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Mobithèque un vrai lieu sur roues
Les BM s'étaient mises il y a 60 ans à faire rouler leurs livres et leurs bibliothécaires dans les Bibliobus. Depuis 2015, elles ont rendu nomades les autres facettes de leur offre : spectacles, rencontres, ateliers… D'un archipel d'îles dans les quartiers, la navigation part à la rencontre de nouveaux publics
Autrefois, une bibliothèque ne bougeait pas. Les gens allaient et venaient, les livres circulaient, mais les lieux restaient vissés au même endroit. Le 5 février 1962, les Bibliothèques municipales de Genève brisent cette immobilité, se faisant pousser des roues et se mettant à rouler avec le premier vaisseau de leur future flottille de Bibliobus. Il faut ensuite attendre un demi-siècle pour qu'une autre idée novatrice vienne prolonger cette lancée. En 2015, on prend un camion, on le rend décapotable sur l'un de ses côtés et on en fait une scène, une plateforme ouverte aux vents, un radeau prêt à s'amarrer quelque part dans les courants de la ville.
Nommé « Mobithèque », l'engin accueille depuis lors tout ce que les bibliothèques se sont mises à faire de plus en plus intensivement au cours des dernières décennies : à côté du prêt de livres, disques et DVD, on y trouve une programmation culturelle, des ateliers, des moments de partage d'expériences et d'apprentissage… Avec tout cela, la Mobithèque n'est donc pas seulement un contenant qui roule, mais aussi un vrai lieu sur roues, naviguant entre des environnements urbains variés. De sa toute première sortie sur la place du Molard le 16 septembre 2015 à ses haltes estivales au Bois de la Bâtie et au parc Geisendorf en 2022, en passant par des places et des parkings, elle vit sa vie nomade en tissant des liens avec tout ce qu'elle rencontre dans ses parcours.
Une machine à rencontrer de nouveaux publics
La Mobithèque voit le jour, à vrai dire, au croisement d'une réflexion de fond et d'une opportunité inespérée. La réflexion, pour commencer : « Une des priorités stratégiques que nous étions en train de poser au sein des Bibliothèques municipales consistait à favoriser l'accès à nos prestations pour tout le monde, incluant les personnes qui jusque-là ne venaient pas dans nos locaux. Cela impliquait de se rapprocher des publics, y compris en allant physiquement à leur rencontre », raconte la directrice des Bibliothèques municipales, Véronique Pürro.
Ce genre d'approche existait déjà, « mais de manière très ponctuelle et modeste, sous la forme d'un stand dans une fête de quartier, ou d'un caddy rempli de livres et d'une couverture sur laquelle une bibliothécaire se posait dans un parc pour lire une histoire aux enfants ». Comment aller plus loin ? « Nous avions une ligne budgétaire en attente pour l'achat d'une camionnette servant à nos transports. Le temps que
la demande de crédit soit inscrite au plan financier et votée par le Conseil municipal, le besoin n'était plus vraiment là. J'ai donc proposé que nous utilisions cette somme pour nous doter d'un équipement permettant d'aller dehors, vers les nouveaux publics.»
« Lorsqu'on est à l'intérieur, à un moment Un programme est élaboré. La Mobithèque (qui faillit alors s'appeler « Proxibib », par analogie avec donné il faut fermer, le programme municipal de fitness urbain « Proxisport » ) sera « un boucler les lieux, mettre l'alarme. Quand on est outil avec lequel on peut absolument tout faire : projeter des films, écouter de la musique, inscrire les hors-murs, on peut toujours rester, poursuivre gens à notre service de prêt et leur permettre de repartir avec leur carte de lectrice ou de lecteur », les échanges, approdétaille la directrice. La plasticienne genevoise Pascale Favre réalise la fondir les rencontres. » fresque qui recouvre l'engin, affichant des mots qui font le tour de ce « tout faire ». Parmi ces termes, un verbe étonne. Que vient faire là le mot « assouplir » ? « À la même époque, il avait été décidé de réaffecter les locaux de la Villa Plonjon, au bout du parc des Eaux-Vives, attribués jusque-là à notre bibliothèque des sports. Avant que cette collection de documents retrouve un lieu fixe à la bibliothèque des Minoteries, puis à celle de Saint-Jean, l'Espace Sport a vécu une période entièrement nomade à bord de la Mobithèque, qui présentait cette facette de notre offre lors d'événements sportifs », répond Véronique Pürro.
Des livres pour courir et pour nager
Pendant un temps, la vocation de la Mobithèque est donc intensément sportive. Le véhicule intervient lors d'événements courus tels que le Marathon de Genève : « Les gens étaient surpris, ils se demandaient ce que des livres venaient faire dans une manifestation où on va pour courir… » raconte David Schnyder, responsable de l'Espace Sport, associé dès le départ à la conception de l'objet. Que répondre ? « J'expliquais que j'étais là pour mettre en avant une documentation reflétant ce qui se passe dans le monde de la course à pied et présentant les tendances actuelles dans ce domaine. Par exemple courir au naturel, sur l'avant du pied, une approche que les livres et les revues spécialisés ont beaucoup traitée ces dix dernières années. » Pareil lorsque la Mobithèque se pointe à la Coupe de Noël : « Dans ce cas, je partais sur les bienfaits de la nage en eau froide, sur lesquels énormément de choses ont été publiées ces 3-4 dernières années. »
Ces sorties sont également l'occasion de présenter des ressources numériques, allant du jeu vidéo d'alpinisme, présenté dans le cadre du Salon de la Montagne sur la Plaine de Plainpalais, à l'application de presse en
ligne PressReader. « Il y a des gens qui ne lisent pas forcément des livres mais qui sont ravis si on leur propose de feuilleter gratuitement L'Équipe sur nos tablettes », signale David Schnyder. En dehors de ce type d'événements, on imagine alors que l'Espace Sport des BM pourrait adopter de façon définitive cette vie nomade : « On garait la Mobithèque une fois par semaine sur le parking à la sortie de la patinoire et piscine des Vernets pour faire du prêt de documents. Mais la formule n'a pas pris. » Le sport retrouvera un espace intérieur pour ses collections, renouant avec le hors-murs de manière plus ponctuelle, et la Mobithèque embrassera avant tout sa vocation événementielle.
Navigations d'été
Si la ville était une mer et que les sept bibliothèques du réseau BM étaient des îles, on pourrait dire que la Mobithèque fait d'abord du cabotage, naviguant en 2016 tout près des côtes, à proximité de chaque bibliothèque de quartier. « Ce programme, initialement appelé “Sortir pour lire”, prolongeait les petites bulles hors-murs que certaines bibliothèques avaient déjà créées dans des lieux tels que la place de la Navigation, les parcs Gourgas, Geisendorf et des Chaumettes, les préaux d'école aux Eaux-Vives ou les voies couvertes de Saint-Jean. Plus que de nouveaux publics, avec ces premières sorties on touchait avant tout le public habitué des BM, à qui on signalait notre volonté d'aller davantage dehors, et qui en était enchanté », raconte Laura Györik Costas, responsable de la médiation culturelle. Certains emplacements commencent alors à entraîner la Mobithèque dans des eaux nouvelles. « Un endroit particulièrement marquant pour les interactions avec le public a été, en 2016, le square de l'Europe, un bout de quartier très multiculturel entre la Servette et les Charmilles. Nous avions installé la Mobithèque au pied des immeubles, ce qui permettait aux enfants de venir sans être accompagné-e-s, car leurs mères pouvaient les voir depuis les fenêtres. » Pour la Tribune de Genève, très inspirée, le véhicule devient alors « la roulotte aux mille histoires » .
Étape suivante : la Mobithèque prend véritablement le large en se mettant au vert et en commençant à explorer systématiquement les parcs. « Il y a eu au début quelques maladresses. Au parc Geisendorf, nous avons investi le préau de l'école en empiétant carrément sur le terrain de basket, ce qui nous a attiré les foudres des jeunes dont c'était le terrain de jeu. Nous avons affiné progressivement la formule en ajustant la durée de notre présence en chaque lieu (deux semaines plutôt qu'une seule, pour laisser au bouche à oreille le temps de se faire) et le choix de la période. En commençant en juillet, au lendemain de la fermeture des écoles, nous offrons une soupape aux familles qui se retrouvent à 100% avec les enfants sans avoir (encore) prévu de vacances », reprend Laura Györik Costas. D'autres aspects vont s'étoffer au fil des étés, améliorant le confort ( « Il fallait créer de l'ombre, d'abord avec des petits parasol qui s'envolaient, puis avec des toiles qui créent désormais de vraies zones ombragées » ) et développant la programmation à travers des partenariats avec des lieux de culture proches : Musée Ariana, Théâtre de l'Orangerie, Musée d'histoire des sciences, Conservatoire et jardin botaniques…
Des cris d'animaux, du slam, des récits prolongés jusqu'à la nuit
Depuis 2017, le périple estival de la Mobithèque entre les espaces verts genevois est appelé « De parc en parc ». Trois moments particulièrement marquants ? « Au parc La Grange, en 2018, nous avons fait un partenariat avec les Cours de français au parc. Pendant que les adultes, issu-e-s des différentes migrations que Genève a connues ces dernières années, suivaient les cours, la Mobithèque accueillait leurs enfants et quelques mamans qui ne souhaitaient pas se séparer de leur progéniture. Comment interagir avec ce public, qui parlait plein de langues différentes, mais pas le français ? Ce qui a fédéré tout le monde, c'était un blind test où il s'agissait de reconnaître un animal à partir de son cri, de dire son nom dans sa propre langue et de découvrir ensuite le mot en français… La prof qui donnait les cours aux adultes, Simona Ferrar, est aussi chorégraphe. Elle revient cette année avec un projet entre danse et pop culture qui s'immerge dans le Bois de la Bâtie (lire l'encadré). »
Deuxième souvenir frappant : « Bois de la Bâtie, 2021 : nous avions fait un tout-ménage pour informer les habitant-e-s vivant à proximité. Là aussi, il y avait pas mal de personnes qui ne parlaient pas français et qui ne partaient pas en vacances. Parmi celles-ci, un papa qui emmenait tous les jours sa fille d'une dizaine d'années et qui restait là, du début à la fin, pendant qu'elle participait aux activités. Le dernier jour de notre programme, le slameur Fafapunk présentait un spectacle tiré du Petit prince, suivi d'un atelier où il proposait au public d'écrire et de slamer à son tour. La petite fille a écrit et déclamé son texte et à la fin elle s'est exclamée, en s'adressant au slameur : “Je ne veux pas que tu partes, je veux que ça continue ! ” Pour le coup, nous avions vraiment l'impression d'avoir comblé une lacune, mais aussi d'avoir permis de vivre des moments forts aux familles qui ne partent pas l'été », note Laura Györik Costas.
Un dernier souvenir, du côté des propositions pour les adultes ? « Nos projets “Le Parc augmenté” et “Hypercity”, des parcours balisés par des codes QR proposant des podcasts entre l'histoire et l'imaginaire des lieux, ont donné lieu à des balades guidées, prolongées parfois par des apéros. Il m'est arrivé de rester tard le soir avec les participant-e-s qui, dans le sillage de la balade, avaient tellement de choses à débattre et à raconter… Lorsqu'on est à l'intérieur, à un moment donné il faut fermer, boucler les lieux, mettre l'alarme. Quand on est hors-murs, on peut toujours rester, poursuivre les échanges, approfondir les rencontres. »
Pour Frédéric Baillif, tout a commencé à Geisendorf
Près de vingt ans avant d'exploser mondialement avec son dernier film La mif (primé 13 fois, de Berlin à Buenos Aires, à l'heure où nous écrivons), le cinéaste genevois Frédéric Baillif filmait Geisendorf (2006) : le parc, le microcosme, le lieu de vie qu'il avait découvert en y travaillant en tant qu'éducateur. Cet espace vert entre les quartiers Saint-Jean/Charmilles et la Servette, aujourd'hui apaisé et investi par des activités socio-culturelles variées, était perçu en ce temps-là comme une véritable jungle urbaine, livrée à des bandes et secouée autour de l'an 2000 par des agressions homophobes particulièrement violentes. Le réalisateur plongeait alors dans l'épaisseur humaine du parc pour la restituer en un documentaire palpitant, qui suivait quatre jeunes hommes habitués des lieux et qui traduisait le quotidien urbain en images prenantes, déroulées sur des musiques funky. Jeudi 21 juillet à 17h, Frédéric Baillif sera au parc Geisendorf pour présenter ce film, projeté à la Mobithèque des Bibliothèques municipales dans le cadre du programme « De parc en parc ». Interview.
Lorsque le film est sorti, en 2006, le journal Le Temps évoquait son impact sur notre vision de la ville en titrant « Geisendorf, la face cachée de Genève ». Le documentaire n'a rien perdu de sa force, mais l'effet est très différent si on le regarde aujourd'hui.
« Tout à fait. Je crois qu'à l'époque, on découvrait une Genève avec des mélanges culturels profonds, ce qui était assez nouveau. De plus, il était encore assez rare chez nous de filmer des personnes noires. Il n'y avait pas encore eu le mouvement Black Lives Matter, qui pour moi en tant que réalisateur a été un véritable tournant : aujourd'hui, je peux beaucoup plus facilement proposer un casting avec beaucoup de personnages noirs, alors qu'il y a encore dix ans, ce n'était pas possible. Lorsque j'ai fait par exemple Tapis rouge, mon premier film de fiction sorti en 2014, je me suis rendu compte que j'avais du mal à le faire vivre auprès des institutions, particulièrement la RTS, parce qu'il y avait toujours cette croyance fausse que les personnes noires ne sont pas représentatives de la population et du public suisses. Geisendorf avait donc, entre autres, marqué les gens parce que j'avais fait ce choix… qui en réalité n'en était pas un : c'était naturel pour moi de filmer des Noirs simplement parce que c'était la population qu'il y avait là.
On découvrait aussi, de manière plus générale, cette population de jeunes issus de l'immigration dans certains quartiers, face à laquelle il y avait des idées reçues et de la peur. En l'occurrence, les jeunes de Geisendorf étaient considérés en bloc comme des voyous parce qu'ils traînaient dans les parcs, et plus particulièrement dans un parc où il y avait eu par le passé de vrais problèmes, avec des mecs qui avaient été quasiment lynchés. En se rapprochant de ces jeunes, on se rend compte que c'est beaucoup plus complexe. C'est ainsi que je me suis mis à faire intuitivement ce que je continue à faire aujourd'hui, car je réalise que l'utilité de mon métier, c'est de montrer le backstage, d'aller au-delà de ce qu'on croit connaître. » Quel était le premier moteur de ce film, l'intérêt pour cette problématique ou le lieu lui-même ?
« C'était assez simple : à l'époque j'étais éducateur, et une de mes missions pour la Délégation à la jeunesse de la Ville de Genève consistait à m'occuper le dimanche de la salle de gym de Geisendorf, où les jeunes venaient faire du foot et du basket. La salle avait été ouverte et des éducateurs avaient été envoyés sur place suite aux agressions qu'il y avait eu dans ces lieux, pour aller à la rencontre de ces jeunes sur leur territoire. À côté de ce travail, j'avais eu trés tôt envie de faire du cinéma. J'avais déjà fait un premier film [Sideman, portrait de l'harmoniciste jazz Grégoire Maret, en 2003], mais comme je n'avais pas de formation en cinéma, je manquais de confiance en moi, donc j'avançais un peu en tâtonnant.
Un jour, en travaillant là une fois par semaine, en faisant moi-même du basket et en rentrant en lien par ces biais-là avec les jeunes du quartier, je me suis dit qu'en fait, c'était incroyable, tout ce qui se passait en ce lieu. Il y avait tellement de jeunes, des centaines tous les weekends, et il y avait de tout : certains étaient vraiment des voyous, mais qui venaient en mode tranquille, parce que c'était leur cour d'école, au sens propre comme figuré, du coup il n'y avait pas réellement de problème, même pour les plus… cramés, j'ai envie de dire. Je me suis dit qu'il y avait vraiment une histoire à raconter autour de cette jeunesse-là, entre autres pour que les gens puissent comprendre
« On retrouve dans Geisendorf et dans La mif cette même démarche qui consiste à soigner ma blessure en allant écouter les autres, les valoriser et mettre le doigt sur leur potentiel… Tout ce qui m'a manqué quand j'étais ado. »
que ce n'est pas noir ou blanc, qu'il y a vraiment des nuances.
J'ai quitté mon boulot parce que j'avais vraiment envie de faire des films, j'ai trouvé un producteur qui m'a fait un contrat de m**** parce que j'étais jeune et que je manquais de confiance en moi, j'ai été sous-payé, mais j'ai quand même fait ce film, qui a gagné le premier prix au festival de documentaire Visions du réel. Et c'est là que tout a commencé pour moi. »
Ce film, ce lieu, les quatre protagonistes sont-ils restés avec vous ?
« Pas physiquement, parce que chacun a vécu sa vie, mais j'ai eu des contacts récemment lorsqu'on a refait une projection. Marvin est devenu coach sportif, tout va bien. Michael le footballeur est papa de deux enfants, c'est ce qui fait qu'à un moment donné il s'est dit OK, j'arrête de déconner. Il disait d'ailleurs, en présentant le film l'autre jour avec moi, qu'il n'était pas très fier de se revoir comme ça… Adli a toujours sa sensibilité à fleur de peau qui est assez difficile à vivre pour lui. Et Cédric, je crois qu'il a terminé sa carrière de basketteur, qui a été moins extraordinaire qu'il ne l'aurait souhaité, mais qu'il est tout de même parvenu à mener au niveau suisse. Si je les croise par hasard, on se tombe dans les bras, on a vécu tellement de choses intenses avec ce film, c'est toujours très émouvant.
Ils sont donc restés dans mon cœur, mais aussi dans mon écriture. Après ce film, j'avais eu une réaction un peu orgueilleuse, qui était de me dire ”bon, maintenant je ne suis plus un éducateur, je suis un cinéaste”, comme si c'était une espèce de promotion sociale. Je le regrette aujourd'hui, parce que du coup, j'avais arrêté de faire des films à caractère social, en lien avec le métier d'éducateur, qui était finalement la meilleure école de cinéma que je puisse faire. Pendant une période, j'ai donc renié ce passé-là, mais avec le temps j'ai réalisé que je fais des films bien meilleurs en parlant de la jeunesse, du travail social et de questions de société. J'ai compris ce que j'avais envie de raconter et pourquoi j'avais envie de le raconter, et aujourd'hui j'y suis revenu avec La mif. »
Quel est le trait commun le plus fort entre Geisendorf et La mif, au-delà des thèmes relativement proches (des jeunes hommes qui traînent dans un parc, des adolescentes dans un foyer d'accueil) ?
« Au fond de moi, il y a une vraie blessure d'adolescent, que ces films me permettent de soigner. Lorsque je me retrouve aujourd'hui devant le public avec La mif et que je réponds aux questions, il m'arrive de parler de cette période de ma vie et je sens dans mes tripes qu'il y a une colère, parfois ma voix se met à trembler… Ce qui me touche encore profondément est l'incapacité du monde adulte à comprendre réellement ce qui passe dans la tronche des ados. C'est quelque chose qui m'a beaucoup blessé, particulièrement à l'école, lorsqu'on m'a fait comprendre que je n'étais pas à la hauteur parce que j'avais de mauvaises notes en math, ce qui a déclenché des problèmes de comportement qui m'ont exclu du système scolaire, me faisant sentir totalement rabaissé, dévalorisé.
J'ai mis des années à reconstruire une confiance en moi grâce au basket, qui m'a sauvé en me donnant un milieu où j'avais la possibilité de m'exprimer et d'être accepté tel que j'étais, de faire mes preuves et même d'être valorisé dans un rôle de leader. C'est pour cette raison, je pense, qu'on retrouve dans Geisendorf et
dans La mif cette même démarche qui consiste à soigner ma blessure en allant écouter les autres, les valoriser et mettre le doigt sur leur potentiel… Tout ce qui m'a manqué quand j'étais ado.
Sous ce rapport-là, je pense quand même qu'on a énormément évolué. Aujourd'hui on sait écouter les émotions des enfants et des ados, susciter le dialogue, il y a du respect, l'autorité arbitraire est beaucoup moins présente, et à mon avis c'est très bien. J'ai l'impression qu'on est nettement mieux outillé-e-s en tant que parents et qu'enseignant-e-s. La preuve, c'est — je trouve — que les jeunes sont beaucoup plus tolérant-e-s, plus ouvert-e-s d'esprits qu'on ne l'était lorsque j'étais ado. Sur les questions de genre, de sexualité ou de racisme, les filles de La mif [des actrices non-professionnelles qui jouent des rôles proches de leur expérience vécue] sont franchement à des années lumière d'où j'en étais à leur âge. »
Vous arrive-t-il de retourner à Geisendorf ?
« J'habite pas loin, donc j'y vais parfois avec mes enfants, et à chaque fois, je ne peux pas m'empêcher de repenser à cette expérience extraordinaire, qui a été le tournant de ma vie professionnelle. Le film a aussi marqué pas mal de gens, on m'en parle encore beaucoup. Je ne vais pas me jeter des fleurs, mais je me demande s'il n'a pas fait du bien au quartier et s'il n'a pas contribué à réconcilier les gens avec ce lieu, qui à l'époque était déserté. Quand je vois le parc aujourd'hui, très vivant, avec plein d'enfants, où il n'y a plus de sentiment de peur, j'aime bien penser que c'est aussi un petit peu grâce à ce film. »
L'amour, l'argent et la santé à l'orée du bois
Simona Ferrar et Louise Hanmer sont danseuses et chorégraphes. Mais les rencontres qu'elles proposent à la Mobithèque prennent place dans ce grand backstage qu'est la vraie vie, pour créer des « instants d'amitié accélérée ». Comment ça se passe ? Simona Ferrar répond.
« Vous êtes invité-e à tirer au sort une carte qui définit la thématique : l'argent, l'amour ou la santé. Louise ou moi vous livrons alors un récit sur ce thème, au cours d'une déambulation à l'orée du bois ou dans un espace clos tout près. Ce que nous vous racontons vient de notre vie “off the dancefloor” (une allusion à un album de Madonna qui, lui, s'appelle Confession on a Dance Floor) : le fait de pratiquer un métier artistique a inévitablement un impact sur sur notre style de vie, et notamment sur notre manière de vivre l'amour, la santé et l'argent. Je me suis toujours demandé, d'ailleurs, pourquoi ces sujets qui touchent tout le monde ne font pas partie des questions qui sont abordées à l'école… Ces histoires prennent 15 à 20 minutes. Ensuite il y a un temps pour vos réactions, si vous souhaitez en avoir.
C'est très rare normalement d'avoir un tel échange avec un-e parfait-e inconnu-e. En général on commence par du small talk et il faut un bon moment pour savoir si on se sent assez à l'aise pour se raconter des choses personnelles. Il m'est d'ailleurs souvent arrivé, du fait de ma timidité, de me sentir peu confortable dans un contexte social et d'attendre avec impatience le moment où on peut passer à un niveau moins superficiel, plus authentique. Une des choses que j'ai souhaité créer avec ces rencontres, ce sont donc des instants d'amitié accélérés, des raccourcis par rapport aux situations sociales normales. On crée immédiatement, automatiquement un Performance Me 6 et 13.7 / 16h échange qu'on n'aurait d'ordinaire I Want to Hold qu'avec une personne déjà proche. Your Hand & Other Confessions off the Dance Floor Performance de Simona Je voulais aussi honorer le risque qu'on prend en tant qu'humain-e quand on va vers un-e inconu-e et Ferrar, avec Louise Hanmer jouer avec le fait qu'on s'influence, → Mobithèque, Bois de la Bâtie qu'on n'estime pas forcément le genre et la force de l'impact ○ Tout public, dès 12 ans qu'on peut avoir en se frottant Durée : env. 2h à quelqu'un. Parfois, longtemps après, j'ai la voix d'une personne qui me revient en tête et qui me donne un conseil. J'ai raconté par exemple le début d'une histoire d'amour, la personne en face m'a dit “Je pense que c'est important de faire des activités ensemble”, et c'est quelque chose qui m'inspire encore aujourd'hui. Je souhaite que ces histoires apportent quelque chose aux personnes qui participent et que, chacun-e les racontant à d'autres, la vague continue. » Qu'est-ce que c'est qu'une « lecture d'été » ?
« Assurément, une lecture qui se fait différente. Paradoxalement plus solitaire, au contraire de la lecture régulièrement collective et familiale l'hiver au coin du feu (même si je n'ai pas de cheminée). Lecture plus diurne, mais livres peut-être plus sombres. Comme si l'un devait compenser l'autre. Ou que la sérotonine apportée par l'allongement des journées permettait de se confronter avec des écrits moins faciles à digérer. »
— Félicien Mazzola, collaborateur à la direction du Département de la culture et de la transition numérique)
Qu'est-ce que c'est qu'une « lecture d'été » ?
« Ma lecture d'été doit être solaire, joyeuse, simple, sans “prise de tête” ! J'attends souvent avec impatience les articles des magazines, spécialisés ou non, qui dispensent des conseils sur des “livres pour votre été” pour faire mon choix. Et puis surtout, surtout, je lis des livres papier. Loin de moi la tablette qui surchauffe sur la plage. Mes lectures d'été finissent toujours par rentrer à la maison avec des grains de sable emprisonnés dans la reliure, des taches de crème solaire et des pages écornées ! »
— Nadine Bonard, chargée de communication au Département de la culture et de la transition numérique
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mardi au Bibliothèque de la Cité & Espace musique du Attention ! La bibliothèque de la Cité est fermée du mardi 5 au vendredi 8 juillet
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samedi
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