Apartheid

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LUTTE ANTI-APARTHEID (1913-1991)



L’apartheid (mot afrikaans partiellement dérivé du français, signifiant « séparation, mise à part ») était une politique dite de « développement séparé » affectant des populations selon des critères raciaux ou ethniques dans differentes zones géographiques déterminées. Il fut conceptualisé et mis en place à partir de 1948 en Afrique du Sud (Union d’Afrique du Sud, puis République d’Afrique du Sud) par le Parti national, et aboli le 30 juin 1991. La politique d’apartheid se voulait l’aboutissement institutionnel d’une politique et d’une pratique jusque là empirique de ségrégation raciale (Pass-laws, baasskap et colour bar), élaborée en Afrique du Sud depuis la fondation par la Compagnie néerlandaise des Indes orientales de la colonie du Cap en 1652. Avec l’apartheid, le rattachement territorial (puis la nationalité) et le statut social dépendaient du statut racial de chaque individu hierarchisant ainsi la société. La politique d’apartheid fut le « résultat de l’anxiété historique des Afrikaners obsédés par leur peur d’être engloutis par la masse des peuples noirs environnants ». Les lois rigides qui en résultèrent, « dictées par une minorité blanche dynamique obsédée par sa survie » en tant que nation distincte, furent ainsi le résultat d’une confrontation, sur une même aire géographique, d’une société sur-développée, intégrée au premier monde avec une société de subsistance, encore dans le tiers monde, manifestant le refus de l’intégration des premiers avec les seconds.

« L’éducation est l’arme la plus puissante qu’on puisse utiliser pour changer le monde. » Nelson Mandela

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LE PEUPLEMENT DE L’AFRIQUE DU SUD Les premiers habitants attestés du territoire actuel de l’Afrique du Sud sont les chasseurs-cueilleurs khoisans (Bochimans et Hottentots). C’est au XVIe siècle qu’apparaissent les Bantous, qui se fixent plus au sud.

De la guerre des Boers à l’Union sud-africaine (1899-1910) Peu après, la révocation de l’édit de Nantes par Louis XIV (1685) provoque une émigration massive de huguenots français vers l’Afrique du Sud. Leur arrivée coïncide avec le début de l’esclavage des Noirs ; les Européens gagnent ensuite l’intérieur du pays. Les pionniers hollandais (les Boers, d’un mot néerlandais qui signifie « paysans ») s’implantent ainsi dans l’Est, où ils affrontent les Bantous. Ils sont arrivés en Afrique du Sud soit par volonté de devenir riche avec les exploitation et la recherche d’or soit par volonté de convertir des peuples dis indigènes. Au cours du XIXe siècle, les Boers se heurtent aux Britanniques, à qui le congrès de Vienne (1814) a attribué Le Cap. Les Boers leur reprochent une politique jugée trop favorable aux Noirs, notamment à la suite de l’abolition de l’esclavage par la Grande-Bretagne en 1833. Afin de préserver leur mode de vie, les fermiers hollandais amorcent à partir de 1834 un mouvement migratoire vers l’intérieur du pays, le Grand Trek. Ils chargent cet exode d’une forte signification biblique, affirmant être les nouveaux Hébreux, le peuple élu en route pour la Terre promise. Ce sentiment d’élection divine marque durablement la population huguenote franco-hollandaise et détermine pour une bonne part l’évolution historique ultérieure de cette partie du monde. À la suite du Grand Trek, les Boers fondent le Transvaal (1852) et l’État libre d’Orange (1854). La fin du XIXe siècle est marquée par la découverte dans les républiques boers de gisements d’or et de diamants qui attirent des immigrants

britanniques vers l’intérieur du même pays. De nombreux conflits éclatent au sujet de la propriété du sol. La guerre des Boers qui s’ensuit éclate en 1899 et, suite à la victoire britannique, s’achève avec les confirmations officielles en 1902 de la souveraineté britannique sur l’Union sud-africaine. Ainsi l’ensemble du territoire devient à partir de 1910 un dominion de l’Empire colonial britan- nique, l’Union sud-africaine, où se juxtaposent le système libéral anglais dans les anciennes colonies britanniques et les fortes traditions religieuses des premiers immigrants calvinistes, hollandais et français, qui se nomment eux-mêmes les « Afrikaners » (« Africains , en ancien hollandais), dans les deux républiques afrikaners vaincues en 1902.

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1-5. Hommes britanniques venus conquérir l’Afrique du Sud. 2. Premier signe de l’Appartheid : une entrée séparée pour les blancs et les noirs. 3-4. Premières installations britanniques. Il s’agit principalement de rail et de dock et d’entrepôts.

La montée du nationalisme afrikaner (1910-1931)

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Sous l’impulsion du parti national – et alors que se développent l’exploitation minière et l’industrie manufacturière grâce aux capitaux britanniques, le fort sentiment antibritannique des Afrikaners se maintient durant l’entredeux-guerres. Ceux-ci cherchent à compenser leur faiblesse économique tout en adoptant une stratégie d’accession aux divers échelons du pouvoir politique. Leurs efforts sont couronnés de succès lorsqu’un gouvernement boer nationaliste, présidé par James Hertzog (1924-1939), parvient à faire reconnaître par le Royaume-Uni l’autonomie du pays (1926), le statut de Westminster (11 décembre 1931) supprimant toutes les réserves qui restreignaient encore son pouvoir législatif, mais conservant le statut de dominion. 4

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L’APARTHEID, SYSTÈME DE GOUVERNEMENT L’apartheid s’est développé de façon rapide et étrange en Afrique du Sud. Bien que ce système ai déjà existé dans d’autres pays, celui-ci a adopté un caractère radicale en quelques années.

La relance de la politique ségrégationniste (1948-1956)

Les premières mesures de ségrégation raciale (1913-1948)

En 1948, le parti national, grand vainqueur des élections législatives, instaure la politique du « développement séparé des races ». Cette doctrine entérine un état de fait en le dotant d’une légitimité juridique. L’année suivante, le gouvernement nationaliste du pasteur Malan étend en 1949 l’apartheid à la population d’origine indienne (qui s’est installée, à la fin du XIXe siècle, dans la région de Durban et de Port-Élisabeth). Au cours des années 1950, le gouvernement fait adopter une nouvelle série de mesures discriminatoires. Ainsi, en 1952, le Native Act n°67 impose à tous les Noirs âgés de 16 ans et plus de porter sur eux en permanence un pass book (laissez-passer) contenant leurs pièces d’identité et un certificat d’origine tribale. En 1953, le Bantu Labour Act interdit aux Africains de faire grève et de se syndiquer. C’est ensuite, en 1956, l’Industrial Conciliation Act qui interdit les syndicats ouvriers mixtes.

Le gouvernement met en place une politique de ségrégation raciale inspirée des premières lois ségrégatives édictées dès 1913 et nourrie, d’un côté, par le désir de revanche et de reconnaissance sociales éprouvé par les Afrikaners, et, de l’autre, par les traditions religieuses des premiers Boers. À partir de 1921, les mesures ségrégationnistes se multiplient et sont étendues à l’ancien SudOuest africain allemand (actuelle Namibie), sur lequel l’Union sud-africaine a reçu en 1920 un mandat de la Société des Nations (SDN). En 1927, la loi Hertzog (du nom du Premier ministre James Hertzog) prohibe tout rapport sexuel hors mariage entre Blancs et Noirs. Dans les années 1930, la récession attise les conflits entre Noirs et fermiers blancs, qui aspirent à trouver du travail dans les villes. Afin de faire de l’Afrique du Sud une nation de Blancs, le gouvernement Hertzog (1924-1939) cherche à concentrer les Noirs dans des réserves. Ni les Noirs ni les métis n’ont le droit de vote. La politique d’apartheid fut le « résultat de l’anxiété historique des Afrikaners obsédés par leur peur d’être engloutis par la masse des peuples noirs environnants ». Les lois rigides qui en résultèrent, « dictées par une minorité blanche dynamique obsédée par sa survie » en tant que nation distincte, furent ainsi historique des Afrikaners obsédés par leur peur d’être engloutis par la masse des peuples noirs.

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1. Femme et son enfant assise dans le bus a des places réservées aux noirs. 2. Voiturier pour Afrinaners. 3. Apartheid au sein d’un bus (les noirs sont assis au fond) 4. Séparation de sentrées entre noirs et blancs. 5. Panneau indiquant une plage réservée au blancs, les noirs ont interdiction d’y pénétrer.


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Les bantoustans, instruments de la ségrégation Répondant au souci de pousser encore plus loin la ségrégation raciale, le Promotion of Bantu Self-Government Act permet en 1954 de créer dix « nations noires » artificielles, dites bantoustans. Sous le mandat de Verwoerd (1958-1966), le Parlement adopte une loi favorisant l’autodétermination bantoue et projetant l’indépendance des dix bantoustans africains. Elle est réalisée en 1976 pour le Transkei, suivi du Bophutatswana (1977), du Venda (1980) et du Ciskei (1981). Ces « États », qui ne seront jamais reconnus par la communauté internationale, sont alors surpeuplés (74 % de la population noire), fragmentés et dotés de ressources limitées. Neuf millions de Noirs, appartenant aux groupes ethniques associés aux bantoustans, ont perdu de facto la citoyenneté sud-africaine. En 1964, le Bantu Law Amendment Act prive les Africains de leurs droits en dehors des bantoustans et, en 1968, l’interdiction des mariages mixtes s’étend jusqu’à l’invalidation de ceux qui sont contractés à l’étranger.

1. Le centre Gandhi a Natal (clinique, école, bibliothèque, imprimerie) brulée durant les affrontement 2. Soweto. A «pass burning» demonstration. 1961. 3. Charge de la police sur les manifestants à Sharpeville. 4. Soulevement à Sharpeville.

«  Bantoustans  » Les bantoustans étaient les régions créées durant la période d’apartheid en Afrique du Sud et au Sud-Ouest africain, réservées aux populations noires et qui jouissaient à des degrés divers d’une certaine autonomie. Le terme bantoustan provient de l’accolement du mot bantou bantu (signifiant « peuple ») au suffixe persan -stan (signifiant « terre de »). Bantoustan signifie donc la « terre des peuples ».

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La montée des tensions interraciales (1960-1979) Le 18 mars 1960, Robert Sobukwe, président du Congrès panafricain (PAC), appelle pour le 21 mars à des manifestations non-violentes dans tout le pays afin de protester contre les « pass » (passeport intérieur), demander leur abrogation ainsi que l’augmentation de la rémunération de base de la journée de travail1. Les manifestants sont appelés à se réunir devant les postes de police et se porter volontaires à l’arrestation pour « non port du pass ». Le but est que tous les postes de police soient rapidement débordés et incapables de procéder aux arrestations et aux emprisonnements. Il s’agit aussi pour le PAC s’imposer face à sa rivale, le Congrès national africain (ANC). Sharpeville était un township calme qui avait échappé à l’influence de l’ANC et n’avait jamais participé à aucun des grands mouvements anti-apartheid des années 1950. Ainsi une manifestation regroupant entre 3000 et 5000 personnes (principalement composée d’enfants, de personnes agées et de femme) a lieu devant le poste de police de la ville.

Trois chars furent dépêchés du township tandis que des avions effectuaient des survols pour tenter de pouvoir ainsi impressionner et disperser pacifiquement la foule. Une interpellation à l’entrée du poste tourna mal. L’officier en fonction trébucha provoquant un mouvement de curiosité de la foule vers l’avant, vers les policiers. Mal interprété, un coup de feu unique partit suivie de rafales de tirs pendant une minute ou plus. La foule, stupéfaite, eut un mouvement de panique, tourna le dos et tenta d’échapper aux balles. On relève 69 morts et parmi les 178 blessés, un nombre très impressionnant de blessures par balles dans le dos, à la tête, à la poitrine. Renforçant alors sa politique répressive, le gouvernement interdit, le 8 juin 1960, les mouvements d’opposition à l’apartheid nés dans les années 1950 sous l’influence de l’ANC (African National Congress, Congrès national africain, né en 1912) dont le président Albert Luthuli reçoit le prix Nobel de la paix, ou d’autres mouvements.

« Un homme qui prive un autre homme de sa liberté est prisonnier de la haine, des préjugés et de l’étroitesse. » Nelson Mandela

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21 mars 1960 : Sharpeville Pour protester contre le port obligatoire du passeport, en vigueur depuis la promulgation du «Pass Law Act», de nombreuses manifestations sont organisées en Afrique du Sud, avec l’encouragement de l’African National Congress (ANC) et du Panafrican Congress (PAC). Mais le rassemblement de Sharpeville tourne au drame lorsque la police ouvre le feu. On compte plus de 60 morts et près de 180 blessés. Les réactions sont immédiates en Afrique du Sud comme sur le plan international. D’autres manifestations de protestations auront lieu, tournant à l’émeute et étant accompagnées de grèves générales, normalement interdites. À la suite de l’événement, les organisations du PAC et de l’ANC seront proscrites, poussant cette seconde à agir clandestinement et à prendre les armes.



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Les réactions de l’ANC Face à l’inflexibilité du pouvoir blanc, la lutte s’intensifie : une branche armée clandestine de l’ANC est créée en décembre 1961. Nelson Mandela, l’un de ses dirigeants les plus influents, est arrêté. Les documents et explosifs saisis permettent d’inculper le prisonnier Mandela et huit de ses nouveaux co-accusés : ils risquent la peine de mort mais sont finalement condamnés, au terme de huit mois d’un procès retentissant, le 12 juin 1964, à la réclusion à perpétuité avec travaux forcés. Les condamnés noirs purgent leur peine à Robben Island, sorte de château d’If au large de la ville du Cap ; l’unique condamné blanc est envoyé dans la prison de Pretoria Central. L’un des avocats afrikaners, Bram Fischer (1908-1975), qui avait déjà défendu Mandela lors du Treason Trial et a dû lui-même passer dans la clandestinité, est à son tour condamné à la prison à vie. À mesure que s’étaient succédé les assignations à résidence, Mandela refusait déjà de se cantonner au territoire imparti par un pouvoir raciste qu’il récusait. Lors de ses procès, il est en mesure s’il le faut d’assurer sa propre défense, voire de faire de la salle d’audience une tribune politique. Une fois entre quatre murs, il s’emploie à maintenir une forme de lutte. L’Union sud-africaine s’est retirée du Commonwealth, qui avait condamné l’apartheid, et la République d’Afrique du Sud a été proclamée le 31 mai 1961. À partir de 1975, le mouvement SWAPO développe son action pour obtenir l’indépendance de la Namibie. Mandela continu a se faire le porte-parole

1. Nelson Mandela à Londres devant l’abbey de Westminster 2. Acte terroriste commis par l’ANC sur des pilones téléphoniques. 3. Mandela brûlant sont laissé passé ; symbole de l’apartheid et de la domination des afrikaners. 4. Foule soutenant les membres de l’ANC arrétés juste après leur jugement. Ils sont emmenés à la prison de Roben Island ou ils ont été condamnés à vie pour la plupart.

des prisonniers auprès de la direction de la prison, les défend sous le manteau dans leurs procès en appel, poursuit ses études de droit par correspondance et commence la rédaction de ses mémoires, discute avec les jeunes gens emprisonnés après les émeutes de Soweto (juin 1976) ou encore lutte contre les bantoustans en conseillant un chef tribal. Il s’efforce de ne pas cantonner son esprit aux quelques mètres carrés de sa cellule. À partir de 1980, l’ANC le met en avant dans ses campagnes internationales de mobilisation de l’opinion. La résistance morale et physique du matricule 466/64 – ayant contracté la tuberculose en prison, il est hospitalisé à deux reprises – contribue à la naissance du mythe.

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Nelson MANDELA Figure emblématique de la lutte

réconcilié... Entré à l’ANC en 1944,

Sa santé est ébranlée mais il montre

contre l’apartheid, Nelson Mandela

il s’engage dans une résistance

une résistance morale et un sens

aura connu le harcèlement policier,

non-violente pour les droits des Noirs

politique sans faille. L’ANC en fait une

la clandestinité et le bagne : chef

en Afrique du Sud. Avec Oliver Tambo

icône de la lutte contre l’apartheid.

historique de l’African National

(1917-1993), il ouvre en 1952 le

Sollicité par les dirigeants afrikaners,

Congress (ANC), il passa plus de

premier cabinet d’avocats noirs du

eux-mêmes soumis à la pression

vingt-sept ans en prison avant

pays. Il participe en 1955 à l’élabora-

internationale, il accepte sa libération

de pouvoir faire entendre la voix

tion de la Charte de la liberté,

(1990) contre l’entrée dans une phase

des Noirs en Afrique du Sud.

véritable plaidoyer pour l’égalité

de transition démocratique avec

L’un des principaux artisans du

entre tous les Sud-Africains. Devant la

le pouvoir. Il reçoit avec F.W. De Klerk

processus de démocratisation

répression sanglante des protestations

le prix Nobel de la paix en 1993

en Afrique du Sud, il reçut le prix

pacifiques, il organise le recours à la

et devient, à l’issue des élections

Nobel de la paix ; élu président de

violence. Il est condamné en 1964

de 1994 Le premier président noir

République, il mena sur une voie

à la réclusion à perpétuité avec travaux

de la République d’Afrique du Sud.

plus juste son pays multiracial et

forcés, sur l’île de Robben Island.

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« Nous travaillerons ensemble pour soutenir le courage là où il y a la peur, pour encourager la négociation là où il y a le conflit, et donner l’espoir là où règne le désespoir. » 1

Nelson Mandela

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Le drame de Soweto : Le 16 juin 1976, avec le soutien du mouvement de la Conscience noire, des écoliers et des étudiants noirs se rassemblent pour protester contre l’obligation qui leur est faite de suivre leur enseignement en afrikaans, la langue de la principale communauté blanche du pays et identifiée à l’apartheid. À neuf heures et demie du matin, ces jeunes commencent à se réunir autour de banderoles. Ils ont pour but de protester et d’exprimer leurs opinions pacifiquement et il est convenu que tout affrontement avec la police doit être évité. La police sud-africaine avait reçu la consigne du ministre de la Justice, Jimmy Kruger, de « rétablir l’ordre à tout prix et d’user de tous les moyens à cet effet ». Après les sommations demandant à la foule de se disperser, elle ouvrit le feu sans distinction sur une foule désarmée. Le bilan est officiellement de 23 morts et 220 blessés, mais le bilan réel n’est pas vraiment connu. On parle de plusieurs centaines de morts, et on avance parfois 575 morts dont 570 noirs. Bon nombre de victimes

1. Manifestation contre les Afrikaners 2. Mise en place de bus spécial pour les personnes de couleurs afin de contourner le système des blancs. 3. Manifestants de Soweto avant le drame 4. Une manifestation de étudiante de Witwatersand. 1961

furent touchées de balles dans le dos. Hector Pieterson, un jeune garçon de 12 ans, devint le symbole de la répression aveugle du régime. La photo, prise par Sam Nzima, sur laquelle il est porté par un camarade de classe, Mbuyisa Makhubo, fit plus tard le tour du monde. Des émeutes se propagèrent dans tous les townships du pays et leur répercussion dans l’opinion internationale fut telle qu’elle obligea en 1977 l’ONU à décréter un embargo sur les ventes d’armes à destination de l’Afrique.

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Photo relative aux émeutes de Soweto représentant un écolier portant le corps sans vie du jeune Hector Pieterson, 13 ans, tué par des balles de la police le 16 juin 1976. Sam Nzima.

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VERS LA FIN DE L’APARTHEID (1991) L’évènement de Soweto signe un tournant dans l’histoire de l’Apartheid. Suite à celui-ci la communauté Afrikaner devient impuissante fâce à la colère de la communauté noire. De plus la société internationnale s’indigne enfin fâce aux photos et vidéos diffusées.

Des signes d’apaisement (1979-1985)

Les insuffisances de la détente (1985-1989)

Au milieu des années 1980, alors que monte la pression internationale, morale et économique, contre un pays qui n’est plus vu comme un rempart contre le communisme, le gouvernement de P.W. Botha infléchit sa politique. Le ministre de la Justice Kobie Coetsee (1931-2000) vient sonder Mandela officieusement. On lui propose sa libération contre un rejet public de la violence. Mandela décline l’offre et le fait savoir publiquement par la voix d’une de ses filles lors d’un rassemblement : il argue que la violence institutionnelle appelle la violence et refuse la liberté d’un seul contre l’oppression de tous dans le cas de minorités. Des pourparlers sont néanmoins entamés secrètement, y compris dans un premier temps à l’insu de l’ANC, pour la mise en place d’un régime où la population blanche deviendrait minoritaire. Pieter Willem Botha (1978-1989) légalisent les syndicats noirs en 1979, autorisent les partis politiques multiraciaux en 1985, suppriment les quotas appliqués par les industries afin de limiter le nombre de travailleurs noirs, ainsi que la loi interdisant les mariages mixtes.

Ces mesures, cependant, ne parviennent pas à contenir les mouvements de protestation des Noirs contre le régime. Pour mettre fin aux violences envers les policiers et les Noirs qui coopèrent avec les Blancs, ainsi qu’entre membres de groupes politiques ou ethnolinguistiques rivaux – essentiellement zoulous –, le gouvernement impose l’état d’urgence sur l’ensemble du territoire entre septembre 1984 et juin 1986. Le président Botha reconnaît néanmoins que le concept d’apartheid est dépassé et qu’il faut l’éliminer. L’année 1985 est marquée par de graves émeutes dans les townships (notamment à Crossroads, en mars 1985). Peu après (janvier 1986), Botha est amené à annoncer la fin de l’apartheid pour apaiser les esprits. La même année disparaissent les laissez-passer réglementant les mouvements d’immigration vers les villes sous domination blanche. En 1987, le gouvernement propose un remaniement du Group Areas Act, loi qui était à l’origine de la ségrégation raciale dans les zones urbaines. Mais la nouvelle Constitution refuse toujours le droit de vote à la majorité noire lors des élections nationales, et n’accorde que des droits limités aux métis et aux Indiens.

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La fin de l’apartheid (1991) En 1989, Botha démissionne de la présidence et cède la place à Frederik Willem De Klerk qui fait libérer Mandela (février 1990), légalise l’ANC et fait abolir l’apartheid par le Parlement (juin 1991). Dans l’intervalle, le 21 mars 1990, a été proclamée l’indépendance de la Namibie, dirigée par la SWAPO. Les affrontements violents entre l’ANC et les Zoulous de l’Inkatha, animés par Mangosuthu Buthelezi, et la résistance des milieux blancs extrémistes, une nouvelle Constitution est adoptée en décembre 1993. Pour assurer la transition, on y propose la formation d’un gouvernement d’union nationale regroupant les représentants des principaux partis.

1. Frederik de Klerk durant les premières négociation avec Nelson Mandela 2. Foule soutenant Mandela pour les premières éléctions interraciales. Les noires sont pour la première fois égaux aux blancs dans es urnes.

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4. Arrestation lors de manifestation pour la victoire de Mandela. Cette image reprrésente l’égalité devant la loi des blanc des et personnes de couleurs

3. Premier discours de Nelson Mandela 40 ans avant qu’il devienne président.

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Mandela président (1994) Les premières élections multiraciales et démocratiques d’avril 1994, auxquelles l’Inkatha, après avoir longtemps hésité, accepte finalement de participer, assurent la victoire de l’ANC, avec 60 % des suffrages, sur 27 partis en lice. Le parti national de Frederik De Klerk est la deuxième force du pays (20 %), ralliant non seulement la majorité des Blancs, mais aussi celle des lndiens et des métis. Buthelezi garde le contrôle du Natal, fief des Zoulous. Le 9 mai, les 400 députés du nouveau Parlement portent Mandela à la présidence de la République, Thabo Mbeki et F. De Klerk devenant vice-présidents. L’apartheid est alors définitivement enterré. Mais la stabilité du pays reste menacée par l’épidémie de sida, de très grands écarts de fortune et de fortes tensions sociales et inter-ethniques.




CHRONOLOGIE


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Loi sur les commodités publiques distinctes (Reservation of Separate Amenities Act) ségrégant les toilettes, fontaines et tous

1953

Loi sur les laissez-passer (Pass Laws Act) faisant obligation aux Noirs ayant plus de 16 ans d’avoir sur eux un laissez-passer, c’est-à-dire un document ressemblant à un passeport intérieur qui stipulait s’ils avaient une autorisation de présence dans certains quartiers blancs au-delà des horaires de travail.

1952

Loi d’habitation séparée (Group Areas Act) répartissant racialement les zones urbaines d’habitation. La loi d’immoralité (Immorality Act), qui lui est liée, pénalise les relations sexuelles entre Blancs et non Blanc. Elle renforce le champ d’application d’une loi homonyme adopté en 1927. Loi de classification de la population (Population Registration Act), distingue les individus selon leur catégorie raciale attribuée (blancs, noirs, coloureds et indiens). Loi de suppression du communisme (Suppression of Communism Act), permettant d’interdire tout parti politique catalogué comme communiste par le gouvernement.

1950

Loi sur l’interdiction des mariages mixtes (Prohibition of Mixed Marriages Act)

1949

Victoire du parti national, qui met en place la politique de l’apartheid selon laquelle les peuples de races différentes ne peuvent pas vivre ensemble dans l’égalité et l’harmonie. Dans un premier temps, ces nouvelles lois systématisent et institutionnalisent l’application de lois raciales déjà existantes en Afrique du Sud.

1948

Loi sur la promotion de gouvernements noirs autonomes (Promotion of Bantu Self-Government Act), spécificité de l’apartheid, renforçant l’autonomie des bantoustans ethniques sous administration tribale. La représentation des populations noires de la province du Cap à la chambre de l’assemblée (4 députés blancs) et au Sénat est supprimée (application en 1960). Création du Congrès panafricain

1959

Loi sur le travail et les mines (Mines and Works Act) renforçant la discrimination raciale dans le monde du travail. Renforcement de la loi sur le contrôle de la migration (influx control) en vigueur depuis 1923. Retrait des populations coloureds des listes électorales communes de la province du Cap et inscription sur des listes séparées malgré les manifestations organisées par les Torch commando et les Black Sash.

1956

Rédaction de la Charte de la liberté par les mouvements anti-apartheid avec l’appui de l’ANC.

1955

Loi de relocalisation des indigènes (Native resettlement Act) : permet de déplacer les populations noires vivant en zones déclarées blanches.

1954

les aménagements publics. Loi d’éducation Bantoue (Bantu Education Act), concernant le programme scolaire des Noirs. Retrait du droit de grève aux travailleurs noirs, interdiction de la résistance passive.


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Loi de citoyenneté des Noirs des homelands : (Black Homeland Citizenship Act) « retirant » la citoyenneté sudafricaine aux Noirs issus de communautés ethniques relevant

1970

Exclusion de l’Afrique du Sud du comité international olympique Adoption du Separate Representation of Voters Amendment Act supprimant la liste électorale des électeurs coloured de la province du Cap. La représentation des populations coloured de la province du Cap à la chambre de l’assemblée (4 députés blancs) et au Sénat est supprimée et, à la place, un conseil représentatif des personnes Coloured est créé.

1968

Assassinat du premier ministre Hendrik Verwoerd. John Vorster premier ministre

1966

Procès de Rivonia : Nelson Mandela est condamné à perpétuité pour terrorisme et enfermé avec d’autres chefs de l’ANC sur l’île pénitencier de Robben Island.

1963-1964

Début de la lutte armée avec Umkhonto we Sizwe, la lance de la Nation (branche militaire de l’ANC). Proclamation de la république d’Afrique du Sud (31 mai), modification de la constitution et retrait du Commonwealth

1961

Massacre de Sharpeville Interdiction de l’African National Congress (ANC) et du Congrès panafricain. Prix nobel de la paix décerné à Albert Lutuli, président de l’ANC.

1960

Embargo onusien sur les ventes d’armes destinées à l’Afrique du Sud à la suite de la répression des émeutes de Soweto. Mort en prison de Steve Biko, chef de la Conscience noire. Indépendance du Bophuthatswana (bantoustan de l’ethnie tswana), non reconnue par la communauté internationale

1977

Loi sur l’interdiction de l’accès à la formation professionnelle aux Noirs. Émeutes de Soweto à la suite de l’adoption d’un décret imposant l’Afrikaans comme langue d’enseignement générale dans les écoles bantoues du niveau secondaire (maths, sciences sociales, histoire et géographie). Indépendance du Transkei (bantoustan de l’ethnie xhosa), non reconnue par la communauté internationale

1976

Exclusion du représentant sud-africain de l’Assemblée Générale des Nations Unies (mais l’Afrique du Sud, membre fondateur, n’est pas exclue de l’ONU). Déségrégation des parcs à Johannesburg, du théâtre Nico Malan au Cap et des hôtels cinq étoiles dans toute l’Afrique du Sud.

1974

Visite officielle du président Hastings Kamuzu Banda en Afrique du Sud. Le Malawi, qui est l’un des seuls pays africains à entretenir des relations diplomatiques du plus haut niveau avec l’Afrique du Sud, nomme son premier ambassadeur noir, Joe Kachingwe, à Pretoria. Les diplomates de l’Ambassade reçoivent le statut de blanc honoraire.

1971

de bantoustans déjà créés à cette époque. Visite d’État du premier ministre John Vorster au Malawi


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Entrée en vigueur d’une nouvelle constitution, validé par référendum, avec la création d’un parlement tricaméral ouvert aux Indiens et aux Métis (suppression des conseils représentatifs indiens et coloureds). Entrée au gouvernement de deux ministres indiens et coloureds (Amichand Rajbansi et Allan Hendrickse).

1984

Attentat de Church Street à Pretoria, le plus sanglant des attentats commis au nom de la lutte contre l’apartheid. Création d’autorités locales noires élues pour gouverner les townships (mais les élections organisées en 1984 sont largement boycottées)

1983

Nelson Mandela est transféré à la prison de Pollsmoor dans la banlieue du Cap

1982

Indépendance du Ciskei, non reconnue par la communauté internationale

1981

Abrogation de l’apartheid dans le Sud-Ouest africain/Namibie, administrée par l’Afrique du Sud Assouplissement dans la réglementation du travail : les travailleurs noirs sont autorisés à se syndiquer ce qui amène à la création de la « National Union Mineworkers » et à la COSATU Indépendance du Venda, non reconnue par la communauté internationale

1979

Ouverture des premières boites de nuit multiraciales à Johannesburg. L’expérience ne dure qu’une année.

1978

Frederik de Klerk devient président de la République et annonce des réformes fondamentales. Il négocie avec l’ANC.

1989

Élections municipales : Le parti conservateur, qui a nettement progressé au Transvaal et dans l’état libre d’Orange, tente de réinstaller dans les villes qu’il dirige la ségrégation (l’apartheid mesquin) dans les lieux publics comme les parcs ou cinéma (cas emblématique de Boksburg).

1988

L’état d’urgence est déclaré dans le pays. Guerre civile au Natal entre mouvements noirs. Abolition des lois symboliques de l’apartheid comme le passeport intérieur (le pass), remplacé par un document d’identité unique pour tous les sud-africains. Nomination du premier ambassadeur américain noir en Afrique du Sud Adoption par les États-Unis de sanctions économiques contre l’Afrique du Sud. Nomination des premiers diplomates sud-africains non blancs comme Bhadra Ranchod nommé en 1987 ambassadeur d’Afrique du Sud auprès de la communauté européenne.

1986

Révolte des townships. Début des négociations concrètes en Suisse entre représentants du gouvernement et ANC. Ouverture de lieux publics multiraciaux (cinéma, théâtre). Le quartier d’Hilbrow à Johannesburg devient emblématique du premier quartier non ségrégué et cosmopolite.

1985

Prix nobel de la paix décerné à Desmond Tutu, figure emblématique de la lutte contre l’apartheid.


29

La Commission vérité et réconciliation, présidée par l’archevêque Desmond Tutu est chargée d’enquêter sur les violations des droits

1996-1998

Rétrocession de l’enclave sud-africaine de Walvis Bay à la Namibie (février) Adoption d’un hymne et d’un nouveau drapeau national à titre transitoire (mars) Premières élections nationales et non raciales (27 avril) : le congrès national africain remporte les élections générales et Nelson Mandela devient le premier Noir à accéder à la présidence sud-africaine. Mise en place d’un gouvernement d’union nationale (ANC, parti national et parti zoulou).

1994

Prix Nobel de la paix attribué à Nelson Mandela et Frederik de Klerk. Rédaction d’une constitution transitoire.

1993

Référendum auprès de la population blanche par lequel celle-ci appuie à 69 % les réformes du président de Klerk

1992

Abolition des dernières lois piliers de l’apartheid (30 juin). Mise en place de la Commission Goldstone chargé d’enquêter sur les violences imputées aux forces de sécurité et aux groupes politiques et paramilitaires pro-apartheid.

1991

Indépendance de la Namibie L’ANC, le Parti communiste et tous les mouvements noirs sont légalisés. Nelson Mandela est libéré, après vingt-sept ans de captivité.

1990 de l’homme commis de 1960 à 1993 et d’éclaircir les crimes et exactions politiques commis au nom du gouvernement sudafricain mais également les crimes et exactions commis au nom des mouvements de libération nationales. 22 000 victimes identifiées recevront chacune 3 900 dollars. Adoption d’une nouvelle constitution et confirmation des hymnes et des emblèmes nationaux.





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