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Page Blanche Version 7.7

Séquence 1 - GRENIER (Int/Jour) Fond noir. Une vieille ampoule éclaire soudain l’obscurité d’un grenier. Gros plan sur un livre ancien. Paul, un jeune écrivain, fouille l’endroit et découvre ce vieux livre qu’il dépoussière. Il décide de l’emporter avec lui, ainsi que d’autres vieilleries. Séquence 2 - BUREAU (Int/Jour) Paul met en scène le bureau dans lequel il travaille pour se donner de l’inspiration (fermeture des rideaux, disposition d’objets ancestraux qu’il a dénichés dans son grenier : cierges etc.), mais dès qu’il s’attable devant sa machine à écrire, c’est le syndrome de la page blanche. Il reste immobile face à la machine. Il tire la page blanche de la machine et la regarde fixement en la tenant en l’air. Soudain, frustré et en colère, il prend sa machine à deux mains, la jette par la fenêtre, puis la referme violemment ainsi que les rideaux. Il s’affale ensuite avec lassitude et de tout son long sur son bureau. Le vieux livre qu’il avait découvert tombe du bureau. Intrigué, il le ramasse et l’ouvre. A l’intérieur toutes les pages sont blanches. Générique Paul est au téléphone. PAUL Non Lucrèce, je peux pas te fournir les premiers chapitres. J’ai encore rien écrit, j’ai beau tout faire je suis totalement sans inspiration… Ce n’est qu’une scène de crime… un conflit entre deux personnes…Il faut juste que je ressente pleinement ce conflit…pour lui donner vie. LUCRECE Et tu comptes y arriver en tranformant ton bureau en crypte avec des reliques du grenier de ton grand-père ? Sérieusement Paul. Ecoutes-moi, je t’envoie Valérie, officiellement pour venir récupérer ton travail. Elle sera avec Maximilien. Ils ne peuvent plus se blairer, c’est exactement ce qu’il te faut pour ton inspiration. Arranges-toi pour les garder à dîner. Tu veux ressentir du conflit, tu vas en avoir. Ils sont tellement en pétard l’un après l’autre en ce moment qu’ils pourraient même s’entretuer devant tes yeux. (rire) PAUL Je sais pas si c’est une si bonne idée…


Séquence 3 – DEVANT LA MAISON (Ext/Jour) Une croix religieuse se dresse sur une route déserte telle un glaive trempé dans la pierre. Plans d’une église et de la demeure de Paul, dans une ambiance sereine, médiévale et mystérieuse. Dans le parc de l’autre côté de la demeure, Valérie, une jeune femme bien habillée et coiffée, s’approche de la maison avec un portable à l’oreille. VALERIE (s’adressant au loin) Paul ? Tu es là ?! (parlant dans le portable avec exaspération) Non Max, je te l’ai déjà dit, il habite la maison de son grand-père tout seul, le temps d’écrire son nouveau roman. (blanc) Max, tais-toi, tu me files la migraine ! (se tenant la tête) Je veux plus entendre un son sortir de ta bouche ! (un bref blanc) Oh…Max tu es répugnant… Je suis bien contente de pas t’avoir à côté de moi pour sentir ça… Paul sort de la maison et arrive vers elle. VALERIE (parlant dans le portable) Il arrive ! Amènes tes fesses si tu veux voir Paul ! Et pitié ne me fait pas honte… Elle éteint son portable d’un air exaspéré. PAUL Ah Valérie ! Ils s’embrassent. VALERIE Comment ça va Paul ? (n’attendant même pas de réponse et enchaînant rapidement). Tu as reçu mon message sur ton répondeur ? Lucrèce veut une copie des premiers chapitres demain sur son bureau. Je viens te les arracher des mains. Mais y’a aussi un autre problème. PAUL Ecoutes, je suis vraiment en panne d’inspiration et il faut qu’elle lâche un peu de mou, parce que j’ai besoin de temps. Et c’est quoi l’autre problème ? VALERIE Un crétin ambulant, toxico de la vie, et encore moins supportable qu’une chirurgie esthétique opérée au marteau et au burin… Il a préféré « garder » la voiture (se moquant sur le mot « garder »), le rôle de sa vie…


PAUL (feignant la surprise) Ah Max est avec toi… C’est toujours aussi difficile avec lui ? VALERIE Avec Max tous les mots du genre « difficile » et « épouvantable » sont du domaine de l’euphémisme. PAUL Je vois… Ecoutes Val, je vais appeler un traiteur, vous allez bien rester dîner ? VALERIE (un peu gênée) Euh… Je voudrais pas t’embêter Paul…Pour le roman et tout… PAUL C’est pas grave du tout, vous ne m’embêtez pas. (prenant un air ambigu) Au contraire. Je pense que vous pourrez certainement m’aider à trouver l’inspiration… Max, un jeune homme aux cheveux hirsutes et aux vêtements démesurés apparaît au loin. VALERIE (se retournant vers Max) Voilà Max… (se retournant vers Paul) Surtout fais pas attention mais il a un ou deux joints au compteur. J’ai pas encore trouvé sa planque mais il se trimballe avec assez de végétation pour repeupler la forêt vierge. Max trébuche et s’étale dans la pelouse. Il se relève et commence à ramasser plein de petites choses sur le gazon, qu’il fourre aussitôt dans ses poches. PAUL Je vois ça…

Séquence 4 - SALLE A MANGER (Int/Nuit) Max, Valérie et Paul sont attablés. C’est la fin du repas. Paul est au centre et les regarde l’un et l’autre. Max est visiblement un peu éméché et boit assez fréquemment entre deux répliques. VALERIE Et alors ce truand sort une bombe anti-agression et me menace avec. Et Max, ce couard, il était tellement mort de peur qu’au lieu de nous sortir du pétrin, il lui a même proposé mes boucles d’oreille Cartier. Il m’a mise hors de moi.


MAX Et elle, elle trouve rien de mieux à faire que de lui chopper la bombe des mains et de se ruer sur moi pour me vaporiser ! VALERIE Au moins, notre agresseur a pris peur et s’en est finalement allé bredouille… MAX Normal, tu fais fuir tous les mecs. VALERIE C’était pas grâce à toi en tous cas, lavette ! MAX Attends ! Qu’est-ce que t’espérais avec moi ma vieille ? Ton valeureux chevalier servant, fier et vaillant ? Bienvenue dans la réalité ! Oui les mecs savent plus se battre aujourd’hui, c’est tous des lopettes. Va falloir qu’elles s’y fassent les gonzesses ! VALERIE Crétin ! MAX Grognasse ! Plan d’ensemble. On se rend compte que Valérie et Max se sont installés aux antipodes de la table de la salle à manger. PAUL Voyez le bon côté des choses. Finalement vous avez fait fuir ce type et il n’a pas blessé Valérie, c’est une chance non ? MAX Ouais autant que d’se crever un œil avec une fourchette. Il se place de profil et mime le geste avec sa fourchette en l’enfonçant sur le côté et en criant de douleur. Il se plaît tellement au jeu, qu’il en tombe à la renverse sur sa chaise et disparaît sous la table. VALERIE (consternée, s’essuyant la bouche avec sa serviette et la jetant sur la table) Je préférerais mourir jugulée que de me sentir aussi morte de honte quand je sors ce… cette… chose, là. MAX (se relevant maladroitement de sa chaise) Si je t’emmerde, tu peux t’casser ! VALERIE


Regardes-toi Max, tu es pitoyable ! Ta mère a du confondre le bicarbonate de soude avec le lait en poudre ! MAX Et la tienne elle t’a foutu ton hochet dans le… PAUL (le coupant) S’il vous plaît tous les deux. Max finit son verre d’alcool d’une gorgée. PAUL Y’a à peine quelques semaines vous étiez inséparables et aujourd’hui c’est la guerre… Le téléphone sonne dans le salon. PAUL Je reviens, vous entre-tuez pas pendant ce temps. MAX Ne plaisante pas, elle a déjà essayé ! PAUL (riant un peu faussement) Je ne veux surtout pas savoir ! Paul s’éclipse dans le salon pendant que Valérie et Max argumentent assez violemment. Séquence 5 - SALON (Int/Nuit) Paul se regarde dans une glace tout en tenant le téléphone. On entend au loin Max et Valérie se fâcher. LUCRECE (dans le téléphone) (d’abord agacée) Pourquoi tu hésites Paul ? (devenant plus conciliante) Ecoutes, tu m’as dit que tu avais besoin de conflit et voilà ces deux-là qui te tombent tout cuits dans le bec. Nourris le conflit et nourris-toi du conflit… Tout ce que tu as à faire c’est jeter un peu d’huile sur le feu, et regarder les flammes danser…Ce soir tu auras ton crime. (blanc) PAUL D’accord Lucrèce, je vais m’en occuper. J’espère juste que ça va pas dégénérer…


Séquence 6 - SALLE A MANGER (Int/Nuit) Paul revient à table et coupe la dispute toujours en cours. PAUL Je te ressers un verre Max ? MAX Fais péter ! VALERIE Ivrogne ! Paul remplit le verre de Max jusqu'au bord. MAX J’ai besoin de ça pour te supporter. Il lève son verre à sa santé et avale une grosse gorgée. PAUL (hésitant) Bon, je sais quel genre de conversation pourrait vous mettre d’accord. Pour m’aider à avancer l’écriture du crime d’introduction à mon roman, vous pourriez répondre à une question. VALERIE Vas-y, ça peut être amusant. PAUL (hésitant à se lancer, mais finalement déterminé) Bon… Quelle serait votre méthode pour tuer quelqu’un ? … Mettons que vous en ayez l’intention bien sûr ! MAX Moi je la grillerais au lance-flammes, à la Terminator. Il mime le geste en direction de Valérie. VALERIE Pourquoi « moi » ? Paul a dit « pour tuer quelqu’un ». MAX Tant que je tue quelqu’un, autant que ça rende service. Valérie le regarde sans cligner, en hochant de la tête.


PAUL Bon alors toi Valérie ? VALERIE (sans quitter Max de son regard sombre) Eh bien, puisqu’il faut tuer utile, j’enverrais bien ce crétin dans l’au-delà. Mais j’emploierais une méthode plus subtile. J’agirais de manière intelligente et efficace et j’effacerais proprement toute trace de mon crime. La mort d’un être aussi insignifiant ne mérite pas que je finisse en cage. MAX Ah ! Ecoute-la ! Elle va essayer de me buter avec un cure-dent ou quoi ? Ah ! Ah ! VALERIE Non, je vais t’étriper à mains nues, espèce de dégénéré ! Furieuse, Valérie se lève de sa chaise et avance rapidement vers l’autre bout de la table en direction de Max, mais elle est arrêtée par la main de Paul à michemin. PAUL Personne ne va essayer de tuer personne ! Valérie ne se sent plus bien et perd connaissance sur Paul. Max se marre. MAX Ah ! Ah ! Regarde-la cette « cul-serré » ! C’est qu’elle pourrait vraiment me tuer en m’étouffant si elle me tombait dessus comme sur toi. Paul essaie de la remettre debout. PAUL Mais qu’est-ce qu’il lui arrive ? MAX (soudain très grave) Tout à l’heure dans la cuisine, j’ai mis de l’arsenic dans son verre… Paul affiche une mine atroce. Max s’effondre de rire. MAX Mais non, va pas tourner de l’œil toi aussi ! Valérie reprend vaguement connaissance et commence à délirer faiblement.


VALERIE Max…J’ai vu un renard… MAX (ironique) Mais bien sûr ma fleur de cactus…Quelle couleur cette fois ? Valérie repart dans les vappes. PAUL Max, tu l’as droguée ? MAX Je lui ai juste foutu un peu d’ecsta liquide ! PAUL Mais c’est dangereux pour sa santé ? MAX Non, tu parles ! Je le saurais depuis le temps ! Remercie-moi plutôt, elle va nous foutre la paix pour le reste de la soirée, parce que j’y ai mis la dose. Paul tire Valérie par les bras. PAUL Vous êtes cinglés tous les deux ! Max ! Ecoute ! Va t’installer dans une chambre pour y passer la nuit. T’es trop saoul pour rentrer chez toi… Je vais aller étendre Valérie sur le canapé avant qu’un autre renard passe par-là. Max prend le chemin vers une chambre. Paul est déjà loin. MAX (à voix basse, s’éloignant vers l’escalier) Ouais ouais, tu te débarrasses de moi pour pouvoir profiter de ma copine… Ah tu es un saint Paul ! Séquence 7 - BUREAU (Int/Nuit) Paul se sent inspiré par la conversation à table et rejoint son bureau pour se mettre à écrire son chapitre. Privé de machine à écrire, il décide d’écrire à la plume dans le vieux livre trouvé dans le grenier. Il commence à écrire. PAUL « La clarté de la lune baignait la grande demeure dans une étrange atmosphère. » Il raye ce qu’il vient d’écrire et corrige :


PAUL « Le soleil dardait ses rayons sur la grande demeure ». Séquence 8 - DEVANT LA MAISON (Ext/Nuit-Jour) Dehors, la lune se change en soleil et la nuit devient jour. Séquence 9 - CHAMBRE DE MAX (Int/Jour) Dans sa chambre, Max est réveillé par le jour soudain. MAX Putain ! Déjà jour ? ! Je me suis pas vu pioncer autant… (se tenant la tête) J’me trimballe une de ces cuites… Il sort de sa chambre et appelle Paul. MAX Paul, t’es là ? Il voit une horloge dont les aiguilles tournent anormalement vite. MAX Woohoo ! C’est de la bonne celle d’hier… Après son passage, le mouvement s’accélère encore plus. Séquence 10 - BUREAU (Int/Jour)/ SALON (Int/Jour) Paul, dans son bureau, continue d’écrire son récit. PAUL « Valérie passait consciencieusement des gants de velours près de la cheminée qui crépitait tel le feu ardent de son désir. » Max rejoint le salon et frotte ses yeux fatigués. Il aperçoit Valérie de dos, face à la cheminée. Elle est bien habillée et maquillée, genre femme fatale. MAX (d’un ton sec) Ah Val. T’aurais pas vu Paul ? Valérie se retourne vers Max, s’approche de lui et commence à le séduire.


VALERIE (sur un ton de séduction) Je suis heureuse de te voir mon cœur… Tu devrais prendre tes aises, et profiter de la chaleur de la cheminée. Max ouvre de grands yeux, n’en revenant pas. MAX « Mon cœur » ? ! Oulà, toujours pas remise de ton petit cocktail d’hier soir toi !… (se retournant avec étonnement vers la cheminée) Et t’as fait un feu ? On est en plein été ! T’es complètement shootée ! Sans faire attention à ces paroles, elle lui désigne un siège, et lui enlève doucement un vêtement. Max ouvre ses yeux plus grands. MAX Hein ?… Bon j’ai abusé de la Vodka hier soir, et là je fais un cauchemar de foncedé, ou pire j’ai encore pris des hallucinos et forcément j’en ai aucun souvenir et là je sens que je vais déguster des tracers d’enfer… Valérie l’empoigne et l’embrasse langoureusement. Paul continue d’écrire. PAUL « Séduit, il se décontracta et s’installa près du feu. » Valérie finit d’embrasser Max. Il est visiblement conquis par ce baiser, et s’installe, un sourire aux lèvres. Valérie retourne au feu et s’empare d’un tison, qu’elle utilise dans le feu. PAUL (écrivant) « Tu attises le feu qui est en moi… » VALERIE Tu attises le feu qui est en moi… je brûle de désir. Elle retire le tison rougi par le feu et le place le long de sa jambe. VALERIE (avec une voix mi-séduisante, mi-menaçante) Je crois qu’il est temps pour nous de passer à l’acte… Il faut battre le fer lorsqu’il est chaud.


Elle se retourne violemment vers le siège de Max en brandissant son tison, mais il n’y a plus personne. Max déboule de nulle part avec un fusil de chasse et le braque sur Valérie. MAX Désolé de plomber cette charmante soirée. Il lui explose la tête d’un coup de fusil. Paul est alerté par le coup de feu. Il s’arrête d’écrire et regarde en direction de la fenêtre. PAUL Ils sont tarés ces chasseurs ! A c’t’heure là ! Il se concentre de nouveau sur son texte. PAUL Non, c’est pas bon. Le coup de fusil, et cette réplique, on dirait du Schwarzenegger. Il raye la dernière action de Max et réécrit. PAUL « Il fit irruption avec un sabre dont la lame étincela à la lumière du feu.» Max déboule avec un sabre à la main. MAX Qui de nous deux mérite de mourir… Nous allons trancher ! Valérie brandit son tison qui vient cogner la lame de Max. Ils s’engagent dans un duel tison contre sabre. Max a nettement l’avantage. Val recule sous ses attaques. PAUL (se parlant à lui-même) Finalement elle est désavantagée. Disons plutôt qu’il a un poignard. Il griffonne sur le livre. Max défait Val de son tison en l’envoyant dans la pièce et prend son élan pour la transpercer de son sabre, qui se change soudain en poignard ridicule.


MAX (regardant sa nouvelle arme, brièvement étonné) Hein ? Valérie en profite pour lancer un assaut avec un flingue muni d’un silencieux. Elle reprend l’avantage dans le duel. Paul écrit. PAUL « Elle tira et la balle déchira son épaule » Valérie s’exécute et Max hurle de douleur en laissant tomber son arme. PAUL (se parlant à lui-même) Non, dans le genou, pour le faire plier ! Il griffonne. La blessure à l’épaule de Max se résorbe magiquement. Et Valérie vise cette fois le genou. Max se tient la jambe en pestant contre Valérie. PAUL (tout en griffonnant encore) Ou mieux… là où ça fait TRES mal ! Valérie vise l’entrejambe et Max se tord de douleur. VALERIE (sarcastique) Intelligent et efficace ! PAUL (se parlant à lui-même) Un petit peu d’hémoglobine maintenant… Paul continue d’écrire.


PAUL « Le sang ruisselait de son pantalon… » Est-ce qu’il a un pantalon ? C’est vrai que j’ai même pas précisé sa tenue. Bon une description rapide du personnage s’impose… Il revient un peu en arrière dans le livre et rajoute : PAUL « cet homme, vêtu d’un costume élégant et doté d’un langage raffiné. » Max se tord toujours de douleur et troque magiquement ses vêtements démesurés contre un costume… Il crie d’autant plus fort lorsqu’il voit ce qu’il porte, complètement horrifié.

Paul est alerté par un cri monstrueux. PAUL Encore un chasseur qui s’est pris le pied dans son piège ! Il secoue la tête, d’un air consterné. Il revient à son récit. PAUL Bon maintenant il faut qu’il s’enfuie jusqu’à la remise. Il réfléchit. PAUL Mais il peut pas courir blessé comme ça… Non, finalement elle l’a pas touché. Il griffonne. Max se tient toujours et est soudain soulagé de sa douleur. Il fait alors une déclamation spirituelle. MAX Les existences faibles vivent dans les douleurs, au lieu de les changer en apophtegmes d'expérience, elles s'en saturent, et s'usent en rétrogradant chaque jour dans les malheurs consommés. Valérie, brièvement étonnée, brandit de nouveau son tison. Max s’enfuit en courant vers la remise. Séquence 11 - BUREAU (Int/Jour) / SOUCHE D’ARBRE (Ext/Jour)


Arrivé là, il voit une hache plantée dans une souche d’arbre.

Paul renverse par accident un café sur une partie blanche de la feuille. PAUL Et Merde !

La lumière du jour s’obscurcit, un nuage noir s’épaissit au-dessus de la maison.

Paul jette un mouchoir imbibé du café vite essuyé dans sa corbeille, et se remet à écrire. PAUL « Il s’y essaya de toutes ses forces, mais ne parvint pas à retirer la hache. »

Paul tire de toutes ses forces sur la hache jusqu’à en tomber à la renverse. Elle est comme super-gluée au tronc. Paul écrit de manière lyrique. PAUL « Enfin, tel Arthur s’emparant d’Excalibur, il empoigna la hache et la délogea miraculeusement du tronc. » Max pose les mains sur la hache qui devient une majestueuse épée. Ses vêtements deviennent magiquement ceux d’un preux chevalier, muni d’un bouclier. Un flot de lumière enchanteur se répand autour de l’épée et inonde tout le lieu. Des scintillements féeriques accompagnent son geste héroïque, lorsqu’il soulève enfin l’épée de son socle. Max la contemple, toute scintillante. MAX (émerveillé ne lâchant pas son regard de l’épée) Wow… Et j’ai rien fumé…


PAUL « Elle fit alors une irruption aussi fracassante et froide qu’un Terminator, munie d’un lance-flammes. » Un bruit de machine violent tire Max de son enthousiasme. Valérie apparaît en cyborg, au dessus de Max, sur la terrasse. Son œil rouge se dilate, comme pour exprimer sa colère. Elle brandit un lance-flammes qui crache une gerbe de feu, en guise de coup d’essai. Le canon fume intensément et Valérie souffle dessus, de manière intimidante. MAX Oh-oh… PAUL Un lance-flammes ? J’écris n’importe quoi ! Je délire complètement ! Il se marre, se plaisant visiblement au jeu de sa folie, et referme le livre. Valérie saute de la terrasse, atterrit dans la position du fétus, se relève en souriant méchamment à Max. Elle braque son lance-flammes et s’apprête à arroser Max. Max lance un éclair sur Valérie du bout de son épée. Elle le reçoit et son corps robotique s’électrise soudain, ce qui lui fait dévier un tir de flammes vers le hangar dont le lierre prend feu. VALERIE (d’une voix robotique) On en est juste à l’échauffement. PAUL C’était quoi ce bruit ? Paul renifle l’air. PAUL (soupirant) C’est pas vrai ! Ces foutus chasseurs défrichent maintenant ! ! ! Il empoigne son livre, s’en servant comme d’un objet menaçant prêt à frapper, se lève d’un bond de son bureau et dévale les escaliers vers la sortie.


PAUL Bon c’est décidé ! Ils vont voir de quel bois…

Il sort dehors. Il constate que la maison est en feu. PAUL …je me chauffe… Affolé par le feu, Paul balance le livre et se précipite sur un tuyau d’arrosage pour éteindre le feu. Valérie crache de nouveau des flammes contre Max qui les évite miraculeusement en les renvoyant avec son bouclier. Paul tente d ‘ouvrir le robinet et une giclée d’eau atterrit sur le livre. Un torrent d’eau se déverse sur lui, Max et Valérie, et réduit l’incendie. Paul se retourne et contemple avec stupéfaction Max et Valérie, qui eux s’étonnent brièvement de se retrouver trempés pour reprendre leur combat. Paul est intrigué et regarde fixement dans la direction du livre. PAUL C’est pas vrai… C’est pas possible… Il arrose une nouvelle fois le livre, et une nouvelle rafale d’eau s’abat sur lui et sur le duel entre Max et Valérie, qu’il observe complètement éberlué et trempé. PAUL (balayant son regard sur le duel) Excalibur… Un lance-flammes… Je rêve… Max se sert de l’épée pour jeter un flot d’énergie bleutée contre les flammes de Valérie. Les deux jets s’affrontent en un éclat de lumières bleue et rouge. PAUL (sidéré) C’est moi qui ai créé tout ça… (s’adressant aux combattants) Max ! Valérie ! Arrêtez de vous battre ! C’est à cause du livre ! Mais Max et Valérie ne pensent plus qu’à une chose : exterminer l’autre. Max dévie des flammes vers le portail en bois qui commence à prendre feu. PAUL Mais je n’écris plus, pourquoi vous ne vous arrêtez pas ? Des mots apparaissent dans le ciel : « Ils écrivent leur propre destin » Ces mots disparaissent aussitôt.


PAUL (ressassant cette phrase à voix basse) Ils écrivent leur propre destin… (déterminé) Alors je dois l’écrire à leur place… Il se saisit du livre posé par terre. Il évite de peu un éclair perdu en se baissant. Assis par terre, à l’abri du feu et des éclairs, il sort un stylo de sa poche et s’apprête à écrire. PAUL Pour régler tout conflit, la discussion est la meilleure solution. Il écrit : « Max et Valérie se mirent à discuter » MAX Tu m’as traité de crétin ! VALERIE Et tu m’as traitée de grognasse ! Les flots d’énergie bleue et de feu rouge s’affrontent de nouveau face à face. Une explosion de flammes atterrit juste à côté de Paul. PAUL (grimaçant et levant les yeux au ciel) D’accord, ces deux-là se détestent complètement ! Il prend l’air de quelqu’un qui a trouvé une idée et il écrit avec hâte sur le livre. PAUL Max et Valérie s’aiment ! Max et Valérie stoppent le flux et baissent leur garde. VALERIE Je t’aime à mourir mon cœur… MAX Moi aussi bébé…Tu me tues tu sais… VALERIE (brandissant de nouveau son lance-flammes) Qui aime bien châtie bien… Max brandit Excalibur. Le flux d’énergies s’intensifie un peu plus et envoie une onde de choc qui balaie Paul en arrière. Il récupère le livre qui lui a échappé des mains.


PAUL (scrutant une page blanche) Maudite page blanche ! C’est le moment où jamais d’être inspiré ! Il regarde le livre et prend un air grave. PAUL Toute mon histoire doit prendre fin ! Sur cette page qui le terrorise, il écrit finalement : « FIN ». L’univers entier semble être aspiré à l’intérieur du livre. Le livre se referme et tout est noir. Séquence 12 - NULLE PART Une lumière apparaît au loin dans l’obscurité. C’est une plume qui virevolte et tombe finalement sur le livre ouvert que tient Paul, se tenant debout, seul dans le vide infini. Il saisit la plume et écrit ces mots sur le livre : « Que la lumière soit. » Fondu au blanc. Générique de fin


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