HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 - Juillet 2020

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HISTOIRE & PATRIMOINE RÉGION

NAZAIRIENNE

PRESQU’ÎLE GUÉRANDAISE

Patrimoine - Histoire - Culture, en Pays Noir / Pays Blanc

Les Quakers à Saint-Nazaire

Les maires de Saint-Nazaire (5

partie)

Enquête patrimoine autour de la villa Mektoub

Un mariage ducal à Saillé

Saint-Nazaire, une ville gallo-romaine

Les Lera, une famille de diplomates nazairiens

Le lotissement du bois de Lanséria, à Mesquer

e

A.P. H.R.N - n° 98 - juillet 2020 - 14 €


Buste d’Henri Gautier, placé, en 1930, square Delzieux, près de l’église Saint-Nazaire. (Sculpteur : Louis Mahé)


L

Éditorial

e fil conducteur de nos articles est l’histoire de Saint Nazaire et de sa région. Les changements de modes de vie et de techniques, les transformations du milieu urbain et des alentours, cela constitue notre ligne éditoriale. Pendant l’élaboration de ce n° 98, un certain intrus, envahissant, appelé « Covid », faisant peser sa chape étouffante, n’a, cependant, pas tari les recherches, ni paralysé la plume de nos auteurs. Ces derniers mois, il n’a été question que de lui, quotidiennement. Geôlier intransigeant, menaçant, exécuteur des récalcitrants, ennemi invisible et omniprésent, il nous a, tous, confinés. L’écriture est passée outre. L’histoire continue, notre revue aussi. Nos articles, toujours variés et nombreux, traversent le temps et les époques, relatent les évènements en tous genres. Cela va des Quakers, à Saint-Nazaire, et leurs actions humanitaires, aux différents maires, citoyens en première ligne, acteurs directs de l’histoire de leur ville, sans oublier de passer par l’époque gallo-romaine. Qui eut cru que les abords de la base sous-marine en cachaient des vestiges ? Étonnante, aussi, cette villa Mektoub, insolite, exotique, et son histoire. Encore une évocation différente, au terme d’une enquête passionnante. Chaque homme, chaque cité se sent unique, « il n’y a pas deux feuilles semblables dans une forêt », dit-on. Or, d’autres villes, différentes, portent le même nom. C’est vrai pour Saint-Nazaire. Un tour d’horizon nous le prouve. Saint Nazaire, port ouvert sur l’Atlantique, a des liens avec les plus lointains pays. La présence du consulat du Mexique est l’occasion d’un article original, narrant l’histoire de la famille Lera. Certains évènements, fort différents, ont laissé des traces, comme, à Saillé, le mariage de Jeanne de Navarre avec le duc Jean IV, à la fin du XIVe siècle. Elle mettra au monde neuf enfants et deviendra reine d’Angleterre, par son second mariage avec le roi Henri IV. Destinée étonnante. Puis, le traict du Croisic, et celui de Mesquer donnent lieu à une recherche géologique et toponymique, en un texte savant et instructif. Suit, à Mesquer, la description de la naissance d’un environnement, particulièrement attrayant, autour de l’anse de Lanséria. De Mesquer à Piriac, il n’y a qu’un pas. Une bannière, exposée en l’église de Piriac, rappelle des faits religieux, historiques et d’autres, plus légendaires. C’est un labyrinthe où l’on aime s’égarer et retrouver ses repères, un jeu pour l’esprit. Tiens ! en fin de revue, le voici, ce virus. Il fera parler de lui longtemps, il se fait craindre, il hante l’imaginaire, de toute sa puissance. Cependant, de tout mal émerge un bien, il suffisait de le déceler. Victor Hugo, trop souvent oublié, nous le rappelle, juste pour le plaisir. Pour résumer, toutes les périodes sont passionnantes. Le champ de recherches est infini. Pour connaître Saint Nazaire, et la presqu’île, de la façon la plus complète qui soit : lire la revue Histoire et Patrimoine. Christiane Marchocki.

1ère page de couverture : Le camion de la mission Quaker, à Saint-Nazaire (Herbins), dans les années d’après-guerre. (Collection Joël Anneix [origine : famille Guillou])

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- HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 — 1


A . P. H . R . N

Association Patrimoine et Histoire de la Région Nazairienne Agora (case n° 4) 2 bis avenue Albert de Mun - 44600 Saint-Nazaire aphrn.asso@gmail.com - https://aphrn-asso.fr - Tél. 06 07 11 21 88

HISTOIRE & PATRIMOINE n° 98 - juillet 2020 ÉÉditeur : A.P.H.R.N Direction de la publication : collégiale (voir dernière page) Maquette/Mise en page/Coordination : Tanguy Sénéchal Impression : Pixartprinting Dépôt légal : 3e trimestre 2020 N° ISSN : 2116-8415 Revue consultable aux Archives de Loire-Atlantique sous la cote Per 145

Contribuez à la revue HISTOIRE & PATRIMOINE Vous vous intéressez à l’histoire, et, en particulier, à l’histoire de notre région ? Vous souhaitez apporter votre témoignage sur une époque, aujourd’hui révolue ? Vous possédez des documents, ou objets, anciens (écrits, photos, dessins, peintures, tableaux, sculptures, objets divers), qui pourraient faire l’objet d’une publication ? Vous aimez écrire, raconter, transmettre, ce qui vous intéresse, ou vous tient à coeur, et qui a trait à l’histoire locale ? L’APHRN vous propose de publier vos écrits, ou documents, ou de transcrire vos témoignages, dans la revue HISTOIRE & PATRIMOINE. Téléphonez-nous, au 06 62 58 17 40, ou écrivez-nous, à l’adresse ci-dessous, ou, tout simplement, adressez-nous, directement, votre texte, sous forme numérique. Vos propositions seront examinées avec la plus grande attention et soumises au conseil de direction de l’APHRN, qui vous répondra dans un délai d’un mois, maximum. Adresse électronique : aphrn.asso@gmail.com - Adresse postale : APHRN – Agora (case n° 4) – 2 bis av. Albert de Mun - 44600 Saint-Nazaire

Abonnez-vous à la revue HISTOIRE & PATRIMOINE Un abonnement à la revue HISTOIRE & PATRIMOINE, c’est l’histoire de la région nazairienne/guérandaise, tous les quatre mois, dans votre boîte aux lettres, en mars, juillet et novembre (votre abonnement vous permet, de plus, de bénéficier d’un tarif préférentiel sur les numéros hors-série, qui paraissent à différentes périodes de l’année). C’est l’histoire locale, dans toute sa diversité, écrite, à la fois, par des historiens professionnels, connus et reconnus, et par des amateurs éclairés, dans la tradition des publications de notre association, depuis sa création, par Fernand Guériff, il y a 50 ans. C’est, aussi, un support en constante évolution, d’un graphisme soigné, richement illustré, composé de près de cent pages à chaque livraison. Nous vous proposons cet abonnement avec une réduction de 10 % par rapport au prix public, frais de port compris (trois numéros par an, parution en mars, juillet et novembre). ff

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SOMMAIRE HISTOIRE & PATRIMOINE n° 98 — juillet 2020

01 P. 62

Éditorial

Christiane Marchocki

Les Quakers à Saint-Nazaire, en 1947 04

Le journal de Roger Craven Daniel Sauvaget

20

P. 68

P. 92

P. 108

P. 130

Les maires de Saint-Nazaire - Cinquième partie 1925 -1941

Patrick Pauvert

32

Saint-Nazaire, une ville gallo-romaine

50

Enquête patrimoine autour de la villa Mektoub

62

La révolution démographique de Saint-Nazaire au XIXe siècle

68

Saint-Nazaire au pluriel

74

Les Lera, Une famille de diplomates nazairiens, venus du Mexique

92

À l’âge de 20 ans, Constant,mort pour la France

Christian Morinière Stéphanie Le Lu

Grégory Aupiais Bernard Tabary Loup

Marcel Lucas

100

Un mariage ducal à Saillé

108

Les Traicts, un des traits géographiques majeurs du paysage de l’Estuaire

118

Le bois de Lanséria et son lotissement bientôt centenaire…

130

La prise de la bastide

134

Malou et Françoise Roussel Claude Thoméré

Jocelyne Le Borgne

Ghislaine Deltombe de Feraudy

Bannière Saint-Pierre-ès-Liens de Piriac, Bannière pérenne de l’île Dumet Michel Barbot

148 151 P. 134

Journal d’un aumônier breton - 1850 - 28 partie e

Christiane Marchocki

André Dubreuil, toujours dans nos souvenirs Christiane Marchocki

ÇA SE PASSE AUJOURD’HUI 152 Sacré Conaro ! Quelques réflexions sur un virus très importun Bernard Tabary

156 L’ASSOCIATION

P. 148

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Les Quakers

à Saint-Nazaire, en 1947 Le journal de Roger Craven Traduction et commentaires : Daniel

Sauvaget

Bénévoles d’inspiration religieuse dépourvus de tout prosélytisme, les Quakers ont fait de nombreuses inter­ventions humanitaires en Europe, notamment en France pendant la guerre 1939-45 jusqu’à ce qu’ils soient expulsés par les Allemands en novembre 1942. Après 1945, ils sont présents dans de nombreuses régions victimes des destructions de 1939-1945, Pologne, Allemagne, Autriche, et en France – notamment à Dunkerque et à Saint-Nazaire.

I

ls apportaient des programmes adaptés aux villes bombardées dont la population avait été dispersée. En région nazairienne, leur projet était plus particulièrement de venir en aide à des victimes de bombes larguées par leur propre pays, les États-Unis. Les secours aux sinistrés et réfugiés ont favorisé la reprise, le retour, et la reconstitution d’une vie sociale. La Société des Amis, c’est leur nom a connu quelque notoriété internationale en ces temps difficiles, puisqu’ils ont été couronnés du Prix Nobel de la Paix en décembre 19471. La région nazairienne a bénéficié de deux de leurs programmes : les transports et la constitution de ce qu’ils nommaient « centres communau­taires  ». On connaît l’histoire des foyers créés dans des cités provisoires, à Trignac (Savine) et Saint-Nazaire (Herbins), en particulier par le livre Saint-Nazaire au temps des baraques 2, qui a bénéficié des souvenirs de témoins contemporains de l’aventure. L’autre mission, le transport, est moins connue. Elle est évoquée dans l’article 1 - La récompense est allée conjointement à l’American Friends Service Committee et au British Friends Service Council – Le Comité du Secours des Amis Américains et le Conseil du Secours des Amis Britanniques. 2 - Par Joël Anneix et D. Sauvaget (Liv’éditions, 2009 – réédition en 2016).

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paru dans Histoire & Patrimoine n° 85 (janvier 2016) sous le titre Les Quakers à Saint-Nazaire – 1946-1953. Elle a pourtant joué un grand rôle dans cet aprèsguerre dominé par la pénurie de transport, les restrictions en tout genre, la lente reconstitution de l’habitat, comme le montrent les deux textes cités. C’est en France qu’a été organisée leur Mission-Transport au début de 1946, notamment pour épauler la Croix-Rouge Internationale. Cette European Transport Unit animée par Winslow Ames associait Quakers britanniques et américains. Une des premières missions a concerné Saint-Nazaire.

Elle amènera dans la région un groupe de volontaires âgés d’une trentaine d’années, comme Roger Craven, un des premiers arrivés, dont le rapport sur sa deuxième mission a été retrouvé, ainsi que Louis Neumann et Gordon Coffin – maintes fois cités dans ces pages, et d’autres sur lesquels il est difficile de trouver des informations personnelles, Van Cleve Geiger, Reed Smith, John Robbins, Leigh Morrell, dont les activités peu soucieuses de gloriole personnelle, ne figurent guère que dans des archives inexploitées au siège des Quakers à Philadelphie. Toutefois, par chance, un rapport, rédigé par Roger Craven, a été identifié et numérisé sur

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Ci-dessus Le camion de la mission Quaker à Herbins, avec, très probablement, Gordon Coffin, à gauche. (Collection Joël Anneix [origine : famille Guillou])

Page de gauche Page de garde du rapport de Roger Craven. (Archives AFSC, [American Friends Service Committee])

le site de l’American Friends Service Committee. Il permet de mieux connaître l’aventure des transports du Quaker Service. Nous en publions de larges extraits, à la fois pour combler des l ac u nes d’ i n for m at ion sur cette mission qui a assuré tant de transports et de déménagements de 1946 à 1948,

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Les maires de Saint-Nazaire Cinquième partie 1925 -1941 Patrick Pauvert Voici la 5e partie de l’histoire des maires de Saint-Nazaire, avec, pour la première fois, un élu socialiste, François Blancho.

23 - Blancho François

17 mai 1925 – mai 1941

F

rançois Blancho est né le 20 juin 1893 au 50 de la rue de Nantes (aujourd’hui rue Henri Gautier), d’un père chef-mécanicien à la transat et d’une mère couturière. Orphelin de son père en 1896, la petite famille s’installe à Redon pour tenir un café. À la mort de sa mère en 1903, une tante charitable recueille François et sa sœur au 33 de la rue Alcide Benoist à Saint-Nazaire, sur le même palier que Bernard Escurat, instituteur à Jules Ferry.

Le 21 mai 1906, François Blancho entre aux Chantiers de Penhoët comme apprenti chaudronnier. Très vite, il se passionne pour les questions sociales, notamment sous l’influence d’Henri Gautier dont il fut le véritable fils spirituel. Il devient secrétaire des jeunesses syndicales en septembre 1910. Le 28 juin 1912, il entre aux Chantiers de la Loire. François Blancho devient secrétaire du syndicat des métallurgistes en 1914, et le bras droit d’Henri Gautier. Deux ans plus tard, il quitte les Chantiers de la Loire pour la maison Fitcher en qualité de pointeur sur les quais. En septembre 1917, François Blancho est mobilisé dans l’aviation.

Ci-contre Rue Alcide Benoît, à Saint-Nazaire (située à gauche, au départ de la place Marceau), dans laquelle a habité François Blancho, à partir de 1903. Page de gauche François Blancho, élu, en 1925, maire de Saint-Nazaire.

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Ci-dessus Les environs de Saint-Nazaire, avant le VIe siècle de notre ère, par René Kerviler (1842-1907). (BnF)

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Page de droite Portrait de Léon Maître (1840-1926). (1912, par Hélène Cornée-Vetault [1849 - 1939] - Cliché Henri Pénot [1867-?])


Saint-Nazaire

une ville gallo-romaine Christian Morinière avec le concours de Gérard Moullec

À partir du milieu du VIe siècle, un port gallo-romain (Brivates portus ?), à l’embouchure de la Loire, prend progressivement le nom de Sanctus Nazarius avec une extension dans certains textes, Sanctus Nazarius de Sinario (SaintNazaire du golfe). Une basilique a été construite à peu de distance du port par l’évêque de Bordeaux Léonce le Jeune, qui l’a dédicacée à un saint de Milan, Nazarius. Ses reliques attirent les pèlerins.

U

ne communauté religieuse dessert le lieu saint. La population gallo-romaine donne au vicus le nom de la basilique. Nous sommes entre la fin de l’Empire romain et le début du Moyen-Âge avec les rois mérovingiens, l’antiquité tardive au milieu du VIe.

Lapopulationgallo-romaine L’étude des textes anciens, l’analyse du contexte propre à ce siècle, les relevés archéologiques permettent de fonder la présence d’une importante population gallo-romaine, avec son port datant de l’âge de bronze, et sa basilique du VIe siècle.

Les fouilles archéologiques

Les fouilles engagées à la suite des travaux d’aménagement de Saint-Nazaire par Léon Maître (1840-1926), archiviste, historien et archéologue de la Loire-Inférieure, et dont les résultats sont rapportés dans sa communication au Congrès archéologique de France (Nantes, 1886), intitulée Saint-Nazaire sous Clovis, exhument, entre le dolmen et le Ruban bleu, trois sarcophages de l’époque gallo-romaine ou mérovingienne et : Une aire faite en chaux et briques pilées, formant un aggloméré très dur, absolument semblable aux aires qui se trouvent partout dans les monuments romains. Son épaisseur est de 0,08 m et compose une place résistante. Les débris de tegulae [tuiles] rondes et plates, qui gisent dans la tranchée sont également des témoins irrécusables.

Léon Maître attribue ces vestiges à un temple primitif. D’autres sarcophages et vestiges gallo-romains furent découverts. Pitre de Lisle (1826-1924), conservateur du musée archéologique de Nantes et du Musée Dobrée indique dans le Dictionnaire archéologique de Loire-Inférieure : Période gallo-romaine. En 1836, découverte de constructions romaines entre le dolmen des Trois-Pierres et l’ancien Prieuré ; des débris de colonnes en pierre calcaire ornées de moulures élégantes ont été remises à la mairie de Saint-Nazaire. Des tuiles, des briques à rebord, des vases et des fragments d’urnes cinéraires furent trouvés au même endroit dans le champ de Praux. Non loin du dolmen on découvrit, au siècle dernier, une vingtaine de médailles d’Auguste, Claude, Néron, Vespasien. M. G. Blanchard [archiviste de la société d’archéologie de Nantes] possède un quinaire d’Octave (29 av. J.-C.) acheté à Saint-Nazaire. Les briques romaines se trouvent fréquemment dans les terres de cette commune et principalement sur le bord des côtes ; j’en ai vu beaucoup aux environs de Pornichet. Il y a quelques années, on trouva près de ce nouveau bourg des substructions gallo-romaines, des poteries, etc. Entre Pornichet et Saint-Marc, on trouve plusieurs chemins pavés de grosses pierres, qui doivent être d’anciennes voies romaines ; en remontant vers le nord, un chemin qui traverse de l’est à l’ouest par la Villez-Moulin-Leron et la Villez-Blais est encombré de pierres, dont beaucoup sont fichées verticalement en terre ; j’ai trouvé des briques romaines intercalées dans ce pavage (1882).

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Enquête patrimoine autour de la

villa Mektoub Stéphanie Le Lu Chercheuse Inventaire du patrimoine pour la Ville de Saint-Nazaire

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Elévation principale donnant sur la rue de Vecquerie. (© Yves Guillotin. Région des Pays de la Loire. Inventaire général)

Soucieuse de connaître son patrimoine, pour mieux le protéger et le transmettre, la Ville de Saint-Nazaire s’est engagée, depuis 2014, dans l’inventaire du patrimoine architectural de l’ensemble du territoire communal. Réalisée en partenariat avec la Région des Pays de la Loire, garante de la méthodologie et des normes scientifiques, cette opération tente une mise à plat des connaissances de l’histoire et du patrimoine bâti de la cité, en croisant les sources depuis leur origine. juillet 2020

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La révolution démographique de Saint-Nazaire au XIXe siècle Grégory Aupiais À la fin de l’Ancien Régime, Saint-Nazaire n’est encore qu’un gros bourg partagé entre ses vocations agricoles et maritimes. Cette dernière est toutefois en train de s’affirmer nettement au gré de l’ensablement de l’estuaire de la Loire. Néanmoins, au début la période contemporaine, ville et paroisse éponyme ne se distinguent pas encore l’une de l’autre.

L

e dénombrement de 1790 a certes permis de recenser près de 3381 habitants, mais pour l’ensemble d’un territoire de 5657 hectares ; l’agglomération nazairienne ne concentrant en elle-même qu’environ deux cents maisons. Honoré de Balzac n’y prêta d’ailleurs guère attention, quand il débarqua à Saint-Nazaire le 5 ou le 6 juin 1830 pour rejoindre Le Croisic, via Guérande et Batz1. « Un pittoresque village tassé sur son rocher », comme le qualifia, plus tard, Fernand Guériff. Une paroisse de la sénéchaussée royale de Guérande parmi les douze ou seize autres donc, car leur nombre varie selon les sources, les auteurs, les périodes ou les trois à la fois2.

1 - Fernand Guériff, Le Vieux Saint-Nazaire, Le Pouliguen, Éditions Jean-Marie Pierre, 1987, p.15. 2 - L’historiographie traditionnelle, à la suite notamment des différents ouvrages d’Henri Quilgars, a plutôt opté pour le nombre de treize ; hypothèse privilégiée également par des travaux de recherche plus récents et qui semble aussi être confirmée par des sources contemporaines. Toutefois, l’estimation haute est celle qui a été retenue par l’archiviste Henri de Berranger. Voir Henri Quilgars , Petite histoire du pays et de la ville de Guérande des origines à 1789, Guérande, Librairie Saint-Aubin, 1922 ; Michel Le Mené, Marie-Hélène Santrot, Cahiers des plaintes et doléances de Loire-Atlantique 1789, Nantes, Conseil général de LoireAtlantique, 1989 ; Henri de Berranger, Guide des archives départementales de la Loire-Atlantique, 2 vol., Nantes, Archives départementales de Loire-Atlantique, 1962-1964.

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Une paroisse pas si anonyme que cela malgré tout à laquelle Jean Ogée dans son Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne consacra une longue notice en insistant tout particulièrement sur ses racines immémoriales3. Toutefois, à la veille de la Révolution, la ville de Saint-Nazaire est loin d’avoir entamée sa mue, ni même d’en avoir posé ne serait-ce que les fondements. Elle alla pourtant crescendo à partir de la seconde moitié du xixe siècle et fut même synonyme d’une véritable révolution démographique, plutôt originale même dans le contexte français, qui se caractérise par un freinage de la croissance à partir de 1790, tendant même à s’accentuer à partir de 18264. 3 - Jean Ogée, Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne, tome 4, Nantes, Vatar, 1778, pp. 345349. 4 - Jean-Claude Gégot, La population française au XIXe siècle, Gap, OPHRYS (coll. « Synthèse Σ Histoire »), 1989, p 13-18.


Dans l’ancien Saint-Nazaire, vue sur la vieille église, vers 1880. (Éditeur : François Chapeau, Nantes - Collection de l’auteur)

Si au début de la période contemporaine, tout du moins au sens chronologique du terme, l’intérêt pour le fait démographique n’est pas neuf ; c’est bien avec la Révolution qu’ont été définis voire parfois simplement consolidés, outils et méthodes pour accéder à une connaissance de plus en plus fine de la population française. En effet à partir de 1789, la démographie entra dans une ère qualifiée ultérieurement par Jacques Dupaquier de « protostatistique » qui s’acheva en 1851 sous le Second Empire avec la réorganisation du Bureau de la Statistique générale de la France5. D’après Jean-Claude Gegot, la période révolutionnaire ouvre même une ère de « recensement permanent » dont la France n’est, en définitive, jamais véritablement sortie6. 5 - Jacques Dupaquier (dir.), Histoire de la population française, t. 3, De 1789 à 1914, Paris, Presses Universitaires de France (coll. « Quadrige »), 1995, p.16-19 6 - Jean-Claude Gegot, Op. cit, p 7-11.

Les enquêtes démographiques se succédèrent à un rythme effréné, pour ne pas dire frénétique, la plupart d’ailleurs demeurant inachevées et il n’en subsiste guère aujourd’hui que des épaves archivistiques. De plus, la mise en place d’un État civil centralisé entraina un réel flottement certes temporaire dans l’enregistrement des naissances, des mariages et des sépultures. Bien souvent, les nouveaux officiers municipaux manquaient d’expérience et durent de plus intégrer les subtilités d’un calendrier révolutionnaire venant bouleverser des siècles d’habitudes grégoriennes. C’est la raison pour laquelle dans un premier temps, confusion et désorganisation semblèrent dominer. Cependant, dès 1798, est créé le Bureau de Statistique afin de normaliser et centraliser l’information. Sa mise en place fut néanmoins très progressive et ce n’est qu’en 1805 que ses attributions furent définies.

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- HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 — 63


Saint-Nazaire

au pluriel Bernard Tabary

Tu habites à Saint-Nazaire ou du moins dans la Presqu’île Guérandaise et tu es donc nazairien, de fait ou de cœur. Tu sais que ta petite ville de 70 000 habitants est la quasi-capitale mondiale de la construction des bateaux de croisière – comme elle a été, dans un passé pas si lointain, championne du monde des super-pétroliers, avec les monstrueux 550 000 tonnes.

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Saint-Nazaire, ville unique ? Oui, d’une certaine façon ; mais pas du tout, d’une autre. Il existe en France beaucoup de communes qui portent le même nom que la nôtre – plus d’une dizaine, mais oui ! Et je vais te les faire découvrir. Ouvre grand tes mirettes et ton ouïe...

Page de gauche Queen Mary II, le plus grand des transatlantiques, 345 m. Retour triomphal au port de construction, le 24 juin 2017. (Photo Bernard Tabary)

Qui était Saint Nazaire ?

Premier siècle, règne de Néron. Nazaire est le fils d’un haut gradé de l’armée romaine. Nazaire et sa mère se convertissent au christianisme – elle est restée dans la mémoire chrétienne comme Sainte Pertétue. Nazaire le néophyte et son disciple-ami Celse veulent propager la nouvelle foi dans tout l’Empire romain, particulièrement en Gaule transalpine (de notre côté des Alpes) et même en Gaule belge – ils montent jusqu’à Trèves (actuellement, Trier, en Allemagne), sur la Moselle. Ils se heurtent aux autorités, mais s’échappent. Ils se font finalement arrêter à Milan (Gaule cisalpine – côté italien) où on leur coupe la tête : c’est le supplice réservé aux citoyens romains. Nazaire et Celse, martyrs, resteront liés et donneront leurs noms à bon nombre d’églises. Un autre binôme, martyrisé aussi à Milan, à la même époque – autour de l’an 56 – Gervais et Protais, donnera son nom à une multitude d’autres églises : au minimum plus de cinquante répertoriées rien qu’en France. En ce qui concerne saint Nazaire le martyr, c’est l’évêque de Milan, Saint Ambroise, qui lance son culte au quatrième siècle. L’évêque s’occupe de retrouver ses reliques et les conserve dans une église qu’il fait construire, la basilique San Nazaro – celle-ci existe toujours, sous le vocable de San Nazaro Maggiore – majeur, le grand ; mais il ne reste pratiquement rien du bâtiment original, qui a brûlé en l’an 1075 et qui a été immédiatement réédifié en style roman.

N

otre Saint-Nazaire, ville des records... Dans la série des Oasis – les plus grands bateaux de croisière qui soient, 362 m de long –, les n° 3 et n° 4 ont été réalisés chez nous, comme le seront très bientôt (2021 et 2023) les n° 5 et n° 6. La construction navale, inaugurée tardivement, après le milieu du XIXe siècle, a fait la renommée universelle de Saint-Nazaire.

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- HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 — 69

Ci-dessus Saint-Ambroise, évêque de Milan. (Giovanni di Paolo [1403–1482] Metropolitan Museum of Art)

Ci-dessous Église San Nazaro Maggiore, à Milan, état actuel. (Photo A ntv - CC BY-SA 3.0)


74 — HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 - juillet 2020


Les Lera

Une famille de diplomates nazairiens venus du Mexique Loup1

On l’oublie trop souvent, Saint-Nazaire, au temps où il était encore un port de voyage et de commerce, était une ville d’une telle importance qu’elle était le siège de plusieurs consulats. Dès 1857 la Prusse et le royaume de Suède-et-Norvège, eurent leurs représentants, rejoints par l’Espagne en 1859, etc.

E

n 1939, il restait encore dix-neuf représentations consulaires en notre cité, et parmi celle-ci, le Mexique était la seule nation à avoir conservé en permanence son consulat depuis son ouverture en 1866. Parmi les différents envoyés ayant reçu leur exequatur, deux ont la particularité d’être père et fils : Carlo Americo Lera Macías, et Ramón Lera Borrell. Le nom de Lera 2 résonne encore pour les Nazairiens, et n’est pas inconnu de l’ensemble des lecteurs de cette revue ; ils l’ont lu dans le numéro précédent, dans l’article consacré à la femme de lettres nazairienne Marc Hélys. En effet, Marc Hélys, en réalité Marie-Hortense Héliard, fut la seconde épouse de Carlos Américo. Après avoir fait le portrait de cette étonnante personnalité, parlons un peu plus des Lera, famille qui se consacra à la diplomatie, et qui reste attachée à Saint-Nazaire3. 1

Carlos Americo Lera Macías Carlos Americo Lera Macías naquit espagnol à La Havane le 4 novembre 1855, à l’époque ou Cuba était encore colonie esclavagiste4 de la reine Isabelle II. Ses parents, Fernando Lera et Elvira Macías, originaires de Valladolid, ne nous sont connus que de nom, et semblent être arrivés à Cuba peu avant sa naissance5. Son enfance est un mystère, la lecture des courriers de ses enfants nous laisse penser qu’il n’en avait jamais parlé. Carlos Americo, père doux et aimant, ami fidèle et dévoué, était un homme secret, à la vie intérieure forte ; un homme charismatique et intimidant, auquel on n’osait poser de question et qui pouvait se montrer abrupte si cela touchait à son intimité. Jeune, c’était un homme brun, mince, mesurant 1 m 60, aux yeux myosotis, et pourvu d’un magnétisme propre aux créoles hidalgos, qualité qui, même âgé, blanchi et dégarni, ne laissait pas les femmes indifférentes, et maintenait une distance de respect chez les hommes, persuadés d’avoir à faire à un grand seigneur de la race des guépards dépeinte par Lampadousa6.

1 - Loup est l’auteur du blog des Chroniques de Saint-Nazaire : http://saint-nazaire.hautetfort.com/

4 - Ce n’est qu’en 1886 qu’il y fut supprimé.

2 - Précisons ici, pour les non-hispanophones, que le nom se prononce « léra », en roulant le R.

5 - Lettre de Marguerite Lera, baronne Eynard, en date du 5 mai 1977, et recherches généalogiques personnelles.

3 - Cet article a été possible grâce à l’amabilité et aux minutieuses recherches en leurs archives et souvenirs, de mesdames Annette Lera et Joëlle Bontempelli, ainsi que de monsieur Adalbert Fontana, qui nous ont fait copie de nombreux document officiels et intimes, et à qui nous adressons encore une fois nos remerciements.

6 - Exemple de son éducation aristocratique : pour choisir un cuisinier, il lui faisait réaliser une omelette, partant du principe que celui qui sait sublimer ce qui est en soit le plus simple, mérite son emploi. En comparaison, le prince Ivan Nikolaïevitch Odoevsky Maslov faisait réaliser une salade de pommes de terre.

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- HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 — 75

Page de gauche Carlos Americo Lera Macias en uniforme d’ambassadeur, portant, à sa droite, la médaille commé­ morative du traité commercial de 1909, la plaque de l’Ordre de Sainte-Anne, la plaque de l’Ordre de la Légion d’honneur ; en travers, le cordon de l’Ordre de Sainte-Anne ; à sa gauche : la croix d’officier de l’Ordre de la Légion d’honneur, la plaque de l’Ordre du Soleil Levant, la plaque de l’Ordre du Double Dragon. (Collection famille Lera)


À l’âge de 20 ans, Constant,

mort pour la France

Marcel Lucas

À treize ans, le certificat d’études en poche, le souci de Constant, aîné de la famille, était de trouver du travail. Suivre des études plus longues ne correspondait pas à la situation familiale de ses parents. Bien qu’il en fût capable, son désir était d’apporter une aide au foyer plutôt qu’une charge.

S

on père, vieillissant, accidenté du travail, ne touchait qu’une petite pension bien insuffisante. Son employeur, compréhensif, patron d’une importante scierie, avait ouvert dans l’espace de son vaste chantier un débit de boisson sur le comptoir, complété d’une épicerie-mercerie, pour les produits les plus courants.

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Ce petit commerce était tenu par Angélina, la maman de Constant. Une Sorte d’économat, cet endroit, un peu confidentiel, était fréquenté, surtout, par le personnel et quelques proches voisins.


La famille Gicquel, à Saint-Nazaire Constant Gicquel, le père Angélina Bernard, la mère. Enfants :

Constant Amélie Raymond Georges Maurice Georgette

né le 21 janvier 1896, tué à l’ennemi, le 9 décembre 1916 née le 14 novembre 1898, décédée, le 5 juillet 1989 né le 24 décembre 1900, décédé, le 6 janvier 1901 né le 1er avril 1905, décédé, en 1912 né le 4 juillet 1909, tué à l’ennemi, le 14 mai 1940 née le 27 octobre 1913, décédée, le 11 mai 2002

On notera, quand même, que le patron de la scierie, F. Gasnier, aussi maire de Saint-Nazaire, avait possibilité et facilité pour établir ce commerce, un peu pour se dédouaner, mais aussi pour rendre service à la famille de son ancien employé. Le père de Constant avait été scieur de long pendant de nombreuses années et s’était blessé gravement à la tête, suite à l’éclatement d’une meule émeri. Son activité professionnelle stoppée, il ne pouvait que s’occuper, à pas lents, de son jardin. Connaissant les difficultés de ses parents, Constant se sentait responsable et avait ambition de se rendre utile et de réussir. C’est par un travail scolaire sérieux que l’on se donne les premières chances. D’un naturel curieux, l’école n’était pas une galère, mais l’endroit pour apprendre à connaître. Tout ou presque l’intéressait et son certificat d’études primaires fut une formalité. Élevé dans le culte de la religion catholique, il passa aussi avec succès le certificat confirmant ses connaissances religieuses. Avec une taille d’un mètre soixante-cinq, qu’il aurait aimée supérieure, il avait à cœur de compenser cela par une grande détermination. Peutêtre un peu court, mais bien planté et conscient d’une force physique bien réelle. Dans sa paroisse, Saint-Gohard, il pratiquait les animations religieuses, le plein air et les sports dans une franche camaraderie. À dix-sept ans, après la gymnastique au patronage Saint-Joseph, il s’intéressa à un nouveau sport. La boxe anglaise, à la mode, succède à la « savate », ou boxe française. Ses activités sportives s’exercèrent au sein d’une société, l’Étoile1, créée, en 1909, par le patronage Saint-Joseph. Bien encadré par les éducateurs de cette nouvelle discipline, il prit beaucoup de goût, progressa et considéra après quelques mois qu’il se sentait capable d’enseigner ce sport.

Ne doutant de rien, il se déclara « Professeur de boxe anglaise » et disposé à donner des cours dans un local près de chez lui.

Ci-contre Photo du jeune Constant Gicquel, boxeur, avec, au-dessus, sa carte de visite de « professeur de boxe anglaise ». Ci-dessus Constant en premier communiant. Page de gauche Constant en uniforme, durant la campagne 1914-1915.

1 - 14 membres de l’Étoile sont tombés au champ d’honneur, durant la Grande Guerre, dont Constant Gicquel. Voir Histoire & Patrimoine, hors-série n° 11, partie ½, mai 2018, page 88, 100 ans de sport à Saint-Nazaire, de Maxence Ponroy.

(Collection Marcel Lucas)

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- HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 — 93


Un mariage ducal à Saillé Malou et Françoise Roussel Pourquoi et comment le petit village de Saillé en Guérande s’est-il trouvé mêlé, en 1386, à un épisode de la succession de Bretagne, guerre secondaire de la très longue Guerre de Cent Ans ?

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n 1341, le Duc Jean III de Bretagne décède sans enfant. Deux prétendants se manifestent : Jeanne de Penthièvre, nièce de Jean III et Jean de Montfort, demi-frère de Jean III. Jean de Montfort est marié à Jeanne de Flandre (1295-1374), dite Jeanne la Flamme et meurt en 1345 en pleine guerre de succession. Il est inhumé au couvent des dominicains puis ses restes sont déposés dans l’église Sainte-Croix de Quimperlé (29). Sous son règne, Guérande est mise à sac en 1342 par les troupes de Penthièvre. Jean III pense alors qu’il est urgent d’en assurer la défense : on améliore les murailles, on creuse les fossés.

Au nom de son fils Jean (1339-1399) qui n’a que six ans, Jeanne la Flamme, héroïne d’Hennebont, poursuit la guerre avec courage et succès. La Haute-Bretagne soutient la cause de Jeanne de Penthièvre et de son époux Charles de Blois, neveu du Roi de France, tandis que la Bretagne bretonnante y compris la Presqu’île Guérandaise, soutient Jean de Montfort dont c’est le seul héritage breton, d’après un acte du 26 décembre 1332, citant plus précisément les possessions des îles du Croisic, de Batz et de Saillé.

La bataille d’Auray

Jean de Montfort épouse successivement Marie d’Angleterre (1344-1362), fille d’Édouard III d’Angleterre dit le Prince Noir et de Philippa de Hainaut, puis en seconde noce, en 1366, Jeanne Holland (1350-1384), fille de Thomas Holland et de Jeanne de Kent. Jeanne Holland est enterrée en l’église de Prières, à Billiers (56). En 1364, Jean assiège Auray quand il apprend que Charles de Blois va l’attaquer. Aidé par les renforts envoyés par le Prince Noir, il écrase l’armée adverse. Son rival Charles de Blois est tué par un Guérandais, Jean de Lesnérac. Il négocie avec Jeanne de Penthièvre, veuve de Charles de Blois, le premier traité de Guérande signé le 12 avril 1365, par lequel elle le reconnait comme seul Duc de Bretagne sous le nom de Jean IV. Mais la noblesse bretonne lui reproche ses alliances avec les Anglais. Il se brouille avec Olivier de Clisson et Olivier de Mauny. En mars 1373, Bertrand du Guesclin entre en Bretagne avec les Français. Jean IV s’enfuit en Angleterre.

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Ci-dessus Ancienne église de Saillé. (Dessin de Madame Fouraud, vers 1850 - [Extraite du livre De Poudre, de Gloire et de Misère, Fernand Guériff, p 107, Éditions Bellanger, Nantes 1980])

Ci-contre Tombeau de Jeanne Holland, dans l’abbaye de Prières, à Billiers (56). (Photo Malou Roussel)

Page de gauche Tableau, dans l’église de Saillé, représentant le mariage de Jean IV et de Jeanne de Navarre, le 11 septembre 1386. (Anonyme, XVIIe siècle Photo Malou Roussel)


Les Traicts

Un des traits géographiques majeurs du paysage de l’Estuaire Claude Thoméré

L’Estuaire est un pays d’eaux, de seils et de coulées. Dans les laisses de mer se retrouvent des choses gaives ; et des traicts marquent le passage des marées. Pour bien comprendre ce dernier mot, il faudra élargir un peu notre rayon d’observation et passer au-delà de l’île Dumet en face de Piriac, aux îles de Houat et Hoëdic ainsi que sur la presqu’île de Sarzeau qui jouxte la « petite mer » du golfe du Morbihan.



Le bois de Lanséria

et son lotissement bientôt centenaire… Jocelyne Le Borgne La création du « Lotissement des sables » ou « Lotissement du bois de Lanséria » à Mesquer est contenue dans l’article 1 du décret impérial1 du 14 décembre 1810 : « Dans les départements maritimes, il sera pris des mesures pour l’ensemencement, la plantation et la culture des végétaux reconnus les plus favorables à la fixation des dunes ». 1 - Recueil des circulaires du Ministère de l’Intérieur, tome 2, P. 244.

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P

lus d’un demi-siècle plus tôt, deux arrêts de la cour de Rennes avaient déjà interdit aux habitants « d’arra­ cher les chiendents et joncs qui croissent sous les sables dans les paroisses d’Escoublac… et Mesquer 1» pour en faire des « balais dont ils tirent très peu de chose… ». Ces arrêt et décret ont connu, tout au long du XIXe siècle, à Mesquer bien des « aléas » de mise en œuvre !

Un peu d’histoire…

Des aveux des XVIIe et XVIIIe siècles rendus par les acquéreurs qui se sont succédés à la tête de la Seigneurie de Beaulieu évoquent cette immense parcelle envahie régulièrement par les sables poussés par les vents marins. Il y est question de deux « tenements », le premier 1 - Gazette du Commerce, n° 45, année 1771.

« anciennement nommé pré de la maison de Beaulieu, à présent le loc étant en pâture et falaise contenante 607 sillons » et le second « un autre grand tenement étant actuellement sous falaises et sable… contenant 675 sillons ». Ces 1282 sillons représentent environ 12 hectares 87 de la superficie actuelle du bois de Lanséria. Dominique Larrey, ancien notaire royal est le dernier acquéreur de Beaulieu, avant la Révolution et ses biens transmis à ses héritiers n’ont pas fait partie des adjudications. Le 13 brumaire an VI (3 novembre 1797), sa fille « la citoyenne Josèphe-Marie Larrey… pour elle et pour les siens, vend, cède et transporte au citoyen Pierre Perraud… les maisons et terres de Beaulieu, à l’exception des marais salants… ». Pierre Perraud, qui fut le premier maire de Mesquer, acquiert entre Sorloch et l’actuelle route de MesquerPiriac, pour un montant de 26 400 livres, un ensemble de terres d’environ 30 hectares.

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Vue panoramique de la plage de Lanséria. (Photo Tanguy Sénéchal)


L’HISTOIRE & L’IMAGINAIRE

La prise de la bastide Ghislaine Deltombe de Feraudy La nouvelle publiée aujourd’hui a obtenu le premier prix du concours organisé, en 2019, par le Salon du livre de Kercabellec, qui se tient depuis onze ans, chaque été, à Mesquer (Loire Atlantique). Après « Au bonheur de l’ogre », publié l’an dernier dans notre revue, Ghislaine Deltombe de Feraudy, Mesquéraise de cœur, nous rappelle à sa façon que les animations d’été à Mesquer rassemblent, depuis plus d’un siècle, estivants et Mesquérais autour de feux d’artifices inoubliables ! Les joyeuses illustrations de ce texte sont l’œuvre de Valérie Baudel, fille de l’auteur.

D

is, papa. Qu’est-ce que c’est une bastide ? demande Léon. Une bastide, répète Alphonse… C’est la deuxième année que la famille Daudet vient en juillet à Piriac. Les aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon se vendent plutôt bien. Elles plaisent à un public de plus en plus large. L’écrivain poursuit la publication en feuilleton de Jack dans Le Moniteur universel. Il a bien gagné d’être en vacances entouré des siens. Il est tombé sous le charme de ce village aux rues étroites, sombres, qui lui rappellent les venelles algériennes. Il s’étonne sans cesse d’avoir découvert ce petit bourg breton, tout autant marin que pastoral. D’un côté, l’océan, immense, infini, à l’odeur fraîche et salée. De l’autre, des champs de blé, de vigne ou de luzerne. Tous pêcheurs ou laboureurs, les gens d’ici semblent bien peu engageants. Une bastide, répond-t-il à son fils, de par chez nous, du côté de Nîmes, c’est une grosse ferme qui se prendrait pour un petit château. Pourquoi cette question, Léon ? Parce qu’à l’hôtel des Bains, Marie-Jeanne et Soizic, à la cuisine, parlaient tout bas de la prise de la bastide. Daudet regarde son aîné avec amusement. Il sourit de sa méprise. La prise de la Bastille, mon grand, reprend le père en appuyant sur la dernière syllabe. Par le peuple de Paris. Souviens-toi, c’est le début de la Révolution. Est-ce que c’est triste ? ajoute l’enfant. Cela dépend pour qui … Je crois qu’ici cette date passe à la trappe. Les Bretons n’appré­ cient pas la fête nationale. Ils en pincent encore un peu pour le roi.

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Il est vrai que les payses boudent l’anniversaire de la chute de la monarchie absolue. Ils préfèrent les processions religieuses aux défilés militaires. En l’an de grâce 1875, le 14 juillet tombe un mercredi. Dans dix jours exactement. Et si nous préparions une petite fête en cachette ? reprend Daudet. Nous tairons qu’il s’agit de mettre la nation à l’honneur. Nous trouverons bien un prétexte. Quelle bonne idée, père ! C’est un secret, n’est-ce pas ? Je ne dirai rien, mais comment allons-nous faire ? D’abord, nous éloigner de Piriac. Le port a des oreilles. Il va de soi que nous oublions la parade. Les zouaves et les fantassins ne courent pas les chemins bretons. À Paris, il y a un feu d’artifice. C’est féérique ces fusées qui éclatent dans le ciel et colorent la nuit. C’est cela qu’il nous faut prévoir. C’est tellement magique. Un peu de magie ne fait de mal à personne. Comme l’illusionniste que nous avions vu au théâtre Robert-Houdin ? questionne Léon radieux. Beaucoup mieux, le rassure son père. Il nous faut tout d’abord dénicher un endroit isolé sans trop de maisons autour. Je crois qu’il existe non loin d’ici un coin aux huîtres merveilleuses. Un coin au bout du monde. Ce serait idéal pour notre fest-noz surprise. Enquêtons, mon enfant. Enquêtons sans en avoir l’air… Aujourd’hui, dimanche, l’auteur des Lettres de mon moulin sait que la jeunesse se réunit à la montée de la lune, au bord du quai. Les jeunes gens dansent de vieilles rondes bretonnes et chantent en chœur.


Daudet n’est pas provençal pour rien. Il se lie facilement. Il se rapproche d’un homme assis sur un banc de pierre. C’est un pêcheur qui connaît la côte comme sa poche. Tandis que les cornettes blanches virevoltent, que le vent de la mer emporte la moitié des paroles de la chanson, le romancier discute avec le marin. C’est bien beau ces jeunes filles aux coiffes à ailettes qui tournoient. Dites-moi, vous qui vivez la moitié du temps sur l’eau, vous connaissez certainement sur ce littoral un lieu éloigné du village, sans trop de voisinage, plat de préférence, aussi vaste que la plage Saint Michel, facile d’accès… Boudiou ! rétorque le loup de mer. Pourquoi les Parisiens cherchent-ils toujours le mouton à cinq pattes ? Attendez donc. Laissez-moi réfléchir. Le penseur se tait. Il suit de l’œil les jouvencelles qui, telle une bande de mouettes, sautillent, pivotent et tournicotent. Allez, monsieur le conteur, je vous emmène demain au traict de Merquel. Est-ce là que l’on peut gober des huîtres, « ce hasard, cet éclair, qui passe avec les mois en R », comme le récite un cuisinier-poète de mes amis ? Exactement. C’est le lieu parfait pour un solitaire ! Oh, je ne suis pas aussi solitaire que maître Cornille, mon vieux meunier mystérieux et malheureux ! Tiens, vous qui aimez les moulins ! Mesquer en compte presque autant que les jours de la semaine. Mais revenons à vos moutons. Le traict de Merquel, c’est à moins de deux lieues d’ici. Pas plus. Avec de bonnes jambes, on y arrive par la côte. À marée basse, une paire d’heures suffit. Par la route, vous suivez le chemin de l’Évêque qui vous mène à Mesquer. Ensuite, il faut bifurquer vers le port. Par des petits sentiers qui longent les marais salants. C’est désert, mais c’est plus long. Pour sûr que la voie de la mer est la plus rapide. Puisque vous me le proposez, j’accepte sans hésiter, décide Daudet. Le lendemain, le serviable marin charge à bord de son bateau de pêche la drôle de famille. Julia et Léon s’assoient au fond. Alphonse se tient debout. Il observe le paysage sans en perdre une miette. Il essaie d’imaginer comment préparer la soirée du 14 juillet sans bouleverser ceux qui les accueillent. La traversée entre Piriac et le port de Kercabellec ménage de belles surprises. La pointe de Port-au-loup, les rochers qui dégringolent dans l’océan, le ciel chiffonné, les genêts battus par le vent, la lande piquetée de l’or des

ajoncs. On dirait une toile d’Eugène Boudin. Le pêcheur tire des bords afin d’éviter des navires chargés de sel. Il accoste la jetée sans déranger grand monde. Comme endroit isolé on ne peut rêver mieux. Au loin, de l’eau jusqu’à mi-jambe, un huîtrier s’affaire. Daudet, talonné par son épouse et son fiston, hèle le gaillard qui les regarde sans bouger. Bonjour, mon brave ! crie l’homme de lettres. Figurez-vous que nous cherchons un endroit pour… organiser une kermesse. Une vente de charité ? braille l’ostréiculteur. Pareil que monsieur le curé par l’an passé ? Un peu oui. Une sorte de fête de bienfaisance. Vous voyez ce que je veux dire ? Il y aurait des jeux. La course en sac, les boules lyonnaises, la galoche, les quilles, que sais-je encore ! On boirait du cidre. On mangerait des galettes.

La bombarde et le biniou accompagneraient des chants marins. On pourrait danser aussi. Peut-être dresserait-on un mât de cocagne… Le bougre dodeline de la tête, opine du bonnet. Daudet invente. Daudet séduit. Il tait cependant le clou de la fête. Le feu d’artifice que les autochtones considèreraient sans doute comme œuvre du diable. Ce sera son tour de passe-passe. Il mettra Marie-Jeanne et Soizic dans le coup. Elles sont jeunes. Elles sont vives. Elles aiment forcément s’amuser. Regrettent-elles que la fête nationale soit rejetée comme menu fretin du filet du sardinier ? Il tâtera le terrain aussitôt rentré à l’hôtel des Bains.

juillet 2020

- HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 — 131


Bannière Saint-Pierre-ès-Liens de Piriac Bannière pérenne de l’île Dumet Michel Barbot Édifiée de 1766 à 1787 sur les bases de 4 anciennes églises, l’église de Piriacsur-Mer fut placée sous le double patronage de Saint-Pierre-ès-Liens et de Saint Clair, évangélisateur suivant la tradition, de la presqu’île de Guérande et premier évêque de Nantes.

L

e visiteur pénétrant dans l’édifice peut admirer au fil des années, dans le chœur ou dans le transept, deux bannières paroissiales. La bannière de saint Pierre-ès-Liens, objet de cette étude, rappelle en son avers, la dédicace de l’église.

134 — HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 - juillet 2020

Lorsque Pierre reconnut Jésus comme le Christ, celui-ci lui dit : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église, les Portes de l’Hadès ne tiendront pas contre elle. Je te donnerai les clefs du Royaume des Cieux : quoi que tu lies sur la terre, ce sera tenu dans les cieux pour lié, quoi que tu délies sur la terre, ce sera tenu dans les cieux pour délié. » (Évangile


de Matthieu, chapitre 16, versets 18 à 19). Cet évènement fondateur de l’Église de Pierre se voit associé par sa symbolique à cet autre épisode du Nouveau Testament qui donnera naissance à la saint Pierre-ès-Liens. (Actes des Apôtres, chapitre 12 versets 1 à 11). Pierre, emprisonné dans les geôles du roi Hérode, dormait, lié par deux chaînes et gardé par deux soldats, lorsque soudain, il vit apparaître un ange et le cachot fut inondé de lumière. L’ange frappa Pierre au côté et le fit lever : ‘’Debout ! Vite !’’ dit-il. Et les chaînes lui tombèrent des mains. L’ange lui dit alors : ‘’Mets ta ceinture et chausse tes sandales’’ ; ce qu’il fit. Il lui dit encore : ‘’Jette ton manteau sur tes épaules et suis-moi.’’ Ainsi Pierre retrouva la liberté. La bannière de Piriac, présente en son avers, un saint Pierre-ès-Liens sans auréole (contrairement au revers) enchaîné à une pierre noire. Saint Pierre, l’apôtre « pêcheur d’hommes », fait corps avec la Pierre : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église. » Madame Christiane Guillou dans sa thèse de doctorat en histoire1, apporte d’importantes informations au sujet des bannières de saint Pierre dont la couleur bleue ou rouge, désigne des confesseurs et des martyrs : 1 - « Les bannières religieuses. Une approche du Catholicisme en Bas-Breton. 1805 – 2012 » (These-2013-SHS-HistoireGuillou_Christiane.pdf) :

« L’autorisation de prendre la bannière de saint Pierre ne peut être accordée par le Pape que pour une cause juste, c’est-à-dire la paix de Dieu. » Les bannières consacrées à saint Pierre prennent le nom de l’apôtre : « Les Pierre répondent à deux modèles, Portier du ciel avec les clés, ou Premier Pape. À cette dernière appellation répond la seule bannière de Locmélar. Pour être complet, il faut ajouter quelques Pierre en compagnie, où le premier prélat est représenté avec un autre vénérable local. » Autre catégorie de Pierre assurément beaucoup plus rare que celle du Portier du ciel, il s’agit du Pierre ès-Liens (ou Pierre aux-Liens). Pour approcher le message de la bannière piriacaise, il nous faut tourner nos regards vers la réplique de la célèbre mosaïque du Triclinium Leoninum figurant jadis dans l’abside de la salle à manger du pape Léon III de l’ancien palais de Latran. Elle commémore notamment le couronnement de Charlemagne Empereur d’Occident, le 25 décembre de l’an 800 par ce même pape. Cette réplique, œuvre du peintre Pier Leone Ghezzi (1674-1755) suscita des commentaires mitigés quant à la fidélité de cette reproduction. Le peintre dut composer en partie avec son imagination lorsqu’il fallut reproduire les inscriptions majoritairement disparues.

Ci-contre Vue générale de la réplique de la célèbre mosaïque du Triclinium Leoninum,sur le flanc de la basilique San Salvatore delle Scala Santa, à Rome. (Pier Leone Ghezzi [1674-1755] Photo LPLT - CC BY-SA 3.0)

Page de gauche, en haut L’église de Piriac, au début du XXe siècle. (Phototypie Vassellier, Nantes)

Page de gauche, en bas Bannière saint Pierreès-Liens, église de Piriac. (Photo Christian Lelièvre)


Journal d’un aumônier breton - 1850 - 28 partie e

Christiane Marchocki Notre récent confinement, dû à une épidémie, nous laisse mieux imaginer la vie que connaissaient nos ancêtres. Lorsqu’ils voyageaient, ils étaient exilés. Durant des mois, sans contacts écrits ou visuels, seuls moyens de communication qui existaient à cette époque, ils ne pouvaient donner ni recevoir un signe de vie de leurs proches et amis..

L Vue de l’île de Gorée. (Photo Théo Vansteenkeste CC BY 4.0)

’émotion suscitée par l’arrivée du courrier était intense : espoir et appréhension. Il était alors impossible de répondre dans l’immédiat. Tout était suspendu. Aucune communion possible. L’incertitude régnait. De plus, ils ne disposaient d’aucun moyen efficace pour lutter contre les maladies, d’aucun confort, qui nous parait maintenant aller de soi. L’anesthésie n’existait pas. C’était une insécurité totale, permanente. Tout ceci leur semblait inévitable, naturel. Ce qui nous parait normal leur aurait semblé relever d’une sorte de magie. Notre aumônier ne fait pas une croisière de rêve. Voyons la suite.

148 — HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 - juillet 2020

21 décembre 1850

Nos malades sont un peu mieux. Nous sauverons le plus jeune et le plus fort. Nous conserverons le vieux jusqu’à Gorée, dont une trentaine de lieues nous séparent. Nous ne pourrons probablement pas le conduire à l’hôpital. S’il vit encore, il sera trop faible pour être transporté. Enfin, nous allons savoir demain comment va le monde, si l’on conserve encore de nous quelque souvenir. Puissent toutes leurs nouvelles être bonnes. Puisse cette journée de demain, après laquelle nous soupirons tous si vivement, ne pas être pour nous une journée de chagrin et de peine ! Nous avons parfois bien de la peine à vivre au jour le jour. Que sera-ce donc pour nous


qu’un jour où toutes les joies, mais aussi toutes les peines, devaient se réaliser ? Un officier, à qui j’en parlais ce matin, me disait que ses appréhensions s’étaient nettement accrues au fur et à mesure que nous approchions de Gorée, qu’il s’en retournerait presque volontiers dans le sud. Pour moi, j’ai confiance comme lui. J’appréhende moins. Je ne consentirais pour rien au monde à tourner le dos. On aime encore la vie, même lorsqu’on ne la sent que par la souffrance qu’elle nous apporte. Et ce n’est pas vivre que d’être dans l’état où nous sommes. Cette suspension absolue de la vie est peu supportable.

22 décembre 1850

Mes pressentiments se sont réalisés. Je viens de recevoir la nouvelle de la mort de ma bellesœur, bonne et excellente mère de famille, pleine de cœur. Dieu l’a appelée à lui. Il remplira le vide qu’elle laisse après elle dans sa famille. Il donnera à mon frère le calme, la résignation, la prudence qui lui seront désormais nécessaires. Il avait partagé le fardeau jusqu’ici, il va être obligé de le supporter tout entier. Mon filleul, encore en bas âge, à élever, à former, quelle tâche ! pour un homme déjà fatigué, à moins que mes amis m’apprennent que la providence y a pourvu ; il peut en lui-même trouver plus de raisonnement qu’on le supposait, et que quelques amis lui viennent en aide. Dieu nous apporte l’espérance et la consolation à côté de la souffrance et de la douleur. Je n’ai pas pu dire la messe aujourd’hui. Nous devions arriver au mouillage pour 11 heures. Presque tous sont dans la joie, leurs paquets étaient présents et bien pourvus. Moi seul, je crains, dans l’état-major, ai reçu de mauvaises nouvelles.

23 décembre 1850

Merci mille fois à tous ceux qui ont eu la bonté de se souvenir du pauvre exilé d’Afrique et lui envoyer quelques lignes d’affection. Elles ont été pour lui d’une valeur inappréciable.

de Noël. C’était un prétexte pour faire un de ces soupers qu’on regrette. L’esprit religieux et le cœur n’ont plus d’inspiration, mais tout leur appétit grossier a pris la haute main. J’irai ce soir à Dakar me délasser, en famille, avec tous mes amis, et assister, dans une église, à une réunion chrétienne.

26,27,28 décembre 1850

J’arrive de Dakar, où j’ai passé presque trois jours dans le calme et la paix. J’y ai trouvé la plupart de ces Messieurs, ils avaient tous besoin, l’évêque et le clergé, de se revoir, après une si longue séparation. Un autre motif d’ailleurs ; ils avaient été pillés à la Saint Joseph. Quelque brigand de l’intérieur, difficile à atteindre et par conséquent à réprimer. Leurs établissements sont sur la côte, on peut les saisir et brûler, sous un prétexte de souveraineté. Tout un village est venu piller et chasser les missionnaires. Après leur avoir pris tout ce qu’ils possédaient. Ils ont été tous fort maltraités, par l’hivernage qui a été long et meurtrier. Cette année, deux sont morts, un prêtre et un frère. Tous ont eu la fièvre et en gardant les traces, ils sont jaunes et maigres et se tiennent à peine. Ce serait un spectacle bien triste si leur gaieté, leur bonne humeur, leur air de joie et de contentement ne faisait oublier l’extérieur et s’il n’y avait dans leur âme autre chose que ce que leurs yeux découvrent au-dehors. Nous avons suivi tout leur office avec toute la pompe que permettaient leurs ressources et ce n’était vraiment pas mal. J’ai tenu un harmonium, que Mgr a acheté, à Sierra Leone, pour accompagner le plein chant et j’ai chanté la messe le jour de la Saint Jean, une des plus importantes pour la congrégation, en grande cérémonie, avec diacre, et sous diacre, en présence de Monseigneur.

24 décembre 1850

Il m’est impossible de ne rien faire tout le jour. Je monte sur le pont, descends dans ma chambre, sans pouvoir me fixer, m’arrêter nulle part. Mes désirs se sont réveillés plus vifs que jamais. Je ne suis plus ici.

25 décembre 1850

Triste fête de Noël. J’ai cependant dit deux messes. Une à minuit dans ma chambre, en la compagnie des deux docteurs, l’autre, à l’heure ordinaire entre mes deux affûts avec mon appréhension habituelle. On a réveillonné, au carré de l’état-major, d’une manière assez splendide. Il n’y avait aucun souvenir de la nuit

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Célébration de la messe, à Dakar. (L’Illustration, 1855, p 28)


Piroguiers, à Dakar. (Afrique Tourisme)

J’ai visité leur village, en la compagnie de Mr de Régnier et promené dans tous les environs. Ils n’offrent rien de curieux. Il reste encore quelques traces de cultures, la tige du mil dont ils ont coupé les épis. Dans un mois, tout aura disparu, pour ne laisser voir partout qu’une terre argileuse et une poussière insaisissable. J’ai pu, cette fois-ci, contempler à mon aise un énorme serpent que des noirs poursuivaient à coups de pierres, mais qui a pu leur échapper. Je ne me suis pas mêlé à la lutte. Je n’avais pas l’envie de lui faire la moindre blessure. Et je n’avais pas le courage de faire comme quelqu’un qui l’attaquait de près, il était long au moins de cinq pieds, et les noirs criaient à tue-tête, mais se tenaient à distance.

29 décembre 1850

Le temps était dur, la mer houleuse et nous avons eu bien de la misère à atteindre Gorée dans un petit canot léger et monté par quatre rameurs. Nous avons été mouillés. Nous avons eu froid. Oui, froid, non comme nous en hiver en France, mais comme au mois d’octobre dans leurs beaux jours. J’avais été prudent d’emporter avec moi mon burnous, et ça ne m’a pas empêché de prendre un rhume. On m’avait donné, à Dakar, la chambre d’honneur. Le grand vicaire avait eu l’extrême bonté de se déranger pour moi. Ce n’était pas grand-chose. Je n’étais pas suffisamment couvert. Un grand carreau, cassé depuis longtemps, donnait libre passage à une brise extrêmement forte et froide. On avait bien pris la précaution de mettre, en dehors, un grand carton, que la force du vent seule fixait, mais qui, à chaque rafale, se déplaçait, se soulevait, et laissait passer une brise glaciale pour le pays. En arrivant à Gorée, nous avons eu le bonheur de sauver un homme qui, sans nous, très probablement, se fût noyé. Le canot venait de faire les provisions, il était chargé par-dessus bord, la mer était mauvaise et, les hommes placés sur l’avant, un coup de mer brusque, ou un choc quelconque, a fait chanceler un malheureux matelot, qui d’ailleurs était ivre, et l’aura

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jeté à l’eau. On essayait de le repêcher avec les gaffes, mais personne n’osait se mettre à l’eau et, déjà, il coulait, lorsque j’ai pu me mettre en avant, et le faire saisir par les hommes du canot. Mon intention était presque de demander de passer toute la soirée à terre, mais j’avais entendu parler de certaines histoires. Tandis que je faisais ma visite à la supérieure, on est venu lui annoncer que le bâtiment qui venait de mouiller lui apportait la sœur Xavier, qui devait la remplacer. Elle s’y attendait, elle le savait, mais la pauvre femme a été sévèrement impressionnée. Vous comprenez que mon parti a été bientôt pris. Je me suis esquivé pour ne pas me trouver mêlé, même comme confident, à toutes ces misères. J’ai couru au port, où j’ai eu le bonheur de trouver un canot de la frégate, et je suis parti au plus vite. L’aumônier de ce bâtiment, que je connaissais de réputation, est venu me voir à bord de l’Eldorado. Nous avons beaucoup causé de notre position. Il ne faut pas que je me plaigne. Il est mieux que moi parce qu’il a toujours une foule de passagers, il un hôpital toujours rempli, puisqu’il ne visite les colonies que pour emporter les malades. Son navire, proprement dit, lui offre encore moins de satisfaction que le mien. J’ai vu son état-major et il m’a semblé que je n’avais rien à lui envier. Son bâtiment est mal tenu, tout y est sens dessus dessous. Il est plus étroitement logé que moi. Il n’est pas permis d’avoir une taille haute de quatre pieds sans se heurter le front, on n’entre chez lui qu’en rampant, ajoutez à cela que ce navire est vieux et fait eau de toutes parts. Je ne sais si son commandant est religieux et mieux que le mien, rien jusqu’ici ne me le fait penser. Mon confrère est musicien, il a un harmonium et a réussi à former, parmi les officiers, un chœur, que je vais entendre mercredi. Ils exécuteront une messe en musique et c’est moi qui vais la dire, lui devant tenir l’harmonium, comme accompagnateur. Christiane

Marchocki


André Dubreuil

Toujours dans nos souvenirs À la naissance d’André Dubreuil, à Nantes, ce 7 octobre 1964, rien ne laissait présager, pour ce nouveau-né, un destin en Chine. Ses parents enseignants, son père, professeur de physique, sa mère, professeur de mathématique, eurent grand soin de son éducation. Particulièrement doué pour les études, diplômé de lettres classiques à l’université de la Sorbonne, agrégé de grammaire, il fut enseignant dans l’éducation nationale, en France, puis, à l’école française de Pékin. Attiré par la civilisation chinoise, il apprend le chinois, pendant deux ans, à l’université de Pékin. Pour un européen, cette langue, à l’écrit comme à l’oral, est un monde inconnu, étrange, sans repères familiers. Même dépaysement pour un chinois apprenant une langue européenne. Il ne tarde pas à se faire remarquer, en particulier, par une jeune étudiante en français, Xiaoya, sa future épouse. Il travaille continuellement, avec acharnement, il soutient et obtient une thèse de doctorat de chinois. Ce couple, hors du commun, publie des traductions commentées de plusieurs œuvres classiques de grande renommée, en chinois ancien. « André avait des activités commerciales dans la fabrication du mobilier urbain, de panneaux solaires, d’éclairage LED. », nous précise Xiaoya, qui, elle-même, a obtenu une maîtrise de lettres modernes et un diplôme de DESS pour l’administration des entreprises.

André Dubreuil était, à l’APHRN, à la fois le plus jeune et le plus ancien adhérent et membre du conseil. À l’âge de 12 ans il accompagnait, en effet, sa tante et marraine, Denise Dedienne lors de nos sorties culturelles. Une profonde affection les liait. Elle lui a fait connaitre Le Croisic, dès son plus jeune âge. Il a souvent écrit dans notre revue et il nous a, notamment, laissé un index, récapitulant tous les articles parus, par auteur, par thème et par année. André ne brillait pas que sur le plan intellec­ tuel. Il était aussi un sportif accompli : il pratiquait des semi-marathons et participait à des courses cyclistes. On peut rappeler, à son sujet, la citation de Juvénal « mens sana in corpore sano », un esprit sain dans un corps sain. Il attirait la sympathie de tous. L’écouter était captivant. Il ne cherchait, cependant, pas à se faire valoir, à dominer. À son contact, on se sentait un peu plus savant. Enfin, ce portrait ne serait pas complet si on ne rappelait pas son action au sein de la paroisse du Croisic. Répondant à l’appel du prêtre, il faisait partie de Pôle-Air, pour l’accompagnement des personnes à mobilité réduite. Durant les deux dernières années de sa vie, il ne s’est jamais plaint et a toujours cru en la guérison, soutenu par Xiaoya, à ses côtés. Habité par la foi, il s’est éteint en paix, le samedi 8 février 2020. Il laisse, à ceux qui l’ont connu, l’image d’un homme exceptionnel. Christiane Marchocki.

juillet 2020

- HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 — 151


ÇA SE PASSE AUJOURD’HUI

 Sacré Conaro ! Quelques réflexions sur un virus très importun

Bernard Tabary

C

oronavirus… Conarovirus ! Sacré Conaro ! Oui, je sais, le jeu de mot… Rassure-toi, je ne prétends pas en être l’auteur.

Ci-dessus Rendu informatique du virus SARS-CoV-2. (Illustration créée par Centers for Disease Control and Prevention [CDC] - Image en provenance de CDC Public Health Image Library [PHIL])

Je l’ai entendu – c’était au dernier salon littéraire avant le confinement, à Saint-Gervais (Vendée 7-8 mars dernier, déjà on ne se serrait plus la main) –, je l’ai apprécié, je l’ai trouvé très… pertinent. Pas amusant, pas amusant du tout, mais – oui, c’est le mot – pertinent. Il dit bien ce qu’il veut dire. Il dit bien ce que je pense, ce que nous pensons. Mais il est là ! Ce virus est un sacré conaro !

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La paternité du jeu de mot est certainement très collégiale. Je suis à peu près sûr que des milliers de gens (de langue ou de culture française) ont eu l’éclair au moment même où ils ont entendu nommer, pour la première fois, le coronavirus, prénommé ensuite Covid 19.


Ce fléau nous est tombé dessus sans crier gare et nous oblige à nous con-finer, à nous con-claver, à nous con-former, à nous con-signer dans nos maisons devenues boites de con-serve, pour éviter la con-tagion. Ce virus est un sacré emmerdeur.

Est-il capable de migrer au-delà, à travers l’indicible vide intersidéral, vers d’autres planètes, vers d’autres étoiles, vers d’autres galaxies ? Sans doute pas – mais qu’en sait-on ?

En tout cas, il a su migrer à travers toute notre terre, n’oubliant Un minus, un microbe, un sous-­ aucun continent, aucun pays, bacille, un quasi-rien, un moins aucune région, lançant des tenque rien, même ! qui part brus- tacules tous azimuts, avec une quement à la conquête du monde, discrétion de tombe. rien que ça ! et qui s’étend par- C’est invraisemblable. tout, invisible, mais très présent, Il n’était pas là. Et, brusquement, très prégnant, invasif, s’engouf- il y est. Puis il pousse plus loin, frant, s’infiltrant, se faufilant, encore plus loin, toujours plus se greffant. loin. L’intrus absolu. Il l’a fait. Il le fait. Et c’est très con-trariant ! Il est en train de le faire. Mais quand faut y aller faut y aller – ou plutôt quand faut rester Le conarovirus contre le con-finé faut rester con-finé. reste du monde. Jusqu’à... ? Justement, on n’en sait rien, Et le reste du monde a beau non, rien de rien. Parce que lui, peser lourd – en nombre (bientôt il nous aime à sa façon – même huit milliards d’habitants), en s’il ne nous veut pas de bien –, et argent ($, €, £, etc., etc.), en resil prend ses aises, il s’épanouit, il sources humaines et techniques, se propage à l’infini… Et surtout, et technologiques, et médicales... il s’incruste et fait de nous ses – le combat est loin d’être gagné transmetteurs, non con-sentants d’avance. mais parfois hélas com-plices (que d’imprudences coupables !).

Parce que nous sommes en lutte contre un adversaire invisible, impalpable, insaisissable, incontrôlable, inexorable, inflexible – une force qui va, merci Victor Hugo : ce n’est certes pas à lui que tu pensais, il y a près de deux cents ans, quand tu écrivais Hernani, mais l’expression est adéquate. Comment peut-il se faire qu’un être si petit, si microscopique (seuls les microscopes électro­ niques permettent de le voir), cette espèce de nano-particule, dont on ne sait même pas si elle est vivante ou non vivante, soit capable d’être aussi active, empoisonnante (le mot latin à l’origine de notre mot virus signifie poison), virulente (tiens ! c’est un mot de la famille de virus ; un virus a donc la capacité d’être virulent, toxique, agressif, délétère,… mortel – létal, pour employer le mot sérieux !) ?

Représentation de ce à quoi ressemblerait le virus Covid-19, sous un puissant microscope. (HFCM Communicatie - CC BY-SA 4.0)

Il est notre hôte, nous sommes ses hôtes, ambiguïté du mot, à la fois sujet et objet. Un hôte indésirable, dont nous nous passerions bien volontiers. Nous voilà devenus à con-trecœur les hôtes involontaires d’un hôte très malfaisant. Il ne demande pas s’il peut entrer, il s’impose. Con-tagieux, tyrannique, mégalo. Un rien qui est brusquement devenu tout. Un infiniment petit qui est parti – absurde ! – à la conquête du monde. Je ne dis pas l’univers, mais notre monde, la planète Terre tout entière, avec ses continents et ses îles, avec ses bientôt huit milliards d’habitants. Ce n’est pas rien !

juillet 2020

- HISTOIRE & PATRIMOINE - n° 98 — 153


A . P. H . R . N

Association Patrimoine et Histoire de la Région Nazairienne Agora (case n° 4) 2 bis avenue Albert de Mun - 44600 Saint-Nazaire aphrn.asso@gmail.com - https://aphrn-asso.fr - Tél. 06 07 11 21 88

Conseil de Direction de l’APHRN

(après Assemblée Générale Extraordinaire du 7 février 2020)

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Présidence Association à présidence collégiale Trésorière Annick Montassier Secrétaire général (Responsable d’édition de la revue HISTOIRE & PATRIMOINE)

Tanguy Sénéchal Conseillère (Responsable des sorties culturelles) Nicole Bonnaud Conseillère Christiane Marchocki

Adhérez à l’APHRN En adhérant à l’APHRN, vous pourrez participer à nos activités (sorties culturelles, et conférences), ainsi qu’à nos assemblées générales et aux réunions de présentation que nous organisons à l’occasion de la parution d’un nouveau numéro de notre revue. De plus, la cotisation d’adhésion (individuelle, ou couple) comprend un abonnement à notre revue HISTOIRE & PATRIMOINE (trois numéros réguliers par an - parution en mars, juillet et novembre) et vous permet de bénéficier d’un tarif préférentiel sur ses numéros hors-série. Il est possible d’adhérer à tout moment de l’année. L’adhésion vaut pour l’année civile d’encaissement de la cotisation. Le renouvellement des cotisations s’effectue au cours du premier trimestre de chaque année. Les tarifs des cotisations, pour l’année 2020, sont les suivants :

ff adhésion individuelle ..... 26 € ff adhésion couple ............ 31 €

Conseillère Geneviève Terrien (Responsable de diffusion de la revue HISTOIRE & PATRIMOINE)

Conseiller Paul Correc Conseiller (Responsable des sorties culturelles) Claude Lebreton

Pour adhérer à l’APHRN, vous pouvez, au choix : vous rendre sur notre site internet, à l’adresse https://aphrn-asso.fr, menu « adhésion » nous adresser un courriel à l’adresse : aphrn.asso@gmail.com nous écrire, à : APHRN – Agora (case n° 4) – 2 bis av. Albert de Mun 44600 Saint-Nazaire téléphoner au 06 07 11 21 88 Vous pourrez, ensuite, régler votre cotisation par chèque, virement ou carte bancaire.

Conseiller Patrick Pauvert

Revue HISTOIRE & PATRIMOINE Responsable de diffusion : Geneviève Terrien Tél. 06 78 91 77 18

Remerciements aux photographes et collectionneurs qui nous ont fourni des illustrations. Merci, également, aux membres du Conseil de Direction de l’APHRN qui ont activement contribué à l’élaboration de ce numéro, réalisé de manière entièrement bénévole.

Les articles sont publiés sous l’entière responsabilité et propriété de leurs auteurs. La publication partielle, ou totale, des articles et illustrations parus dans HISTOIRE & PATRIMOINE est interdite.

Illustration : Villa Les Ajoncs, dans le bois de Lanséria, à Quimiac, en Mesquer.

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(Collection Jean-Luc Roy)


Couple de baigneurs avec enfant, sur la plage de Lanséria, à Mesquer, vers 1928. (Collection privée)


Impression Khilim - Réalisation Tanguy Sénéchal

Villas, parmi les pins, dans le bois de Lanséria, à Quimiac (Commune de Mesquer)

HISTOIRE & PATRIMOINE n° 98 - juillet 2020 - 14 €

A.P.H.R.N - Association Patrimoine et Histoire de la Région Nazairienne Agora (boîte n° 4) - 2 bis avenue Albert de Mun - 44600 Saint-Nazaire Courriel : aphrn.asso@gmail.com - Site internet : https://aphrn-asso.fr ISSN : 2116-8415

ISSN : 2116-8415

(Collection Jean-Luc Roy)


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