Les Amants de Coste-Belle Album photos - mai 2019 - ARySQUE
À René Char et au Pays des Écrins
Prélude Au jardin de Coste-Belle, sis au Serré-Coste-Telme, un poète muet écoute la sève fatiguée parcourir le vieux prunier. L’hiver, il disparaît sous la neige. Les lièvres pourraient presque lui piétiner la tête. Habitué des saisons, Il patiente jusqu’aux averses de pétales de cerisiers qui sont les premières douceurs. L’été, les fleurs poussent à ses pieds et le chatouillent jusqu’aux narines !
Contre la pierre sèche, une métamorphose me rassure.
Les Matinaux
Après la rénovation du toit de bardeaux de mélèze du chalet, nous disposions à Coste-Belle, d’un important stock de planches plus ou moins abîmées après vingt années passées à couvrir la maison. Avec les plus belles, nous avions fabriqué des meubles, tandis que nous avions débité les plus pourries pour nous chauffer depuis. Restaient les “entre-les-deux”, celles que l’on conservait pour s’en servir au besoin, empilées dans un coin du jardin, et promises, tôt ou tard, aux flammes de la cheminée. Je me suis servie dans ce tas-là et, cette fois encore, René Char est venu musarder dans mon jardin. J’y ai donc planté trois groupes de planches dessinées qui récitent chacun quelques-uns de ses vers : un solitaire pour la Rougeur des Matinaux, un trio pour La fête des arbres, et Les Amants de Coste-Belle pour Lettera amorosa. Au jardin de Coste-Belle, ces “ totems ” ont affronté deux rudes hivers et savourent en ce moment leur deuxième printemps.
« Ils sont privilégiés ceux que le soleil et le vent suffisent à rendre fous, sont suffisants à saccager. » Les Matinaux, René Char
« Au plus fort de l’orage, il y a toujours un oiseau pour nous rassurer. C’est l’oiseau inconnnu. Il chante avant de s’envoler. » Les Matinaux
« Arrive le chasseur. Il est vêtu de toile. Il porte un fusil et une gibecière. Il dit avec lenteur, la voix triste, les premiers vers du poème, accompagné très doucement par les guitares, puis va chasser. » Fête des arbres et du chasseur
Les Amants de Coste-Belle Après la neige
« Le cœur soudain privé, l’ôte du désert devient presque lisiblement le cœur fortuné, le cœur agrandi, le diadème. » Lettera amorosa
« Après le vent, c’était toujours plus beau, bien que la douleur de la nature continuât. » Lettera amorosa
Épilogue Il y a dix ans, il y avait déjà des amants dans le jardin de Coste-Belle. C’était déjà des morceaux de l’ancien toit. C’était déjà dans un petit pré, en lisière de verger. Déjà, cette métamorphose m’avait rassurée. Déjà, René Char m’y musardait. Déjà, l’été ensauvagé les rendait fous.
En ce mois de mai - enfin ! -, la bouture d’amants de Coste-Belle pousse en bac dans un atelier parisien. Sa sève se nourrit des fleurs qu’on y plante, mais il faut aussi lui parler et l’enrichir régulièrement d’un engrais poétique.
ARySQUE - Album photos des Amants de Coste Belle créé pour le Génie du dessin - Mai 2019