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Martina Hingins
BUCHERER REPENSE L’HORLOGERIE DE SECONDE MAIN
TEXTE [[[ Chantal de Senger
Avec son concept « certified pre-owned », l’entreprise familiale entend ouvrir les portes de l’univers du luxe à tous les amateurs de montres.
Le marché mondial de la montre de seconde main ne cesse de croître. Selon les experts, il atteindra entre 30 et 40 milliards de francs en 2025. Certains estiment même qu’il dépassera le marché du neuf d’ici à 2027. En 2020, Bucherer inaugurait sa première boutique certified pre-owned à Munich avant d’ouvrir des corners un peu partout en Europe et à Genève. Chaque montre est authentifiée, contrôlée, révisée et certifiée par des experts de l’entreprise fondée en 1888 qui compte 2400 collaborateurs dans le monde. Interview d’Odilo Lamprecht, responsable du département global certified pre-owned chez Bucherer.
Le marché de la montre d’occasion continue de croître. Comment expliquez-vous ce phénomène ? J’aimerais juste préciser quelque chose: quand nous parlons de montres de seconde main, nous parlons ici de montres «modernes» qui ont entre 5 et 20 ans. Les montres plus anciennes sont des montres vintage. Quant au succès des premières, il vient de plusieurs facteurs. Premièrement, la nouvelle génération est attachée à la notion de durabilité. Les produits qui sont de bonne qualité n’ont pas forcément besoin d’être achetés neufs. Par ailleurs, de nombreuses montres ne sont pas disponibles de suite, donc certains consommateurs préfèrent acheter en seconde main plutôt que d’attendre des années pour acquérir leur montre. Il y a aussi une question de prix, car souvent les montres de seconde main sont moins chères que les neuves.
Pourtant, certaines montres de seconde main atteignent des prix records… Oui, mais il s’agit seulement de quelques modèles de quelques marques. La majorité des montres de seconde main sont moins chères que les neuves.
Une Rolex Daytona a été récemment achetée à 30’000 francs puis revendue trois mois plus tard pour 50’000 francs. Comment expliquez-vous ce phénomène ? Je vais être très honnête: c’est très difficile à expliquer. Nous devons être francs, les prix en seconde main de certaines Rolex sont une exception. Nous ne pouvons pas faire de généralité sur le marché par rapport à des pièces comme celles-ci.
Choisissez-vous les modèles que vous mettez en vente. Si oui, sur quels critères ? Le seul critère est la demande sur le marché de la montre d’occasion.
Certaines personnes sont prêtes à attendre des années pour leurs montres, comment expliquez-vous cela ? Certaines montres ne sont pas juste des montres. Aujourd’hui, personne n’a besoin d’une montre. L’heure se lit sur un smartphone. Une montre amène un statut. Certaines marques arrivent à créer le fait qu’une montre amène ce statut.
Quels sont les critères qui font qu’une montre gagne ou perd de la valeur ? A vrai dire, il n’y a pas vraiment de critère spécifique. C’est le marché qui décide. Nous nous alignons aussi sur celui-ci pour appliquer nos prix.
Justement, comment appliquezvous les prix des montres d’occasion que vous vendez ? Premièrement, nous évaluons les prix du marché. Nous avons développé à l’interne un système qui identifie ces prix. Ensuite nous regardons l’état et la demande sur le marché. Nous regardons toujours s’il y a un numéro de référence et un numéro de série. Si ce n’est pas le cas, nous n’entrons pas en matière. Ensuite, nous regardons si la montre a eu un service, si elle a encore sa boîte et ses documents d’origine. Tout cela déterminera le prix de la montre.
Comment réagissent les consommateurs par rapport à ce marché ? Ils se posent beaucoup de questions. Nous essayons de faire la différence chez Bucherer en certifiant à 100% nos montres d’occasion. Nous offrons aussi un service complet et une garantie globale de deux ans pour chaque montre. Nous voulons que nos clients soient en confiance totale avec ces produits.
Quelles sont les marques les plus populaires sur le marché secondaire ? A vrai dire, toutes les marques et modèles qui sont populaires sur le marché du neuf sont les mêmes qui ont du succès sur le marché secondaire.
Le marché secondaire est aussi victime de beaucoup de spéculation. Comment luttez-vous contre cela ? Nous ne combattons pas la spéculation. Nous estimons que chaque propriétaire a le droit de faire ce qu’il veut avec sa montre. Cependant, nous n’achetons pas de montres qui ont moins de trois ans.
Combien êtes-vous pour certifier les montres ? Nous avons 4 hubs. Un à Lucerne où environ 50 horlogers travaillent, un hub à Munich où il y a une petite trentaine d’horlogers, en Angleterre où ils sont deux et à New York où ils sont une soixantaine.
Etes-vous fréquemment confronté aux contrefaçons ? Non, car les personnes qui savent que leur montre est une contrefaçon ne viendront pas chez Bucherer la vendre. Elles essayeront plutôt de la vendre en ligne.
Combien de montres de seconde main détenez-vous dans vos différentes boutiques ? En Europe, entre 3000 et 4000, mais ce chiffre change tout le temps. La plupart de ces montres sont aussi disponibles en ligne.
Avec son concept «Certified Pre-Owned», Bucherer entend ouvrir les portes de l’univers du luxe à tous les amateurs de montres
Des centaines d’horlogers remettent en état des montres de seconde-main dans les différents magasins Bucherer en Europe et aux Etats-Unis.
Ulrich Friedrich