La pandémie de Covid-19, le réchauffement climatique et la guerre en Ukraine ont entraîné des crises mondiales multiples qui affectent particulièrement les populations du Sud. Pour éviter la famine dans ces pays, il faut agir maintenant.
Prise de position de Caritas sur la crise alimentaire dans les pays du Sud
Crises multiples dans le monde La Suisse doit agir d’urgence
Les multiples effets de la guerre En bref : La guerre menée par la Russie contre l’Ukraine a une fois de plus mis en évidence les interdépendances qui existent dans notre système économique mondial. La vulnérabilité aux crises se manifeste de manière dramatique dans le système alimentaire international et touche surtout les populations du Sud. L’augmentation des prix des céréales, des carburants fossiles et des engrais, causée par la guerre, a considérablement aggravé la situation alimentaire des pays pauvres. Nombre de ces pays étaient déjà touchés économiquement par la pandémie de Covid-19, alors qu’ils sont déjà fortement endettés et luttent contre les conséquences de la crise climatique qui menacent leur existence. Face à ces crises multiples, Caritas Suisse demande que la Suisse augmente immédiatement son engagement en matière d’aide humanitaire et qu’elle contribue à long terme à accroître la souveraineté alimentaire des pays du Sud et à réduire leurs dépendances.
La guerre en Ukraine engendre une explosion des prix et la faim Une explosion des prix des denrées alimentaires de base, une raréfaction des engrais et un renchérissement des carburants fossiles : la guerre menée par la Russie en violation du droit international a non seulement des conséquences catastrophiques pour la population en Ukraine, elle aggrave également les conditions de vie des personnes touchées par la pauvreté dans les pays du Sud. La guerre a des conséquences particulièrement graves sur la situation alimentaire partout dans le monde, puisque l’Ukraine et la Russie sont parmi les principaux pays exportateurs de céréales et d’oléagineux. Début mai 2022, Caritas Suisse a mené une enquête auprès de ses collaborateurs dans les pays de ses projets, afin d’évaluer les conséquences de la guerre en Ukraine pour l’approvisionnement des personnes sur place (voir le service de presse de Caritas du 19. 05. 2022 sur caritas.ch/ sp-crisealimentaire). Les résultats sont alarmants. Des hausses de prix souvent massives ont été signalées dans les trois quarts des pays où nous menons des projets, surtout en ce qui concerne le blé, mais aussi pour d’autres denrées alimentaires de base, pour les carburants et pour les engrais. La hausse des prix frappe particulièrement les personnes déjà touchées par la pauvreté, qui consacrent la quasi-totalité du
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revenu de leur ménage à l’alimentation. Si l’argent leur permettait à peine de survivre auparavant, la crise actuelle rend l’approvisionnement en denrées alimentaires inabordable pour une partie toujours plus importante de la population, qui ne mange donc plus à sa faim. À cela s’ajoute le fait que la situation alimentaire était déjà très tendue dans de nombreux endroits avant le début de la guerre en Ukraine. Les conséquences économiques de la pandémie de Covid-19 se font encore fortement sentir dans de nombreux pays et provoquent, avec les effets négatifs du réchauffement climatique et les conflits armés locaux, des crises multiples. Les résultats de l’enquête de Caritas Suisse coïncident donc avec les mises en garde déjà formulées par des organisations comme le Programme alimentaire mondial des Nations Unies (PAM) : si l’on n’agit pas maintenant, on risque d’être confronté à une crise alimentaire mondiale qui pourrait conduire à la famine dans différentes régions. En tant que membre de la communauté internationale, la Suisse est appelée à agir de toute urgence.
Situation aggravée dans les pays des projets de Caritas Suisse L’enquête menée dans les pays où Caritas Suisse mène ses projets met en évidence les conséquences de la guerre en Ukraine sur la situation alimentaire dans les pays du Sud. Dans près des trois quarts de ces 20 pays, les collaborateurs interrogés ont signalé une augmentation de 20 à 100 % du prix des denrées alimentaires. Le prix du blé, en particulier, a explosé. La plus forte hausse a été observée en Éthiopie, où il a doublé, tout comme au Brésil, au Cambodge, au Mali, au Tadjikistan et en Ouganda, où il a augmenté de 50 %. Les denrées alimentaires de base, l’huile alimentaire, le sucre et la farine, sont également touchées par d’énormes augmentations de prix allant de 20 à 100 %. L’exemple du Mali montre pourquoi la hausse des prix des denrées alimentaires entraîne immédiatement des difficultés de subsistance. Près de la moitié de la population gagne moins de 1,90 dollar par jour dans ce pays d’Afrique de l’Ouest. Les ménages touchés par la pauvreté y dépensent environ 80 % de leur revenu disponible pour l’alimentation. Comme d’autres pays du Sahel, le Mali est en outre touché par une grave sécheresse qui a fait également monter les prix des denrées alimentaires de base : ainsi, le maïs, le sorgho et le mil coûtent aujourd’hui deux fois plus cher qu’il y a un
La guerre dans les greniers du monde La Russie et l’Ukraine font partie des principales nations exportatrices mondiales de blé, d’orge, de maïs, de colza, de graines de tournesol et d’huile de tournesol. La région de la mer Noire joue un rôle important dans le système alimentaire industriel mondial. Avec l’invasion des troupes russes fin février 2022, les prix mondiaux des céréales ainsi que de l’huile de tournesol ont fortement augmenté. L’indice mensuel des prix alimentaires de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a atteint en mars 2022 son niveau le plus élevé jamais enregistré. En avril également, malgré une légère détente, l’indice était toujours supérieur d’environ 30 % à celui de l’année précédente. On voit que la guerre a une influence directe sur les prix mondiaux des denrées alimentaires. En Ukraine, la guerre a empêché l’exportation de la récolte de l’année dernière, car les ports de la mer Noire sont bloqués et minés. Avant la guerre, environ 90 % des exportations de céréales se faisaient par porte-conteneurs. Les alternatives de transport par voie terrestre sont difficiles à mettre en place à cause de la guerre. Les céréales stockées risquent donc de pourrir et les capacités de stockage pour la récolte à venir des céréales d’hiver font défaut. La guerre a également fortement perturbé la mise en place des semis d’été au printemps 2022. L’agriculture ukrainienne manque de main-d’œuvre, de carburant et de pièces détachées pour les machines agricoles, d’engrais, de semences et de pesticides. À cela s’ajoute le fait que les importantes zones de culture et les sols fertiles se trouvent dans des régions violemment disputées. Les mines et les blindés représentent un grand danger pour les agriculteurs et les agricultrices. La FAO estime que seuls 65 à 70 % des cultures d’été comme le maïs et le tournesol ont pu être semées au printemps 2022. Les exportations de produits agricoles en provenance de Russie ont également diminué avec cette guerre. Les sanctions imposées au trafic international des paiements ont rendu le commerce avec la Russie plus difficile, sans compter que le gouvernement russe utilise les exportations de manière stratégique pour exercer une pression politique sur d’autres pays.
an. Les gens peuvent donc consommer deux fois moins avec le même revenu disponible ; la faim augmente au sein de la population. En plus des prix des céréales, Caritas Suisse s’est également renseignée sur l’évolution des autres prix. Les collaborateurs sur place ont parfois signalé que les prix des produits non alimentaires comme le savon ou les semences avaient également augmenté. Dans la moitié des pays, le prix des carburants a également pris l’ascenseur, de 10 à 20 %, parfois même de 50 %. Cela se répercute également sur les prix des produits alimentaires de base et des biens de consommation courante. Les produits importés sont devenus particulièrement chers en raison de l’augmentation des coûts de transport. Les conséquences que les hausses de prix entraînent pour les personnes vivant dans les pays où Caritas Suisse mène des projets sont donc directes ; mais plusieurs collaborateurs locaux ont également exprimé leurs craintes concernant les effets indirects de la guerre en Ukraine. On craint par exemple que les fonds de la coopération internationale ou de l’aide humanitaire soient distribués autrement et que la situation d’urgence en Ukraine engendre une baisse des ressources financières dans les autres pays de projets. Les collaboratrices et collaborateurs de Caritas Suisse au Tadjikistan ont par ailleurs signalé que les transferts d’argent des travailleurs ayant migré en Russie avaient diminué, notamment parce que le rouble russe a fortement perdu de sa valeur. Or, ces transferts sont d’une grande importance pour la population du pays. Cela montre combien les conséquences de la guerre en Ukraine peuvent être diverses et variées pour les habitants des pays du Sud.
Les crises multiples mènent à la faim et à l’endettement Dans son rapport annuel sur les crises alimentaires 2022, le PAM a noté que la faim dans le monde avait déjà fortement augmenté avant le début de la guerre en Ukraine, suite à la pandémie de Covid-19. Selon ce rapport, le nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde a encore augmenté d’environ 40 millions en 2021 et a atteint un nouveau record, de près de 193 millions de personnes. Les conséquences de la guerre en Ukraine touchent désormais souvent précisément les pays où la situation alimentaire était déjà très tendue.
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Hausse des prix des engrais et des combustibles fossiles Outre les produits agricoles, la guerre impacte également les prix des combustibles fossiles et des engrais chimiques qui voient leurs prix s’envoler. La Russie est un important exportateur de pétrole et de gaz naturel. Et, avec la Biélorussie, elle est également leader en matière de production et d’exportation d’engrais chimiques. En outre, la Russie est également un fournisseur important de matières premières dont les autres pays ont besoin pour la production d’engrais, comme la potasse, le phosphate, l’azote et le gaz naturel. Les experts de la FAO s’attendent à ce que cette hausse des prix des engrais entraîne dans diverses régions du monde une baisse des récoltes de céréales. L’agriculture industrielle dépend fortement de l’utilisation d’engrais chimiques. Si elle économise sur les engrais à cause de la hausse des prix, la récolte sera moindre. Il faut donc s’attendre à une forte augmentation du prix du riz, par exemple, et donc une augmentation du nombre de personnes touchées par la crise alimentaire.
On en voit d’ailleurs l’expression dans plusieurs pays africains où les crises alimentaires régionales provoquées par le changement climatique et les conflits armés s’étendent. Le PAM avait déjà signalé au début de l’année une aggravation de la situation alimentaire dans la région centrale du Sahel, qui comprend le Mali, le Burkina Faso et le Niger. La Corne de l’Afrique connaît actuellement la pire sécheresse de ces 40 dernières années ; plus de 15 millions de personnes sont gravement touchées par la faim en Éthiopie, au Kenya et en Somalie. Selon un rapport du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), le coût moyen de la nourriture a déjà augmenté de 66 % en Éthiopie et de 36 % en Somalie. Selon la FAO, ces deux pays achètent une grande partie de leur blé à l’Ukraine et à la Russie : l’Éthiopie environ 40 %, la Somalie plus de 90 %. Les collaborateurs de Caritas Suisse en Éthiopie confirment cette situation dramatique dans notre enquête.
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Comme les pays du Sud doivent payer les importations de céréales, de carburant et d’engrais en devises étrangères, leur endettement extérieur croît avec la hausse des prix. Un endettement qui avait déjà fortement augmenté avec la pandémie de Covid-19. Selon le rapport sur l’endettement publié cette année par l’organisation allemande Misereor et l’alliance de désendettement erlassjahr.de, 135 États d’Asie, d’Afrique, d’Amérique latine et d’Europe de l’Est présentaient un niveau d’endettement critique en 2021, 39 pays étant même menacés de faillite. La monnaie locale de nombreux pays du Sud a perdu beaucoup de sa valeur en raison de la pandémie. De ce fait, les aliments importés, qui pourraient compléter ce qui ne peut être produit localement, sont devenus extrêmement chers. Les crises multiples actuelles déclenchées par la guerre en Ukraine montrent à quel point il est urgent de réduire les dépendances globales, notamment en matière d’approvisionnement alimentaire, et de renforcer les chaînes de valeur existant sur place. La coopération internationale peut contribuer de manière importante à cet objectif. Mais des pays comme la Suisse n’ont toujours pas suffisamment tenu leurs promesses en matière de coopération internationale. L’objectif fixé par les Nations Unies – les pays riches consacrent 0,7 % de leur revenu national brut (RNB) à la coopération internationale – n’est pas respecté par la Suisse, qui n’y a consacré que 0,5 % en 2021. La Suisse est également à la traîne en matière de financement international pour le climat. Le Conseil fédéral ne veut consacrer au financement international du climat que la moitié du milliard demandé – entre 440 et 585 millions de francs – selon son propre rapport de 2017. Et on peut craindre que l’augmentation des dépenses militaires de 2 milliards de francs décidée par le Parlement ne se fasse sur le dos du budget de la coopération internationale. Cela serait fatal compte tenu des crises multiples actuelles. Il faut au contraire augmenter de toute urgence les contributions financières de la Suisse à la coopération internationale et au financement climatique.
Dépendances mondiales – crise alimentaire mondiale Le réchauffement climatique menace la sécurité alimentaire La situation dans les pays touchés par la pauvreté est en outre aggravée par la crise climatique mondiale. Le réchauffement de la planète affecte la sécurité alimentaire ; les sécheresses, les fortes pluies et autres événements climatiques exceptionnels menacent les moyens de subsistance des populations du Sud et entraînent directement la faim. Dans l’Accord de Paris sur le climat, les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) se sont engagés à verser 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 pour des mesures de protection du climat dans les pays en développement. L’objectif est de donner aux pays pauvres les moyens nécessaires pour s’adapter à l’évolution des conditions climatiques. La Suisse s’est également déclarée prête à fournir une part équitable de ce financement international pour le climat. En fonction de sa puissance économique et de sa responsabilité effective dans le réchauffement climatique mondial, la Suisse doit contribuer au financement climatique à hauteur d’au moins un milliard de francs par an. La crise climatique crée de nouvelles détresses et met en péril les moyens de subsistance de groupes de population de plus en plus étendus ; le financement de projets climatiques ne doit donc pas se faire au détriment des programmes existants de lutte contre la pauvreté. Des moyens supplémentaires sont nécessaires pour protéger les moyens de subsistance des personnes touchées par la pauvreté et menacées par le changement climatique.
Même si la guerre en Ukraine est probablement le déclencheur aujourd’hui de la flambée des prix des denrées alimentaires et de la crise alimentaire actuelle, les causes réelles de cette situation se trouvent plutôt dans le système alimentaire mondial misant tout sur l’agriculture industrielle, et qui n’est ni durable ni à l’abri des crises. Les dépendances mondiales engendrent désormais une crise alimentaire mondiale. Les pays africains, qui couvrent une grande partie de leur consommation de céréales avec des importations en provenance d’Ukraine et de Russie, sont particulièrement touchés par l’énorme augmentation des prix. Auparavant, le blé russe et ukrainien était bon marché dans ces pays, car les distances de transport étaient courtes. Le Programme alimentaire mondial s’approvisionnait également en Ukraine
pour plus de la moitié du blé qu’il distribuait dans le cadre d’actions humanitaires dans le monde entier. Si les céréales deviennent soudain plus chères à l’achat, l’organisation, avec les moyens dont elle dispose, pourra aider considérablement moins de personnes touchées par la faim. La crise actuelle doit provoquer des discussions sur les faiblesses et les risques du modèle agricole industriel, y compris en Suisse. Les représentants des entreprises agricoles ont profité de la situation actuelle pour demander l’abandon des méthodes d’agriculture écologiquement durable avec l’argument qu’elles auraient des rendements plus faibles. Au vu de l’augmentation de la faim dans le monde, ces exigences sont cyniques ; il est clair qu’elles sont orientées vers les intérêts économiques à court terme des grandes entreprises de pesticides, d’engrais et de semences. Caritas Suisse plaide de son côté pour la mise en place d’un système alimentaire résistant au changement climatique qui permettrait de nourrir la population mondiale à long terme (voir à ce sujet la prise de position de Caritas « Une alimentation équitable et respectueuse du climat », caritas.ch/prisesde-position). Nous devons nous éloigner de l’image selon laquelle le « grenier de l’Europe nourrit le monde ». Les pays du Sud doivent pouvoir augmenter leur degré d’autosuffisance. Depuis les années 1980, ces pays ont été encouragés à orienter leur agriculture vers l’exportation par des programmes d’ajustement structurel, les devises étrangères gagnées servant à financer les importations de denrées alimentaires en provenance de l’étranger. Les crises actuelles montrent de manière dramatique à quelles dépendances dangereuses ce système agricole a conduit. Une partie de ce modèle se caractérise également par le fait qu’une part de plus en plus importante des céréales cultivées dans le monde est utilisée dans les pays du Nord pour produire des biocarburants et des aliments pour animaux, et donc pour la production de viande, plutôt que pour l’alimentation humaine. Là aussi, il est impératif de changer de mentalité. Les Nations Unies et la Direction du développement et de la coopération suisse (DDC) considèrent depuis longtemps que le modèle agroécologique est une solution qui permettrait de rendre le système alimentaire mondial plus résistant aux crises et plus durable sur le plan environnemental et social. Les solutions sont donc là, il faut simplement les mettre en œuvre de manière cohérente.
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Les revendications de Caritas Suisse Dans la situation d’urgence actuelle, Caritas Suisse soutient les populations d’une vingtaine de pays par une aide humanitaire directe et par des projets de coopération au développement. Nous nous engageons également en Suisse pour des conditions-cadres qui permettent de lutter contre la faim et la pauvreté dans le monde. La pandémie de Covid-19, le réchauffement climatique et la guerre en Ukraine ont entraîné des crises mondiales multiples qui affectent particulièrement les populations des pays du Sud. Face à ces crises, nous adressons au Conseil fédéral et au Parlement les revendications suivantes :
1. À court terme : augmenter l’aide humanitaire pour stopper les crises alimentaires Début avril 2022, le Programme alimentaire mondial a déjà demandé une aide humanitaire immédiate pour les pays qui dépendent fortement des importations de céréales venant de la région de la mer Noire. Il s’agit notamment du Sahel central et de la Corne de l’Afrique, deux régions où la sécheresse et les conflits armés avaient déjà provoqué une crise alimentaire. Caritas invite les autorités suisses à suivre enfin les recommandations des organisations internationales et à engager aussi rapidement que possible des moyens financiers dans le domaine humanitaire. Pour le PAM, la Suisse doit mettre à disposition au moins le même montant qu’en 2021, soit environ 100 millions de francs. Au vu de l’urgence de la situation, une augmentation de cette contribution s’impose. L’objectif est d’éviter à court terme l’escalade de la crise alimentaire. Nous demandons en outre que la Suisse s’engage au niveau international pour que les réserves de céréales bloquées par la Russie en Ukraine puissent être exportées le plus rapidement possible. La diplomatie suisse peut apporter une contribution importante à cet égard. En outre, la Suisse doit également apporter son aide dans le cadre d’initiatives logistiques concrètes visant à exporter les céréales d’Ukraine, par exemple les « Solidarity Lanes » mises en place par la Commission européenne.
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2. Renforcer la coopération au développement, augmenter le financement pour le climat Les crises mondiales multiples exigent également à long terme davantage de moyens financiers pour l’aide humanitaire, la coopération internationale et la lutte mondiale contre le changement climatique. Jusqu’à présent, la Suisse n’a pas tenu ses engagements et ses promesses, que ce soit dans le domaine de la coopération publique au développement ou dans celui du financement international du climat. Il s’agit maintenant de rattraper ce retard. Au lieu de dépenser 2 milliards de francs supplémentaires par an dans son réarmement militaire, la Suisse doit contribuer à garantir la sécurité dans le monde. La Direction du développement et de la coopération (DDC) peut apporter une contribution importante à cet égard. Dans ses engagements, la DDC soutient le modèle agroécologique qui renforce les petites structures paysannes et les exploitations agricoles de taille moyenne dans le Sud et réduit la dépendance vis-àvis des importations de denrées alimentaires en provenance de l’étranger. Il faut étendre cet engagement qui a fait ses preuves. Concrètement, Caritas Suisse demande que la Suisse augmente ses dépenses annuelles pour la coopération publique au développement à 1 % du revenu national brut. En ce qui concerne le réchauffement climatique, la Suisse doit également renforcer son engagement financier à long terme. Le changement climatique menace directement la situation alimentaire des populations des pays du Sud. Combiné à des événements tels que la guerre en Ukraine et la pandémie de Covid-19, il provoque des crises alimentaires dramatiques. L’objectif est de donner aux pays pauvres les moyens leur permettant de s’adapter à l’évolution des conditions climatiques. Au vu de sa puissance économique et de sa responsabilité réelle dans la crise climatique mondiale, la Suisse doit apporter une contribution d’au moins un milliard de francs par an.
3. Soutenir l’annulation de la dette des pays pauvres La Suisse doit participer, au niveau international, à l’aide aux États les plus pauvres qui dépendent des importations de céréales, en annulant leur dette. Si on ne le fait pas, un certain nombre d’entre eux risquent la faillite. De plus en plus de pays ont une dette extérieure si importante qu’ils n’ont plus les moyens financiers d’aider leur population à faire face à la crise alimentaire ou d’investir dans leur propre agriculture et dans l’approvisionnement alimentaire national. La Suisse, pays riche, dispose de nombreux moyens pour soulager financièrement les pays pauvres au niveau international. L’une de ces possibilités serait que la Suisse transmette ses droits de tirage spéciaux au Fonds monétaire international (FMI). Les droits de tirage spéciaux sont des réserves monétaires que les pays reçoivent du FMI et qu’ils peuvent échanger contre des devises étrangères. Les États financièrement faibles obtiendraient ainsi des liquidités indispensables et leur marge de manœuvre financière serait accrue. La Suisse peut tout à fait supporter financièrement de mettre ses droits de tirage spéciaux à la disposition des pays pauvres qui sont aujourd’hui particulièrement touchés par les crises. À long terme, le désendettement des pays pauvres doit en outre s’accompagner de changements structurels et d’une répartition plus équitable de l’argent des contribuables. Les pays pauvres doivent toucher une part équitable des dépenses fiscales des entreprises transnationales. Cela leur permettrait de réagir avec leurs propres moyens dans des situations comme celle que le monde traverse aujourd’hui.
Juillet 2022 Auteure : Angela Lindt, Service Politique du développement Courriel : alindt@caritas.ch, tél : 041 419 23 95 Cette prise de position peut être téléchargée sur caritas.ch/prises-de-position
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