TEASING
À découvrir dans ce numéro... «LA FOIRE AUX CÉLIBATAIRES EST OUVERTE»
RUNNING
NRJ12 CAMGIRL «UN LANCE-ROQUETTES SUR L’ÉPAULE»
TOP MODEL
FRED ET JAMY
HELLS ANGELS
CASTING
BAMBA TRISTE
« O N VA T O U S C R E V E R , A U TA N T E N R I R E »
ÉDITO
CENT PATATES ! Ca y est : la rentrée vient à peine d’arriver que tout le monde vient déjà mettre son nez dans le portefeuille des étudiants. Comme chaque année, les enquêtes sur le coût de la vie à l’université, les courriers du Crous et les dossiers à la Caf rappellent à chacun que les vacances sont bel et bien terminées. Un coup à débronzer direct. À ce petit jeu, c’est l’Unef, le principal syndicat étudiant, qui a dégainé en premier il y a une quinzaine de jours, en décortiquant les dépenses pour une année de fac dans vingt villes françaises. Au crible : logement, transport, bouffe, téléphone… Bonne surprise de cette étude, c’est à Brest que la vie apparaît la moins reuch. En moyenne, un étudiant doit y débourser 680 € par mois. Mieux que Nantes (744 €), Rennes (746 €) et surtout Paris (1 124 €). Bien que principal poste de dépense, c’est le montant des loyers qui permet à Bresss’ d’obtenir cette première place (en moyenne 322 € mensuels). Un joli classement qui, malgré le point noir du transport (abonnement à 27,95 € par mois pour les étudiants, soit la ville la plus chère), connaîtra même un allié de poids en cette rentrée : le retour du fameux Défi Brestois en octobre. Soit trois jours de challenge où il est interdit de taper dans le budget liche. Et si c’était ça la plus belle économie ? La rédaction
SOMMAIRE 6 à 13 14 à 25 26 à 29 30 & 31 32 à 37 38 à 41 42 à 47 48 & 49
WTF : side project, bière IPA, cover YouTube, running festif, plans B de festival... Je zappe et je mate Le retour de la mob Camgirls : nouvelles e-dolls Chroniques de la guerre ordinaire Toujours à la mode RDV : Algiers, Marion Montaigne, The Slow Sliders, Thylacine Comment sont nés... les clubs de foot bretons
50 BIKINI recommande
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septembre-octobre 2015 #23
Directeur de la publication : Julien Marchand / Rédacteurs : Régis Delanoë, Isabelle Jaffré, Brice Miclet / Directeurs artistiques : Julien Zwahlen, Jean-Marie Le Gallou / Photo de couverture : Laurent Denis - France 2 / Illustration : Étienne Laroche / Stagiaire : Nolwenn Mousset / Consultant : Amar Nafa / Relecture : Anaïg Delanoë / Publicité et partenariats : Julien Marchand, contact@bikinimag.fr / Impression par Cloître Imprimeurs (St-Thonan, Finistère) sur du papier PEFC. Remerciements : nos annonceurs, nos lieux de diffusion, la CCI de Rennes, Michel Haloux, Mickaël Le Cadre, Étienne Cormier, Émilie Le Gall. Contact : BIKINI / Bretagne Presse Médias - Espace Performance Bât C1-C2, 35769 Saint-Grégoire / Téléphone : 02 99 23 74 46 / Email : contact@bikinimag.fr Dépôt légal : à parution. BIKINI “société et pop culture” est édité par Bretagne Presse Médias (BPM), SARL au capital social de 5 500 €. Les articles publiés n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Le magazine décline toute responsabilité quant aux photographies et articles qui lui sont envoyés. Toute reproduction, intégrale ou partielle, est strictement interdite sans autorisation. Magazine édité à 20 000 exemplaires. Ne pas jeter sur la voie publique. © Bretagne Presse Médias 2015.
WTF
QUEL SIDE PROJECT ALLER VOIR ?
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MISE EN BOUCHE
LE TEMPS D’UN ALBUM OU D’UNE TOURNÉE, DE NOMBREUX ARTISTES LANCENT LEUR PROJET PARALLÈLE. NOUVEAU GROUPE, COLLAB’ OU ÉCHAPPÉE SOLO : DES PARENTHÈSES DONT ON AIMERAIT QU’ELLES RESTENT OUVERTES.
Alex De Mora
Innovation sympatoche de l’équipe des Trans qui, pour la 37e édition du festival, a décidé de présenter la prog en public lors d’une soirée spéciale. Celle-ci aura lieu à l’Ubu à Rennes le 17 septembre et sera l’occasion de découvrir en live un premier nom : les Canadiens de Dralms.
BLANCK MASS DR
KITSUNÉ NIGHT
Le label au renard de Gildas Loaëc et Masaya Kuroki investit le temps d’une nuit le 1988 Live Club à Rennes. Pour cette chouille nu-disco, il fait venir le DJ et producteur ricain Moon Boots (photo), Kulkid, Korgbrain et Dim Sum. Le 24 octobre.
LES STATES À BREST
chicago Prenez votre passeport, direction l’Illinois et le lac Michigan. Pour sa 12e édition, l’Atlantique Jazz Festival nous emmène à Chicago, l’un des bastions des musiques black aux USA. Parmi les pointures invitées cette année : le trompettiste Wadada Leo Smith et le pianiste Adegoke Steve Colson. Du 2 octobre au 18 octobre à Brest et dans neuf autres villes bretonnes. 6
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Bristol, capitale anglaise de la musique, a généré de bons groupes : Massive Attack, Portishead ou encore Fuck Buttons, duo électro dont fait partie Benjamin John Power, a.k.a Blanck Mass en projet solo (photo). Son style ? Électro nihiliste, immortalisée dans le récent album, Dumb Flesh, aux titres évocateurs : Cruel Sport, Atrophies, Detritus, Dead Format… À taaaaaable ! Au générique de ? Le Magazine de la santé (spécial médecine légale) Quand et où ? Le 12 novembre aux Indisciplinées à Lorient
LESKA
Tels Son Goku et Vegeta dans Dragon Ball Z, les deux producteurs et beatmakers rennais Les Gordon et Douchka ont eux aussi fusionné pour former Leska. Une créature à deux têtes et quatre mains qui, entre deux EP perso, a dévoilé au printemps dernier le planant et joli track Keys, sorti chez Nowadays Records (label de Fakear et de La Fine Équipe entre autres). Kaméhaméhaaaaaaaaaa ! Au générique de ? Midi les zouzous Quand et où ? Le 23 octobre à L’Antipode à Rennes
EXTREME PRECAUTIONS
On le savait déjà doué pour l’électro qui tabasse et les ambiances plutôt dark façon B.O de fin du monde. Le Toulousain Paul Régimbeau, plus connu sous le nom de Mondkopf, a décidé de passer à l’étape supérieure avec Extreme Precautions. Sous ce blaze de métalleux, le gazier (vu cet été sur la furieuse scène Mekanik d’Astropolis) réaffirme plus que jamais son amour pour les sonorités noires et oppressantes en développant une techno-grindcore qui sent bon le chaos. Mais pourquoi est-il aussi méchant ?! Au générique de ? Le Jour du Seigneur (spécial Jugement Dernier) Quand et où ? Le 10 octobre à La Carène à Brest
WTF
COVERS YOUTUBE : LES DOIGTS DANS LA REPRISE CHOPER DES DATES C’est un classique pour de nombreux musiciens débutants : les reprises. Pas encore de compo perso, envie de prendre du plaisir en jouant tout de suite, s’assurer des morceaux qui tiennent un minimum la route. Au milieu des massacres et des larsens, il y a parfois de bonnes surprises. Et notamment sur YouTube où les covers sont innombrables. C’est le cas de Camille et Suzanne, deux jeunes Lamballaises qui ont fondé le duo Deep Eyes (photo). Grâce à leurs reprises, elles ont réussi à se faire un petit nom, leur cover de Sweet Darling de Fréro Delavega culminant à 20 000 vues. « Notre première reprise, c’était
Rolling In The Deep d’Adele, en 2012. C’était une musique du moment, ça marchait fort. » Des prestations qui permettent aux deux filles âgées de 19 et 20 ans de trouver des petites scènes dans la région. Cet été, elles ont ainsi assuré la première partie de Pierre Perret lors d’un de ses concerts en Ille-etVilaine. « On peut tenir deux heures en live, en mélangeant des reprises et des compos », précisent-elles.
notables, les Américains de Us The Duo, repérés sur YouTube et Vine, qui ont sorti par la suite leur propre album. Et, plus proche de nous, les trois Parisiennes de L.E.F SORTIR UN ALBUM (Lucie, Elisa & Juliette) qui, après De là à percer dans la musique ? Si leur carton de cet été (Summer, un poster des vidéos sur le Net peut medley des tubes de cette année. ouvrir des portes, la liste de ceux qui Sept millions de vues YouTube se sont imposés grâce aux reprises en quinze jours), vont sortir un reste maigre. Parmi les exemples skeud en 2016. B.M
MAIS QU’EST-CE QUE C’EST QUE CETTE BINCHE ? C’EST LA BIÈRE QUI CARTONNE EN CE MOMENT. L’IPA, POUR « INDIA PALE ALE », EST UNE MOUSSE D’ORIGINE ANGLAISE BLINDÉE DE HOUBLON. LA RECETTE DU SUCCÈS : UN GOÛT FRUITÉ ET UN MARKETING BIEN TRAVAILLÉ. HOUBLONNÉE. Au PMU des bleds, elle n’est pas prête de
SPORT ET NOURRITURE SAINE. L’IPA est une invention
remplacer la Stella pression. Dans les villes étudiantes en revanche, elle commence à essaimer. À Rennes, la bière IPA est à la carte d’une petite dizaine de bistrots du centre. « Depuis un an qu’on en propose, elle cartonne », constate-t-on à l’Amaryllis. Ce qui plaît ? « L’effet nouveauté, son goût aussi. » Lequel est identifiable dès la première gorgée : une attaque aromatique, avec des notes de litchi et d’agrumes. « C’est le fait qu’il y ait beaucoup de houblon dedans qui apporte ce côté fruité », explique Matthieu Breton, directeur de Coreff. La brasserie bretonne a elle aussi pris le pli de l’IPA à l’occasion de son 25e anniversaire l’an dernier. « On a décidé de marquer le coup en sortant une bière à tirage limité mais elle connaît un tel engouement qu’elle pourrait finalement rester au catalogue. »
britannique du 18e. Pour approvisionner les troupes coloniales en Inde, il fallait une bière qui supporte le voyage, d’où l’idée de la charger en houblon, un conservateur. Même les Belges de Leffe s’y sont mis depuis le printemps. « Notre cible ? Les trentenaires qui apprécient les bières de microbrasseries », développe la marque pour qui « le packaging a été soigné avec des bouteilles de 75 cl et 33 cl». Le marketing, c’est aussi ce qui fait le succès de cette mousse d’après IBB, distributeur de la BrewDog en France, qui se targue d’être l’une des références mondiales de l’IPA. « Elle correspond parfaitement à la politique du boire moins mais mieux prônée par une génération de jeunes actifs qui aiment le sport et la nourriture saine. » C’est sûr qu’on est loin de la Stella de comptoir et du bol de cahouètes.
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Deep Eyes
UNE GUITARE, UN ORDI, UNE WEBCAM, ET ROULE MA POULE. DE NOMBREUX ZIKOS S’ESSAIENT SUR LE WEB EN REPRENANT LA CHANSON D’UN AUTRE. UNE FAÇON DE FAIRE SES ARMES, MAIS PAS QUE.
WTF
LE RUNNING PART-IL EN COUILLE ?
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T2 AVEC TERRASSE
Depuis l’album Apart sorti en 1997, Peter Milton Walsh s’était montré très discret. Dix-huit ans plus tard, il revient avec The Apartments, groupe dont il est le seul membre. Le songwriter australien à la voix soyeuse a récemment sorti No Song, No Spell, No Madrigal, un retour salué par la critique et accompagné d’une tournée qui passe par Rennes (l’Ubu le 24/09) et Brest (La Carène le 26/09).
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AVANT BLUR ET OASIS
L’immense tube Common People des Anglais de Pulp et génies de la brit-pop fête cette année ses 20 ans. Le moment d’aller mater le docu Pulp, a film about life, death & supermarkets. Une projection (gratos) est proposée par L’Échonova le 22 octobre.
« LAISSEZ MOI SORTIR »
fortress
Nostalgique de Keroual depuis cet été ? No soucy, la team d’Astro revient avec une nouvelle soirée dans le cadre tip-top du château de Penfeld à Guilers. Cette 3e édition de Fortress a lieu samedi 5 septembre avec, entre autres, Rone et Bambounou. 10
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C’était le 16 mai à Rennes. Près de 12 000 personnes s’étaient donné rendez-vous au Parc Expo pour la première édition bretonne de la Color Me Rad. Une course, inspirée de la fête indienne de la Holi, où les participants (tous en t-shirt blanc) se prennent en pleine tronche de la poudre colorée à chaque kilomètre. De quoi imaginer, à l’issue des cinq bornes, des coureurs aussi chatoyants qu’une barquette d’Apéricubes pas encore entamée. Un type d’épreuve en plein développement. Si la Color Me Rad a depuis connu une deuxième édition à Lorient juste avant l’été, un nouveau concept s’apprête à débouler à Rennes à la rentrée : Electrodash. Ici, pas de pigments en poudre mais des néons fluorescents et des peintures phosphorescentes. Le tout, déguisé et accompagné de DJ estampillés Fun Radio sur l’ensemble du parcours. « Nous sommes sur du running festif, justifie David Drahy, de l’équipe organisatrice. Il n’y a ni classement ni podium. La course est davantage un prétexte pour faire la fête. » De quoi filer des boutons à tous les puristes du run pour qui la seule fantaisie autorisée est un t-shirt du Saint-Pol/Morlaix 98. « C’est vrai qu’il y a débat auprès des coureurs de la première heure concernant ce nouveau genre de courses, reconnaît le Breton Matthieu Le Maux, journaliste sportif à GQ et auteur du Dico du running. Certains critiquent l’absence de chrono, la distance trop courte ou encore le prix
ElectroDash
APRÈS LA COLOR ME RAD, UNE NOUVELLE COURSE FESTIVE VA S’ÉLANCER EN BZH : ELECTRODASH. POUDRES COLORÉES, AMBIANCE DISCOTHÈQUE ET LUMIÈRES FLUOS : MAIS POURQUOI LE FOOTING SE TRANSFORME-T-IL EN FÊTE DU SLIP ?
(en moyenne 35 €, ndlr). D’autres en revanche considèrent cela comme une rampe de lancement, un moyen supplémentaire de faire courir des gens qui n’avaient pas l’habitude. » Une façon d’attirer un public plus large. Ce que confirme David Drahy : « Un quart des inscrits n’ont jamais participé à une épreuve chronométrée et un tiers ne font pas de sport régulièrement. Les participants sont également plus jeunes : entre 18 et 25 ans en moyenne. L’idée, c’est de faire ça entre potes. » Un phénomène de bande que Matthieu Le Maux voit se développer à fond les ballons. « Le running est en train de devenir un sport collectif. Ce n’est plus une activité solitaire. On le voit avec les courses festives, les réseaux sociaux (à l’image de l’opé Boost Battle Run d’Adidas, ndlr) et les applis smartphone où, en plus de partager ses perf, on peut maintenant monter sa propre équipe et en affronter d’autres. Team contre team, comme dans Intervilles. » J.M
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« J’AURAIS AIMÉ NEW ORDER COMME REMPLAÇANT » Le 5 août dernier, à une dizaine de jours du début de La Route du Rock, les organisateurs annoncent l’annulation de la tête d’affiche de l’édition 2015, Björk (photo). « Il a fallu vite encaisser et se mettre au boulot pour trouver dans l’urgence un plan B », raconte le boss du festival François Floret. Même s’il assure ne pas avoir de liste de réservistes prévue à l’avance en cas de désistement, un trio de remplaçants possibles se dégage rapidement de leur brainstorming : New Order, Tame Impala et Foals. « J’aurais aimé New Order mais on m’a dit que le groupe ne comptait pas jouer avant la rentrée. » C’est
Inez Vinoodh
BJÖRK CET ÉTÉ À LA ROUTE DU ROCK, DAVID BOWIE EN 2004 AUX CHARRUES... CHAQUE ANNÉE, LES FESTOCHES DOIVENT COMPOSER AVEC LES ANNULATIONS D’ARTISTES, PARFOIS À LA DERNIÈRE MINUTE. ET PARTENT À LA QUÊTE DU PLAN B.
finalement Foals qui est annoncé, à peine 24 heures après le plantage de la diva islandaise. Joli coup. Mieux que les Vieilles Charrues en 2004 qui, confrontées aux problèmes de santé de David Bowie, l’avaient remplacé par Texas. Mouais, bof. Difficile de composer avec le calendrier souvent chargé des stars que tous les festivals s’arrachent. Heureusement pour les organisateurs, les gros lapins
restent rares. Le festival carhaisien n’a d’ailleurs pas eu ce problème cet été (seul un “petit” désistement a été enregistré sur la scène Gwernig). Et Art Rock, au printemps, n’a dû gérer que deux forfaits mineurs : Blue Pills (« un problème de voix »), remplacé par VKNG, et Coely (« mal de gorge »), suppléé par les locaux The Madcaps. « On s’en sort toujours, rassure le boss JeanMichel Boinet. Exemple en 1991 : les Pogues allaient annuler car Shane MacGowan était mal foutu, le manager me propose finalement qu’il soit remplacé par Joe Strummer… Résultat, un super concert. »
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TCHI-TCHAAAAAAAAA
Pour vous aider à surmonter cette satanée rentrée, plusieurs festivals de cinéma ont la bonne idée de squatter l’agenda cet automne. La 26e édition du Festival du film britannique de Dinard (du 30 septembre au 4 octobre) nous présente les dernières sorties venues d’outre-Manche. On y découvrira notamment Gold de Niall Heery avec Maisie Williams (photo), Arya dans Game of Thrones. Pour les fans de films fantastiques et chelous, Court Métrange apparaît comme le meilleur spot du 15 au 18 octobre à Rennes. Enfin, méga teuf à Brest du 10 au 15 novembre où le Festival européenn du film court fête sa 30e édition avec, comme d’hab, la crème des courts métrages dénichés sur le continent. Un anniversaire qui sera l’occasion d’une rétrospective de La Cocotte Minute, sélection de films ultra courts, sans dialogues mais bien barrés. 12
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DOSSIER
JE ZAPPE ET JE MATE
DE TF1 À NRJ 12 EN PASSANT PAR DIRECT 8 : LA TÉLÉ POPU OCCUPE UNE BONNE PART DU PETIT ÉCRAN. ON Y A PLONGÉ TÊTE LA PREMIÈRE POUR VOIR CE QU’IL Y AVAIT DERRIÈRE. 14
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DOSSIER
ON A PARTICIPÉ AU CASTING DE MOTUS... OOOO onsieur et madame Motus ont un fils, comment l’appellent-ils ? Momo. » La blague est presque aussi vieille que le jeu qui s’en inspire. Ça fait déjà 25 ans que Motus squatte le petit écran. Un quart de siècle que des binômes s’affrontent en duel en balançant des mots sous le regard de l’increvable Thierry Beccaro. Tout dans ce jeu pue le culte tant il est suranné : son générique, ses jingles, la boule noire (« ooooh-ohoh-oh-oh ! »)… Un concept aussi ancré dans la mémoire collective que bien rodé. Pour faire tourner le bouzin, les organisateurs doivent sillonner la France à longueur d’année à la recherche de chair fraîche. La dernière session en date des sélections bretonnes avait lieu en juin. Un mail d’inscription envoyé quelques semaines avant a suffi pour qu’on y soit convié. Rendez-vous était donné à la salle de réception du Brit Hôtel de Cesson, près de Rennes. Ce n’est pas encore les studios d’enregistrement de La Plaine Saint-Denis mais ça commence à sentir bon les paillettes. Le premier test est une épreuve écrite en solo. Façon Bac, le stress en moins. Quoique… Chaque candidat penché sur sa copie dispose de sept minutes pour trouver un max de mots avec
contraintes : un de 7 lettres commençant par la lettre A, un de 8 comprenant un V et un E, etc. Bizarrement, le cerveau a tendance à buguer sur des mots bien bien cons. Pas moyen qu’ils vous lâchent avant de les coucher sur le papier. Alors timidement, on tente un curieux V.A.G.I.N.A.L.E. Eh ben quoi, il est dans le dico, non ? Les copies sont corrigées dans la foulée par un des organisateurs, tandis que son acolyte tente de détendre l’atmosphère en attendant les délibérations. « Je déclare la foire aux célibataires ouverte », lâche-t-il au moment d’annoncer à certains venus en binôme que l’un des deux est trop mauvais pour continuer l’aventure. La télé et son impitoyable loi de la jungle.
« Beccaro est un gars sympa » Le speed dating improvisé permet de nous constituer en équipe avec Antonin, étudiant rennais en maths. S’il dit participer aux sélections « pour s’amuser », on se dit qu’on est quand même bien tombé quand il confesse avoir déjà gagné une autre émission du PAF, Des chiffres et des lettres, à cinq reprises (« mon gain max ? 1 000 euros »). Avant de se confronter aux grilles, les organisateurs rappellent qu’en plus de choper des mots, il faut se détendre (« trouver les bonnes lettres
« Trouver les lettres c’est bien, sourire c’est pas mal aussi » 16
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c’est bien, décrocher un sourire c’est pas mal aussi… »), parler assez fort et articuler convenablement (« il va falloir apprendre à épeler, à Paris ça ne passera jamais, mais JAMAIS »). Cette deuxième phase de sélection se déroule plutôt bien. Il faut dire qu’avant de venir, on s’était un peu préparé : visionnage de l’émission, entraînement régulier sur le site, lecture de bons conseils sur le forum officiel et, surtout, mémorisation d’une liste de mots pour éviter le blanc total. À la différence des habitués, on continue quand même à compter discrètement sur nos doigts le nombre de lettres en même temps qu’on épelle. Si la première grille est un échec, on réussit la seconde, gardant bon espoir d’être sélectionné. C’est aussi ce qu’espère Florian, Quimpérois de 28 ans, venu exprès jusqu’à Rennes pour disputer les sélections. « Je viens de tenter celles de Tout le monde veut prendre sa place l’autre jour mais j’ai échoué. Alors je change de jeu. » L’émission de la mi-journée présentée par Nagui serait une sorte
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de Graal inatteignable. « Ils cherchent des personnalités plus que des têtes, faut limite être acteur », poursuit Florian, à qui on a demandé pourquoi il mettait le réveil un samedi matin pour se fader de tels castings. « Par amusement, répond-il. J’ai toujours aimé jouer aux jeux de société, l’opportunité de passer à la télé voire de gagner un lot ajoute du piment à la chose. » Comme Florian, la majorité des candidats seraient surtout de grands enfants kiffant ces défis à base de mots, de lettres ou de QCM. Une sorte de gymnastique intellectuelle ludique où il y a toujours moyen de garder en souvenir de bonnes anecdotes. Exemple avec Erwan, trentenaire finistérien qui a participé à Motus il y a quelques années avec une amie. « Beccaro est un gars sympa, vraiment, se rappelle-t-il aujourd’hui. Il était venu nous voir à la pause de midi alors qu’on était au bar face au studio à boire une mousse en attendant notre tour (il y a jusqu’à sept enregistrements qui se succèdent sur une seule journée, ndlr). Par contre, on a fait zéro pointé. On avait révisé des mots de 7 et 8 lettres mais on a eu des grilles de 6. 17
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DOSSIER
« Nagui peut enchaîner 12 heures d’enregistrement, c’est grand » À la première, qui commençait par un S, ma copine a paniqué et a sorti “salope”. On n’a rien gagné mais on est passé au Zapping. » Thomas, lui, a remporté une paire de valises en participant aux Z’amours, autre émission culte de France Télé. C’était en 2007 et il n’était alors en couple avec sa copine Delphine que depuis deux mois. « On l’a fait sur un coup de tête, en mitonnant un peu au moment du casting. Fallait expliquer son engueulade la plus mémorable, on n’était pas ensemble depuis assez longtemps pour s’être déjà engueulés alors on a baratiné et c’est passé. » Jusqu’à se trouver face à Tex (« un connard qui traite le personnel comme de la merde »), à découvrir un envers du décor pas forcément très glorieux. « Le plateau est minuscule, les gens dans le public sont les candidats des autres 18
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émissions enregistrées dans la journée et les questions sont posées à l’avance, ce qui fait que tout est un peu cheap. » N’empêche que huit ans après, le couple Thomas et Delphine dure toujours…
« Il nous faut du biscuit » Début juillet, on est retourné à une sélection en région. À Quimper, une trentaine de personnes étaient présentes pour participer au casting de Slam, l’émission qui monte sur la 3. Le principe ? Une sorte de mots fléchés qui, étant donné la composition de l’assistance, semble plaire à une majorité de femmes. Comme Myriam, une quadra qui explique en pincer un peu pour l’animateur Cyril Féraud, le nouveau sourire à dix plaques des chaînes publiques et possible futur remplaçant de Julien Lepers.
Un des rares jeunes présents à Quimper, Vincent, profite d’une période de chômage pour écumer les castings du coin. « J’ai été recalé à Tout le Monde veut prendre sa place (décidemment…, ndlr) et aux 12 Coups de Midi. Je me laisse pas abattre. » À force d’entraînement, son discours de présentation est rodé, au point de séduire les deux productrices de l’émission présentes ce jour-là (« il nous faut du biscuit, expliquent-elles. Des anecdotes, du cocasse, que les gens n’aient pas peur de raconter leur vie »). Vincent s’en tire bien avec sa passion autistique pour les trèfles à quatre feuilles (« j’en ai plein mon portefeuille, vous en voulez un ? ») et ses sessions cerf-volant au quartier de La Défense à Paris quand il y travaillait (« y a pas meilleur spot là-bas pour pratiquer. »). Vincent est clairement là pour le délire et l’opportunité d’avoir son quart d’heure de gloire. L’inverse de Béatrice qu’on avait croisée en juin aux sélections rennaises. Cette Brétilienne de 59 ans, qui se fait appeler Nougatine35, est l’actuelle championne de France du Motus en ligne, jeu qu’elle a découvert il y a trois ans. Depuis, elle n’a pas décroché. « En journée, je me connecte de temps en temps, mais le soir je joue quasi quotidiennement. De 20 h à 1 h 30 du matin. » Nougatine35 est à ranger dans la catégorie des passionnés hardcore, au même titre que la Brestoise Suzie Le Pape, responsable de la section bretonne de la fédération francophone de Pyramide. « Le club a été fondé il y a 16 ans, peu après la création du jeu par France 2 (époque Patrice Laffont, Laurent Broomhead et MarieAnge Nardi, ndlr). J’ai mordu dans le gâteau dès les origines. Je mange
Pyramide, je pense Pyramide. » Suzie est uniquement fan par plaisir pur du jeu puisqu’elle n’a jamais franchi le cap de l’enregistrement d’un programme qui a fait son retour dans le PAF en 2014, après une décennie d’absence. « Je suis timide, et puis Paris c’est loin… Mais des membres du club ont déjà gagné 20 000 euros, c’est une fierté. »
« Pascal Brunner, paix à son âme » Mais on peut encore trouver plus déglingo : Dominique, le boss de Teleludophile.com, l’unique blog d’infos spécialisé dans le domaine. « Je suis un peu connu dans le milieu, ce qui fait que les producteurs m’appellent pour faire les pilotes, explique-t-il. C’est comme une famille, j’ai déjà rencontré pas mal d’animateurs. Reichmann ? Il était casteur avant de passer devant la caméra, il connaît le métier. Boccolini, une grande pro. Le meilleur étant Nagui : il peut enchaîner douze heures d’enregistrement d’affilée de N’oubliez pas les paroles. C’est grand. » Sa dernière participation ? Le Maillon faible il y a quelques mois. « Mon meilleur souvenir remonte à Mokshû Patamu (été 1997, présenté par Vincent Perrot, ndlr). On n’a jamais fait mieux depuis. Ou à la limite Fa Si La Chanter de Pascal Brunner, paix à son âme. » Et nous alors, est-ce qu’on va y passer à la télé ? La réponse arrive par mail, cinq jours après les sélections rennaises de Motus. Verdict ? « Suite à votre participation, nous avons le plaisir de vous informer que la candidature de votre équipe a attiré notre attention. Vous êtes susceptibles d’être appelés dans un délai qui va habituellement de 3 à 24 mois. » À nous la gloire, la coke, les hôtesses et Thierry Beccaro. Régis Delanoë et Nolwenn Mousset 19
DOSSIER
LES GÉNÉRIQUES DE JEUX TÉLÉ SONT-ILS DES
Tout musicien rêve de la mélodie ultime. Celle reconnue instantanément, qu’on sifflote inconsciemment dans la bagnole, qui traverse les époques sans perdre de sa force et de son efficacité. Cet art du refrain tubesque et intemporel n’est pas donné à tout le monde. Souvent l’apanage des plus grands noms de la pop music, cet exercice s’avère également plutôt bien maîtrisé par une certaine catégorie de musiciens : les compositeurs de génériques de jeux télé. Si je vous dis Motus, Le Juste Prix ou Des Chiffres et des lettres, vous vient alors en tête la musique de ces programmes : « ta-ta-ta-ta-TATAta-ta-ta-ta-TATA » (c’était Motus), « tin-tin-tin-tin-tin-tin-tin-TINTIN ! tin-tin-tin-tin-tin-tin-tin-TINTIN ! » (Des Chiffres et des lettres). Avouez que pour se nicher au fond de votre crâne, ces airs sont plutôt doués (on vous laisse vous démerder pour vous en débarrasser).
Parmi ces faiseurs de tubes : Pierre Billon. Ancien compositeur de Sardou (la musique d’Être une femme, c’est lui), ex-collaborateur de Johnny (il a été son directeur artistique sur dix albums) et auteur de la désormais culte Bamba Triste, la plus belle moustache de la variété française s’est également essayé à quelques émissions télé.
« Comme une musique de pub » « J’ai commencé par le générique de 40° à l’ombre sur FR3 au milieu des années 80. Ça m’avait plutôt amusé comme truc alors j’ai eu envie de proposer mes services à d’autres programmes. » Il créé alors Tatoo Music, une boîte spécialisée dans « l’identité sonore », et s’attaque aux jeux télé. À son palmarès : Le Juste Prix, Le Millionnaire, L’Or à l’appel, Le Bigdil... « C’est comme si tu composais une chanson, sauf qu’elle dure 20 à 30 secondes. Alors tu vas à l’essentiel. Soit tu attaques
« Le Juste Prix par un orchestre philharmonique, ça claque » 20
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tout de suite par le refrain, soit tu trouves le son imparable. Comme le petit bruit de ressort que j’ai placé dans le générique de Slam sur France 3. Tu l’as déjà entendu ? Il est vraiment sympa. » « C’est un peu comme une musique de pub, poursuit Khalil Chahine, auteur du thème des Z’amours en 1995. Tu dois, sur un format très court, installer une ambiance et coller au style de l’émission. Avec ce but plutôt simple : que la musique soit tout de suite identifiée. » Des mélodies souvent indissociables de leur programme qui, malgré les années et les modes, ne changent pas, ou peu. C’est ainsi que le musicien Jean de Aguiar, missionné pour repenser le générique Des Chiffres et des lettres à la fin des années 90, s’est retrouvé à le réarranger et non le réinventer. « En même temps, il n’y a pas de raison de le changer. Ce thème historique, qui date de 1965, fonctionne encore super bien. Ça serait une erreur d’en faire un nouveau, concède-t-il. Du coup, je lui ai juste apporté une nouvelle couleur : façon samba et chantée avec quelques la-la-la. »
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TUBES ?
S’il a lui aussi connu quelques arrangements en 25 ans d’antenne, le générique de Motus a cependant gardé la même mélodie. Un gimmick inventé par Georges Augier de Moussac (ancien zikos de Cabrel, Hallyday et Hugues Aufray avec qui il tourne toujours). « C’est le fils d’une amie, qui était à la production de l’émission, qui m’a demandé si je pouvais lui créer un thème. Je lui ai donc proposé cette mélodie que j’avais l’habitude de jouer à la guitare à mon petit-fils pour le faire rire. » Un air qui, à la gratte électrique, prend de jolies allures disco-funk. On dirait presque du Nile Rodgers, si si ! De quoi imaginer des destins tout autres à ces refrains si jamais ils étaient passés par la case album et non télé. Ce que reconnaît – sans regret – Pierre Billon. « Le générique du Juste Prix, tu le fais jouer par un orchestre philharmonique, franchement ça claque. Ça aurait une gueule terrible ! Je sais que ce n’est pas un genre extrêmement glorifiant mais c’est toujours rigolo de s’entendre à la télé. Être écouté tous les jours depuis des dizaines d’années par des millions de personnes, ça n’arrive pas à tout le monde. » Julien Marchand 21
DOSSIER
IL Y A DIX ANS, NAISSAIT DIRECT 8, LA « TÉLÉ C’est une légende que tous les animateurs télé racontent à leurs enfants au moment de les border. « Mon cœur, sais-tu qu’il existe un temps où D8 n’avait pas encore été envahi par Cyril Hanouna et Julien Courbet ? Aujourd’hui oublié, ce paradis perdu de la TNT était peuplé de gens joyeux, d’oiseaux multicolores et d’émissions faites avec amour. Une époque magique dont beaucoup ne se souviennent plus, mais qui continue de faire rêver ceux qui l’ont vécue. Ouvre bien grand tes oreilles, je vais te narrer son histoire. » Pour la journaliste Clélie Mathias, celle-ci a débuté en janvier 2005. Un matin, elle découvre dans Libération une petite annonce pour le moins étonnante. « C’était Vincent Bolloré qui expliquait qu’il recherchait, pour une nouvelle chaîne de télé, des réalisateurs, ingés son, maquilleurs, journalistes… Le lendemain, j’ai envoyé mon CV. Quinze jours plus tard, j’étais reçue par Bolloré, en personne, dans son bureau au dernier étage de sa tour à La Défense. » Enthousiaste et loquace, le patron breton lui dévoile alors le nom de la future chaîne, Direct 8, expose son projet (« le direct comme valeur ajoutée ») et lui explique le fonctionnement de la TNT qui s’apprête à débouler. « À l’époque, personne ne savait encore ce que c’était. » Comme Clélie, une cinquantaine de journalistes et animateurs – quasi tous débutants – sont recrutés quelques semaines avant le lan-
cement officiel de la chaîne. Pour eux, tout est à inventer. « On partait d’une feuille blanche. Participer à la création, ex nihilo, d’une nouvelle chaîne, c’était une chance incroyable », reconnaît Théo Phan, qui a été à l’antenne de Direct 8 les trois premières années.
Un poulet géant multicolore Pour motiver ses troupes, Bolloré prend aussi une décision plutôt maligne : chaque présentateur est promu patron de sa tranche horaire. « Sur les autres chaînes, tu n’es qu’un maillon, coincé entre le rédac chef et l’attaché de prod. Là, ce n’était pas le cas : le responsable c’était toi, t’étais obligé de tout faire », poursuit Théo. Une façon aussi de composer avec des effectifs réduits au max (« pour mon émission, on était deux : moi et un stagiaire »). Animateur du programme jeunesse Les Z’Octopus, Allan Van Darc a
« De 7 h à 22 h, 6 jours sur 7 : à un moment, c’était ma vie » 22
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également en mémoire des plannings bien bien ouf. « Je faisais du 7 h - 22 h, 6 jours sur 7. J’habitais à 300 mètres de la Tour Bolloré. À un moment, Direct 8 c’était ma vie. Mais c’était génial. » En plus de la présentation, Allan touche au montage, au générique, à la musique et s’occupe même de la peinture des décors, « comme au centre aéré ». Un do it yourself total que va connaître tous les services. Jusqu’au jour J. Le 31 mars 2005, Direct 8 prend l’antenne sur le canal 8 de la TNT à 19 h pétantes. À l’écran : un plan fixe de la Tour Eiffel, avant que Vincent Bolloré et Philippe Labro (alors vice-président de la chaîne et conseiller du patron milliardaire) n’accueillent tout sourire les téléspectateurs. Les deux zigotos ne le savent pas encore mais ils viennent de mettre sur orbite une curiosité cathodique qui, très vite, va faire parler d’elle. Si tous les foyers ne sont pas encore équipés de la TNT (seul 35 % du territoire pouvait la recevoir à son lancement, dont la Bretagne), le nom de Direct 8 arrive même aux oreilles de ceux qui ne l’ont pas
PIRATE » DE BOLLORÉ
« Pendant 20 secondes, la tête d’un technicien en gros plan » encore vue. Dans l’univers standardisé et policé de la téloche, son style détonne. Ici, pas de programmes achetés à l’étranger : tout est produit en interne. Pas d’enregistrements, mais du direct de 7 h à 23 h (y compris pour le réveillon de Noël). Pas d’écrans publicitaires, mais des “caméras de vie” postées dans les couloirs et l’open space qui montrent les employés en train de bosser, prendre un café ou allant pisser (le tout au son de Moonlight Shadow). Pas d’émissions trash mais une certaine bienveillance et pédagogie (« tous les jours, il y avait par exemple une émission de débat sur l’environnement qui durait 1 h 30. Faire une quotidienne sur ce thème et de cette durée-là en 2005, c’était plutôt innovant », estime Clélie). Pas une télé froide et impersonnelle, mais une mascotte bien fendard : Tuih-Tuih, un poulet géant multicolore (« une idée de Vincent »,
assure Allan) qui vient faire le con à l’antenne. Pas une chaîne qui se la pète, mais une certaine esthétique du cheap : en plein direct, un technicien peut venir changer un projecteur qui vient de griller, sans que personne ne s’en étonne sur le plateau.
Seize heures de direct De quoi diviser les spectateurs. Si certains se réjouissent de cette fraîcheur et y voient la télé du futur, d’autres parlent de programmes foutraques et déplorent l’amateurisme qui semble régner. Car avec ses seize heures quotidiennes de direct, la chaîne va inéluctablement faire face à un paquet d’imprévus et multiplier les couacs. Une télé sans filet où tout est possible à chaque seconde. « Un jour en zappant, je suis tombé sur Direct 8. Pendant une vingtaine de secondes, il y avait en gros plan la tête d’un technicien qui ignorait qu’il était filmé. C’est là que je me
suis dit “ça y est c’est ma nouvelle chaîne préférée”. » Cette confidence est signée Sébastien Liébus, cocréateur du Gorafi, qui avant de lancer le site d’infos parodiques a débuté sur la chaîne de Bolloré. Un job que lui même n’imaginait pas vraiment. Au chômage à ce momentlà, il squatte le forum Hardware.fr où tout le monde commentait ce qui se passait sur la chaîne : dérapages, couilles techniques, captures d’écran des présentatrices bonnasses et de Tuih-Tuih. « Moi, je m’amusais surtout à faire des fausses bandesannonces d’émissions. C’est comme ça que j’ai été repéré par la chaîne qui cherchait quelqu’un pour s’occuper du zapping » précise Seb qui aimait dans Direct 8 « le côté télé pirate. Un truc bricolé qui donnait le sentiment d’être totalement libre ». Un âge d’or qui – malheureusement – ne va pas durer. Après une année en freestyle, l’arrivée des premiers chiffres d’audience et du fiston Bolloré (Yannick) comme directeur des programmes va changer la donne. La grille se normalise, la pub fait son apparition, les plages de direct rétrécissent, de nouveaux présentateurs débarquent et les imperfections sont gommées. « En perdant l’esprit des débuts, la chaîne s’est banalisée », regrette Allan qui quittera la maison en avril 2011. Pour Clélie, qui y restera jusqu’en 2014, ce virage commercial était logique. « Avec l’annonce en 2011 du rachat par le groupe Canal +, Direct 8 est devenue plus classique. Il y avait de nouveaux enjeux. Mais cela fait partie de la vie de toute chaîne : grandir et évoluer. » Tant pis pour Tuih-Tuih. J.M 23
DOSSIER
La première fois qu’on t’a vu, tu jouais de la batterie dans un bal musette (lire Bikini, septembre 2011). Avant qu’on te retrouve deux ans plus tard dans Hollywood Girls. Comment t’as atterri là-bas ? J’ai la chance d’avoir dans mes contacts l’ancien PDG de NRJ 12. Il m’imaginait dans certains de ses programmes et m’a parlé des Anges. J’ai refusé car je suis pas fan de téléréalité, avant qu’il ne me propose Hollywood Girls. Sur le coup, j’ai hésité : j’avais jamais joué de ma vie.
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Camille Chenut, Rennais de 30 ans, a participé aux saisons 2 et 3 de Hollywood Girls, série de scripted reality sur NRJ 12.
Bikini
« C’EST PAS DU HITCHCOCK C’EST SÛR »
Pourquoi ne prennent-ils pas des comédiens professionnels ? Déjà, parce que les gens qui veulent vraiment percer dans la comédie n’accepteraient pas ce style de programme, question d’image. Ensuite, je ne pense pas que les producteurs misaient sur les talents théâtraux. Une partie des acteurs venaient de la téléréalité... Pour moi, Hollywood Girls, c’est le soleil, des sourires, des gens beaux. C’est pas du Hitchcock c’est sûr, mais quand t’es collégien et que tu rentres chez toi après les cours, t’as pas besoin de réfléchir.
de cocu : j’ai tourné mes scènes les deux premiers et les trois derniers jours. Du coup, j’ai presque eu un mois et demi de vacances entre les deux. On en a bien profité : beaucoup de sorties en boîtes où on a pas mal dépensé... Ce qui fait que financièrement, Hollywood Girls n’a pas été non plus la super bonne opération.
Comment ça se passe un tournage de scripted reality ? Tu reçois un script où chaque scène est décrite brièvement. Mais tu n’as aucun dialogue. Ce qui est compliqué, c’est Mais t’as quand même été pris... l’impro. Surtout qu’on avait droit à Ils m’ont demandé de jouer plusieurs cinq prises max par scène. C’est arrivé situations sans texte, juste en impro. plein de fois qu’on dise « bon, celleJe ne me suis pas trouvé terrible, mais là elle est nulle mais on la garde ». eux ont considéré que c’était correct. Cette série fonctionne beaucoup sur Et les conditions de travail ? les physiques. Ils avaient déjà le mec C’était une dizaine de scènes par jour. typé espagnol, le Maghrébin... Mais On commençait tôt le matin mais ça pas de petit blondinet jeunot. Je pense allait. Les scènes intérieures étaient que c’est plus mon profil que mes réalisées à Paris, et celles extérieures à talents d’acteur qui les a intéressés. Los Angeles. Là-bas, j’ai une chance
Tu as désormais repris les bals musette. Passer des States aux salles des fêtes bretonnes, pas trop dur ? L’atterrissage n’a pas été facile. Il m’a fallu un petit temps d’adaptation. Mais Silvère Burlot (l’accordéoniste qu’il accompagne, ndlr) est un ami et c’est toujours un plaisir de jouer avec lui une dizaine de bals par mois.
Qu’est-ce qui t’a fait accepter ? Pour moi qui suis musicien professionnel, je me suis dit que ça restait dans le domaine artistique. Ce genre d’expérience te permet aussi de rencontrer du monde. À une semaine des castings, je me suis donc mis à m’entraîner dans ma chambre devant la glace. Résultat ? C’était vraiment mauvais.
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T’étais bien payé justement ? Convenablement. Le smic acteur on va dire... Même si quand tu regardes les chiffres d’audience, tu te dis que ça pourrait mériter un peu plus.
On t’a proposé d’autres émissions ? Récemment, un casting pour Les Princes de l’amour, une émission de drague. Je leur ai dit que j’avais une copine, ça n’avait pas l’air de les déranger. Mais j’ai quand même refusé.
PAPIER
LE RETOUR DE LA MOB
DÉLAISSÉES DANS LES ANNÉES 2000 AU PROFIT DE L’IGNOBLE SCOOTER, LES MEULES RUGISSENT À NOUVEAU DANS NOS BLEDS ET DANS NOS VILLES. DERRIÈRE CE COME-BACK, DES TARÉS DE CUSTOM ET DE BOLIDES VINTAGE.
Atelier Vandale
i toi aussi tu as grandi dans les années 90, les récrés au collège étaient des petits moments de paradis. Calées entre le cours d’histoire et celui de techno, ces quinze minutes de liberté offraient à chacun la possibilité de faire tout ce qui lui chantait. Il y avait ceux qui jouaient au foot sur le terrain de hand, les chanceux qui roulaient des pelles, ceux qui enchaînaient les tournantes au ping-pong sous le préau, les lècheculs qui révisaient ou encore ceux qui squattaient devant la machine à bonbons (« trop bons les Skittles violets ! »). À côté de ces tribus de bipèdes, une catégorie encore plus cool avait fait son nid près de la grille d’entrée où leurs bécanes les attendaient : 103 SP, MBK Club Jazz, Magnum Racing XR… Des mobylettes équipées selon les recommandations du magazine MobChop : roues pleines et pot Ninja pour les pilotes, sticker tâche d’huile pour les esthètes, guidon torsadé et garde-boue chromé pour les frimeurs... Ici, que des brêles et des meules (surtout pas de scoot, truc de bourges !). Toutes trafiquées, toutes customisées. 26
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Si les mob ont aujourd’hui déserté les cours de récré, l’amour nostalgique pour ces pétoires persiste. Vingt ans plus tard, les inconditionnels du cyclomoteur demeurent et sont même de plus en plus nombreux à le revendiquer. C’est le cas d’Étienne, Maxime, Julie, François et Joan, les cinq loustics d’Atelier Vandale. Né en 2012, ce collectif mécanoartistique a réussi le joli coup de rendre à nouveau la mob sexy dans les rues de Rennes. Après avoir commencé par retaper et relooker des vélos, Vandale s’est attaqué au custom de meules, attiré par leur dégaine et les possibilités de transformation qu’elles offraient. « Au départ, on voulait juste rouler avec de belles bêtes. Une mob, c’est plutôt facile à transformer et, visuellement, t’as moyen de bien t’amuser. » Des engins qu’ils démontent, découpent, soudent et repeignent, avec une esthétique rétro et de jolies typos.
Road trip « Pour tout ce qui touche à la mécanique et au moteur, on a appris sur le tas. On trouve aussi pas mal de trucs sur le Net », précise la bande qui, après la Belgique et la Bretagne, s’est lancée cet été dans un nouveau road trip pendant sept jours sur les routes normandes, tels des Hells Angels du 50 cm3. « Quand t’es plusieurs à rouler en mobylette, tu passes pas inaperçu. Ça a un côté gang. T’as l’impression d’avoir 15 ans, c’est génial. » Lui aussi entouré de ses potes avec qui il a fondé la Breizh Racing Team à Hennebont, Brendan Le Guyader, 23 ans, a également chopé la manie de bidouiller tout ce qui avait deux roues. « Quand j’étais ado, j’ai demandé pour Noël un poste à souder et une scie à métaux. J’avais envie de modifier mon BMX, se souvient-il. J’ai descendu l’assise de 20 centimètres et mis une nouvelle peinture. » 27
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Dès lors, il se passionne pour le custom et envahit la baraque familiale avec des bicyclettes et mob récupérées à la déchetterie. Obligeant même sa mère à lui faire construire un cabanon dans le jardin en guise d’atelier. Y passeront 150 vélos (!) et une vingtaine de bolides motorisés, dont certains seront entièrement revus : cadre, fourche, freins, cylindres, vilebrequins, carénage, échappement, peinture… « J’ai pourtant aucune formation en mécanique. C’est en démontant des moteurs que j’ai compris comment ils étaient foutus », explique cet ancien étudiant en chaudronnerie qui, après quelques travaux effectués gracieusement pour des copains, rêve d’ouvrir un jour son propre atelier moto. « Modifier la bécane d’un client selon ses désirs, ça serait l’aboutissement. »
confesse Manu. J’ai bossé auparavant pour un concessionnaire : tout est standardisé... Je préfère l’ancien. Pour nos créa, on garde d’ailleurs les moteurs d’époque. Il nous arrive aussi de refaire certaines pièces de façon artisanale. » Souhaitant créer des modèles uniques, les deux collègues, l’un mécano, l’autre carrossier/peintre/ graphiste, se sont positionnés sur Moteurs d’époque la customisation de A à Z. « On Un pas franchi en 2014 par Manu souhaite que les motos qui sortent de Jouan et Yann Collet. Ces garçons notre atelier ne ressemblent à aucune de 27 et 29 ans ont créé Sur les autre. Alors, on retravaille tout. Soit Chapeaux de Roues, un atelier de le client nous explique ses envies, custom moto, à Tréméven près de soit il nous laisse carte blanche. » Quimperlé. Leur créneau : la trans- Une moto complète leur demande, formation et personnalisation de en moyenne, trois mois de taf. Un motos vintage. Passées par leur délai qu’ils essaient de tenir malgarage : des machines de 1972, gré un carnet de commandes qu’ils 1976, 1980, 1982… « Les nou- avouent plutôt bien rempli. « On veaux modèles ne me plaisent pas, sent clairement un engouement pour
« Je n’aime pas les nouveaux modèles : tout est standardisé » 28
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le custom. Même auprès des gens qui ne s’y connaissent pas trop en moto », indique Yann. Idem pour les lignes vintage. « Ce qui marche beaucoup actuellement, c’est le style “café racer” (moto avec peu de carénage et un guidon bas. Modèles nés dans les années 60, ndlr). Des grosses marques actuelles, Yamaha par exemple, reviennent d’ailleurs à ce genre de modèles rétro. »
La fin du neuf Un relooking de la part des constructeurs qui, hélas, ne concernera pas les mob. Dernier spécimen encore en production en France, la 103 Vogue de Peugeot connaît même ses dernières heures. « Fin 2017, arrive l’échéance Euro 4. Une norme anti-pollution qui nous obligera à arrêter la distribution au niveau européen », annonce Alexandre Albert, chef de produit chez Peugeot Scooters. Oui, vous avez bien lu : dans deux ans, plus aucune meule neuve ne sera commercialisée en France.
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« Une page se tourne, mais il faut savoir que le marché baisse d’année en année. Un jeune qui a 14 ans aujourd’hui va privilégier le scooter à la mobylette, pour des raisons de confort surtout. » En 2014, seules 1 345 Vogue ont été vendues par Peugeot (prix : 889 €). Des chiffres trop bas selon Alexandre Albert pour amortir des investissements de remise aux normes. L’offre d’occasion sera alors la seule option. Une perspective qui, à vrai dire, ne casse pas trop les bonbons de nos customiseurs hardcore pour qui seuls les modèles d’époque comptent. Seul risque de cet arrêt de la distribution : une possible hausse des prix. Une inflation déjà constatée par les gaziers d’Atelier Vandale, habitués à choper leurs bécanes sur Le Bon Coin. « Il y a cinq ans, on avait acheté un lot de trois pour 200 €. Aujourd’hui, t’es content si t’en trouves une à ce prix-là. » De quoi imaginer des tarifs supérieurs à partir de 2017. La mob, un placement d’avenir. Julien Marchand 29
INTERVIEW
CAMGIRLS : NOUVELLES E-DOLLS
EN S’EFFEUILLANT CHEZ ELLES DEVANT LEURS ORDIS, LES CAMGIRLS SONT DEVENUES LES NOUVELLES STARS DU X. PARMI ELLES : JESSICA, UNE BRESTOISE DE 22 ANS, QUI A FAIT DE CE TÉLÉPHONE ROSE 2.0 SON JOB PRINCIPAL.
Comment es-tu devenue camgirl ? Avant de commencer la webcam peu après mes 18 ans, j’avais déjà fait quelques films X, amateurs et pro. Jusqu’au moment où pas mal de personnes qui suivaient mon parcours m’ont demandé si je faisais de la cam. Je me suis alors dit « pourquoi pas ». J’ai débuté par des sites gratuits, de manière épisodique, entre deux tournages. À cette époque, je n’avais pas de planning de diffusion : je le faisais uniquement certains soirs pour m’amuser. Je ne gagnais pas d’argent avec. 30
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À quel moment tu t’es dit que ça pouvait être un business ? Après deux années dans le X, j’ai décidé d’arrêter les films. Je venais de me mettre en couple et je n’avais plus forcément envie de partir en tournage. Et puis le porno est un milieu assez dur. Si tu veux faire carrière dans le X aujourd’hui, il faut partir à l’étranger. Ce que je ne souhaitais pas. C’est à partir de ce moment que je me suis dit que je voulais faire de la webcam de façon « professionnelle ». C’était une activité dont j’entendais de plus
en plus parler et dont j’imaginais le développement. Combien de temps tu consacres à cette activité ? Le nombre de jours où je travaille est variable. Ça peut être une seule fois par semaine en soirée, ou alors plusieurs jours de suite en journée. Si ça me permet d’en vivre ? En se connectant souvent, oui. Il suffit que je diffuse un peu plus régulièrement et je gagne vite de l’argent. C’est une activité plutôt rentable, suffit juste de s’investir. À la rentrée, je
EN ATTENDANT LA RÉALITÉ VIRTUELLE ?
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vais d’ailleurs prévoir un planning Les camgirls ont pas mal de sucde diffusion plus dense, avec un cès ces derniers temps, comment minimum de trois jours par semaine. t’expliques ça ? Cela change du film porno. Même Combien tu gagnes ? si les deux choses sont virtuelles, (Elle réfléchit) En moyenne 100 € il y a une part de réel avec la webpar soir, pour trois heures de tra- cam. On a la personne en face de vail. Mais c’est un peu tabou dans soi, on peut lui parler, lui demanle milieu de parler de ça, je préfère der des choses. C’est une sorte de ne pas en dire plus. prolongement du téléphone rose, avec la vidéo live en plus. Concrètement, comment se déroule une session webcam ? Avec le développement des plateLes shows peuvent se faire par formes et le nombre croissant de Skype, mais ce n’est pas ce que je camgirls, la concurrence est-elle préfère : tu es obligé de trouver les rude aujourd’hui ? clients à l’avance et de prévoir un Une fille lambda qui débarquerait rendez-vous avec eux. Je suis sur- maintenant, cela serait sans doute tout présente sur les plateformes de plus compliqué pour elle. Moi, j’ai cam (EuroLive, Xcams, Socialporn, eu la chance de commencer un peu Chaturbate, ndlr). C’est beaucoup avant les autres, j’ai réussi à me plus simple : les gens présents sur le faire un petit nom donc ça va. Le site peuvent se connecter à ma cam fait d’avoir fait du X était aussi un dès qu’ils me voient en ligne. Sur ces plus. Je ne sors pas de nulle part. sites, il y a deux façons de gagner de J’ai déjà mon cercle, mes fans, mon l’argent : soit je fais payer à la minute compte Twitter où je peux avertir un show privé à un utilisateur, soit mes 30 000 followers de mes proje fais payer à l’action quand je suis chaines sessions... Tout ça, ça aide. en mode public. Par exemple, pour que je montre mes seins, je demande Il y a l’air d’avoir une forte proximité aux internautres de m’envoyer un entre camgirls et utilisateurs… certain nombre de tokens (monnaie On peut parler de petite commuvirtuelle, ndlr) et, une fois la somme nauté. Lorsque je suis connectée, je collectée, je m’exécute (il s’agit du me rends compte que ce sont soumodèle “freemium”, mode de paie- vent les mêmes pseudos qui viennent ment qui tend à se généraliser, ndlr). me voir. Certains sont là à chaque fois, durant les trois heures du show Tu préfères le job d’actrice X ou (ses fans les plus fervents lui offrent de camgirl ? même des cadeaux via sa wishlist C’est beaucoup plus agréable la cam. sur Amazon : lingerie, cosmétique, Je suis chez moi et ça marche comme jeux vidéo, ndlr). Généralement, j’ai j’ai envie que ça marche. Ce sont toujours une cinquantaine de permes règles. Certes, les internautes sonnes connectées simultanément. paient pour me voir mais j’ai quand C’est un score plutôt bon pour un même le droit de dire ce que j’ai site français. Mais vu que je pense envie de faire ou non. C’est plus migrer vers un site international dur de dire « non » dans le X où, d’ici quelques temps, j’espère avoir généralement, les producteurs t’im- une plus large audience. posent une tenue, un maquillage, des pratiques… En webcam, rien Recueilli par n’est programmé. Julien Marchand
Si ces derniers mois ont été marqués par l’ascension des camgirls dans le fap game, la popularité de ces dernières n’est pas prête de s’arrêter. « Il est vrai qu’on a beaucoup parlé de la cam cette année, mais on n’en est encore qu’au début. Pour l’instant, cela ne touche pas le très grand public », situe Stephen des Aulnois, le boss du Tag Parfait, un site de décryptage de la culture porno. Une perspective qui laisse imaginer un certain nombre de développements, technologiques notamment. Les sextoys connectés (eux aussi en plein boom) sont en effet déjà dans la place. « Sur le site Chaturbate, des modèles utilisent OhMiBod, un vibro que les utilisateurs peuvent contrôler en donnant de l’argent. » Une appli qui cartonne pas mal, plaçant très régulièrement le hashtag #OhMiBod en tête sur Chaturbate. Si cet objet offre une relation unilatérale (seule la camgirl est équipée), l’arrivée dernière de Kiiroo (deux sextoys connectés réagissant aux stimulations de l’autre) permet d’entrevoir un potentiel essor de la télédildonique (soit le sexe à distance par télécommunications). Reste les casques de réalité virtuelle. Si l’Oculus Rift et consorts font naître des possibilités assez dingo pour les jeux vidéo, le journalisme et le cinéma, le X compte bien lui aussi profiter de ces bécanes. Pour des films tout d’abord (il en existe déjà), en attendant la cam ? Pas pour de suite, estime Stephen. « Filmer à 180° et en 3D, c’est simple techniquement. Le problème, c’est la retransmission en direct. En termes de bande passante et de stream, ce n’est pas encore possible. » 31
DOSSIER
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CHRONIQUES DE LA GUERRE ORDINAIRE
ILS SONT PRÉSENTS LÀ OÙ ÇA PÈTE SUR LA PLANÈTE. UKRAINE, MALI, BURUNDI... MALGRÉ LES DANGERS, LES REPORTERS DE GUERRE Y VONT POUR TÉMOIGNER. MAIS QUI SONT-ILS ? ET POURQUOI VONT-ILS LÀ OÙ TU N’OSERAIS PAS ALLER ? es grands reporters ont couvert plus de guerres que n’importe quel militaire. » Le constat est signé Alexandre Solacolu, directeur du festival Photoreporter à Saint-Brieuc. Un exemple ? Patrick Chauvel, légende du journalisme qui a débuté dans le métier par le Vietnam et la Guerre des Six Jours. À 66 ans, il est toujours sur le terrain, en Lybie, en Turquie… Fantasmée par la littérature et le cinéma (Salvador, Secret d’État…), l’activité suscite l’admiration mais très peu de monde – y compris parmi les journalistes – accepteraient de la pratiquer. Car, comme le dit encore Alexandre Solacolu, « on en ramène plus de cicatrices que d’argent ». Être jeune reporter en zone de conflit en 2015, c’est accepter de se dépouiller pour aller chercher l’information, sans être sûr de vendre ses articles, tout en devant le plus souvent avancer les principaux frais.
« L’âge d’or, c’était les années 80, cadre Alexandre Solacolu. Le magazine Paris Match était un gros argentier. Pour un reportage, certains photographes pouvaient se payer un appart à New York. Depuis, la profession s’est mondialisée. Des bons reporters, il y en a désormais dans le monde entier, alors pourquoi un média français financerait-il un compatriote pour couvrir un conflit à l’autre bout du monde ? S’il se passe quelque chose en Afghanistan, les photographes afghans sont sur place… » Constat partagé par Aurélie Viel, chargée d’organisation du Prix Bayeux des correspondants de guerre. « Non seulement les médias et les agences ont moins de moyens, mais en plus ils prennent moins de risques à envoyer des journalistes sur le terrain, constate-t-elle. Il y a le coût des assurances, la menace d’une prise d’otage dans certains endroits… Aller en Irak aujourd’hui nécessite des
moyens énormes : transport, logement sur place, chauffeur, fixeur (le local servant de guide, ndlr)… » C’est pourquoi malgré la grande densité de journalistes diplômés chaque année, ils sont peu à partir à l’aventure. Une majorité d’hommes, remarque Aurélie Viel, « confrontés à un contexte géopolitique instable en même temps qu’à une profession en mutation. Il n’y a jamais eu autant de conflits dans le monde, il n’y a jamais eu autant de médias pour les couvrir, mais il n’a jamais été aussi difficile d’en vivre. Il faut avoir la passion de témoigner. Pourquoi le font-ils ? Un journaliste récompensé du Prix Bayeux m’a dit un jour ceci : “pour goûter à la sensation d’être là où l’Histoire est en train de se jouer”. » Régis Delanoë Illustration : Étienne Laroche Festival Photoreporter à Saint-Brieuc du 3 octobre au 1er novembre 33
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« LE GENRE DE JOURNÉE QUE TU RACONTES PAS Anthony Fouchard, 22 ans, couvre le conflit centrafricain depuis janvier 2014. « Quand je me suis lancé dans des études de journalisme (IUT de Lannion, ndlr), j’avais de grands rêves de parcourir le monde, d’aller voir là où ça bouge. Alors quand j’ai appris le lancement de l’opération Sangaris en Centrafrique fin 2013, je me suis dit que c’était le bon moment. Ça tombait bien : j’étais en fin de CDD dans un journal local et j’avais quelques économies. Je suis parti la boule au ventre, sans avoir jamais pris l’avion de ma vie jusque-là ! À la sortie de l’aéroport de Bangui, j’avais pas fait 200 mètres que je tombe sur mon premier mec en train de se faire découper. Il est 6 h du matin, je sors de 15 heures de vol, je me dis que ça va être long… Je suis resté trois semaines la première fois, puis de nouveau en juin 2014, en pleine
Coupe du monde. L’erreur : aucun média ne s’intéressait au conflit à cette époque ! Finalement, j’y suis retourné une troisième fois en mars dernier et depuis ça commence à bien marcher pour moi, avec des piges pour Le Monde, RFI… Faut de la persévérance, c’est clair. Faut aussi être débrouillard, oser sortir de la capitale, Bangui, aujourd’hui plutôt pacifiée, pour se rendre là où ça se passe, non sans se faire des frayeurs. La pire ? Une fois où avec mon fixeur (un local chargé de faire le lien entre les journalistes étrangers et la population, ndlr), on s’est retrouvé à devoir passer un checkpoint de miliciens qui venaient de se faire attaquer par l’armée française. Forcément, j’étais une cible. On est passé en tenant les portières de la voiture, avec des mecs tout autour et des hélicoptères qui volaient 10 mètres
au-dessus pour essayer d’éloigner la foule surexcitée. C’était Mission Impossible ! Tu sors d’une journée pareille, t’évites de la raconter à tes parents ensuite… Plus ça va pourtant et plus je me plais ici, au contact de ces miliciens et rebelles, même si je suis pessimiste quant à l’avenir du pays…
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« LES MECS ÉTAIENT LÀ POUR FAIRE UN MAXIMUM international. L’Afrique de l’Ouest francophone me semblait un bon terrain pour commencer : le Sénégal d’abord, puis le Mali où j’ai débarqué avec la fin de mon prêt étudiant et 36 heures de taxi-brousse. Les djihadistes régnaient en maître au nord du pays, et je suis arrivé juste au moment de l’offensive éclair de la France. Je me suis direct mis en route vers la ligne de front, où je suis resté trois mois. En tant François Rihouay, 30 ans, suit le que pigiste, il a fallu improviser pas conflit malien depuis janvier 2013. mal et compter sur la solidarité des « Après Rennes où j’ai grandi, j’ai confrères de la BBC, de Reuters, terminé mes études au Canada où d’AP… J’étais là avec mon petit j’ai pris goût pour le journalisme boîtier numérique, ma sacoche en 34
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cuir contenant mon enregistreur radio et mes calepins. C’était un apprentissage express mais j’en suis vite arrivé à devoir refuser des piges. J’ai assisté à des libérations de villages, avec la population en liesse façon été 44, ça fout les poils. Après, faut faire attention, car ici le journaliste est une monnaie d’échange. Le pire, ça a été à Gao, le 21 février 2013, où j’ai suivi les combats entre un petit groupe d’une trentaine de djihadistes et l’armée malienne qui s’en sortait comme elle pouvait. Les mecs étaient pas là pour repartir, il fallait faire un maximum de victimes et mourir
Anthony Fouchard
À TES PARENTS »
L’expérience t’apprend à maîtriser le danger, même si on n’est jamais à l’abri et que ça reste quand même un métier exposé. Mais je commence à m’y sentir à l’aise, contrairement au Moyen-Orient, où c’est encore plus dangereux pour le coup. Risquer de se faire découper pour un article payé 100 euros, non merci. »
DE VICTIMES » au combat. C’est pas très rassurant… Mais le boulot est intéressant et la population plutôt bienveillante, même si c’est pas toujours facile d’avoir un rapport sain avec elle quand on porte casque, gilet pare-balles et qu’on sort d’un blindé de l’armée. J’envisage de rester encore quelques temps au Mali, puis pourquoi pas aller dans un autre pays. Retourner en France ? Pour les chaînes de télé, un correspondant de guerre n’est utile que sur le terrain. Sinon, il me faudra certainement repasser par les marronniers sur la rentrée des classes ou le sapin de Noël. Franchement, je ne suis plus sûr d’en avoir envie… » 35
DOSSIER
« J’ÉTAIS TÉTANISÉ, INCAPABLE DE SORTIR » Paul Gogo, 24 ans, travaille sur le conflit ukrainien depuis avril 2014. « Je suis allé une première fois en Ukraine en 2012 au moment des élections et je suis tombé sous le charme de Kiev. Lors des premières manifestations sur la place Maïdan en décembre 2013, j’étais étudiant en master journalisme à Rennes et j’ai décidé de sécher une semaine les cours pour aller là-bas et réaliser quelques photos. Puis, dès la fin de mon année d’études, j’y suis retourné et j’ai filé à Donetsk, où ça commençait à péter. J’ai vu la guerre arriver dans la région, les avions de chasse dans le ciel, les gens en treillis, les checkpoints se mettre en place. Je n’étais pas forcément préparé à ce que ça dégénère aussi vite. Je me suis fait de grosses frayeurs, allant par exemple
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Paul Gogo
à pied à l’aéroport de la ville qui venait tout juste d’être bombardé… À Donetsk, presque tous les journalistes logeaient dans le même hôtel mais je n’avais pas les moyens de me payer une chambre alors j’avais pris un appart à côté. En novembre, les combats se sont intensifiés, avec des tirs d’obus qui retentissaient certaines nuits toutes les vingt secondes. Les fenêtres s’ouvrent, se fêlent voire explosent avec le souffle. J’ai passé une semaine enfermé dans ma chambre, incapable d’en sortir, tétanisé par la peur. Un soir aussi, alors que je sortais d’un restaurant, une explosion a retenti à 200 mètres. J’y suis allé, il y avait deux cadavres en pleine rue. Ici, on appelle ça la loterie nationale : les mecs tirent des bombes sur une zone, pas sur un lieu en particulier, ça peut
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te tomber dessus… C’est passionnant à vivre, même si on est plus dans de la survie concernant les pigistes comme moi. Un article dans Libé me permet de gagner 250 euros, mais une fois que tu as tout remboursé ce qui t’a permis de le faire, il ne te reste plus grand-chose… Niveau vie personnelle, c’est difficile aussi : j’avais fait l’erreur de laisser un message à ma copine et juste avant que ça coupe, on entend un bombardement. Elle a fait des crises de panique, on s’est séparés… Et pourtant je suis heureux dans ce pays. C’est intéressant d’essayer de le comprendre, pas seulement en période de conflit. Pour autant, je sais que je suis là pour couvrir une guerre et que mes revenus dépendent de son intensité, il y a quelque chose de cynique là-dedans… »
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Maxime Le Hégarat, 32 ans, a couvert le coup d’État avorté au Burundi en mai dernier. « Après des études de journalisme à Lannion, je suis parti en Afrique : en Casamance d’abord, puis la Côte d’Ivoire et la République démocratique du Congo où je suis désormais installé, même si je voyage pas mal autour. Je travaille pour la BBC, avec qui j’ai effectué une formation sécurité avec d’anciens militaires anglais. On y apprend les bons réflexes. Par exemple, si on est pris au milieu d’une fusillade, il faut savoir se cacher non pas à l’arrière d’une voiture, où se trouve le réservoir, mais à l’avant, où la mécanique des moteurs peut ralentir la trajectoire d’une balle. Je reviens juste du Burundi, où j’ai été envoyé couvrir le coup d’État manqué. C’est beaucoup d’adrénaline, on dort très peu, on est dans l’action, j’ai vu la police tirer à balles réelles sur des étudiants… J’ai aussi côtoyé d’anciens génocidaires au Rwanda, kalach’ en main, lance-roquettes sur l’épaule, faut pas céder à la pression psychologique que ces gars-là cherchent à t’imposer. Couvrir d’autres régions ? Pourquoi pas. Même si dans certaines zones comme la Syrie, tu sais que tu ne prendras pas de plaisir car tu ne maîtrises pas le danger. Et mourir pour une connerie d’histoire politique, ce serait embêtant (sic). » 37
PAPIER
SI LE MANNEQUINAT A CONNU SON PIC DE MÉDIATISATION DANS LES ANNÉES 90 AVEC LES “SUPERMODELS”, IL CONTINUE D’ATTIRER SON LOT DE PRÉTENDANTS. DU SHOOTING LOCAL AU CASTING INTERNATIONAL, ON A SQUATTÉ AU PIED DES PODIUMS. laudia Schiffer défileraitelle aujourd’hui dans une galerie marchande, devant une Brioche Dorée ? « Ach ach ach ! Che crois que za ne va pas zêtre pozzible ! » Carla et Chloé, elles, l’ont fait. Au centre Alma de Rennes plus précisément où 360 jeunes gens, âgés de 14 à 22 ans, s’étaient réunis fin mai pour le casting Elite Model Look, l’un des huit qui s’est tenu en France cette année. But de ce tremplin considéré comme l’un des plus prestigieux : recruter et former les top models de demain. Celles qui succéderont à Cindy Craw38
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ford, Karen Mulder ou encore Gisele Bundchen, toutes les trois révélées par ce concours qui, depuis 1983, part à la recherche de toutes les méga bombasses de la planète. « Nos scouts (casteurs de mannequins, ndlr) ont toujours un œil qui traîne lorsqu’ils sont dans la rue, ils bossent H24. Néanmoins, le casting est un moyen important de recrutement. Dans notre portefeuille de top, beaucoup sont issues du concours. Ça serait dur de s’en passer, fait savoir Cécile Rousseau, la chargée de com d’Elite qu’on imaginait pourtant crouler sous les candidatures spontanées. Avec des
opérations de ce genre, nous sommes dans une démarche de proximité. Nous allons à la rencontre de jeunes filles qui n’auraient jamais intégré le circuit. Elles osent plus facilement candidater lorsque la sélection se déroule près de chez elles. » C’est le cas de Chloé, élève en 4e et dossard 2663 scotché sur le t-shirt. « J’avais envie de tester. Des copines m’ont dit que j’avais mes chances alors je suis venue. Je me fais pas vraiment d’illusions mais bon, on sait jamais », espère-t-elle avant de monter sur le podium. Si cet essai ne sera pas le bon pour Chloé, non retenue malgré sa jolie
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bouille, il le sera pour Carla, Loane et treize autres candidats sélectionnés pour la finale à Paris (qui s’est tenue fin août). Parmi les lauréats du jour : dix garçons, l’une des nouveautés de cette édition 2015 (« le marché se développe. De plus en plus de marques ont des besoins en mannequins homme »). Axel, étudiant rennais aux faux airs de Brandon Walsh (<3), fait partie des heureux élus. S’il raconte avoir déjà posé devant un photographe (« pas en pro, juste pour le plaisir »), ce défilé était une première pour ce garçon qui parle déjà comme Kate Moss (« mon point fort ? Mes yeux verts. C’est important le regard »). Ce qui visiblement a séduit les trois membres du jury. « Ce que nous recherchons, ce sont des mannequins complets. Plusieurs critères entrent en jeu : la beauté naturelle, la taille (1 m 72 minimum pour les filles, 1 m 84 pour les gars, ndlr), la photogénie, l’harmonie du corps, l’attitude… Il faut que tout cela matche. Prenons la photogénie par exemple : il y a des gens très beaux en vrai mais qui ne dégagent rien quand on les photographie. Et, a contrario, des personnes qu’on ne remarque pas plus que ça qui explosent en photo, explique Victoria Da Silva, 39
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Klass Kaerenn
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la directrice générale d’Elite Model Look, présente à Rennes. À l’arrivée, c’est un métier que nous proposons aux gagnants de la finale nationale. Avec des contrats, des défilés, des shootings… »
Top 50 mondial Des carrières de top model qu’ont pu embrasser les Bretonnes Manon Piéto et Joséphine Le Tutour, respectivement lauréates en 2009 et 2014. Si la première a depuis décidé de tourner la page (« le mannequinat ne m’intéresse plus, je n’ai pas vraiment envie d’en parler », nous a-t-elle sobrement répondu), la deuxième continue l’aventure. Aujourd’hui établie à New York, la Morbihannaise de 20 ans travaille pour l’agence The Society (une des branches d’Elite) et a intégré, selon le site spécialisé Models.com, le top 50 mondial des mannequins les plus courtisées. Easy. À deux coups de pagaie de NYC, Brest peut elle aussi se vanter de faire partie des places fortes du
mannequinat en BZH : la société finistérienne Klass Kaerenn est la seule agence professionnelle de la région. À sa tête, Cathy Vallée qui a obtenu l’agrément nécessaire en 2011, après deux années de prestations d’hôtesses. Aujourd’hui, elle fait défiler une cinquantaine de mannequins (« 75 % sont originaires de la région, le quart restant de Nantes et Paris principalement ») pour des centres commerciaux, des municipalités, des salons et des marques de prêt-à-porter (Armor Lux notamment). Des structures régionales qui, à la différence d’Elite et de ses standards high level, viennent chercher « des mannequins au profil naturel. On ne travaille pas pour de la haute couture mais pour du prêt-à-porter courant. Il faut que les gens puissent s’identifier ». Même topo pour Xavier Prudhomme, directeur de la marque malouine Bonobo, qui depuis cinq ans organise un casting pour dénicher ses égéries. « On se définit comme une marque communautaire.
« Des photos devant le frigo ou le canapé des parents » 40
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Il est donc normal de proposer à nos clients d’incarner notre image. Dans le passé, nous avons fait de belles campagnes avec des mannequins pro, mais il nous manquait l’essentiel : la spontanéité, le sourire, des gens vraiment contents d’être là », justifie le patron de la marque de fringues qui, pour le casting 2015, a attiré 3 500 postulants dans ses magasins sans critères officiels de poids et de taille. Un point que partage Klass Kaerenn. « Les tailles de nos mannequins vont du 34 au 40. Une fille avec de jolies formes peut défiler avec nous », avance la jeune patronne qui tout au long de l’année avoue recevoir un paquet de candidatures, de mineures notamment (« on reçoit de tout comme photos : devant le canapé ou le frigo des parents... Certaines ne se rendent pas compte des exigences »).
« Être la plus belle, ça fait rêver » Car oui, malgré son image écornée, ses dérives et le règne passé des “supermodels” dans les années 90 (époque Naomi Campbell, Linda Evangelista...), cette profession fait toujours rêver : des jeunes filles fascinées par les podiums aux médias,
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qu’ils soient mainstream (la presse people, Le Petit Journal et ses sujets quotidiens pendant la Fashion Week) ou branchouilles (les docs de Loïc Prigent sur Canal, le magazine Lui et ses portfolios XXL des plus belles top). En attendant la sortie courant 2016 de L’Idéal, le prochain film de Beigbeder – toujours au taquet – sur un chasseur de mannequins. Mais nom dé diou, pourquoi cet attrait pour un milieu réservé à quelques happy few ? « Les motivations des filles qui postulent sont multiples, observe Cathy Vallée. Certaines viennent pour le glamour et le prestige que renvoie l’activité, d’autres sont vraiment modeuses et, enfin, il y a bien sûr la raison financière. » « Tous les miroirs aux alouettes émerveillent. Beaucoup d’appelés, peu d’élus : cela donne envie d’en faire partie », poursuit le réalisateur Gilles de Maistre, auteur du docu Apprenties mannequins, diffusé il y a quelques années sur Arte. Nous vivons dans une époque où l’image compte beaucoup. Avoir une vie de privilégiée, être regardée, susciter le désir, être considérée comme la plus belle : qu’on le déplore ou non, cela fait rêver. » Même devant une Brioche Dorée. Julien Marchand 41
RDV
ONE-TWO-THREE VIVA ALGIERS APRÈS UN CONCERT FOUFOU À LA ROUTE DU ROCK, LES AMÉRICAINS D’ALGIERS REVIENNENT CET AUTOMNE EN BZH. UNE RÉGION QUE CONNAÎT BIEN LE CHANTEUR FRANKLIN JAMES FISHER, QUI A UN TEMPS VÉCU À RENNES ET DOUARNENEZ. l faut vous confesser un truc : l’anglais c’est pas vraiment notre came. On se débrouille à tenir une discussion mais, fatalement, ça finit en charabia récité avec un accent tout moisi. Alors quel ne fut pas notre soulagement quand le responsable com’ de Beggars, qui gère la distribution des Américains d’Algiers en France, nous a dit : « Ah ! Mais attendez, Franklin le chanteur parle français. » De fait, c’est un parfait francophone qu’on a eu à l’autre bout du fil depuis New York, où il réside désormais. Explications de l’intéressé : « J’ai fait des études de français, que j’ai 42
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poursuivies jusqu’à un master de littérature à Londres. » Où il travaille notamment sur l’œuvre en VO de ce diable de Houellebecq. Et c’est pas tout : le loustic a aussi vécu par chez nous ! « Quand j’ai eu mon diplôme, je suis d’abord retourné chez moi, à Atlanta. C’était la crise (2009, ndlr), j’ai cherché pendant un an un poste de professeur avant de partir en France pour une mission d’assistant bilingue. J’ai passé un an en Bretagne, à Rennes puis à Douarnenez. Cette région est dans mon cœur, j’y ai encore plein d’amis. » Il est petit le monde, hein ?
Aujourd’hui, Franklin a donc déménagé à New York, tandis que ses acolytes Ryan (bassiste) et Lee (guitare) vivent respectivement à Atlanta et Londres. Un éloignement géographique qui ne poserait aucun problème aux dires de l’ex-résident breton. « On a tous la trentaine et on est assez matures pour savoir gérer cette situation. C’est important que chacun mène sa vie. Ryan a un master en politique comparée, Lee termine le sien… Notre envie de fonder ce groupe en 2010, alors que j’habitais encore en Bretagne, découle de cette envie de découvrir le monde. »
Algiers, c’est une sorte d’hybride entre Rage Against the Machine pour le verbe militant et TV On the Radio pour les envolées vocales et les sophistications post-punk. Avec aussi, parfois, une pointe de soul sudiste et de hip-hop old school sur certains morceaux, grâce à l’utilisation de pas mal de samples en arrière plan. Un LP éponyme sorti chez Matador est là pour se faire une idée de la chose, lequel contient déjà quelques tubes bien obsédants, dont on vous recommande vivement l’écoute : Blood, But She Was Not Flying, ou encore Black Eunuch. « Tous les trois, on se connaît depuis longtemps. On a eu nos projets musicaux au lycée mais celui-ci est plus sérieux, plus engagé, reconnaît Franklin d’une voix douce et posée. On vient de la banlieue d’Atlanta, on sait les conséquences du capitalisme américain. Oui, on est en lutte contre ça. » Notamment contre les inégalités qui s’accroissent, les discriminations raciales qui persistent et les violences policières qui se multiplient ces derniers temps envers la communauté afro-américaine. « Mais en vrai, cette violence et ces abus de pouvoir n’ont jamais tellement cessé, c’est juste qu’on a aujourd’hui plus les moyens de les montrer, via les smartphones et les réseaux sociaux. Le plus triste, c’est qu’aujourd’hui on a un président afro-américain, ce qui a apporté de grandes espérances. Et pourtant, rien ne change », constate, un peu vénère pour le coup, le leader d’un groupe nommé en hommage à la capitale de l’Algérie, « une ville fascinante, connue pour la lutte de sa population contre l’impérialisme et où les Black Panthers avaient fondé un bureau ». Régis Delanoë Le 12 novembre aux Indisciplinées à Lorient 43
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C’EST PAS SORCIER INVITÉE À QUAI DES BULLES, LA DESSINATRICE MARION MONTAIGNE VULGARISE LA SCIENCE DANS UN STYLE RIGOLO ET TRASH. IDÉAL POUR SE RÉCONCILIER AVEC DES MATIÈRES QUI N’ONT PAS LAISSÉ QUE DES BONS SOUVENIRS DE LYCÉE...
Marion Montaigne
Faut bien reconnaître que les cours de bio et de physique à l’école, c’était pas toujours fun. Pour quelques TP sympa à base de champis qu’on faisait pousser dans des bacs à fleurs et de fausses bagarres avec des tubes à essai (« Frzzzzz… Luke… Frzzz… Je suis ton père »), combien de problèmes ultra chiants à résoudre, de calculs de trajectoire ou de bachotage sur la composition chimique d’un conifère, hein ? Les seuls qui réussissaient à nous y intéresser, c’étaient Fred et Jamy sur France 3. Jusqu’à ce que l’illustratrice Marion Montaigne déboule, sur la toile d’abord, puis dans le joyeux monde de la BD. « La série Tu Mourras Moins Bête a commencé sous forme de blog en 2008 où je racontais mes petits trucs de sciences avec mon alter ego mihomme mi-femme, Professeur Moustache », rembobine la trentenaire, qui n’a pourtant jamais fait d’études dans le domaine. « Je me sous-estimais certainement, explique-t-elle. Je ne suis d’ailleurs pas la seule dans ce cas : beaucoup considèrent encore les matières scientifiques comme élitistes alors que c’est fascinant et pas si inaccessible que ça en a l’air. » 44
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Surtout pas quand c’est elle aux crayons qui trifouille ses dessins trashouilles racontant avec un humour pipi-caca des histoires de points noirs, de pets, de dinos, de hobbits, d’agoraphobie ou de flics américains un peu teubés qui goûtent de la coke à même le doigt. Son crédo : la vulgarisation, façon C’est Pas Sorcier mais pour un public adulte. « Je me documente beaucoup, je vais aussi à la rencontre de scientifiques. Leur potentiel comique est insoupçonné. Il y a matière à apprendre et à se marrer au contact d’un physicien spécialiste des accélérateurs de particules comme d’un légiste s’occupant d’un cadavre à la morgue. Là, je bosse sur l’intelligence artificielle, eh ben c’est assez cool ! » Et si le style graphique de l’ancienne étudiante de la prestigieuse école des Gobelins est hardcore, c’est « pour exorciser une anxiété de la maladie et de la mort. On est tous faits de tripes et de sang. Même un bébé, c’est assez dégueulasse en fait. Ben ouais, on va tous crever alors autant en rire. » Régis Delanoë Du 23 au 25 octobre au festival Quai des Bulles à St-Malo
Riwal La Prairie
LA FORCE « TRANQUILLE »
LES QUATRE GARS DE THE SLOW SLIDERS SONT BONS DANS DEUX CHOSES : LE ROCK ET LA FÊTE. EN UN MOT, L’ESSENTIEL. Potes de lycée, potes d’études, potes de picole, les Brestois de The Slow Sliders se collent déjà une belle réputation : celle d’être un poil perchés. De la pochette de leur premier EP (joli montage de photos de soirées qui respirent la murge à plein nez) à leurs lives parfois casse-gueule, les garçons semblent résumer assez bien la notion de rock’n’roll. Après avoir écumé les scènes (et les bars) du Finistère, les quatre bonhommes, tous âgé de 21-22 ans, ont migré vers Nantes cette année pour changer d’air musical. « On avait pas mal fait le tour de Brest, explique le guitariste Gwen, et on voulait aussi se rapprocher de nos potes de Bantam Lyons. » Les deux groupes sont tellement en osmose que tous leurs membres se sont tatoués le mot “tranquille” sur le bras. Et c’est vrai qu’il est tranquille le rock des Slow Sliders. Car si quelques morceaux assez énervés figurent dans leur set list, c’est surtout par leur sens de la mélodie que les gaziers se distinguent. Un rock « tranquille » qui parle de tout et n’importe quoi : des filles, des teufs... « Notre dernier morceau, ajoute Victor le chanteur, elle est pour mon chien, décédée il y a deux mois. C’est notre plus belle chanson. » Brice Miclet Le 25 septembre à Echap à Quimperlé, le 26 septembre au Run-ar-Puñs à Châteaulin 45
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DANSE AVEC LE LOUP n 1936, le loup de Tasmanie, également connu sous le nom de thylacine, entrait au triste panthéon des espèces officiellement éteintes. Victime de la déforestation, chassé par l’Homme, ce mammifère au pelage tigré, largement répandu en Australie, s’en était donc allé, n’ayant pu survivre à l’arrivée des colons qui le considéraient comme un nuisible. Près de 80 ans plus tard, like the legend of the phoenix, le thylacine est ressuscité. À plus de 17 000 kilomètres de son Océanie natale, à Angers plus précisément, où William Rezé, alors étudiant aux Beaux-Arts, choisit comme blaze le nom de ce marsupial pour son projet électro fraîchement créé. Une mue pour ce garçon de 23 ans, venu du Conservatoire (où il a appris le saxophone) et du jazz où il s’est essayé dans de nombreuses formations. « Je n’étais pas du tout branché musiques électroniques avant. Les trucs les plus proches que j’écoutais, c’était Massive Attack, Moby, des trucs comme ça. La transition s’est faite avec des artistes comme DJ Shadow, capables de mélanger les genres. C’est à partir de ce moment-là que j’ai commencé mes propres compos avec des petites machines, avant de découvrir les 46
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2013 FUT L’ANNÉE DE SUPERPOZE, 2014 CELLE DE FAKEAR, 2015 CELLE DE THYLACINE ? C’EST EN TOUT CAS BIEN PARTI POUR L’ANGEVIN QUI, AVEC SON ELECTRONICA MÉLODIEUSE ET ONIRIQUE, CONNAÎT UNE ANNÉE À FOND LA CAISSE. VROUM VROUM !
synthés et la MAO (musique assistée par ordinateur, ndlr) », retrace le jeune homme qui aujourd’hui développe une electronica vaporeuse, élégante, sophistiquée. Un style qui le rapproche forcément de Fakear et Superpoze, à qui on l’associe (quasi) tout le temps. Une comparaison facile ou justifiée ? « C’est plutôt juste car on a une façon de faire de la musique qui est assez proche. Nous venons tous les trois d’un instrument et nous voulons défendre une électro qui soit la plus mélodique possible. » Une triplette de producteurs qu’on cite tel le tiercé gagnant sur l’hippodrome de Longchamp et qu’on présente désormais comme les têtes de gondole de la nouvelle scène électro
française. Une électro émancipée de la french touch, délaissant la culture clubbing, non obsédée par le tube. « Le hit qui va cartonner, ce n’est pas quelque chose que je recherche. Je ne souhaite pas faire une musique qui tabasse, juste des morceaux qui me touchent », confesse William qui avoue connaître une année 2015 à bloc : enregistrement d’un album, lives à gogo, projet avec le Centre Pompidou… Le thylacine est bien revenu à la vie. Julien Marchand Le 26 septembre à Rêverie Moderne à Sarzeau, le 7 novembre à La Teufestival à Briec, le 13 novembre à L’Ubu à Rennes et le 17 décembre au Vauban à Brest
CSN
COMMENT SONT NES... LES CLUBS BRETONS LA NOUVELLE SAISON DE FOOT A COMMENCÉ AVEC QUATRE CLUBS PROS SUR LE TERRITOIRE : TROIS EN LIGUE 1 (RENNES, LORIENT, GUINGAMP) ET UN EN LIGUE 2 (BREST). DES ÉQUIPES AUX HISTOIRES, AUX MODÈLES ET AUX DÉBUTS TOUS SINGULIERS, AFFIRME GEORGES CADIOU, HISTORIEN DU SPORT ET EX-VOIX DU FOOT SUR FRANCE BLEU BREIZH IZEL.
FC LORIENT : DES RACINES FAMILIALES ET OUVRIÈRES C’est sous l’impulsion de Caroline Cuissard, une patronne autoritaire, à la tête d’une fameuse entreprise familiale de mareyage, que naît la formation morbihannaise le 2 avril 1926 au café Eon, rue Carnot (aucun lien avec Stéphane) à Lorient. « Le club est d’abord connu sous le nom de La Marée Sportive de Lorient et va vite devenir un des meilleurs de la région », situe Georges Cadiou. 48
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Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale et ses conséquences, avec une entreprise en difficulté et un club aux abois. « Pour le sauver, la mère Cuissard, toujours aux commandes, va demander à son petit-fils Antoine, alors un des meilleurs espoirs du foot français et qui avait fait ses débuts pros avec Saint-Étienne, de revenir donner un coup de main. Et à l’époque, on obéissait à sa grand-mère… »
Antoine Cuissard va ainsi devenir le seul joueur de niveau amateur (Lorient se bat alors pour son maintien en DH, l’équivalent à l’époque de la D4) à être sélectionné en équipe de France (question camembert orange, édition genius du Trivial Pursuit). Ce n’est qu’à partir des sixties que le FCL passe pro, puis se stabilise dans l’élite ces dernières années sous l’impulsion du druide Gourcuff.
STADE RENNAIS : LES PREMIERS PROS Le 10 mars 1901, quatre étudiants fondent le Stade Rennais, qui se pare d’abord de rayures bleu ciel et foncé, avant d’emprunter le rouge et noir du concurrent, le FC Rennais. « Le club a décollé à partir des années 20 (finale de Coupe de France perdue face au Red Star en 1922, ndlr), puis surtout la décennie suivante en étant un des pionniers du professionnalisme sous la présidence d’un ancien joueur, Isidore Odorico. » Un dirigeant fort en gueule cet Isidore, par ailleurs artiste mosaïste auteur des céramiques art déco de la piscine Saint-Georges de Rennes. « C’était un visionnaire qui a permis à son club d’être pendant des décennies le seul professionnel du grand ouest. » Jusqu’à l’émergence du FC Nantes au sortir de la Seconde Guerre mondiale.
STADE BRESTOIS : À LA GLOIRE D’ALEXIS THÉPOT Aux origines du Stade Brestois, il y a l’Armoricaine de Brest, club omnisport fondé en 1903 et qui prend la forme d’un patronage catho. « Le Stade Brestois en tant que tel ne va voir le jour qu’en 1950 par la fusion d’un ensemble de ces patronages, avec l’objectif de concurrencer le club phare de la ville à l’époque, l’AS Brest, laïc. D’ailleurs il y a encore peu, chaque AG du club était présidé par le curé du coin », détaille Cadiou.
Mais avant cette fusion, la grande fierté du football finistérien s’appelle Alexis Thépot, « gardien de but dont le père est mécano de la Marine à Brest ». Formé à l’Armoricaine dans les années 20, « Alex » va ensuite être transféré au Red Star, un des grands clubs français de l’époque, et devient un cadre de l’équipe de France. « Il est le portier des Bleus lors des deux premières Coupes du monde en 1930 en Uruguay et en 1934 en Italie. »
EN AVANT DE GUINGAMP : LAÏCARD ET FIER Le dernier des clubs bretons à avoir eu le statut pro est l’En Avant de Guingamp, fondé en 1912 et qui a longtemps évolué au niveau amateur. « Ses origines sont très marquées par le contexte de séparation entre l’Église et l’État », souligne Cadiou. C’est à l’initiative d’instituteurs laïcs et socialistes qu’il naît. Sport et militantisme : le rouge et le noir comme couleurs ne sont pas anodins, tout comme ce terme, “En Avant”, référence à un cri de ralliement socialiste de l’époque et à des journaux engagés tels que Forward en Angleterre et Avanti en Italie.
Le premier rival historique de l’EAG est d’ailleurs le Stade Charles-deBlois, fondé également en 1912 à Guingamp mais par les curés… « Fidèle à sa tradition de club ouvrier, l’En Avant s’est ensuite appuyé sur un partenariat avec les usines Tanvez, ce qui a permis d’accueillir à partir de l’après-Guerre les meilleurs jeunes de la région. » Lesquels seront à l’origine de l’épopée 1972/73 en Coupe de France. Avec, déjà, un certain Noël Le Graët à la présidence, lui qui a commencé son histoire avec l’EAG en tant que joueur chez les jeunes dans les années 50. 49
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AGENDA
Marie Athénaïs
DR
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Michel Bause
RECOMMANDE
I’M FROM RENNES
DISABLED THEATER
MUSIC ACT
LA MVERTE
La quatrième édition du festival I’m From Rennes reste sur le même crédo : montrer que la capitale bretonne reste une place forte en matière musicale. La preuve avec une solide programmation qui mêle valeurs sûres (Success, Mermonte, Manceau…) et découvertes (Bop’s, Valderamas, Born Idiot…).
En septembre, la prog’ des théâtres est encore un peu chiche mais le Quartz propose tout de même une sacrée curiosité : le travail du danseur contemporain Jérôme Bel avec la troupe du théâtre Hora, constituée de comédiens handicapés mentaux. Quand la danse prend le relais d’une parole défaillante.
Quels sont les rapports entre musique et nourriture ? Pour répondre à cette appétissante question, L’Échonova invite musiciens et intello de la bouffe pour une série de débats, concerts et projections où il y aura à boire, à manger et à écouter. Cochée dans notre agenda : une conférence sur la place de la frite dans la culture.
C’est avec une belle stachmou d’acteur porno seventies qu’Alexandre Berly, a.k.a La Mverte, va enchaîner les bons coups à la rentrée : Scopitone à Nantes, l’Ubu, Les Indisciplinées… Une virée dans l’Ouest pour ce Parisien, passé par la Red Bull Music Academy, qui viendra défendre une synth wave au poil. Le 23 octobre à Rennes Le 7 novembre à Lorient
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À St-Avé, Arradon, Elven, Séné… Du 1er octobre au 21 novembre
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Au Quartz à Brest Les 29 et 30 septembre
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À Rennes Du 16 au 26 septembre
LE GRAND SOUFFLET
JOURNÉES DU PATRIMOINE À LA MASS
MAINTENANT
Le festival d’accordéonmais-pas-que fête cette année ses 20 ans avec une prog pas piquée des hannetons. Au menu notamment : La Yegros, Krismenn & Alem, l’Orchestre National de Barbès, The Roughneck Riot (photo). Fan des Pogues, ce dernier groupe est pour toi.
Héritages de ce fripon de Jack Lang, les Journées européennes du patrimoine permettent de visiter gratos des monuments pas toujours ouverts au public : des classiques châteaux à des lieux plus fun tels qu’une caserne de pompier, un opéra ou un tribunal...
Ce festival s’affiche comme un joli point de convergence entre musiques, arts et technologies. Ce laboratoire numérique accueille créateurs et bidouilleurs internationaux, comme Caitlind RC. Brown & Wayne Garrett qui viennent installer leur nuage composé de 6 000 ampoules (photo).
À Rennes et en Ille-et-Vilaine Du 1er au 10 octobre
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Dans tous les lieux culturels Les 19 et 20 septembre
septembre-octobre 2015 #23
Les affreux jojos de Mass Prod réunissent le meilleur de la scène alterno-ska-punk pour deux jours de teuf où ça devrait bien pogoter. Parmi les têtes d’affiche : les Washington Dead Cats (photo), fers de lance du psychobilly dans les années 80 en France. Au Parc de la Prévalaye à Rennes Le 3 octobre
À Rennes Du 13 au 18 octobre