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La musique en suspension

La musiqueen suspension

À quoi ressemble l'offre sonore d'une bibliothèque depuis que la musique s'est dématérialisée ? Entre une enquête achevée sur l'impact de cette mutation et une réflexion à venir sur ses prochaines métamorphoses, l'Espace musique des BM fait le tour de ses propositions

En-dessous de 30 ans, on ne dit plus « un morceau de musique », on dit « un son ». C'est un détail qui change tout, même s'il a l'air de rien. « Un morceau » fait penser en effet à un bout de matière, une chose qu'on mettrait dans la bouche ou qu'on tiendrait dans la main, un objet qui existerait dans le monde physique. « Un son », en revanche, c'est parfaitement immatériel. Ce glissement de langage, apparu peut-être il y a une dizaine d'années et propagé de l'argot à la langue courante, accompagne un changement majeur dans ce domaine : la musique s'est largement dématérialisée, remplissant de plus en plus nos vies, mais de moins en moins nos étagères.

Face à tout cela, à Genève comme partout ailleurs, les bibliothèques innovent, expérimentent, s'interrogent. Les BM ont commandé une enquête pour étudier ces mutations et leurs reflets dans les rayons (lire l'encadré), qui alimentera une réflexion à venir sur les métamorphoses de cette facette bibliothécaire. L'occasion d'un survol guidé avec Katia Savi, bibliothécaire responsable de l'Espace musique des BM, logé au 3e étage de la Bibliothèque de la Cité. Si on a perdu l'habitude du CD, cet espace a-t-il quelque chose à nous proposer ? Voyons voir…

Des playlists pour suggérer des chemins et créer la surprise

Des playlists sont publiées par l'équipe de l'Espace musique toutes les deux semaines. On en trouve à ce jour une centaine en ligne, on y accède via le menu déroulant sur le catalogue des BM, via la page genevebm sur Spotify, via les articles de blog qui leur sont liés ou via les codes QR posés sur place.

Exemples récents : « Netflix & Chill » ( « morceaux choisis des meilleures bandes originales » ), « Plus d'un tour dans son sax » (centrée sur le saxophone dans le jazz mais aussi, plus étonnant, dans la musique clas-

sique), « Musiques de transe » (des morceaux rock, punk, folk ou jazz « dont l'un des buts recherchés est un état de transe » ) ou encore « Les femmes dans le jazz suisse » (si vous êtes à Genève, vous connaissez la batteuse Béatrice Graf, mais avez-vous déjà écouté les pianistes Sylvie Courvoisier et Irène Schweizer, la guitariste Sylvie Canet, la saxophoniste Maria Grand ? ).

Créées sur la plateforme Spotify, ces playlists renvoient-elles à des albums empruntables en CD ? « Dans la mesure du possible oui, elles mettent en avant des documents de nos collections, mais elles ne s'y limitent pas », répond Katia Savi. À quoi servent-elles ? « À suggérer un chemin dans un genre, dans un thème, dans la galaxie autour d'un groupe ou d'un-e artiste, à susciter des découvertes dans des domaines auxquels on n'aurait pas pensé. » Spotify fait ce travail aussi, non ? « C'est à nuancer. Une étudiante, par exemple, m'expliquait il y a quelques jours qu'elle n'apprécie pas cette plateforme notamment pour cette raison : les playlists qui sont censées vous proposer des découvertes à partir de vos goûts ont tendance en fait à tourner en rond et à vous suggérer tout le temps les mêmes choses. Pour finir vous vous sentez un peu en prison. »

Des postes d'écoute pour des plongées guidées (ou pas)

Six lecteurs de CD sont logés au calme dans un «coin écoute». À quoi servent-ils ? « Il y a pas mal de gens qui n'ont plus d'appareil à la maison et qui viennent ici pour écouter des disques (les nôtres ou les leurs). En musique classique, il y a des utilisateurs et utilisatrices qui hésitent entre plusieurs interprètes d'une même œuvre et qui en parcourent des extraits pour décider quelle version emprunter. Il y a des personnes qui nous demandent du conseil pour un usage spécifique, du genre “Je fais un spectacle de

danse du ventre”, ou “Je dois faire une animation musicale, je travaille dans un EMS”, ou "J'aimerais découvrir des chanteuses de jazz actuelles"… Nous sortons une sélection de CD et la personne les échantillonne pour voir ce qui va lui servir au mieux. En tant que bibliothécaires, nous avons un rôle de passeurs et de passeuses, filtrant l'offre gigantesque de ce qui existe pour répondre aux goûts et aux besoins des usager-e-s. »

Un accès à des trésors en ligne bien gardés

« Un ordinateur placé près du coin écoute permet d'accéder gratuitement à des ressources numériques consultables sur place ou en ligne. C'est le cas des archives de la Phonothèque musicale suisse, qui numérise les titres produits dans le pays (c'est-à-dire enregistrés par des artistes suisses ou par un Miles Davis qui passait par là…) C'est le cas également de la Classical Music Library de la plateforme Alexander Street (un million et demi de titres). On peut aussi faire des découvertes dans plus de deux millions de titres de Divercities, plateforme de streaming dédiée aux labels indépendants, basée à Lyon, à laquelle on peut même accéder gratuitement depuis chez soi si on est inscrit-e à notre réseau de bibliothèques. »

Des collections physiques aux ramifications inattendues

Les rayonnages de l'Espace musique contiennent aujourd'hui quelque 60'000 CD. Un point de départ possible pour s'immerger ? « Les nouveautés, qu'on trouve sur leur présentoir à l'entrée et sur des listes par genre et par saison. Ou les tables d'exposition où nous mettons en avant des thématiques selon les envies, les inspirations ou l'actualité.  Ou des bibliographies telles que "Pop Cultures" (voir l'article dans ce même numéro). Ou les suggestions des bibliothécaires.»

Quels sont les accents de ces collections ? Réponse en 3 mouvements : « 1. Le pop-rock est ce qui sort le plus. C'est aussi le domaine dans lequel il faut remplacer le plus souvent des documents endommagés par la fréquence du prêt. 2. La production musicale genevoise est l'un des axes de notre politique d'acquisitions, mais il devient de plus en plus difficile de se maintenir à jour dans ce domaine, parce que les artistes sortent leurs morceaux en numérique, éventuellement en vinyle, et de moins en moins en CD. La mise en avant de la scène locale passe donc également

par d'autres moyens, tels que nos playlists ou notre programmation culturelle : concerts, conférences, ateliers… 3. Une approche historique et encyclopédique de la musique : si vous vous intéressez aux débuts du tango, au phénomène des orchestres ballroom sud-américaines, à 40 ans d'histoire du rap, ou à une exploration des musiques du monde réfléchie pour être représentative de chaque pays, nous avons ce qu'il faut. »

Les vinyles, au fait, que sont-ils devenus ? « Ils ont coexisté avec le CD après l'arrivée de celui-ci, jusqu'au début des années 1990, dans ce qu'on appelait alors les discothèques municipales, aux Minoteries et à Vieusseux. Notre collection — près de 40'000 pièces — a ensuite été stockée dans un dépôt bibliothécaire au quai du Seujet, où elle a fait l'objet de quelques prêts sporadiques sur demande… Pour finir, étant donné que nous n'avons pas pour mission la conservation à long terme, les vinyles ont été vendus au public sur la place Neuve lors de la Fête de la Musique en 2013. »

À côté des CD, l'Espace musique propose des méthodes pour apprendre un instrument (55 pour la guitare, 27 pour le piano, 15 pour la batterie…), des magazines et des livres. L'éventail de ces derniers va de 3 minutes pour comprendre les 50 courants essentiels de la musique classique (2017) à 100 lieux mythiques de musique, en passant par une sélection étonnante d'ouvrages sur le metal tels que Metal et genre : essai sur les rapports de genre au sein de la culture metal ou Cthulhu metal, l'influence du mythe.

L'offre « en dur » est complétée par une collection de DVD. « Certaines catégories, par exemple les concerts de jazz ou de chanson française, ne sont plus très empruntés. Les opéras, en revanche, marchent du tonnerre. Nous avons par ailleurs une palette de documentaires musicaux absolument géniaux dans le domaine de l'histoire du jazz, de genres tels que le hip-hop ou la salsa et des musiques du monde. »

Une guitare et un piano silencieux pour jouer sur place

Un piano se tient dans un coin près d'une fenêtre, une guitare est accrochée au mur à côté de l'entrée. Qui en joue, et pourquoi ? « Il y a un homme qui vient une ou deux fois par semaine en costume-cravate dans la pause de midi, il se met au piano pour se relaxer. Une étudiante qui vient un soir par semaine, en nous expliquant que jouer lui fait du bien. Un jeune homme qui essayait d'apprendre en regardant un tutoriel sur son téléphone, posé à l'endroit où normalement on met la partition. Deux jeunes filles en coup de vent qui ont pris deux casques, ça sentait la répétition avant un concert. Des personnes qui partent en improvisation pendant des heures (normalement on a droit à 45 minutes, mais on peut rester s'il n'y a personne après). Certain-e-s ont fait du “piano libre” lors d'un samedi où nous proposions de jouer sans écouteurs, mais les gens sont timides : les pianos en libre service dans la rue sont sollicités tout le temps, mais le calme d'une bibliothèque, ça intimide… La guitare est moins utilisée, mais la demande augmente depuis que nous l'avons placée bien en vue. Il y a des enfants qui aimeraient apprendre et que leurs parents emmènent pour essayer, voir si ça leur plaît suffisamment pour justifier un achat. »

Un portrait-robot du public mélomane ?

Quel est le profil musical du public des Bibliothèques municipales ? Une enquête a été lancée auprès des usager-e-s actives des BM, défini-e-s comme les personnes possédant une carte des bibliothèques et ayant emprunté au moins un document entre 2020 et 2021.

2'683 personnes ont répondu à l'appel, formant un échantillon de répondant-e-s volontaires qui n'est pas forcément représentatif du public des BM ou de l'Espace musique, mais dont la disponibilité pour l'enquête suggère un intérêt pour la musique. Le groupe est un peu moins féminin que le public des BM en général (61% contre 66%) et un peu plus âgé (âge médian de 49 ans pour les femmes et de 52 ans pour les hommes contre 46 et 47 ans pour le public en général).

— Les répondant-e-s expriment une préférence pour la musique classique (61%) et pour la chanson française (52%), devant la pop (48%), le rock (42%), les musiques du monde (38%) et le blues (32%). — Plus de la moitié (55%) ont déjà joué d'un instrument. — 78% écoutent la radio, 57% écoutent des CD souvent ou de temps en temps (s'y ajoutent 23% qui en écoutent rarement), 72% écoutent de la musique en ligne.

Sans surprise, ces pourcentages varient radicalement en fonction des âges. — 38% des personnes fréquentent l'Espace musique des BM, la moitié de celles-ci empruntent des CD et les deux tiers ont déjà demandé conseil aux bibliothécaires, avec un taux de satisfaction de 75%.

Les playlists des BM pour Spotify demeurent pour l'instant très peu connues (4% des personnes qui fréquentent l'Espace musique), mais elles sont très appréciées (par 85% des personnes qui en ont écouté).

L'ensemble des résultats est disponible en ligne: bit.do/bm-enquete-musique

Musique Ve 24.6/22h30

Fête de la Musique – DJ set avec Brazzaville

Soul, funk, rumba congolaise → Scène Calabri ○ Tout public

Durée : env. 2h30

La rumba congolaise de Brazzaville-sur-Grottes

« Je fais partie de ces gens obtus, voire même butés, pour qui un bon disque, c'est un disque de seconde main, parce qu'il a vécu », annonce Karl Mayala. Son arcade au 9, rue de la Faucille, contient « de tout : sorties locales, musiques de jeux vidéo, rap, metal… et les deux axes sur lesquels je suis le plus fort, les musiques africaines et le soul-funk nord-américain ». Au sous-sol, un studio d'enregistrement « proche des conditions professionnelles » accueille des rappeurs du quartier, du cor des Alpes et du yodel, des figures du jazz telles que le pianiste Jean-Yves Poupin.

Le magasin et le studio payent le loyer, permettant ainsi à ce lieu, baptisé Centre culturel Brazzaville, d'abriter dans un salon à l'arrière un sanctuaire voué à la conservation, la numérisation et la diffusion de la rumba congolaise. Cette musique est inscrite depuis décembre 2021 sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité de l'UNESCO (Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture), suite à une démarche conjointe lancée par le Congo-Brazzaville et la République démocratique du Congo. Mais sans cet homme et son arrière-boutique dans le quartier des Grottes, siège de son association Les Ambianceurs, de nombreux bouts de ce patrimoine seraient perdus. Les BM invitent Karl Mayala lors de la Fête de la Musique pour un DJ set « 100% vinyle, 100% rumba ».

La chaîne YouTube des Ambianceurs

https://www.youtube.com/c/LaSociétédesAmbianceursGeneve La rumba congolaise, qu'est-ce que c'est ?

« Dans les années 1940, les premiers disques en provenance des Antilles française et de Cuba sont arrivés dans les deux Congos. Des marins antillais, qui avaient sans doute le mal du pays, ont commencé à demander aux musiciens congolais de reproduire cette musique. Après avoir joué pendant quelques années la musique cubaine à l'identique, les Congolais ont commencé ensuite à se l'approprier, incorporant des éléments des musiques traditionnelles locales, ce qui a donné la rumba congolaise qu'on connaît aujourd'hui.

Mais il faut savoir qu'à l'origine, le rythme de la rumba antillaise venait d'Afrique. Il avait été apporté dans ces îles via les esclaves, il s'était mélangé aux musiques des populations autochtones et blanches, il avait fini par prendre ce nom latin, rumba, qui vient de nkumba, c'est-à-dire « nombril » dans un ancien dialecte bantou. Ce rythme retourne donc des Antilles au Congo… d'où il repartira à nouveau en s'exportant vers les Antilles françaises et l'Amérique du Sud 60 ou 70 ans plus tard. C'est un ping pong qui n'a jamais cessé. »

Est-ce que tout le monde a déjà écouté de la rumba congolaise sans le savoir, à travers des tubes qui se la sont appropriée ?

« Probablement. Lors de la Coupe du monde de football de 2010, la première qui s'est jouée en terre africaine, on a entendu Shakira chanter l'hymne « Waka Waka », qui est à la base une comptine congolaise. Dans le premier album du collectif de rap français Bisso Na Bisso, qui rassemblait des artistes du Congo Brazzaville en 1997 et qui a été certifié disque de platine (300'000

Les compilations de la Société des Ambianceurs sur la plateforme Bandcamp

https://lasocietedesambianceurs.bandcamp.com

La page des Ambianceurs sur la plateforme Discogs, recensant leurs trouvailles

https://www.discogs.com/fr/user/Les_Ambianceurs

exemplaires vendus), la plupart des morceaux contenait des samples de rumba congolaise. Plus loin dans le passé, dans les années 70 et 80, quelques artistes congolais ont fait pas mal de premières parties d'artistes yéyé comme Claude François et Johnny Hallyday. L'artiste Gérard Madiata était connu au Congo comme l'ami des people français parce qu'il avait énormément chanté avec eux. Plus près de nous, le pire des ambassadeurs possibles pour la rumba congolaise est Maître Gims, qui en met des échantillons dans sa musique… »

Quelle est votre histoire avec cette musique ?

« Mes parents sont né-e-s à Brazzaville, de la rumba congolaise il y en avait tout le temps à la maison dans mon enfance en France. À l'âge adulte, j'ai recommencé à en écouter un peu par nostalgie et je me suis rendu compte qu'en fait, j'aimais beaucoup. Je me suis mis à faire des compilations avec un ami. Mbote Na Beno volume 1 est une porte d'entrée, avec un ou deux tubes et des rythmes accrocheurs, il mélange les années dorées de cette musique et des choses plus récentes, allant de 1967 à 1982. Le volume 2 contient des morceaux un peu plus vieux et obscurs, il s'adresse encore aux néophytes, mais également aux DJ, aux diggers qui creusent en quête de trésors cachés, aux mélomanes. Dans le 3e on s'est lâchés, c'est un crescendo qui va jusqu'aux racines de cette musique. À la base, tout ça était juste pour nous, pour se faire plaisir, mais on s'est retrouvés à extrêmement bien vendre ces compilations et à avoir pas mal de demande pour aller mixer à droite et à gauche. En essayant de voir ce que je pourrais faire de plus pour cette musique, je me suis mis à racheter autant de disques que possible, à les numériser et à les mettre sur une chaîne YouTube que j'ai créée pour les diffuser. Puis, il y a deux ans, j'ai décidé de structurer cette démarche en créant une association. Ce n'est pas que je veuille jouer au héros, où m'investir de la mission de sauver un patrimoine : tout ce que je fais, c'est parce que j'aime ça. »

Comment dénichez-vous les disques ?

« Depuis 2016, je voyage au pays pour en trouver. Il en reste beaucoup au Congo, à chaque fois que je pars j'en ramène 300, mais lorsque je demande aux anciens s'ils en ont encore, la plupart me répondent qu'ils les ont jetés depuis des années. Il y a donc une vraie urgence de les récupérer avant qu'ils soient détruits, ou qu'ils se retrouvent dans une collection privée. Quand on essaie de sauvegarder ce type de patrimoine, le pire ennemi est le collectionneur qui ne pense qu'à la taille de sa collection et qui empêche la musique et l'information de rester en circulation. De mon côté, dès que je trouve un disque qui n'est pas encore référencé, je fais tout ce que je peux pour qu'on l'entende et pour que le monde sache qu'il existe. »

K-pop, des chorés venues de Corée

Musique Di 26.6/18h30

Fête de la Musique – Welcoming K-pop

Initiation à la danse et à la musique pop coréennes avec l'école Studio Press Play → Scène Calabri ○ Tout public

Durée : env. 2h30 En vrai, Mitsuki Akashiya n'est pas japonaise, mais depuis son adolescence elle dédouble ainsi son identité parce que, dit-elle, « dans la communauté des fans de la culture japonaise, on aime bien avoir des surnoms ».

Elle n'est pas coréenne non plus, mais elle est l'ambassadrice à Genève de la K-pop ou Korean pop, courant musical dansant et/ou sucré qui lance ses grosses vagues sur la planète depuis une décennie. Les BM l'invitent lors de la Fête de la Musique pour un atelier d'initiation à la chorégraphie K-pop, ouvert à tout le monde et donné en collaboration avec l'école de danse Studio Press Play, suivi d'un DJ set. Quelle est son histoire avec cette musique et cette culture ?

« Ma passion a commencé par le Japon, avec les animes (dessins animés) que je regardais depuis toute petite, puis avec les mangas et le rock japonais. Ensuite j'ai dévié sur la Corée du Sud, je me suis beaucoup intéressée à son histoire et à sa culture, je suis partie deux mois là-bas pour en apprendre davantage et j'ai eu un coup de cœur pour ce style musical, avec des groupes tels que Big Bang, Super Junior, 2NE1 ou Girls' Generation. Ce sont des artistes brillant-e-s à tous les niveaux, la musique, les costumes, la communication, le visuel, la performance physique, la danse, le chant… c'est presque la perfection.

J'ai cherché à mieux connaître cet univers et j'ai vu apparaître progressivement une petite communauté autour de moi, une trentaine de personnes qui se retrouvaient par le bouche à oreille pour des soirées dans des bars où j'amenais la musique sur une clé USB. La demande grandissait, attirant également le public d'une manifestation telle que Polymanga, du coup en 2010 j'ai décidé avec un ami de créer l'association FullMoon Entertainment pour promouvoir cette culture. Entre-temps la K-pop est devenue beaucoup plus connue avec notamment le morceau “Gangnam Style” (2012) ou le groupe BTS, et elle a suscité pas de mouvements de danse de rue au niveau mondial. L'activité de l'association s'est arrêtée en 2018 à cause de nos études, puis à cause du Covid… et voilà, aujourd'hui, nous la relançons. »

Une histoire de pirates et de buffet à volonté

À quoi sert un CD ? Pour l'industrie discographique, ce support qui se développe au cours des années 1980 n'est pas tellement destiné à concurrencer le vinyle, mais plutôt à freiner le boom de la cassette audio, qui permet tout à coup d'enregistrer ce qu'on veut, y compris des copies gratuites de n'importe quel morceau… C'est ce que rappelle l'Étude de l'évolution des pratiques d'écoute musicale et des supports d'enregistrement de l'étudiant en information documentaire Tristan Girard, l'un des volets de l'enquête sur la musique lancée par les Bibliothèques municipales :

« Après la débandade des cassettes pirates, l'industrie musicale reprend le dessus sur les pratiques illégales grâce au CD, un format inaltérable et propriétaire. On arrive donc à une époque où les labels ressortent sur CD absolument tous leurs titres phare, et ce pour plusieurs raisons : premièrement, le CD est bien moins cher à produire que le vinyle, et le matériel nécessaire à son écoute l'est tout autant, favorisant l'équipement (mais surtout un rééquipement adapté au CD) des foyers de manière exponentielle. Deuxièmement, le format est inaltérable, c'est-à-dire qu'il est impossible de pouvoir en modifier ou copier le contenu comme avec les cassettes audios. Et troisièmement, la qualité sonore du CD, bien que grandement discutée par les audiophiles, reste incroyable pour l'époque et d'une grande fidélité qui ravira le grand public. »

À part tout ceci, « le CD en lui-même n'a pas apporté de grands changements dans les pratiques musicales » : on écoute plus ou moins comme avant.

La musique purement numérique, qui prend son essor à partir de 1995, et qu'on copie et fait circuler comme on veut, représente une rupture par rapport à l'âge triomphal du CD et un retour à l'ère anarchique des cassettes audio. Les gros labels de disques réagissent cette fois en reprenant à leur compte les nouvelles pratiques, proposant des services de téléchargement payant.

Seulement, « ce ne sont pas eux qui vont profiter des ventes, mais plutôt des entreprises comme Microsoft et Sony, à l'instar d'Apple, qui vont commercialiser la musique depuis leurs logiciels ». Et cette fois, les habitudes d'écoute changent radicalement. « L'arrivée du streaming provoque un changement drastique dans les pratiques musicales des auditeurs. Ces derniers ont soudain accès à l'équivalent d'un buffet à volonté de musique pour moitié moins que le prix d'un CD par mois. (…) Face donc à ce buffet à volonté, on plonge dans une “musicalisation” constante de la vie, la musique tout le temps, partout. »

Rapport disponible en ligne : bit.do/bm-enquete-musique Qu'est-ce donc qu'une « lecture d'été » ?

« On lit sans s'endormir. On “dé-procrastine”. On s'attaque à la pile de livres abandonnée à côté du lit. Le pavé de l'été, quel bonheur. On revient avec une autre pile de livres, parce que la librairie du village est tellement vachement mieux que celle à côté de chez toi. »

— Olivia Cupelin, médiatrice culturelle aux BM

« J'ai adoré lire un roman de Jules Verne qui se passe dans le Grand Nord — Les Aventures du capitaine Hatteras — alors qu'il faisait très chaud… »

— Leila Amacker, aide-bibliothécaire à la BM Cité

« Pour le jeune public des BM, la lecture d'été, c'est par LA VALISE SURPRISE que cela se passe, en tout cas pour les 0—12 ans. Le concept est simple : chaque collègue de l'équipe choisit 12 titres et prépare 4 ou 5 valises, selon ses goûts, ses envies, sa sensibilité, et l'enfant prend une valise au bol, choisissant sa tranche d'âge (0—3 ans, 4—5 ans, 6—7 ans, 8—9 ans, 10—12 ans) et sans savoir ce qu'il y a dedans (pour info, les valises sont réalisées par nos collègues de l'Atelier reliure des BM, qui savent TOUT FAIRE). C'est drôle de jouer sur une donne inconnue et ça marche, vraiment : on nous les demande déjà, une grand-mère a eu un succès boeuf avec ses petits-enfants habitant Berne… »

— Françoise Zutter, bibliothécaire à la BM Servette

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