NumÉro 58 | HIVER 2015 /16
Globalisation et politique Nord-Sud
Swissaid | Action de Carême | Pain pour le prochain | Helvetas | Caritas | Eper | www.alliancesud.ch
Climat : la tête dans le sable RIE III : vive le paradis fiscal suisse !
RSE : besoin de régulation légale
Myanmar : investisseurs prudents
News TISA : opposition locale croissante ia. L’opposition monte contre le TISA, le traité étendu sur le commerce des services négocié en dehors de l’OMC par 25 membres, dont la Suisse. Le 7 octobre, la ville de Genève s’est déclarée hors TISA – la conseillère administrative Sandrine Salerno a remercié publiquement Alliance Sud pour son expertise. La ville de Zurich a suivi le 28 octobre et, le 13 novembre, c’était au tour du canton de Genève. A chaque fois, les partis de gauche, l’UDC et le MCG ont voté en faveur des résolutions. Alliance Sud avait participé à une table ronde organisée par la ville de Genève ; elle avait été auditionnée par une commission du Grand Conseil genevois et invitée à s’exprimer devant le Parti socialiste de la ville de Zurich. Les autres communes suisses s’étant déclarées hors TISA sont Lausanne, Carouge, Meyrin, Renens, Puplinge, Meinier et Plan-les-Ouates. Alliance Sud a été auditionnée par plusieurs d’entre elles. France : loi rejetée par le Sénat me. Le 18 novembre, la proposition de loi sur le devoir de vigilance des multinationales a été rejetée en première lecture au Sénat par la majorité de droite. Le texte prévoit l’ins-
ODD : la Suisse durable ? es. Après l’adoption fin septembre des Objectifs de l’ONU pour le développement durable ( ODD ), un groupe d’experts travaille à la définition d’indicateurs permettant de contrôler la mise en œuvre des objectifs. La Open Knowledge Foundation Deutschland a déjà accompli un pas de plus et veille sur la transparence des données. A partir d’informations publiques, elle compare sur son site www.2030-watch.de la durabilité de
l ’Allemagne et d’autres pays, dont la Suisse. La base de données est encore lacunaire et l’intégration d’autres indicateurs importants continue. Il en ressort cependant déjà une bonne vue d’ensemble des domaines où un besoin d’agir existe. Par exemple, en Suisse, c’est notamment le cas avec les déchets ménagers par habitant et l’opacité des marchés financiers. Premières cités Fair Trade en Suisse dh. Le conseil communal de Zweisimmen veut que la commune de l’Oberland bernois devienne – après Glaris Nord – la deuxième cité du commerce équitable en Suisse. Fair Trade Town est une campagne internationale qui se déroule avec succès dans une trentaine de pays. Plus de 1600 villes et communes ont reçu le label. Pour l’obtenir, plusieurs critères doivent être remplis. Entre autres, les commerces de détail, hôtels et restaurants doivent proposer des produits du commerce équitable, des institutions et entreprises doivent en utiliser, et le commerce équitable doit être promu dans la population par des activités ciblées d’information et de sensibilisation du public.
Impressum
Alliance Sud en un clin d’œil
GLOBAL + paraît quatre fois par an.
Président Melchior Lengsfeld, directeur d’Helvetas Swiss Intercooperation
Editeur : Alliance Sud, Communauté de travail Swissaid | Action de Carême | Pain pour le prochain | Helvetas | Caritas | Eper E-Mail : globalplus@alliancesud.ch Site Internet : www.alliancesud.ch Médias sociaux : facebook.com/alliancesud, twitter.com/AllianceSud Médias sociaux InfoDoc : facebook.com/AllianceSudDok, twitter.com/dok_alliancesud Rédaction : Michel Egger ( m e ) Tel. + 4 1 21 612 00 98 Iconographie : Nicole Aeby Graphisme : Clerici Partner AG, Zurich Impression : s+z : gutzumdruck, Brig Tirage : 1500 Prix au numéro : Fr. 7.50 Abonnement annuel : Fr. 30.– Abonnement de soutien : min. Fr. 50.– Prix publicité / e ncartage : sur demande Photo de couverture : Consolidation d’un barrage après un cyclone au Bangladesh © E spen Rasmussen/Panos Le prochain numéro paraîtra fin mars 2016.
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tauration pour les grandes entreprises françaises d’une obligation de diligence en matière d’environnement, de droits humains et de corruption dans l’ensemble de leur chaîne d’approvisionnement, y compris à l’étranger. Des grands groupes comme Veolia et Bolloré ainsi que le Forum pour l’investissement socialement responsable, qui regroupe des gestionnaires de fonds et des investisseurs, soutiennent le texte. Les ONG ont déploré l’absence pure et simple de débat et une décision qui « maintient l’impunité des multinationales ». La proposition de loi doit désormais repasser en deuxième lecture devant l’Assemblée nationale, qui l’avait adoptée en première lecture fin mars.
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Direction Mark Herkenrath ( d irecteur ) Kathrin Spichiger, Andrea Rotzetter Monbijoustr. 31, Case postale 6735, 3001 Berne Tél. + 4 1 31 390 93 30 Fax + 4 1 31 390 93 31 E-Mail : mail@alliancesud.ch Politique de développement – C oopération au développement Eva Schmassmann, Tél. + 4 1 31 390 93 40 eva.schmassmann@alliancesud.ch – Politique financière et fiscale Dominik Gross, Tél. + 4 1 31 390 93 35 dominik.gross@alliancesud.ch – Environnement et climat Jürg Staudenmann, Tél. + 4 1 31 390 93 32 juerg.staudenmann@alliancesud.ch – Commerce et investissements Isolda Agazzi, Tél. + 4 1 21 612 00 97 isolda.agazzi@alliancesud.ch
– Multinationales et droits humains Michel Egger, Tél. + 4 1 21 612 00 98 michel.egger@alliancesud.ch – Médias et communication Daniel Hitzig, Tél. + 4 1 31 390 93 34 daniel.hitzig@alliancesud.ch InfoDoc Berne Jris Bertschi / E manuela Tognola / Emanuel Zeiter Tél. + 4 1 31 390 93 37 dokumentation@alliancesud.ch Bureau de Lausanne Michel Egger / I solda Agazzi / K atia Vivas Tél. + 4 1 21 612 00 95 / Fax + 4 1 21 612 00 99 lausanne@alliancesud.ch InfoDoc Lausanne Pierre Flatt / A mélie Vallotton Preisig / Nicolas Bugnon Tél. + 4 1 21 612 00 86, doc@alliancesud.ch Bureau de Lugano Lavinia Sommaruga Tél. + 4 1 91 967 33 66 / Fax + 4 1 91 966 02 46 lugano@alliancesud.ch
Photo : © Daniel Rihs
Solidarité à la carte
Points forts Responsabilité sociale des entreprises Besoin de régulation légale
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Conférence de Paris sur le climat COP21 En finir avec la politique de l’autruche Photo : © A manda Mustard / A P / Keystone
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Le soir du 16 novembre, le Palais fédéral s’était paré des couleurs trico lores. Un signe important de solidarité avec les victimes des attentats terroristes de Paris. Mais aussi un rappel de son approche sélective. Que feraient le Conseil fédéral et le Parlement pour exprimer leur solidarité avec des victimes au-delà de nos voisins européens ? Le Palais fédéral dans les teintes du drapeau du Mali ou du Liban ? Ou même de Tuvalu, où les changements climatiques ont déjà des conséquences dévastatrices ? La conférence de Paris sur le climat est un test pour juger du degré de solidarité de la Suisse avec le monde. Un autre bon indicateur pour mesurer l’attitude de la Suisse envers les populations défavorisées de la planète est le montant de l’aide publique au développement. Depuis quelques semaines, on peut lire sur le site du Département des affaires étrangères ( DFAE ) qu’elle a atteint l’objectif de 0,5 pour cent du revenu national brut ( RNB ) fixé par le Parlement – en 2014, c’était même 0,51 pour cent. Il n’y a toutefois pas de quoi pavoiser. Même le DFAE a préféré garder pour soi ce résultat réjouissant et a renoncé élégamment à un communiqué de presse. Le fait est qu’une part considérable des dépenses suisses de coopération est de l’aide fantôme. En 2014, les dépenses internes pour les requérants d’asile représentaient quelque 17 pour cent du budget de l’aide bilatérale. Dans d’autres pays, elles ne dépassent pas en moyenne 4 à 5 pour cent. Si ces dépenses, dont les pays en développement ne bénéficient en rien, n’étaient pas comptabilisées, l’aide publique suisse au développement se serait élevée en 2014 à 0,44 pour cent du RNB. Le silence du DFAE a encore une autre raison. L’aide au développement est déjà sous pression et va subir une réduction massive dans le budget 2016 ainsi que dans le programme de stabilisation 2017 – 2019. Elle ne devrait plus s’élever qu’à 0,47 pour cent du RNB les prochaines années, coûts pour les requérants d’asile inclus. Cela contredit non seulement la décision du Parlement de 2008 d’augmenter l’aide à 0,5 pour cent, mais aussi l’intérêt à long terme de la Suisse à promouvoir un ordre mondial stable et paisible. Il reste le petit espoir que le nouveau Parlement s’en tienne au 0,5 pour cent et corrige l’inconséquence du Conseil fédéral. La volonté de la Norvège, de la Suède et de la Finlande d’utiliser à l’avenir une part croissante de leur aide au développement à l’aide interne pour les requérants d’asile ne va pas faciliter les choses. En Norvège, cela pourrait même atteindre 21 pour cent. La différence avec la Suisse, c’est que l’aide publique norvégienne au développement dépasse le 1 pour cent du RNB. Même si ces pays nordiques consacraient jusqu’à la moitié de leur aide aux dépenses d’asile, leur coopération au développement – en proportion du RNB – resterait toujours plus élevée que celle de la Suisse dans ses meilleurs jours.
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Mark Herkenrath, directeur d’Alliance Sud
Reportage au Myanmar La grande prudence des investisseurs
Réforme de l’imposition des entreprises III 10 Le paradis fiscal helvétique a de l’avenir Les bons tuyaux de l’InfoDoc 11 Le Myanmar en transition démocratique
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Responsabilité sociale des entreprises
Etre régulé pour mieux s ’autoréguler Michel Egger
Les lobbies économiques trompettent qu’il n’est nul besoin de dispo-
sitions légales pour que les entreprises respectent les droits humains et l’environnement. Plusieurs études scientifiques disent cependant le contraire, en montrant les limites de l’autorégulation.
Comment réguler les multinationales, dont l’impact socio-environnemental n’a cessé de croître avec les chaînes de production mondiales ? La question a gagné en importance ces dernières années, en particulier avec les Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits humains. Elle s’est aussi invitée à l’agenda politique suisse, grâce notamment à la campagne « Droit sans frontières » et à l’initiative fédérale pour des multinationales responsables, dont la récolte de signatures bat son plein. Cette situation a conduit Economiesuisse et SwissHoldings à sortir en juin un « point de vue » de 36 pages sur la responsabilité sociale des entreprises ( RSE ). Elles définissent cette dernière comme « la prise en compte de préoccupations sociales et environnementales par les entreprises dans leurs opérations
Photo : © Robin Hammond / Panos
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commerciales, dans l’esprit d’une gestion durable ». Elles précisent cependant qu’il s’agit d’un « engagement volontaire » que « l’Etat soutient par divers instruments ». Elles sont, en ce sens, globalement en phase avec la position de la Confédération sur la RSE, publiée début avril. Sous la loupe des études scientifiques La RSE est la réponse du secteur privé aux critiques de la société civile et aux demandes de régulation qu’il a contrecarrées aux plans national et international. Depuis le lancement en 2000 du Pacte mondial des Nations unies, on ne compte plus les initiatives de RSE initiées par les gouvernements et les entreprises – parfois en collaboration avec la société civile. La Suisse s’est d’ailleurs beaucoup engagée dans ce domaine.
L’une des forêts tropicales les plus riches de la planète en biodiversité va être sacrifiée pour l’extraction de nickel à Ambatovy ( Madagascar ). Fidelise, quatre ans, porte le plant d’un projet de reboisement.
Le problème, c’est que, tout bien intentionnées et utiles soient-elles, ces démarches d’autorégulation ne suffisent pas à garantir le respect des droits humains et de l’environnement par les entreprises. Pour preuve, les nombreux cas de violations documentés par les organisations de la société civile ainsi que plusieurs publications scientifiques récentes. Mené par 17 universités, centres de recherche et écoles de business dans l’Union européenne ( UE ), l’IMPACT Project a analysé les politiques de RSE de plus de 5000 entreprises.1 Elle montre qu’entre 2000 et 2010, leurs approches n’ont conduit qu’à des progrès marginaux en matière de qualité de l’emploi et de l’environnement, et n’ont pas permis de réaliser les objectifs de l’UE. De son côté, Richard Locke, professeur au Massachusetts Institute of Technology, a effectué pendant près de dix ans une recherche fondée sur des analyses d’audits, des enquêtes de terrain et de multiples interviews avec des représentants de firmes, notamment dans le secteur électronique.2 Il révèle que la situation dans les usines – conditions de travail, heures supplémentaires, sécurité et santé – a empiré et que les audits n’ont pas conduit à un processus d’apprentissage. Les conclusions de ces études rejoignent celle de la Royal Society for Protection of Birds ( GB ), qui vient de paraître.3 A partir de l’évaluation de 161 initiatives volontaires dans le domaine de l’environnement, ses experts estiment que quatre fois sur cinq, elles ont échoué à apporter la protection recherchée. Par conséquent, les actions volontaires ne sauraient être « un substitut effectif à des mesures régulatrices pour atteindre des objectifs de politique publique ». Insuffisances multiples Les raisons des insuffisances de la RSE sont multiples. Elles tiennent d’abord à sa nature volontaire. Les initiatives proposent des standards et des bonnes pratiques, mais elles ne sont pas contraignantes. Certaines entreprises s’y engagent de manière sérieuse, d’autres avant tout pour des raisons de relations publiques, d’autres encore les ignorent. Selon le Centre de ressources sur les entreprises et droits humains, seules 340 entreprises se seraient dotées d’une politique en matière de droits humains. Un chiffre dérisoire en comparaison des 80 000 multinationales répertoriées en 2011 par John Ruggie. Le vrai problème est précisément les entreprises « filous » qui n’assument pas leur responsabilité et en tirent un avantage comparatif, au risque de commettre de graves violations.
La situation dans les usines – conditions de travail, sécurité et santé – a empiré. Les audits n’ont pas conduit à un processus d’apprentissage. D’autres limites de la RSE relèvent du contenu – fréquemment incomplet – des codes de conduite, avec notamment des carences en matière de droits humains, d’intégration des besoins des communautés locales et de transparence. Ainsi que le constate IMPACT, les études d’impact, quand elles existent, ne regardent que les risques pour l’entreprise et non ceux pour
les êtres humains et l’environnement. De plus, il manque souvent des mécanismes de vérification indépendante ainsi que des systèmes de plainte accessibles et protégés. Il n’y a en général pas non plus de sanction en cas de non-respect des standards. Enfin, la RSE se heurte à des facteurs structurels liés au fonctionnement des chaînes globales de production. C’est ce que Locke a bien mis en évidence. D’un côté, pour soigner leur image, les entreprises prennent des mesures de RSE. De l’autre, sous couvert de compétitivité et d’exigences de leurs clients et actionnaires, elles continuent à faire pression sur leurs fournisseurs pour obtenir des produits toujours plus différenciés dans les délais les plus courts et au prix le plus bas. D’où un manque de cohérence dont les travailleurs et la nature paient ultimement le prix. Même au sein des entreprises progressistes, la RSE finit par buter sur la logique de profit. On est donc loin de la vision idéalisée des lobbies économiques suisses, pour qui la RSE est un processus fondamentalement gagnant-gagnant, c’est-à-dire bon pour tout le monde à partir du moment où cela répond aux intérêts du business. Avec la collaboration de Chantal Peyer
1 www.csr-impact.eu 2 Richard M. Locke, The Promise and Limits of Private Power, Cambridge University Press, 2013 3 Using regulation as a last resort ? Assessing the performance of voluntary approaches, 2015
« Smart mix » requis me. Pour remédier aux insuffisances de la RSE, les Principes directeurs de l’ONU recommandent un « assortiment judicieux » ( smart mix ) de mesures volontaires et contraignantes. Son maître d’œuvre John Ruggie déclare : « L’autodiscipline peut accomplir certaines choses. D’autres ne peuvent progresser que par coercition. La surveillance des chaînes de valeur depuis 1990 démontre que la performance sur le terrain est encore insuffisante. Il faut à mon sens combiner les deux approches » ( Agefi, 23 janvier 2015 ). Dans la mesure où les Etats-hôtes – pour des raisons de faible gouvernance, corruption et dépendance aux investissements étrangers – n’ont souvent pas la capacité ou la volonté d’encadrer les multinationales, les Etats d’origine ont la responsabilité de veiller à ce que leurs multinationales ne commettent pas de violations. La concrétisation d’un « smart mix » consistant est préci sément le but de l’initiative pour des multinationales responsables, qui demande une obligation légale de diligence raisonnable des entreprises en matière de droits humains et d’environnement. C’est aussi à cette recommandation qu’arrivent Locke, l’étude de la Royal Bird Society et surtout IMPACT. Cette dernière montre que les politiques qui ont le plus d’effet sur les entreprises sont les législations – nationales et de l’Union européenne. Contrairement à ce qu’affirment Economiesuisse et Swissholdings, l’adoption de normes contraignantes ne conduit pas les firmes à se désengager d’initiatives allant au-delà de ce qui est obligatoire.
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Photo : © Markus Bühler-Rasom
Au Nord-Ouest du Groenland, les Inuits chassent sur une banquise toujours plus fine. Le réchauffement climatique a fragilisé les bases de leur vie.
Conférence de Paris sur le climat COP 2 1
En finir avec la politique de l’autruche Jürg Staudenmann
Les mesures de protection du climat
et d’adaptation vont coûter des centaines de milliards de dollars aux pays en développement. Qui exigent un plan de financement concret. Les pays industrialisés leur reprochent d’être opportunistes. De quel droit ? Il y a six ans, les pays riches ont promis de mettre à disposition, dès 2020, 100 milliards de dollars par an pour des mesures de protection du climat et d’adaptation dans les pays en développement. Ils ont cependant jusqu’ici refusé un calendrier contraignant. Et les versements au Fonds vert pour le climat établi à cette fin restent loin du compte : début octobre, les ministres des pays industrialisés ont parlé de 77 milliards pour cinq ans. Pire encore, plutôt que de négocier les mécanismes qui permettraient de mobiliser des fonds supplémentaires selon le principe du pollueur-payeur, les milieux de l’OCDE se concentrent sur les nouvelles méthodes de comptabilisation des fonds privés. Ainsi, les USA et la Suisse ont présenté une « méthodologie
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transparente » selon laquelle plus de 60 milliards de dollars seraient déjà payés chaque année. De fait, la grande partie de cette somme virtuelle se compose d’investissements privés existants, de crédits remboursables et même de garanties contre les risques à l’exportation. Dans tous les cas, rien qui profiterait aux populations les plus pauvres qui souffrent le plus des changements climatiques. La communauté internationale ne pourra faire face aux changements climatiques qu’à travers des milliards d’investissement au plan mondial pour une conversion des technologies et un développement pauvre en carbone. Cela nécessitera deux choses. D’une part, au Nord comme au Sud, de nouveaux instruments étatiques, fiscaux et de marché, en particulier pour réorienter les moyens privés vers des projets énergétiques et d’infrastructure correspondants. D’autre part, un soutien financier et technologique accru des pays industrialisés aux pays en développement, ne serait-ce que parce que les premiers ont délocalisé dans les seconds la production riche en carbone des biens qu’ils consomment. Responsabilité différenciée à assumer A tout cela s’ajoute la mise en place des mesures d’adaptation dont les populations du Sud ont urgemment besoin pour répondre aux conséquences négatives croissantes des change-
ments climatiques. Une récente étude de la Banque mondiale prévoit que le réchauffement de l’atmosphère pourrait augmenter de 100 millions le nombre de pauvres en 15 ans, avant tout en Afrique subsaharienne et en Asie. Or, contrairement aux nouveaux projets énergétiques par exemple, il n’y a pas ici de retour sur investissement. Quelle entreprise s’engagerait en Suisse dans la prévention des avalanches et des inondations ? Il est clair que cela doit être financé par la main publique. L’ONU estime les coûts moyens dans les pays en développement entre 100 et 150 milliards de dollars par an. Les pays du Nord ont acheté leur formidable bien-être en produisant les deux tiers des gaz à effet de serre que la Terre peut supporter. Selon la convention de l’ONU sur le climat, nous devons assumer cette responsabilité et les coûts qui en résultent. Il ne s’agit pas seulement d’une question morale, mais d’éviter une aggravation de la précarité dans les pays en développement.
En conclusion, trois choses sont claires. D’abord, de nouveaux moyens sont nécessaires, en plus de l’aide au développement qui ne doit plus servir, comme cela a été le cas jusqu’ici dans les pays de l’OCDE, de vache à lait pour le financement du climat. La protection du climat et la lutte contre la pauvreté sont complémentaires et toutes deux nécessaires. Les jouer l’une contre l’autre ne fera au mieux que déplacer les problèmes. Ensuite, il est hypocrite de taxer d’opportunistes et égoïstes les demandes de soutien des pays en développement. Au contraire, sous pression des pays industrialisés, la plupart d’entre eux ont présenté leurs propres plans de réduction des émissions de CO2, ce qui est aussi dans l’intérêt des pays du Nord. Enfin, la Suisse doit repenser d’urgence sa position actuelle ( voir encadré ), ne serait-ce que pour être cohérente avec son engagement dans le lancement de l’initiative Nansen pour les réfugiés du climat. Sa crédibilité en tant que partenaire de négociation est en jeu.
Exigences envers la politique climatique de la Suisse js. Pays parmi les plus riches de la planète – avec une grosse empreinte écologique – la Suisse doit assumer sa responsabilité dans la politique climatique. Aux plans national et international. Cela concerne la réduction des émissions de gaz à effet de serre – domestiques et « grises » – ainsi que le soutien des pays les plus pauvres dans leur lutte contre le changement climatique. 1. Améliorer ses propres objectifs climatiques : afin de respecter le plafond de 2°C de réchauffement inscrit dans la loi sur le CO2, la Suisse doit jusqu’en 2050 renoncer totalement aux énergies fossiles. Les émissions domestiques doivent diminuer de 60 pour cent jusqu’en 2030, et pas seulement de 30 pour cent comme le Conseil fédéral l’a annoncé. 2. Reconnaître sa responsabilité et garantir des contributions appropriées : la Suisse doit participer de manière suffisante et ciblée au financement des mesures de protection du climat et d’adaptation dans les pays en développement. Cela, aussi parce qu’elle y a délocalisé sa production riche en carbone ces dernières décennies. Sur la base de son empreinte internationale en CO2 et de sa puissance économique, la contribution juste avoisine 1 pour cent. En 2016, cela représentera 500 à 600 millions de francs et environ un milliard dès 2020. 3. Renoncer à la compensation : les réductions d’émissions réalisées à l’étranger ne doivent pas servir de prétexte à en faire moins au plan domestique. La
énergétique discuté actuellement Suisse doit sortir de la volonté obsespar les Chambres fédérales. Le sionnelle de comptabiliser les résultats potentiel est de plusieurs centaines obtenus à l’extérieur dans ses objectifs de millions de francs. nationaux. Cela aussi pour ne pas s’isoune taxe sur les trans – Introduire ler de plus en plus sur la scène internafinancières, comme actions tionale. dans les autres pays de l’Union européenne. 4. Mobiliser des fonds nouveaux et additionnels sur le principe du pollueurpayeur plutôt que par les impôts : au 5. Décarboniser la place financière : selieu de puiser dans le crédit-cadre de lon une nouvelle étude de l’Office fédéla coopération au développement, la ral de l’environnement ( OFEV )1, la place Suisse doit étudier de nouveaux méca- financière suisse investit dans des nismes de financement permettant sources et techniques d’énergie fossile d’avoir un effet de levier. Les pistes sont à l’étranger, qui génèrent quelque 52 faisables et prometteuses : millions de tonnes de CO2 par an. Cela – Utiliser les revenus du commerce correspond aux émissions domestiques national de certificats d’émission de la Suisse. En cas d’éclatement de la de CO2 : un supplément de 25 francs bulle de carbone, le risque de perte de par tonne, par exemple, générevaleur de ces placements est estimé rait déjà aujourd’hui au moins entre 0,5 et 1,1 pour cent du produit in125 millions. térieur brut. Pour cette raison et afin de – Introduire une taxe sur les billets protéger le climat, notre pays doit pousd’avion internationaux : 20 francs ser les instituts financiers dont elle par passager rapporterait plus de abrite le siège à se retirer des place400 millions de francs par an. ments dans des projets qui stimulent les – Prévoir l’affectation d’une partie des changements climatiques. recettes provenant du système incitatif en matière climatique et 1 http://bit.ly/1Xl87C5
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Reportage au pays des pagodes
Myanmar : la grande prudence des investisseurs Isolda Agazzi ( de retour du Myanmar )
L’ouverture économique dans un contexte fragile
conduit une partie des entreprises étrangères à prendre les mesures nécessaires pour ne pas violer les droits humains. C’est notamment le cas au Myanmar. Les entreprises suisses semblent y prêter attention.
Photo : © I solda Agazzi / A lliance Sud
La charrue tirée par le buffle avance péniblement sur le chemin boueux. En ce mois de novembre, après une saison des pluies qui a joué les prolongations, les champs du Myanmar – l’ancienne Birmanie – se sont parés des couleurs les plus chatoyantes. L’ocre vif de la terre alterne avec le jaune du sésame et tous les dégradés de vert des champs de choux, riz, soja et arbres fruitiers. La terre est très fertile dans le Shan, le principal grenier du pays. Des femmes sont courbées dans les rizières, la faux à la main. Les campagnes semblent figées dans le temps : pas d’eau courante, ni d’électricité dans les rues des villages. Depuis deux ans, cependant, les maisons sont éclairées par les panneaux solaires installés par le gouvernement. Quelques paraboles sont apparues sur les toits et la diffusion des téléphones portables est passée de 7 à 33 pour cent en deux ans. « La récolte a été bonne cette année », se réjouit Daw Khin Aye Thet, à la tête d’un groupement d’épargne et de crédit de
La capitale du Myanmar est en pleine effervescence. Les lieux traditionnels – ici un marché matinal de quartier au milieu de maisons délabrées – contrastent avec les immeubles flambant neufs des investisseurs étrangers.
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femmes. « Nous cultivons assez pour notre consommation, mais il est très difficile de transformer les produits sur place car nous manquons de savoir-faire et d’accès au marché. » Les tentatives pour ajouter un peu de valeur aux produits se heurtent aux intermédiaires qui dominent la chaîne de valeur locale. « Il faudrait que des investisseurs étrangers introduisent des cultures nouvelles et qu’ils nous aident à les exporter », renchérit une autre femme, le petit doigt encore couvert d’encre noire, preuve presque indélébile de sa participation aux élections du 8 novembre. Après la victoire écrasante de la Ligue nationale pour la démocratie d’Aung San Suu Kyi, le pays rêve de changement et d’ouverture. Mais quand on lui demande de préciser son souhait, la paysanne avoue qu’elle ne sait pas trop... Villes et campagnes : deux mondes à part Dans son bureau flambant neuf, avec vue sur la pagode Sulé, Nestlé n’a pas attendu le lointain appel de la paysanne du Shan. Au cœur du vieux Yangon, où les bâtiments coloniaux décrépits côtoient les centres commerciaux rutilants, le contraste avec la campagne est saisissant : la capitale économique du Myanmar grouille comme une fourmilière et le changement se fait au pas de course. « Le pays produit 3000 tonnes de Robusta par an. Nous étudions la possibilité d’en développer la culture pour pouvoir en acheter plus aux paysans et de meilleure qualité, nous explique David Pettinari, directeur exécutif de Nestlé Myanmar. A terme, nous aimerions aussi nous impliquer davantage dans le secteur laitier pour produire du lait localement. » Pendant des décennies, la terre a été confisquée par les militaires. Aujourd’hui, elle est convoitée par les investisseurs. Mais les paysans expropriés osent maintenant exiger une compensation – plusieurs activistes ont d’ailleurs été emprisonnés. « Le gouvernement n’a pas la capacité de réguler les investissements, nous explique Daniel Aguirre, de la Commission internationale des juristes. Beaucoup de lois ont été adoptées ces dernières années, mais leur mise en œuvre est difficile. Il n’y a pas de standards environnementaux, par exemple. La terre est l’une des questions les plus sensibles et pour éviter les pro blèmes, les entreprises occidentales font énormément d’efforts de diligence ». Elles semblent éviter soigneusement les zones économiques spéciales – où la question foncière n’est pas ré-
Nestlé : étude d’impact par une organisation indépendante Les multinationales suisses – ABB, Schindler et autre Roche – affirment prendre les mesures nécessaires pour ne pas violer les droits humains. Une affirmation qui reste bien sûr difficile à vérifier. Le Danish Institute for Human Rights a réalisé une étude d’impact sur les droits humains à la demande de Nestlé. « Nous avons fait examiner notre portefeuille d’activités, y compris toute notre chaîne de production, des paysans aux fournisseurs, en passant par les distributeurs et les sous-traitants, explique David Pettinari. Nous n’avons pas constaté de violation des droits humains, mais nos opérations sont encore très limitées et nous devons continuer à veiller à ce que, dans toutes nos activités et relations d’affaires, il n’y ait pas d’atteintes. Nous devons nous assurer que, sur les terres où nous établissons des fermes de démonstration ou des usines il n’y ait pas de graves conflits fonciers, ni de travail des enfants dans notre chaîne de production. » Les droits du travail restent un sujet sensible. Si la loi interdit d’employer toute personne de moins de 18 ans, on ne compte pas les enfants qui travaillent dans les restaurants de rue et les cafés. Mais la situation s’améliore. « Le travail forcé a fortement diminué grâce à un vaste projet de l’Organisation internationale du travail ( OIT ) », se réjouit Bobbie Sta Maria, représentante du Business and Human Rights Resource Center à Yangon. « Avec le boom du secteur manufacturier va se poser le problème des heures supplémentaires non payées et du salaire de subsistance. Le gouvernement a introduit un revenu minimum de 3600 kyat ( moins de 3 euros ) par jour ouvrable, mais beaucoup d’entreprises ont diminué d’autres prestations, et des grèves ont éclaté récemment un peu partout. » Le Centre a envoyé un questionnaire à 120 entreprises étrangères – aucune suisse pour l’instant – sur leur politique en matière de droits humains. Seule la moitié a répondu, de façon plus ou moins satisfaisante. « Il est plus difficile d’obtenir des réponses des entreprises asiatiques, relève Bobbie Sta Maria. Mais parfois c’est juste une question de temps et elles finissent par envoyer des réponses exhaustives. » Parallèlement, soutenu notamment par la Suisse, le Myanmar Centre for Responsible Business a mené le même genre de projet avec les entreprises birmanes. Si une dizaine font preuve de transparence, les autres ne sont pas encore habituées à l’exercice et sont très peu coopératives. Pas à n’importe quelle condition Dans beaucoup de domaines, on sent une véritable envie de faire avancer les choses. Ainsi, les investissements étrangers. « Le nouveau projet de loi ne prévoit pas le recours automatique au mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etat ( ISDS ), ajoute Daniel Aguirre. Le gouvernement veut se réserver le droit de réguler dans l’intérêt public. En cas de conflit, les investisseurs devront passer par les tribunaux internes. Il est vrai qu’ils ne fonctionnent pas bien, mais leur amélioration va profiter à toute la population. » Après les élections, les investisseurs vont continuer à affluer au Myanmar. Mais probablement pas à n’importe quelle condition. « Aujourd’hui une entreprise ne peut plus négliger sa responsabilité sociale comme il y a vingt ans », conclut Da-
Photo : © I solda Agazzi / A lliance Sud
glée – ainsi que les zones de conflit, qui regorgent de pierres précieuses et de ressources naturelles.
Dans la région très fertile du Shan, principal grenier du pays, la question se pose de comment ajouter de la valeur à la production locale.
niel Aguirre. Il reste cependant des défis intrinsèques qui ne seront pas réglés avant longtemps : les militaires vont continuer à avoir la main sur les postes clés et certains secteurs, comme les pierres précieuses et les ressources naturelles, restent totalement opaques.
La Suisse, 26e investisseur ia. 895 entreprises étrangères investissent actuellement au Myanmar, pour un montant de 54 236 millions de dollars US. La Chine caracole en tête avec 14 754 mio et 154 entreprises. La Suisse est au 26e rang des investissements étrangers – trois entreprises totalisent 30,4 mio. Les PME suisses continuent à venir en mission d’exploration, mais moins qu’en 2012 et 2013, et elles hésitent à investir. La Suisse n’a pas d’accord de protection des investissements avec le Myanmar. L’Union européenne est en train d’en négocier un.
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RIE III : Baisse prévisible de 1,3 milliard de francs de recettes
Le paradis fiscal helvétique a de l’avenir Dominik Gross
Le Parlement discute actuellement
Justice Network, estime entre 21 et 32 billions ( mille milliards ) de dollars les fortunes ( dé )placées actuellement dans les paradis fiscaux, où elles ne sont pas ou que faiblement imposées. Les personnes riches des pays du Sud y contribuent de manière significative. Ces transferts de fonds entravent au Sud l’amélioration structurelle de l’Etat de droit et freinent les investissements publics dans l’éducation, la santé et les infrastructures.
de la réforme de l’imposition des entreprises III. Les privilèges des holdings devraient être remplacés par des patent boxes. Avec cette manœuvre, en termes de politique de développement, la Suisse passe de Charybde en Scylla. Pour chaque dollar US gagné, les pays en développement en perdent plus du double ( voir graphique ). Plusieurs formes de transfert de capitaux contribuent à l’hémorragie des ressources financières des pays du Sud. Selon le réseau européen d’ONG Eurodad, ces derniers ont perdu en 2012 quelque 1583 milliards de dollars. C’est dix fois plus que les 120 milliards de dollars reçus la même année au titre de l’aide publique et privée au développement ! Selon les analyses de la Banque mondiale, les pays les plus pauvres sont les plus grands perdants de ces transferts de capitaux. Les statistiques d’Eurodad ne comprennent pas les pertes de recettes des pays en développement liées aux pratiques de soustraction et d’évasion fiscale des multinationales. Le dernier Financial Secrecy Index ( FSI )1 du réseau d’experts fiscaux Tax
1 DOLLAR
POUR QUE LES PAYS EN DÉVELOPPEMENT
REÇOIVENT
La Suisse, reine des paradis fiscaux En octobre, la Suisse occupait une fois de plus la 1ère place au classement mondial des places financières les plus opaques établi par le FSI. Avec la suppression des privilèges pour les hol dings prévue par la réforme de l’imposition des entreprises III ( RIE III ) et l’introduction de l’échange automatique d’information avec les pays ( riches ) de l’OCDE dès 2018, le Conseil fédéral et le Parlement ont réagi à la pression étrangère sur le paradis fiscal helvétique. L’OCDE est depuis 2012 à la pointe de la lutte multilatérale contre les pratiques fiscales nuisibles. Début octobre, elle a présenté les résultats de son projet baptisé BEPS ( érosion de la base imposable et transfert de bénéfices ) qui devrait obliger les entreprises à payer des impôts là où elles réalisent leurs bénéfices. Ce nouveau système ne tolérera plus les privilèges pour holdings. Un changement particulièrement important pour les économies des cantons de Genève, Vaud et Bâle-Ville. Afin d’atténuer les soucis économiques des cantons concernés, le Conseil fédéral propose – dans le cadre de la RIE III – l’in-
Autres flux financiers officiels
Aide (ONG, fondations, privés)
Revenus de titres
Aide (publique, APD)
Transferts d’argent des émigrés
Investissements directs étrangers
Intérêts sur les dettes étrangères
14 Cents
Transferts de gains des investisseurs étrangers
42 Cents
Crédits aux pays industrialisés
59 Cents
Flux financiers illicites
93 Cents
3 Cents 3 Cents
6 Cents 10 Cents 34 Cents 44 Cents
ILS
PERDENT PLUS DE
2
DOLLARS
© Eurodad – European Network on Debt and Development / Rich Weber für Alliance Sud
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d
Les bons tuyaux de l’InfoDoc Le Myanmar en transition démocratique Les récentes élections du 8 novembre au Myanmar et la victoire de la Ligue natio nale pour la démocratie ( NLD ) d’Aung San Suu Kyi semblent donner un espoir pour l’entrée du pays dans la démocratie. La route a été longue pour en arriver là. En 1962, un coup d’état militaire a fait main basse sur le pays. La résistance, surtout des étudiants, a tout de suite été matée par la force, mais jamais éliminée jusqu’au jour des « quatre huit » : le 8.8.1988, un vaste soulèvement du pays a été réprimé dans le sang par la junte militaire. En 1989, Aung San Suu Kyi est placée en résidence sur veillée. Elle y restera, par intermittence, du rant plus de vingt ans jusqu’en 2010. En 1990, l’armée organise des élections qui seront remportées par le NLD. Elle ne lâche finalement pas sa férule et réprime à nouveau les opposants. Plusieurs épisodes de soulèvement – sans réel succès – vont suivre, notamment en 1996, en 2004 avec la libération des leaders du mouvement des « quatre huit » et en 2007, où des moines dé filent par milliers et rassemblent plus de 200 000 personnes dans les rues. En 2008,
une nouvelle clause, visant directement Aung San Suu Kyi, est introduite dans la Constitution, empêchant un parent d’en fants étrangers d’exercer la fonction de pré sident. En 2010, une nouvelle élection est or ganisée, mais sans la participation de la cheffe du NLD, emprisonnée. En 2011, la junte militaire s’auto-dissout et entame une transition vers la démocratie – entre autres sous la pression de l’embargo écono mique international – mais sans change ment gouvernemental. C’est finalement en 2015, pour la première fois depuis plus de 50 ans, que des élections libres se déroulent dans le pays. La victoire du NLD permet l’es poir, mais la Constitution garantit toujours 25 pour cent des sièges du parlement à l’armée. A côté de cela, les minorités musul manes ( les Rohingyas ) sont toujours persé cutées et le NLD ne s’exprime pas sur cette problématique. Les tuyaux – « Birmanie : dynamiques du mouve ment démocratique », Alternatives Sud – État des résistances dans le Sud,
troduction d’une patent box pour la recherche, le développement et l’innovation ( R&D&I ) dans le domaine des biens immatériels : les gains provenant de brevets et d’autres droits devraient bénéficier de privilèges fiscaux. Les patent boxes nuisent cependant autant au Nord qu’au Sud, parce que les sociétés transnationales peuvent continuer à transférer leurs paiements et leurs profits via les paradis fiscaux. En termes de politique de développement, la Suisse ne fait que remplacer un régime fiscal nocif par un autre. Bière amère Décrypté par l’ONG britannique ActionAid en 2010, un bon exemple des effets pervers des patent boxes concerne l’entreprise SABMiller qui contrôlait alors 30 pour cent du marché ghanéen de la bière. Tout était bon pour réduire les bénéfices, soumis au Ghana à un impôt de 25 pour cent. D’un côté, la multinationale facturait à sa filiale ghanéenne des droits de licence record pour ses variétés de bière africaine, lesquelles avaient été placées dans une patent box aux Pays-Bas où elles jouissaient d’importants allègements fiscaux. De l’autre, la filiale ghanéenne payait 1,5 million de francs par an ( 4 ,6 pour cent de son chiffre d’affaires ) pour des conseils financiers fournis par une autre filiale du groupe domiciliée à Zoug, où les impôts sur les services sont très bas. Une box aussi large que celle des Pays-Bas pour les droits de brevet et de licence existe déjà depuis 2011 dans le canton de Nidwald. On y octroie des allègements fiscaux sur les brevets, les marques, les logiciels ou encore les noms de domaine.
vol. XIV 2007/4. https://frama.link/2N6kXCgj – Bruno Philip, « Les inconnues de la nouvelle Birmanie ‹ démocratique › », Le Monde, 13.11.2015. https://frama.link/SZSK0BPI – Déjunter la Birmanie, site suivant l’actualité par des reprises d’articles de presse. http://www.dejunterlabirmanie.fr – Luc Besson, The Lady, 2011, 132 min., disponible à Alliance Sud InfoDoc. – Célestine Foucher, « Pour les Rohingyas de Birmanie : partir ou mourir », Libération, 28.8.2014. https://frama.link/Tx0ee_w3 – Birmanie : le nouvel eldorado ?, Alliance Sud InfoDoc, 14.11.2013. https://frama.link/D4IWdfvg Pour plus d’informations : Alliance Sud InfoDoc Avenue de Cour 1, 1007 Lausanne doc@alliancesud.ch ou 021 612 00 86 www.alliancesud.ch / documentation
Nidwald entend cependant renoncer à offrir cette box dès 2016, car elle est incompatible avec ladite approche Nexus de l’OCDE, qui a été adoptée dans le cadre du processus BEPS. Cette approche stipule comme condition que les activités de recherche et de développement doivent avoir lieu dans le pays qui octroie les allègements fiscaux. Elle laisse cependant une certaine marge de manœuvre pour la configuration concrète de la box. Le projet de loi discuté à la session d’hiver par le Conseil des Etats ne dit pas comment l’approche Nexus sera interprétée dans la patent box suisse 2016. Le Conseil fédéral va en préciser les modalités d’application dans le cadre d’une procédure de consultation. La solution pour une patent box proposée en 2013 par l’administration fédéral des contributions, n’exige pas que les activités R&D&I favorisées aient effectivement lieu en Suisse. D’où le risque de nouvelles lacunes rendant possibles les transferts de profit des pays en développement vers la Suisse. Pour l’éviter, on ne devrait autoriser des allègements fiscaux que sur des revenus de brevets liés à des activités de recherche et de développement effectuées en Suisse. La dernière réforme des entreprises a coûté plusieurs dizaines de milliards de francs aux contribuables. Les calculs les plus optimistes parlent d’au moins 1,3 milliard pour la RIE III. Aucune compensation cependant n’est prévue pour les pertes de recettes fiscales qui en découleront. Le risque n’est pas exclu que la coopération au développement en fasse à nouveau les frais dans le prochain exercice d’économies du budget fédéral. 1 www.financialsecrecyindex.com
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Photo : © Pascal Mora
Regards suisses sur le Sud. Au Nord de la Jordanie, à six kilomètres de la frontière avec la Syrie, se trouve le camp de Zaatari dirigé par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ( U NCHR ). Peuplé de 80 000 habitants, Zaatari est l’un des plus gros camps de réfugiés du monde et est devenu entre-temps la quatrième ville de la Jordanie. La rue principale avec les magasins et stands du marché a été baptisée ironiquement Champs-Elysées par les réfugiés. La boutique sur l’image s’occupe de transferts d’argent aux quatre coins du monde, selon le principe du système informel Hawala.
Pascal Mora, né en 1983, a grandi à Neuenhof ( AG ). Autodidacte, il travaille depuis 2006 comme photographe indépendant et vit à Zurich. www.moraphoto.ch
Le site de l’UNCHR sur Zaatari : http://bit.ly/1kLiGeW
Faits et chiffres Soustraction fiscale mondiale Source : Documentaire « L e Prix à payer » d’Harold Crooks Video on demand ( OV anglais )
21 à 32 billions
75 pour cent
200 mrd USD
USD de fortune dans le monde sont placés offshore ou dans des paradis fiscaux.
de tous les bénéfices de multinationales sont transférés en Suisse, à Singapour, aux Bermudes et aux îles Caïman pour y être « imposés ».
sont perdus chaque année par les pays en dévelop pement, via des transferts de gain des multinationales, au profit des paradis fiscaux.
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