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Wallonia

Oh! Valognes chérie, blottie dans le vallon, Tu sembles bien transie, quand la pluie est glaçon, Et que le vent, venant du très proche océan, Agite tes vieilles girouettes au soleil du couchant.

Ta naissance est lointaine, on pourrait l’oublier, Tes deux millénaires et ton dernier clocher, Alauna la romaine fut détruite, incendiée, Mais dans le vallon, tout près du Gravier, On arracha, brûla, pour bâtir quelques huttes.

Les Saxons étendirent leur fière hégémonie, Les tribus pénétrèrent pour s’en faire une patrie, Transformant au plus vite le vieux nom d’Alauna Imposant le wallon, pour être Wallonia.

Des huttes de bois et de terre jaunie Bien vite la belle pierre remplaça le bâti Pour donner au Grand Siècle, au temps des Lumières, De grands et fiers hôtels, remplis de luminaires.

Aux confins de la ville s’élèvent des maisonnettes, Où gîtent des artisans raclant la peau des bêtes, Les gamins aux joues rouges se chamaillent, chapardent, Laissant dans les rigoles traîner leurs sales hardes.

J’aime déambuler le long des trottoirs Discerner tous les bruits, plus résonnants le soir, Tout ce murmure urbain, c’est la ville qui vit Chaque jour, elle respire, elle s’anime à midi. Sur la place Vicq-d’Azir, à l’ombre du clocher, S’étalent les vitrines du boucher, du crémier, Depuis quelques années, les banques, leurs coffres-forts, Semblent pousser les murs, sans beaucoup de remords.

Mais de loin je préfère la majesté des murs De la longue et vieille rue, si splendide, si pure, Celle des Religieuses. Le voile, les cornettes Ont presque disparu, mais l’ombre chevaleresque Du grand et fier Barbey hante encore comme une fresque.

De toutes ses portes cochères, ses portails anoblis, Ses fenêtres romantiques aux frontons arrondis, On pénètre dans un lieu de très loin historique Qu’il me semble percevoir des aristocrates bien tristes.

La grille du vieil hôtel du comte de Maquillé N’ouvre plus le passage aux carrosses dorés, Marie-Louise la Régente de sa robe a frôlé Les vieux parquets de chêne, pour s’asseoir déjeuner.

À quelques pas de là, l’étroite rue Pelouze L’ancienne Trois-Tisons n’a guère de barbouze, Les pavés ont repris l’image du passé, Que déjà on contemple les hauts murs beaumontais.

Le fronton que supportent quatre colonnes ioniques, Doublé d’une architrave à facture simpliste, Semble saluer bien haut les curieux visiteurs, Invitant à franchir le seuil de la demeure.

Mais les rues, les hôtels, ne sont pas tout Valognes, Il faut poursuivre sa marche, loin des colonnes, Pour s’engager tranquille dans la verte nature, Et humer les senteurs, en oubliant les murs.

Valognes, Broc-House

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