3 minute read
Plaisirs d’automne au Cotentin
from Balade cotentinaise
by Octopus
L’automne est revenu avec ses ciels parés d’or, sa fraîcheur matinale, ses jours en déclin. C’est aussi une saison transitoire, on quitte les longs jours de l’été pour rentrer doucement dans l’hiver, une période de repos où l’on vit un peu plus au ralenti.
L’automne est assurément la saison la plus colorée de l’année, et pour ceux qui adorent la nature c’est un vrai régal. J’aime l’automne parce que j’aime la vie, qui ne peut se résumer à se comporter en simple consommateur. Avec les autres saisons de l’année, l’automne marque le temps à sa façon, il nous fait changer de rythme de vie, il imprime une nouvelle cadence de marche comme si on avait oublié dans les beaux jours insouciants le temps qui passe. Le tic-tac de la pendule se fait à nouveau entendre avec le défilement des secondes qui ne s’arrêtent jamais. L’automne du temps avec ses premières feuilles qui tombent en voletant pour s’échouer sur la pelouse encore bien verte. Le temps a passé pour ces feuilles, elles étaient les premières à quitter leur arbre et leur course si courte leur a donné certainement un instant de liberté.
Si l’automne aime changer les tons pour se transformer en parfait coloriste, il donne à la nature entière des instants lumineux qui procurent à ceux qui aiment à ressentir les premières sensations de la beauté révélée. Le ciel d’automne, avec ses nuages gris lilas, bleu violacé, vert turquoise ou encore beige rosé, est à l’heure du coucher un véritable spectacle. Au loin, près de l’horizon, l’astre déjà caché colorie le ciel de sa lumière dorée. J’aime à m’extasier sur les derniers feux du soir en regardant à travers les arbres qui forment des contrastes étonnants. On se croirait sur une autre planète, une planète de couleurs.
L’automne, c’est aussi la saison des brumes qui montent soudainement et emprisonnent nos rues, nos maisons. Le froid humide se fait sentir, l’oiseau s’ébroue, mécontent. Sur les fils, les oiseaux migrateurs se regroupent, attendant le signal du départ. Au jardin, les plantes sont arrivées à maturité, c’est la période des récoltes. Les légumes, les fruits sont un peu l’aboutissement d’une année de travail, la récompense d’un labeur. L’automne est généreux. Ici, les poires se sont gonflées en prenant des couleurs pour quitter leur tenue verte, là, ce sont les pommes qui tombent lourdement dans l’herbe de la prairie; il faut vite les ramasser, ou mieux, les cueillir à l’arbre, un autre plaisir pour apprécier la générosité de la nature. Ce matin encore, en ouvrant les volets de la maison, quelle ne fut pas ma surprise de découvrir une compagnie de petits champignons sortis de terre pendant la nuit. Leurs petits chapeaux chinois sont à l’image des habitants de Lilliput, le pays imaginaire où séjourne Gulliver.
J’aime l’automne pour les dernières balades dans les sentiers de la nature. Ce sont des moments de plénitude, de décontraction. En marchant, les pensées vont à tous les instants de la vie passée. Il y a comme une communication entre le vécu et ce qu’il y a encore à vivre, une symbiose que la nature accompagne. Je marche dans le creux des sentiers, à l’ombre des arbres, le long des talus enchevêtrés de broussailles, de feuilles brunies et desséchées. La mousse court et tapisse la terre. Les branches mortes craquent sous les pas. Le gros tronc d’un vieil arbre rabougri s’est habillé d’un grand lierre touffu et verdoyant qui brille comme le vert d’une bouteille. Le tapis de feuilles mortes est tellement épais qu’il recouvre complètement le sentier. Le brun rouille des feuilles apporte une note splendide à l’automne des couleurs. Les jeunes noisetiers ont perdu leurs feuilles et les branches créent des traits singuliers de lumière. Le ciel semble filtré et s’amuse à percer ici ou là de ses lueurs intenses. Au sommet des talus, l’horizon court, file vers le lointain. On entend le souffle du vent dans les arbres dénudés, chantant sa romance, c’est la nature qui respire et envoie son haleine fraîche et vivifiante. L’automne signe sa dernière page de lumière avant de transmettre son flambeau à l’hiver.
Quettehou, pommiers en fleurs
Là où le sourire de la terre est l’un des plus éclatants.
Le Val de Saire
Morsalines, Anse le Cul du Loup