Connexions 55

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Connexions 联 magazine de la

Chambre

dossier

Le

de

Commerce

et d’Industrie

Fr a n ç a i s e

en

Chine

no 55 octobre

2010

L’eau, la Chine face aux défis de l’or bleu 水资源:中国面临“蓝金”挑战

中 国 法 国 工 商 会 双 月 刊

结 • Focus :

S’installer en Chine Les produits chinois se vendent de plus en plus en yuan Gros plan sur le Guangxi

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Vu d’ici « Lanzhou – Pont sur le Huang He » par le photographe David Gourhan



卷首语 EDITORIAL « Qui domine l’eau, domine la Chine »

Annick de Kermadec-Bentzmann Présidente de la CCIFC 中国法国工商会会长:甘安懿

Chers amis, chers lecteurs, La toute nouvelle équipe de rédaction de Connexions, composée de Nicolas Sridi, rédacteur en chef et de Flore Coppin, responsable de la publication, est heureuse de vous proposer un Focus « spécial rentrée » enrichi de renseignements qui se veulent surtout pratiques et fort utiles pour les nouveaux arrivants. Ensuite, vous découvrirez un dossier très exhaustif sur l’eau, il ne vous laissera pas indifférent, surtout, pour ceux qui résident en Chine, tout comme ceux qui s’intéressent à ce pays et à son devenir. D’ailleurs, selon un célèbre adage

“治水者治天下” 尊敬的朋友和读者: 由主编塞迪和出版负责人龙丹妍组成的全新 《联结》编辑团队荣幸地向您推荐“复工特辑”,该 栏目信息丰富,对刚刚来到中国的朋友们特别实用、 非常有益。接下来,您会看到内容非常完整的关于水 的专栏,它不会让您无动于衷,尤其是那些居住在中 国以及关注这个国家及其未来的人。况且, 中国有句 著名谚语: “治水者治天下”。 中国在历史进程中遭遇过各种与水有关的问题 (水污染,饮水问题等),尤其是饮用水匮乏的问 题。 对于这个地球上人口最多的国家,解决水问题 是生死攸关的大事。另外,在过去的30年里,中国经 济、人口和工业的迅速增长,还有涌向大城市的上 千万农民工,不断汲取着有限的水资源,直至含水 层。 在水资源领域,接下来的20年对中国至关重要, 否则水资源枯竭的风险将危及其发展和民生。 为了使中国能够应对持续增长的用水需求,节水 技术和手段、水处理和污水回用应该得到优先发 展。这些领域都是法国企业所擅长的,并呈现出显 而易见的商机。

祝大家阅读愉快!

chinois « qui domine l’eau domine la Chine ». Au cours de son histoire, la Chine a connu des problèmes liés à l’eau (pollution, accès...), notamment, au manque d’eau potable. Pour le pays le plus peuplé de la planète, ce sujet reste un enjeu vital. En outre, depuis ces 30 dernières années, la formidable croissance économique, démographique et industrielle de l’Empire du Milieu, sans compter les migrations massives de centaines de millions de villageois vers les grandes villes, ont puisé sur les ressources en eau jusqu’aux nappes phréatiques, pourtant limitées. Les deux prochaines décennies seront cruciales pour la Chine, dans le domaine de l’eau, sinon le risque de pénurie pourra dangereusement affecter son développement et sa population. Des méthodes et des technologies d’économie d’eau, des opérations de traitement de l’eau et de recyclage des eaux usées devraient être prioritaires, afin de permettre au pays de faire face à une forte demande en constante augmentation. Tous ces domaines dans lesquels nos entreprises excellent et qui présentent des opportunités évidentes. Bonne lecture à tous !

octobre 2010 / Connexions


协助委员会

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COMITÉ DE PATRONAGE

Connexions Le magazine de la Chambre de Commerce et d’Industrie Française en Chine 中国法国工商会双月刊

Directeur de la publication Jacques Leclerc du Sablon Responsable de la publication Flore Coppin Rédacteur en chef Nicolas Sridi Edition des textes chinois / 中文编辑

Ruan Zheng 阮征 Graphiste / 美术编辑 Xie Bin 谢滨 Ont collaboré à ce numéro : Véronique d’Antras, Laurent Ballouhey, Pauline Bandelier, Mathilde Bonnassieux, Any Bourrier, Antonia Cimini, Julie Desné, Hélène Duvigneau, He Feng, David Gourhan, Yann Marin, Patrice Nordey, Manuel Rambaud, Alban Renaud, Christine Simon, Renaud de Spens, Pierre Tiessen, Emilie Torgemen, Jean Van Wetter. Photographie de couverture David Gourhan « Lanzhou – Pont sur le Huang He » Publicité / 广告招商 Pékin : Ruan Zheng 阮征 Tél. : (010) 6461 0260 # 14 Shanghai : Séverine Clément Tél. : (021) 6132 7100 # 114 Guangzhou : Hervé Lambelin Tél. : (020) 8186 8585 # 801 Imprimé par Versatra Graphics 富运达图文印刷

Toute reproduction même partielle des textes et documents parus dans ce numéro est soumise à l’autorisation préalable de la rédaction. La CCIFC décline toute responsabilité quant aux documents qui lui auraient été fournis, ou aux erreurs qui auraient pu échapper à son attention. Les propos tenus dans les articles n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs.

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Connexions / octobre 2010



Connexions

5 5 OCTOBRE 2 0 1 0

©IAnne Garrigue

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no

Sécheresse au Yunnan : l’hiver dernier, le Sud-Ouest de la Chine a connu la pire sécheresse depuis 100 ans. 云南干旱的景象:2010年初的冬天,中国西南省份遭遇了百年来特大旱灾

focus : Spécial rentrée : s’installer en Chine 8 - 15 rendez-vous A la une des médias 16 Le dessous des chiffres 20 Tendances RH 22 L’état des lois 24 l’actualité Les marchés boursiers français ouverts aux Chinois 26 Actualité entreprises 28 Gorgy Timing à l’heure chinoise... de demain 32 l’entretien Pr. Wang Zhenyi, symbole de la coopération franco-chinoise en matière de santé 34

L’ eau, la Chine face aux défis de l’or bleu Etat des lieux Le Dragon à court d’eau La politique de l’eau de la Chine Ds Avocats : Le cadre réglementaire sur l’eau en Chine, la valse des standards Les infrastructures

36 40 40 42 44 46

Adduction d’eau Sud-Nord, le désir face à la réalité Les Karez, un système d’irrigation millénaire toujours d’actualité L’eau dans la culture chinoise Enjeux et défis globaux La Chine contrainte d’envisager de nouveaux modes de gestion de l’eau Les chiffres du défi chinois Géopolitique de l’eau en Chine Comment la planète abbreuve le géant chinois Coup de chaud pour les fleurs du Printemps éternel Le cauchemar de l’avancée du désert en Chine du Nord Tibet : menace sur le « château d’eau » de l’Asie La grande marche contre la pollution De l’eau pour produire Dragon bleu et Tigre blanc : L’immense défi de l’eau agricole Agrifrance : La nécessaire réforme de l’agriculture chinoise Le nexus eau/énergie, une équation salvatrice ? Schneider Electric au service du nexus eau/énergie

48 50 52 54 54 55 58 60 61 62 63 64 66 66 68 72


2010年十月号 第55期 中文译文目录 29 公司简讯 33 Gorgy Timing与中国明天同步计时 35 专访:王振义教授,中法医疗卫生领域合作的象征 37 水资源:中国面临“蓝金”挑战 45 德尚律师事务所: 中国水资源法规,标准频繁调整

Inondation à Chongqing en juillet 2010. 2010年7月重庆的洪灾

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59 中国水资源的地缘政治对政府而言,

54

水是重要的外交武器 67 青龙与白虎,农业用水的巨大挑战 69 法国阿利芳公司 : 中国农业需要改革 75 施耐德电气为水能关系服务 常识与技术用于卓越管理 77 工业污水处理 81 法国开发署:小水电,介于气候政策和农村可持续 发展的“交叉点” 87 苏伊士环境如何为中国城市提供饮用水 89 中国建筑用水向合理化方向发展? 91 威立雅 : 净化上海黄浦江水

Au Guangxi, il est possible de voyager tout au long de l’année. 广西适宜全年旅游。

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93 Artelia: 污水处理的综合管理

128

Bon sens et technique pour une meilleure gestion 74 Le traitement des eaux industrielles 76 Hydroélectricité, les yeux dans le bleu 78 AFD : La petite hydroélectricité, à la croisée des politiques climat et de développement rural durable 80 De l’eau pour vivre 82 L’eau usuelle en Chine : un défi majeur 82 Les aspects juridiques de l’accès au marché de l’eau en Chine 84 Comment Suez Environnement apporte l’eau potable aux villes chinoises 86 Vers une utilisation raisonnée de l’eau dans les bâtiments en Chine ? 88 Veolia nettoie l’eau du Huangpu à Shanghai 90 Artelia : pour une gestion intégrée du traitement des eaux usées 92 Pékin, le mirage d’une oasis ? 94 Les pékinois ont leur mot à dire sur l’eau 97 Le marché des eaux minérales en Chine 98 Connaissez-vous vraiment votre bonbonne ? 100 Zones rurales : l’ONG Initiative Développement au Guizhou 101 Campagnes discrètes, timides mesures 102

99 Perrier: 中国有气矿泉水市场的领军品牌 113 水足迹标准 122 旅游:普瓦图-夏朗德大区

Les Joyeuses marches au bord de l’eau 103 Quand les riverains partent au secours du lac Tai 104 Les sciences et technologies au secours de l’eau 106 La Chine assoiffée de technologies et de coopérations scientifiques 106 La Chine met l’eau de mer en bouteille 108 Pluie artificielle : la Chine à l’assaut des nuages 109 Vers une gestion optimale de l’eau en milieu urbain 110 Empreinte eau : vous êtes peut-être vert… mais serez-vous bleu ? 112 Des stations d’épuration vertes 114 régions jumelles Le Guangxi, future plateforme d’intégration économique entre la Chine et l’ASEAN 116 tourisme chine Féerie du Guangxi 128 associations Shanghai Young Bakers 130 culture David Gourhan, un contre regard 132 Le voyage interculturel d’un atelier théâtral en Chine 134 lire 136

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FOCUS

聚焦

S’installer en Chine Pour la rentrée, Connexions vous propose un Focus spécial « S’installer en Chine ». L’occasion pour les néo-arrivants d’obtenir des informations pratiques, de connaître les tendances du marché de l’emploi d’obtenir les dernières mises à jour sur la fiscalité des expatriés, de découvrir les conseils de spécialistes de l’interculturel et de lire les témoignages de Français qui vous feront partager leur expérience d’expatriation en Chine.

Français de Chine, vous n’êtes pas seuls ! Les Français expatriés sont un million et demi à travers le monde et leur nombre a progressé de 40% depuis le début des années 2000.

25 260, c’est le nombre de Français enregistrés sur les registres des différents consulats de France en Chine (chiffre au 1er février 2009). On estime à un tiers le nombre des non inscrits. La population de chaque circonscription consulaire est essentiellement concentrée dans les grandes villes et est constituée principalement d’hommes (plus de 60% des adultes). La communauté française se caractérise par son dynamisme (population essentiellement active), sa jeunesse (entre 30 et 40 ans) et son inscription dans le domaine économique : la majorité des actifs sont des cadres. Les Français restent en moyenne en Chine de 3 à 5 ans et 80% de la population réside depuis moins de 5 ans dans le pays. La Chine demeure une destination très attractive: la population de Français a doublé à Pékin en 5 ans et il y a 100 Français de plus par mois à Hong Kong.

Connexions / octobre 2010

Combien de Français en Chine ? Les chiffres au 1er février 2009 Nombre de Français inscrits au Registre mondial

Estimation du nombre de non-inscrits

2 288

1 500

350

100

Consulat Général à Hong-Kong

8 436

entre 2 000 et 3 000

Section consulaire de l’Ambassade de France à Pékin

5 192

1 500

Consulat Général à Shanghai

8 767

entre 2 000 et 3 000

Consulat Général à Shenyang

252

200

Consulat Général à Wuhan

675

300

Consulat Général à Canton Consulat Général à Chengdu

Source : www.consulfrance-pekin.org


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Spécial rentrée : s’installer en Chine 复工特辑:在中国落脚

La rentrée 2010 des entreprises Annick de Kermadec-Bentzmann, Présidente de la CCIFC, répond aux questions de Connexions sur les tendances de la rentrée pour les entreprises françaises en Chine. Connexions : Comment s’annonce selon vous la rentrée 2010 pour les entreprises françaises en Chine dans le contexte économique actuel ? Annick de Kermadec-Bentzmann : Les entreprises

françaises continuent à renforcer leur présence en Chine. Le nombre de nos membres est en constante progression. Depuis, le début de l’année de nouvelles implantations sont inaugurées aux 4 coins de la Chine, notamment dans la région du Sud et autour de Shanghai témoignant ainsi de la vitalité et du dynamisme de nos sociétés. Shanghai reste encore au coeur de l’actualité, pour un certain nombre de sociétés françaises, au moins jusqu’à la fermeture de l’Expo Universelle prévue le 30 octobre prochain. La prochaine visite du Président Hu Jin Tao en France prévue à l’automne scellera ainsi de façon éclatante l’excellence des relations France-Chine, déjà sur de bons rails depuis l’an dernier et surtout après la visite du Président Nicolas Sarkozy, à l’occasion de l’inauguration de l’Expo Universelle le 30 avril dernier. Une excellente nouvelle dans le contexte économique de nos deux pays et, de ce fait, pour notre communauté d’affaires. C. : Quelles seront les grandes orientations de l’équipe France pour la rentrée ? A.d.K.B. : A l’initiative de l’Ambassadeur de France en Chine, des

missions « Villes d’avenir » sont programmées, co-organisées par l’Ambassade, Ubifrance et la CCIFC, la dernière a eu lieu à Chongqing début septembre, la prochaine aura lieu à Dalian, les 8 et 9 novembre. La participation de plus en plus importante de nos entreprises à ces missions atteste du succès et de la pertinence de ces opérations. C. : Quel conseil donneriez-vous à une entreprise française qui s’installe

en Chine ? A.d.K.B. : Le premier des conseils est de ne pas hésiter à s’infor-

mer sur la Chine, que ce soit dans les domaines économique, juridique, financier et culturel. Il faut surtout avoir une attitude pragmatique, être à l’écoute, être humble car la Chine ne nous attend pas ! L’entreprise doit s’entourer de conseils de la part de conseillers juridiques, de leurs banquiers, de leur CCI régionale, de la CCIFC et des pouvoirs publics qui font notamment d’excellentes études sectorielles. Sur différentes questions la CCIFC publie des guides (RH, etc...) indispensables pour ces entreprises désireuses de mieux connaître ce pays avant de faire le saut pour s’y s’installer. Elle organise des conférences et des groupes de travail avec ses membres sur des thèmes utiles dans l’approche de ce marché difficile. L’échange d’expérience et de renseignements est précieux dans cette étape exploratoire. La CCIFC, par ailleurs, propose des missions de découverte en liaison avec les CCI régionales en France et offre aussi des possibilités de domiciliation, dans les 3 villes, Pékin, Shanghai et Canton, permettant ainsi aux PME de mieux appréhender le marché et ses opportunités.

Les rendez-vous à venir de la CCIFC

Villes d’avenir Dalian : 8 et 9 novembre 2010. En 2011, 4 villes sont programmées dans la tournée Villes d’avenir : Qingdao, Changsha, Xi’an et Kunming. Galas annuels Pékin : 22 octobre 2010. Canton : 14 janvier 2011, avec remise des Prix PME Chine. octobre 2010 / Connexions


FOCUS

聚焦 Recherche d’emploi, mobilité, fiscalité, intégration… s’installer en Chine s’inscrit dans un projet, personnel ou familial, qui est parfois long et complexe. Des experts répondent aux questions que se posent les expatriés à leur arrivée en Chine.

La recherche d’emploi en Chine

3 questions à Karine Yue, Responsable appui RH de l’antenne de Pékin de la CCIFC. Connexions : Quelles sont les tendances actuelles du recrutement des Français en Chine ? Karine Yue : Les tendances

varient selon les régions. Le recrutement des candidats français dépend beaucoup des implantations des sociétés françaises. Les nouvelles structures s’implantent de plus en plus dans les villes moyennes en province, tandis que le nombre de postes basés dans les grandes villes chinoises comme Pékin, Shanghai et Canton reste stable ou voire est à la baisse. Cette nouveauté nécessite plus de mobilité géographique chez les candidats français, ce qui peut poser problème aux personnes qui ont des conjoints salariés ou des enfants scolarisés. Aujourd’hui, une expérience professionnelle en Chine est indispensable pour la majorité des postes ouverts aux étrangers. Les entreprises implantées en Chine favorisent les candidats déjà présents en Chine. Pour un poste de VIE, la décision d’embauche se fait souvent en France. Il est ainsi parfois plus avantageux d’être présent en France lors de la sélection. D’une manière générale, il existe des opportunités dans tous les secteurs même s’il n’y a pas un grand nombre de postes réservés aux candidats français. Le secteur des services emploie plus facilement les salariés étrangers et notamment les sociétés visant la clientèle internationale (assurance, relocation, services médicaux, conseil, hôtellerie-restauration etc.). C : Pourriez-vous donner quelques conseils aux candidats français qui arrivent en Chine ? K. Y. : L’évolution rapide du marché de

Le guide « Les Ressources humaines en Chine » de la CCIFC est à destination des entreprises. Vous y trouverez des conseils juridiques et fiscaux concernant les ressources humaines en Chine.

10 Connexions / octobre 2010

l’emploi en Chine demande une adaptation constante de la part des candidats. Il faut être prêt à être mobile et à accepter des postes qui ne soient pas forcément complètement à la hauteur de ses attentes, notamment pour ceux qui recherchent une première expérience chinoise. Il faut mettre en avant ses avantages

concurrentiels par rapport aux candidats chinois et d’autres candidats français. Une bonne maîtrise du mandarin n’est toujours pas un critère décisif lors de l’embauche, mais cela joue beaucoup dans la première phase de sélection. Les recruteurs n’exigent pas le chinois sauf s’il est jugé nécessaire pour le travail. Il est donc assez peu fructueux pour les candidats ayant un niveau de chinois faible de postuler à un poste qui exige un niveau courant. Pour augmenter ses chances de réussite, le candidat débutant en chinois doit surtout montrer sa motivation et son potentiel d’amélioration de la langue dans une période relativement courte. Concernant la recherche d’emploi depuis la France, nous conseillons aux chercheurs d’emploi de se mettre en contact avec les CCI de leur région afin de mieux connaître les projets d’implantations des sociétés locales en Chine. C. : Y a-t-il une démarche plus efficace qu’une autre ? K. Y. : Les démarches classiques sont les

suivantes : sites emploi, candidatures spontanées, cabinets de recrutement, forums, magazines en anglais, réseaux etc. Il n’existe pas une piste idéale. Selon les profils, les démarches de recherche sont différentes. Ainsi, un networking peut être une occasion pour un commercial de rencontrer un recruteur ou un client potentiel, mais ce n’est pas forcément l’endroit idéal pour un ingénieur souhaitant croiser un directeur technique. D’une manière générale, nous encourageons les candidats déjà en Chine à participer aux différents événements organisés par la CCIFC, d’autres chambres de commerce étrangères ou des organisations internationales Les besoins en recrutement n’étant pas toujours communiqués sur le marché de l’emploi, faire connaître son profil et développer des réseaux auprès des professionnels permettent de connaître les projets qui amènent certaines créations de postes inhabituelles.


Les ateliers pilotes recherche d’emploi du bureau de Shenzhen de la CCIFC Depuis Mars 2009, le bureau de Shenzhen de la CCIFC a mis en place une série d’ateliers hebdomadaires de recherche d’emploi à destination des candidats français. L’approche des ateliers est de redynamiser une recherche d’emploi infructueuse via des exercices de réécriture de CV, des mises en situations et en mettant en réseau les contacts de chacun. Selon Isabelle Carlier, responsable du bureau de Shenzhen de la CCIFC, qui anime ces ateliers, la recherche d’emploi est difficile en Chine pour les Français mais les solutions existent, l’essentiel étant d’être très actif, patient et surtout de ne pas s’isoler. Sur la quinzaine de personnes ayant assisté aux ateliers ces 6 derniers mois, toutes ont aujourdhui trouvé un emploi dans le réseau des entreprises françaises du Sud de la Chine. Les profils des candidats étaient très différents : ingénieur, marketing, design… et aucun n’avait des compétence en chinois professionnel, mais le coaching leur a permis de retrouver confiance en eux et de mettre en valeur de manière collective leurs compétence et leur réseau et surtout de s’adapter au contexte local. Après le succès de Shenzhen, l’antenne de Canton lancera très prochainement son 1er atelier. En un mot : candidats, réseautez ! Pour connaître les dates des prochains ateliers consultez le site www.ccifc.org Le site de recrutement de la CCIFC http://job.ccifc.org

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Spécial rentrée : s’installer en Chine 复工特辑:在中国落脚

Mobilité internationale et fiscalité en Chine Par Alina Quach, Avocat associé, UGGC & Associés, vice-présidente de la Chambre de Commerce et d’Industrie Française en Chine. Connexions : Pourriez-vous nous rappeler dans quelle situation un Français qui travaille en Chine doit payer des impôts ? Alina Quach : Un Français

résidant plus de 183 jours et travaillant en Chine doit acquitter localement des impôts sur ses revenus de source chinoise, que son contrat de travail soit local ou qu’il ait un statut d’expatrié. Après 5 ans de résidence dans le pays, tous les revenus, quelle qu’en soit l’origine, seront imposés en Chine. C. : Quels sont les grands principes de l’impôt sur le bénéfice des entreprises étrangères ? A. Q. : Une société étrangère est assujet-

tie à l’impôt sur le bénéfice au taux de 25% sur ses revenus de source chinoise et non chinoise lorsque la société est résidente en Chine, ou lorsque son lieu de direction effective est situé en Chine. Lorsque cette société n’est pas considérée comme résidente en Chine, mais y a créé un bureau ou un établissement, elle est imposable au même taux de 25% sur ses revenus de source chinoise ainsi qu’étrangère si les revenus sont liés aux dits bureau ou établissement. Si elle ne dispose pas d’un bureau ou d’un établissement, seuls les revenus de source chinoise sont alors imposés. C. : Il y a-t-il des nouvelles mesures à venir concernant la fiscalité des entreprises ? A. Q. : La législation fiscale chinoise est en

perpétuelle évolution, dans tous les domaines. Récemment, la réglementation

a été précisée concernant la fiscalité des restructurations d’entreprises ainsi que sur les prix de transfert. Des mesures seront prises pour renforcer le contrôle par les administrations fiscales notamment contre l’évasion fiscale. C. : Quels sont les secteurs et régions de Chine encouragés en matière de fiscalité pour les entreprises étrangères ? A. Q. : Les avantages fiscaux accordés aux

entreprises investissant dans l’Ouest de la Chine dans des domaines encouragés sont restées applicables jusqu’en 2010. La protection de l’environnement, l’eau, les énergies renouvelables, les hautes et nouvelles technologies ou la sécurité industrielle sont des secteurs qui peuvent bénéficier de réductions d’impôt voire d’exemption. En outre, des avantages fiscaux sont octroyés dans les activités de recherche et développement.

Les séminaires Bienvenue en Chine La CCIFC organise depuis plusieurs années dans ses antennes des séminaires dédiés aux Français néoarrivants en Chine. Ils sont l’occasion pour ces personnes d’obtenir des informations générales sur leur installation en Chine, de partager leur expérience avec d’autres Français et de recueillir des conseils d’experts dans les domaines juridique, fiscal et interculturel. Retrouvez les dates des prochains séminaires sur le site www.ccifc.org octobre 2010 / Connexions 11


FOCUS

聚焦

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L’engagement d’un « homme d’expatriée » en Chine

« Je fais partie de ces hommes qui ont fait le choix de mettre de côté leur vie professionnelle en France pour suivre leur conjointe dans leur projet d’expatriation », nous confie Laurent Peyrot. Installé en Chine depuis 4 ans avec sa femme qui travaille pour une entreprise française à Pékin, Laurent a décidé de mettre à profit ses compétences au service de l’ONG française Enfants du Ningxia. Fort de son expérience dans le domaine du conseil pour les associations caritatives en France, il a d’abord été bénévole durant quelques mois pour l’ONG à son arrivée en Chine avant d’être recruté à plein temps comme coordinateur. Créée en 2002, Enfants du Ningxia et a pour but de contribuer à l’amélioration de l’environnement scolaire dans des districts pauvres de la région autonome Hui du Ningxia (bourses scolaires, formations de professeurs…). « Aujourd’hui, je suis un homme comblé, j’ai l’immense chance de pouvoir vivre cette expérience grâce à mon statut un peu particulier d’homme d’expatrié… », explique Laurent Peyrot. Retrouver la liste des associations françaises en Chine (représentation, accueil, ONG…) sur le site Internet de l’ambassade de France en Chine www.ambafrance-cn.org. 12 Connexions / octobre 2010

S’épanouir dans son expatriation Les enjeux personnels d’une expatriation L’expatriation est un projet de vie et sa réussite passe par l’épanouissement de l’expatrié et de son conjoint dans leur vie personnelle et professionnelle. La décision et la préparation au départ sont les premiers gages de réussite d’une expatriation. Comme le remarquent Marie Rivière et Catherine Lazbounatirou, fondatrices de Harmony and Mobility consulting1, « en réalité, le conjoint est peu associé à la prise de décision et n’est pratiquement jamais reçu par le DRH de l’entreprise qui expatrie la famille. Par conséquent, les motifs « négatifs » associés à l’expatriation (fuite, problèmes personnels…) auront à court terme un impact fort sur l’adaptation de chacun. ». La plupart des conjoints (femmes) abandonnent leur poste et leur carrière pour suivre leur partenaire, ce qui entraîne des frustrations. Ces frustrations sont d’autant plus difficiles à vivre et à surmonter lorsque le pays d’accueil, comme la Chine, offre peu de structures d’aide à la recherche d’emploi et où la barrière de la langue est un obstacle non négligeable. De plus, le « choc culturel » est d’autant plus important lorsque le pays d’accueil est éloigné de sa propre culture et l’adaptation est différente pour l’expatrié et le conjoint. C’est pourquoi, suivre des formations interculturelles dans les premiers mois de l’arrivée permet de mieux comprendre son nouvel envi-

Le top 3 des destinations les plus demandées par les Français 50% 41%

40%

40% 30% 19%

20% 10% 0% Chine

Etats-Unis

Grande-Bretagne

D’après une étude d’ECA International : « Managing Mobility Survey » réalisée en 2008 auprès des DRH des grandes entreprises

ronnement et de mieux s’adapter. Comme le souligne Harmony and Mobility consulting, s’expatrier c’est aussi revenir un jour dans son pays d’origine et « il est souvent plus facile d’arriver que de repartir ». La gestion du retour n’est pratiquement jamais anticipée par la direction des Ressources Humaines des entreprises, pourtant, accompagner les personnes à la fin d’un contrat à l’étranger pour les aider à mesurer et valoriser les compétences acquises au retour de la mission est aussi important que l’accompagnement au départ dans le processus d’expatriation.

1. Harmony and Mobility consulting est un cabinet de conseil RH implanté en Chine et à Singapour, www.harmonymobility. com.

La vie professionnelle des Français à l’étranger % des femmes, conjointes d’expatrié en activité professionnelle 57% Autre*

% des hommes, conjoint d’expatriée en activité professionnelle

43% en activité professionnelle

90% en activité professionnelle 10% Autre*

* Etudiants, retraités, sans emploi... Selon une enquête sur l’Expatriation des français, réalisée par la Maison des Français de l’Etranger - 2008


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Spécial rentrée : s’installer en Chine 复工特辑:在中国落脚

Ma Chine à moi … Installés depuis plusieurs années en Chine et membres actifs de la communauté d’affaires française, ils vous font partager leur expérience chinoise….

Michel Arnaud déchiffre la Chine avec une neutralité bienveillante Pendant ses loisirs, Michel Arnaud se plait à enfourcher sa bicyclette. Avec son épouse, ils partent sillonner les ruelles de Pékin. « Parfois, on découvre des choses tout à fait inattendues. De vieux temples abandonnés par exemple, ou bien des carrés de hutongs qui sont tellement calmes et paisibles qu’on y entend les oiseaux chanter... ». Le Directeur Général de la banque PSA Peugeot Citroën en Chine évoque son expérience avec sérénité et détermination. Il est facile de se plaire en Chine si l’on sait profiter du pays, précise-t-il. Il faut être curieux. Et puis, il faut savoir se ressourcer en allant, par exemple, se promener sur les tronçons peu fréquentés de la Grande Muraille », suggère-t-il. C’est la troisième fois que Michel Arnaud séjourne en Chine. En 1989, « la Chine n’avait absolument rien à voir avec ce que l’on connaît aujourd’hui, se souvient-il. Il y avait de la poussière et des camions partout. Beaucoup de gens portaient des costumes traditionnels, et la ville était... basse ! A l’époque, la Chine, c’était l’autre bout du monde et les rares étrangers présents étaient cantonnés dans des compounds. ». Revenu en 1999, puis en 2007, il n’a alors « rien reconnu... Aujourd’hui, on voit dans la même rue des gens en tricycle rouillé qui en croisent d’autres en voiture de luxe. ». Plus frappant encore : « la coexistence, apparemment sans conflit, de deux voire trois générations si différentes. Chez les plus de 40 ans, il y a un esprit collectif beaucoup plus grand que chez leurs

enfants qui ont un énorme appétit de consommation, et qui vivent dans une compétition effrénée. La Chine perd peu à peu son âme », constate-t-il. Michel Arnaud préserve autant que possible sa neutralité intellectuelle. « Ma motivation personnelle est de comprendre ce pays et ses grands défis. J’observe, je regarde, j’analyse », dans le souci constant de ne pas rester « à la surface des choses ». Et s’il adopte tour à tour la posture du simple témoin ou du sociologue, c’est aussi parce qu’il rejette vigoureusement « toute forme d’ingérence. Souvenons-nous que nous ne sommes pas chez nous ! ». Loin de tomber dans la tendance inverse qui consiste à devenir « plus chinois que les Chinois », il conseille plutôt d’assumer sa culture et sa personnalité de Français, mais tout en essayant de s’imprégner du pays et de multiplier les contacts avec « les gens du coin. Il est toujours intéressant de ne pas se limiter à la communauté d’expatriés. A 58 ans, et après trois années et demi passées à Pékin, pendant lesquelles « on a pas vu le temps passer », Michel Arnaud suggère aux nouveaux arrivants de « conserver autant que possible l’esprit ouvert. Et surtout, de positiver ! ». Finalement, un peu comme une illustration involontaire de son propos, à la question de savoir si des aspects de la vie en Chine le dérangent, il répond spontanément : « Non, rien du tout, on peut vivre en Chine plusieurs années, avec un bémol peut-être pour la nourriture, car je ne raffole pas des plats épicés ! ». M a n u el R a mbau d

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FOCUS

聚焦

Éric Meyer, la Chine au long cours Après une expérience journalistique en Europe « pas assez palpitante » à ses yeux, Éric Meyer « trouve sa voie » en Chine, et s’y installe en 1987 avec l’ambition de « découvrir la face cachée de la planète Terre ». En spectateur attentif, il traverse la période tourmentée du Printemps de Pékin qui voit « l’ancien et le nouveau s’affronter », raconte le fondateur de l’incontournable site « le Vent de la Chine ». Un premier contact avec le pays qu’il qualifie d’« extrêmement difficile. ». À l’époque, l’administration est contrôlée par des « Gardes Rouges très mal élevés ». La situation est tellement tendue qu’il se retrouve bientôt en instance d’expulsion... Une position inconfortable dont il ne se dégage finalement que grâce à l’intervention du Quai d’Orsay. Arrivé dans une disposition d’esprit à la fois « pragmatique et naïve », il constate bientôt, parmi cette société post-socialiste déboussolée, une forme d’indifférence générale hypertrophiée à ses yeux d’occidental « Je me souviens avoir été témoin d’une noyade dans le lac de Houhai et, à ma grande stupeur, nul ne réagissait ! »... Mais le journaliste évoque également la dimension romantique qui baignait cette période. Éric Meyer se souvient en particulier, avec un soupçon d’émotion dans la voix, des soirées de partage profond, émotionnel et intellectuel avec ses

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amis artistes chinois, échanges qui ne se retrouveront plus dans les périodes ultérieures. Il évoque « de jeunes idéalistes en quête de leur art et confiants dans la capacité du régime à évoluer. ». Progressivement, sans négliger les aspects désagréables de cet univers en transition, Éric Meyer apprend à aimer les vertus chinoises, en particulier « un certain pragmatisme qui leur permet de réagir positivement face à l’échec, et générer du positif à partir du négatif, à force d’humilité et d’obstination. Ce que nous, souvent, ne savons pas faire. ». Et la liste des choses qu’il apprécie ici semble sans fin : « Leur capacité à ne pas se plaindre, à ravaler leur amertume, leur puissante énergie vitale, ainsi qu’une certaine forme de naïveté et de sincérité dans la parole, etc. ». Dans cet univers culturel si différent du nôtre, il reconnaît aujourd’hui qu’il n’est « pas toujours aisé de s’adapter. ». Et pour avoir vu, pendant plus de 20 ans, nombre de ses compatriotes s’installer puis repartir, le journaliste suggère, « pour tenir le coup, d’avoir confiance en soi et de ne jamais oublier que s’adapter ne signifie pas se renier en tant que Français ». Ce qui veut dire, entre autres, qu’on peut passer une longue tranche de sa vie en Chine sans s’y ennuyer, ni s’y perdre !

M a n u el R a mbau d


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Spécial rentrée : s’installer en Chine 复工特辑:在中国落脚

Julien Chol, « en Chine, le changement, c’est la normalité » Julien Chol est l’un de ces Français qui ont parfaitement su s’adapter en Chine. Ce jeune sportif, par ailleurs très impliqué socialement, est aux commandes de l’entreprise qu’il a lui-même créée. Il a su, depuis cinq ans, profiter au mieux de ce qu’avait à lui offrir la capitale. Pour lui, tout s’est fait de manière « très simple et très sympa. Globalement, les gens sont plus ouverts qu’en France. Non seulement les Chinois, mais également les Français eux-mêmes. Sans doute parce que les nouveaux arrivants veulent faire des rencontres, et peut-être aussi par affinité communautaire. ». « J’étais déjà venu en 2002. Dans le cadre professionnel, c’était le royaume de la démerde », se souvient-il. A l’époque, ce qui le frappe, c’est l’incroyable dynamisme du pays. « Ici, le changement, c’est la normalité. Je sentais qu’il y avait des opportunités tous les jours, dans tous les domaines ; beaucoup plus qu’en France. ». Pour ce jeune qui, à l’époque déjà, rêve de « monter sa boîte », c’est le terrain de jeu idéal. Il décide donc de revenir en 2005. Très sociable, il se lie rapidement d’amitié avec plusieurs de ses compatriotes qui, comme lui, ont envie de s’investir dans un projet. Ensemble, ils fondent la Jeune Chambre Économique, un groupe « engagé civiquement, et qui veut changer les choses en mettant en place des actions concrètes. Comme, par exemple, le ‘’Forum Travailler Ensemble’’ ». Multipliant les initiatives abouties et désormais

reconnue, la JCE s’est peu à peu imposée comme un acteur crédible vis à vis de nombreux interlocuteurs. Mais l’essentiel de son temps, il le consacre à sa société Lalaso, qui commercialise des purificateurs d’air et des masques anti-pollution, en particulier à l’usage des sportifs. Des accessoires qui peuvent s’avérer très précieux lorsqu’on connaît le taux de pollution de l’air à Pékin... Son temps libre, ce passionné d’escalade le passe volontiers au parc Ritan, où il grimpe régulièrement avec un groupe de Chinois amateurs de varappe. « Je pensais qu’il serait difficile de me lier d’amitié avec des Chinois, mais en fait, il suffit d’être patient .». Selon lui, il est important pour les nouveaux arrivants français de « se trouver une activité fixe qui leur permette de rencontrer des Chinois. ». C’est un facteur d’enracinement et un bon moyen de s’ouvrir à Pékin : « Cette ville est tellement cosmopolite qu’il y en a vraiment pour tous les goûts », s’enthousiasme-t-il encore en citant en particulier le Yugongyishan, un lieu « plein de bonnes vibrations ». Autre conseil : « Apprendre le chinois, sinon on risque d’être vite frustré. Et c’est tellement sympa de pouvoir parler un peu avec un vieux du hutong. D’autant que les gens, ici, ont réellement envie de discuter avec nous autres étrangers... ».

M a n u el R a mbau d

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头条新闻 A la une des médias

Par Renaud de Spens

« Direct Zhongnanhai », liberté d’expression et démocratie : quand la presse chinoise relève la tête

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Envoyez les gongs ! Le 8 septembre dernier, le pouvoir que les plus hauts dirigeants « mettent la main à la pâte pour chinois a lancé en grande pompe le site « Direct Zhongnan- toutes les choses » (事必躬亲shì bì gōng qīn) et que ce hai » (直通中南海), qui permet aux internautes d’écrire à qu’il faut d’abord, c’est que « les échelons inférieurs fassent chacun des plus hauts dirigeants de la République Populaire, bien leur travail » ! les neufs membres du Comité Central. Le magazine Zhongguo Xinwen Les six premiers jours, 30 000 messaZhoukan (中国新闻周刊 Hebdoges ont déjà été envoyés au président madaire chinois d’actualités) se perHu Jintao, et 20 000 au premier mimet d’être direct : en Chine, il n’exisnistre Wen Jiabao. L’initiative est-elle terait aujourd’hui aucun moyen d’être un signe d’ouverture ou au contraire écouté pour un citoyen de base. Le l’ajout d’une nouvelle rustine à un nouveau site risque même d’exacerber système de soupape pour tenter de les tensions, peut-on lire entre les lineutraliser les toujours plus fortes gnes, car il est clair que « les dirigeants Direct Zhongnanhai 直通中南海 aspirations politiques des citoyens n’auront pas le temps de le lire », mais chinois ? La presse en tout cas n’hésite plus aujourd’hui à qu’en même temps, « ne pas écouter ces voix » serait un exprimer ses doutes : le système de l’autocensure est en train « échec politique ». C’est encore en deçà de ce que pense la de se fissurer, et les intellectuels interpellent directement le rédaction, comme le montre le blog du rédacteur en chef pouvoir pour demander une réforme du régime. adjoint du même hebdomadaire, qui n’hésite pas à titrer : Direct Zhongnanhai critiqué ouvertement « Direct Zhongnanhai ? Quelle plaisanterie ! » (直通中南 dès sa sortie 海?笑话!). Son billet est repris des dizaines de fois, et Ce nouveau site, géré par l’organe de propagande du n’a pas été censuré. Parti, le Quotidien du Peuple, est fraîchement accueilli par Prudemment, certains journalistes se retranchent derrière la presse chinoise. les avis des internautes ou de personnalités externes pour Le phrasé reste encore diplomatique, mais l’agacement relayer les critiques. La revue Kan Tianxia (看天下 Regard pointe. L’hebdomadaire des intellectuels, le Nanfang Zhou- sur le monde) publie ainsi une interview avec Rita Fan, mo (南方周末), fait ainsi remarquer qu’il faudrait au pré- présidente du Conseil Législatif de Hong-Kong et députée sident chinois 40 heures pour pouvoir passer 5 secondes à l’Assemblée Nationale Populaire. Celle que ses détracsur chacun des messages qui lui ont été envoyés la première teurs avaient surnommée « le caméléon » en raison de son semaine, et doute que le nouveau site puisse réussir à devenir ralliement à Pékin après avoir travaillé pour les Britanniun véritable outil institutionnel. Shi Zhao, du Xin Jing Bao ques accuse les hauts fonctionnaires chinois d’être avant tout (新京报 Nouvelles de Pékin), affirme qu’on peut certes se préoccupés par la face, se comportant parfois comme des réjouir du symbole du progrès de la société que représente « ingénieurs en superficialité » (形象工程) et se fait l’avo« Direct Zhongnanhai », car la communication est « le droit cate d’une démocratisation interne du Parti. Les intellectuels le plus fondamental ». Mais il ajoute qu’on ne peut espérer chinois n’ont plus peur de la démocratie.

•••

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头条新闻 A la une des médias

••• La presse propose d’avancer

sur la démocratisation Suite à l’échec du mouvement étudiant de 1989 et à l’effondrement de l’Union Soviétique, un consensus parfois sincère quoique pesamment soutenu par la propagande s’était formé parmi les élites chinoises : le problème le plus important de la Chine n’était pas la politique mais l’économie. Cette idée reçue commence aujourd’hui à être contestée. Shi Zhao l’affirme dans son éditorial : le plus grand problème « n’est pas l’écart entre les pauvres et les riches » mais « l’impossibilité de se comprendre ». Et comment peuton se comprendre si on ne laisse pas le peuple s’exprimer politiquement ? Pas uniquement en lui permettant de laisser des messages à ses dirigeants, mais en lui donnant un rôle à sa mesure. C’est ce que ne craint pas de préconiser le magazine Caijing (财经 Finances) dans un article quasi révolutionnaire de son édition du 13 septembre intitulé « Il faut faire de l’Assemblée Populaire le point nodal de la réforme des structures politiques » (以人大为枢纽推进政治体制改 革). Pour son auteur, « la démocratisation de la société, la démocratisation interne du Parti et la réforme du système administratif sont liées ». Comme l’histoire l’a montré, la démocratisation permet d’améliorer le fonctionnement de l’Etat. Les trente années de réforme ont permis l’éclosion d’assez de citoyens éduqués pour qu’ils puissent siéger dans

une assemblée nationale qui aurait un véritable pouvoir. Il n’hésite pas d’affirmer que cela serait « un moyen pour avoir des alternances de pouvoir relativement stables et pour résoudre de manière efficace les problèmes politiques légitimes ». Profitant de la visite du président Hu Jintao dans la zone économique spéciale de Shenzhen le 6 septembre, le Quotidien du Sud (南方日报) a quant à lui proposé que les fameuses Zones Economiques Spéciales, qui avaient été instaurées sous Deng Xiaoping pour faire les expérimentations d’économie libéralisée qui ont ensuite été étendues à toute la Chine, soient également des laboratoires de la réforme des structures politiques du pays. A deux ans de sa retraite, l’équipe au pouvoir commence à tirer son bilan. Le premier ministre Wen Jiabao, autrefois l’espoir des démocrates, a beaucoup déçu les intellectuels. C’est dans ce contexte qu’il a commencé à multiplier les déclarations sur la nécessité de la réforme politique depuis le mois d’août. Pour presque tout le monde aujourd’hui en Chine, la démocratie apparaît pour le meilleur ou pour le pire comme inéluctable. La seule question est de savoir quand. En 2012, les épaules des nouveaux dirigeants leur sembleront sans doute bien lourdes. »

http://cpc.people.com.cn/GB/191862/191865/index.html

La résurgence du quatrième pouvoir Ces six derniers mois, aiguillonnés par le bouillonnement d’idées et de revendications sur Internet (voir Connexions n°53), les éditorialistes de la presse écrite sont de plus en plus souvent audacieux, certains n’hésitant pas à défier le pouvoir. Le premier mars 2010, une semaine avant l’ouverture de la session du Congrès National Populaire, treize quotidiens avaient publié un texte commun demandant une réforme du système du permis de résidence (户口hùkǒu). Cet acte était révolutionnaire : pour la première fois dans l’histoire de la Chine Populaire, un groupe d’individus ne se réclamant ni du Parti ni de l’Etat suscitait un débat public sur une question politique dans les medias. L’affaire avait été bien préparée, franchissant sciemment la ligne rouge tout en choisissant un sujet de réflexion

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relativement acceptable pour le pouvoir, afin de limiter les représailles. Zhang Hong, qui en était à l’origine, fut le seul à en payer le prix, et fut démis de ses fonctions de rédacteur en chef adjoint du site internet de « L’observateur économique » (经济观察报jīngjìguānchá bào). Il aurait cependant très bien pu être arrêté. En 2004, un an après son entrée en fonction, le président Hu Jintao avait fait condamner quelques journalistes à de longues peines de prison pour stopper net un vent de liberté qui soufflait alors dans la presse. Mais depuis, le nombre d’internautes en Chine a quadruplé pour dépasser 420 millions, et ce phénomène a donné de la force à l’opinion publique, qui arrive de plus en plus souvent à faire battre les autorités en retraite (voir par exemple l’affaire Deng Yujiao, in Connexions n°50).



数字背后 Le dessous des chiffres

Par Yann Marin *

Les produits chinois se vendent de plus en plus en yuan Au 1er semestre 2010, le volume du commerce exté- ques étrangères et des entreprises chinoises sont longues et rieur libellé en yuan a atteint 10,3 milliards de dollars. maintiennent un faible nombre d’acteurs pour le système. En d’autres termes, des entreprises étrangères, situées Au 2e semestre 2009, sur les six premiers mois d’expépar exemple en Malaisie, ont accepté d’être payées en rimentation, seuls 527 millions de dollars d’opérations yuan pour les produits qu’elles vendaient à leur parte- commerciales ont été libellées en yuan. Un semi-échec naire chinois. Elles ont pu ensuite utiliser ces yuans pour pour la banque centrale. Il lui faut réagir : elle lève certains payer des marchandises acquises auprès de fournisseurs obstacles et accélère les autorisations. Le volume des tranchinois. sactions en yuan s’affiche alors en hausse de 1860% d’un La monnaie chinoise est-elle encore « non-convertible » ? semestre à l’autre ! De 0,527 à 10,33 milliards de dolLe terme est impropre en réalité, le yuan est devenu par- lars. tiellement convertible dès la fin des années 70. Mais l’esForte de ce résultat, la banque centrale annonce le 22 juin l’extension géographique du programme. Ce sont désentiel est resté contrôlé : les mouvements de capitaux sont strictement surveillés, les investissements sormais les entreprises de 20 provinces ou financiers très limités et la circulation du régions chinoises qui pourront proposer à yuan hors des frontières quasi inexistante. leurs clients ou fournisseurs d’abandonner « La pleine Du moins jusqu’à la crise financière. le dollar au profit du yuan. Ces provinces Au milieu de la tourmente, alors que convertibilité représentent 95% du commerce extérieur la confiance dans la monnaie américaine de la Chine. Mais il faut aller encore plus du yuan n’a s’affaisse, les autorités chinoises décident loin et favoriser la détention de yuan à d’avancer résolument sur la voie de l’in- jamais été l’étranger. La banque centrale ouvre les ternationalisation du yuan. Pour redonner vannes en autorisant les banques étrangèaussi proche. » confiance aux marchés. Pour réduire le risres à investir ces montants sur le marché que de change. Pour favoriser le commerce obligataire chinois (16 août) et autorise quand le protectionnisme menace. Le discertaines opérations en capital dans la récours est modeste, mais l’ambition bien plus grande. gion de Shanghai (20 août). Et surtout Hong Kong, qui A l’été 2009, le gouvernement chinois met en place « un représente 75% de ce commerce en yuan, peut désormais programme pilote », une expérience limitée, pour permet- offrir des services financiers en yuan presque sans restrictre aux entreprises de cinq villes (Shanghai, Canton, Shen- tion (19 juillet). zhen, Dongguan et Zhuhai) de payer et d’être payées en La réussite n’est pas encore complète : les autres pays yuan pour leurs opérations de commerce extérieur avec sont ne sont pas encore prêts pour ce type de transactions, leurs clients et fournisseurs des pays de l’ASEAN, auxquels tandis que les volumes, bien qu’en forte croissance, restent s’ajoutent Hong Kong et Macao. Les banques le souhai- faibles au regard du commerce chinois : à peine 0,76% tant sont invitées à se faire enregistrer pour pouvoir pro- du total. poser des comptes en yuan à leurs clients. Les premières La pleine convertibilité du yuan n’a jamais été ausopérations sont annoncées en grand pompe. si proche, mais de nombreuses étapes restent encore Les débuts sont pourtant très timides. Le gouvernement à franchir. s’est montré prudent et a mis de nombreuses barrières administratives. Les procédures d’accréditation des ban- * Conseiller financier, adjoint au Chef de la Mission économique

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人力资源发展趋势 Les tendances RH

Par Jean Van Wetter*

Employer une personne en situation de handicap en Chine La capacité de générer un revenu pour vivre et être autonome est probablement un des facteurs les plus importants dans le processus d’acceptation du handicap et d’insertion sociale. Dans la plupart des pays, l’accès à l’emploi des personnes handicapées reste néanmoins difficile. Aux problèmes de discrimination et préjugés s’ajoutent les difficultés d’accès à l’éducation et à la formation professionnelle, ainsi que les problèmes d’accessibilité de la plupart des environnements de travail. Ainsi, d’après l’Organisation Internationale du Travail, 82% des personnes en situation de handicap dans le monde vivent sous le seuil de pauvreté. La Chine compte plus de 83 millions de personnes en situation de handicap et le revenu moyen par personne handicapée est actuellement inférieur à la moitié du revenu moyen par habitant. La Fédération Chinoise des Personnes Handicapées (CDPF), un organisme parastatal en charge de toutes les questions liées au handicap en Chine, est bien consciente des enjeux et a mis en place une série de mesures visant à améliorer l’accès à l’emploi : • Système de quotas dans les entreprises : chaque entreprise doit employer un pourcentage minimum de personnes handicapées, sous peine d’amende à verser à un fonds pour la protection de l’emploi des personnes handicapées (Employment Security Fund). Le pourcentage minimum est actuellement fixé à 1,5% de l’effectif total des employés. • Mise en place d’«ateliers protégés» (dans la même logique que ce qui a été fait en France) • Mise en place de services d’aide à l’emploi (Employment Services Centers), via le réseau de la CDPF. • Promotion de l’entreprenariat, via formations adaptées et micro crédit.

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Le système de quota concerne la plupart des entreprises françaises en Chine. La règle de calcul de l’amende à payer par les entreprises en cas de non respect du quota est la suivante : [(nombre d’employés dans l’entreprise x 1.5%) - nombre de personnes handicapées employées] x salaire moyen de la ville C’est le Bureau Fiscal qui est en charge de collecter cet argent. Les entreprises qui respectent le quota bénéficient en revanche de subsides (3 000 Rmb par an par employé handicapé sous contrat à durée déterminée et 5 000 Rmb par an par employé handicapé sous contrat à durée indéterminée). Si l’introduction du système de quota a permis à la CDPF de générer des revenus supplémentaires qui ont été réinvestis dans la mise en place de centres de formation professionnelle, de nombreux problèmes subsistent. Les canaux traditionnels de recrutement ne sont pas adaptés et les personnes handicapées ne sont pas encouragées à rechercher de l’emploi via ces canaux. Les employeurs désirant recruter des personnes handicapées doivent donc passer par les services d’aide à l’emploi spécialisés des fédérations locales de personnes handicapées. Ces services ne sont pas encore suffisamment développés et connus des entreprises.

* Directeur de Handicap International China Liens utiles : Fédération Chinoise des Personnes Handicapées (CDPF) : www.cdpf.org.cn Disability China : portail d’information sur le handicap en Chine mis en place par Handicap International : www.disabilitychina.org



法制天地 L’état des lois

Par Alban Renaud*

Nouvelles mesures pour l’administration du commerce des produits et services sur Internet

Chasser le contrefacteur sur Internet, c’est comme jouer à la bataille navale contre un adversaire qui déplacerait constamment la position de ses bateaux. Comment lutter contre un adversaire invisible et mobile ? Et pourtant, on y arrive. Il faut savoir “chater” avec le vendeur de contrefaçons et lui inspirer confiance, jusqu’au point où on lui proposera une rencontre. Une fois le contact établi, on organisera la filature. Elle conduira, avec un peu de chance, vers un entrepôt. Il faudra, ensuite, convaincre la Police et l’Administration de l’Industrie et du Commerce (l’AIC) de mener conjointement le raid et de saisir, non seulement le stock, mais surtout l’historique des activités commerciales passées. Ces preuves existent pourtant chez l’opérateur de la plateforme commerciale (par exemple Tao Bao), mais seule la Police a le pouvoir de les réclamer, d’où la nécessité de l’impliquer dès l’origine. Ce travail long et onéreux donne parfois des résultats satisfaisants (prison ferme). La principale difficulté réside donc dans le fait de parvenir à convaincre la Police d’agir. Or, tout récemment, l’Administration de l’Industrie et du Commerce de la République populaire de Chine (la SAIC) a publié des Mesures pour l’Administration du Commerce des Produits et Services sur Internet, datées du 31 mai 2010 et entrées en vigueur le 1er juillet 2010, qui ouvrent des horizons intéressants. Le texte propose, entre autres, des mesures sur certains points essentiels : le contrôle de l’identité des vendeurs, la responsabilité des fournisseurs d’accès et opérateurs de plateformes commerciales, les pouvoirs de contrôle et de répression de l’administration. Les opérateurs de plateformes commerciales doivent à présent vérifier l’identité des vendeurs, la rendre accessible

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à tous, surveiller leurs activités, en conserver la trace pendant deux ans et établir des barèmes de qualité permettant au consommateur de savoir à qui il a à faire. L’Administration se voit dotée d’un pouvoir de supervision et de surveillance très général qui lui permet d’accéder aux informations concernant l’activité des vendeurs, un pouvoir qui, jusqu’alors, était réservé à la seule Police. En revanche, l’AIC n’a pas le pouvoir de bloquer ou de fermer un site elle-même, elle ne peut que transmettre une requête à cette fin à l’administration compétente en matière de communications. Des amendes financières (de 5.000 à 10.000 Rmb) sont prévues, notamment pour obliger les opérateurs à conserver la trace de l’activité commerciale effectuée sur leurs sites. Une nouveauté intéressante : le titulaire du droit de propriété intellectuelle contrefait peut adresser une notification à l’opérateur de la plateforme, ce dernier devenant alors susceptible d’avoir à réparer, conjointement et solidairement avec le vendeur, le préjudice subi à compter de la date de la notification. En principe, il faut d’abord s’adresser à l’AIC du lieu où se trouve le siège de l’opérateur de la plateforme, avant que celle-ci ne transfère le dossier à l’AIC du lieu où est domicilié le vendeur de contrefaçons. L’AIC a cependant proposé de mettre en place un service à compétence nationale pour agir sur Internet. Ces nouveaux pouvoirs de l’AIC s’inscrivent, c’est évident, dans une politique générale de prise de contrôle d’Internet. Pour une fois, on ne s’en plaindra pas !

* Alban Renaud, Avocat associé, Adamas Chine.


La référence en Chine pour apprendre le français 在 中 国传播法语的榜样

15 Alliances Françaises, 25 000 étudiants par an, 2 800 000 heures de cours par an 15所法语联盟,每年向2万5千 名学生教授280万小时的课程 Les meilleurs résultats aux tests de langue française 抢占法语水平考试榜首 La porte d’entrée pour les universités francophones 法语留学语言水平通行证 Une programmation culturelle haute en couleurs 全年不间断多彩的文化活动 275 professeurs, 17 500 m2 de surface d’enseignement, 45 000 documents disponibles sur 1800 m2 de médiathèques, 325 manifestations culturelles par an et 40 000 spectateurs 275名教师,17500 平方米的教学场所, 1800平方米的多媒体图书馆收藏了近45000册 资料,每年325场文化活动和40 000多名观众

www.afchine.org


Du côté des PME chinoises, la frilosité reste de mise à l’égard d’Alternext.

© Imagine china

商务简讯 l’actualité / business chine

中国中小企业对欧交所创业板Alternext仍显得谨小慎微。

Les marchés boursiers français ouverts aux Chinois Des entrepreneurs de l’empire du Milieu s’initient – timidement - à Alternext Le 17 mai 2005, tout a changé pour les PME internationales qui, sur la place de Paris, voulaient disposer d’un accès rapide et aisé aux marchés des capitaux. Depuis cinq ans, en effet, avec des conditions d’admission et des règles de négociation simplifiées, NYSE Alternext offre, aux PME de toutes origines, la possibilité de lever plus facilement des fonds. Les quelques règles édictées par Alternext imposent, entre autres, la transparence financière pour les investisseurs, un historique de deux ans des comptes de l’entreprise, un accompagnement de l’entreprise tout au long de son parcours boursier par un spécialiste (appelé le listing sponsor)… Quant à la cotation des PME sur Alternext, elle s’établit après un placement privé ou public de minimum 2,5 millions d’euros. Pour le cinquième anniversaire du lancement de NYSE Alternext, ses responsables ont dressé un 1er bilan. Un bilan jugé positif puisque depuis 2005, quelque 133 sociétés ont pris le chemin d’Alternext, affichant une capitalisation boursière totale de quelque 4,4 milliards d’euros (en mai 2010). Quant au CA moyen des sociétés cotées en 2009, il 26 Connexions / octore 2010

était de 39 millions d’euros. Un bilan qui se veut encourageant, même si du côté des PME chinoises, la frilosité est restée de mise à l’égard d’Alternext. Il aura fallu, en effet, attendre le printemps 2008 pour que la première PME chinoise franchisse le pas. Originaire de la province du Shandong, China Corn Oil, optait pour une introduction sur Alternext, rejoignant six autres entreprises originaires de pays extérieurs à la zone Euronext. Ouvrir la voie En 2008, China Corn Oil tentait donc « l’aventure » Alternext, suivie, dans les mois qui ont suivi, par quatre autres PME chinoises. China Corn Oil, gros producteur et exportateur d’huile de maïs alimentaire, a levé directement 5 millions d’euros par placement privé, étant ainsi directement admis sur Alternext. « Notre objectif aujourd’hui est de doubler notre capacité de production et de répondre à la très forte demande du marché domestique », déclarait alors Wang Mingxin, directeur général de China Corn Oil. Son enthousiasme s’est cependant vite érodé, changement stratégique oblige. Fin

2009, la première PME chinoise sur Alternext tirait sa révérence à Paris et optait pour Hong Kong. Après réflexion, le patron de China Corn Oil a voulu se recentrer sur la seule Chine continentale. « Il ne s’agit pas d’un échec insiste Christine Lambert-Goué, directeur d’Invest Securities China - Il y a deux ans, les dirigeants de China Corn Oil décidaient de diversifier leurs activités par des acquisitions en Europe, ce qui impliquait une cotation sur Alternext pour gagner en visibilité et crédibilité. Un an après, ils choisissaient de se replier sur la Chine continentale. Le retrait de la cotation de leur entreprise sur Alternext s’imposait, comme s’impose une cotation à Hong Kong. ». Une grande diversité d’activités Basée à Shanghai, la société de promotion immobilière Huacheng Real Estate SA compte plus de 260 salariés. Elle a intégré le top 100 des plus importantes sociétés chinoises de promotion immobilière. Son fondateur Hang Feilong cible le top 50, « boosté » par son introduction en bourse sur NYSE Alternext en 2008 (classement


网络简讯 Invest Securities). Huacheng vise le secteur porteur du moyen de gamme et des commerces de pied d’immeuble. Son succès se développe dans la plus grande discrétion ! Fondée en 2006 à Dongying au Shandong, CNPV Solar Power SA, pilotée par Zhang Shunfu, développe des produits solaires photovoltaïques. Cotée sur Alternext depuis le 14 août 2008, elle a signé des accords de partenariat avec des entreprises européennes dont Willis, courtier allemand qui assure les opérateurs contre un défaut de performance des modules photovoltaïques vendus par l’entreprise chinoise. Le tandem CNPV – Willis offre une puissance garantie assurée pendant 25 ans. CNPV, dont le listing sponsor est Invest Securities, a obtenu une homologation pour le marché solaire britannique et signé, en Europe et en Australie, divers contrats de ventes à long terme. Malheureusement, comme d’autres, CNPV oublie souvent de rassurer ses actionnaires sur sa stratégie. Une transparence qui se révèlera avec le temps, sans doute. A Shenzhou au Zhejiang, Toolux Sanding s’est spécialisé dans la conception, la fabrication et la commercialisation d’outillages en métal et en plastique. Son PDG Xu Xueming joue la diversification sans imposer sa marque : 13% du CA de l’entreprise figure sous la marque Toolux, le reste étant commercialisé sous marques tierces. Fin 2008, Toolux Sanding choisissait Allegra Finance comme listing sponsor et fin 2009 affichait une capitalisation boursière de 22 millions d’euros. Enfin, Great Leisure Group SA, fondée en mars 2000 à Ningbo et présidée par Wang Huajun, conçoit, fabrique et commercialise du mobilier d’extérieur Elle a rejoint l’IPO China Club, un site créé par Allegra Finance pour centraliser les informations disponibles sur les valeurs chinoises cotées à Paris. Une manière de mieux épauler les investisseurs chinois ! Il est évident que les gros entrepreneurs chinois qui se sont frottés à l’international se montrent moins frileux que les responsables de petites sociétés. Reste que les patrons chinois avancent, observent et apprennent rapidement. Le choc des cultures entre entreprises chinoises et occidentales existe toujours, mais ne persistera pas. Chr ist i n e SIMON

Luxe en Chine : « Internet est un accélérateur de business » La Chine est devenue le second plus

partager les profits et unifier l’image de

grand marché du luxe au monde, de-

marque conduit aussi les grandes ensei-

vant les Etats-Unis.

gnes à ouvrir leurs propres boutiques

En 2009, les consommateurs chinois

sur Internet.

ont dépensé 9,4 milliards de dollars en

Dans le contexte de forte concurrence

articles de luxe. Soit une croissance de

que se livrent actuellement les marques

30% alors que l’Europe, le Japon et les

de luxe en Chine, Internet présente

Etats-Unis enregistraient dans le même

d’ailleurs un autre avantage : celui de

temps une baisse de leurs ventes.

la vitesse !

Selon le Boston Consulting, d’ici 2015,

Avec plus de 420 millions de consom-

29% de la consommation mondiale

mateurs en ligne, le Web permet en ef-

de produits de luxe se fera en Chine.

fet de couvrir le marché en des temps

A ce stade, le marché aura atteint 14

records.

milliards de dollars et la Chine sera le

L’étude « China Luxury Forecast 2010

plus grand marché du luxe au monde.

» réalisée par Ruder Finn et Albatross

Afin d’améliorer leurs marges, de nom-

Global Solutions auprès de consom-

breuses sociétés de luxe réorientent leur

mateurs fortunés confirme l’incroya-

stratégie vers la vente directe. Consé-

ble potentiel de ce nouveau canal de

quence, les sociétés du secteur rachètent

vente : 50% des répondants souhaitent

à leurs partenaires locaux le contrôle de

pouvoir acheter des produits de luxe

leurs opérations en Chine.

sur Internet. Par ailleurs, 70% des per-

Dès 2008, Coach a ainsi racheté à

sonnes interrogées considèrent qu’In-

son distributeur chinois ses activités

ternet est le meilleur canal d’informa-

de ventes au détail. La même année,

tion pour comprendre les marques et

Montblanc et Chloe, deux filiales du

les produits de luxe.

groupe suisse Richemont, ont retiré à

Il est enfin intéressant de noter que

leur partenaire local la licence de repré-

parmi les 15 marques de luxe les plus

sentation de leurs produits en Chine.

populaires en Chine, Hong-Kong et

Cette année, c’est Burberry qui rache-

Taiwan…14 sont européennes !

tait pour plus de 100 millions de dol-

lars l’ensemble de ses franchises chinoi-

Pat r ice Nor de y

ses, soit 50 points de ventes.

M a nagi ng Dir ec tor (A si a)

Internet devient stratégique

L’At el i er BN P Pa r iba s

Passer à la vente directe pour éviter de L’Atelier BNP Paribas est le centre de veille technologique de BNP Paribas. Depuis son bureau de Shanghai, L’Atelier BNP Paribas conseille les entreprises qui développent une stratégie digitale en Chine. L’Atelier est aussi présent à San Francisco et Paris.

www.asie.atelier.fr octobre 2010 / Connexions 27


公司简讯 l’actualité / entreprises L’AFD et la gestion durable de la forêt en Chine

Dans le cadre de la mise en œuvre de son 1er projet Forêt en Chine, l’Agence Française de Développement (AFD) a invité M. Makon, ancien Ministre du Cameroun et Facilitateur adjoint du Partenariat pour la Forêt du Bassin du Congo (PFBC), ainsi que plusieurs experts français, à participer à un Symposium International sur « la Forêt, le Carbone et l’Eau en réponse au changement climatique » et à un atelier franco-chinois organisé par l’AFD sur le thème de la gestion durable de la forêt (du 15 au 18 juin 2010 dans la province chinoise du Yunnan). Ces rencontres ont rassemblé près de 150 représentants forestiers chinois autour de l’Administration nationale chinoise des Forêts et des partenaires de cette opération. Une importante délégation d’experts français a saisi cette occasion pour mettre en valeur le savoir-faire français, participer au débat d’idées sur les politiques forestières chinoises et leur adaptation au changement climatique et pour échanger sur les attentes de la Chine en matière d’assistance technique forestière internationale. Des coopérations trilatérales concrètes France-Chine-Afrique ont été évoquées.

DS Avocats partenaire de l’Expo

DS Avocats est partenaire du Pavillon de la Région Rhône-Alpes à l’Exposition Universelle de Shanghai 2010. La Région Rhône-Alpes a construit un pavillon de plus de 3000 m² situé dans « l’espace des bonnes pratiques urbaines », celui-ci constituera une vitrine mondiale pour les savoir-faire et l’innovation des entreprises rhône-alpines en matière d’écoconstruction et d’éclairage urbain. Implanté de longue date à Lyon et à Shanghai notamment, DS Avocats s’est imposé comme le partenaire naturel d’une telle organisation. Les équipes de DS Avocats en Chine et à Lyon ont ainsi accompagné la région Rhône-Alpes dans la négociation de ses deux contrats de participation pour le Pavillon et le projet

28 Connexions / octobre 2010

Gorgy Timing lauréat du prix PME Chine catégorie International Le prix CCI International Chine 2010 a été décerné à Gorgy Timing (www.gorgy-timing.fr), PME familiale iséroise de 45 salariés réalisant un chiffre d’affaires de 4,8 millions d’euros, leader européen pour les équipements horaires et de synchronisation de haute précision. Le prix a été remis par la Présidente de la CCI française en Chine, Annick de Kermadec Bentzmann, en partenariat avec Total et Air France à l’occasion de Planète PME, le 15 juin 2010 au Palais des Congrès de Paris. Créée en 1974, par Maurice Gorgy, Gorgy Timing SAS fournit ses systèmes dans le domaine des transports depuis 1983. L’entreprise réalise 50% de son activité à l’international. Afin de profiter des programmes chinois d’infrastructures tout en répondant à une attente forte de production locale de la part des donneurs

Lumière, la création de ses deux structures juridiques créées dans le cadre de l’exposition universelle et pour la négociation et la rédaction des contrats commerciaux. DS Avocats assistera également la Région tout au long de la manifestation. DS souhaite inscrire ce partenariat dans la relation historique établie entre la région Rhône-Alpes et la municipalité de Shanghai.

Gide Loyrette Nouel conseille PSA Peugeot Citroën pour la création d’une JV avec Chang’an

Gide Loyrette Nouel a conseillé le groupe PSA Peugot Citroën pour la création d’une joint-venture avec Chang’an Automotive, l’un des plus importants constructeurs automobiles chinois. L’entreprise sera détenue à parts égales par les deux groupes, qui y investiront initialement 935 millions d’euros, et sera basée à Shenzhen, dans la province du Guan-

d’ordres publics chinois, Gorgy Timing a engagé une approche en plusieurs étapes avec le conseil opérationnel de Grex, le centre de commerce international de la CCI de Grenoble. L’entreprise a créé en 2008 une JV de commercialisation conjointe avec une des principales sociétés d’Etat chinoises de son secteur d’activité, Polaris, une production locale devant ensuite progressivement permettre des gains de compétitivité sur une partie de sa gamme et une intégration dans les offres des bureaux d’études et ingénieries chinois. Gorgy Timing profite de l’expérience cumulée des PME françaises membres de la CCIFC, des réseaux d’appui et de conseil français, enfin d’un partenariat gagnant-gagnant avec une société chinoise. Ces points d’appui, couplés à une démarche de protection de marque et de technologie, sécurisent la

gdong. Sa capacité annuelle de production sera au départ de 200 000 véhicules et moteurs. Le contrat prévoit la commercialisation en Chine de véhicules légers et de particuliers, notamment la série DS sous la marque Citroën, et le lancement d’une nouvelle marque spécifique. La commercialisation de véhicules sous les autres marques des deux partenaires, Peugeot et Chang’an, est également envisagée. Le lancement du premier véhicule est prévu pour le second semestre 2012. L’équipe Gide Loyrette Nouel était dirigée par Guillaume Rougier-Brierre. Le cabinet d’affaire international Gide Loyrette Nouel est présent en Chine depuis plus de vingt ans. Son activité se déploie à partir de ses bureaux de Pékin, Shanghai et Hong Kong, réunissant près de 120 personnes, dont plus de 50 avocats et juristes occidentaux et chinois. http://www.gide.com


© DR

Gorgy Timing荣获中国法国工商会 国际中小企业奖

Remise du prix à Gorgy Timing par la Présidente de la CCIFC, Annick de Kermadec Bentzmann. 中国法国工商会会长甘安懿女士向Gorgy Timing颁奖

2010年国际工商会中国奖颁给了Gorgy

Gorgy  Timing与格勒诺布尔工商会国

Timing(www.gorgy-timing.fr)——

际 贸 易 中 心 ( Grex) 顾 问 委 员 会 采

法国伊泽尔省的家族式中小企业。

取了分步走的策略。2008年,Gorgy

Gorgy Timing拥有45名员工,实现营业

Timing与中国钟表行业的重要国有企

额480万欧元,是欧洲钟表和高精度时

业北极星集团成立了销售合资公司,

间同步设备的领军企业。2010年6月

北极星集团将逐步使自己的一部分产

15日,在巴黎国会大厦的中小企业沙

品赢得竞争力,并参与国内工程设计

龙上,中国法国工商会会长甘安懿女

研究院的招标活动。Gorgy  Timing利

士颁发了由道达尔和法航赞助的该奖

用中国法国工商会法国中小企业会员

项。

积累的经验及法国支持和咨询网络,

Gorgy Timing成立于1974年,由Maurice

最终从与一家中国公司的双赢合作中

Gorgy先生创建。公司自1983年以来为

受益。这些支持要素,加上品牌和技

交通运输领域提供计时系统,50%的

术的保护手段,保证了企业活动的安

démarche de l’entreprise et permettent à une PME de moins de 50 employés de résister à la crise et de profiter de la croissance chinoise.

营业额来自于海外。为了利用中国基

全,使这家不到50名员工的中小企业

础设施的发展规划,同时满足中国公

能够抵御经济危机,并从中国的经济

共建设部门强烈的本地生产愿望,

增长中受益。

法国开发署与中国林业可持续管理

世博会合作伙伴德尚律师事务所

立的历史关系中。

为了实施与中国的第一个林业项目,

德尚律师事务所是2010上海世博会

基德律师事务所为标致雪铁龙集团与

法国开发署邀请喀麦隆前林业部长

罗纳-阿尔卑斯大区馆的合作伙伴。

长安汽车成立合资公司提供咨询

兼刚果盆地林业合作项目副协调员

罗纳-阿尔卑斯大区在“城市最佳实

基德律师事务所为标致雪铁龙集团与

Makon先生和多位法国专家参加了“应

践区”建起了一座3000多平米的展

中国最主要的汽车制造商之一长安汽

对气候变化之森林、碳和水资源”国

馆,该馆是展示罗阿大区企业在生态

车成立合资公司提供咨询。合资企业

际座谈会以及由法国开发署组织的以

建筑和城市照明领域专长与创新的

将由两大集团各持股50%,初期投资

林业可持续管理为主题的中法工作组

世界窗口。

额9.35亿欧元,设在广东省深圳市。

会议(2010年6月15日至18日在云南

德尚律师事务所很早就在里昂和上海

其年生产能力最初将为20万辆汽车和

省)。这些会议聚集了近150位来自

建立了代表处,自然就成为这一活动

20万台发动机。合同规定在中国投放

中国国家林业局和这个项目的合作伙

的合作伙伴。德尚在中国和里昂的团

轻型汽车和个性化汽车,尤其是雪铁

伴。一支重要的法国专家团抓住此次

队全程协助罗阿大区谈判展馆和照明

龙DS系列,并推出合资企业的特有

机会,以展示法国在这一领域的专

项目的合同,为其成立世博会的两个

品牌。根据合同计划,合资企业还可

长,并参加了中国林业政策及应对气

法律机构负责谈判和起草商业合同。

用合作双方的其他品牌:标致品牌及

候变化的意见讨论,就中国在国际林

德尚还将在整个世博会期间协助罗阿

长安品牌销售其他车型。首款汽车预

业技术协助方面的期望交流看法。会

大区,希望把这种合作关系纳入到罗

计将在2012年第二季度投产。为合资

上还提及了法中非三方具体合作事宜。

纳-阿尔卑斯大区与上海市政府业已建

事宜提供咨询的基德顾问团队由胡杰

octobre 2010 / Connexions 29


公司简讯 l’actualité / entreprises L’antenne de Pékin de la CCIFC a déménagé au Lufthansa Center

中国法国工商会北京办

Installée depuis 2003 au Novotel Xinqiao, l’antenne de Pékin de la CCIFC a déménagé depuis le 13 septembre 2010 dans ses nouveaux locaux du Lufthansa Office Builing. C’est dans un souci d’être plus proche de ses membres et de leur permettre un meilleur accès aux différents services de la Chambre que Jacques Leclerc du Sablon, directeur général de la CCIFC, a décidé de ce déménagement. La CCIFC Pékin est désormais voisine de la future Ambassade de France qui ouvrira en 2011 et des autres CCI étrangères installées dans le quartier. La direction générale ainsi que l’équipe de l’antenne de Pékin sont installés dans des bureaux au 7ème étage tandis que les 10 bureaux de domiciliation ainsi que la salle de conférence sont situés au 5ème étage. Nous espérons vous accueillir très prochainement dans nos nouveaux locaux lors de nos événements !

从2003年起在新侨诺富特饭店安家 的中国法国工商会 北 京办公室,自 2010年9月13日迁至燕莎中心写字楼新 址。 考虑到更加接近会员企业并使他们 更便利地获得商会的各项服务,中国 法国工商会总经理杨磊先生决定搬 家。中国法国工商会北京办公室将与 2011年开放的法国大使馆新馆以及在 这个地 段办公的其他外国工商会为 邻。中国法国工商会总经理及北京办 公室工作人员在7层办公,10间企业临 时安置办公室和会议室则在5层。我们 希望很快在新办公地举办的活动中见 到你们! 中国法国工商会北京办公室 经理:安兰 地址: 北京市朝阳区亮马桥路50号北 京燕莎中心写字楼C712室 电话:+86 (10) 6461 0260 传真:+86 (10) 6461 2990 电邮:ccifc-beijing@ccifc.org www.ccifc.org

Troisième édition de « la Caravane de la Sécurité Routière PSA Peugeot Citroën » en Chine

Le 22 juin 2010, Philippe Varin, président de PSA Peugeot Citroën a lancé la 3e édition de la « Caravane de la Sécurité Routière » à l’école maternelle de Yizhuang à Beijing. Cette formation à la sécurité routière, destinée aux enfants de 4 à 5 ans, a été cette année enrichie d’un « Atelier Multimédia » et d’un « Atelier Parents ». La 1ère édition de « la Caravane de la Sécurité Routière PSA Peugeot Citroën » a vu le jour en 2008. En deux ans, la Caravane a été à la rencontre des enfants dans 66 écoles maternelles de 11 villes de Chine. Le groupe a offert aux écoles maternelles 60 000 manuels pour sensibiliser les enfants à la sécurité routière. Partenaire historique du développement durable de

30 Connexions / octobre 2010

© Philippe Bourgeois

公室迁到燕莎中心了

Les nouveaux bureaux de l’antenne de Pékin de la CCIFC 中国法国工商会北京新办公室

Antenne de Pékin de la CCIFC Directrice : Nathalie Aniel Adresse : Office Unit C 712, 7th Floor, Office Building Lufthansa Center, No. 50 Liangmaqiao Road, Chaoyang District, Beijing, 100125 P.R.C. Tel : +86 (10) 6461 0260 Fax : +86 (10) 6461 2990 Email : ccifc-beijing@ccifc.org www.ccifc.org

l’industrie automobile en Chine, PSA Peugeot Citroën s’est engagé activement, dès 2004, dans la promotion de la sécurité routière en Chine. La démarche originale du Groupe dans ce domaine a été couronnée par une série de trophées dont le prix de la « Meilleure Entreprise Citoyenne » du journal 21st Century Business Herald, le prix du Nanfang Weekly de l’entreprise automobile la plus charitable et récemment le prix « Golden Bee » du China WTO Tribune.

Le Club Méditerranée et Fosun annoncent un partenariat stratégique en Chine

Le Club Méditerranée et Fosun, le plus grand conglomérat privé chinois, ont annoncé en juin que Fosun a acquis 7,1 % du capital du Club Med, ce qui en fait l’un des ses plus importants actionnaires

stratégiques. Les deux groupes annoncent également la signature d’un accord de partenariat stratégique dans le domaine de la construction et de l’exploitation de resorts haut de gamme ainsi que le développement des synergies. Créé en 1992, le Groupe Fosun est l’un des plus prestigieux groupes de Chine. La société mère du Groupe Fosun, Fosun International, a fait son entrée à la bourse de Hongkong en 2007. Aujourd’hui, Fosun a des investissements dans le secteur pharmaceutique, l’immobilier, l’acier, l’exploitation minière, le commerce de détail, les services et des industries stratégiques, avec un chiffre d’affaires annuel de plus de 35 Mds de Rmb. L’objectif du Club Méditerranée est de faire de la Chine son 2e plus grand marché dans les 5 ans à venir.


C’est devant la presse chinoise réunie pour l’inauguration de l’espace focus Peugeot sur le pavillon France de l’exposition universelle qu’a été annoncé le lancement, en décembre prochain, de la commercialisation en Chine de Peugeot Scooter. 2010 est une année-clé pour la marque au lion sur le marché chinois. Après le lancement en première mondiale de la 408, de sa nouvelle image de marque et de la célébration de ses deux cents ans à Shanghai Expo, Peugeot franchit une nouvelle étape stratégique sur le plus grand marché de deux roues du monde en présentant la futuriste BB1(modèle électrique avec zéro émission de gaz carbonique). Avec plus de 20 millions de deux-roues vendus par an, la Chine représente la moitié du marché mondial. Peugeot Scooter, avec le soutien de Qingqi, son partenaire depuis 2006, pourra distribuer des scooters et des motos dans plus de 145 concessions et 9 magasins

« flagship ». La marque au lion mise en priorité sur cinq modèles de 80 à 125 cm3, trois scooters et deux motos, fabriqués dans l’usine de Jinan. D’autres modèles viendront ensuite élargir la gamme. L’inauguration du premier magasin est prévue pour décembre. La rétrospective Peugeot sur le pavillon France qui a eu lieu du 14 juillet au 15 août permettait aux visiteurs de se familiariser avec l’histoire de la marque en matière de voitures et de deux-roues : depuis le « grand bi », premier vélo signé Peugeot en 1882, en passant par les cyclomoteurs, les scooters et les motos. A cette occasion, la marque a également dévoilé son plan de marche : avec 1 million de véhicules vendus dans le monde au 1er trimetre 2010, Peugeot a réalisé une croissance de 16,7% le meilleur score de la marque et ainsi gagné une place au palmarès des plus grands constructeurs mondiaux,. D’ici 2012, Peugeot prévoit de lancer 14 nouveaux modèles dans le

© DR

Lancement de Peugeot Scooter en Chine

Lancement de Peugeot Scooter en Chine. 标致电动车在中国投产

monde. En Chine, le lancement de la 408, dont 17 000 exemplaires ont été vendus au 1er semestre, a permis au groupe de réaliser une croissance de 30% faisant ainsi de la Chine le deuxième marché pour Peugeot, devant l’Allemagne.

(Guillaume  Rougier-Brierre)领导。基

中国11座城市66个幼儿园的小朋友见

复星集团购得地中海俱乐部7.1%的股

德律师事务所进入中国已有20多年,

面。集团向幼儿园发放了6万本宣传

份,从而使复星集团成为地中海俱乐

通过设在北京、上海和香港的代表处

手册,以增强儿童道路安全意识。作

部最重要的战略股东之一。两大集团

开展业务,拥有近120名工作人员,其

为中国汽车工业可持续发展的历史合

同时宣布在建设和经营高档度假村以

中包括50多位中外律师和法律顾问。

作伙伴,标致雪铁龙集团自2004年积

及协作开发方面签署战略合作协议。

http://www.gide.com

极投入到中国道路安全的宣传活动

创建于1992年的复星集团是中国最负

第三届标致雪铁龙道路安全训练营在

中。集团这种独树一帜的举措赢得了

盛誉的集团之一。集团母公司复星国

中国开营

一系列赞誉,其中包括《21世纪经济

际于2007年在香港上市。如今,复星

2010年6月22日,标致雪铁龙集团总裁

报道》评出的“最佳企业公民”奖,

集团投资的行业涉及医药、房地产、

瓦兰先生在北京亦庄幼儿园启动了第

《南方周末》评出的“最佳慈善汽车

钢铁、矿业、零售、服务业及战略工

三届道路安全训练营活动。

企业”奖,以及最近由《WTO经济导

业,年营业额达350多亿元。

本届针对4-5岁儿童的道路安全培训,

刊》评出的“金蜜蜂”奖。

地中海俱乐部的目标是在5年内将中国

内容更加丰富多彩,新增了“多媒体

地中海俱乐部与复星集团宣布在中国

变成其第二大市场。

工作室”和“父母工作室”。第一届

建立战略合作关系

标致雪铁龙道路安全训练营在2008年

今年6月,地中海俱乐部与复星集团—

问世。在两年时间里,训练营活动与

—中国最大的综合类民营企业宣布:

octobre 2010 / Connexions 31


© Gorgy Timing

公司简讯 l’actualité / entreprises

La famille Gorgy dans les locaux de l’entreprise en France.

Gorgy一家在法国公司总部的办公室

Gorgy Timing à l’heure chinoise... de demain « Gorgy Timing exploite une niche technologique : la synchronisation horaire ». Son président Maurice Gorgy en explique le principe : « A partir d’une horloge-mère, nous donnons une heure identique dans un établissement et nous synchronisons l’ensemble du réseau informatique. ». A première vue, le procédé paraît plutôt anecdotique. C’est tout le contraire. D’abord, il suffit de dresser une liste non exhaustive des secteurs qui exigent ce savoir faire pour bien mesurer son degré de pénétration dans notre monde actuel où tout s’accélère « Aujourd’hui, pas un centre de contrôle aérien dans le monde n’est construit sans que nous soyons consultés », note Maurice Gorgy presque comme une évidence. Les gares, les laboratoires, les hôpitaux, les grands immeubles modernes, les télévisions et les radios (que Gorgy Timing équipe à 90% en France), « ces systèmes sont présents partout où on a besoin du temps précis pour sécuriser les opérations. ». L’exigence de la précision Ensuite, dans certains domaines d’application, comme les télécoms, l’exigence de 32 Connexions / octobre 2010

précision (de l’ordre de 100 nanosecondes) est telle qu’elle exige de recourir à de permanentes innovations technologiques. « Il y a quelques années, durant une conversation téléphonique, on pouvait entendre des superpositions de voix, c’était dû à une précision insuffisante »... Car au fil du temps, ces systèmes évoluent. « Dans notre métier, ce qui est pénalisant, ce sont les frais engendrés par le tirage des câbles. ». Aussi Gorgy timing a-t-il décidé de... se passer de câbles, en développant une application spécifique d’Ethernet : le Network Time Protocol. Et cette avancée n’a rien d’anodin : « Dans un paquebot par exemple, elle permet d’économiser plusieurs tonnes de câbles en faisant passer une multitude d’informations sur un même câble et entre autre la synchronisation horaire ... ». Une approche du marché progressive L’implantation de Gorgy Timing sur le marché chinois a débuté comme on teste la température d’un bain avec le gros orteil : « Nous avions un peu peur de la Chine », reconnaît Maurice Gorgy. L’ap-

proche a donc été très progressive, en réalisant des marchés d’importance en Asie d’abord par Taïwan, HK, Singapour. Puis un jour, le ministère des Chemins de fer chinois a fait appel à l’entreprise française pour assurer une formation de ses ingénieurs sur les normes internationales de synchronisation. « Car à l’époque, chaque gare faisait un peu ce qu’elle voulait... l’arrivée des TGV demandait de grandes précisions pour la sécurité de circulation des trains. Nos interlocuteurs ont trouvé notre discours intéressant, et nous ont suggéré de se rapprocher d’un des deux fabricants chinois. ». Dès lors, les choses s’accélèrent, et en 2008, naît Polaris-Gorgy Timing Technology, une JV signée avec leur alter ego chinois, le poids lourd local Polaris entreprise chinoise centenaire... Pour autant, Maurice Gorgy, prudent, ne se jette pas aveuglément dans l’aventure. « Aucun produit technique n’est fabriqué en Chine », affirme-t-il en expliquant que « la productivité n’y est pas bonne sur les petites séries. ». Mais déjà, parmi les premiers chantiers décrochés par la JV, on trouve un gros contrat d’équipement d’une trentaine de gares chinoises, et d’une vingtaine de centrales d’énergie… La décision d’installer la production à Yantai, dans le berceau historique de l’horlogerie chinoise, permet en outre de disposer d’une base arrière solide. Pour l’heure, ses cibles prioritaires sont les marchés des aéroports, des centrales d’énergie, des télévisions et radios, des immeubles industriels. Même s’il assure que « rien n’est simple pour l’instant », le chiffre d’affaires évalué à 5 200 000 Rmb pour la première année qui pourrait atteindre 40 millions de Rmb en 2014, prouve un réel optimisme. Gorgy Timing a reçu à Paris en juin dernier le prix PME Chine catégorie International décerné par la CCIFC qui récompense en particulier une approche avisée du marché. Maurice Gorgy et le Président de Polaris envisagent à moyen terme une entrée en bourse des PME innovantes en Chine. Par ailleurs, Gorgy Timing a reçu le label OSEO Excellence 2010 pour ses qualités entrepreneuriales et sa volonté de développement.

•M a n u el R a mbau d


Gorgy Timing与中国明天同步计时 “Gorgy Timing开发一种“缝隙”技 术 : 时 间 同 步 。 ” 该 企 业 总 裁 Maurice Gorgy先生解释了工作原理,“通过一台 母钟,我们在一个机构内设定相同的时 间,对所有计算机系统同步。”这种技 术乍听起来像天方夜谭。但恰恰相反。 首先,只需为使用这种技术的领域列出 一张不全的清单,就能测出它在我们这 个节奏加快的世界里的渗透程度。“如 今世界上没有一个航空监测站不向我们 咨询就可以建成,”Maurice Gorgy先生指 出这一不争的事实。火车站、实验室、 医院、大型现代建筑、电视台和广播电 台(Gorgy Timing为90%法国广播电台和 电视台安装了计时系统),这些系统出 现在所有需要精准计时的地方,以确保 运营安全。” 精度要求 在某些应用领域,例如电信,精 度要求非常高(约为100纳秒),以至 需要不断地进行技术更新。“几年前, 我们在电话中会听到重音,这是由于精 度不够造成的。”......随着时间的 推移,这些系统在发展。“在我们的

工作中,造成损失的是架设电缆产生的 费用。”于是Gorgy  Timing决定放弃电 缆,开发以太网的一项特殊应用:网络 时间协议。这一技术进步并非无足轻 重:“例如在一艘邮轮上,它能节省好 几吨缆线,只需在同一条电缆上发送大 量信息,其中包括时间同步...... ” 循序渐进的市场策略 Gorgy  Timing最 初 进 入 中 国 市 场 就 像 用 脚 趾 试 洗 澡 水 温 一 样 。 Maurice Gorgy先生承认:“我们曾经有点害怕中 国。”因此,Gorgy Timing采取了循序渐 进的市场策略,首先通过台湾、香港和 新加坡在亚洲获得了重要的市场。然后 有一天,中国铁道部请Gorgy Timing为其 工程师提供有关国际时间同步标准的培 训。“因为那时每个火车站都有些各行 其是......为了保障列车行驶安全,高 铁到达时刻需要十分精确。对方认为我 们的讲课内容很有价值,于是建议我们 与两家中国制造商中的一家联系。” 从那时起,事情的进展加快; 2008年,烟台北极星高基时间同步技术 有限公司成立,这是Gorgy Timing与其中

国同行——当地拥有百年历史的重量级 企业北极星集团签约成立的合资公司。 不过,Maurice Gorgy先生十分谨慎,不 盲目冒险。“没有一件技术性产品是在 中国制造的。”他肯定并解释说,“小 批量生产在本地生产率不高。”但在合 资公司已经拿下的第一批项目中,有一 个为中国30多个火车站和20多个电厂安 装时间同步系统的大合同...... 在中国钟表业的发源地——烟台建 立生产基地的决定使Gorgy  Timing拥有 一个稳固的后方阵地。目前,公司的首 要目标是航空、电厂、广播电台和电视 台 , 以 及 工 业 建 筑 市 场 。 即 使Maurice Gorgy先生表示“目前任何事都没那么简 单”,但第一年公司的营业额就达到了 520万元,2014年将达到4000万元,这显 示出真正的乐观前景。今年6月,Gorgy Timing在巴黎荣获中国法国工商会颁发 的国际中小企业奖,这个奖项主要用以 奖励深思熟虑的市场发展策略。Maurice Gorgy先生和北极星集团董事长考虑在 中期内在中国中小企业创业板上市。另 外,Gorgy Timing还获得了2010年法国创 新署优秀企业标签,以表彰其开拓创新 精神。

octobre 2010 / Connexions 33


© Imagine china

专访 l’entretien

Un chercheur au centre d’hématologie de l’hôpital Ruijin de Shanghai. 上海瑞金医院血液学研究所的一位研究员

Pr. Wang Zhenyi, symbole de la coopération franco-chinoise en matière de santé A 86 ans, le professeur Wang Zhenyi est un spécialiste de renommée mondiale en hématologie. Toujours actif aujourd’hui à l’hôpital Ruijin de Shanghai et également « conseiller de la CCIFC », il revient pour Connexions sur ses liens profonds avec la France et l’évolution du secteur de la santé en Chine. C : Vous êtes parfaitement francophone, membre de l’Académie des Sciences française et également décoré de la légion d’honneur. Comment avez-vous tissé ces liens très importants avec la France ? Wang Zhenyi : Ma rencontre avec la France a eu lieu dans une Chine bien différente de celle d’aujourd’hui. J’ai suivi dans les années trente un enseignement secondaire dans un collège rattaché à l’université francophone Aurore, un établissement ouvert à Shanghai par les jésuites français. C’est là que j’ai commencé à apprendre la langue 34 Connexions / octobre 2010

de Molière puis j’ai continué mes études de médecine au sein de cet établissement. Autant dire que j’ai été très tôt imprégné par la culture et la langue françaises. Les évènements historiques ont fait que la Chine s’est ensuite fermée, et ce n’est qu’à la fin de la Révolution Culturelle, dans les années 80, que j’ai pu reprendre contact avec l’Hexagone. A cette époque, j’ai effectué mon premier voyage à Paris dans le cadre d’une délégation ayant pour but de développer les liens entre la France et

la Chine en matière de santé. C’était évidemment une grande joie pour moi de pouvoir enfin visiter ce pays et d’avoir un contact direct avec ses habitants. C : Comment s’est mise en place cette coopération médicale franco-chinoise dont vous êtes un des précurseurs ? W. Z : Il faut rappeler qu’au début du 20e siècle, la France était un centre de pointe en matière de médecine. Anglais et Américains venaient s’y former, le pays était donc une destination de choix pour apprendre les sciences médicales. Avant comme après la Révolution, la Chine, en tant que pays en développement, avait un grand besoin d’apprendre des expériences de pays plus développés. Dans les années 80, le système éducatif chinois était cependant très inspiré du modèle soviétique et les instituts de formation médicale étaient totalement isolés du reste des universités. Après mon passage en France, les choses ont évolué et je suis devenu un des responsables de l’école de médecine rattachée à la prestigieuse université de Communication de Jiao Tong à Shanghai. Entre 1984 et 1988, j’ai pu faire venir des professeurs français pour enseigner en Chine et j’ai également incité de nombreux étudiants à partir se former en France. Que ce soit avec l’Université René Descartes, ou le célèbre Institut d’hématologie de Paris VII du Pr. Bernard, des relations étroites se sont mises en place et ont permis d’aboutir à la coopération que nous connaissons aujourd’hui. A titre d’exemple, le ministre de la Santé actuel en Chine, M. Chen Zhu, est un de mes anciens élèves formés à Paris VII, tout comme sa femme qui dirige l’institut d’hématologie de Shanghai. Ce sont des liens très importants qui prouvent bien la qualité de la coopération franco-chinoise dans le domaine médical ! C : Comment envisagez-vous l’avenir de cette coopération et également des relations franco-chinoises en terme de marché ? W. Z : Selon moi, les relations étroites existantes vont se renforcer et nous allons accélérer le passage d’une situation plutôt de transmission de savoir à une véritable coopération. Au sein de l’hôpital Ruijin, nous avons un déjà un institut de recherche franco-chinois très important qui est


financé par les deux pays. Si nous arrivons à obtenir des résultats concrets et à dépasser certains obstacles budgétaires, je suis certain que cette collaboration sera très fructueuse. En ce qui concerne le marché, la Chine a d’énormes besoins en matière de santé et les grands groupes pharmaceutiques français sont déjà bien présents dans le pays. Cette présence devrait s’étoffer de manière générale. Au niveau des vaccins par exemple, les autorités chinoises suivent avec beaucoup d’attention ce qui se passe en France sur des sujets comme l’hépatite B et l’Institut Pasteur est implanté depuis 2004 à Shanghai. L’avenir pour ce secteur me semble assez radieux. C : Réciproquement, envisagez-vous que la Chine deviennent exportatrice dans le secteur médical, notamment au niveau de la médecine traditionnelle ? En Chine, nous considérons la médecine traditionnelle comme un trésor national encore peu exploité. L’Etat investit lourdement dans ce secteur et l’on retrouve des universités de médecine traditionnelle dans toutes les grandes villes chinoises. Très expérimentale, cette médecine manque encore de fondements théoriques solides et il convient de mieux cerner ce qui fonctionne, pourquoi et comment. Il faut donc à la fois développer notre compréhension des différents principes actifs de la pharmacopée chinoise mais aussi élaborer les fondements théoriques de leurs interactions. Par exemple, un traitement traditionnel à base d’arsenic s’est révélé efficace dans certains cas de leucémie. Il s’agit d’un dosage très précis de différents principes actifs qui permet de contrer la très grande toxicité de l’arsenic, par ailleurs un agent très efficace pour tuer les cellules malades. Voilà le genre de choses que nous devons réussir à comprendre et théoriser aujourd’hui. Je pense néanmoins que l’on verra un jour naître un véritable marché mondial pour la médecine traditionnelle chinoise. En France par exemple, on fait déjà appel à l’acupuncture dans le traitement de certaines maladies neurologiques.

• Propos r ecu eil l is pa r

Nicol a s Sr idi

王振义教授,中法医疗卫生领域合作的象征 86岁高龄的王振义教授是国际上久负盛名的血液学专家。如今他依然活 跃在上海瑞金医院,也是中国法国工商会顾问;他向《联结》杂志谈起 了他与法国的渊源以及中国医疗卫生事业的发展变迁。 《联结》:您法语说得非常好,又是

研究所所长。这是有力证明中法医学

法国科学院院士,并获得法国荣誉骑

合作质量的非常重要的联系!

士勋章。您是如何建立与法国的重要

《联结》:您如何考虑这项合作的未

关系的?

来以及市场方面的中法关系呢?

王振义:我与法国的相识发生在一个

王振义:我认为现有的密切关系会得

与现在完全不同的中国。上世纪30年

到加强,我们要加快从知识传播的状

代,我在法国耶稣会在上海开办的震

态向真正合作的过渡。在上海瑞金医

旦大学附属中学上高中。在那里,我

院,我们已经有一个由两国政府资助

开始学习法语,然后又在这所大学继

的十分重要的中法研究所。如果我们

续学医。可以说我很早就受到了法国

能够取得具体结果并克服某些预算困

文化和语言的熏陶。历史事件让中国

难,我相信这一合作将取得丰硕的成

随后封闭起来,直到文化大革命末

果。

期,上世纪80年代,我才重新与法国

至于市场,中国在医疗卫生方面的

建立起联系。当时,我随同一支代表

需求巨大,法国大型医药集团已经在

团实现了我的第一次巴黎之旅,访问

中国站稳脚跟,法国企业在中国的发

的目的是为了发展中法医疗卫生领域

展会越来越好。例如在疫苗领域,中

的关系。终于能够参观法国并与法国

国政府非常关注法国在乙肝防治方面

人民有了直接接触,这对我来说无疑

的进展,另外巴斯德研究所在2004年

是一种巨大的喜悦。

进驻上海。我觉得这个领域的未来具

《联结》:您是中法医疗合作的先驱

有比较光明的前景。

之一,请问这项合作是如何建立起来

《联结》:反之,您认为中国会成为

的?

医药行业出口国吗,尤其是在中医方

王振义:应该说在20世纪初法国在医

面?

学方面处于非常领先的地位。英国人

王振义:在中国,我们认为中医是一

和美国人都来这里学习,法国因此成

种尚未得到开发的民族财富。政府在

为学习医学的目的地。无论在革命前

该领域投入了大量资金,我们在所有

还是革命后,中国作为发展中国家,

中国大城市又看到了中医药大学。这

都非常需要学习发达国家的经验。上

一非常实验性的医学仍缺乏坚实的理

世纪80年代,中国教育制度却大量借

论基础,应该更清楚地确定什么是有

鉴了前苏联的模式,医学院与大学的

效的,为何以及如何发挥效用。因此

其他部分完全脱离。

我们既需要发展对中药典中各种活性

我从法国回来后,事情发生了变 化,我成为著名上海交通大学医学院

成分的理解,又要为它们的相互作用 建立理论基础。

的负责人之一。1984年至1988年间,

例如,以砒霜为基础的中医治疗显

我邀请一些法国教授来中国任教,同

示出对某些白血病例有效。问题在于

时鼓励很多学生去法国学习。无论是

能够阻止砒霜剧毒的各种活性成分的

与巴黎五大(勒内.迪卡尔大学),

剂量需要非常精确,还要保留杀死病

还 是 与 巴 黎 七 大 Bernard教 授 主 持 的

毒细胞的有效成分。这就是我们今天

著名血液病学院,我们都建立了密切

需要理解和理论化的东西。

联系,并达成了我们今天所看到的合

然而,我仍然认为有一天我们会看

作。作为例证,现任卫生部部长、我

到真正的世界中医市场的诞生。例如

的学生陈竺就曾就读于巴黎七大,他

在法国,人们已经开始使用针灸治疗

的夫人也一样,目前担任上海血液学

某些神经系统疾病。

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36 Connexions / octobre 2010

© Imagine China © Imagine China

dossier 专 栏

L’ eau, la Chine face aux

Sommaire Etat des lieux Un dragon à court d’eau p. 40 La politique de l’eau p. 42 L’eau dans la culture chinoise p. 52 … Enjeux et défis globaux De nouveaux modes de gestion p. 54 Géopolitique de l’eau p. 58

La grande marche contre la pollution p. 64 … De l’eau pour produire Dragon bleu et Tigre blanc p. 66 Le nexus eau/énergie p. 72 Le traitement des eaux industrielles p. 76 …


défis de l’or bleu

水资源:中国面临 “蓝金”挑战 目录 现状 水资源短缺的中国 p. 40 水资源政策 p. 42 中国文化中的水 p. 50

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严峻形势和挑战 新型管理模式 p. 54 水资源地缘政治 p. 58 加快水污染治理步伐 p. 64

生产用水 青龙与白虎 p. 66 水能关系 p. 72

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工业水处理 p. 76

生活用水 进入水市场的相关法规 p. 84 北京,绿洲蜃景 p. 94

De l’eau pour vivre Les aspects juridiques de l’accès au marché de l’eau p. 84 Pékin, le mirage d’une oasis ? p. 94 Quand les riverains partent au secours du lac Tai p. 104 …

Les sciences et technologies au secours de l’eau La Chine met l’eau de mer en bouteille p. 108 Pluie artificielle : la Chine à l’assaut des nuages p. 109 L’empreinte eau p. 112 …

当太湖周边的居民去拯救太湖 p.104

拯救水资源的科学和技术 中国用海水制作瓶装水 p. 108 人工降雨:中国向云层发起冲锋  p.109 水足迹 p. 112

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DOSSIER

专栏

Glossaire Cycle hydrologique Le cycle hydrologique est divisé en deux sous-ensembles : premièrement, le grand cycle de l’eau marqué par deux phases – évaporation, précipitation – qui rythment la vie de la ressource. Cette dernière se présente sous différents états naturels : rivières, nappes souterraines, lacs, océans, nuages et glaces. Deuxièmement, le petit cycle de l’eau qui couvre l’ensemble des prestations effectuées par l’homme pour satisfaire les besoins agricoles, industriels et domestiques. Eau virtuelle L’eau virtuelle est l’eau que nous consommons « sans la voir ». C’est l’eau utilisée dans les processus de fabrication de produits, que ce soit dans l’industrie, l’agro-alimentaire, etc. Empreinte eau L’empreinte eau d’un état est le volume d’eau nécessaire pour la production des biens et des services consommés par ses habitants : La moyenne mondiale est de 1 243 m3/ personne/an (7 452 milliards de m3/an). Stress hydrique On assiste à un stress hydrique lorsque la demande en eau dépasse la quantité disponible pendant une certaine période ou lorsque sa mauvaise qualité en limite l’usage. Le stress hydrique entraîne une dégradation des ressources d’eau douce en termes de quantité (suréxploitation des eaux souterraines, rivières asséchées, etc.) et de qualité (eutrophisation, pollution par la matière organique, intrusion saline, etc.).

Sources : www.eaufrance.fr/spip.php?rubrique189 www.cite-sciences.fr

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L’ingénieux système d’irrigation de Dujiangyan, conçu au IIIe siècle av. J.-C. pour éviter les est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. 巧夺天工的都江堰水利工程,设计于公元前3世纪, 科文组织列入世界文化遗产名录。

La Chine face aux défis de l’or bleu Indispensable à la vie en général mais aussi à la production et au développement économique, l’eau s’annonce comme l’un des prochains enjeux majeurs à l’échelle de la planète. Si, en ce début de 21e siècle, on peut espérer trouver des alternatives au pétrole comme source d’énergie principale, rien ne saurait venir remplacer un accès à des ressources hydrauliques suffisantes et de qualité. A l’échelle mondiale, la croissance démographique, l’urbanisation, l’industrialisation et une production agricole intensive pèsent lourdement à la fois sur la quantité d’eau disponible et la qualité des ressources. Pour les populations, le concept d’ « or bleu » devient de plus en plus tangible et, selon les mots du représentant du Yémen à l’ONU, l’eau est appelée à devenir « le pétrole du

siècle de la soif que sera le 21e siècle »1. Avec plus de 20% de la population mais seulement 7% des ressources en eau du globe, la Chine n’a pas été réellement gâtée par la nature et de plus ces ressources sont réparties de manière très inégale. Assurer l’approvisionnement et la gestion de l’eau est donc un enjeu essentiel pour l’Empire du Milieu. D’autant que sans le précieux liquide, il sera impossible d’atteindre la productivité agricole nécessaire pour nourrir la population ou d’alimenter les zones industrielles qui tirent la croissance économique du pays. Sans parler des conséquences sanitaires et écologiques d’une pollution de l’eau jusqu’à présent mal contrôlée… Un défi de taille donc qui, outre son cortège de problèmes, draine également un formidable éventail d’opportunités pour les


© Imagine China

L’eau 水

inondations et irriguer la plaine de Chengdu, 用于预防洪涝灾害和灌溉成都平原。该水利工程被联合国教

entreprises françaises du secteur dont les compétences sont reconnues internationalement. A travers ce dossier, nous avons cherché à explorer de manière large cette problématique tout en sachant qu’un sujet aussi vaste ne pourrait être traité de manière totalement exhaustive. Dans un premier temps, un état des lieux s’imposait pour mesurer l’ampleur des difficultés présentes et à venir et voir l’évolution des politiques menées par les autorités chinoises. Projet phare à l’heure actuelle, le transfert d’eau « Sud-Nord » visant à mieux répartir les ressources dans le pays méritait d’être détaillé avec en miroir l’expérience millénaire et nettement plus « verte » des Karez du Xinjiang. Partant de cet état de fait, nous avons voulu offrir un aperçu des défis et enjeux qu’impose la situation locale. D’un point de vue géopolitique, la soif d’eau chinoise crée des tensions de plus en plus fortes avec les pays voisins comme avec l’Inde.

Les « déplacés climatiques » chinois quittent des terres devenues inexploitables par manque d’eau alors que la fonte des glaciers au Tibet menace l’approvisionnement du pays en général. Dans le même temps, la pollution infiltre peu à peu toutes les sources alors que la Chine part en quête d’ « eau virtuelle » pour assurer son développement futur. L’eau est essentielle pour la production qu’elle soit agricole ou industrielle et c’est aussi une source très importante d’énergie grâce aux installations hydroélectriques. Concept innovant, le « nexus eau-énergie » permet d’aborder ces problématiques de manière plus globale et de s’ouvrir à des notions d’économies circulaires et d’efficience. Des notions qui se transforment concrètement en opportunités économiques en Chine pour les entreprises françaises. L’eau est avant tout un besoin vital pour les populations que ce soit pour boire ou pour les usages courants. Une eau qu’il faut désormais traiter en amont comme en aval des zones d’habitations et qu’il va falloir payer de plus en plus cher. La société civile chinoise se mobilise de plus en plus pour influencer les choix des autorités mais les inégalités entre zones urbaines et rurales restent très importantes. Pour les spécialistes français du traitements des eaux, la Chine apparaît désormais comme un marché majeur où il convient d’être bien implanté. Et pour faire face à tous ces défis, la Chine mise avant tout sur la science et les progrès technologiques. La coopération avec la France à ce niveau est très solide et des solutions intéressantes émergent. Les technologies restent cependant limitées et il n’est plus possible de ne compter que sur elles pour faire face à une situation plus qu’urgente. Une gestion mieux intégrée et plus globale est devenue une nécessité que les autorités chinoises reconnaissent aujourd’hui. Reste à espérer que cette prise de conscience nationale se traduise bien dans la pratique au niveau local.

Nicolas Sridi

1. Assemblée Générale de l’ONU sur le droit à l’eau potable, 28/07/2010 http://www.un.org/News/fr-press/docs/2010/AG10967.doc. htm

D’où provient l’eau sur notre planète ?.... Ressources Globales Océans : 97.5%

Eau douce : 2.5%

Eau Douce Glaciers et neiges éternelles : 68.7 % Eaux souterraines : 30.1 %

Eaux de surface et atmosphèPergélisol : 0.8% re : 0.4 %

Eaux de surface et atmosphère

Marais : 8.5 % Atmosphère : 9.5 %

Rivières : 1.6 % Végétation : 0.8 %

Humidité du sol : 12.2 %

Lacs : 67.4 %

Et où va-t-elle ?.... Prélèvement d’eaux dans les rivières, les lacs et les aquifères Evaporation

Energie : 10% des réservoirs : Domestique et 3% industriel : 20%

Agriculture : 67%

Eaux prélevées destinées à la consommation Domestique et industriel : 7%

Agriculture : 93% * Eaux non disponibles pour d’autres usages dans le cycle après utilisation Source : A special report on water, the Economist, mai 2010, http://www.economist.com/node/16136302

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DOSSIER

专栏

etat des lieux Berceau de la civilisation chinoise, le Fleuve jaune, pourrait connaître de longues et graves périodes d’assèchement dans les prochaines années. 华夏文明的摇篮——黄河 © Imagine China

将会在今后几年遭遇漫 长、严重的枯水期。

Le Dragon à court d’eau La Chine fait face à une situation de pénurie qui l’oblige à innover et à repenser progressivement son modèle de croissance. Dans son bureau, hébergé au sein de l’université de Droit et de Sciences Politiques de Pékin, Wang Canfa dresse un bilan hydrique de la Chine alarmant : « 50% des ressources en eau globales sont au niveau V de pollution – le plus élevé. L’immense majorité des eaux souterraines sont touchées par cette pollution. Neuf fleuves et rivières sur dix sont asséchés une partie de l’année. La superficie des lacs a diminué de 15% en un demi-siècle… ». Dans ces conditions, « la croissance du pays est en péril », assure, catégorique, cet universitaire d’une cinquantaine d’années, qui dirige depuis 12 ans le centre d’Assistance Légale aux 40 Connexions / octobre 2010

Victimes de la Pollution1. De fait, l’eau (son accès et son traitement) est devenue l’un des enjeux majeurs pour un pays énergivore, désormais « premier exportateur en valeur et troisième puissance mondiale », comme le rappelle le français Alexandre Heim, de l’Institut des Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) dans une récente étude consacrée à l’eau en Chine2. « Le pays connaît aujourd’hui une crise qui risque de remettre en cause cette dynamique [économique]. […] De nombreux pays vivent déjà ou se dirigent vers une crise du même type. Seulement, la Chine abrite un cinquième de la population mondiale. Une crise

de l’eau toucherait donc plus de personnes que dans tout autre endroit sur Terre, ou presque. Et l’impact d’une telle crise sur l’ensemble de l’économie mondiale serait sans commune mesure ». Au même niveau que l’Algérie et Djibouti La Chine dispose actuellement de 2100 m³ d’eau douce par habitant et par an (la moyenne mondiale est de 8 500 m³), mais la partie nord du pays – qui abrite 45% de la population nationale (environ 600 millions d’habitants) et génère près de la moitié du PIB chinois – est régulièrement soumise à des situations de pénuries en eau critiques.


L’eau 水 Dans certains endroits des provinces de l’Ouest notamment (Xinjiang, Gansu, Qinghai, etc.), ces statistiques tombent à moins de 500 m³ par habitant et par an, « ce qui les place, note Franck Galland, directeur de la sureté de Suez Environnement3, bien en deçà du seuil de stress hydrique et au même niveau que des pays comme l’Algérie (478 m³ d’eau par habitant et par an) et Djibouti (475 m³ d’eau par habitant et par an) ». Idem pour Pékin et les régions du Dongbei, qui ne reçoivent en moyenne que 400 mm d’eau de pluie par an, quand les provinces placées au sud du Yangzi – humides et semi-humides – en reçoivent plus du double. « Les nuages provenant de l’océan Pacifique au sud-est concentrent les précipitations dans les régions méridionales pour diminuer graduellement dans les terres », analyse Alexandre Hein. « Ainsi, les précipitations annuelles du Nord-Ouest de la Chine sont de 65% inférieures à la moyenne mondiale ». Relier le Yangzi au Fleuve Jaune, le rêve de Mao Pays-continent dont les cours d’eau s’étendent sur plus de 220 000 km, dont 9 5000 km de voies navigables, la Chine est aussi régulièrement touchée par des inondations spectaculaires, comme celles qui ont ravagé, l’été dernier, plusieurs provinces du pays. « Tout au long de son histoire, la Chine a cherché à dompter ses fleuves réputés capricieux », relève Yang Xiaoliu, professeur au collège des Sciences Urbaines et Environnementales de l’Université de Pékin. « Nous investissons beaucoup pour maîtriser les crues - via notamment la construction de réservoirs » (85 000 sur l’ensemble du territoire pour une capacité totale de 500 milliards de m³), mais aussi pour rétablir l’équilibre, en termes d’accès à l’eau, entre le sud – où se concentrent 80% des ressources hydriques – et le nord. « Le projet de dérivation sur trois voies des eaux du Yangzi et de ses affluents vers celles du Fleuve Jaune (titanesque chantier, initié en 2002 et évalué à plus de 50 milliards d’euros – soit deux fois le budget des Trois Gorges4) devrait permettre de trouver une solution pérenne au problème de rareté de l’eau dans certaines régions », espère Yang Xiaoliu. Une fois achevés, ces trois canaux – le premier devrait être inauguré en 2014 – dévieront quelque 50 milliards de m³

Répartition des ressources en eau de la Chine

< 200 200 - 1500 1500 - 3500 3500 - 4500 > 4500 Disponibilité en eau per capita par an en Chine (m3) Source : CAI Zongxia, Les ressources en eau et leur gestion en Chine, « Géocarrefour », Vol. 79/1, 2004, ttp://geocarrefour.revues.org/index510.html

d’eau par an. Des milliards pour redresser la barre L’eau en Chine, c’est aussi de belles opportunités pour les entreprises spécialisées dans les techniques et les solutions hydrauliques innovantes5. « En 2008, l’industrie de l’eau a généré 43,7 milliards de dollars US », précisent Stéphane Vernay et Nadine Ganesan, avocats au cabinet Gide Loyrette Nouel à Pékin, qui prévoient une croissance de ces revenus de 20% en 2010. Dans son récent plan de relance de 400 milliards d’euros, le gouvernement central a par ailleurs décidé d’en consacrer 7,5 % (soit 30 milliards d’euros) aux seuls projets de production d’eau potable et de traitements des eaux usées. Avec cette enveloppe, Pékin veut exiger de chaque municipalité qu’elle construise une ou plusieurs stations d’épuration afin qu’au moins les deux-tiers des eaux usées soient traitées. En 2003, seulement 40% des 669 villes de plus de 100 000 habitants, selon le SEPA (State Environmental Protection Administration, l’administration chinoise de protection de l’environnement), disposaient de ce type de stations. Ces nouvelles mesures seront-elles efficaces alors que la moitié des eaux usées chinoises sont encore rejetées dans les rivières ou dans la mer sans recevoir aucun traitement ? Comme souvent en Chine, « il va falloir du temps avant que les autorités locales de certaines provinces

décident d’appliquer ces règles », redoute Wang Canfa.

Pierre Tiessen

1.Cette ONG – majoritairement financée par des fonds étrangers – prend juridiquement en charge tout conflit lié à l’environnement. Le centre a déjà défendu en justice plus de 120 affaires. 2. « La Chine, son eau et ses voisins. Aperçu des pénuries en eau annoncées au XXIe siècle », sous la direction de Barah Mikaïl, IRIS, mai 2010. 3. Voir interview page ?? 4. « L’eau en Chine », Stéphane Vernay et Nadine Ganesan, Revue Internationale du Droit des Affaires, 2010. 5.Ibid. En 2002, la Chine a ouvert le secteur de la distribution de l’eau aux capitaux étrangers, domaine auparavant interdit à tout investissement privé. Les IDE dans la construction et l’exploitation d’usines de traitement des eaux usées et de production d’eau potable sont particulièrement encouragés.

Les rendez-vous de l’eau La journée mondiale de l’eau Instituée par l’ONU en 1992, la Journée mondiale de l’eau est célébrée le 22 mars. Forum mondial de l’eau Organisé tous les 3 ans par le Conseil mondial de l’eau (The World Water Council) depuis 1997. Il s’inscrit dans le processus de collaboration mondiale sur les problématiques liées à l’eau. International Conference for Urban Water Development Rendez-vous annuel des acteurs de l’industrie de l’eau en Chine www.chinacitywater.org

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DOSSIER

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专栏

Deux-tiers des 660 villes chinoises souffrent de pénurie d’eau.

中国660座城市中有2/3缺水。

La politique de l’eau de la Chine Des investissements colossaux pour un bilan encore mitigé. La Chine doit faire face à une sévère crise de l’eau et devra fournir un effort soutenu si elle ne veut pas voir cette crise s’aggraver. Celle-ci s’explique d’abord par une ressource en eau limitée, inégalement répartie, et qui connaît des pollutions très graves, aussi bien des eaux en surface que souterraines. Cette ressource fragile est soumise à des contraintes de plus en plus importantes liées à la croissance de la population urbaine, le changement des modes de consommation, l’industrialisation et l’intensification des cultures. Responsabilité et rôle des institutions Face à ces défis, la formulation d’une politique cohérente et unifiée de l’eau est rendue difficile par le partage de responsabilités entre l’Etat et les collectivités locales. Au niveau national, la gestion de l’eau est confiée à cinq ministères distincts, avec des attributions parfois liées : le ministère 42 Connexions / octobre 2010

des Ressources en Eau, le ministère de la autorités locales (district ou province) qui Protection de l’Environnement, le ministère ont un rôle de supervision. du Logement et du Développement urbain Une politique organisée autour des et rural, le ministère des Finances et le mi- bassins nistère de l’Agriculture. D’autres ministères Néanmoins, comme en France depuis la loi participent à la gestion sur l’eau de 1962, la politique de l’eau : le ministère « Au cours des de l’eau de la Chine s’organise des Ressources natuautour de bassins hydrogracinq dernières relles, le ministère de phiques pour lesquels les la Santé, le ministère années, le comités de bassin fixent les des Transports et l’Adorientations générales, les obtarif de l’eau ministration des forêts. jectifs et les dispositions. Les Au niveau local, le mi- a augmenté en autorités chinoises ont créé en nistère de la Protection moyenne de 1998 des commissions de basde l’Environnement sin chargées du partage des par an . » 11% est représenté par les ressources en eau auprès des bureaux de protection usagers. Ces commissions, qui de l’environnement, et s’apparentent au comité de les stations de gestion bassin français, ont le pouvoir de l’eau appliquent les directives émanant d’approuver ou de rejeter les plans d’allocadu ministère des Ressources en Eau. A cela tion en eau établis par les offices de l’eau, s’ajoutent les offices de l’eau créés par les dépendants des autorités locales.


Le financement de l’eau en Chine Depuis la loi sur la prévention de la pollution des eaux de 1984, la Chine a adopté le principe de « pollueur-utilisateur-payeur ». Ce principe également en vigueur en France donne lieu à des prélèvements effectués sur les ménages et les industries, calculés en fonction de l’utilisateur, et selon le volume d’eau consommé, auxquels s’ajoutent des amendes pour les pollueurs. Les tarifs sont établis en fonction de la capacité financière des usagers et de la rareté de la ressource. Ils restent toutefois inférieurs aux coûts d’approvisionnement et d’assainissement, la différence étant payée par l’Etat. La politique actuelle des autorités consiste à augmenter progressivement le prix de l’eau pour promouvoir une consommation plus raisonnée, financer les nouvelles infrastructures de traitement et rénover les installations et les réseaux de canalisation existants, tout en protégeant les consommateurs d’une augmentation brutale du tarif de ce bien de première nécessité. L’augmentation des tarifs de l’eau cache de fortes disparités entre villes, les tarifs allant de 1,4 Rmb à plus de 7 Rmb par mètre cube suivant la rareté de la ressource dans la zone considérée. Les autorités chinoises préparent actuellement une réforme visant la transparence des coûts de revient de l’eau. Elle permettra à terme la consultation par les usagers des coûts de traitement des eaux, de la situation financière du fournisseur et du rapport de supervision effectué par le bureau local du ministère du Logement et de la Construction urbaine et rurale. Les objectifs de la politique de l’eau menée par les autorités chinoises Le renchérissement de l’eau est nécessaire si la Chine veut poursuivre les investissements engagés lors du 11ème plan quinquennal (2006 – 2010). Le ministère des Ressources en Eau a mené un programme de développement des infrastructures de traitement de l’eau. Au cours de cette période, les autorités chinoises ont construit plus de 1000 nouvelles usines de traitement des eaux usées pour un investissement total de 330 milliards de Rmb, auxquels s’ajoutent 200 milliards de Rmb d’investissements dans des stations d’eau potable. Le volet eau du plan de relance prévoit des investissements supplémentaires de

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L’eau 水

La gouvernance de l’eau en Chine En Chine, 4 niveaux de gouvernance sont litique et de la législation nationales sur la impliqués dans la gestion des services protection de l’eau, mesure et qualifie le publics de l’eau : central, provincial, mu- degré de pollution des ressources, finannicipal et local. Différents départements cement et organisation de la recherche. et agences sont reliés à chaque niveau. D’autres ministères prennent en charge Au niveau central, 5 ministères, sous la di- des domaines particuliers : le ministère rection du Conseil d’Etat, sont impliqués des Ressources naturelles est en chardans l’élaboration des politiques de l’eau : ge de la surveillance et de la protection - Le ministère des Ressources en des nappes phréatiques ; le ministère Eaux : formulation de la politique na- de la Santé participe à l’élaboration tionale de l’eau, recommandations sur la des standards de qualité ; le ministère fiscalité, la politique tarifaire, planification des Transports contrôle le niveau de de l’usage des ressources en eau, exa- pollution dans le secteur des transports mination des projets et l’Administration majeurs de construc- « Une réforme des forêts formule les tion d’infrastructures, orientations pour le délivrance des permis prévoirait contrôle des eaux et la de prélèvement d’eau. d’assigner à un seul lutte contre l’érosion - Le ministère du en milieu forestier. Logement et du ministère toutes Aux autres niveaux, D é ve l o p p e m e n t les responsabilités les gouvernements urbain et rural : rémunicipaux ont gulation du marché relatives au secteur une fonction de de la construction, dé- de l’eau dans son premier plan car ils finition des standards, sont responsables direction de la ré- ensemble. » de 60% des infrasforme nationale sur la tructures du pays déconstruction des logements, formulation diées au secteur de l’eau. de la politique et des plans concernant la Les entreprises du secteur privé (chinoidistribution de l’eau en milieu urbain, la ses ou étrangères) qui participent au protection des ressources en eau, la col- service public de l’eau sont regroupées lection et le traitement des eaux usées. autour de l’Association des Eaux Urbai- Le ministère de l’Agriculture : distri- nes Chinoises (China Urban Water Assobution de l’eau dans le secteur agricole. ciation) qui a un rôle de lobbying auprès - Le ministère des Finances : for- des institutions. mulation de la politique et de la lé- Sources : « L’eau en Chine », Stéphane Verney et Nadine Ganegislation sur la fiscalité, les tarifs. san, Revue Internationale du Droit des Affaires / International - Le ministère de la Protection de Business Law Journal, Thomson Reuters/Sweet & Maxwell, juin l’Environnement :formulationdelapo- 2010 ; Mission économique de Pékin.

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octobre 2010 / Connexions 43


DOSSIER

专栏

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150 milliards de Rmb, principalement pour l’accélération des travaux d’adduction d’eau du Sud vers le Nord et le développement des stations d’eau potable et des systèmes d’irrigation en milieu rural. Parallèlement, la Chine s’est efforcée de rationaliser sa consommation. Le 11ème plan a pour objectif de réduire de 20% la consommation d’eau par unité de PIB et de 30% la quantité d’eau utilisée par unité de valeur ajoutée industrielle. Les pertes dans les irrigations seront limitées à 50%, contre 55% en 2005. Cette mesure est essentielle dans ce pays où le secteur agricole représentait 62% de la consommation totale en 2009, contre seulement 24% pour l’industrie et 14% pour le secteur tertiaire. En matière de contrôle de la pollution, le ministère de la Protection de l’Environnement s’est principalement focalisé sur la concentration en dioxyde de souffre et la demande chimique en oxygène, qui font l’objet d’une réduction de 10% au cours du 11ème plan quinquennal. Les autorités ont par ailleurs identifié 10 villes, trois fleuves (Huai, Hai, et Liao) et trois lacs (Taihu, Chaohu, Dianchi) aux niveaux de pollution alarmants et qui font l’objet de mesures prioritaires. Le bilan reste cependant mitigé. Fin 2009, 300 millions de personnes n’avaient pas un accès suffisant à l’eau potable et 70% des lacs et des cours d’eau étaient pollués. Le 12ème plan quinquennal devrait prolonger l’action menée au cours de cinq dernières années en insistant sur le contrôle des émissions de polluants, le traitement de la pollution des eaux de surface, le renforcement de la protection de la ressource en eau, la réduction des pollutions industrielles et le traitement des eaux usées urbaines, autant de problématiques qui entrent dans le périmètre de l’Accord de coopération dans le domaine de l’eau signé fin 2009 par le Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de la Mer de la République Française et le Ministère des Ressources en Eau de la République Populaire de Chine.

Jean-Quentin Heitz Attaché sectoriel Environnement - Energie – Transports Mission économique de Pékin

44 Connexions / octobre 2010

Une station d’épuration des eaux à Ningbo (Zhejiang).

Ds Avocats

Le cadre réglementaire sur l’eau en Chine, la valse des standards Depuis les années 2000, de nombreuses réformes ont participé à modifier le cadre réglementaire de l’eau en Chine, le point avec Chen Xiaoyun, Avocat, Ds Avocats. Les réformes ont principalement porté sur les questions de gestion, de protection et de conservation des ressources en eau, et d’aggravation des responsabilités en cas de non respect de la réglementation en vigueur. Ainsi, la majorité des industries qui reversent des eaux usées se sont dotées d’un système de récupération, de même que les grandes villes chinoises pour l’eau usée des ménages, afin d’augmenter considérablement le pourcentage d’eau retraitée. Cette préoccupation a notamment été mise en avant dans le 11ème Plan Quinquennal (2006-2011), avec l’objectif d’atteindre un retraitement des eaux usées à hauteur de 60%. Mais les inégalités entre les provinces et les municipalités en termes d’équipements d’infrastructures adéquates sont notables puisque les autorités centra-

les préfèrent privilégier les zones de fortes concentrations urbaines et industrielles. Cette orientation politique s’explique par le fait que ces zones sont les principales responsables de rejets d’eaux usées, et par conséquent leur besoin d’un système de retraitement d’eaux usées est plus grand que les zones rurales ou les zones de l’ouest de la Chine, du fait de la densité humaine et d’une activité économique plus faibles. Une réglementation encore mouvante Les entreprises étrangères qui souhaitent pénétrer ce secteur de l’économie chinoise doivent donc tenir compte d’une règlementation encore mouvante puisque les normes techniques et standards sur les ressources, la qualité de l’eau et le rejet de polluants, bien qu’existants, ne sont pas à l’heure actuelle définitifs dans la mesure où la Chine cherche toujours à améliorer la qualité de l’eau potable accessible aux ménages urbains. En raison des priorités du


L’eau 水 德尚律师事务所 中国水资源法规,标准频繁调整 2000年以来,多项改革参与了对

理和可持续开发水资源。在水价长期

中国水资源法规的修改。这些改革主

由政府补贴的情况下,改变居民用水

要涉及水资源的管理、保护和保存问

习惯的工作也需要做。随着水资源领

题,以及违反现行法规的责任加重。

域向国外投资者开放,由于外国企业

因此,大部分废水排放企业都配备

进行配套设施建设投入的费用往往更

了回收系统,大城市里的生活污水亦

高,水价上涨肯定在所难免。

是如此,以便大大增加废水处理的比

© Imagine China

重。随着废水处理达到60%目标的确

浙江宁波一净水站

gouvernement central visant à garantir une meilleure qualité de l’eau et à atteindre les objectifs environnementaux, nationaux et internationaux, les investisseurs étrangers doivent dorénavant être attentifs à toutes les réglementations touchant à la question de l’eau. Ce sont notamment les lois relatives à l’environnement, telle que la « Loi sur la prévention de la pollution de l’eau » (révisée le 28/02/2008 et entrée en vigueur le 01/06/2008), qui peuvent contenir des dispositions qui rendent l’accès à certains projets d’investissements plus contraignants. Les autorités chinoises tiennent, en effet, de plus en plus en compte du paramètre environnemental notamment pour une gestion plus économique de l’eau et d’une exploitation plus durable de ces ressources. Enfin un travail sur les habitudes d’utilisation de l’eau par les ménages doit être fait, dans la mesure où pendant longtemps le prix de l’eau a été subventionné par l’Etat. Aujourd’hui avec l’ouverture du secteur aux investisseurs étrangers, une flambée des tarifs est sans doute inévitable, en raison des coûts souvent plus élevés engagés par les entreprises étrangères pour

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未来的挑战

立,这种忧患意识尤其在十一五期间

然而,即使数量庞大的法规显示

(2006-2011)表现更为突出。然而各

出中国对该领域的关注,今天主要存

省市之间在相应的配套基础设施方

在的问题是将这些法律、法规、规范

面存在着明显的不平等,因为中央更

和标准切实付诸实施。由于有不同的

侧重于城市化和工业化高度集中的地

主管水的部门,任务更加艰巨,有时会

区。这种政治导向通过一个事实反映

导致行政权力的重叠。

出来:这些地区是废水排放的主要责

另外,每个地区的利益和行动方

任者,因此较之于人口相对稀少、经济

式各不相同,同一法律或法规的条例

活动落后的农村和西部地区,它们更

实施起来也会不同。其次,有些想要

需要废水处理系统。

吸引投资的地方政府对采取的是一种 放任的态度,经常使现行法规得不到

仍在变化的法规

真正实施。

希望进入中国经济这一领域的外

因此目前来看,中国政府应当面对

国企业应当知道相关法规仍在变化,

的挑战主要有两类。一方面,在管理与

有关资源、水质和污染物排放的技术

水有关的问题上,中国应该设置唯一

规范和标准,虽然已经存在,但目前

的主管部门或协调一致的制度,另一

并不是最终的,因为中国一直在努力改

方面,应该让有关水法规得以切实执

善城市居民饮用水的质量。

行。但中国还要考虑减少地区不平等,

鉴于中央政府的首要目标在于保

使地区扶持政策得以统一实施。

障水质更优,并达到国内外环保目标,

未来在水领域的改革应该重视改

外国投资者今后应该关注涉及水问题

善水资源管理,改善饮用水和用水环

的所有法规。

境质量;加强水污染防治,加重违法

这些主要是与环境相关的法律,

责任;制定更加可信的规范和标准,

例如《水污染防治法》(2008年2月

以减少甚至消除污染;可持续地使用

2 8日重新修订,同年 6月1日开始施

水资源。为了减少地区不平等,使全国

行),其中包括对某些投资项目准入限

水资源行业更和谐地发展,外国投资

制更严的条例。的确,中国政府越来

主要在中国工业化、城市化较低的地

越多地考虑环境参数,尤其是节水管

区会受到欢迎。

octobre 2010 / Connexions 45


DOSSIER

专栏

adéquates. Les défis à venir Cependant, malgré une réglementation abondante marquant la préoccupation chinoise dans ce domaine, il reste aujourd’hui principalement la question de l’application effective de ces lois, de ces règlements, de ces normes et standards. La tâche est rendue d’autant plus ardue du fait des différentes institutions reconnues compétentes dans le secteur de l’eau, ce qui conduit parfois à des chevauchements de prérogatives. Par ailleurs, face aux intérêts et aux moyens d’action divergents de chaque région, une application différente pourra être faite pour une même disposition de la loi ou du règlement. De plus certaines administrations locales, dans le dessein d’attirer des capitaux, adopteront une attitude plus laxiste, et manqueront souvent à l’application effective de la règlementation en vigueur. Ainsi, à l’heure actuelle, les défis auxquels doivent faire face les autorités chinoises sont principalement de deux ordres. D’une part la Chine doit se doter d’une institution unique compétente ou d’un cadre institutionnel cohérent dans la gestion des problèmes liés à l’eau, et d’autre part permettre l’exécution effective de sa règlementation en matière de l’eau. Mais la Chine doit également penser à réduire les inégalités entre les différentes régions, et permettre une application plus uniforme de sa politique d’aides aux régions. Les futures réformes dans ce secteur devront donc prendre en considération l’amélioration de la gestion des ressources en eau, de la qualité de l’eau potable et de l’eau en milieu aquatique ; le renforcement de la prévention de la pollution de l’eau et l’alourdissement des cas de responsabilités ; l’établissement de normes et standards plus fiables afin de réduire, voire d’éliminer les cas de contamination ; et l’utilisation durable des ressources en eau. Les investissements étrangers sont principalement bienvenus dans les zones moins industrialisées et moins urbanisées de la Chine afin de réduire les inégalités entre les régions, et de permettre un développement plus harmonieux du secteur de l’eau sur l’ensemble du territoire chinois.

Chen Xiaoyun, Avocats, DS Avocats 46 Connexions / octobre 2010

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••• mettre en place les infrastructures

Le Grand Canal qui relie Hangzhou à Pékin sur 1 800 km est le plus vieux et le plus long canal façonné par l’homme. 全长1800公里的京杭大运河是最古老、最长的人工运河。

Les infrastructures Avec ses 220 000 km de cours d’eau, la Chine a mis en place un système d’infrastructures hydrauliques unique au monde. Irrigation Plus gros consommateur d’eau, le secteur agricole exploitait en 2007 environ 540 000 km2 de terres irriguées soit plus de 40% des terres arables du pays. Cette irrigation s’effectue à près de 70% via les eaux de surface déviées dans des systèmes de canaux développés depuis des générations, et à 25% via des réseaux souterrains nécessitant du pompage. Les systèmes de canaux d’irrigation restent assez archaïques et on estime que 50% de l’eau est perdue en raison de l’évaporation et des fuites. Dérivation Le plan de dérivation « Sud-Nord » pour ramener les eaux du Yangzi vers la plaine du Nord représente le projet le plus important. La construction des routes centrales et orientales a débuté en 2003 et ces voies devraient atteindre une longueur totale de près de 2500 km à la fin des travaux. Une

route Ouest supplémentaire est à l’étude pour acheminer de l’eau directement depuis le plateau Qinhai-Tibet vers le fleuve jaune. Au Nord-Ouest, un projet est en cours pour détourner une partie des eaux du fleuve Irtych vers Urumqi à travers un canal de 300 km et un réseau de réservoirs géants pour assurer le développement économique de la région. Barrages et réservoirs Sur les cours d’eau du pays, de nombreux barrages ont été installés pour mieux maîtriser les flux et aussi produire de l’électricité. Entre 1949 et 2008, 86 000 barrages ont été construits dont près de 25 000 de grandes tailles, soit trois fois plus qu’aux Etats-Unis. Pas moins de 12,5 millions de personnes ont dû être déplacées sur cette période pour permettre la construction de ces barrages. Pour compléter

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联 Connexions 结 Le

magazine de la

Chambre

de

Commerce

et d’Industrie

Française

en

Chine

中 国 法 国 工 商 会 双 月 刊

Un autre regard sur la Chine d’aujourd’hui 另一种角度看当代中国

Communiquez dans Connexions Connexions est le seul magazine d’information à caractère économique en langues française et chinoise. Ses dossiers traitent, en détail, des grands enjeux de l’économie et de la société chinoises : la Responsabilité sociale des entreprises, l’Enfant unique, l’Internet, l’Exposition universelle… Au-delà des idées reçues, Connexions donne la parole aux experts et acteurs de terrain.

Diffusion et lectorat : Les décideurs économiques français de tous secteurs exerçant une activité en Chine. Les décideurs chinois francophones et francophiles (d’administrations et d’entreprises) et les officiels français en Chine. Circulation :16 000 personnes

Cible large : Les salariés chinois des sociétés françaises, les passagers des vols Air France (Pékin/Paris, Shanghai/Paris et Canton/Paris), la communauté française en Chine. Parution : Bimestrielle Tirage : 5 000 exemplaires

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Archives Retrouvez les anciens numéros de Connexions sur le site : www.connexions.ccifc.org

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ce système de maîtrise des flux ••• hydrauliques, 85 000 réservoirs ont également été construits avec une capacité totale de 500 milliards de m 3.

En zones urbaines Avec une concentration de la population en zone urbaine qui va grandissante, la Chine a choisi de miser en premier lieu sur le retraitement des eaux usées municipales. Ces dernières représentaient 57,7% de l’ensemble des eaux usées rejetées dans le pays en 2008. Le pays comptait à cette période 1 692 stations d’épuration, soit 434 de plus qu’en 2007. Le taux de retraitements des eaux usées restait encore assez bas, 57,4% en 2008, sachant que l’objectif du gouvernement est d’atteindre les 70% en 2010. En zones rurales En zone rurale, la situation est inquiétante puisque la majorité des eaux usées est rejetée sans être traitée avec des conséquences sanitaires importantes. Les eaux souterraines tirées des nombreux puits sont également polluées par l’utilisation d’engrais et pesticides chimiques dans l’agriculture. En 2007, plus de 300 millions de chinois n’avaient pas accès à une eau potable de qualité suffisante Les eaux industrielles Le secteur industriel représentait 42,3% du total des eaux usées rejetées en Chine en 2008, soit 2% de moins qu’en 2007. Le taux de recyclage de ces eaux industrielles atteignait pour cette période 83,8% et les investissements consentis dans le secteur 194 milliards de yuans.

Nicolas Sridi

Sources : Statistiques 2008 du Ministère de l’environnement chinois : http://www.mep.gov.cn/zwgk/hjtj/ FAO – système d’information Aquastat http://www. fao.org/nr/water/aquastat/main/indexfra.stm

48 Connexions / octobre 2010

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Traitement des eaux Dans le cadre du 11ème plan quinquennal, l’Etat aura investi 330 milliards de yuans dans le secteur du retraitement des eaux usées et 200 milliards dans des stations d’eau potable.

Le canal de dérivation des eaux Sud-Nord qui s’étendra sur 1300 km devrait être achevé en 2014. 南水北调中线输水干渠全长约1300公里,预计于2014年完工。

Adduction d’eau Sud-Nord, le désir face à la réalité Projet titanesque, la dérivation des eaux du Sud du pays vers le Nord en proie à la sécheresse, reliera les principaux cours d’eau en Chine. Déjà imaginée par le Président Mao en 1952, l’idée de ramener les eaux abondantes du Yangzi vers le Nord du pays se concrétise aujourd’hui sous la houlette des ingénieurs et experts qui sont désormais aux commandes de la Chine. Implicite au modèle de « développement à caractère scientifique », la volonté de maîtrise de la nature des autorités n’a jamais été aussi bien illustrée. Trois dérivations du Yangzi sont prévues, la route Est, la route Ouest et la route Centrale. Les deux premières sont en cours de construction depuis 2003, alors que la dernière, la plus complexe techniquement, n’en est qu’au stade d’étude de faisabilité. Une fois les travaux terminés, à l’horizon 2050, le système de dérivation devrait

transporter 44,8 milliards de m3 chaque année pour un montant total de près de 50 milliards d’euros. Le tracé oriental acheminera l’eau sur 1 156 km jusqu’à Tianjin, à travers la province du Shandong, en réutilisant le Grand canal Pékin-Hangzhou. Le précieux liquide servira à l’agriculture et à l’industrie des zones traversées et alimentera également la mégapole de Tianjin. La route centrale, 1 267 km, est prévue pour alimenter Pékin et sa région en eau potable depuis le réservoir de Danjiankou dans la province du Hubei et à travers le Henan et le Hebei. L’audacieuse route Ouest prévoit de détourner les eaux de tributaires du Yangzi directement depuis le plateau Qinghai-Ti-


L’eau 水 Les grands projets de détournement d’eau en Chine

ua gh

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Urmuqi u Yal

Chaine de montagnes Tian Shan

Beijing

Pla tea u

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Désert du Taklamakan

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Huan

Shanghai

Changjiang (Yanzi)

Fleuve

Rivière

des Per

les

Hong Kong

Transfert Sud-Nord Transfert III - Irtysh Autre projet de trasfert

Source : Transferts massifs d'eau: outils de développement ou instruments de pouvoir, Sous la direction de Frédéric Lassere, Presses de l’Université du Québec, 2005

bet pour alimenter le Fleuve jaune qui ne cesse de se tarir, asséché par des ponctions industrielles et agricoles exponentielles. Le relief du tracé impose cependant des technologies qui n’existent pas encore comme des pompes capables de faire passer des cols de montagnes ou des tunnels de plus de 100 km de long. Retards, pollution et déplacement de population Solution plus ou moins pérenne sur le papier, la diversion des eaux du Sud vers le Nord se heurte toujours à des défis majeurs 8 ans après le début des premiers travaux. Le tracé Est prévoyait d’acheminer de l’eau vers le Nord dès 2007 or les autorités avancent aujourd’hui la date de 2013. Cause principale de ces retards : la pollution ex-

cessive liée aux activités économiques intenses le long de la côte orientale. Malgré la fermeture de milliers d’usines polluantes et la construction de plus de 400 stations de contrôle, la qualité de l’eau n’atteint toujours pas le niveau minimum requis pour être utilisée. Une situation des plus inquiétante étant donné que cette eau est censée favoriser le développement de zones industrielles supplémentaires et de l’agriculture et donc de la pollution associée… Sur la route centrale, la situation n’est guère meilleure puisque la fin des travaux a été repoussée de 2008 à 2010 puis à 2014. En cause cette fois, le déclin continuel du réservoir de Danjiankou, source principale de la déviation, qui nécessite des travaux de protection et d’expansion. Une solution en-

visagée est de relier le réservoir au barrage des Trois Gorges pour assurer l’approvisionnement. Autre problème de taille, le tracé nécessite le déplacement de 330 000 personnes au total dont 60 000 d’ici la fin du mois de septembre 2010. Face aux réticences des populations concernées, les déménagements viennent tout juste de commencer depuis le mois d’août dernier. Au final, les désirs de maîtrise de la nature de Pékin ont donc bien du mal à prendre forme dans le réel et les objectifs concrets sont encore loin d’être atteints. Et cela sans parler des conséquences environnementales à long terme d’un tel projet qui restent à ce jour inconnues.

Nicolas Sridi

octobre 2010 / Connexions 49


DOSSIER

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专栏

Vue depuis le musée des Karez de Turpan.

吐鲁番坎儿井博物馆

Les Karez, un système d’irrigation millénaire toujours d’actualité Transporter une eau de qualité en pleine zone aride sans pompes ni évaporation, telle est la promesse tenue par les Karez du Xinjiang. Loin de la volonté de contrôle sur la nature symbolisée par des infrastructures géantes du type grands canaux de déviation SudNord, les Karez offrent un modèle d’acheminement de l’eau d’une nature assez différente. Située dans la deuxième plus importante dépression géographique du monde, la ville de Turpan est le point le plus chaud de Chine avec un record historique à 49,6°C. Sans eau, la zone ne serait jamais devenue un oasis mythique, point de passage obligé de la Route de la Soie, ni une célèbre zone viticole en plein désert de Gobi. Or, si des nappes souterraines existent bien à Turpan, rechargées par les précipitations 50 Connexions / octobre 2010

et la fonte des neiges des montagnes Tianshan et Flaming à proximité, elles sont situées très en profondeur et donc peu facilement exploitables. Introduits il y a plus de 2000 ans dans la région, les Karez permettaient déjà une irrigation agricole en continu à une époque où les techniques de forages et d’extraction restaient rudimentaires. Ils prennent la forme d’un réseau de puits verticaux reliés à des canaux horizontaux souterrains. L’ingéniosité du système consiste à utiliser la pente du relief local pour acheminer, grâce à la gravité, de l’eau d’une nappe souterraine (à la base d’une montagne) vers des zones cultivées plus

bas dans la vallée désertique (voir schéma). Nul besoin de pompes et, de plus, l’eau circule à l’abri du soleil ce qui évite les pertes liées à l’évaporation. Soutenabilité versus efficacité immédiate On compte aujourd’hui plus de 1 000 Karez dans la région de Turpan avec une longueur totale dépassant les 5 000 km dont seuls 300 continuent d’approvisionner la ville en eau potable de haute qualité et fournissent 30% de l’irrigation. Mal entretenu, ce réseau est de moins en moins fonctionnel alors que les infrastructures modernes et l’augmentation de la production agricole surexploitent les eaux


L’eau 水 Le système des KAREZ a TURFAN

Précipitations Niveau de la nappe phréatique Puits pour l’entretien

Champs

Rivière (intermittente)

couche imperméable Source: http://www.eaudela.org

souterraines les plus proches. Dans le même temps, les demandes urbaines et industrielles en eau ne font qu’augmenter. Les Karez offrent pourtant un modèle soutenable d’irrigation puisqu’ils ne dévient que les surplus d’eaux souterraines liés à la fonte des neiges et laissent les nappes se recharger autrement. A l’inverse, le pom-

page intensif moderne accentue les stress sur les ressources locales même si il permet d’accroître rapidement les rendements et la taille des exploitations agricoles. Les Karez soutenus par la Banque Mondiale Dans le cadre d’un prêt de 100 millions de dollars accordé pour la modernisation des

infrastructures hydrauliques dans la région de Turpan, la Banque Mondiale soutient la réhabilitation des Karez1. Pour le moment, un seul système de 12 km sera restauré grâce à ce financement mais l’idée est d’en faire un exemple de développement soutenable à reproduire. Du côté des autorités chinoises, on envisage ce projet plutôt sous l’angle de la conservation du patrimoine culturel local en continuant à miser sur des infrastructures plus « évoluées » pour l’avenir2. Limités à des zones géographiques particulières, les Karez du Xinjiang sont néanmoins la démonstration que des systèmes d’irrigations respectueux des cycles naturels, économes et ne nécessitant que peu de technologie sont envisageables. De nos jours, 2000 ans après leur création, on n’a pas vraiment trouvé mieux !

•Nicolas Sridi

1. Pour plus de détails sur le projet voir le lien suivant : http:// go.worldbank.org/6XOGBE1SS0 2. La Chine veut inclure les Karez comme patrimoine culturel local auprès de l’UNESCO http://whc.unesco.org/fr/listesindicatives/5347/

Avec la Chambre de Commerce et d’Industrie Française, simplifiez-vous la Chine ! L’aventure chinoise est un défi. Notre mission est de soutenir toute entreprise française s’implantant en Chine ainsi que nos membres dans leur développement dans le pays. Avec pour seul objectif votre réussite, de la phase de projet au développement sur le terrain, nos services optimiseront votre démarche. La communauté d’affaires française en Chine, forte de 1 300 entreprises réunies en association, accueille votre projet Chine. Découvrez notre offre de services d’appui aux entreprises 2010-2011 sur le site www.ccifc.org « Entreprendre en Chine c’est bien… durer c’est mieux » Nous vous aidons à… • Etre informé : parce que l’information est votre première alliée ! • Prospecter : grâce à notre réseau et notre potentiel de ‘match making’. • Vous implanter, vous structurer, vous développer… en utilisant les ‘boîtes à outils’ CCIFC. • Communiquer, promouvoir grâce aux grands événements de la CCIFC et tous ses media. Contactez-nous à Pékin, Shanghai, Canton, Wuhan, Shenzhen ccifc-beijing@ccifc.org ccifc-shanghai@ccifc.org ccifc-guangzhou@ccifc.org ccifc-wuhan@ccifc.org ccifc-shenzhen@ccifc.org octobre 2010 / Connexions 51


DOSSIER

专栏

Le mausolée de Yu le Grand, considéré comme le premier empereur mythique de la dynastie Xia, à Shaoxing (Zhejiang).

L’eau dans la culture chinoise

Un élément omniprésent dans la psyché chinoise

Les trois petites gouttelettes que l’on trouve souvent à gauche dans les caractères chinois, comme dans 汉 (漢) han, « Han, Chinois » ou dans 法 fǎ, « droit, Français », ont une valeur idéographique directe et pratiquement universelle. Une recherche en français et en chinois sur un moteur de recherche en images confirme cette communauté de vue : pour tous, ce qui caractérise aujourd’hui le mieux l’eau, c’est son plus petit élément, la goutte claire. Mais dès qu’on élargit quelque peu le champ de vision, des différences culturelles commencent à apparaître : l’eau est plus présente dans la psyché chinoise ; elle a plus de facettes que dans la culture occidentale, et dépasse les seules idées « d’eau fraîche » ou de « mer ». Les grandes étendues d’eau sont en

52 Connexions / octobre 2010

France d’abord des frontières (Rhin, mers, océan), et ensuite des voies de communication (Rhône, Seine…) : elle encadrent, traversent et relient des espaces. En Chine, elles font plus partie de la nature même de l’espace. La peinture traditionnelle des paysages se dit ainsi « peinture des monts et des eaux » (山水shānshuǐ). L’encyclopédie Guanzi, datant des Royaumes Combattants (vers 645 avant notre ère) explique que l’eau est comme le sang de la terre, et que les fleuves sont semblables à des artères. Plus que la mer, c’est d’ailleurs le fleuve qui est la première image géographique associée à l’eau en Chine. Le caractère développé de l’eau, shuǐ, s’écrit 水, et représente un courant d’eau. En y ajoutant par dessus un point de référence, le signe se transforme en yǒng 永, et si-

gnifie « éternel », dérivé de l’impression d’infini que donne la contemplation d’un fleuve s’étirant jusqu’à l’horizon. Par un hasard signifiant de l’histoire, le nom de l’ethnie Han 汉 (漢hàn), qui compose presque 94% de la population chinoise, est aussi aqueux. Il vient de la dynastie Han, elle même nommée en souvenir du premier fief possédé par Liu Bang, le fondateur, fief traversé par une rivière du même nom, constituant le plus grand affluent du Fleuve Bleu. D’ailleurs, le Fleuve Jaune est à la Chine antique ce que le Nil est à l’Egypte et le Tigre et l’Euphrate à la Mésopotamie. Les nécessités de la maîtrise de l’irrigation, et les richesses obtenues par les eaux fluviales domestiquées, ont très certainement influencé les structures politiques et sociales, ainsi que l’expansion économique et culturelle du creuset chinois. Ce souvenir s’est conservé dans les chroniques chinoises, qui attribuent au souverain mythique Yu le Grand la mise en place des structu-


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L’eau 水

位于浙江绍兴的大禹陵。大禹被看作传说中夏朝的第一位皇帝。

res hydrauliques de l’agriculture chinoise. Dans la première moitié du XXe siècle, sur la lancée de la pensée positiviste et déterministe marxiste, des penseurs comme Karl Wittfogel ont extrapolé un peu trop loin, développant la théorie du « despotisme hydraulique », qui entend expliquer la tyrannie politique par les nécessités de la mobilisation humaine pour permettre l’irrigation. C’est malheureusement ce genre d’idée, que l’historiographie juge simpliste aujourd’hui, qui prévaut encore jusque dans les manuels scolaires chinois. Mais il est vrai que l’empire chinois fonde toute une partie de sa légitimité, de sa contrepartie du contrat social, sur ces travaux pour réguler les crues ou favoriser la circulation fluviale. Le Grand Canal, courant sur près de 2 000 km de Pékin à Hangzhou dès le VIIe siècle, est un ouvrage qui a probablement plus apporté à la Chine que la Grande Muraille. En construisant le barrage des Trois Gorges, nul ne doute que les dirigeants communistes

entendaient aussi montrer qu’ils s’inscrivaient dans cette tradition impériale, renforçant leur légitimité dans la conscience collective chinoise. La bonté suprême est comme l’eau Dès le « Classique des Mutations » (易經 yìjīng) et la théorie Yin-Yang des éléments, l’eau a sa place dans la philosophie chinoise, symbolisée par deux traits pointillés Yin entourant un continu Yang, étendue féminine parcourue par une force de vie masculine. Le taoïsme, la théorie de la « voie » et du « souffle », exploite et développe ce symbolisme du flux, qui se retrouve par exemple dans le terme 风水, (fēngshuǐ) littéralement « vent et eau », qui désigne la géomancie chinoise. Laozi fait de l’eau l’élément paroxystique de la bonté de la nature, car elle permet à tous de vivre, et n’est en concurrence avec personne. La citation « La bonté suprême est comme l’eau » (上善若水shàng shàn ruò shuǐ), du « Classique de la voie et de la vertu » (道德經 dàodéjīng), est connue de tous les Chinois éduqués, mais résonne encore plus fort pour les activistes écologistes. Dans les Entretiens de Confucius, on trouve une autre idée, faisant également encore partie de la culture générale chinoise : « 知者樂水 » zhīzhě lè shuǐ, l’homme intelligent aime l’eau. Cet extrait prend place dans un raisonnement expliquant la différence entre le savoir humain acquis (le zhī 知) et la bonté humaniste innée (le rén 仁). L’homme bon par essence aime la montagne, calme, solide - il vivra longtemps ; l’homme devenu intelligent aime l’eau, mobile, utilisable - il vivra heureux. L’eau est aussi ce qui sert à l’homme pour comprendre le concept du niveau, et son sens peut ainsi glisser vers la sémantique de la norme, que l’on retrouve dans le terme 法 fǎ, le droit. Le débordement de la vague Cependant, la nature nomade et impétueuse de l’eau permet aussi un symbolisme plus ambigu. Les anciens aventuriers, héros errants ou bandits, popularisés par les romans comme « Au bord de l’eau » ou les films de kungfu en costumes, étaient appelés les gens des « rivières et des lacs » (江湖 jiāng hú). Quant à la vague, 浪làng, elle fait penser dans la culture chinoise

aux pulsions qui submergent les hommes, notamment aux bas instincts. Le terme « romantique » en chinois se dit 浪漫làngmàn, littéralement le « débordement de la vague », et fait ainsi directement référence au libertinage ; ce n’est donc pas une traduction exacte. Ce malentendu est à méditer lorsqu’on entend dire les Chinois que les Français sont romantiques… Le caractère de la mer, 海 (hǎi), est facile à retenir pour un français puisqu’il contient la poitrine du signe de la mère 母, d’ailleurs pour une raison phonétique et non pas idéographique. Les richesses fabuleuses de l’océan, symbolisées par la légende de la cité sous-marine du dragon sont encore sublimées par les grandes expéditions maritimes de Zheng He, au début du XVe siècle qui atteignent les côtes de l’Afrique orientale. Toutefois la fermeture de la Chine sur le monde décidée par le pouvoir Ming, quelques années plus tard, rétrécit les horizons maritimes. L’expression « frères des quatre mers » 四海兄弟sìhǎi xiōngdì, que l’on trouve notamment dans les romans de cape et d’épée, n’est pas un précurseur de la fraternité de l’Internationale communiste, mais ne signale que les Chinois (aujourd’hui, elle est aussi employée par les homosexuels masculins pour se désigner). Néanmoins, dès les réformes des années 80, on utilise le néologisme 下海xià hǎi, littéralement « descendre à la mer », pour décrire l’ouverture sur les activités commerciales ou libérales (« pantouflage » pour les fonctionnaires, ou création d’une activité privée par un individu). On y trouve à la fois la symbolique du risque, de la richesse, des échanges, et bien entendu, du développement des provinces côtières du pays. Aujourd’hui, l’eau en Chine est encore au quotidien, un peu différente de l’eau en Occident. L’eau potable est ainsi souvent servie brûlante (originellement pour des raisons d’hygiène, mais c’est devenu une habitude bien ancrée, un goût). Pour en avoir à volonté, beaucoup de particuliers installent chez eux une machine fontaine comme dans les entreprises, alimentée par de grands bidons.

Renaud de Spens

octobre 2010 / Connexions 53


DOSSIER

专栏

Enjeux et défis globaux

Inondation à Chongqing en juillet 2010, le Yangzi a connu cet été sa plus forte crue depuis 10 ans. 2010年7月重庆洪灾, 长江今夏遭遇十年来

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最大洪水。

La Chine contrainte d’envisager de nouveaux modes de gestion de l’eau Denis Fourmeau, expert national détaché auprès de la Délégation de l’Union Européenne en Chine (2007-2010), et ancien directeur général adjoint de l’Office International de l’Eau à Paris nous expose sa vision sur la politique de l’eau chinoise. En 1911, le Yangzi sort de son lit pendant trois mois, tuant 100 000 personnes. 20 ans plus tard, le fleuve déborde de nouveau, emportant 400 000 vies avec lui. D’autres inondations suivront, décennies après décennies. Plus au nord, le Fleuve Jaune est tout aussi meurtrier. En 1887, 1931, 1938, les crues dévastatrices se succèdent. Autant dire que les toutes récentes inondations du bassin du Yangzi, quoi qu’en disent certains médias, n’ont rien d’exceptionnel. Pourtant, de nombreuses voix s’élèvent aujourd’hui pour alerter des risques liés aux bouleversements climatiques. « On s’accorde à dire que les phénomènes ex54 Connexions / octobre 2010

trêmes seront de plus en plus intenses et fréquents », relaye Denis Fourmeau, en précisant que cette tendance pourrait en particulier concerner les inondations, les sécheresses et la désertification. Selon le World Wild Fund for Nature (WWF), la fonte anormalement rapide des glaciers himalayens, qui perdent 10 à 15 m par an, pourrait, dans un premier temps, accroître le volume d’eau dans les grands fleuves d’Asie, provoquant de violentes crues. Puis, le phénomène s’inverserait progressivement, provoquant une baisse des débits qui pourrait remettre en cause l’alimentation des centrales hydroélectriques, en-

traînant un risque de pénurie d’électricité, tandis que l’irrigation réduite affectera les cultures. La profonde complexité du fonctionnement des systèmes climatiques et des écosystèmes exige sans doute une certaine prudence face à de telles prophéties. Rien ne permet pourtant d’invalider irrévocablement ces hypothèses... Une gestion non concertée D’autant qu’il existe des motifs d’inquiétude plus tangibles. Ainsi, Denis Fourmeau souligne comment la gestion non concertée des bassins fluviaux peut provoquer des catastrophes. « La multiplication des grands barrages hydroélectriques, par

•••


L’eau 水

Les chiffres du défi chinois Géographie

50 000 cours d’eau ont une superficie de bassin versant dépassant 100 km2 et 1 500 ont une superficie de bassin s’étendant sur plus de 1 000 km2.

Superficie totale des lacs  :  1 787 km2, volume d’eau stocké : 709 milliards de m3. 2 300 grands lacs ont une superficie dépassant 1 km2.

Glaciers : superficie totale de 58 500 km2 représentant une réserve d’eau de 5 100 milliards de m3.

Ressources en eaux renouvelables : 2 841 km3 par an, ce qui fait de la Chine la 6ème réserve la plus importante après le Brésil, la Russie, le Canada, les États-Unis et l’Indonésie.

loppés.

Hydroélectricité : la produc-

le rejet des eaux polluées tend à la baisse. Seuls 56% des eaux usées municipales

tivité hydroélectrique de la Chine est de

sont traités contre 92 % des eaux usées

3.60$/m , ce qui est faible par rapport à

industrielles.

la moyenne des pays à revenus moyens

En 2004, sur les 745 rivières du pays, 28%

($4.80/m3) ou élevés ($35.80/m3).

ont dépassé le stade V de pollution

3

(impropre à toute utilisation) et seule-

Villes

2/3 des 660 villes chinoises souffrent de pénurie d’eau et 110 d’entre elles sont dans une situation critique.

Surexploitation des nappes phréatiques : l’eau souterraine représente 1/3 des eaux consommées par les villes chinoises. 310 villes ont l’eau souterraine comme source principale d’approvisionnement.

Subsidence du sol : dans la

ment 32% ont atteint le grade IV-V.

90% des réseaux aquifères du Nord de la Chine sont pollués.

Plus de 47 km3 d’eaux non conformes aux standards sont utilisées pour la consommation des ménages, de l’industrie ou de l’agriculture.

Coûts

300 millions de ruraux n’ont pas accès à l’eau potable en Chine.

plaine de Huang-Huai-Hai, une zone de

60 000 décès prématurés seraient di-

Nord : 200 à 400 mm par an

200 km autour de la ville de Shijiazhuang

rectement imputés à la pollution de l’eau.

connaît un affaissement.

66.2 milliards de RMB soit 0.49% du

Stress hydrique

Pékin ne dispose en moyenne que de 3,6

PIB ont été nécessaires en 2003 pour

milliards de m d’eau, soit

payer les traitements des affections liées

300 m3 par personne, ce qui représen-

directement à la consommation d’eau

te 1/8e de la moyenne nationale, et

polluée.

est estimé entre 170 à 330 millions

de l’eau coûterait déjà à la Chine environ 2.3 % de son PIB, dont 1.3% directement imputables

de m3 par an, mais grâce aux mesures

à la pénurie d’eau et 1% aux différents

communément défini à 1 000 m3.

mises en place par le Bureau chargé de

impacts de la pollution.

l’économie de l’eau, la municipalité aurait

Productivité

économisé 1,26 milliard de m3 d’eau

Agriculture : le système tradition-

en 10 ans.

nel d’irrigation par inondation fait perdre

Pollution

Mais ces chiffres ne représentent que le sommet de l’iceberg : ils ne prennent pas en compte les impacts écologiques associés à l’eutrophisation et à l’assèchement des lacs, des marais et des rivières et de la pollution de toutes les ressources d’eau en Chine…

Sud : 2 000 mm de précipitation par an

Ressource en eau disponible per capita : 2 156 m3 par an soit ¼ de la moyenne mondiale estimée à 8 549 m3 par an. Nord : ressource en eau disponible per capita : 757 m3 par an soit moins du ¼ de celle du Sud et loin en dessous

du seuil de stress hydrique

50% de l’eau utilisée dans le secteur, soit par infiltration, soit par évaporation.

Industrie : le secteur représente 24% de la consommation de la res-

3

1/30e de la moyenne mondiale. Le manque d’eau à Pékin

Volume total des eaux usées déversées : 53.7 milliards de tonnes en 2006.

source en eau du pays, le taux de

Les eaux usées domestiques sont la plus importante source

contre 75 à 85% dans les pays déve-

de pollution en Chine mais depuis 2007,

recyclage est en moyenne de 83,8%,

Selon la Banque Mondiale, la crise

Sources : Addressing China’s Water Scarcity Recommendations for Selected Water Resource Management Issues: www.worldbank.org www.fao.org Les ressources en eau et leur gestion en Chine, Zongxia Cai, http://geocarrefour.revues.org

octobre 2010 / Connexions 55


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Le barrage des Trois Gorges risque d’être obstrué par des tonnes d’ordures qui se sont 今夏洪灾期间堆积的垃圾有可能堵塞三峡大坝。 amoncelées durant les crues de cet été.

••• exemple, perturbe brutalement le

cours normal des eaux. La nature est réglée sur l’alternance saison sèche/saison des pluies. En mettant un barrage, vous prenez le risque de casser la saisonnalité millénaire des fleuves », avec des conséquences sur les écosystèmes et sur l’irrigation. Ainsi, les grandes retenues d’eau sur le Mékong menacent le cycle de l’eau dont dépendent en aval 60 millions d’habitants du bassin. Le fleuve fournit 80% de leurs apports en protéines animales (poissons d’eau douce) et conditionne également la riziculture : un enjeu d’auto-suffisance alimentaire et de santé publique pourrait rapidement générer des tensions géopolitiques. Car si ces petits pays ont une diplomatie peu influente, il en va tout autrement de l’autre poids lourd régional, l’Inde, qui est directement concernée par un projet de barrage sur le Brahmapoutre... L’illusion de pouvoir contrôler la nature Bien sûr, la Chine n’ignore rien de ces problèmes, la priorité systématique donnée à son développement économique conduit souvent à privilégier des politiques d’augmentation de l’offre au détriment de politiques de gestion de la demande, en construisant par exemple des stations de traitement à mesure que les agglomérations s’étendent. Ce qui amène Denis Fourmeau à estimer que ce pays reste encore fortement influencé par une «culture d’ingénieurs», comme l’atteste d’ailleurs le concept même de « développement scientifique ». Cette prépondérance des in56 Connexions / octobre 2010

génieurs peut entretenir l’illusion, comme c’était le cas dans la France de la fin du XIXème siècle, que l’on peut tout faire avec la technique, et notamment contrôler la nature. Une telle spécialisation empêche souvent de développer une perception plus globale de la situation, ce qui conduit à de véritables aberrations. Denis Fourmeau mentionne l’exemple de l’endiguement du Fleuve Jaune destiné à contenir les crues. « Le problème, c’est qu’en l’empêchant de s’épancher, les sédiments s’accumulent rapidement dans son lit. Le niveau du fleuve monte donc régulièrement, et on est obligé de surélever les digues en permanence. A tel point qu’en certains secteurs, la surface de l’eau est aujourd’hui plus haut que la ville en contrebas... ». La pollution, une priorité nationale Si « le curatif court après le développement », c’est bien souvent la population qui en fait les frais. Régulièrement victimes de pollutions industrielles, les usagers de l’eau deviennent progressivement des sentinelles qui exercent une certaine pression sur les autorités. A tel point que ces dernières ont hissé depuis plusieurs années la lutte contre la délinquance environnementale comme une priorité nationale. Ce que gouvernement craint, c’est que la pollution de l’habitat et des ressources n’engendre des troubles sociaux, preuve en est l’évolution hautement symbolique de la liberté laissée aux journalistes chinois sur ces questions. Ces nouveautés, ainsi que la multiplication des ONG et autres associations de défense de l’environnement, sont autant de signes

de l’émergence d’une société civile militante. Le grand virage de la politique de l’eau Confrontée à une situation de stress hydrique qui s’aggrave, et bien décidée à tendre vers les standards européens, la Chine a amorcé un grand virage dans la manière de gérer ses ressources en eau. Denis Fourmeau relate une anecdote significative : « En 2003, la Commission du Fleuve Jaune a organisé le premier forum international pour le Fleuve Jaune. A l’époque, il s’agissait en substance d’inviter pour la première fois les observateurs étrangers à constater l’ampleur des aménagements hydrauliques réalisés, la compétence technique et managériale de la Commission, et tous les succès dont elle pouvait à juste titre se prévaloir. Deux ans plus tard, le discours avait totalement changé : les mêmes responsables reconnaissaient publiquement les problèmes de pollution auxquels ils étaient confrontés, et demandaient aux experts européens d’expliquer et de partager les solutions techniques, mais aussi administratives et financières mises en œuvre sur les grands fleuves européens. Ce qui est frappant, c’est cette capacité à s’adapter et réagir très vite.». Et cette brusque prise de conscience n’est pas restée lettre morte : des coopérations internationales sont en cours, des délégations chinoises vont observer in situ les pratiques européennes, etc. . Il est nécessaire de rappeler que dès le début de la politique de réformes et d’ouverture, le gouvernement chinois a fait appel, tant pour des raisons techniques que financières, aux grands groupes internationaux spécialisés dans l’adduction et la gestion de l’eau : Veolia, Suez, Degrémont, Thames Water... Ce partage des connaissances est de l’avis des experts de bon augure. Ainsi, la gestion du petit cycle de l’eau en zone urbaine s’est notablement améliorée et c’est aussi, selon Denis Fourmeau, une manière de faire évoluer les mentalités, pour qu’enfin « les Chinois comprennent que l’eau n’est pas un produit mais un service ; qu’en amont et en aval du robinet, il y a du Manuel Rambaud travail »...

1. Source : la Documentation française. 2. www.yellowriver.gov.cn/eng 3. A ce sujet, lire l’article de Delphine Spicq, Maître de conférences au Collège de France : « Approvisionnement en eau des villes chinoises et le rôle des étrangers », 2009, www.reseau-asie.com.



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La station hydraulique de Xiaowan située sur le Mékong est le barrage à arche hyperbolique le plus haut du monde.

澜沧江上的小湾水电站是世界上最高的双曲拱坝。

Géopolitique de l’eau en Chine Pour Pékin, l’eau est une arme diplomatique importante Interview de Franck Galland, directeur de la sûreté de Suez Environnement. Auteur de « L’Eau : Géopolitiques, Enjeux, Stratégies », Editions CNRS, Paris, 2008.

Connexions : Les autorités centrales ont-elles réellement conscience des situations de stress hydrique auxquelles sont confrontées plusieurs régions du pays, en particulier celles du Nord et du Nord-Est – Pékin inclus ? Franck Galland : Jamais probablement un gouvernement en Chine n’a pris autant au sérieux cette problématique. En 2005 déjà, Qiu Baoxing, vice-ministre de la Construction (ministère remplacé depuis par celui de l’Habitat et du Développement Urbain et Rural, ndlr) reconnaissait publiquement que la Chine était confrontée à la crise d’eau la plus sérieuse et la plus urgente au monde. L’eau est devenue en Chine un sujet de sécurité collective dont aujourd’hui tout le monde parle ouvertement. J’ai été invité fin 2009 à participer au colloque annuel du China Institute of International Strategic Studies - un influent think tank de l’Armée Populaire de Libération - dont le thème débattu portait justement sur l’eau. J’ai entendu à cette occasion des discours 58 Connexions / octobre 2010

très francs et honnêtes qui ne masquaient aucune réalité de la situation. La Chine investit par ailleurs énormément à travers des partenariats public-privé – avec Suez Environnement notamment – afin de gérer avec efficience l’ensemble du cycle de l’eau. Il y a donc aujourd’hui une réelle prise de conscience politique et économique du problème.

C. : Cette pénurie en eau est aussi pour la Chine source de nombreux conflits avec ses pays voisins… F. G. : Pour Pékin, l’eau est une arme diplomatique importante qui est au centre de nombreuses discussions bilatérales et multilatérales. En 2008 par exemple, le Premier ministre indien, en visite officielle, avait demandé au Président Hu Jintao de clarifier le projet chinois d’adduction d’eau du Sud au Nord qui prévoit de creuser trois dérivations reliant chacune, sur plus de 800 kilomètres, le Yangzi au Fleuve Jaune. Or, l’une de ces dérivations, en amont du Yangzi, qui devrait passer par les contreforts du Tibet, est suivie de près par les autorités indiennes à NewDehli. Cette zone tibétaine est en effet très stratégique quand on sait que 10 fleuves d’Asie y prennent leurs sources – dont le Brahmapoutre (Yalu Zangpu, en mandarin) qui traverse la vallée de l’Assam, et l’Indus qui arrose le Cachemire1. L’Inde manifeste

régulièrement ses inquiétudes quant aux ambitions de la Chine liées à l’eau dans la région du Tibet. Le conseiller national à la sécurité indienne lui-même a dernièrement fait part de ses craintes à ce sujet dans le Times of India.

C. : La Chine construit plusieurs barrages sur le Mékong (Lancang, en mandarin) – qui prend sa source dans la province du Qinghai – au grand dam des pays en aval, le Laos, le Cambodge, la Thaïlande et le Vietnam. Cette situation pourraitelle, selon vous, dégénérer ? F. G. : Il est possible qu’un pays comme le Vietnam, pour ne citer que lui, puisse finir par adopter une logique belliciste sur ce dossier sensible si les outils de concertation et de dialogue existants ne sont pas renforcés. Une commission internationale, la Mekong River Commission2 – créée en 1995 et dont le but est de régler les conflits transrégionaux – est là pour ça. Il faut que Pékin lui donne plus de poids. Vous savez, l’eau ne connait pas les frontières. C’est une richesse incroyable pour celles et ceux qui y ont accès ; c’est aussi un outil d’anticipation des conflits. De manière générale, la Chine doit réussir à établir un dialogue stratégique efficace avec ses pays voisins, de façon à éviter les problèmes.

C. : Par quels autres moyens Pékin peut-il renforcer ce dialogue stratégique régional ?


L’eau 水 F. G. : La Chine a un rôle important à jouer sur ce sujet au sein de l’Organisation de Coopération de Shanghai (OSC3), qui regroupe depuis 2001, en plus de la Chine et de la Russie, tous les pays en « stan » : Kazakhstan4, Kirghizistan, Tadjikistan et Ouzbékistan. L’Inde et l’Iran y sont également associés. Pékin a intérêt à influencer l’OSC pour que l’eau devienne un outil diplomatique majeur comme entend le faire l’Australie – autre pays confronté à la rareté de l’eau – au sein de l’APEC (Asia-Pacific Economic Cooperation qui réunit les pays d’Asie du Sud-est). Les autorités chinoises cherchent aussi à multiplier les coopérations bilatérales afin d’éviter les tensions diplomatiques comme celles apparues, fin 2005, au lendemain de la pollution au benzène de la rivière Songhua, dans le Heilongjiang. La nappe toxique était alors remontée jusqu’à la ville russe de Khabarovsk (600 000 habitants), ce que n’avait pas du tout apprécié Moscou.

C. : Vous estimez également que la Chine doit s’intégrer davantage à la communauté internationale de l’eau. Pourquoi est-ce si important ? F. G. : La Chine, qui a derrière elle une longue tradition hydraulicienne, est appelée à devenir une vitrine technologique (traitement et réutilisation des eaux usées, dessalement, etc.) à l’image de Singapour ou d’Israël. Il est donc essentiel pour elle de montrer ce qu’elle sait faire dans ces domaines si elle veut devenir une hydropuissance mondiale. La Chine pourrait accueillir un jour le Forum mondial de l’eau5 – un rendez-vous tri-annuel créé afin de répondre aux préoccupations liées à l’eau qui se posent dans de très nombreux pays de la planète. La prochaine édition se tiendra en 2012 à Marseille. Pékin en 2015 ? Ce serait une bonne idée…

Propos recueillis par Pierre Tiessen 1. La Salouen (Nu Jiang, en mandarin) prend naissance sur les plateaux tibétains avant de rejoindre la Birmanie. On compte aujourd’hui, côté chinois, 13 barrages construits ou en construction le long de ce fleuve de 2400 km. 2. www.mrcmekong.org 3. www.sectsco.org 4. L’eau est aussi source de tensions dans les relations sino-kazakhes depuis que la Chine s’est lancée, à la fin des années 90, dans des travaux d’aménagements sur le fleuve Irtych, dont un canal de 300 km qui alimente la ville de Urumqi. Ces travaux ont fortement diminué le débit de ce fleuve qui alimente un important canal, essentiel à l’irrigation des terres arides du Kazakhstan. Ces inquiétudes se portent de la même façon sur la rivière transfrontalière Ili. L’augmentation des ponctions côté chinois a déjà de lourdes conséquences sur le débit de la rivière. « La superficie du lac Balkhach (au Kazakhstan), alimenté à 80 % par l’Ili, est passée de 23 464 km² en 1910 à 18 200 km² aujourd’hui », explique Alexandre Heim, chercheur à l’IRIS. « Le lac Alakol, situé à l’Est du lac Balkhach, à 50 km de la frontière chinoise, n’existe plus qu’à l’état de marais salant ». 5. www.worldwatercouncil.org

中国水资源的地缘政治 对政府而言,水是重要的外交武器 专访苏伊士环境集团安全事务总监弗兰克.加朗 《水:地缘政治,风险,战略》一书的作者,2008年, 巴黎,法国国家科学研究中心出版 《联结》:中央政府确实意识到好多地区,

能得到加强,像越南这样的国家也许最终会

尤其是华北、东北,包括北京,正面临着水

在这个敏感问题上采取黩武的手段。成立于

资源紧张的形势了吗?

1995年,以解决跨地区冲突为目的的湄公河委

弗兰克.加朗:中国可能还没有一届政府如此

员会正是为此而存在。中国政府需要向该委员

重视过这个问题。早在2005年,建设部(现已

会施加更多的影响。你们知道,水是没有国界

更名为住房与城乡建设部)副部长仇保兴就公

的。对于得到它的人来说,是一种难以置信的

开承认中国面临着世界上最严重最紧迫的水危

财富,也是预见冲突的手段。总之,中国应该与

机。水在中国已经成为人们公开谈论的一个共

其邻国成功建立起有效的战略对话,以防止问

同安全的话题。2009年底,我应邀参加了中国

题的发生。

军方“智库”——中国国际战略学会的年度研

《联结》:中国政府还能通过什么其他方式

讨会,讨论的主题恰好就是水。借此机会,我听

加强地区的战略对话?

到了十分坦诚的演讲,它们毫不避讳任何实情。

弗兰克.加朗:中国在上海合作组织(OSC)

另外,中国通过公私合作,尤其是与苏伊士环

中就该问题发挥着重要的作用,该组织成立于

境集团的合作,投入大量资金,以便有效地管

2001年,除了中国和俄罗斯,其他所有国家都

理整个水循环系统。因此,中国现在已经真正

包含“斯坦”:哈萨克斯坦、吉尔吉斯斯坦、塔

从政治和经济上认识到了水资源问题。

吉克斯坦和乌兹别克斯坦。印度和伊朗也已加

《联结》:水资源短缺也成为中国与其邻国

入。

众多冲突的起因......

中国政府可以对OSC

弗兰克.加朗:对于政府而言,水是重要的外

种重要的外交武器,就像另一个面临缺水问题

交武器,成为诸多双边与多变谈判的核心。例

的国家澳大利亚在亚太经合组织中所做的那样

如2008年,印度总理在一次正式访问中要求胡

(亚太经合组织包括东南亚国家)。中国政府

锦涛主席阐释一下中国的南水北调工程,工程

还可以努力加强双边合作,以防止外交局势紧

计划开挖三条相互联接的支流,全长800多公

张,就像2005年底松花江遭受苯污染之后出

里,将长江水引入黄河。然而,其中一条支流

现的局面。污染范围直达俄罗斯的哈巴罗夫斯

位于长江上游,需经过西藏的山脉,因此受到

克市(拥有60万居民),对此莫斯科当局非常不

了新德里印度当局的密切关注。因为西藏地区

满。

确实非常具有战略意义,要知道10条亚洲的河

《联结》:您还认为中国应该更加融入国际

流从这里发源,其中包括穿越阿萨姆与印度河

水务团体。为什么这一点如此重要?

河谷,流经克什米尔地区的布拉马普特拉河(

弗兰克.加朗:中国身负着悠久的水利传统,

即雅鲁藏布江)。印度对于中国在西藏地区对

应该成为一扇像新加坡或以色列那样的技术

水的雄伟规划经常表示担忧,印度国家安全顾

窗口(废水处理或再利用,海水淡化,等等)。

问最近在《印度时报》上表示了对该问题的不

因此,中国如果想成为世界水利强国,那么展

安。

示其在该领域力所能及的事情则非常重要。或

《联结》:中国在发源于青海省的湄公河(

许有一天中国能够举办世界水资源论坛——每

即澜沧江)上修建了多个水坝,这对下游国

3年举 行一次活动,为了解 决地球上很多国

家老挝、柬埔寨、泰国和越南极为不利。您

家 遇到的水问题 。下一届论 坛将于2 01 2年

认为这种情况会恶化吗?

在马赛举行,2015年会在中国吗?这可是个

弗兰克.加朗:如果现有的磋商和对话手段不

好主意……

施加影响,让水变成一

• octobre 2010 / Connexions 59


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Conséquence directe des récentes inondations, l’indice des prix à la consommation a 受洪灾直接影响,2010年7月,居民消费物价指数上涨了3.3%。 fait un bon de 3,3% en juillet 2010.

Comment la planète abbreuve le géant chinois Pour sécuriser son approvisionnement alimentaire, la Chine importe de l’eau « virtuelle ». . Ne disposant que de peu d’eau douce et de seulement 7% des terres cultivables, mais avec plus de 20% de la population mondiale à nourrir, la Chine est indéniablement parvenue à résoudre la délicate équation de nourrir sa population. Pourtant, les autorités savent que ce succès n’est pas définitif et qu’elles vont devoir redoubler d’efforts pour assurer leur sécurité alimentaire. En effet, l’évolution du mode de vie des Chinois exerce une pression croissante sur les ressources du pays en général et sur l’eau en particulier. Ainsi entre 1980 et 2005, la consommation de viande a quadruplé dans le pays. Ce qui pourrait sembler anecdotique. Sauf que pour produire 1 kg de viande de bœuf en élevage intensif, 13 000 litres d’eau seraient nécessaires ! On pourrait multiplier les exemples : ainsi pour un unique verre de bière, il faut au moins 75 litres d’eau... Arrosage des cultures de malt ou du houblon, fermentation, fonctionnement de l’usine : chaque étape de la production prélève son 60 Connexions / octobre 2010

quota d’eau. Le volume ainsi calculé représente ce qu’il convient aujourd’hui d’appeler « l’empreinte eau », en référence à la désormais célèbre « empreinte carbone ». Une solution : louer des terres arables à l’étranger Pour éviter que cette empreinte ne pèse trop sur ses propres ressources, le gouvernement, sur le modèle d’autres pays confrontés aux mêmes problèmes que la Chine, a simplement décidé d’acheter et de louer massivement des terres arables à l’étranger : Amérique du Sud, Afrique, Asie Centrale, et même au Canada... la Chine semble insatiable. Ces transactions s’avèrent constituer un sujet très sensibles pour les pays « vendeurs » et il est très difficile de savoir aujourd’hui la surface exacte de terres possédées effectivement par la Chine à l’étranger. Ainsi un contrat de leasing d’1,24 millions d’hectares avec les Philippines serait en suspend depuis 2009 et un investissement de 800 millions de dollars pour augmenter la

production de riz aurait été rejeté par le Mozambique à cause d’oppositions politiques.1 Il faut dire qu’avec ses 36 millions d’hectares de terres arables et seulement 5 millions en exploitation, le pays africain a de quoi attiser les convoitises d’un géant chinois mal doté par la nature… L’eau virtuelle En installant des concessions à rendements industriels, ce ne sont pas seulement des denrées agricoles que la Chine importe. Il faut rappeler que la nourriture n’est pas autre chose qu’un stockage d’eau et d’énergie. En d’autres termes, en sécurisant ainsi ses approvisionnements alimentaires, la Chine importe de l’eau « virtuelle ». Un constat qui se vérifie également au niveau des échanges agricoles plus « classiques » puisque l’empire du milieu est devenu un importateur net de denrées depuis 2004 alors qu’il était exportateur auparavant. C’est particulièrement le cas avec les germes de soja dont la culture nécessite un abondant apport en eau et qui représentaient près de 38% des 60 milliards de dollars d’importations agricoles chinoises en 2008, selon les statistiques des douanes locales. Ce concept d’eau virtuelle, intimement lié à celui d’« empreinte eau », permet d’apporter une nouvelle dimension à la manière dont le commerce international est perçu, et de mesurer avec plus de précision ses conséquences concrètes. Une démocratisation de leur utilisation pourrait permettre de développer des comportements plus civiques chez les consommateurs, et partant, d’exercer une relative pression sur les fournisseurs. On peut se demander si le principe d’acheter de l’eau virtuelle à l’autre bout du monde est si choquant car la démarche est la même que dans l’exploitation de mines ou de puits de pétrole ; néanmoins, en plaçant leurs terres cultivables sur le marché international, les pays vendeurs introduisent une nouvelle et puissante concurrence dans l’exploitation des ressources locales. Pour les populations concernées, le concept d’eau « virtuelle » devient alors brusquement bien réel.

•Manuel Rambaud

1. Selon l’International Food Policy Research Institute (IFPRI), http://www.ifpri.org/publication/land-grabbing-foreign-investors-developing-countries


L’eau 水

© DR

Des millions de dollars fanés Les effets de la spectaculaire sécheresse de cette année se sont faits très fortement ressentir pour les fleurs du Yunnan, cette industrie étant une grande consommatrice d’eau. 80% des cultures de la région ont été touchées par un manque significatif, plus de 10 000 hectares ont été très lourdement endommagés et, selon les autorités locales, près de 1 500 tout simplement abandonnés sans être ensemencés. Sur le premier trimestre 2010, c’est pas moins de 854 millions de yuans de pertes économiques qui ont été enregistrées dans le secteur d’après les statistiques du Bureau provincial des industries florales. Une catastrophe pour les paysans du district de Chenggong, englobant Dounan, dont 70% dépendent entièrement de la culture des fleurs. D’autant Le marché aux fleurs de Kunming est le plus grand d’Asie. que le manque d’eau a touché principale昆明的花市是亚洲最大的花市。 ment les plus petites exploitations dont les systèmes d’irrigation vétustes gaspillent le précieux liquide. Pour ceux qui ont les moyens d’investir dans des technologies économes et des canalisations pour acheminer l’eau distante, la situation est nettement meilleure. Un système d’arrosage « plantes par plantes » Au Yunnan, l’impact de la sécheresse sans précédent permet ainsi de diviser par 3 la consommation par rapport à l’irrigation traditionnelle de cette année sur l’horticulture est dramatique. et ouvrir les robinets 10 mn par jour suffit à la culture en serre. Cet exploit nécessite Connue comme la province du Printemps sont destinées à 80% au marché intérieur cependant un investissement de 200 000 éternel en Chine, le Yunnan présente un et sont également exportées vers le Japon, yuans par mu (1mu=1/15ha), une charge climat particulièrement tempéré avec des le Vietnam, la Thaïlande, la Russie et même encore impensable pour les petites exniveaux de précipitations parfaitement l’Europe. Dounan est une ploitations qui restent maadaptés à l’horticulture. Des conditions pro- entreprise rentable avec 4,4 joritaires aujourd’hui. pices qui ont permis à Kunming, la capitale milliards de fleurs vendues en « Le Yunnan Coup dur pour la province provinciale, d’abriter le plus grand marché 2009 pour un chiffre d’affaire est la plus du Printemps éternel, la aux fleurs d’Asie, le Dounan International de 3,2 milliards de yuans sécheresse 2010 devrait au grande Flower Market. et représente désormais final favoriser l’émergence Si à ses débuts en 1983, le marché n’était une part importante de région d’une industrie florale locaqu’une ruelle d’un village agricole où les lo- l’économie du Yunnan. Le le plus développée techniproductrice caux venaient à vélo vendre quelques bou- marché s’est même associé quement et plus économe quets et des orchidées, la situation a bien à un fonds d’investissements de fleurs du en eau. Reste aussi à gérer changé aujourd’hui. 40 000 ha de terres ser- hongkongais pour construire pays. » les problèmes de polluvent à cultiver des fleurs dans les alentours un véritable site industriel et tion liés à l’usage excessif et Dounan fournit pas moins de 70% des entrer en bourse par la suite. d’engrais qui impactent la espèces vendues dans toute la Chine. Des entreprises étrangères, notamment les qualité de l’eau, abîment les sols et menaAvec plus de 10 000 visites et de 6 à 12 Hollandais Vandenberg Roses et Anthura, cent à long terme la qualité des fleurs de millions de yuans de transactions par se sont déjà implantées à Dounan pour Dounan. Nicolas Sridi jour, le marché s’est hissé à la première mieux cibler les marchés asiatiques et en place en Asie. Les roses fraiches (60% des particulier la Chine. échanges) et autres espèces de la région

Coup de chaud pour les fleurs du Printemps éternel

octobre 2010 / Connexions 61


DOSSIER

En Chine, il faut parfois marcher des kilomètres pour accéder à l’eau.

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专栏

在中国为了能喝上水有时需要走上几公里的路。

Dong Yuexia, déplacée climatique

Le cauchemar de l’avancée du désert en Chine du Nord Sur la plaine de Chengnan Zhuangcun, au pour travailler sur un chantier après avoir Ningxia, la pluie est enfin tombée cet été. abandonné les champs. Le choix de Dong Yuexia s’est donc avéré Chaque année, les calamités naturelles bon. Il y a un an, quand elle comme la sécheresse, les a décidé de quitter le village « le inondations, les tempêde Zhangjiayuan avec sa fates, les tremblements de gouvernement mille pour échapper à l’avanterre et les glissements cée du désert, les autres vil- estime avoir de terrain sont responsalageois n’ont pas osé suivre déplacé 30 bles de la destruction de ses pas et abandonner leur nombreuses habitations maison. Les autorités locales millions de et de milliers d’hectares avaient pourtant élaboré un personnes de récolte qui forcent projet séduisant : déménades millions de Chinois à ger la population entière du en raison de quitter leur lieu d’origine. village ravagé par la séche- l’impact du Les conséquences de ces resse dans une verte vallée phénomènes naturels changement extrêmes vont contrain40 km plus loin. « Durant les dix dernières années la situa- climatique. » dre la Chine à organiser tion a empiré. On n’a jamais d’ici les prochaines andisposé d’assez d’eau, mais nées de grands dépladepuis quelque temps, on n’avait même cements de population. plus de quoi faire pousser nos céréales », ex- Les terres sont de plus menacées par l’avanplique Dong Yuexia. Les hommes du village cée du désert et la pénurie d’eau s’accroît. sont contraints de partir travailler en ville Le désert du Gobi, à la frontière duquel se alors que les femmes tentent de survivre situe le village de Dong Yuexia, est estimé en vendant leurs broderies ou en tenant de avancer de plus de 10 000 km2 par an. Par petits commerces. Le mari de Dong Yuexia conséquent, le gouvernement chinois réest parti a Yinchuan, la capitale provinciale, fléchit aujourd’hui à de nouvelles mesures 62 Connexions / octobre 2010

destinées à garantir la stabilité et la productivité des zones rurales. Le village de Dong Yuexia, a de cette manière été entièrement reconstruit sur une pleine fertile et ses habitants encouragés à déménager : « Le Parti nous a offert une maison et 2 mu de terre par personne. Aujourd’hui ma famille peut vivre de la production de légumes en serre. Nous cultivons surtout des poivrons » dit-elle. Ses deux enfants sont scolarisés et elle gère aussi un petit commerce dans le nouveau village. « Depuis que nous vivons dans le nouveau village, on mange mieux, on peut se nourrir avec des légumes frais et de la viande.». Les revenus du ménage se sont accrus de 1000 Rmb par an, presque un tiers de plus qu’auparavant, et la famille Dong estime être sortie d’un cauchemar qui durait depuis de longues années.

Antonia Cimini

La Grande Muraille Verte Depuis 1978, la Chine est en train de planter la plus grande forêt artificielle du monde qui s’étendra de l’ouest du Xinjiang à l’est du Heilongjiang sous la forme d’une barrière verte de 4 480 km. Le projet qui devrait s’achever en 2050 a pour objectif de porter la couverture forestière de la Chine du Nord de 5 à 15%. Cette Grande Muraille Verte sera censée protéger les terres arables et les régions urbanisées de l’avancée du désert et des inondations consécutives. La barrière végétale est constituée d’espèces tolérantes au sable dont les plantations sont disposées en damier afin de stabiliser les dunes. Les arbres doivent également servir de coupe-vent contre les tempêtes de poussière. Cependant, certains scientifiques doutent de l’efficacité du projet. Notamment, les espèces choisies seraient trop gourmandes en eau dans cette région aride où le niveau des eaux souterraines baisse inexorablement chaque année de plusieurs mètres et la tendance à la monoculture limiterait la biodiversité végétale et animale.


40% des glaciers du plateau tibétain pourraient disparaître d’ici 2050.

Tibet : menace sur le « château d’eau » de l’Asie Les glaciers du plateau tibétain, dont certains sont vieux de plus de 700 000 ans, constituent la plus importante zone de concentration glacière en dehors des régions polaires de l’Arctique et de l’Antarctique. Ils s’étendent sur 104 850 km2, dont 40 000 km2 en Inde et au Pakistan et 49 873 km2 en Chine, et alimentent 10 des plus larges rivières d’Asie, parmi lesquelles le Fleuve Jaune, le Yangzi, le Gange et l`Indu. Au total, un demi-milliard de personnes dans la région de l’Himalaya - la moitié d’entre elles en Chine - dépendraient des glaciers tibétains pour leur approvisionnement en eau. Au cours des quarante dernières années, cette zone glaciaire a connu un rétrécissement de 6 606 km2 sur l’ensemble du plateau, la diminution la plus rapide se produisant depuis les années 90. La fonte des glaciers, phénomène global causé par le réchauffement climatique et ses effets, est particulièrement préoccupante sur le plateau tibétain où l’augmentation des températures est trois fois supérieure à la moyenne mondial. Selon Yao Tandong, professeur de l’Académie chinoise des sciences sociales, dans l’hypothèse d’une poursuite du processus de réchauffement

climatique actuel, 40% des glaciers du plateau pourraient disparaître d’ici 2050. Depuis qu’il a commencé à étudier les galciers en 1989, le scientifique a observé une diminution de ces derniers de 4 mètres par an. L’ONG Greenpeace se montre quant à elle encore plus alarmiste puisqu’elle prédit une disparition de 80% des zones glaciaires du Tibet et des chaînes de montagnes qui l’entourent d’ici 2035. Des conséquences potentiellement dramatiques L’accélération de la fonte des glaciers au Tibet pourrait avoir des conséquences dramatiques sur l’accés à l’eau et la sécurité alimentaire pour l’ensemble des populations de la sous-région asiatique, mais aussi sur l’environnement et les infrastructures en aval. Le chemin de fer QinghaiTibet, inauguré en 2006 et symbole de la volonté chinoise de développement de la région, est construit en partie sur du pergélisol et son fonctionnement risque d’être perturbé si la fonte des glaciers se poursuit. L’expansion des terres arides en amont, la fonte des glaciers et l’ aggravation des dépôts de sédiments qui affectent le débit du fleuve Yangzi menacent aussi la

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L’eau 水

到2050年,西藏高原冰川有40%会消失。

plus grande installation hydroélectrique au monde, le barrage des Trois Gorges. La Chine n’est pas non plus à l’abri d’une catastrophe soudaine : la fonte des glaciers a en effet entraîné la formation de lacs glaciaires derrière les moraines. Plusieurs de ces lacs, situés à très haute altitude, sont potentiellement dangereux. Les barrages de moraines, relativement précaires, peuvent se briser à tout moment, déclenchant des inondations catastrophiques pour les populations, l’environnement et les infrastructures. La réactivité des autorités Face à ces conclusions scientifiques alarmistes, la Chine a récemment annoncé un plan de 2,19 milliards de dollars sur 20 ans pour gérer le problème de la fonte des glaciers via une série de programmes environnementaux. Parmi ces programmes, est prévu un plan de protection des prairies contre la désertification (avec la fonte des glaces, la région attire de plus en plus d’éleveurs ce qui met en péril l’éco-système) et la contruction dans les dix prochaines années d’une série de réservoirs pour collecter et stocker l’eau de la fonte des glaciers. Reste à savoir si ces mesures seront suivies dans des provinces où les ambitions du pouvoir central restent entravées par une difficile traduction au niveau local dans un contexte de course au développement économique.

Pauline Bandelier

1 Stern, N (2007) Stern Review on the Economics of Climate Change. Cambridge: Cambridge University Press.

octobre 2010 / Connexions 63


DOSSIER

Des barils contenant des produits chimiques flottent sur la rivière Songhua à Jilin (Jilin) après les crues spectaculaires de l’été 2010.

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专栏

2010年夏,吉林发生特大洪水后,化工原料桶漂浮在松花江上。

La grande marche contre la pollution La pollution alarmante dans tout le pays contraint le gouvernement chinois à prendre des mesures d’exception. Selon un rapport de l’Agence des Nations Unies pour le Développement, la pollution coûterait chaque année à la Chine 9% de son PIB, un coût aussi spectaculaire que les taux de croissance de son économie. Ce problème est désormais une cause importante de désordre social dans les provinces chinoises, comme l’indique le nombre croissant de plaintes reçues par les autorités. Parmi toutes ces formes, l’une des plus dramatiques est l’aggravation de la pollution de l’eau. L’OCDE assure que près d’un tiers des cours d’eau du pays et 90% de ses nappes phréatiques sont polluées, alors que la Chine fait partie des 13 pays les plus pauvres en eau au monde. Sans oublier que 64 Connexions / octobre 2010

trois quarts des principaux lacs du pays sont eux aussi atteints par la pollution. Des coûts humains et financiers colossaux Au-delà des dégâts immédiats sur l’environnement, cette pollution entraîne des conséquences qui pèsent sur la viabilité du développement chinois et sur l’avenir de la société. La dégradation de l’eau provoque la destruction d’écosystèmes aquatiques, la pénurie, et la contamination des nappes phréatiques. Elle est également un danger pour la santé publique et peut être la source de nombreuses maladies. D’après le ministère des Ressources en Eau, plus de 300 millions de personnes vivant dans

les campagnes chinoises n’ont pas accès à l’eau potable et un tiers des campagnes du pays n’a pas accès à de l’eau conforme aux règles en vigueur. Selon la même source, seulement 38% de la population est desservie par des installations sanitaires qui traitent les matières organiques et les métaux lourds. Et la tendance est à la hausse, compte tenu de l’augmentation des rejets, anciens et nouveaux. En effet, à une pollution classique est venue s’ajouter une pollution composée, où les rejets industriels s’aditionnent aux rejets domestiques et urbains. Des causes variées Des statistiques sur la pollution de l’eau


L’eau 水

les causes des ces dysfonc- sera 100 millions de personnes tionnements. A l’origine, la supplémentaires. mise en œuvre et le contrôle d’atteindre Des mesures incitatives des lois et règlements dans ce un taux de Parmi les points les plus indomaine relèvent des 3 854 téressants de ce projet pour recyclage bureaux locaux de l’environles entreprises, citons la nement (EPB) qui dépendent des eaux politique de « Crédit Vert » financièrement des autorités qui interdit aux banques usées de municipales et provinciales d’accorder des prêts ou des soit 10 20% et non pas du gouvernement financements aux projets central. industriels particulièrement millions de Ensuite, la protection de l’enpolluants ou énergivores. vironnement n’est pas un mètres cube Pourtant, jusqu’à présent, critère d’appréciation de la d’eau.» seules deux des trois granperformance, la priorité étant des banques nationales donnée le plus souvent à la China Development Bank et croissance et à l’emploi au détriment du China Eximbank - ont adopté des standards respect des règles environnementales. En- de financement environnementaux. fin, malgré un nombre considérable de lois Un autre point important est la « Liste et de règlements qui ont vu le jour depuis noire » des entreprises polluantes qui font plusieurs années - pas toujours très claires l’objet d’un contrôle et d’une surveillance et trop générales - leur interprétation varie rigoureuse des autorités locales, comme selon les municipalités ou le statut des opé- l’inspection régulière sur le site ou l’exarateurs économiques. men détaillé des demandes d’autorisation Légiférer d’émission de déchets. Dès 2008 les autoConscient de la gravité de la situation, le rités ont annoncé deux autres mesures : gouvernement central a réagi avec une d’une part, les entreprises lourdement ardeur législative qui ne s’avère cepen- polluantes doivent souscrire une police dant pas toujours efficace. Depuis 1949, d’assurance pollution, et, d’autre part, celles l’Assemblée Nationale Populaire a élaboré qui souhaitent être introduites en Bourse sept lois sur l’environnement et quinze lois doivent passer un contrôle de leurs normes sur la protection des ressources naturelles. environnementales. Dix entreprises chinoiEt le Conseil des Affaires d’Etat a publié à ses ont été recalées à l’examen de passage, son tour une cinquantaine de règlements dont la China Coal Energy Co, le deuxième administratifs sur cette question. producteur de charbon du pays. L’arsenal juridique comprend également Parmi les mesures incitatives, citons les la « Loi sur la Prévention et le Contrôle « exemptions fiscales » pour les entrepride la pollution des eaux » (1984) qui vise ses qui contribuent à la protection de l’enà empêcher et à contrôler la pollution des vironnement par l’emploi de technologies fleuves, des lacs, des chaînes des canaux propres. Une autre mesure - et non des d’irrigation, des réservoirs et d’autres plans moindres - le gouvernement central a fait

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dans les grandes villes chinoises montrent d’eaux de surface ou souterraines et la « Loi que 17 000 d’entre elles sont dépourvues sur la Protection de l’environnement maride systèmes d’évacuation des eaux usées, time » (1982, modifiée). de sorte que les rejets de près d’un milliard Dans le cadre du 11ème plan quinquennal d’habitants sont déversés directement dans (2006-2010) les autorités chinoises ont lanles rivières. Résultat : l’eau de la majorité des cé une politique de l’environnement ambirivières qui traversent les zones urbaines est tieuse, qui alterne des mesures incitatives et impropre à la consommation. contraignantes. Elle vise une réduction des L’absence de gestion centralisée et indé- émissions polluantes de 10%, une réduction pendante de la politique environnementale de la consommation d’énergie de 20%, un chinoise, les relations difficiles traitement de 70% des eaux entre les services centraux usées, de 60% des ordures « En 2015, et régionaux ainsi que la diménagères en ville ainsi que vision des compétences sont l’objectif l’accès à l’eau potable pour

Qualité de l’eau des lacs d’eau douce Nom du lac

Niveau de pollution*

Dalai

Niveau V+

Baiyangdian

Niveau V+

Hongze

Niveau V+

Nansi

Niveau IV

Bositeng

Niveau III

Poyang

Niveau IV

Dongting

Niveau V

Jingbo

Niveau IV

Erhai

Niveau II

Xingkai

Niveau II

Tai

Niveau V+

Dian

Niveau V

Cao

Niveau V

* Meilleur : niveau I, pire : niveau VI

Source : China’s Environment Status Report (2008)

passer la SEPA (State Environnemental Protection Administration) du rang d’agence à celui de Ministère de l’Environnement ( MEP) avec un budget propre et une capacité d’influence accrue. Toutefois, ce Ministère a son talon d’Achille : l’application concrète de la politique qu’il prône. Car les amendes infligées aux industries polluantes ne sont pas importantes quand on les compare aux coûts de mise aux normes environnementales.

Any Bourrier

1 Source : Livre blanc sur la Protection de l’Environnement en Chine.

octobre 2010 / Connexions 65


DOSSIER

专栏

De l’eau pour produire

Rizières en terrasse dans le Guangxi. La riziculture inondée occupe 17% de la production mondiale de riz. 广西水稻梯田。 淹水种植的水稻占世界

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稻谷产量的17%。

Dragon bleu et Tigre blanc L’immense défi de l’eau agricole

L’analyse de Jacques Leclerc du Sablon, ingénieur agronome, directeur général de la CCIFC.

Selon la tradition, le monde chinois est composé de deux familles, celle du Tigre blanc et celle du Dragon bleu, la Chine de la terre et la Chine de l’eau, les campagnes oubliées et les vibrantes cités. Ces deux figures illustrent un combat inégal aussi ancien que la Chine elle-même. Par le passé le gagnant a toujours été le dragon. Y aurait-il des raisons de penser qu’il en serait autrement aujourd’hui ? L’eau a été au long des siècles un enjeu majeur du combat. Elle l’est de nouveau 66 Connexions / octobre 2010

aujourd’hui car les contraintes environnementales et hydrauliques deviennent drastiques. Un historique lourd La Chine ne découvre pas aujourd’hui son handicap hydraulique. L’une des figures majeures de la mythologie chinoise est celle de Da Yu, maître de l’eau. Depuis la plus haute antiquité, l’un des fonctionnaires les plus élevés dans la hiérarchie gouvernementale a été celui en charge des canaux. Bien des empereurs ont eu à faire face à cet enjeu

politique majeur, jusqu’à l’époque récente. Dans les années 90, lors des grands travaux du barrage des Trois Gorges, un éditorial du Quotidien du Peuple rappelait la lutte entre les Maîtres de l’eau Gun et son fils Da Yu, le premier étant promoteur d’une maîtrise contraignante de l’eau par des barrages, le second lui opposant l’accompagnement dirigé de l’eau par les canaux. La mémoire mythologique a retenu l’exemplarité de Da Yu et déprécié Gun. Le Premier ministre d’alors, promoteur du grand barrage sur le Chang Jiang (Yangzi), se trouvait ainsi mis en rivalité défavorable. L’un des premiers ministres qui ont succédé remettra en chantier les travaux sur le Grand Canal et la jonction Nord-Sud. La Chine dit volontiers qu’elle doit nourrir 20 % de l’humanité sur une surface arable dramatiquement réduite. C’est vrai, mais la situation s’est aggravée par un arrêt criminel des grands travaux hydrauliques pendant de longues décennies pour ne pas dire pendant tout le dernier siècle tellement chahuté par des guerres et l’ins-


L’eau 水 tabilité politique. La Chine doit faire face à un dur choix politique en matière de politique hydraulique dans une recherche difficile d’un équilibre entre les provinces. La richesse hydraulique est inégalement répartie en Chine et les provinces riches sont réticentes à céder de leur eau aux sœurs démunies. Le pouvoir central a-t-il encore assez de poids pour imposer une répartition nationale ? Le savoir faire ancestral chinois en matière d’hydraulique agricole permet de penser que la Chine, malgré le retard et la régression dans ce domaine pendant les décennies passées, peut transformer une pression négative en contrainte positive1. L’eau agricole en cause L’agriculture utilise 70 % de l’eau douce consommée dans le pays… Cela ne pourra pas durer. Comment s’en sortir ? La traduction en volume d’eau par habitant des besoins des cultures agricoles irriguées ou fort demandeuses en eau indique que la Chine devra faire évoluer son ratio S.C.O.P2 et s’orienter vers des spéculations agricoles plus sobres que le riz inondé ou le maïs fourrager pour la production de viande. En doublant sa population, la Chine n’a pas mieux rentabilisé le volume d’eau agricole consommé, elle l’a proportionnellement accru. Il « Si la Chine faut prendre très au d’aujourd’hui sérieux les mettait évolutions rapides et l’hydraulique récentes au même niveau des habitudes alipolitique mentaires d’urgence et dans leur effet sur la de moyens que consomdans le passé, mation la gravité serait en eau. Le passage à moindre.» un régime protéique plus animal (viande de bœuf en tout premier lieu) accroît considérablement le besoin en eau via des cultures fourragères très consommatrices. On peut penser que la recherche agronomique et génomique apportera, si ce n’est déjà fait, des solutions appuyées

•••

青龙与白虎,农业用水的巨大挑战 农艺工程师、 中国法国工商会总经理杨磊先生的分析。 在传说中,中国由青龙白虎组成,分别代

农作物或高耗水农作物的需求反映成人均用水

表着土地和水、被遗忘的农村和躁动的城市。

量,表明中国应该改变其谷物、油料作物和含

这两个形象展示了一场与中国一样古老的不平

丰富蛋白质作物种植面积的比率,向比水稻或

等斗争。过去的获胜者总是龙。我们有理由认

作为产肉饲料的玉米更节水的农业经营发展。

为如今的情况已经不同了吗?

中国的人口增加了一倍,却没有提高农业用水

在过去的几个世纪里,水始终是争夺的

的效益,而是成比例地增加了用水量。应该认

重大筹码。今天它再次成为筹码,因为环境和

真看待近来饮食习惯的迅速变化对用水量的影

水资源的压力尤为严峻。

响。动物蛋白(首先是牛肉)摄入的增加,通过

沉重的历史

需水量极大的饲料作物,大大增加了对水的需

中国现在并未发现其水利缺陷。中国传说

求。我们可以认为农业和基因研究 — 如果还

故事中有一位重要人物叫大禹,他是治水大师。

没有完成 — 将会带来以抗旱能力强的转基因

自远古时代起,级别最高的官员之一就是负责

品种或更少依赖淹水灌溉的耕作制度为依托

治水的官员。历代帝王都要面对这一巨大的政

的解决方案。

治挑战直至近代。上世纪90年代,在三峡大坝

我们知道城市发展和农田保护之间的竞

建造期间, 《人民日报》的一篇社论又提到了治

争所带来的后果。耕地面积会继续减少,中国

水大师鲧与其儿子禹之间的争论,前者主张以

已经确认了食品自足的目标,低于过去100%自

大坝堵截的方法治水,后者则通过疏通水道引

给自足的目标,因为那时中国没有足够的政治

水进海。传说以禹作为治水的榜样,同时贬低

实力防备敌视禁运的风险,尤其在粮食供给

鲧。当时主张在长江上修建大坝的国务院总理

方面。认为中国将作为客户更多地出现在世界

被置于不利境地。之后继任的其中一位总理将

粮食市场是合情合理的,将生产优质面粉和啤

重启大运河治理工程和南水北调工程。

酒谷物的法国农业置于优势位置。在这些交易

中国自称以极其有限的耕地养活20%的人

中,法国会在数量上紧随粮食巨头美国、加拿

口。的确如此,然而,别说在过去饱受战争与政

大、澳大利亚和乌克兰之后,但在质量上居于

治动荡的整整一个世纪里,就是在漫长的近几

首位。

十年里,大型治水工程的罪恶性中止也令形势

近几十年中国加速的城市化进程也大大

恶化。如果今天的中国将水利问题置于与过去

加重了水资源的负担。如今13亿中国人并不比

同样的政治紧迫度并采取同样的政治手段,形

以前的7亿人更加节俭。2010年的青龙和白虎

势不会那么严峻。做这样的政治选择,需要在

要承担同样的责任,任何一方都未能做到像骆

各省之间寻求一种艰难的平衡。中国水资源分

驼一样节水!

布不均,富裕的省份不情愿向贫困的姐妹省份

中国农业用水的问题已经远远超越了国

出让自己的水资源。中央是否有足够的威力强

界。中国应该从流经本国以及发源于边境邻国

令实施水资源的全国分配呢?

的河流上游保障其供水安全。在河流下游,作

中国流传下来的农业水利技术使人相信,

为建造水坝的大国,中国应与依赖共同水源的

虽然在过去几十年里中国在这方面已经落后

邻国进行探讨。这可不是一个简单的问题,就

和倒退,但仍能将负面的压力转化成积极的动

像中国在红河、湄公河以及怒江上修建水坝或

力。

水利设施......随着中国回到世界和地区大国的

受质疑的农业用水

行列,农业用水重新成为一场超越青龙白虎的

农业用水占全国淡水消耗的70%,这种情 况不可能持续。如何走出这一困境呢?把灌溉

挑战, “灌溉”着中国与其所有邻国的政治和经

济关系。

octobre 2010 / Connexions 67


DOSSIER

专栏

••• sur la modification génétique des es-

pèces cultivées en faveur de résistances au stress hydrique ou de systèmes culturaux moins liés à l’irrigation par inondation. On sait l’effet de compétition entre le développement urbain et le maintien des terres agricoles. La surface cultivée va poursuivre son rétrécissement et la Chine a déjà entériné un objectif d’autonomie alimentaire bien en dessous des 100 % des temps passé où le pays n’avait pas le poids politique suffisant pour se prémunir du risque d’embargo hostile sur l’approvisionnement céréalier en particulier. Il est raisonnable de penser que la Chine sera plus présente comme cliente sur les marchés céréaliers mondiaux, plaçant l’agriculture française en bonne position avec ses céréales de très haute qualité meunière et brassicole. Sur ces spéculations, la France se situe immédiatement derrière les géants américains, canadiens, australiens et ukrainiens en termes de volumes mais en tête de la qualité. L’urbanisation chinoise accélérée de ces dernières décennies a aussi considérablement alourdi la note d’eau. Les 1,3 milliards de Chinois d’aujourd’hui ne sont pas plus sobres que leurs 700 millions de prédécesseurs ! Le Dragon bleu et le Tigre Blanc de 2010 sont autant responsables l’un que l’autre. Aucun n’est devenu chameau ! La question de l’eau agricole en Chine dépasse largement les frontières du pays. La Chine doit sécuriser son approvisionnement en eau très en amont des cours d’eau qui la traversent et parfois viennent de pays frontaliers. Pour l’aval, grande bâtisseuse de barrages, la Chine doit traiter avec ses voisins qui dépendent de l’eau commune. Cela n’est pas simple comme dans le cas des barrages chinois ou des aménagements sur le Fleuve Rouge, le Mékong et autre Salouen… Avec le retour de la Chine au premier plan mondial et régional, l’eau agricole redevient un enjeu qui dépasse Dragon bleu et Tigre blanc et « irrigue » l’ensemble des relations politiques et économiques entre la Chine et tous ses voisins.

Jacques Leclerc du Sablon

1. Voir à ce sujet l’excellente encyclopédie de Joseph Needham, dans la partie concernant l’agriculture. Joseph Needham, Science and Civilisation in China 6 : Biology and Biological Technology. Part II : Agriculture by Francesca BRAY. Cambridge-London-New York-New Rochelle-Melbourne-Sydney, Cambridge University Press, 1984. 2. Surfaces Céréales Oléagineux Protéagineux

68 Connexions / octobre 2010

Scène durant la sécheresse au Yunnan : l’hiver dernier, le sud-ouest de la Chine a connu la pire 云南干旱的景象:2010年初的冬天,中国西南省份遭遇了百年来特大旱灾

La nécessaire réforme de l’agriculture chinoise Agrifrance Le développement rapide de l’urbanisation et de l’industrialisation en Chine s’est traduit par une pression accrue sur les ressources en eau, largement insuffisantes et mal gérées. La dégradation progressive de la situation se manifeste par la pénurie de cette denrée indispensable à la vie, aussi bien dans les villes que dans les campagnes. Pour le monde rural, la solution ne peut venir que des techniques modernes et de la formation des paysans, comme l’explique Stéphane Testa, directeur général d’Agrifrance.


L’eau 水 法国阿利芳公司 : 中国农业需要改革 中国城市化和工业化的快速发展通过加

育。当然,水资源稀缺是一个基本困难,因为

剧的水资源压力反映出来:严重不足且管理不

没有水就无法灌溉。我们不能对气候变暖视而

善。无论在城市还是农村,形势的不断恶化表

不见:沙漠化和在华北地区肆虐的干旱就是例

现在这种生活必需品的匮乏。对于农村,对策

证。只举一个例子:1990年,黄河流量是120亿

只能来自现代技术和对农民的培训,法国阿利

立方米,1996年是60亿立方米,自2000年以

芳公司首席代表斯蒂芬.德斯达如是解释。

来,夏季出现断流。因此水在中国的农业生产

© Imagine China

作为第一家在中国经销农业收割机、播种

sécheresse depuis 100 ans.

Premier distributeur français de machines agricoles utilisées en Chine pour les récoltes, les semis et l’irrigation, Agrifrance est implantée en Chine depuis 1996. La PME aide les paysans chinois à se moderniser grâce à un matériel de qualité et à une formation innovatrice avec la société Alifang créée spécialement en Chine pour la formation et l’accompagnement « inter-cultural. » Cet accompagnement vise à combler l’écart qui sépare l’agro-industrie et les agriculteurs.

Connexions : En Chine, les ressources en eau sont faibles et inégalement réparties. Quelles sont les principales conséquences de cette pénurie pour l’agriculture ? Stéphane Testa : D’une manière générale on peut parler de deux grandes périodes, celle qui va de l’ouverture des années 80 jusqu’à l’année 2000 et celle des années suivantes. Pendant la première période, l’approvisionnement en eau ne posait pas de

•••

活动中成为一个负面参数。

机和灌溉设备的法国企业,法国阿利芳公司于

为了获取更好的收益,农耕技术在世界

1996年进驻中国。这家中小企业专门在中国成

各地都有了很大的发展。然而,中国农业落后

立了阿利芳公司,提供培训与“跨文化”陪同服

了30年。因此农民应该更好地适应现代农业

务,通过优质的设备和创新的培训帮助中国农

方法,这要通过培训完成。要教给他们土地会

民实现现代化。这一陪同服务的目的在于弥补

自我培育,自己变肥,应慎用肥料。例如在黑龙

农产品加工业与农民之间的差距。

江,农民有时会在甜菜地里一次施用1000公斤

《联结》:中国水资源不多且分布不均。水

化肥。与法国平均施肥量相比,这个数字过大

资源短缺对农业的主要影响有哪些?

了,多余的肥料会造成浪费且污染含水层。必

斯蒂芬.德斯 达:总的来看,我们可以谈到两

需更好地掌握化肥的使用。同量化肥分多次施

大时期,从80年代改革开放到20 0 0年,以及

用而不是一次施用,可以更好地保护农作物并

随后的这几年。在第一段时期,供水本身没有

防止污染。对于灌溉也是如此。以前中国农民

给中国农业提出什么问题。人们知道在哪儿找

对田地实施淹灌,高达90%的水被浪费掉了。

到水,或是在河里或是挖井,而且人们已经掌

15年来,阿利芳努力地向他们解释还有其他更

握了灌溉技术。从2000年起,由于中国经历了

合理的灌溉方法,例如滴灌带、中心支轴式喷

工业化、城市化和房地产热潮,形势发生了变

灌机、卷盘式喷灌机、全面网络覆盖式喷灌系

化。问题不再于水资源的数量,而在于它们的

统,用这四种系统可以避免浪费。

分布。水变得更加稀有,污染更加严重,不再适

《联结》:在中国,农业是用水大户。那么,

合农业利用。取水并不困难,因为农民一如既

它也是主要的污染大户吗?

往地灌溉,抽水,但水质发生了变化。不仅如

斯蒂芬.德斯达:我不认为农业比城市化更污

此,水资源在城市和农村分布不均的问题也出

染环境,尤其是在废水方面。一个非常简单的

现了。

理由:不管怎样,肥料在中国使用得当。然而,

今天,应该更加全面的看待该问题,才能

由于水污染对农业生产的影响,农业所遇到

明白中国的水和农业之间的问题。当您想进行

的问题是不用被污染的水。因为废水没经过处

农业生产的时候,应该考虑多个参数:土壤和

理,没有经过更换被多次重复使用,所以有一

种子的质量、即将给予种子的营养、水、阳光和

个不间断的污染循环最终渗透到含水层。

农作物的保护,直至要求农民提供优质产品的

《联结》:30年不当的农业实践留下了一些后

下游农产品加工业。因此水是中国农业生产活

果,您建议有哪些解决方法呢?

动的其中一个参数,但不是唯一。

斯蒂芬.德斯达:已经有一些投入使用的解决方

《联结》:如何解决水资源管理不善的问题

法了。第一种方法是在中国推广转基因作物。

呢?

这显然是个让法国人害怕的话题,但在中国

斯蒂芬.德斯达:我认为,主要问题是农民教

却不再令人惊讶,转基因作物被中国人

•••

云南持续干旱的景象:去年冬天中国西南省份遭受了一场百年不遇的大旱。 可用水和可用耕地的地区差异:

中国地区

可用水

可用耕地

人口

国内生产 总值

南方

81 %

36 %

54 %

56 %

北方

19 %

64 %

46 %

44 %

信息来源: 联合国开发计划署

octobre 2010 / Connexions 69


DOSSIER

© Imagine China

专栏

Le cotton représente la 2ème culture après les céréales. La Chine est le plus gros producteur, consommateur et importateur de coton au monde. 棉花是排在谷类之后的第二大农作物。中国是世界上最大的棉花生产国、消费国和进口国。

••• problème en soi pour l’agriculture

chinoise. On savait où la trouver, soit dans les rivières, soit par des forages , et on maîtrisait les techniques d’irrigation. A partir des années 2000, la situation a évolué en raison notamment de l’industrialisation, de l’urbanisation et de la vague immobilière qu’a connu la Chine. La question n’était plus la quantité des ressources mais leur répartition. L’eau est devenue plus rare, plus polluée et inadaptée à l’utilisation agricole. Il n’y avait pas de difficulté pour récupérer l’eau car les paysans continuaient à irriguer et à pomper comme avant, mais la qualité de l’eau avait changé. A cela est venu s’ajouter le déséquilibre de la répartition de l’eau entre les milieux urbain et rural. Aujourd’hui, il faut regarder le problème de manière plus générale pour comprendre la problématique de l’eau et de l’agriculture en Chine. Lorsque vous voulez produire, vous devez prendre en compte plusieurs paramètres : la qualité du sol et des semen-

ces, la nourriture qu’on va donner à ces semences, l’eau, le soleil et la protection des plantations, jusqu’à l’industrie agro-alimentaire qui se situe en aval et qui exige des paysans une production de qualité. L’eau est donc bien l’un des paramètres de l’activité agricole en Chine mais pas le seul.

C. : Comment résoudre le problème de la mauvaise gestion des ressources en eau ? S.T. : A mes yeux, le problème majeur est l’éducation des paysans. Certes, la rareté de l’eau est une difficulté fondamentale puisque sans elle il n’y a pas d’irrigation. On ne peut pas fermer les yeux sur le réchauffement climatique : la désertification et la sécheresse qui sévit dans le nord du pays en sont les preuves. Pour ne citer qu’un seul exemple, le débit du Fleuve Jaune était de 12 Mds de m3 en 1990, de 6 Mds de m3 en 1996 et depuis 2000 il n’arrive plus à la mer en été. L’eau est donc un paramètre négatif dans l’activité agricole en Chine. Partout dans le monde, les techniques de

Différences régionales pour les disponibilités en eau et en terres arables Région de Chine

Disponiblité en eau

Sud

81 %

36 %

54 %

56 %

Nord

19 %

64 %

46 %

44 %

Terres arables Population

Source : United Nations Development Program 70 Connexions / octobre 2010

P.I.B

culture ont beaucoup évolué afin d’obtenir de meilleurs rendements. Or, l’agriculture chinoise a trente ans de retard. Les paysans doivent par conséquent mieux s’adapter aux méthodes agricoles modernes et cela se fait par la formation. Il faut leur apprendre qu’un sol se travaille et s’enrichit, que les fertilisants doivent être utilisés avec attention. Par exemple, dans le Heilongjiang, les paysans ont parfois utilisé 1 000 kg d’engrais, d’un seul coup, dans les champs de betteraves. Ce chiffre est excessif si on le compare à la moyenne française et ce surplus d’engrais va se perdre et polluer les nappes phréatiques. Il est nécessaire de procéder à un meilleur usage des fertilisants. En utilisant la même quantité en plusieurs fois au lieu d’une seule on protège mieux les plantations tout en évitant la pollution. Il en va de même pour l’irrigation. Autrefois, les paysans chinois inondaient les champs et l’eau était ainsi gaspillée à hauteur de 90%. Depuis une quinzaine d’années, Agrifrance s’emploie à leur expliquer qu’il existe d’autres méthodes plus rationnelles pour irriguer, comme le goutte à goutte, le pilot, l’enrouleur, la couverture intégrale. Grâce à ces quatre systèmes on peut éviter le gaspillage.

C. : En Chine, l’agriculture est le principal consommateur d’eau. Ce secteur est-il aussi le principal pollueur ? S.T. : Je ne pense pas que l’agriculture soit plus polluante que l’urbanisation, notamment dans le cas des eaux usées. Pour une


L’eau 水 raison très simple : malgré tout, les fertilisants sont correctement utilisés en Chine. En revanche, le problème qui se pose pour l’agriculture est celui de ne pas utiliser de l’eau polluée, en raison des effets de cette pollution sur la production agricole. Comme l’eau n’est pas traitée, comme elle est utilisée plusieurs fois sans être renouvelée, il y a un cycle ininterrompu de pollution qui s’infiltre jusqu’aux nappes phréatiques.

C. : Trois décennies de mauvaises pratiques agricoles ont laissé des traces. Quelles solutions préconisez-vous ? S.T. : Il existe déjà des solutions qui se mettent en place. La première est la banalisation des OGM en Chine. C’est évidemment un sujet qui fait frémir les Français mais en Chine il ne surprend plus, les OGM étant considérés par les Chinois comme partie intégrante de leur processus de développement. Un exemple : 95% du coton planté dans le pays est transgénique. La modification génétique change la nature de la plante lui donnant un meilleur rendement pour le même travail de la terre. Cela permet aussi d’économiser l’eau, cette denrée de plus en plus rare. La deuxième solution réside dans la modernisation du secteur agricole. Par exemple, en Chine, les tracteurs ont un passage de trois mètres, tandis qu’en France ce passage est de six mètres et dans d’autres pays, comme les Etats-Unis, beaucoup plus. En modernisant l’équipement agricole, en utilisant des tracteurs plus puissants, les paysans chinois n’auront pas besoin de passer plusieurs fois sur la même surface et feront des économies de temps, d’effort et de carburant. La troisième solution consiste en l’utilisation de produits plus modernes et plus efficaces ou encore faire appel aux pesticides qui entourent les graines et les protègent de manière localisée, au lieu de recourir aux méthodes anciennes d’aspersion, sources de gaspillage.

C. : Que pensez vous des actions entreprises par les autorités et quel est leur impact sur l’économie agricole ? S.T. : La grande majorité des décisions prises dans ce domaine s’adressent aux grands centres urbains et très peu au monde rural. Malheureusement, en Chine l’agriculture reste le parent pauvre du développement et de la modernité. Si un entrepreneur doit investir, il choisira l’industrie, jamais l’agri-

culture qui reste en dehors du système. On peut se demander pourquoi. Je crois qu’il y a un fossé entre ces deux mondes que les autorités n’arrivent pas à combler. On sait très bien que la Chine ne dispose, sur son propre territoire, que de 7% de terres arables de la planète et doit néanmoins nourrir 21% de la population mondiale. D’où le développement de politiques de location de terres agricoles en Afrique, en Amérique du Sud et, plus près de ses frontières, au Kazakhstan. Par ailleurs, la modernisation de l’agriculture se fait très lentement et tarde à venir. L’Etat peut aider avec des subsides, mais il ne peut pas forcer un entrepreneur à investir là où il ne veut pas. De sorte que personne en Chine ne veut retourner à la terre et la paysannerie reste marginalisée. Aujourd’hui, le monde rural chinois est divisé en deux : d’un côté, l’agro-industrie très exigeante sur la traçabilité de la production et, de l’autre côté, une agriculture qui n’intéresse plus personne.

C. : Que peut faire l’Etat chinois dont on connaît la capacité d’intervention ? S.T. : L’Etat peut aider par le biais de subsides, mais comme personne ne veut plus retourner à la terre. Il ne peut pas forcer les investisseurs à y aller. Aujourd’hui il n’y a pas de respect pour l’agriculteur car on ne peut pas appliquer à ce secteur le principe du gagnant-gagnant. Les solutions viendront sans doute du secteur agro-industriel et des grandes fermes d’Etat, dont on dénombre environ 2 000 dans le pays, notamment au Xinjiang et dans le Heilongjiang. Ces fermes sont actuellement à la pointe du progrès et de la modernisation de l’agriculture. Elles sont très attentives à l’évolution des techniques de culture et elles ont les moyens de leur politique. Par exemple, le groupe COFCO, qui cultive des tomates dans deux provinces chinoises, notamment dans le Xinjiang. Ce groupe, qui a réussi à fédérer divers producteurs par le biais de coopératives et de circuits de distribution favorise beaucoup l’utilisation d’un matériel moderne. Mais à côté de cela, subsistent les petits agriculteurs, sans moyens, sans la capacité de moderniser leur exploitation, sans un bon rendement, ils restent et resteront sans doute les parents pauvres de la croissance économique de la Chine.

• Propos recueillis par Any Bourrier

•••看作其发展进程的一个组成部分。例如, 中国种植的棉花95%是转基因的。转基因改变

植物的本质,使其在相同耕作条件下获得更好 的收益。这样也能节省愈来愈稀有的水资源。 第二种方法是农业的现代化。例如在中国,拖 拉机的操作面是3米,而在法国操作面可以达 到6米,在其他国家,如美国,操作面会更宽。 通过农业设备现代化和使用更强马力的拖拉 机,中国农民无需再在同一地面往返多次,从 而节省时间、劳力和燃料。第三种方法是使用 更现代更有效的产品,或者在种子周围使用农 药,局部对种子进行保护,而不再使用过去造 成浪费的喷洒法。 《联结》:您如 何看待中国政 府采 取的行 动,它们对农业经济有何影响? 斯蒂芬.德斯达:政府在这方面做出的绝大多 数决定都是针对大城市的,很少针对农村。不 幸的是,中国农业仍是发展和现代化的软肋。 如果一位企业家要投资,他会选择工业,从来 不会选择处于制度之外的农业。我们可以想 象为什么。我认为在这两个世界之间有一道政 府无法弥合的鸿沟。我们都知道中国在自己的 领土上只拥有全球7%的耕地,却要养活世界 21%的人口。于是,在非洲、南美出现了租赁农 田的政策,或离边境更近的地方,在哈萨克斯 坦。 另外,农业现代化进展非常缓慢,且姗姗 来迟。国家可以通过补助来扶持,但不能强迫 企业家把钱投到他不愿投的地方,因此在中国 没人想回到土地上,农民是边缘群体。今天的 中国农业被分成两半:一方面是对生产可追溯 性要求苛刻的农产品加工业,另一方面是无人 问津的农业。 《联结》:中国政府其干预能力众所周知, 它能做些什么呢? 斯蒂芬.德斯达:政府可以通过补贴来扶持, 但由于没人愿意回到土地上,它不能强迫投资 者去那里。如今人们对农民缺乏尊重,因为无 法在这个领域运用双赢原则。解决方法可能来 自农产品加工业和国有大型农场,中国大约有 2000个国有农场,主要分布在新疆和黑龙江。 这些农场处于农业进步和现代化的前沿,非常 重视耕作技术革新,拥有政策优势。例如在中 国两个省份(主要在新疆)种植西红柿的中粮 集团,该集团成功地通过合作社和销售渠道将 各种农业生产者联合起来,大大促进了现代机 械设备的使用。但与之共存的是那些小农户, 没有资金,没有能力实现经营现代化,没有好 收成,也许他们现在是,将来也是中国经济增 长的软肋。

• octobre 2010 / Connexions 71


DOSSIER

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专栏

Le charbon est très consommateur d’eau : il faut froidir la mine, nettoyer le charbon et l’arroser pour limiter la dissémination des poussières. 煤炭耗水巨大:要冷却煤矿,清洗和浇注煤炭,以防止扬尘。

Le nexus eau/énergie, une équation salvatrice ? Explication d’un concept pertinent dans un contexte de fortes tensions entre ressources limitées et demande croissante. Lorsqu’on évoque le rapport existant entre la production énergétique et l’eau, on pense immédiatement aux barrages hydroélectriques, où le passage du liquide dans les turbines génère du courant. Or, lorsqu’on étudie attentivement l’utilisation humaine de ces ressources, les liens entre les deux apparaissent encore beaucoup plus importants. Il est tout simplement impossible d’évoquer une quelconque production d’énergie sans considérer la consommation d’eau qui l’a rendue possible ni, réciproquement, comprendre le circuit de l’eau sans mesurer la consommation d’énergie qu’elle a exigée. Denis Fourmeau, ancien Conseiller auprès de la Délégation de l’Union Européenne en Chine, parle de « nexus1 eau/énergie » pour nommer cette interdépendance. Ce concept est particulièrement pertinent 72 Connexions / octobre 2010

dans un contexte chinois caractérisé par de fortes tensions entre des ressources limitées et une demande croissante. Le cas du charbon, qui représente 70% de l’énergie primaire du pays, en est une bonne illustration. Car dès sa phase d’extraction, il est extrêmement gourmand en eau : il faut froidir la mine, nettoyer le charbon et l’arroser pour limiter la dissémination des poussières, etc. Le coût hydrique d’une telle exploitation est d’autant plus élevé qu’on estime que les trois quarts des quatre siècles de réserves chinoises de charbon se situent dans des zones arides qui ne disposent que de 2% de l’eau disponible... Dans les zones en aval des mines aux paysages ravagés sur des dizaines de kilomètres, la pollution de l’eau est telle que le traitement requis pour la purifier est très lourd, donc plus énergivore. Selon D. Fourmeau, « on peut certes techniquement toujours, à

partir d’une eau très usée, obtenir une eau bactériologiquement et chimiquement extrêmement pure. Mais au delà d’un certain seuil, les traitements nécessaires sont tels que si on fait le calcul, ça devient très vite un non-sens économique ». Une équation complexe Programmée pour répondre à la demande énergétique croissante du pays, la multiplication des barrages hydroélectriques constitue une autre illustration du concept de « nexus ». D’abord parce que stocker de l’eau facilite son évaporation. Ainsi chaque année, on estime que quelque 54 km3 sont vaporisés, soit près de 10% de la capacité totale de stockage des réservoirs chinois, accentuant ainsi la pression exercée sur la ressource : car même si on considère que le cycle naturel de l’eau n’est pas interrompu et que cette dernière reviendra assurément sur terre sous forme de pluie, force est de


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L’eau 水

Plantation d’une forêt dans la région de Zhalantun (Mongolie Intérieure). 在内蒙古扎兰屯地区的植树造林

constater qu’alors, le précieux liquide ne sera plus disponible avant longtemps ni forcément là où on en a le plus besoin. Autre conséquence : le fait de transformer de l’eau vive en eau stagnante provoque une eutrophisation : le liquide devient vert, saturé d’algues qui asphyxient l’étendue, tuant en particulier les poissons. Ce pourrissement, au bout du compte, exige un traitement de dépollution, donc de l’énergie... Plus globalement, le concept de nexus eau/énergie permet de dépasser un certain travers de pensée qui consiste à consi-

dérer indépendamment chaque variable de l’équation. Karim Khemiri, membre du programme Alef (Alternative pour l’Energie du Futur) soutenu notamment par l’école des Mines de Paris et l’université Tsinghua de Pékin, estime qu’« il est nécessaire de se poser la question de la place de l’eau dans le développement sous peine de faire des choix aberrants. Ainsi, on entend souvent des gens faire la promotion de la biomasse car elle a un faible impact carbone sauf qu’en termes de coût hydrique, c’est énorme... ».

Pourcentage de quantité d’eau utilisée par secteur dans les bassins fluviaux 0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

Rivières du N.O Rivières du S.O Fleuve Jaune Rivière Songhua Rivière Hai Rivière Liao Rivière Huai Rivière des Perles Rivière du S.E Fleuve Yangzi

Agriculture

Industrie

Usage domestique et services

Source : China Water, Ressource Bulletin, Responsible Research

Protection biologique

De fausses bonnes solutions ? Face à une situation de pénurie d’eau, certaines réponses séduisantes se révèlent au final être de véritables pièges. Ainsi, le dessalement de l’eau de mer est-il l’exemple parfait d’une fausse bonne solution parce qu’elle « permet de s’affranchir d’une dépendance à l’eau mais au prix d’une nouvelle dépendance cette fois énergétique », prévient D. Fourmeau. De fait, la distillation comme la filtration par membrane nécessitent beaucoup d’énergie soit pour chauffer l’eau de mer soit pour assurer une pression suffisante au filtrage. Heureusement, se réjouit-il, « les chercheurs commencent à avoir une vision globale des choses. Par exemple, ils commencent à intégrer dans leurs calculs sur le charbon les coûts en termes environnementaux et de santé. Et ça change énormément le prix du KWH ! ». Avec des conséquences très sensibles sur l’eau également. Un peu de bon sens… « Et même si ce genre de calculs n’entrent pas assez pour l’instant dans les équations officielles », la prise de conscience de ce nexus pourrait représenter une belle opportunité en termes de gestion. Car lorsque les autorités chinoises prendront en compte les dimensions économiques de toutes ces interactions, en d’autres termes, lorsqu’elles se poseront « la question de savoir ce que coûte réellement le litre d’eau supplémentaire qu’on a fait venir de 800 km », peut-être alors s’engageront-elles sur le chemin d’une meilleure gestion de l’amont. Et pour remplacer la surenchère technique actuelle, D. Fourmeau suggère de considérer d’abord « les solutions que la nature peut nous offrir. Ne pas se priver, par exemple, du pouvoir purificateur du sol et des plantes. Eviter autant que possible, donc, la déforestation, limiter le bétonnage des zones agricoles, repenser l’étalement urbain etc. ». Du bon sens qui, entre autres avantages, pourrait assurer la viabilité d’un développement économique chinois actuellement rendu très incertain au regard de ses impacts « collatéraux » sur des ressources limitées et l’environnement en général. Manuel Rambaud

1 Un nexus définit les connexions ou les séries de connexions d’un système.

octobre 2010 / Connexions 73


DOSSIER

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专栏

Pompes à eau dans une station à Huaiyin (Jiangsu).

江苏淮阴一净水站里的水泵

Schneider Electric au service du nexus eau/énergie Bon sens et technique pour une meilleure gestion « Le marché de l’eau en Chine est en plein virage : nous aidons nos clients à tourner le volant ». Pascal Bonnefoi, le directeur du segment eau de Schneider Electric, spécialiste de l’efficacité énergétique, résume bien le contexte dans lequel son entreprise évolue. Déjà impliqué dans nombre de projets majeurs tels que le barrage des Trois Gorges ou la dérivation d’eau Sud-Nord, le groupe français a par ailleurs travaillé sur plus de 500 réalisations références locales. Et les perspectives de développement restent bonnes. Car souvent en Chine, de nombreuses lacunes touchent les installations de traitement, de pompage et de transport de l’eau. « Les gens pensent qu’un changement des équipements lourds est 74 Connexions / octobre 2010

la clef pour réaliser des économies. Mais selon nous, celles-ci exigent d’abord une amélioration des équipements légers et de la gestion. », résume Feng Jun, spécialiste du marché de l’eau et des eaux usées en Chine pour Schneider Electric. La première étape consiste à réaliser un audit des installations qui permet d’identifier les aspects sur lesquels le rendement énergétique peut être amélioré. « Puis nous proposons des solutions détaillées aux clients. Nos équipes techniques vont alors sur place pour les installer. Enfin, nous effectuons un suivi dans la durée. Ces améliorations permettent en général à nos clients des économies de 10 à 30 %. ». Parfois, il suffit de faire preuve de simple bon sens, la priorité étant la lutte contre le

gaspillage. Cela peut commencer par des choses très simples comme la réparation des fuites. Et de telles déficiences se retrouvent parfois à grande échelle. Ainsi, l’eau qui sort des usines de traitement de Pékin répond aux standards de qualité en vigueur. Mais à cause de l’état de vétusté du réseau de canalisations, lorsqu’elle sort du robinet, ce n’est plus le cas... Pour autant, le plus souvent, les solutions apportées sont beaucoup plus techniques. C’est le cas de l’installation des moteurs électriques à très haute efficacité, ou des appareils électroniques tels que les variateurs de vitesse pour les pompes ou les aérateurs, qui permettent d’ajuster très efficacement les débits en fonction de la demande et des étapes du cycle de trai-


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L’eau 水

Chantier du canal de dérivation Sud-Nord à Zhengzhou (Henan).

南水北调工地河南郑州段

tement. Appliquées à des vastes installations, ces techniques et méthodes d’optimisation ont un impact de poids. Ainsi, sur le site pétrochimique de Yanshan, le client, désireux de faire des économies, avait demandé à Schneider Electric d’évaluer sa consommation énergétique. Après avoir renforcé les capacités du système de contrôle et modernisé l’organisation de la gestion, leurs usines de traitement des eaux usées ont allégé leur facture électrique de 450 000 Rmb par an et réduit leurs émissions de CO2 de 700 T/an. De telles performances expliquent sans doute l’optimisme de Pascal Bonnefoi, qui prédit que le groupe français a encore « une énorme marge de progression, en particulier dans les villes reculées de Chine. ».

施耐德电气为水能关系服务 常识与技术用于卓越管理

型设备和管理。”施耐德电气中国水和

Manuel Rambaud

“中国的水资源市场正处在转型期:

识开始的。首要任务是反对浪费,可以

我们帮助客户调转方向盘。”全球能效

从防水补漏这样简单的事情做起。”类

管理专家施耐德电气全球水行业总监

似的缺陷往往比比皆是。国际环境管

Pascal Bonnefoi谈到公司发展所处的大

理硕士后项目的学生Josepha

环境时这样总结。这家法国集团参与了

出: “从北京水处理厂流出的水符合现

三峡和南水北调等重大工程,并且致力

行的水质标准。但由于管道老化,当水

于500多个地方示范性项目。

从水龙头里流出时已经不达标了……”

发展前景仍然向好。因为中国在水处

然而,解决方案往往更有技术含量。

理、泵送、传输设施方面还存在诸多不

比如安装非常高效的电机或水泵变速器

足。 “人们认为重型设备的更换是节能

之类的电气元件,它们可以根据循环水

的关键。但我们认为,首先需要改进轻

处理的步骤更加有效地调节流量。

污水市场专家冯俊说道。

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Shu指

这些优化技术和方法被广泛运用并 产生重要的影响。我们的客户燕山石化

第一步是对设施进行审计,找到可以

希望能够节约能源,曾要求施耐德电气

进一步提高能源利用效率的地方。 “然

对其能源消耗进行评估。在提高控制系

后我们向客户提供详细的解决方案。

统的能力和实现管理体系的现代化之

然后,我们的技术团队会到现场安装设

后,他们的污水处理厂每年节约45万元

备。最后,我们将进行长期跟踪。这些

电费并减少二氧化碳排放700吨。这样

改进措施一般能为客户节约10%到30%

的表现无疑解释了Pascal Bonnefoi的乐

的能源。”

观态度,他预计施耐德还有“巨大的发

有时,这么专业的内容是从简单的常

展空间,尤其是在中国的偏远城镇。”

octobre 2010 / Connexions 75


DOSSIER

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专栏

Expérimentation sur le traitement de l’eau au parc pétro-chimique de Shanghai (SCIP).

在上海化学工业区进行的水处理试验

Le traitement des eaux industrielles Au parc chimique de Shanghai, Suez Environnement retraite quelques-unes des eaux les plus polluées du monde. En s’associant dès ses débuts avec le SCIP, le parc pétrochimique de Shanghai, Suez Environnement s’est offert une vitrine technologique sur la Chine. C’était en 2002, alors que la zone de 30 km² qui accueille aujourd’hui le parc était encore en friche, l’entreprise française avait alors remporté un important contrat d’un investissement initial de 95 millions de dollars pour gérer la production d’eau industrielle ainsi que le traitement des effluents pollués des industriels de l’ensemble de la zone pendant 50 ans. Pour l’occasion, Suez Environnement a créé une structure mixte, la Shanghai Chemical Industry Park Sino French Water Development Co. Ltd. (SCIP SFWD) co enterprise entre le parc et la JV eau de Suez Environnement en Chine. 76 Connexions / octobre 2010

Une vitrine de l’innovation « Nous avons pu installer un système innovant : les eaux sont collectées via quinze tuyaux différents partant des usines de chacun de nos clients», explique JeanPierre Arcangeli, aujourd’hui directeur de l’assemblage franco-chinois SCIP SFWD. Dans la station d’épuration, trois lignes traitent les eaux usées selon leur niveau de pollution, lorsque des effluents sont trop toxiques, ils sont immédiatement dirigés vers des réservoirs d’urgence d’une capacité de 25 000 m3. Leur contenu est analysé puis réintroduit dans le flux de dépollution standard. Face à la mer, sur la baie de Hangzhou, le SCIP est le plus important parc pétrochimique de Chine, le second en Asie, il ras-

semble les plus grands de la pétrochimie mondiale comme BASF, BAYER, Sinopec, Air liquide et représente 7% du PNB total de Shanghai. On imagine donc l’importance du projet. Né d’une décision du gouvernement central, le SCIP a été imaginé comme un site exemplaire dont le fonctionnement pourrait être dupliqué à travers le pays. Exemple d’économie circulaire, chaque usine produit des composants chimiques utilisés par les usines voisines ; exemple de hautes technologies, y compris dans le traitement des eaux usées. Suez Environnement y utilise en effet ses méthodes de pointe pour traiter 50 000 m3 d’eau très lourdement polluée chaque jour. A savoir, les normes de rejet en Chine sont plus strictes que les normes européennes


L’eau 水 qui acceptent 125mg/l de DCO (demande chimique en oxygène), alors que Pékin ne tolère que 100 mg/l. Un système de pointe Jean-Pierre Arcangeli insiste sur la fiabilité du système. Toutes les eaux qui sortent de la station passent par un petit bâtiment cubique d’apparence anodine. C’est ici qu’est analysée 24h/24 et transmise en temps réel la qualité de l’eau au Service Environnement de la ville de Shanghai. L’entreprise française a aussi installé un centre de R&D au sein de cette station en association avec les universités Tongji et la East China University of Science and Technology. Le Français a investi 10 millions de yuans dans cette structure. « L’usine offre un terrain inédit, on se prépare aussi ici à des purifications encore plus poussées au cas où les seuils soient abaissés », explique Qu Xian, responsable du laboratoire. Le jeune chercheur a fait son doctorat en France au prestigieux Cemagref. Au sein de l’usine de retraitement de Suez Environnement, il continue ses recherches sur l’ultrafiltration, les technologies membranaires ; pour le groupe, ce partenariat est l’un des fleurons de son réseau de recherche. Le centre R&D a permis à Suez Environnement de réutiliser une partie de l’eau retraitée en eau déminéralisée, très utile dans les industries chimiques. Une ligne de production en fonctionnement depuis 2009 fournit les usines du parc. Qiu et ses collègues en blouses blanches imaginent d’autres usages des eaux traitées et des déchets, encore faut-il que les procédés soient écologiquement viables, « si par exemple un nouveau type de traitement qui produit une eau plus pure utilise plus d’énergie qu’il n’en faudrait, cela annule le bénéfice, nous n’avons pas d’intérêt à recycler pour recycler » explique le chercheur. Emilie Torgemen

工业污水处理 苏伊士环境为上海化学工业 园处理一些世界上污染最严 重的水 苏伊士环境从上海化学工业区建立 伊始就与其合作,获得了向中国展示技术

范例,包括在污水处理领域。 苏伊士环境在上海化工区运用尖端 技术日处理5万立方米污染非常严重的 水。要知道中国的废物污染控制标准比欧 洲更为严格。欧洲的标准是125毫克的化 学需氧量,而中国仅为100毫克。 尖端的系统

优势的窗口。2002年,上海化工区所在的

Jean-Pierre Arcangeli再三强调了系统

30平方公里的区域还是一片荒地,这家法

的可靠性。在离开水站前,所有水源都要

国公司便获得了初始投资额高达9500万

经过一个外观不起眼的正方体建筑。在这

美元的大合同,管理工业用水的生产以及

里,水质受到24小时全天候分析,并被实

整个工业园为期50年的工业污水处理。为

时传给上海市环保局。

此,苏伊士环境成立了上海化学工业区中

苏伊士环境还与上海同济大学、华东

法水务发展有限公司,这是上海化学工业

理工大学合作在水站建立了一个研发中

区与苏伊士环境在华合资企业中法水务

心,总投资额达到1000万人民币。 “工厂

共同成立的公司。

提供了前所未有的平台,我们还准备在水

创新的窗口

研究中心开发更先进的净化技术,如果

“我们安装了一个创新的系统,通

标准进一步下调的话。”该实验室负责人

过15条不同的管道从我们每个客户的工

瞿贤(音译)解释说。这位年轻的科研人

厂收集污水。”上海化学工业区中法水

员在法国著名的农业与环境工程研究院

务发展有限公司生产线经理Jean-Pierre

(Cemagref)完成了博士学位,并在苏伊

Arcangeli解释说。在净水站里,3条生产

士环境的水处理厂继续他在超滤法、膜

线根据污水的污染程度进行处理。当污

技术方面的研究。对苏伊士环境集团而

水的毒性太高时,它们立即被导入一个容

言,这家合作建立的研发机构是其研发网

积为25000立方米的紧急蓄水池内进行成

络中的翘楚之一。

分分析,然后再被重新导入标准去污水流 中。

水研究中心使苏伊士环境能够对一 部分经过脱盐处理的水进行再利用,它们

面朝大海、地处杭州湾北岸的上海

在化工行业中非常有用。自2009年起投产

化学工业区是中国最大、亚洲第二大化工

的一条生产线为园区的工厂提供这种经

区,已经吸引了巴斯夫、拜尔、中国石化、

过脱盐处理的水。身着实验室工作服的瞿

液化空气集团等全球最大的化工企业,占

贤和他的同事们还设想了处理过的水和

上海市国民生产总值的7%。由此可以想象

废物的其他用途,这些工艺还需要在环保

这个项目的重要性。上海化学工业区由中

方面具备可行性。 “如果一种新的处理方

央决定建立,把它设想为一个示范基地,

法可以生产出更纯净的水,但需要耗费更

其运作模式将会推广到全国。它既提供了

多的能源,如此一来,好处就抵消了。我

循环经济的范例,每个工厂所产生的化学

们不是为了循环利用而再循环的。”瞿贤

成分都被邻厂再利用,又提供了高科技的

解释说。

Le cycle de l’eau par Suez Environnement

© Jean-Marie Lagnel et Suez Environnement octobre 2010 / Connexions 77


DOSSIER

专栏

EDF et l’hydroélectrique en Chine

© Imagine China

En Chine, peu d’espace est laissé aux entreprises étrangères sur le marché de l’hydroélectrique. « Aujourd’hui, il y a une grande maturité de l’industrie hydraulique chinoise et on y voit peu d’autres intervenants » explique Martin Leys, directeur Ressources Humaines et Communication pour EDF en Asie-Pacifique. Le niveau d’expertise domestique s’élève constamment et permet à la Chine de construire des centrales et barrages dans les autres pays, notamment en Afrique et Asie du Sud. EDF, qui est l’un des acteurs majeurs dans l’hydroélectrique mondial, exploite en Chine surtout ses compétences techniques. « Notre Centre d’Ingénierie Hydraulique (CIH) a toujours été consulté par la Chine. En lien avec la direction AsiePacifique, EDF, qui a construit tous les grands barrages français, a été consultée sur la plupart des installations hydrauliques chinoises ». Les équipes du CIH ont participé en tant qu’expert technique aux études de la plupart des projets de barrages, notamment ceux de stations de pompage-turbinage (STEP). EDF a également été appelée avec le Bureau Veritas dans les années 1990 par le gouvernement chinois lors de la construction du barrage des Trois Gorges pour superviser la fabrication des turbines et des transformateurs. Actuellement le groupe travaille avec ses homologues chinois sur des projets de contrôle commande centralisé par vallée afin d’optimiser la valeur de l’eau à la fois pour la production d’électricité, la navigation et l’irrigation ainsi que dans les projets de benchmark pour l’amélioration de la performance A. C. de gestion des centrales.

Le barrage des Trois Gorges mis à l’épreuve durant les crues spectaculaires de l’été 2010. 今年夏天,三峡大坝经受特大洪水考验

Hydroélectricité, les yeux dans le bleu

© Imagine China

La Chine se tourne de plus en plus vers la solution de l’eau pour assurer son approvisionnement électrique.

78 Connexions / octobre 2010

La croissance chinoise à deux chiffres des dix dernières années n’a été modérée que par la crise économique mondiale. Une telle puissance de production nécessite inévitablement un gigantesque besoin d’énergie. Aujourd’hui, Pékin ravitaille son moteur économique principalement grâce au charbon, une ressource qui arrive à satisfaire 70% des besoins énergétiques du pays. Toutefois, à Copenhague, Pékin s’est engagée à produire 15% de son énergie à partir de ressources non-fossiles. Les autorités se sont ainsi tournées vers la nature pour exploiter l’immense potentiel hydraulique du pays : la Chine compte parmi les rivières les plus longues du monde… Elle peut alors aisément annoncer vouloir augmenter de 90% sa capacité hydroélectrique installée, afin d’arriver à produire en 2020 quelques 380 millions de kW d’énergie.

La première puissance hydroélectrique du monde La Chine a le potentiel pour devenir un géant de l’énergie hydroélectrique, puisqu’ elle dispose d’un sixième des ressources de la planète. Le défi est de pouvoir transformer cette richesse en énergie électrique. Les experts estiment que le pays est doté d’un potentiel de 542 millions de kW exploitables par voie hydroélectrique, il s’agit du plus grand potentiel du monde, bien plus important que les 25 GW de capacité de la France ou que les 95 GW déjà produits chaque année par les Etats-Unis. La plupart des installations hydroélectriques sont adossées à un barrage construit le long des rivières, afin de pouvoir stoker l’eau nécessaire à la production. L’eau est alors utilisée pour faire tourner une turbine et ensuite un générateur d’électricité. L’énergie ainsi générée est alors appelée


L’eau 水 Alstom, un acteur majeur du marché Avec 20% du marché chinois de l’hydroélectrique, Tianjin Alstom Hydro (TAH), JV fondée il y a 14 ans, est un acteur majeur dans l’Empire du milieu. Les usines sont capables de produire des turbines géantes allant jusqu’à 1 000 MW et fourniront quatre turbines/générateurs de 800 MW pour le barrage de Xiangjiaba,

hydroélectricité. Aujourd’hui elle ne participe que pour 15 à 16% de la production énergétique annuelle de la Chine, d’après le Conseil Mondial de l’Energie, mais une vague d’investissements pulics s’apprête à renverser la tendance. « Un grand nombre de nouvelles centrales est en construction aujourd’hui », explique M. Zhang Jinzhu, le responsable international de la centrale de stockage de Zhanghewen dans le Hebei qui approvisionne en énergie une grande partie de cette province. La centrale de Zhanghewen est entrée en fonctionnement l’année dernière grâce aux investissements de Hebei Electric Power Corporation et Hebei Construction and Investment Corporation, deux entreprises du secteur public de la région. Le rôle d’une centrale de stockage est essentiellement d’assurer l’intégration du réseau électrique et de répondre aux besoins lors des pics de demandes et dans les situations d’urgence. Les pompes de stockages sont une étape très importante dans le processus de production d’hydroélectricité car elles permettent d’emmagasiner une grande quantité d’énergie pour éviter le gaspillage et optimiser l’approvisionnement. Actuellement la Chine dispose de 8 300 MW de capacité de stockage, mais les investissements déployés dans ce domaine vont accroître ce chiffre de 7 600 MW dans les prochaines années. Selon M. Zhang, il existe aujourd’hui 6 à 8 pompes semblable à celle de Zhanghewen dans le pays, et de nouvelles sont en construction. Des projets géants pour un marché d’avenir Un cap a été passé par la Chine dans le secteur de l’hydroélectricité en 2009 avec la mise en service terminale du barrage des Trois Gorges, la plus grande centrale du monde. Malgré les polémiques, après 17 ans de travaux, le complexe de Trois Gorges

les plus grandes unités jamais livrées au monde. La production n’est pas uniquement destinée au marché local mais vise l’international comme au Vietnam où TAH fournira tout l’équipement électromécanique du barrage de Son La, le plus grand du SudEst asiatique. Nicolas Sridi

a modifié le paysage énergétique chinois, en raison des dimensions, de son potentiel et des risques qu’il engendre. Constitué d’un barrage, de structures de prévention des inondations, et de centrales électriques, le complexe est capable de produire 22 500 MW par an qui ravitaillent neuf provinces et deux villes du centre de la Chine, dont la mégapole de Shanghai. Ce géant, quand il tournera à plein régime à partir de 2011, contribuera à faire baisser la consommation de charbon de 30 millions de tonnes par an en réduisant ainsi les émissions de CO2 qui en découlent. Un deuxième grand projet vient de s’achever : la station de Xiaowan, dans le Yunnan, qui travaille à plein régime depuis août dernier, avec une capacité installée de 4,2 millions de KW. Grâce à l’investissement de 5,8 millions de dollars la station produira 19 milliards de KWh par an. Parallèlement à la construction des grands projets, la Chine montre une réelle volonté d’accroître de rentabiliser le secteur de l’hydroélectrique. Actuellement, selon l’Administration Nationale pour l’Energie , 70 millions de KW de capacité installée sont en construction. Les nouvelles centrales seront installées sur les cours d’eau du Sud du pays comme les fleuves et rivières Lancang, Jinsha, Yalong, Minjiang, Dadu… Le fleuve Dadu est même censé posséder un potentiel de 50% plus élevé que le barrage des Trois Gorges… Une fois les infrastructures réalisées, le pays pourra ainsi réduire sa dépendance au charbon et ses dommages collatéraux en terme de pollution et de risques sanitaires, ou au pétrole, ressource liée à des enjeux internationaux lourds. Les investissements dans le secteur sont pour la plupart gouvernementaux et proviennent des entreprises publiques, même si de plus en plus d’opportunités s’ouvrent aux entreprises étrangères. Parmi

les principaux acteurs nationaux, Huaneng Group qui possède une capacité installée en énergies renouvelables de 15,75 GW. La compagnie Datang Co, possède elle une capacité installée de 14,08 GW, qui la place au même niveau que Huadian Power et Guodian Co. Ces entreprises gèrent de facto de manière monopolistique les plus grands projets du pays, comme Xiaowan (Huaneng) ou Longtan (Datang). Les investisseurs étrangers sont toutefois favorisés dans le développement des structures de petite échelle et localisés dans des zones moins développées. Le gouvernement chinois, mise en effet sur des centrales de petite et moyenne taille pour promouvoir et développer les énergies propres à travers tout le pays. Les investissements étrangers sont encouragés car ils ne privent pas l’industrie locale de parts de marché importantes. Les acteurs internationaux d’envergure tels qu’EDF Alstom ou GE, pour le moment relégués aux études de faisabilité des barrages ou la vente de services et composants mécaniques, espèrent ainsi percer le marché chinois. Le défi de la durabilité Bien que l’énergie hydroélectrique s’avère la solution la plus appropriée au dilemme de l’énergie en Chine, les activistes environnementaux doutent néanmoins de la rationnalité de ce choix. Des risques majeurs sont associés à la construction de barrages et de stations hydroélectriques : délocalisation de millions de familles, constructions sauvages en proximité des zones naturelles protégées, risque de glissements de terrain et menace sur la biodiversité. Les risques et conséquences de ces projets sont à l’échelle du pays et leur réussite passera par la capacité du gouvernement à les anticiper et les gérer de manière durable.

Antonia Cimini

octobre 2010 / Connexions 79


DOSSIER

La petite centrale hydroélectrique de Goupitan au Guizhou.

© Imagine China

专栏

贵州构皮滩小水电站

Agence Française de Développement

La petite hydroélectricité, à la croisée des politiques climat et de développement rural durable Philippe Percheron est responsable du pôle Energies renouvelables et Efficacité énergétique de l’Agence Française de Développement (AFD) à Pékin, il nous apporte un retour d’expérience sur les projets de petite hydroélectricité soutenus par l’AFD en Chine.

Connexions : Pourriez-vous nous rappeler en quoi consistent les petites centrales hydroélectriques et quels en sont les principaux avantages ? Philippe Percheron : Les petites centrales hydroélectriques (PCH) qualifient les centrales de 10 à 50 MW (définitions variables), par opposition aux mini- et grandes centrales. Les projets de PCH, à la croisée des politiques Climat et de développement rural durable, sont à fonctions multiples : ils ont largement contribué à l’électrification « propre » et bon marché du monde rural et, plus globalement, à l’amélioration du 80 Connexions / octobre 2010

mix énergétique chinois. A cela s’ajoutent les fonctions d’irrigation, de prévention des inondations, d’alimentation en eau potable et la création d’emplois et de richesses.

C. : Quel est l’état de ce secteur en Chine et quelles en sont les perspectives de développement ? P. P. : Grâce au soutien des politiques incitatives du gouvernement, le secteur chinois des PCH représente, avec plus de 40 000 unités, le tiers des ressources hydroélectriques nationales (1er parc mondial). Les statistiques du Mécanisme de Développement Propre donnent par exemple une image de la vitalité de ces projets en Chine. Après le charbon, la « houille blanche » occupe la deuxième place dans le mix énergétique national. La petite hydroélectricité est donc un sujet majeur et s’inscrit dans l’objectif gouvernemental d’augmentation des capacités hydroélectriques à installer d’ici 2020 (soit 300 GW). Non seulement le potentiel à exploiter reste important, mais les projets de réhabilitation vont

s’accroissant compte tenu de la vétusté du parc existant.

C. : L’AFD et sa filiale Proparco ont financé en Chine trois projets de petite hydroélectricité, pour quelles raisons soutiennent-elles ce type de programme ? P. P. : L’AFD accompagne depuis les années 80 de nombreux projets de barrage en Afrique, avec comme en Chine, le souci d’accompagner les politiques publiques et de renforcer la maîtrise d’ouvrage. Ces projets de PCH en Chine ont été octroyés entre 2005 et 2007, conformément au mandat climat de l’AFD, et croisent une volonté du gouvernement chinois de recourir à des financements de bailleurs étrangers et leurs expertises. Il s’agit d’une part d’améliorer la maîtrise d’ouvrage (gestion de projet, maîtrise des risques environnementaux et sociaux…), et d’autre part d’apporter des financements adaptés à ces projets difficiles en zone rurale isolée. Ces projets cofinancés par l’AFD se traduisent par la construction/ réhabilitation d’une douzaine d’ouvrages,


L’eau 水 essentiellement des petits barrages au filde-l’eau et la construction de centrales associées. Ils permettront d’éviter l’émission d’environ 900 000 tonnes de CO2 par an. Se situant dans des zones géographiques à haut niveau de coopération franco-chinoise (Yunnan, Hubei, Chongqing), ils peuvent offrir des opportunités intéressantes de coopération multiformes (des turbines au montage MDP en passant par de la consultance). Un appui important est d’ailleurs déjà apporté par des bureaux d’études français de renommée internationale dès les études de faisabilité et le début de la conception. Par ailleurs, l’AFD a développé autour des PCH une première coopération trilatérale France-Chine-Afrique en participant à des programmes de formation de cadres africains en Chine.

Propos recueillis par Flore Coppin

Bibliographie

Atlas mondial de l’eau. De l’eau pour tous ?, David Blanchon, Autrement, 2009 L’eau, facteur d’instabilité en Chine – Perspectives pour 2015 et 2030, Alexandre Taithe, Fondation pour la Recherche Stratégique, 2007 Un enjeu hydropolitique et environnemental majeur pour la Chine : le transfert Sud-Nord, Jean-Paul Bravard, Hérodote, n° 102 : Géopolitique de l’eau, 2001

Webographie

Addressing China’s Water Scarcity Recommendations for Selected Water Resource Management Issues, Rapport de la Banque Mondiale, www-wds.worldbank.org Données de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture sur la Chine, www. fao.org/nr/water/aquastat/countries/ china/index.stm Géopolitique de l’eau en Chine, Franck Galland, « Monde chinois », n°15 automne 2008, p. 7-19.  http://www.diploweb.com Les impacts du changement climatique sur les ressources en eau de la Chine, Fabien Dupuis, octobre 2009, http://www.affaires-strategiques.info

法国开发署:小水电,介于气候政策和农 村可持续发展的“交叉点” 白鸿飞(Philippe Percheron)

会增加。

是法国开发署(AFD)驻华代表处

《联结》:法国开发署及其子公

可再生能源和能效部门负责人,他

司经合促 进公司(Proparco)在

向我们回顾了法国开发署在中国支

中国资助了三个小水电项目,为

持小型水电站项目的经验。

什么他们要支持这类项目呢?

《联结》:您能否再告诉我们一

白 鸿 飞 :法国开发署自上世 纪

下什么 是小型水电站以及它们

80年代以来在非洲参与了多个水坝

的主要优点有哪些?

建设项目,像在中国一样,都是出

白鸿飞:小型水电站不同于微型

于协助公共发展政策、加强工程

和大型水电站,是指装机容量在

监管的考虑。中国的这些小水电站

10-50兆瓦(可变概念)的水电站。

项目是在2005-2007年间依据法国

小水电项目介于气候政策和农村可

开发署的气候委托书被批准的,符

持续发展的“交叉点”,具备多种

合中国政府使用外国资金和专业

功能:为农村“清洁”、低价的电气

经验的想法。一方面需要改善工程

化作出了巨大贡献,更广泛地说,

监管(项目管理,环境和社会风险

为中国能源消费结构的改善作出了

控制等),另一方面要为这些偏远

贡献。除此之外,还有灌溉、预防

农村地区难度很大的项目提供合

洪涝灾害、提供饮用水以及创造就

适的资金。这些由法国开发署参与

业和致富的功能。

资助的项目包括12个建设/改造工

《联结》:中国小型水电站的现

程,主要是河流之上的小水坝及配

状及发展前景如何?

套水电站的建设,每年可减少大约

白鸿飞:得益于政府鼓励政策的

90万吨二氧化碳排放量。

支持,中国小型水电站共有4万多

这些项目地处中法合作高度

座,占全国水电资源的1/3(总量为

集中的地区(云南、湖北和重庆),

世界第一)。例如清洁发展机制的

能够带来多种形式有价值的合作

统计显示,小水电项目在中国富有

机会(从涡轮机到清洁发展机制

活力。 “瀑布水能”排在煤炭之后,

项目的实施、工程咨询)。在可行

在中国的能源消费结构中占据第

性研究和设计阶段,一些国际知

二位。因此小水电成为一个重大议

名的法国研究机构已经给予了重

题,并被列入政府提高水电装机容

要支持。另外,法国开发署还围绕

量的目标,到2020年须达到3亿千

着小型水电站开展法中非三方首

瓦。不仅开发潜力巨大,而且由于

次合作,参与了非洲干部在中国的

现有水电站老化破旧,改造工程也

培训项目。

• octobre 2010 / Connexions 81


DOSSIER

专栏

De l’eau pour vivre

En Chine, encore 300 millions de ruraux n’auraient pas accès à l’eau potable 中国仍有3亿农民 喝不上符合标准

© Imagine China

的饮用水。

L’eau usuelle en Chine : un défi majeur Les problèmes liés à l’eau auxquels la Chine doit faire face à l’échelle nationale se trouvent concentrés à l’échelle locale et urbaine. La croissance urbaine chinoise alimentée en partie par l’exode rural et la croissance intrinsèque devrait accroître considérablement les tensions liées à l’accès à l’eau potable pour les ménages et l’utilisation des ressources. Si au vu des chiffres nationaux, la Chine paraît bien pourvue en ressources hydriques, à l’échelle d’un territoire aussi gigantesque, cela cache pourtant un déséquilibre majeur. Alors que le sud, avec 58% de la population, dispose d’environ 3353m3 par habitant, le stress hydrique est en fait très fort dans la partie nord de la Chine qui abrite quasiment 45% de la population,

82 Connexions / octobre 2010

mais n’a accès qu’à 20% des ressources en eau, soit 1127 m3 par habitant. Ces dernières années, environ 400 des 669 villes de plus de 100 000 habitants font face à des pénuries qui s’accroissent pendant la période d’été, 108 se trouveraient dans un état de pénurie avancé et 164 ont déjà été obligées de mettre en place des limitations. Le cas du Nord de la Chine Pékin et la plaine de la Huai constituent un cas exemplaire des problèmes d’accès à l’eau en zone de fort peuplement. La municipalité de Pékin revendi-

que aujourd’hui une population de 20 millions d’habitants mais la disponibilité par habitant n’excède pas 500 m3 par an en moyenne dans la plaine du Nord alors que le minimum fixé par la FAO s’établit à 1000 m3/an et atteint seulement 300m3 à Pékin, dont uniquement 128 m3 en eau renouvelable. Dans ces espaces, l’augmentation du nombre des ménages et le développement fulgurant de l’activité urbaine fortement consommatrice d’eau a poussé à une surexploitation des nappes souterraines, qui représentaient 20% de la consommation nationale en 2003, mais 75% de la consommation pékinoise. Cette utilisation abusive des réserves non renouvelables va jusqu’à entraîner des phénomènes de subsidence du sol notamment dans la province du Hebei autour de Pékin (Shijiazhuang) et dans la capitale elle-même, où l’affaissement atteindrait 20 mm/an1. Les faibles ressources hydriques dans les zones les plus peuplées du Nord et de l’Ouest et les tensions sur la consommation, imposent à la Chine de prendre des


L’eau 水 mesures décisives pour éviter une pénurie généralisée qui pourrait porter préjudice à sa croissance économique. L’urgence d’agir et l’ampleur de la tâche à accomplir ont été soulignées par le rapport de la Banque mondiale sur l’eau2 pour assurer un accès suffisant à cette ressource vitale pour les décennies à venir et les différentes administrations chinoises en charge (ministère des Ressources en eau3, SEPA, ministère de la Construction) ont toutes établi des plans de gestion et d’aménagement. Outre les grands projets de détournement des eaux du Yangzi et des réservoirs du Hebei vers la capitale pour augmenter la disponibilité, des mesures d’économie et d’efficience de l’utilisation s’imposent pour assurer une limitation de la consommation. Limiter le gaspillage L’amélioration de la gestion de l’eau apparaît comme un des objectifs majeurs dans ce domaine. Les pertes dans la consommation domestique sont dues principalement à la vétusté du réseau de distribution publique qui est en cours de renouvellement (en plomb), tout comme à celle des installations domestiques. Le faible coût de l’eau dans l’ensemble de la Chine explique par ailleurs le peu de cas que font les industries, les agriculteurs et les particuliers de leur consommation d’eau. L’augmentation du prix est donc devenu un levier majeur sur lequel les autorités

locales peuvent jouer pour limiter le gaspillage. A Pékin la tendance a déjà été amorcée avec des augmentations successives depuis août 2004 où le prix de l’eau domestique est passé de 3,7 Rmb/m3 à 4,6 Rmb/m3 aujourd’hui. L’augmentation du prix est un élément délicat à gérer pour les autorités mais elle est pourtant vue comme inévitable tant le coût actuel est inférieur à celui des coûts d’exploitation et de distribution. Mais toutes les villes n’ont pas encore fait ce choix, la gestion étant laissée à l’échelle locale. Améliorer la qualité et le traitement L’un des chantiers auxquels est confronté le pays est également de distribuer une eau potable, notamment dans les zones rurales4 car la moitié de la population chinoise boirait une eau non conforme aux standards de potabilité. Une étude menée par le ministère de la Construction en 2009 montre que 41% des zones rurales ne disposent pas de système d’alimentation en eau centralisée et 96% n’ont pas de système d’évacuation ni de traitement des eaux usées. Le volet eau du plan de relance prévoit le développement des stations d’eau potable et des systèmes d’irrigation en milieu rural, selon un rapport récent Bureau National d’Audit, au total, 22 000 projets ont été réalisés dans le cadre du plan de relance et 14 386 800 personnes rurales supplémentaires ont accès à l’eau propre.

Prix moyens de l’eau – tarifs domestiques – dans les grandes villes Prix moyens de l’eau – tarifs domestiques – dans les grandes villes du monde* du monde* et dans une sélection de 5 villes chinoises** et dans une sélection de 5 villes chinoises**

Johannesbourg Hong Kong Sau Paulo Singapour Tokyo Sydney Paris Vienne Londres Urumqi Shanghai Chengdu Canton Pékin

Villes chinoises sélectionnées

0.0

0.5

1.0

1.5

Parallèlement à l’augmentation de la consommation se pose le problème de l’épuration des eaux usées et de la pollution des ressources en eau, qu’il s’agisse des fleuves ou même des nappes souterraines. De nombreux projets ont été mis en place depuis dix ans, mais leur nombre reste insuffisant et beaucoup n’apportent pas l’efficacité escomptée.. La SEPA indique qu’en 2004, seules 40% des villes possédaient des stations d’épuration mais cette administration s’était fixé comme objectif un taux de recyclage de 70% pour la fin 2010. Un nécessaire recours aux sociétés étrangères L’offre technologique chinoise n’étant pas suffisante, les autorités ont dû faire appel à des entreprises étrangères telles que Veolia, Suez Environnement ou Sogreah, ce qui ne manque pas de provoquer des réactions dans la presse chinoise. L’affermage de la distribution même s’il est indispensable, est ressenti comme une abdication de souveraineté et soulève en particulier des craintes quand à l’augmentation du prix de l’eau5. Le modèle français de gestion de l’eau est prisé par les Chinois et les grandes entreprises ont devant elles un champ de possibilités gigantesque. Leur expérience avérée leur confère un avantage indiscutable dans cette grande bataille pour l’exploitation, le traitement et l’amélioration de la fourniture d’eau urbaine en particulier. La Banque Mondiale a renouvelé, dans une note récente6, les avantages que représente pour les grands pays émergents comme le Brésil ou la Chine le fait de concessionner le traitement, la vente et la distribution de l’eau malgré les réticences qui peuvent être engendrées. Compte tenu du gigantisme du territoire et des difficultés pour la Chine à financer seul un nombre d’infrastructures suffisant, cette option paraît incontournable si elle veut répondre à un défi d’une telle ampleur.

2.0

US$ par mètre cube d’eau. *en 2007, ** en 2009 Source : International Water Association, China Water.net, Responsible Research.

2.5

David Gourhan

1. Zongxia Cai, « Les ressources en eau et leur gestion en Chine », Géocarrefour, Vol 79/1, 2004. 2. http://www.worldbank.org/cn 3. http://www.mwr.gov.cn/english/200701.pdf 4. L’eau, facteur d’instabilité en Chine- Perspectives pour 2015 et 2030, Alexandre Taithe, Fondation pour la Recherche Stratégique, 2007. 5. http://www.qz828.com/dis/system/2009/07/22/010140407. shtml 6. http://go.worldbank.org/G9TPQEC3A0

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DOSSIER

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专栏

Une station d’épuration des eaux à Huabei (Anhui).

安徽淮北一净水站

Les aspects juridiques de l’accès au marché de l’eau en Chine Nadine Ganesan est avocate au Barreau du Québec et travaille depuis 6 ans au bureau pékinois du cabinet Gide Loyrette Nouel. Très active dans le secteur des services publics, elle est co-auteur avec son collègue Stéphane Vernay d’une note spécialisée sur le marché de l’eau en Chine1. Connexions : Quel est le cadre juridique qui entoure aujourd’hui l’accès au marché de l’eau en Chine pour les investissements étrangers ? Nadine Ganesan : Tout d’abord, il convient de distinguer les marchés privés des marchés publics. Un projet portant sur le retraitement d’eaux industrielles pour un client industriel ne sera pas soumis au même cadre réglementaire qu’un projet portant sur le traitement et/ou la distribution de l’eau

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pour une municipalité. Dans le premier cas, un contrat commercial peut être conclu de gré à gré alors que cela n’est généralement pas possible dans le deuxième cas au regard des règles plus complexes applicables aux marchés publics. Il faut d’abord savoir que le Catalogue pour l’Orientation des Investissements Etrangers encourage et restreint à la fois l’entrée de capitaux étrangers dans les services publics de l’eau. Alors que le traitement de

l’eau en amont et en aval est encouragé, la construction et l’exploitation des réseaux de distribution d’eau sont restreints car jugées stratégiques par l’Etat2. Concrètement, cela veut dire qu’une société à investissement étranger détenue à 100% par des capitaux étrangers peut détenir et exploiter une station d’épuration d’eau alors que la construction et la gestion d’un réseau de distribution d’eau potable ne peuvent, sauf exception dans certaines régions de


L’eau 水 la Chine, être assurés que par des sociétés une dose d’incertitude quant à la possibilité purement domestiques ou par des sociétés de réaliser certains projets. à investissement étranger dans lesquelles C : Envisagez-vous des évolutions importantes par les partenaires chinois détiennent le con- rapport au cadre légal régissant soit l’accès au trôle effectif. Depuis 2004, des directives na- marché de l’eau soit la mise en œuvre des projets tionales émises par l’ancien ministère de la dans ce secteur ? Construction encadrent l’octroi des projets N.G. : Nous avons vu ces dernières années, en matière de services publics avec notam- quelques évolutions positives au niveau ment l’obligation d’octroyer ces projets par de la réglementation sur l’investissement voie d’appel d’offre et sous forme de con- étranger dans le secteur de l’eau. Ainsi, l’Etat cessions. Ce texte qui peut être considéré a théoriquement ouvert la possibi-lité pour comme un fondement embryonnaire au les investisseurs étrangers de détenir 100% droit des concessions des capitaux dans les sochinois, reste très général « Le secteur de ciétés de projet investies et incomplet et son applinotamment dans la concation à un projet donné l’eau est régi struction et la gestion de est conditionnée à sa par un cadre réseaux de distribution transposition formelle d’eau et ce, dans trois législatif par les autorités locales. provinces du nord-est Dans ces conditions, on complexe en du pays où les besoins travaille vraiment au cas en investissements dans Chine et il faut par cas et devons, en tout ce secteur sont très imétat de cause, contraire- savoir gérer portants. Même si en ment à la pratique en l’incertitude réalité à ce jour, aucun Europe ou en Amérique, opérateur étranger dans détailler les contrats de inhérente à le secteur de l’eau n’a concession au maxi- un droit local pu bénéficier de cet asmum. souplissement, certains La réglementation chi- en pleine investisseurs étrangers noise sur la protection dans d’autres types de construction. » des actifs d’Etat ajoute un services publics ont déjà niveau de complexité additionnel à la mise pu bénéficier de cette mesure, laissant en œuvre des projets dans les services pub- présager des opportunités futures dans le lics dans la mesure où tout transfert de par- secteur de l’eau. ticipations dans une société d’Etat et toute De son côté, les modalités de mise en œuvente d’actifs d’Etat à des intérêts privés vre de la loi anti-monopole sont en cours sont généralement assujetties à une procé- de précision dans le cadre du renforcement dure de mise en concurrence distincte de du droit de la concurrence en Chine. Ces la procédure d’appel d’offre lancée pour évolutions sont positives, plutôt bien acl’octroi d’un projet donné (listing). cueillies et contribuent à progressivement Enfin, l’adoption de la loi anti-monopole en réduire l’incertitude liées à la réalisation 2008 a ajouté une condition importante à la de nombreux projets d’investissement mise en œuvre des projets dans le secteur étranger. de l’eau en Chine dans la mesure où sous Par contre je reste, au regard des faibles réserve de rencontrer un certain nombre développements depuis 2004, plutôt scepde critères financiers - lesquels sont gé- tique sur les évolutions du cadre juridique néralement rencontrés par les opérateurs applicable au régime des concessions internationaux dans le secteur de l’eau - en Chine. L’absence d’évolutions dans ce l’approbation préalable du département de secteur est essentiellement attribuable au la concurrence du Ministère du Commerce fait qu’il n’existe pas en Chine de véritable doit être obtenue pour les investissements droit public et administratif qui puisse serdans le secteur de l’eau. Or, le droit de la vir de fondement à un véritable droit des concurrence chinois étant encore balbu- concessions. Il va donc falloir continuer à tiant et parfois contradictoire, cela rajoute s’appuyer sur le régime hybride existant

et donc, nous continuerons à devoir avoir recours à des contrats de concession très complets et complexes pour protéger au mieux les intérêts de nos clients. Enfin, un autre élément important à mentionner est l’évolution de la tarification de l’eau. Gratuite jusqu’en 1985, l’eau reste aujourd’hui très bon marché en Chine, ce qui explique en partie pourquoi plus de 60% des sociétés de distribution d’eau fonctionnent à perte. La tendance des tarifs à la hausse est soutenue par le gouvernement et un système de tarifs progressifs et différenciés est à l’étude. Il s’agit de pénaliser les gros consommateurs et de mieux refléter les coûts réels de l’eau et de sa distribution. Toute augmentation des tarifs municipaux reste aujourd’hui cependant encore très encadrée et doit, en autre, faire l’objet d’une audience publique.

C : Comment a évolué la manière dont vos clients envisagent des marchés publics très importants comme celui de l’eau ? N.G. : D’une manière générale, les investisseurs étrangers sont aujourd’hui plus prudents en Chine. La ruée vers l’or des 15 dernières années alors que tout était à faire prend fin et les orientations des autorités sont plus claires. Bien que les marchés soient ouverts, il existe, dans le secteur des services publics comme ailleurs, une forte tendance à privilégier les acteurs locaux. Pour l’eau, cela veut dire que les grands groupes internationaux ne sont plus les seuls. Ils sont désormais en concurrence avec des entreprises locales ayant bénéficié de transferts de technologie importants au cours des dernières années et offrant des conditions différentes. La Chine reste toujours très intéressante mais il s’agit d’un marché difficile qu’il faut bien connaître et où règne une incertitude constante. Il est donc logique que nos clients, tant dans le secteur de l’eau que dans d’autres types de services publics, qui sont là depuis longtemps fassent aujourd’hui, l’expérience aidant, preuve de plus de retenue au niveau de leur développement local.

Propos recueillis par Nicolas Sridi

1. « L’eau en Chine », Stéphane Vernay et Nadine Ganesan, Revue Internationale du Droit des Affaires / International Business Law Journal - Juin 2010 / June 2010. 2. A noter que la Constitution chinoise stipule que les ressources naturelles sont propriété de l’Etat et ne peuvent être cédées à personne.

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专栏

Même quand l’eau est conforme aux normes, c’est la qualité des tuyauteries qui pose problème.

就算水符合标准了,管道的质量还有问题。

Comment Suez Environnement apporte l’eau potable aux villes chinoises Boire de l’eau au robinet en Chine n’aurait rien d’une utopie. « L’eau qui sort de nos tuyaux à Chongqing par exemple est potable », assure Alan Thompson, vice-président exécutif de Suez Environnement Chine. Le challenge est que le bout du tuyau n’est pas tout à fait le robinet de la cuisine, mais l’entrée des circuits d’eau des résidences, gérés de façon autonome. « Là, on ne contrôle pas du tout ce qui se passe dans ces tuyaux et certaines pollutions peuvent apparaitre qui détériorent la qualité de l’eau », précise le responsable, qui distingue le réseau primaire, sur la rue, du réseau secondaire, à l’intérieur des complexes résidentiels, commerciaux ou industriels. Deux réseaux sous pression. Une demande en constante augmentation Aujourd’hui, les Chinois utilisent bien moins 86 Connexions / octobre 2010

d’eau que les Européens ou les Américains. eaux sont au sud du pays tandis que 40% La consommation d’eau par tête représente de la population vit dans le Nord. Alors que, à peine deux tiers de celle dans le même temps, le observée en Europe et la « Dans notre gouvernement central moitié de celle aux Etatss’est engagé à garantir Unis. Mais les progres- métier, un plan la livraison d’un mètre sions sont beaucoup quinquennal ne cube d’eau par jour à plus importantes de ce chaque foyer. côté-ci du globe. « La suffit pas. Il faut Le réseau de distribution demande augmente en pouvoir prévoir doit se construire ramoyenne de 14% chaque pidement pour anticiper à quinze, vingt, cette demande chaque année depuis cinq ans », souligne Alan Thompson, cinquante ans ! » jour plus importante alors que la demande a dûe à une forte urbaniplutôt tendance à se rétracter en Europe. sation. « Nous investissons massivement Et la gestion de l’eau est un défi millénaire dans les techniques les plus modernes », en Chine avec une équation simple et en- déclare le responsable de la société francore non résolue : 80% des ressources en çaise. Système de cartes électroniques des


L’eau 水 réseaux, régulation des flux hydrauliques assistée par ordinateur, détection à distance des fuites d’eau… autant de nouvelles techniques, qui permettent à Suez Environnement d’appliquer le nec plus ultra mondial aux réseaux chinois, dans les villes où il intervient comme Chongqing, Tianjin, Changhsu ou Sanya. « La Chine est en train de faire un bond direct vers des systèmes sophistiqués sans avoir besoin des décennies d’élaboration qu’il a fallu en Europe », note Alan Thompson. De l’eau à zéro revenu Pour les fuites d’eau, le Français dispose, par exemple, des dizaines de détecteurs dans les tuyaux qui traquent en permanence le moindre bruit anormal, pouvant révéler une fuite. Le but est d’éviter tout risque de dégradation du réseau mais aussi d’assurer une distribution optimale, sans perte d’eau, aussi appelée « eau à zéro revenu ». Il y a encore quinze ans, cette détection se faisait à la main, en envoyant des experts tapoter régulièrement les conduits pour déceler les fuites. La société conjointe Sino French Water, constituée par Suez Environnement et le groupe hongkongais NWS, est présent dans une vingtaine de villes en Chine, Suez Environnement compte plus de trente contrats de gestion d’eau ou des déchets, eux-mêmes signés en partenariat avec des sociétés publiques chinoises, souvent rattachées aux gouvernements locaux. Ces derniers, portés par une urbanisation galopante en Chine, planifient des développements sans précédent dans les années à venir. Le défi reste cependant entier. Devancer les attentes « Ce que nous voulons faire de plus en plus, c’est surtout proposer un service complet qui couvre l’ensemble de la chaîne, de la récupération de l’eau, au traitement en passant pas la distribution », précise Alan Thompson. Une raison pour laquelle Sino French Water a développé ces trois dernières années des services dédiés aux consommateurs, en partenariat avec les entités publiques avec qui il travaille. « C’était jusqu’alors inexistant et impensable. Face à ce marché en plein boom, nous essayons de devancer les attentes », résume le responsable, conforté par le succès rencontré par cette initiative.

苏伊士环境如何为中国城市提供饮用水 在中国,自来水生饮不再是梦想。 “比 如在重庆,从我们的供水管道里流出的 水是可以饮用的。”苏伊士环境中国执行 副总裁Alan  Thompson保证。挑战在于 我们管道的末端不是厨房的水龙头,而 是住宅供水系统的入口,它们的管理是 独立的。 “我们无法监控在这些管道里 的情况,可能会出现一些的污染,影响水 质。”这位负责人解释说。他把供水管网 分成两类:大街上的初级管网和住宅、商 业或工业楼宇内的二级管网,两个管网的 压力都很大。 目前中国人的用水量比欧洲或美国人 都少,人均用水量刚刚达到欧洲的三分之 二、美国的一半。但中国用水量的增长更 快。 “5年来,需求量以年均14%的速度增 长。”Alan  Thompson强调说,而欧洲的 需求量却呈现下滑趋势。中国的水资源管 理是千年的挑战,是一个简单但尚未解开 的方程式:80%的水资源分布在南方,而 40%的人口分布在北方。而与此同时,中国 政府承诺保证每户每天供水1立方米。 为了预先考虑由于快速城市化造成 的日益增长的需求,必须加快供水网络 的建设。 “我们在最现代的技术上大量 投资。”这家法国公司的负责人宣称。供 水管网的电子地图系统、计算机水流量 调节、远程漏水检测等诸多新技术,让 苏伊士环境将全球最尖端的技术运用到 中国的供水网络,在重庆、天津、常熟或

三亚等城市都有他们参与的项目。 “中国 正直接跳跃到高端系统的应用,不需要 欧洲所经历的数十年的设计阶段。”Alan Thompson指出。 针对漏水问题,苏伊士环境在管道中 安置了十几个检测仪,追踪任何不正常的 声音,找出漏水点。目的是避免任何管网 损害的风险,同时保证最优化的、无损失 供水。15年前,这项检测还靠手工完成, 通过派遣专业人员经常敲击管道发现漏 水。 苏伊士环境与香港新创建集团合资 成立的中法水务公司在中国二十几座城市 开展业务。苏伊士环境同中国公用事业企 业合作,签署了30多个水和废弃物管理合 同。这些企业往往隶属于地方政府。在中 国高速城市化的带动下,地方政府为未来 几年规划了前所未有的发展。然而面临的 挑战是全方位的。 “在我们的行业,做5年规划是不够 的。必须做15年、20年、50年的规划!” “我们希望做得越来越多的是提供 覆盖整个链条的全面服务,从水的回收、 输配再到处理。”Alan  Thompson解释 说。为此,中法水务近三年与公用事业单 位合作,开发为消费者提供的服务。 “直 到三年前,这还不存在或难以想象。面对 这个飞速发展的市场,我们尽力迎合客户 的期望。”公司负责人如是总结,他对这一 设想所取得的成功倍感鼓舞。。

Julie Desné octobre 2010 / Connexions 87


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专栏

Un agent vient changer gratuitement la plomberie défectueuse chez un habitant d’un district de Pékin lors de la journée mondiale de l’eau le 22 mars 2010. 2010年3月22日世界水日,工作人员在市民家里免费更换受损的水管。

Vers une utilisation raisonnée de l’eau dans les bâtiments en Chine ? Aymeric Novel, en charge du bureau de Pékin de Terao, PME française experte en éco-bâtiments (green buildings), nous fait partager son analyse de l’utilisation de l’eau dans les bâtiments en Chine. Connexions : Quels sont les principaux postes d’utilisation de l’eau dans les bâtiments ? Aymeric Novel : Dans le secteur du bâtiment,

tion irraisonnée de la ressource en eau dans les bâtiments en Chine ? A. N. : Il faut d’abord mentionner que les

quand on parle de l’utilisation de l’eau, on peut considérer deux usages majeurs : l’eau utilisée pour les espaces verts et l’eau utilisée dans les bâtiments. Ces deux aspects sont abordés dans les approches green building. Il faut aborder la question de l’eau par type d’usage et par type de bâtiment. Ce sont les logements qui sont les principaux consommateurs d’eau car ils représentent la plus grande surface construite et ils ont le plus grand ratio de consommation par mètre carré.

problèmes d’utilisation irraisonnée de l’eau sont quantitativement situés lors de la phase d’exploitation du bâtiment, pour la simple raison que cette durée est de plusieurs décennies. Ainsi, les gaspillages au niveau des fuites de plomberie, des appareils électroménagers consommateurs, d’irrigation de la végétation et tous les usages réguliers se cumulent année après année. En Chine, la plomberie est l’un des lots les plus défavorisés des projets de construction. Les pertes linéaires d’eau le long des canalisations sont à l’image de ce que

C. : Quels sont les grands problèmes liés à l’utilisa88 Connexions / octobre 2010

chacun peut constater chez soi en Chine. Qui n’a jamais eu de problème avec son siphon de lavabo, ses toilettes ou sa douche ? J’ai demandé un jour à un ami architecte pourquoi selon lui la plomberie était aussi mauvaise en Chine, il m’a répondu : « la plomberie est une chose qui ne se voit pas, donc aucun maitre d’ouvrage ne souhaite investir ! ». Les points de consommation désignent les endroits où l’on prélève de l’eau dans les bâtiments comme les douches, les toilettes et les robinets. Actuellement, ces équipements ne présentent pas de propriétés d’économie d’eau ni de dispositif de détection de présence, à part dans certains lieux publics, comme les aéroports, où les robinets ont des détecteurs de présence infrarouge. Pour les toilettes, il existe cependant quelques avancées positives : les doubles chasses d’eau existent et il peut y avoir des logements dont les toilettes utilisent de l’eau usée retraitée. En ce qui concerne l’électroménager, il n’existe encore que très peu de normes qui permettraitent de sélectionner les produits hydro-économes. Quant aux espaces verts, ils sont de plus en plus présents dans les grandes villes chinoises où ils sont souvent le symbole de la politique environnementale de la ville. Pourtant, il y a peu de réflexion sur le choix des espèces végétales en fonction de leur appétit en eau et bien souvent, l’irrigation est faite avec beaucoup de gaspillage.

C. : Quelles sont les bonnes pratiques qui permettent de répondre à ces challenges et quelles sont les spécificités de la certification chinoise des green buildings dans le domaine de l’eau (GBDL) ? A. N. : De manière générale, les différents labels traitent les grandes problématiques suivantes : économie d’eau potable, gestion et réutilisation des eaux de pluie et traitement des eaux usées sur site. Ils imposent des réductions quantitatives des volumes d’eau potable pour les usages sanitaires. Le principe est de définir une consommation de référence avec les pratiques, équipements et standards courants. Le choix des solutions techniques pour les douches, toilettes, robinets et points de puisage divers définit une économie relative. Les labels américain LEED et français HQE exigent au moins 20% d’économie et valorisent des efforts allant jusqu’à 40%. Il


L’eau 水 Quantité d’eau utilisée par type de bâtiment dans les grandes villes chinoises : Bureaux : 2 tonnes/m²/an Centres commerciaux : 1,5 tonnes/m²/an Hôtels 5 étoiles : 4 tonnes/m²/an Logements : 7 tonnes/m²/an 96% des familles ont un lave-linge et 70% ont un chauffe-eau. Source : base de données de Terao

va sans dire que dans tous les cas, les certificats de performance de chaque type d’équipement sont exigés pour s’assurer que la somme des économies escomptée sera atteinte. En ce qui concerne l’irrigation, de grandes économies peuvent être faites en choisissant les bonnes espèces végétales, en utilisant un arrosage efficient, et en réutilisant les eaux de pluie ou des eaux usées traitées sur site. Le label chinois reprend ces principes, mais il a la particlularité d’avoir des exigences additionnelles qui sont liées aux spécificités locales telles que la plomberie. Par exemple, le GBDL exige qu’il n’y ait pas de pollution secondaire dûe aux matériaux de la plomberie. Ceci serait plutôt une évidence couverte par les standards en France. Il impose aussi une mesure des fuites dans les réseaux, ces dernières ne devant pas dépasser 2% du total circulé.

C. : Pensez-vous que les bâtiments en Chine soient en passe de devenir plus économes en eau ? A. N. : Pour l’instant je pense que seuls les projets green building offriront des progrès significatifs et mesurables. La partie eau dans les bâtiments est pour l’instant encore trop délaissée et part de très bas comme le montre l’état général de la plomberie. Mais cela s’améliorera avec l’ensemble des infrastructures. A mon avis, il est possible que des efforts soient faits mais d’abord sans doute plus sous l’angle de la santé que sous l’angle de l’économie de la ressource. C’est en effet une caractéristique de la communication sur l’environnement en Chine où la population est plus sensible au chapitre santé.

Propos recueillis par Flore Coppin

中国建筑用水向合理化方向发展? Terao公司是一家专业从事环保 建筑(绿色建筑)咨询服务的法国中 小企业,该公司北京代表处负责人 Aymeric Novel同我们分享他对中国建 筑用水的分析。 《联结》:在 建 筑业中,有哪些主 要用水的地方? Aymeric  Novel: 在建筑行业,当人们 谈到用水,可以想到两大用途:绿化 用水和建筑用水。这两方面在绿色建 筑概念中均有涉及。首先要从用途和 建筑类型来讨论水的问题。住宅是用 水大户,因为它们占据的建筑面积最 大,每平米消耗量比率也最大。 《联结》:在中国建 筑业中,有关 不合 理使用水资源的大问题有 哪 些? Aymeric  Novel: 首先要提到的是不 合理用水的问题在建筑的使用阶段尤 为常见,因为这个期限会持续数十年。 在管道漏水、用户家电、植物浇灌和 所有日常使用上的浪费年复一年地累 积。 管道是工程项目中质量最差的一 部分。在中国,每人都可以在自己的家 里发现管道漏水的情况。谁没遇到过 洗脸池下水道、厕所或淋浴出现问 题?有一天,我问一位建筑师朋友他 认为中国管道质量如此差的原因。他 回答我说: “管道是一个看不到的东 西,因此没有哪个承建商会愿意在这 上面投钱!” 建筑里的耗水点是指像淋浴、马 桶和水龙头这样的取水处。目前这些 设备既没有节水性能,也没有感应装 置。除了在一些公共场所,比如机场 的水龙头有红外感应器。然而在厕所 的设计上已经有一些积极的进步:使 用双冲水式抽水马桶,还有一些住宅 使用中水冲马桶。在家电方面, 可以选 择节水产品的标准还很少。 中国大城市里有越来越多的绿 地,它们往往是城市环境政策的标 志。然而,很少根据植物的用水需求选 择品种,植物浇灌常常造成许多水资 源的浪费。 《联结》:有哪些好的做法可以应 对这些挑战?中国绿色建筑设计标 识在水资源方面有哪些特点? Aymeric  Novel: 一般而言,不同的 标识针对下列几大问题:节水、雨水 管理和再利用、现场废水利用。这些

标识严格规定了卫生用水减少的数 量。其原则是通过日常的做法、设备 及标准来确定一个参考用水量。针对 淋浴、马桶、水龙头和各种汲水点技 术方案的选择来确定一个相对的节约 量。美国LEED和法国HQE绿色建筑评 价体系规定节水不少于20%,并鼓励 节水达到40%的举措。然而,这并不 意味着要求每种设备都要达到节水标 准,才能保证达到预计的节水量。在 绿地浇灌方面,通过选择合适的植物 品种、使用高效的灌溉方法、对雨水 和现场处理过的废水再利用就能节约 大量用水。 中国绿色建筑标识遵循同样的原 理,但其特点是有一些与当地特色相 关的要求,比如管道。例如,绿色建筑 设计标识(GBDL)要求不能因管道材 质带来二次污染。这个问题在法国是 显而易见的事,并有相应的标准加以 约束。此外,标识还严格规定了管网 中防止漏水的措施,漏水点不能超过 总管网的2%。 《联结》:您认为中国建筑正变得 更为节水吗? Aymeric  Novel: 目前,我认为只有绿 色建筑项目才会有重大的、可衡量的 进步。在建筑领域,水问题目前还远 未受到重视,而且起点很低,从管道 的普遍状况可见一斑。但这些情况将 随着基础设施的总体改善而有所改 观。在我看来,在这个领域是可以有 所作为的,当然首先会从健康的角度 而不是资源经济的角度考虑。这是中 国环境宣传的一个特征,公众对健康 问题更为关注。

中国大城市按建筑类型 的不同用水量

写字楼:2吨/平方米/年 商业中心:1.5吨/平方米/年 5星级酒店:4吨/平方米/年 住宅:7吨/平方米/年 96%的中国家庭拥有一台洗衣机, 70%有一部热水器。 信息来源:Terao数据库

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Une hôtesse se désaltère sur un stand d’eau potable à l’exposition Universelle de Shanghai. 一位礼仪小姐在上海世博会的直饮水台前喝水。

Veolia nettoie l’eau du Huangpu à Shanghai Ce pourrait être un petit bout de campagne d’une province chinoise, mais c’est bien au coeur de la « surmodernité » shanghaienne que Veolia a élu domicile. Dans un coin discret de la zone nouvelle de Pudong, en fin de route, un processus crucial pour l’avenir de la ville fait ronronner les turbines de la station de traitement des eaux de Linjiang, gérée par l’industriel français. Ici, la compagnie récupère de l’eau boueuse de la rivière Huangpu pour la rendre limpide et presque potable. Ce sont 600 000 mètres cube qui sont chaque jour traités en moyenne sur l’année. « Nous avons une capacité de 1,45 million de m3 par jour et l’été, nous ne sommes pas loin de tourner à pleine capacité », note Julia Gu, directrice adjointe de Veolia Water à Shanghai. Le groupe français approvisionne l’ensemble de la ville nouvelle de Pudong, autrement dit toute la rive est de la rivière Huangpu, à l’exception du district de Nanhui à la pointe 90 Connexions / octobre 2010

sud est. « Cela représente 672 km2 », précise la responsable. Un traitement en plusieurs étapes Après avoir acheté l’eau à la centrale de récupération voisine, Veolia traite en plusieurs étapes. Il y a d’abord le passage au microsable qui capture les impuretés. Puis les flux sont filtrés deux fois. Une fois selon un procédé à « très grande vitesse », qui passe l’eau à travers une couche de 2,20 mètres. « On peut filtrer 20 m3 par heure, contre 6 à 7 pour une filtration traditionnelle », explique Vincent Jing, ingénieur sur le site. Une étape indispensable pour faire tomber les teneurs en manganèse et en ammoniaque, très présents dans le Huangpu. Enfin une seconde filtration au charbon actif vient compléter le procédé, avant la désinfection aux ultra-violets. « Ce qui est important dans l’eau c’est son pH (niveau d’acidité) et sa turbidité. Dans le Huangpu le pH est déjà à peu près neutre, à 7, en revanche on a des

niveaux de turbidité très élevés », détaille l’ingénieur. La boue retirée de l’eau est séchée et recyclée ensuite. « On en réutilise pratiquement 99% », affirme Vincent Jing, qui évoque son usage dans le secteur de la construction. La vitrine de l’Expo Qui dit Pudong dit aussi Exposition universelle. Les deux tiers du site sont situés sur cette rive du Huangpu. Les millions de visiteurs ont sans doute à peine remarqué le bâtiment vitré et design qui jouxte l’entrée n°7 du site. Des écrans géants y surveillent l’approvisionnement en eau de tous les pavillons, qui représente entre 35 000 et 40 000 m3 chaque jour. Ici, Veolia contrôle tout le circuit et l’« Expo » est le seul endroit de Shanghai où des robinets dispensent de l’eau potable un peu partout sur le site. Trois équipes d’urgence sont sur place 24 heures sur 24 pour intervenir en cas de problèmes sur les conduits. Prochain projet phare de la ville de Shanghai, le parc d’attraction Disney pourrait être également approvisionné en eau par Veolia. « Nous en sommes au stade préliminaire des consultations », précise Julia Gu. Le nouveau site devrait ouvrir ses portes en 2014. Julie Desné


L’eau 水 威立雅 : 净化上海黄浦江水 99%。”Vincent Jing肯定地说,并

这里看似中国某省乡下的一个

从旁边的取水站购水后,威立

小角落,但却是威立雅入驻的超级

雅对水源进行几步处理。首先用

现代城市上海的中心。在浦东新区

细沙过滤,清除水中的杂质。然后

说到浦东就自然会说到上海

一处不显眼的角落里,路的尽头,

再经过两次过滤。一次是高速过

世博会。三分之二的世博园区位于

这家法国企业管理的临江水厂的

滤,让水通过一个2.2米宽的过滤

浦东的黄浦江畔。数以百万计的参

水轮机轰轰作响,对这座城市的

层。 “我们可以每小时过滤20立方

观者未必会注意到7号门入口附近

未来至关重要的系统正在运行。在

米水,而传统过滤只能达到6-7立

的一座艺术性的玻璃建筑。那里有

这里,公司取来混浊的黄浦江水,

方米。”水厂工程师Vincent Jing解

巨大的屏幕监控各场馆的给水,日

把它变成清澈的自来水。一年日均

释说。黄浦江水含有很多锰和氨,

供给量在3.5万到4万立方米之间。

处理60万立方米水。 “我们的日处

这是去除这些杂质必不可少的一

威立雅监控整个给水系统。世博

理能力能达到145万立方米。夏季,

步。最后,在用紫外线消毒前,使

会是上海唯一一个在园区各处都

我们近乎满负荷运转。”威立雅水

用活性炭进行二次过滤。 “水最

有直饮水龙头的场所。三个应急

务上海副总经理Julia Gu介绍说。

重要的是其PH值(即酸碱度)和

小组24小时待命,处理水管故障。

这家法国集团为整个浦东供水,

混浊度 。黄浦江 水的 PH值大致

下一个上海的标志性项目— —迪

也就是说除了东南端南汇区之外

接近中性,约为7,不过浑浊度很

士尼主题乐园也可能由威立雅给

的整个黄浦江沿岸区域。 “面积达

高。”这位工程师详细说道 。水

水。 “我们正处在项目的前期征询

到672平方公里。”这位负责人明确

中分离出来的泥浆被晒干后再回

阶段。”Julia  Gu明确说。乐园预计

道。

收。 “我们的回收利用率几乎达到

将于2014年开始营业。

提到泥浆在建筑业中的应用。

Participez au prix PME 2010 ! La deuxième phase du concours, lancée en juin, récompensera les entreprises des prix PME Excellence & Entrepreneur. La catégorie « Excellence » s’adresse aux PME françaises ayant établi une structure locale (bureau de représentation, WFOE, JV, etc.) en Chine continentale depuis 2 à 5 ans. La catégorie « Entrepreneur » récompensera un entrepreneur individuel français ayant créé son entreprise en Chine avec succès. Cette année, les prix seront remis lors d’un Gala CCIFC organisé à Canton le 14 janvier 2011

© CCIFC / XIE Bin

Date limite de réception des candidatures le 30 novembre 2010

Contacts Nathalie ANIEL à Pékin Tél : +86 10 6461 0260 ext 43 Fax : +86 10 6461 2990 aniel.nathalie@ccifc.org

Adeline Chen à Shanghai Tél : +86 21 6132 7100 Fax : +86 21 6132 7101 chen.adeline@ccifc.org

Hervé Lambelin à Canton Tél : +86 20 8121 6818 ext 801 Fax : +86 20 8121 6228 lambelin@ccifc.org

Les lauréats des prix Excellence et Entrepreneur se verront attribuer de nombreuses récompenses prestigieuses grâce à la participation et au soutien de Total et Air France KLM (précisions dans le règlement). Téléchargez le règlement et le bulletin de candidature sur le siteoctobre : www.ccifc.org 2010 / Connexions 91


DOSSIER

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专栏

Vue sur la ville de Wuhan.

武汉市全貌。

Artelia : pour une gestion intégrée du traitement des eaux usées Avec sa croissance urbaine, la Chine produit quantité de boues liées à l’épuration des eaux usées. Un défi sanitaire et environnemental majeur que le groupe français Artelia entend bien relever à Wuhan. Dans le cadre d’un financement du Ministère français de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi (MINEFE), Sogreah, groupe Artelia, en consortium avec Enviroconsult et Carbonium, prépare une stratégie intégrée de gestion des boues produites par l’épuration des eaux usées à l’échelle de la région du Grand Wuhan (province du Hubei). Ce consortium, via un projet FASEP1, travaille en étroite collaboration avec le Project Management Office (PMO) de Wuhan pour établir une stratégie de gestion des boues de l’épuration pour l’ensemble de l’agglomération. Il s’agit de gérer les résidus générés par une zone urbaine de près 92 Connexions / octobre 2010

de 250 km², 9 millions d’habitants où une trentaine de stations d’épuration seront en service d’ici 2030 produisant des centaines de tonnes de boues chaque jour à travers toute la ville. Ce déchet de l’assainissement est une conséquence directe et inévitable du développement soutenu des infrastructures de traitement des eaux usées sur l’intégralité du territoire chinois. La nature même des boues et les quantités produites pourraient remettre en cause rapidement la durabilité de l’ensemble du système sanitaire. Des solutions de traitement doivent donc être proposées rapidement. La France fait partie des pays leader en

matière de technologies de traitement des boues et l’excellente implantation française à Wuhan a permis l’instauration d’une relation de confiance entre partenaires industriels et institutionnels locaux. Le projet mené par le consortium s’inscrit donc pleinement dans la démarche française de soutien au développement urbain durable de la Chine, et en particulier dans l’accord Franco-Chinois récemment signé qui fait de Wuhan la ville d’application directe de cette coopération. Artelia relève ici un véritable défi Il n’existe pas, à ce jour, de solution opérationnelle durable en Chine au problème de l’élimination des boues. De nombreuses


L’eau 水 études fournies par des entreprises de toutes nationalités ont déjà avorté faute de n’avoir pas réussi à dépasser la simple proposition technologique (inutilisable sans stratégie globale), ne pas avoir su s’adapter au cadre réglementaire local, ne pas avoir coopéré efficacement avec les administrations concernées ou ne pas avoir réussi à intégrer les contraintes du développement urbain et industriel si spécifique au pays. Le projet conduit par Artelia a justement pour but à terme de fournir à la municipalité de Wuhan un plan d’action clair, réalisable et durable. La méthodologie appliquée sera bien évidemment adaptable par la suite à d’autres sites. Le succès d’un tel projet ouvrira de très belles opportunités non seulement pour ARTELIA mais aussi pour toute l’industrie française du secteur. Cette problématique s’inscrit dans celle plus vaste de l’insuffisance de la seule solution technique. « Il est relativement facile d’acquérir une technologie, il est nettement plus complexe de savoir l’utiliser correctement et d’en assurer la maintenance dans le temps » précise Antoine Daval, manager développement urbain durable d’Artelia en Chine « c’est au niveau de la stratégie de planification et, en aval, de l’exploitation des grandes infrastructures que se situe la principale valeur ajoutée des entreprises françaises en Chine ». Une telle expertise a été façonnée en France par des décennies de pratique et d’amélioration continue. Elle ne saurait s’improviser. De nécessaires synergies entre les secteurs Les autorités de Wuhan sont conscientes des enjeux, des forces et des faiblesses institutionnelles actuelles, « notre travail à leur côté a été jusqu’à présent très constructif », confirme le jeune expert français. Le projet a bénéficié d’une forte participation de l’ensemble des administrations concernées, ce qui devrait permettre de mettre en place de véritables synergies entre les différents secteurs. Une condition nécessaire à la promotion d’une économie circulaire où les déchets sont valorisés et à une gestion durable des résidus de l’épuration compatible avec le rapide développement industriel et urbain de Wuhan.

Nicolas Sridi

Artelia: 污水处理的综合管理 随着城市化加快, 中国在废水净化过程中产生出大量污 泥。在武汉,法国Artelia集团准备接受这个重大的卫生和 环境挑战。 在 法 国 经 济 、工业 和 就 业 部 的 资 助 下,索格利 公司即现 在的Ar telia集团联合 Enviroconsult和Carbonium公司为大武汉地区 (湖北省)废水净化产生的污泥制定一项综合 的管理战略。 这个项目的企业联合体,通过私营企业扶 持基金(FASEP)的项目,与武汉市项目管理办 公室紧密合作,为整个大武汉制定管理净化后 污泥的战略。这涉及到管理一个拥有900万居 民、近250平方公里的地区产生的残 留物,到2030年,这里将有30多个净 化站投入运行,每天在全市制造几百 吨污泥。 这种净化后垃圾是废水处理设 施的持续发展在全中国范围内产生的 一个直接的、不可避免的后果。污泥 本身的性质及其数量会迅速使整个 净化系统的持久性受到质疑,因此应 该马上推出处理对策。 法国在污泥处理技术方面处于 领先地位。法国企业在武汉已经站稳 脚跟,能够在工业合作伙伴和当地政 府部门之间建立一种信任关系。 由企业联合体实施的这个项目 被完全列入法国支持中国可持续城市 发展的行动中,尤其被列入中法两国 最近签署的协议中,协议使武汉成为 这次合作的直接实施城市。 Artelia接受了真正的挑战 今天,在中国尚不存在可持续运 作的解决污泥问题的方法。各国企业 提供的大量研究工作皆因未能突破 简单的技术要求(因没有整体战略而 不能用),不能适应当地法规,没与 相关政府部门有效合作或未能综合 考虑中国特有的城市和工业发展限制 而流产。由Artelia领导的这个项目其 目的是在短期内向武汉市政府提供 一份清晰、可行、持久的行动计划。很 明显,运用的方法随后会用在别的地 方。这一项目的成功不仅为Artelia,也 为该行业的所有法国企业打开良好的 商机。 这个问题 还面临着 一个更 大 的问题,即单一技术方案不足的问 题。 “掌握一门技术相对容易,而懂 得正确使用这门技术并保证按时维 护显然更加复杂。”Artelia中国可持 续城市发展经理Antoine  Daval肯定 道, “法国企业在中国的主要附加值 在于规划战略层面和下游大型基础设 施的开发。”这项专业技术在法国经 过几十年实践和不断改进而形成,它 不会是即兴而成。 各部门之间的必要协作

武 汉市 政 府 意 识 到了目前 制 度 的 利 弊。 “到目前为止,我们与他们的合作非常富有 建设性。”这位年轻的法国专家说道。该项目 得到了所有相关政府机构的积极参与,这将会 在各部门之间形成一种真正的协同合作。这既 是推广废物再利用循环经济的一个必要条件, 也是配合武汉市城市和工业的迅速发展,持续 管理净化残留物的一个必要条件。 “学会一门技术相对容易,而懂得正确 使用这门技术显然更加复杂。”

octobre 2010 / Connexions 93


DOSSIER

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专栏

Vue sur le réservoir de Miyun, principale source d’eau potable de Pékin.

Pékin, le mirage d’une oasis ? Wang Jian, expert en gestion des ressources en eau, fondateur de l’ONG Green SOS installée à Pékin, nous explique comment la capitale chinoise gère sa crise de l’eau. Il fut un temps où les Pékinois disposaient de suffisamment d’eau pour leur usage quotidien, où les sources et les rivières étaient abondantes… Urbanisation, surconsommation, désertification, boom de la population ont contribué au tarissement des eaux de surfaces et souterraines de la capitale. Face à l’urgence de la situation, la municipalité a opté pour une politique de réponse à la demande. Ainsi, des mesures ont été prises visant principalement à redistribuer l’usage d’eaux destinées à l’agriculture à l’usage urbain, à extraire les eaux souterraines profondes, à acheminer les eaux de surface vers les réservoirs de la ville, à restreindre l’utilisation de l’eau dans les provinces avoisinantes, à fermer ou à 94 Connexions / octobre 2010

déménager les industries polluantes. Wang Jian, expert en gestion des ressources en eau et grand connaisseur de la politique de l’eau de la ville de Pékin, nous expose son point de vue sur la situation hydrique de la capitale.

Connexions : Pourriez-vous nous rappeler quelle est la situation hydrique de la ville de Pékin? Wang Jian : Nul n’est sans savoir que Pékin est affectée par une grande pénurie d’eau. Aujourd’hui, elle possède le triste record de la capitale qui dispose du plus faible taux moyen d’eau par habitant : 300 m3 d’eau par personne et par an, soit un dixième de la moyenne nationale chinoise, et un quarantième de la moyenne mondiale.

密云水库——北京市饮用水的主要来源

La ville dépend principalement de deux types de ressources pour son approvisionnement : les sources d’eau de surface et les sources profondes. Les ressources que la ville utilise sont réparties entre l’industrie, l’agriculture,

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Le saviez-vous ? Pékin possède le seul musée au monde de l’Eau du robinet. (Beijing Tap Water Museum, 北京自水来博 物馆). Installé dans le bâtiment de la première station d’eau de la capitale, le musée abrite une collection d’objets, photos et maquettes illustrant l’histoire de l’approvisionnement en eau de la capitale. L’exposition a par ailleurs pour but de montrer au visiteur que l’approvisionnement en eau courante est une chose très complexe et coûteuse. Adresse : 6A Dongzhimenwai Beidajie (Inside Qingshui Yuan), Dongcheng District, Beijing.



DOSSIER

专栏 W.J. : Je ne crois pas que la situation

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va empirer, pourvu que les autorités arrivent à contrôler la croissance démographique. C’est un choix politique très important pour l’avenir de Pékin. De plus, je pense que les citoyens vont petit à petit prendre conscience de leur excès et tendre vers une consommation d’eau plus économe.

L’urbanisation excessive contraint la Municipalité de Pékin à restreindre l’usage de l’eau dans les campagnes environnantes. 过快的城市化迫使北京市限制周边农村的用水。

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l’environnement (parcs, lacs…), et l’usage domestique, ce dernier étant le poste le plus gourmand. La ville n’a donc pas les ressources propres suffisantes pour répondre à sa consommation croissante d’eau. Cependant, il est surprenant de noter que jusqu’à présent, Pékin a été capable d’assurer un certain équilibre grâce à l’utilisation des eaux profondes et à l’approvisionnement à partir des provinces voisines. Aujourd’hui, la pénurie s’aggrave et ce système n’est plus soutenable.

C. : Quelles sont les raisons d’une telle pénurie d’eau ? W.J. : Dans le passé, Pékin s’est élevée au rang de capitale et a prospéré grâce à sa richesse en eau, mais aujourd’hui elle fait face à une pénurie sévère. Ce manque d’eau a été provoqué par deux raisons, l’une naturelle et l’autre liée aux actions humaines. Entre 1999 et 2009, Pékin a été touchée par 11 années de sécheresse, qui ont provoqué le dessèchement des cours d’eau autour de la ville, abaissé le niveau d’eau dans des réservoirs des eaux souterraines. Par ailleurs, avec une croissance constante de la population urbaine - il y a aujourd’hui 20 millions d’habitants à Pékin et la population a augmenté de 3% entre 2007 et 2009 - et une demande toujours plus élevée des citadins, les politiques actuelles ne sont pas capables de trouver une réponse équilibrée entre l’offre et la demande.

C. : Comment la ville de Pékin peut-elle améliorer la gestion de ses ressources en eau ? W.J. : Il s’agit de prendre simultanément différentes mesures. En cas de pénurie grave, le gouvernement doit adopter une ligne que l’on peut résumer par ce slogan : « abandonner l’agriculture, mettre 96 Connexions / octobre 2010

la pression sur l’industrie et préserver la vie humaine ». Il doit aussi restructurer les secteurs productifs pour assurer une économie basée sur une basse consommation d’eau. Cette dernière politique est déjà largement mise en place par Pékin depuis les années 1990. Par exemple, les industries les plus gourmandes en eau, telles que les aciéries, ont été délocalisées loin de la ville ou même fermées, alors que des industries de services ont été encouragées. Du côté de l’agriculture, les cultures comme le riz qui ont besoin de beaucoup d’eau ont été remplacées par des cultures céréalières qui en demandent moins. Les citadins ont par ailleurs été incités à économiser l’eau grâce à l’installation de compteurs individuels et via l’augmentation des tarifs. En cas de pénurie aiguë, Pékin a la possibilité d’acheter de l’eau aux provinces voisines. La ville doit rapidement mettre en œuvre un système efficace d’épuration et de récupération des eaux. Aujourd’hui, Pékin réutilise chaque année 600 millions de m3 d’eau mais le potentiel global de recyclage est d’un tiers plus élevé.

C. : Quel impact aura le projet d’abduction d’eau Sud-Nord sur les ressources de Pékin? W.J. : Ce projet apportera à Pékin 1 milliard de mètres cube d’eau supplémentaires par an, de quoi soulager la pénurie hydrique de la capitale. Grâce à ce projet, de nombreux puits d’eaux profondes vont pouvoir être fermés pour permettre aux nappes de se recharger. Mais l’abduction en elle-même n’est pas suffisante : le gouvernement doit à la fois prendre des mesures pour contrôler la croissance de la population urbaine et rationaliser la consommation l’eau.

C. : Comment voyez-vous la situation évoluer dans les prochaines années?

Propos recueillis par Antonia Cimini

Répartition de l’utilisation de l’eau par secteur dans la municipalité de Pékin Environnement urbain

Domestique

Industrie

Agriculture

4000 3500 3000 2500 2000 1500 1000 500 0

1985 1995 2005 2006 2007 2008

Volume total d’eau utilisée (en million de m3 par an) Source : 2009 Beijing Water Ressource Bulletin

Les terrains de golf de la capitale La ville de Pékin utiliserait environ 27 millions de m3 d’eau par an rien que pour arroser les pelouses de ses 38 terrains de golf. Introduit au sein de l’élite pékinoise à la fin des années 80, le golf recrute plusieurs milliers de nouveaux adeptes chaque année. Un terrain de golf consommerait environ 1 000 m3 d’eau par jour… Hormis la consommation d’eau, les terrains de golf posent également de graves problèmes environnementaux : des milliers d’hectares de forêt ou de terres agricoles ont été rasés ou réquisitionnés par les investisseurs pour créer ces gigantesques pelouses artificielles qui nécessitent pour leur entretien de grandes quantités de pesticides et d’engrais qui polluent notamment les nappes phréatiques.


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L’eau 水

« Jieyue yongshui » : consommez moins d’eau. La hausse des tarifs de l’eau sera-t-elle le seul moyen d’inciter la population à réduire sa consommation ? “节约用水”。提高水价是促使居民节约用水的唯一手段吗?

Les pékinois ont leur mot à dire sur l’eau Quand ils ont appris que d’ouvrir le robinet allait leur coûter plus cher, les résidents du quartier de Haidian ont décidé de prendre la situation en main. C’est dans un district populaire de Haidian à Pékin qu’a eu lieu fin 2009 la première audition publique en Chine sur les tarifs de l’eau à usage domestique. Face à la pollution des ressources, aux scandales en tout genre, comme les fausses eaux minérales, et à l’inévitable montée des prix, les habitants ont mis en place une pratique de participation à la gestion des ressources largement répliquée depuis dans le reste du pays. L’eau à Pékin est un enjeu de poids car la ville connait des pénuries récurrentes et de plus en plus graves. C’est pourquoi lorsque le gouvernement local a décidé d’augmenter les tarifs, col-blancs et ou-

vriers du quartier se sont mobilisés pour demander une audition publique. Le but étant de mieux comprendre les raisons de la montée des prix et d’avoir un mot à dire sur les modalités de paiement, en bref de ne pas être exclu de la prise de décision. La Commission pour le Développement et les Réformes de Haidian a alors nommé 25 représentants parmi les résidents du quartier et convoqué une audition pour le 16 décembre 2009. La session s’est avérée une véritable surprise. Mme Gao Yang, une des délégués, a mené un sondage parmi 200 de ses voisins, collecté leurs idées pour au final appren-

dre que 70% d’entre eux préféraient que l’augmentation soit graduelle. Elle a donc élaboré une proposition : la hausse doit se faire par étapes, le gouvernement étant censé donner du temps aux ménages pour s’y habituer. Une proposition jugée insuffisante pour M. Li Shijie, un autre délégué : pour limiter la consommation il ne suffit pas d’introduire des pressions économiques, il faut aussi et surtout éduquer à l’économie des ressources. C’est ce qui ressort de sa propre enquête, les habitants y affirmant préférer ne plus voir les rues inondées en raison des fuites massives dans les canalisations plutôt que de payer plus. En conséquence M. Li a proposé de mettre en place des campagnes d’éducation publique et de fixer un plafond maximum pour la consommation ordinaire d’eau : ceux qui en utilisent plus payeront plus. M. Zhu Yufeng va encore plus loin et estime que ce sont les hôtels, les saunas et les bains publics qui sont les plus grands responsables du gaspillage et en profitent pour faire supporter les coûts de leurs activités à l’ensemble de la société. Sa proposition sans concession : aux capitalistes de payer ! Une satisfaction générale Au final la Commission a décidé d’une hausse de 0,9 yuan par mètre cube d’eau qui interviendra sur trois ans. Le nouveau tarif couvrira les frais d’approvisionnement ainsi que le traitement des eaux usées. La satisfaction des résidents est générale et les ménages à plus bas revenus ont même obtenu une subvention du gouvernement local. Cette expérience de débat participatif dans le district de Haidian a non seulement permis de mettre en place une solution acceptée par tous, mais a également montré la voie à bien d’autres villes. Depuis, Harbin, Shanghai, Hangzhou ont fait de même et l’organisation d’une audition publique est désormais un pré-requis légal nécessaire à toute augmentation des tarifs de l’eau à usage domestique en Chine. Ces réformes sont, il faut le dire, nécessaires en Chine où selon l’Office national des statistiques, 60% des sociétés de distribution d’eau en Chine fonctionnent à perte, avec pour cause principale des tarifs d’eau trop bas.

Antonia Cimini octobre 2010 / Connexions 97


DOSSIER

专栏

Le marché des eaux minérales en Chine

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du produit, la dégradation peut durer plus de 500 ans et l’incinération éventuelle des bouteilles entraîne l’émanation de polluants toxiques et de cendres qui contiennent des métaux lourds. La Chine, qui importe déjà chaque année 5 millions de tonnes de plastiques usagés en provenance du Japon, d’Allemagne, des EtatsUnis, des Pays-Bas et de Grande-Bretagne, risque encore d’avoir à payer le prix fort sur le plan environnemental.

Pauline Bandelier

Un consommateur hésitant devant un rayon d’eaux en bouteille dans un supermarché. 一位消费者在超市的瓶装水货架前犹豫

L’explosion de la croissance dé mographique et économique de la Chine se traduit dans la consommation d’eau minérale en bouteille, qui a doublé entre 2003 et 2008 et devrait représenter 40,3 milliards de Rmb en 2012. En quelques années, la Chine est ainsi devenue le troisième plus grand consommateur mondial d’eau minérale, avec une croissance annuelle prévisionnelle de 7,1% au cours des prochaines années1. Trois marques d’eau minérale, Tingyi Master Kong, Hangzhou Wahaha Group et Nongfu Spring Co. Ltd. se partagent 50% du marché2. Evian et Perrier, qui contrôlent aujourd’hui 50% du marché des eaux haut de gamme, sont concurrencés depuis 2005 par les eaux tibétaines lancées par les groupes hongkongais JDB Group et Mineral Water Resources. Cette croissance pose le problème de la consommation énergétique engendrée par la fabrication des bouteilles en plastique créées à partir de polyéthylène téréphtalate (PET), un dérivé du pétrole brut. A l’échelle mondiale, chaque année, ce sont plus de 2,7 millions de tonnes de plastique qui sont nécessaires. Ce qui n’est pas négligeable, comme on peut le voir avec la consommation américaine qui monopolise ainsi plus de 1,5 millions de barils de pétrole par an. En fin de cycle 98 Connexions / octobre 2010

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Les eaux minérales, un marché d’avenir ?

L’usine de l’eau de source tibétaine 5100 Water Spring à Lhassa. 位于拉萨市的西藏冰川5100矿泉水厂

Les eaux tibétaines : l’offensive des marques chinoises sur le marché haut de gamme Ces dernières années, de nouvelles eaux minérales sont apparues dans les rayons des supermarchés chinois : les eaux tibétaines. Dès les années 80, des entrepreneurs avaient caressé l’idée de distribuer l’eau provenant des glaciers du toit du monde, dont les ressources s’élèvent à 448,2 miliards de mètres d’eau en surface et 110,7 miliards en sous sol. Mais transporter l’eau de glaciers situés à 5 000 mètres d’altitude jusqu’aux métropoles de l’est de la Chine n’est pas chose aisée. Il faudra attendre l’inauguration de la ligne de chemin de fer Qinghai-Tibet le 1er juillet 2006 pour fournir une option financièrement viable et relativement rapide à l’accès du marché chinois. La première eau à voir le jour est la 5100 Tibet spring water, dont les affiches publicitaires n’hésitent pas à vanter les vertus médicales. Cette eau miraculeuse est produite par la Tibet Glacier Mineral Water,

branche de la société hongkongaise Mineral Water Resources Ltd. Avec un prix de 6,5 Rmb pour une bouteille de 33 cl, 5 fois supérieur au prix moyen d’une eau minérale en Chine, le marché visé est celui des eaux minérales haut de gamme, aujourd’hui controllé à 50% par Evian et Perrier. Seulement 1/5 de la production est distribuée dans les supermarchés, l’essentiel étant vendu dans les restaurants, hôtels, clubs de golfs ou boites de nuits, « à une clièntèle avertie et haut de gamme » précise Mr Yu, le pdg PDG de la Mineral Water Resources Ltd. La Kunlun Mountains Natural Mineral Water issue d’une source basée près du mont Kunlun dans la province du Qinghai a été lancée l’année dernière par le groupe Hongkongais JDB et la 9000 Years Dagu Glacier Spring Water par la Guangzhou Xinchen Water Company. Les marques étrangères, présentes en Chine depuis plusieurs années, ont une clientèle fidèle et il ne sera pas aisé pour ces marques domestiques de leur reprendre des parts de marché, au moins dans un futur proche, estiment les analystes. Les distributeurs chinois parient sur un prix légèrement inférieur à celui des marques étrangères3 et à des chaines de marketing alternatives pour promouvoir leurs eaux tibétaines. La Kunlun Mountains Natural Mineral Water, a été choisie comme boisson officielle des Jeux Asiatiques 2010 de Canton et la Mineral Water Resources Ltd a signé un accord avec le ministère des Transports pour acheminer la 5100 Tibet spring water gratuitement sur ses trains à travers la Chine. L’enjeu est de taille : selon Ming Chao, directeur général adjoint de Sinomonitor International4, une société d’études de marché basée à Beijing, le marché des eaux haut de gamme en Chine va connaître un taux de croissance annuel de 80% au cours des 5 prochaines années pour représenter plus de 10 milliards de Rmb.

P.B.

1. Selon Euromonitor International. 2. Chiffres de 2008 selon une étude de marché d”AC Nielson. 3. Une bouteille 33 cl d’Evian ou Perrier est vendue entre 8 et 11 Rmb contre 6.5 Rmb pour la 5100 Tibet spring water et 5 Rmb pour la Kunlun Mountains Natural Mineral Water 4. “Chinese owners jostle for share of China’s bottled-water market”, New Zealand Exporter, 5 Mai 2010


L’eau 水

La Chine est une des priorités de la marque Perrier.

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Perrier, 中国有气矿泉水 市场的领军品牌

中国是Perrier矿泉水的发展重心之一。

Perrier, leader sur le marché de l’eau gazeuse en Chine Présente en Chine depuis 1996, la marque Perrier tente de faire sa place sur un marché très étroit. Au total, les ventes de bouteilles d’eau gazeuse ne représentent encore que 1% des ventes de bouteilles d’eau. « Les Chinois ne sont pas habitués mais ils sont très intéressés », explique Sara Vettori, directrice des ventes Nestlé Waters en Chine. A 11 Rmb (environ 1,30 euro) la bouteille de 33 cl et 22 Rmb (2,50 euros) celle de 75 cl, la marque est en vente uniquement chez les grands distributeurs internationaux comme Carrefour, Auchan et Wall Mart. En réalité, Perrier est un produit de luxe surtout consommé par les étrangers et les riches Chinois dans les hôtels et restaurants, bars et cafés d’un certain standing (où les bouteilles coûtent significativement plus cher que dans les supermarchés). Marché émergent, la Chine représente toutefois un potentiel immense, d’où cette volonté d’être présent. « Cela demande beaucoup de temps, mais la Chine est une de nos priorités ». Perrier est d’ailleurs leader sur le marché chinois de l’eau gazeuse, avec des ventes en constante hausse, surtout ces dernières années, souligne-t-on chez le géant suisse Nestlé, numéro un mondial des eaux en bouteille devant le

français Danone. Autre avantage, la faible concurrence. S’il existe quelques marques locales d’eau gazeuse, leur distribution reste géographiquement limitée. Aucune ne dispose d’un réseau de ventes à l’échelle du pays tout entier. Vigilance cependant. En 2007, la découverte de bouteilles contrefaites, de look quasiment similaire à celles produites en France mais remplies d’eau gazeuse naturelle produite à Dalian avait provoqué l’ire des salariés de Vergèze (Gard), source d’où provient la célèbre eau gazeuse. Ceuxci craignaient alors que Nestlé ne délocalise la production de l’eau Perrier à partir d’une source chinoise. Rumeur aussitôt démenties par la direction qui écarte encore aujourd’hui tout risque de délocalisation. « Perrier est un produit unique strictement lié à sa source. La délocalisation n’est absolument pas une option envisageable dans le futur », assure-t-on chez Nestlé Waters qui produit deux marques d’eau plate en Chine, Nestlé Pure Life et Nestlé Deep Spring. Au fil des années, le géant a néanmoins pris soin de renforcer sa surveillance à l’égard de la contrefaçon.

Mathilde Bonnassieux

自1 9 9 6 年 进 入中国市场, Perrier努力跻身于这个狭小的市 场。在中国,有气矿泉水只占普通 矿泉水销量的1%。 “中国消费者不 习惯喝有气矿泉水,但他们很感兴 趣。”雀巢水业集团中国区销售总 监Sara Vettori解释说。330毫升和 750毫升装的Perrier有气矿泉水售 价分别为11元(1.3欧元)和22元 (2 . 5 欧 元),只在家 乐福、欧 尚和沃尔玛之类的国际大型零 售超市有售。事实上,Perrier是 奢 侈品牌,消费群 体主要 是在 有一定档次的酒店、餐厅、酒吧 和咖啡馆里的外国人和有钱的 中国人,售价也明显高于超市。 作为新兴市场,中国具 有巨 大的发展潜力,因此公司愿意置 身其中。 “需要花费大量的时间, 但是中国是我们的发 展重心之 一。”Perrier已经是中国有气矿泉 水市场的领军品牌,尤其近几年销 量持续增长,领先于法国达能、全 球最大的瓶装水公司——瑞士食 品巨头雀巢强调说。另一个优势是 竞争少。虽然有几家有气矿泉水的 本土品牌,但它们的分销受到了地 域限制,没有一家拥有全国的销售 网络。 然而不能掉以轻心。2007年, 市场上发现了与法国生产的外观几 乎一样的仿冒瓶装水,但里面装 的是出自大连的天然有气矿泉水。 这引起了法国加尔省威尔杰兹镇 (Vergèze)员工的愤怒,Perrier矿 泉水的水源出自那里。他们担心雀 巢会把Perrier矿泉水的生产迁到中 国,使用中国的水源生产。这个传 言马上被公司管理层否定了,他们 今天仍在排除任何生产外迁的风 险。 “Perrier是独一无二的产品,与 其水源息息相关。在未来的时间 里,生产外迁绝对不是我们考虑 的选择。”在中国生产雀巢优活和 雀巢深泉饮用水的雀巢水务保证 说。雀巢逐年注意加强了对仿冒品 的监督。

octobre 2010 / Connexions 99


DOSSIER

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专栏

La consommation d’eau minérale a doublé en Chine entre 2005 et 2008.

2005至2008年间,中国矿泉水消费翻了两番。

Connaissez-vous vraiment votre bonbonne ? En zone urbaine, on consomme le plus souvent en Chine de l’eau traitée en bonbonne faute de pouvoir utiliser celle du robinet. Mais peut-on vraiment faire confiance à ces réseaux de distributions peu contrôlés et à leurs produits ? Dans les grandes villes chinoises, on trouve à tous les coins de rue de nombreux petits commerces de proximité : pressings, épiceries, teinturiers… parmi lesquels des « stations d’eau » (水站). Ces dernières livrent à domicile de l’eau potable conditionnée en bonbonne. Une « station d’eau » fonctionne selon un business model très simple : un numéro d’appel et une liste d’abonnés suffisent. Pour recruter de nouveaux clients, la petite entreprise dépose ses cartes de visite sur les comptoirs des magasins, les glisse sous les portes des particuliers ou bien colle des affiches dans la rue. Le client n’a plus qu’à téléphoner pour commander 100 Connexions / octobre 2010

sa bonbonne d’eau. Le paiement se fait à la livraison, qui est en général effectuée dans le quart d’heure. Tout se passe quasiment sans contact direct entre les 2 parties… sauf un petit bonjour au livreur quand on lui ouvre la porte. Le client ignore la plupart du temps le nom de la « station d’eau » à laquelle il est parfois abonné depuis des années. Ce modèle très efficace semble être adapté pour répondre à la demande pressante en eau potable, en quantité comme en qualité, de villes chinoises à la croissance tentaculaire. A Pékin l’eau du robinet est potable mais…

Dans la capitale chinoise, l’eau du robinet est officiellement potable. Les normes sur la qualité de l’eau ont été révisées en juillet 2007, juste avant la tenue des Jeux Olympiques et sont dorénavant conformes aux standards internationaux. 106 tests sont aujourd’hui nécessaires avant d’acheminer l’eau jusqu’au robinet des habitants comparé aux 35 exigés auparavant. Néanmoins, compte tenu de la vétusté des canalisations et des installations de plomberie, peu nombreux sont les Pékinois qui ont suffisamment confiance pour boire l’eau du robinet. La mise à niveau de ces normes n’a donc eu que peu de répercussion sur le mode


de consommation d’eau des habitants. Ils préfèrent toujours faire appel aux stations d’eau et leurs rassurantes bonbonnes sous scellés remplie d’eau parfois minérale mais le plus souvent dite purifiée. Les Chinois font traditionnellement très attention à leur santé. Ils sont donc particulièrement sensibles aux scandales qui touchent la sécurité alimentaire et qui font inéluctablement objet de grands tapages médiatiques. Ce fut le cas en juillet 2007 avec un reportage d’investigation sur le site du Quotidien du Peuple dans lequel le responsable d’une célèbre marque de bonbonnes d’eau déclarait estimer qu’à Pékin 50% des bonbonnes étaient des copies. Il reconnaissait lui-même en boire faute de pouvoir reconnaître les vraies des fausses. Selon le journal, les fraudes seraient dues au fait qu’à Pékin, les clients passent la commande directement à la « station d’eau » qui centralise les demandes et les transmet ensuite la commande au fabricant. Dans certaines autres grandes villes chinoises, comme à Canton, les clients passent directement la commande au fabricant qui livre ensuite à la « station d’eau ». Des bonbonnes parfois remplies à l’arrière des boutiques Yang Ayi, pékinoise de souche, travaille comme femme de ménage dans une société basée dans les hutong du vieux Pékin. Trouver une « station d’eau » de proximité pour son employeur n’a pas été chose facile. « Il y a beaucoup moins de stations d’eau dans les vieux quartiers depuis les scandales de ces dernières années, explique-t-elle. Personnellement, je préfère faire bouillir l’eau courante, comme mes voisins. C’est plus sûr que les bonbonnes d’eau. On raconte d’ailleurs qu’elles sont le plus souvent remplies avec l’eau du robinet. C’est simple, des provinciaux arrivent à la capitale, louent un taudis, font du bricolage et ça y est, une « station d’eau » est née ! ». Des numéros de série anti-copie existent pourtant sur les bonbonnes mais ils sont parfois eux-mêmes falsifiés ! Le meilleur moyen de se faire livrer de la « vraie » eau reste, selon les Pékinois, de faire semblant de vérifier le certificat de conformité de la bonbonne à chaque fois dans l’espoir d’inquiéter le livreur…

He Feng

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L’eau 水

Un puit du projet d’Initiative Développement au Guizhou. 法国发起发展项目在贵州打出 的一口井

« Rivières et ruisseaux sont à portée d’yeux mais bien loin des seaux des paysans », dit-on du haut des collines ocres du Guizhou.

Zones rurales : l’ONG Initiative Développement au Guizhou Dans cette province de Chine du Sud, la déforestation a causé une importante érosion des sols karstiques. Ceux-ci se sont fissurés, et ne retiennent plus l’eau, qui s’y infiltre profondément. C’est dans ce contexte de stress hydrique que l’ONG française Initiative Développement (ID)1 a mené de 2002 à 2009 un projet d’accès à l’eau dans des villages de la province du Guizhou. Des citernes familiales de récupération d’eau de pluie, des réservoirs et des latrines pour les écoles, des réseaux d’adduction gravitaire d’eau potable, ainsi que des puits, ont été construits facilitant l’accès à l’eau de 20 000 personnes. Un réseau auto-géré Les travaux ont été réalisés en collaboration avec les populations et des techniciens locaux, qui ont été formés à l’entretien des infrastructures construites et sensibilisés à l’hygiène. Dans les écoles, ID a offert des formations aux enseignants et leur a apporté des outils pédagogiques pour qu’ils dispensent des cours d’hygiène aux élèves. Des comités de gestion de l’eau en charge de l’entretien du réseau (financé avec l’argent régulièrement collecté auprès des usagers), et du partage équitable de l’eau ont été organisés. Ils assurent donc la pérennité de l’accès à l’eau dans leur village. Ainsi, le premier comité, créé il y a 6 ans, est toujours actif et est totalement autonome depuis 2007. Il gère de manière encourageante un réseau desservant plus de 2 000 bénéficiaires. Toutefois, certains défis posés par ce pro-

jet ont été plus délicats à surmonter. Principalement, c’est l’acceptation de certains équipements impliquant des changements d’habitude qui a été laborieuse. Ainsi pour assurer la qualité de l’eau, il est recommandé de couvrir les puits et d’en prélever l’eau avec des pompes. Mais les populations concernées ont souvent refusé ces dispositifs : souhaitant continuer à plonger leurs seaux directement dans les puits, les villageois ont délaissé les pompes. Un projet récompensé Par ailleurs, si la durabilité des constructions semble assurée, le problème du transfert de compétences en matière d’accès à l’eau à des organisations locales demeure. L’ONG n’a pour l’instant trouvé aucune organisation à qui confier la responsabilité du suivi des réseaux créés ou celle d’en concevoir d’autres à l’attention de populations rurales isolées. Au final, il s’avère que les garants de la pérennisation des projets d’ID sont les bénéficiaires eux-mêmes. Fin 2009, le projet d’ID a été couronné par un Energy Globe Award2, tandis que son financement s’interrompait, et qu’une sécheresse d’une ampleur historique affectait cette région. Assurément, le défi de l’accès à l’eau potable reste important dans les régions reculées du sud de la Chine.

Christophe BARRON et Joël BAUMGARTNER, Initiative Développement, www.id-ong.org/cn 1. ID s’implique notamment dans les domaines de la santé, l’éducation, l’environnement dans 6 autres pays, 2. Les Energy Globe Awards sont l’un des prix environnementaux les plus prestigieux, récompensent des projets intégrant développement durable et solidarité internationale.

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专栏

Des écoliers chinois brandissant le slogan « protégeons les ressources en eau » lors de la journée mondiale de l’eau le 22 mars 2010. 国 2010年3月22日世界水日,小学生挥动着“爱护水资源”的标语

Campagnes discrètes, timides mesures En matière d’économies d’eau, la Chine avait annoncé la couleur dans son 11ème plan quinquennal, prévoyant de réduire sa consommation de 20% par unité de PIB en 2010, par rapport à 2005. Pour tenir son ambitieux pari, des campagnes d’information s’imposaient. Que dire aujourd’hui de leur impact ? « Les Chinois urbains sont conscients de la rareté de l’eau et de la pollution, assure Zhang Hehe, de l’ONG Friends of Nature. Dans les villes, l’accès à l’information s’est développé avec internet et depuis 2000, la communication de l’état passe mieux auprès de la population. » D’après une enquête de cette ONG parue en juin 2010, 74% des Pékinois interrogés affirment ressentir l’impact de la rareté de l’eau dans leur vie quotidienne, et 70% pensent que prendre un bain est du gaspillage. Pourtant, poursuit Mme Zhang, « la participation du public reste faible, et il n’y a aucun d’effet d’entrainement pour promouvoir ces valeurs.». Des campagnes insuffisantes Et pour cause, la plupart des campagnes sont plutôt formelles, d’abord liées à la Journée mondiale de l’eau, le 22 mars. Il n’y a pas non plus de véritable campagne nationale, l’initiative étant déléguée aux régions, ce malgré la création en 2000 d’un « bureau national pour les économies d’eau ». Cette année, une centaine d’universités ont ainsi participé à la cam102 Connexions / octobre 2010

pagne « sauver une barrique d’eau ». Ironie des choses, l’événement est sponsorisé par Coca Cola, classée l’an dernier par Pékin comme l’une des 12 entreprises qui polluent le plus l’eau de la capitale, en raison de sa surconsommation. En 2010, le ministère de la Construction a également produit six courts-métrages sur les économies d’eau. Mais les slogans diffusés à cette occasion sonnaient creux : « Mobiliser l’ensemble de la population pour économiser l’eau », « Que les villes consomment moins d’eau : indispensable pour le développement durable », etc. Face à ces initiatives, Yao Yao, directeur de l’ONG Civil Society Watch, est très critique : « Dans les lieux publics, on trouve certes des flyers sur les bonnes pratiques, mais ce n’est pas systématique et c’est de toute façon insuffisant au regard du problème. » Réformer le marché pour changer les comportements Elément positif dans ce tableau, les actions éducatives d’ONG chinoises ou étrangères semblent destinées à relayer celles de l’état. Début 2009, vingt organisations ont lancé

un appel au grand public, et elles se mobilisent aussi en région, comme le montre l’exemple de Green Hanjiang, dans le Hubei, qui diffuse des notions de développement durable auprès des paysans vivant dans le bassin de la rivière Han, et relaie les préoccupations des populations auprès des autorités locales. Le problème, c’est que l’existence de ces ONG n’est pas toujours assurée, et que les campagnes d’Etat sont rarement suivies d’effets concrets. « Les mesures sont souvent prises quand c’est trop tard, explique Zhang Junfeng, de l’association Le Shui Xing. Les autorités du Yunnan ont attendu une grave sécheresse pour interdire aux gens de laver leur voiture. ». Pour Yao Yao, la priorité actuelle est moins de multiplier les campagnes que de s’attaquer à la réforme du marché de l’eau, plus efficace, selon lui, pour changer les comportements. Et de citer l’exemple d’universités de Pékin qui « font payer la douche à leurs étudiants en fonction du temps passé sous l’eau » !

Hélène Duvigneau


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Une marche organisée par l’association pékinoise « Le Shui Xing ».

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L’eau 水

“乐水行”北京志愿者组织的一次走水

Les Joyeuses marches au bord de l’eau

Parler moins, pour agir plus

Une ONG chinoise sensibilise les Pékinois à la pollution de l’eau Zhang Junfeng nous reçoit dans un joyeux bric-à-brac de geek, en banlieue nord de Pékin. A presque 50 ans, ce technophile ingénieur au ministère des Communications est d’abord un homme d’engagements. « Mon métier, c’est militer, et à côté, je suis ingénieur en satellites », explique-t-il non sans sourire. Dans son bureau aux murs tapissés de schémas compliqués, rien ne transpire de son combat environnemental, ni de sa connaissance pratique des 200 cours d’eau qui entourent Pékin, à l’exception d’une dizaine d’échantillons d’eau en bouteille, au-dessus d’une armoire. Fondateur de l’association Le Shui Xing 乐 水行 -les « Joyeuses marches au bord de l’eau » -, créée en 2007, l’homme entend sensibiliser les Pékinois au thème de l’eau, à mesure que certains cours s’assèchent ou dégagent des odeurs pestilentielles. « J’ai commencé par militer dans des ONG écolos à la fin des années 1990. A l’époque, le journaliste Feng Yongfeng les avait regroupées sous le concept « d’université de la nature ». Il s’agissait de rapprocher l’homme de la nature. C’est seulement après, en entamant des études de biologie en 2001, que je me suis intéressé à l’impact de l’activité humaine sur les rivières. ». Durant trois ans, entre 2003 et 2006, M. Zhang parcourt méthodiquement les 500 réservoirs de la région au volant de sa petite voiture, dans le but de dresser un état

des lieux pour ses travaux de recherche. Le voyant faire ses enquêtes en solitaire, Feng Yongfeng le pousse alors à s’ouvrir au grand public : c’est là qu’est née Le Shui Xing. Limité dans un premier temps à des amis militants, le cercle de participants s’élargit ensuite à des salariés, des étudiants et des retraités. « Aujourd’hui, nous sommes entre 30 et 100 à marcher tous les samedis. Chaque marche a son thème, et un accompagnateur explique les caractéristiques de chaque cours d’eau : sa faune, sa flore, et les transformations subies sous la pression de l’homme. Nous prélevons aussi des échantillons pour mesurer le degré de pollution. ». Mais attention, Le Shui Xing ne vise pas tant à recueillir des données qu’à intéresser les gens. « On ne peut pas toujours tout apprendre dans les livres ! », rappelle Zhang Junfeng. S’il s’intéresse à l’eau, et dit en consommer trois fois moins qu’un Pékinois moyen, c’est qu’il trouve la situation déjà très critique. « A Pékin, il manque 400 millions de m3 par an, et les besoins augmentent de 10% chaque année.» Or selon lui, la pénurie ne vient pas tant de l’industrie, que de l’homme. « Les villes consomment trop de ressources. Elles sont le cancer de la vie humaine…». Philosophe, il ne prône pas moins « la joie » de marcher au bord de l’eau. H. D. Site Internet : leshuixing.q.sohu.com

Le long du Yangzi, les paysans pâtissent quotidiennement et dans l’indifférence des autorités de la pollution des eaux du fleuve qui endommage leurs récoltes. Afin d’aider ces paysans, Wu Dengming a décidé de prendre lui-même les choses en main et a fondé une ONG, la Green Volunteer League dont le slogan est « parler moins pour agir plus ». Ce militant écologique, membre du Parti communiste, se bat pour la promulgation d’une loi qui permettrait aux ONG de porter plainte au nom de l’intérêt général lorsque les lacs et les rivières sont en danger. Pour convaincre les paysans de s’équiper de stations naturelles d’épuration par les plantes, il a installé un site d’épuration biologique à Wangjia, un village agricole proche de Chongqing qui produisait 800 tonnes d’eaux usées par jour, déversées ensuite dans le Yangzi. Grâce à cette station, les eaux usées qui transitent par des cultures de plantes dévoreuses de pollution sont naturellement épurées au terme de 24 heures dans ce circuit. Depuis 2009, une douzaine de stations du même type a été construite et une vingtaine d’autres est en cours. Dans un futur proche, Wu Dengming voudrait voir fleurir ces stations tout le long du Yangzi.

Any Bourrier

Site Internet : http://www.jeef.or.jp/ASIA/ china3/chongqing.html

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DOSSIER

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专栏

Ma Jun, artisan de la transparence Ancien journaliste rendu célèbre par son livre « La crise de l’eau en Chine » paru en 1999, Ma Jun poursuit sans relâche son combat pour la transparence des données sur l’eau. Le combat de Ma Jun est d’autant plus crucial que les catastrophes liées à l’eau sont aujourd’hui monnaie courante en Chine. « La meilleure arme contre la pollution, explique t-il, c’est d’impliquer la population en l’informant. ». Il faut dire que le gouvernement n’est pas un grand communiquant sur la question : selon le Washington Post, la Chine aurait publié début 2010 des chiffres révisés sur l’état de la pollution de l’eau qui seraient deux fois supérieurs à ceux annoncés en 2007, mais ceux-ci ne sont pas consultables par les citoyens… En 2006, Ma Jun crée ce qui deviendra son cheval de bataille, « l’Institut pour les affaires publiques et l’environnement » (IPE), une ONG indépendante dont le but est de lever le voile sur la pollution des cours d’eau. Comme méthode, Ma Jun choisit de s’appuyer sur le droit chinois, et sur la relative tendance du législateur à favoriser la transparence des données environnementales. Avec sa petite équipe, il entreprend donc de piocher dans les statistiques poussiéreuses des agences gouvernementales, et de relever les noms des entreprises polluantes déjà épinglées par l’état. S’ils veulent en savoir plus sur la qualité de leurs eaux, les

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internautes n’ont plus qu’à cliquer sur la carte de leur région. Il s’agit de la première initiative privée de mise en carte de la pollution des cours d’eau chinois, dont Ma Jun juge d’ailleurs qu’ils sont « à 50% non potables ». Après quatre années de compilation méticuleuse des données, l’IPE a répertorié 41 000 entreprises connues de l’administration pour avoir violé les lois sur l’eau. Certes, les gouvernements locaux n’ont pas toujours très bien réagi à cette « Glasnost » écologique. Certains ont même dépêché des émissaires à Pékin pour essayer de rayer des listings le nom des entreprises les plus chères à leur développement économique. Pourtant, comme le précise l’écologiste, « le but n’est pas de menacer les entreprises, mais de les inviter à prendre des mesures correctives. ». A l’avenir, Ma Jun espère enrichir sa base de données en fusionnant les informations disponibles sur l’eau et l’air, et en ajoutant celles sur les déchets dangereux et les émissions carbone. Un travail de fourmi qui pourrait se révéler à terme explosif. Site internet : http://en.ipe.org.cn/ ly.jsp?qybh= Hélène Duvigneau

Laché de carpes argentés par les riverains du lac Tai

Quand les riverains Les lacs constituent un élément clé de l’équilibre des écosystèmes et sont particulièrement touchés dans un contexte de croissance rapide comme c’est le cas en Chine depuis une trentaine d’années. Le pays compte environ 24 800 lacs naturels dont une vingtaine disparaissent en moyenne chaque année. Détournement des fleuves qui les alimentent, remblaiement par les ordures, sécheresses, sont autant de causes qui contribuent à leur disparition. De plus, près de 90% des lacs seraient en état d’eutrophisation et nombreux sont ceux pollués par les algues bleues. L’exemple emblématique est celui du lac Taihu, le troisième grand lac d’eau douce de Chine sur la frontière entre les provinces du Jiangsu (Nanjing), du Zhejiang (Hangzhou), et de la municipalité de Shanghai. Ce lac, dont la superficie est équivalente à 4 fois le lac Léman, est relié au célèbre Grand Canal qui, de Beijing à Hangzhou, parcourt 1 794 km. En 2007, le Taihu a été envahi par des al-


L’eau 水 Retrouvez les archives de Connexions sur :

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www.connexions.ccifc.org

durant l’hiver 2009.

2009年冬,太湖居民向湖里投放鲢鱼

partent au secours du lac Tai gues bleues pestilentielles, obligeant les autorités à arrêter l’approvisionnement en eau potable des riverains. En conséquence, dans la seule ville de Wuxi, 2,5 millions d’habitants ont été privés d’eau potable durant un an. La prolifération de l’algue était due aux rejets d’eaux usées industrielles et agricoles. Le scandale s’est transformé à l’époque en véritable crise politique depuis le sommet de l’Etat jusqu’aux gouverneurs des provinces concernées et aux municipalités riveraines. La province du Jiangsu a déjà dépensé l’équivalent de 80 milliards de RMB pour améliorer la qualité de l’eau du Taihu et des fleuves affluents. Sur décision des pouvoirs locaux, 1 000 usines pétrochimiques ont été fermées à Wuxi, Suzhou et Changzhou. 1 600 petites usines ont cessé leurs activités et 2 800 autres ont été déplacées. Mais c’est surtout l’action des riverains qui mérite d’être citée : ils ont formé des associations pour lutter contre la pollution des eaux du lac par leurs propres moyens. Début 2010,

ils ont acheté 330 000 carpes argentées pour aider à le nettoyer. Chaque carpe doit manger près de 50 kg d’algues et atteindre 2kg environ. Elles n’ont coûté aux riverains que 0,6 Rmb pièce. A la tête du combat on retrouve l’écologiste Wu Lihong, médaille d’or de la liberté attribuée par le groupe des Verts au Parlement de Strasbourg. Il a été arrêté le 13 avril 2007 et condamné à trois ans de prison. C’est au lac Taihu que le principe du « pollueur payeur » a commencé à être appliqué. Depuis, Wuxi a fermé son parc industriel et espère décrocher le label de « ville verte ». Par ailleurs, une réglementation transversale entre les riverains du lac est en cours d’élaboration pour coordonner les actions de dépollution et mettre en place des mécanismes d’indemnisation. Le Gouvernement de Nanjing, par exemple, a dû payer 18 000 Rmb à la ville de Changzhou qui, elle-même, a dû compenser la ville de Wuxi de 180 000 Rmb.

Any Bourrier

Au-delà des idées reçues, Connexions donne la parole aux experts et acteurs de terrain.

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DOSSIER

专栏

Les sciences et technologies au secours de l’eau

Le mur végétal du pavillon de la région Alsace durant l’Exposition Universelle de Shanghai. 上海世博会阿尔萨斯

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大区馆的植物墙

La Chine assoiffée de technologies et de coopérations scientifiques

Face aux défis liés à son exceptionnelle croissance économique, la Chine fait plus que jamais appel à la science et aux avancées technologiques pour trouver des solutions.

Dans un pays où les slogans ont une importance particulière, le choix de baser la construction d’une « société harmonieuse » sur « un développement à caractère scientifique » illustre bien la position actuelle des autorités chinoises. C’est avant tout la science et les avancées technologiques qui permettront de trouver des remèdes aux maux qui accompagnent la fulgurante réussite économique du pays. Barrages géants, réseau d’abduction d’eau aux proportions jamais vues, urbanisation galopante en zones peu favorables… La liste des projets illustrant le désir d’un contrôle puissant de l’environnement, et des ressources en eau en particulier, est en106 Connexions / octobre 2010

core longue. Forte de nouveaux moyens financiers et technologiques, d’une armada d’experts de mieux en mieux formée, l’empire du milieu se rêverait en maître de la nature, à l’image de la « France des ingénieurs » à la fin du 19e siècle. Le « laboratoire » Chine des années 2000 tourne cependant à une cadence bien plus rapide que l’Europe du début du siècle dernier. Les dégâts d’une industrialisation, d’un développement agricole et d’une urbanisation ultra-rapide sur les ressources en eau sont visibles en quelques années à peine. Le gigantisme d’infrastructures comme le barrage des 3 gorges soulève des problèmes écologiques avant même de tourner

à plein régime. Conscientes de ces limitations, les autorités chinoises apprennent à sortir peu à peu d’une vision uniquement technologique et à réfléchir à des modes de gestion mieux intégrés. Des milliards de yuans pour la recherche locale Reste que face à l’urgence de la situation actuelle, le pays doit trouver des solutions pratiques rapidement et investit massivement dans la recherche scientifique. En 2006, Ministère des Sciences et Technologie chinois (MOST) a lancé une série de 16 programmes majeurs nationaux de soutien à l’innovation locale étalés sur 15 ans. Un de ces programmes prévoit un budget de


L’eau 水 2 milliards de yuans alloué à la recherche pour la Chine qui est en forte demande scientifique sur le contrôle de la pollution de technologies mais également pour la de l’eau1. recherche française », explique Catherine Il s’agit de financer des projets pour fa- Bastien Ventura, responsable du programçonner des outils capables de répondre à me Chine à l’INEE « le fait de se confronter à la situation unique du pays. Méthodes de des situations extrêmes comme celle de la filtration ultra efficaces, monitoring des mi- gestion de l’eau en Chine impose de pencropolluants, biotechnologies de dépollu- ser les problèmes de manière transversale tion ou encore désalinisation, les domaines et intégrée et non plus sectorielle ; cela d’études sont nombreux. implique aussi d’envisager de nouveaux Ces recherches sont essentiellement réa- paradigmes, un point crucial pour le dévelisées au sein de l’Académie des Sciences loppement de la recherche scientifique en de Chine (CAS) mais aussi par des univer- général. ». sités et le CRAES, l’institut de recherche du Au delà des innovations techniques, la Ministère de la Protection de Chine s’intéresse beaucoup l’environnement (MEP). au système de gestion in« Face à Une coopération tégrée mise en place dans franco-chinoise solide l’hexagone. « Des agences l’urgence de La Chine sait aussi qu’elle des bassins dans les années la situation, à besoin de l’expertise 60 au mode de gestion acétrangère pour accélérer la Chine tuel, la France a su construila recherche locale et les doit investir re un modèle structuré et coopérations scientifiques efficace qui pourrait être massivement internationales sont nomrepris en Chine pour rationbreuses, en particulier avec dans la naliser sa gestion de l’eau » la France. estime la responsable du Ainsi depuis 1978, le CNRS recherche programme franco-chinois et la CAS sont liés par un scientifique. » au CNRS. accord de coopération gloUn avis repris par Denis bal. Fourmeau, ancien conseiller En 1997, un programme de de la section Sciences, techrecherche avancé sur le domaine de l’eau nologies, et environnement de la délégaest lancé grâce à une coopération entre le tion de l’Union européenne en Chine : MOST et le Ministère des Affaires Etrangè- « L’aspect révolutionnaire des agences, c’est res français. Il s’agissait essentiellement de d’avoir réuni autour d’une même table difdévelopper des outils structurants pour férents acteurs qui, en apparence, ont des faciliter les recherches conjointes et les intérêts divergents mais au final les déciéchanges. sions se prennent de manière concertée. A partir de 2004, le Programme de Recher- C’est un modèle globalement applicable che en Réseau (PRR) est inauguré avec 6 à la Chine ». axes majeurs : évaluation des ressources, Les autorités chinoises financent donc de gestion intégrée des bassins, suivi de la manière massive une recherche scienqualité des eaux, élimination des micro- tifique et technologique pour résoudre polluants, biotechnologies pour le traite- les problèmes d’eau car, sans innovations ment des eaux usées et recyclage des eaux technologiques, il n’y a pas à ce jour de sopluviales. lutions pérennes. Cette coopération s’est ensuite renfor- Elles semblent cependant aussi sortir du cée à partir de 2007 avec un partenariat « tout technologique » pour se tourner vers privilégié entre l’Institut Ecologie et Envi- une approche plus intégrée, de la même ronnement du CNRS (INEE) et la CAS. Le manière que des pays comme la France but étant d’améliorer la capitalisation des l’ont fait dans le passé sur des périodes de connaissances et les synergies interdiscipli- temps beaucoup plus longue. naires d’une collaboration assez fragmen- Nicolas Sridi 1. Données fournies par le MOST http://www.nmp.gov.cn/index. tée auparavant. htm « Cette coopération est très importante

Quelques pistes de coopération pour les technologies de demain Bio-capteurs : Avant de pouvoir traiter la pollution des eaux encore faut-il en connaître la nature exacte. Afin de pouvoir suivre in situ de manière fiable, continue, et à moindres coûts les polluants, des chercheurs français et chinois coopèrent sur l’élaboration de bio-capteurs. Il s’agit de trouver des éléments réagissant à une pollution chimique ou organique puis de transformer cette réaction en un signal qui puisse être interprété. La mise au point de ces capteurs est très complexe et demande des recherches poussées mais ces outils s’avèrent très efficaces et surtout peu onéreux. Bio-réacteurs à membranes : Pour traiter les eaux industrielles « à la source », les bio-réacteurs à membranes offrent une solution innovante et efficace. L’idée est de coupler une dégradation biologique des polluants à une filtration physique pour obtenir une eau qui puisse être réutilisée dans les processus industriels. Ce recyclage va permettre d’abaisser en amont les prélèvements d’eau et d’éviter de lourds rejets polluants des usines à la sortie. Modélisation climatique : Une récente étude franco-chinoise , « The impacts of climate change on water resources and agriculture in China», reprise par le magazine scientifique américain Nature s’intéresse aux évolutions climatiques en Chine depuis 1960. Elle met en évidence la réalité d’un réchauffement climatique sur la période et son impact sur l’eau et l’agriculture. Les simulations faîtes sur la base de cette étude prévoient une poursuite du réchauffement global et des conséquences importantes sur les ressources en eau du pays. Ces recherches sont évidemment très importantes pour évaluer les risques futurs et prendre des actions préventives lorsque cela est possible.

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专栏

Le dessalement, une solution d’avenir pour la Chine.

脱盐处理,中国未来的方案

La Chine met l’eau de mer en bouteille La Chine fait son entrée dans le cercle – relativement fermé – des pays producteurs d’eau douce à partir d’eau de mer. La Chine, futur « hydro-hub » mondial du ans – imbuvable en l’état – et de la rendre dessalement ? Franck Galland1 ose y croire, propre à la consommation. Un vieux rêve même si reconnaît-il, l’industrie chinoise de l’Homme, qui depuis 40 ans, rappelle le dans ce secteur est Français, est devenu encore « naissante ». « Cette technique une réalité « grâce aux techniques – cuMais, « dans un conpar dessalement texte de tensions hymulées ou non – de driques, particulière- pourrait fournir, distillation et de techment vives au nord avant 2020, plus niques membranaires2 et au nord-est de la ». Deux procédés qui Chine, le dessalement du quart de l’eau permettent d’isoler est devenu une solu- consommée dans le sel et les impuretés tion opérationnelle et contenus dans l’eau stratégique pour le certaines régions de mer afin de produigouvernement cen- côtières du pays. » re à l’infini ou presque tral qui s’oriente vers (les océans couvrent cette technologie à marche forcée ». De 70% de la planète) une eau saine et donc, quoi s’agit-il au juste ? Ni plus ni moins que commercialisable. Les débouchés et les apde puiser l’eau salée des mers et des océ- plications, on l’imagine, sont gigantesques. 108 Connexions / octobre 2010

Seul hic : la note reste salée. Il faut en effet compter, d’après Franck Galland, entre 0,5 et 1,8 dollars US - selon la technique utilisée - pour produire un seul mètre cube de cette eau traitée. Rien d’étonnant donc à ce que de nombreux pays du Golfe, pauvres en eau et riches en dollars, se soient imposés comme les maîtres incontestés de l’eau de mer sans sel. L’Arabie Saoudite, immense territoire à sec (le pays n’est traversé par aucun cours d’eau permanent naturel) de 2 millions de km², est le plus grand producteur d’eau par dessalement au monde3. 3 millions de m³/jour en 2020 Pour l’instant, la Chine, elle, est encore loin derrière. Seules quelques provinces côtières se sont lancées, depuis peu et souvent à titre d’expérience pilote, dans ce business


dit marginal (la part d’eau douce produite par dessalement représente à peine 1,5% de l’eau consommée au monde). Pékin espère toutefois, d’ici 5 à 10 ans, passer à une vitesse nettement supérieure. « Les prévisions à horizon 2015 sont estimées à 2,5 millions de m³/jour et à 3 millions de m³/jour en 2020 (contre 400000 m³/jour en 2009), ce qui permettrait alors de fournir jusqu’à 24% de la ressource en eau dans certaines villes (proches des côtes) », pronostique le responsable de la sureté de Suez Environnement. La Chine, estime-t-il, semble « avoir clairement pour ambition de devenir un des leaders dans le dessalement, dés que sa courbe d’apprentissage sera atteinte ». Ambitions qu’elle commence – au nord du pays essentiellement – à dévoiler. En juin dernier, la ville de Tianjin annonçait ainsi être en mesure de livrer chaque jour l’équivalent de 100 000 m³ d’une eau propre à la consommation, après avoir été purifiée de ses impuretés de sel. D’après la presse chinoise, Tianjin Beijing Power Plant, l’entreprise qui gère cette toute nouvelle usine, devrait dès 2012 doubler sa capacité de livraison. La province du Shandong, voisine, concentre par ailleurs les plus gros investissements du secteur (construction de stations de dessalement, R&D, essais sur prototypes, etc.), évalués jusqu’en 2012 à près de 500 millions de dollars US. D’autres nouveaux projets sur le dessalement sont également à l’étude dans le Liaoning et le Hebei. Pour les opérateurs étrangers, en avance sur cette technologie, l’avenir en Chine s’annonce donc particulièrement radieux. A condition là encore d’innover et de rester compétitif. Car la Chine pourrait, comme à son habitude, doubler tout le monde. « Sur les marchés extérieurs, il est à craindre une concurrence chinoise agressive pour les grandes entreprises occidentales », reconnaît à nouveau Franck Galland. « Un dessalement « made in China » devrait ainsi être progressivement disponible sur des marchés très demandeurs en ressource alternative, comme l’Australie ».

Pierre Tiessen

1. Responsable sureté de Suez Environnement, auteur en 2008 de « Géopolitique du dessalement », Fondation pour la Recherche Stratégique. 2. Ibid. La distillation utilise l’évaporation – via chauffage thermique – pour séparer l’eau des impuretés de sel. La filtration membranaire utilise, elle, le procédé d’osmose inverse pour retenir les sels contenus dans l’eau. 3. Ibid. En 2005, le royaume saoudien produisait quotidiennement près 3 millions de m³ d’eau douce à partir d’eau de mer.

Des agents du département local de météorologie préparent un lance-roquette pour créer une pluie artificielle à Huaibei (Anhui) en février 2009.

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L’eau 水

2009年2月,安徽淮北气象部门的工作人员为人工降雨准备火箭发射器。

Pluie artificielle : la Chine à l’assaut des nuages Maîtriser la pluie, le fantasme est vieux comme le monde mais en Chine c’est devenu un véritable programme gouvernemental avec ses objectifs quinquennaux. Si les scientifiques restent sceptiques, la modification climatique continue d’être utilisée massivement ici, souvent faute de mieux… Plus de 7000 canons anti-aériens, 5000 lance-roquettes, 35 OOO hommes et 30 avions, il ne s’agit pas d’un nouveau régiment de l’APL mais bien de l’équipe chinoise dédiée à la création de pluies dîtes « artificielles » sur l’ensemble du territoire. En 2009, le budget alloué à ce projet avoisinait les 100 millions d’euros contre 40 millions en 2003 et il devrait continuer à croître, selon Zheng Guogang, directeur de la China Meteorological Administration (CMA). Sur la période 2006-2011, un objectif de 48 à 60 milliards de m3 de précipitations « artificielles » a même été fixé par les autorités centrales. Derrière ces chiffres imposants se cache une volonté simple : augmenter les pluies dans les zones de sécheresse qui ne cessent de s’étendre en Chine, en particulier dans le nord-est du pays. La théorie Il ne s’agit cependant pas de créer des

précipitations ex nihilo dans un ciel d’azur mais plutôt de perturber la structure interne de nuages préexistants pour déclencher les pluies. Concrètement, les chinois injectent dans les masses nuageuses de l’iodure d’argent dont la structure est proche de celle des cristaux de glace. Ces cristaux vont alors servir de « noyaux » nécessaires pour initier les interactions physiques et chimiques aboutissant à la pluie. Voilà pour la théorie, reste que dans la pratique il est très difficile de prouver que cela fonctionne réellement. « La position de l’Organisation météorologique mondiale est très claire » prévient Jean-louis Brenguier, responsable de la recherche expérimentale à Météo France « on n’est pas encore capable de prouver l’efficacité de ces techniques d’ensemencement même si il est certain que perturber la microphysique d’un nuage a un impact ». De fait, la complexité des phénomènes météos est telle

•••

octobre 2010 / Connexions 109


DOSSIER

专栏

••• qu’il est impossible de prouver que

c’est bien l’action de l’homme qui a fait pleuvoir ou même qu’il aurait plu moins abondamment sans intervention. Dans ces conditions, pourquoi continuer à financer un tel programme ? « Pour lutter contre la sécheresse, soit on fait venir de l’eau d’ailleurs soit on essaye de faire pleuvoir pour recharger les nappes phréatiques. Or la pluie artificielle est une solution nettement moins coûteuse que des grands travaux de détournement de fleuves même si ces techniques ne sont pas encore matures » explique sans détour Hu Zhijin, un des chercheurs pionniers des modifications climatiques à la CMA. Loin des médiatiques fantasmes de maîtrise totale de la nature, c’est donc le pragmatisme économique qui est le plus puissant moteur du programme local de pluie artificielle. « Ce que font les chinois n’est pas inutile » ajoute néanmoins en nuançant Jean-Louis Brenguier, « En emmagasinant aujourd’hui des données sur le terrain, les scientifiques locaux pourront à l’avenir affiner plus rapidement leurs modèles et obtenir des résultats concrets quand les technologies auront atteint des niveaux suffisants, peut être dans une décennie voir plus ». Touche pas à mon nuage ! Et quand la pluie artificielle sera devenue une réalité tangible, elle apportera aussi dans son sillon son lot de problèmes juridiques. Il faudra en effet définir à qui appartiennent des masses nuageuses peu enclines à respecter des frontières par définition. Un tel problème a déjà été soulevé en 2004 en Chine, 2 villages du Henan s’étaient à l’époque accusés réciproquement d’avoir volé leurs précipitations après une opération d’ensemencement. « Il faudra encore une vingtaine d’années de recherches avant de pouvoir mettre en place un cadre juridique adapté pour ce genre d’opération » reconnaît Hu Zhilin, une manière élégante d’avouer que les résultats actuels restent peu probants. Et en attendant, la Chine reste donc, comme les autres pays, dépendante du bon vouloir de Mère Nature en matière de précipitation.

110 Connexions / octobre 2010

Nicolas Sridi

Réintroduire la biodiversité, une étape indispensable dans la gestion de la ressource en eau.

Vers une gestion optimale de l’eau en milieu urbain Des étudiants du Master EnvIM de l’Isige-Mines ParisTechTsinghua ont rédigé une étude sur la gestion de l’eau dans la ville de demain en Chine « En Chine, il existe désormais une loi sur l’économie circulaire qui encourage les usines à utiliser au maximum les déchets produits par d’autres sites industriels », remarque Josepha Shu, l’une des onze élèves du Master International Environmental Management (EnvIM) de l’IsigeMines ParisTech-Tsinghua. Une manière de suggérer qu’une tendance favorable à la gestion durable des ressources existe bel et bien en Chine. Pour autant, dans le domaine de l’eau, le chemin à parcourir est encore long. Aujourd’hui, la ressource eau est gérée de manière linéaire dans les agglomérations : « On fait venir de l’eau, on l’utilise, et on la rejette. Mais on peut imaginer une boucle qui intégrerait de meilleurs traitements, du recyclage, qui prendrait en compte

l’importance de la biodiversité et l’impact écologique sur les sources d’eau, qui réduirait le gaspillage, qui améliorerait l’efficacité énergétique, etc. », insiste l’étudiante actuellement en mission professionnelle chez Schneider Electric. Avec ses camarades d’EnvIM, et en collaboration avec les étudiants du master Alef (Alternatives pour l’énergie du futur », Josepha Shu a participé à la rédaction d’une étude « sur la gestion de l’eau dans la ville de demain et de ses impacts sur la production d’énergie » et présentant un certain nombre de suggestions et d’innovations. Un recueil de réflexions qui se fonde d’abord sur un constat : « de fortes pressions s’exercent sur les villes qui croissent rapidement : pénurie, inondations, changements climatiques, pollution des sources, destruction


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L’eau 水

重新引入生物多样性,水资源管理的必经阶段

des écosystèmes, surexploitation. » Particulièrement concernées, les nappes phréatiques : « On constate un effondrement des volumes et une pollution des eaux souterraines les plus proches du sol. ». Ainsi, sur la municipalité de Pékin, 50% de ces réserves souterraines affleurantes seraient touchées par une certaine pollution... Le « mix eau » Dans ces conditions, il est impératif pour les centres urbains de développer « un vrai potentiel d’adaptabilité à ces conditions changeantes. ». D’où l’importance de réaliser un « mix eau » équilibré, c’està-dire une meilleure répartition des différentes sources d’approvisionnement : précipitations, eaux de surface ou nappes phréatiques. « Ce ‘’mix’’ est différent pour chaque agglomération », précise l’étudiante, car il dépend des particularismes topographiques, géographiques et climatiques locaux. Par ailleurs, c’est le b.a.-ba, mais il faut vérifier l’état des équipements installés : « localiser et réparer les fuites, très nombreuses, surveiller l’état des pompes, etc. ». A ces recommandations s’ajoutent une foule de petites astuces peu coûteuses et pourtant encore trop rarement utilisées en Chine :

installer des grillages d’aération pour les robinets, préférer des machines à laver à hublot frontal (qui consomment jusqu’à deux fois moins d’eau que les machines à ouverture verticale), etc. Mais au-delà de ces mesures de bon sens, le travail d’EnvIM insiste surtout la responsabilité des urbanistes à repenser la ville dans son ensemble, et à lui apporter des innovations. Parmi celles qui pourraient être appliquées en Chine, Josepha Shu mentionne les murs végétaux et les « toits verts » qui permettent une meilleure isolation thermique en réduisant par exemple la déperdition calorifique en hiver, donc la consommation de chauffage. Pendant l’été au contraire, ils favorisent la conservation de la fraîcheur, et économisent de 25 à 50% d’électricité sur la climatisation. Autre intérêt des toits recouverts de pelouse, ils permettent « la régulation des eaux pluviales : absorption d’une partie de l’eau par les plantes, évaporation d’une autre partie, et évacuation dans le réseau avec un délai. » Ce système présente de surcroît l’avantage de constituer un purificateur d’air capable de capturer jusqu’à deux kilogrammes de particules en suspension par mètre carré et par an. D’autres mesures plus lourdes sont proposées. L’étude insiste par exemple sur la nécessité de réimplanter de la biodiversité dans les villes. Ainsi, l’installation de massifs de roseaux et de piscines naturelles permettrait de traiter l’eau contre une partie de la pollution. « Ils ne sont d’aucun secours contre certains germes pathogènes, mais seraient un bon complément des autres systèmes de traitement. ». Pour autant, tempère la jeune scientifique, pour envisager ce genre d’option, il serait nécessaire de réaliser un travail éducatif en amont, parce que « de l’eau traitée dans les marais, ça n’inspire pas encore vraiment confiance aux gens »... Et de pointer du doigt un autre problème : « Le manque de surface disponible »... L’économie circulaire Cette restriction serait par exemple rédhibitoire à Pékin, une agglomération sur laquelle les étudiants se sont particulièrement penchés, dressant un état des lieux de sa situation délicate. Ici, « il y a un fort déséquilibre entre l’offre et la demande. Dans ce climat semi-aride, les réservoirs de

surface de la ville s’assèchent, et le niveau des nappes phréatiques baisse. ». Pour remédier à ce déficit, des dérivations d’eau ont été réalisées ; d’autres sont en cours. Pourtant selon le rapport de l’Envim, des mesures complémentaires sont nécessaires. Multiplier les systèmes de moissonnage des eaux pluviales et, surtout « il faut adapter l’agriculture au climat, en choisissant des cultures moins gourmandes en eau. ». Selon Feng Jun, spécialiste du marché de l’eau et des eaux usées en Chine pour Schneider Electric, la technologie reste le recours incontournable. Il vante en particulier les process développés ou améliorés par l’entreprise française. « L’un de nos principaux procédés du traitement de l’eau est l’élimination du phosphore et de l’azote, qui est réalisée au moyen d’une réaction biologique dans des cuves dédiées. Ce n’est que grâce à une oxygénation très précise qu’on va permettre aux bactéries aérobies d’avoir une activité suffisante pour achever la réaction biologique, et donc, pour obtenir la meilleure élimination possible des composés chimiques. En Chine, Schneider Electric a mis au point l’algorithme de contrôle de l’oxygénation, en remplacement d’un algorithme plus traditionnel. Nous avons aussi développé un procédé de filtration intelligente pour le traitement de l’eau potable », rapporte-t-il. Quelles que soient les méthodes privilégiées à l’heure actuelle par les agglomérations, un consensus émerge parmi les spécialistes de l’eau : il est nécessaire de tendre vers un système intégré de recyclage. En pratique, et pour le seul exemple des stations d’épuration, les résidus solides récupérés après séparation des eaux usées pourraient être mis à fermenter afin d’obtenir du méthane, donc de l’énergie. Ou bien pourraient-ils être employés, dans certains cas et après assèchement, à la fertilisation des terres agricoles, à l’épandage en forêt, etc. L’eau pourrait, quant à elle, être injectée dans les systèmes de refroidissement des centrales thermiques, en l’utilisant pour l’arrosage des paysages ou encore en l’exploitant dans les process industriels... A l’évidence, les applications du principe d’économie circulaire ne manquent pas. Reste à en persuader les décideurs publics. Manuel Rambaud

octobre 2010 / Connexions 111


DOSSIER

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专栏

La Chine fait de plus en plus appel à l’aide des pays étrangers pour améliorer sa gestion de l’eau. 中国越来越多地向国外求助以改善其水资源管理。

Empreinte eau : vous êtes peut-être vert… mais serez-vous bleu ? Les notions d’empreinte écologique ou carbone ont mis plusieurs années avant d’être harmonisées et le concept d’empreinte eau, plus récent, demande à être affiné. Linda Wang, responsable du développement des nouveaux produits chez Bureau Veritas, nous éclaire sur les enjeux de ce nouvel instrument. D’après le chercheur hollandais Arjen Y. Hoekstra1, considéré comme le père du concept, « L’empreinte eau (water footprint en anglais) est un indicateur de l’usage direct et indirect de l’eau par le consommateur ou le producteur. L’empreinte eau d’un individu, d’une communauté ou d’une entreprise est définie comme le volume total d’eau douce nécessaire pour la production de marchandises et services consommés par l’individu, la communauté, ou produit par le commerce. ». Selon Linda Wang, « le calcul de l’empreinte eau permet d’obtenir des données significatives d’évaluation et d’amélioration de l’efficacité énergétique ou de développe112 Connexions / octobre 2010

ment durable des produits, des organisa- comme le Gobal Water Tool2 ou le Busitions, des Etats ou des individus. ». Dérivé ness Water Footprint Accounting3. Par ailde la notion d’empreinte écologique, le leurs, une initiative para publique, The CEO concept est notamment Water Mandate, vise la censé répondre à la néconstitution d’un cadre cessité d’information « L’empreinte d’intervention censé resdes consommateurs (via eau de la Chine ponsabiliser les entrel’étiquette des produits) prises dans l’utilisation de est d’environ et de garantie de sécurité la ressource en eau. 3 des productions dépen- 700 m /an/ « Sur le plan international, dantes des ressources en il est nécessaire que l’ISO 4 habitant . » eau - notamment dans harmonise au plus tôt l’industrie alimentaire ou les divers standards sur textile - dans des pays où elles sont limi- l’empreinte de l’eau pour faire en sorte tées ou menacées. Plusieurs organisations que les résultats du calcul des différentes ont développé des instruments de calculs, entreprises soient comparables. », explique


L’eau 水 Linda Wang. C’est ce que l’ISO prévoit pour 2011 avec la publication officielle de l’ISO 14046, Empreinte eau – Exigences et lignes directrices qui complétera les normes existantes sur l’analyse du cycle de vie (ACV) et les travaux sur l’évaluation de l’empreinte carbone. Cette norme impliquera de nombreux facteurs complexes, comme celle de « périmètre » (prise en compte de la fabrication ou de l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement), et relatifs (un volume d’eau donné ne représente pas la même pression hydrique selon la région dans laquelle il est consommé). D’après Linda Wang, « en Chine, le ratio de l’utilisation de l’eau recyclée est d’environ 10%, alors qu’il est de plus de 70% dans les pays développés. Israël est le pays champion en matière de l’utilisation de l’eau recyclée, 100% de l’eau usée pour vivre et 70% de l’eau usée dans les travaux urbains est recyclée. En Chine, pour l’instant le recyclage de l’eau n’est pas attractif pour les entreprises car peu rentable. Si les prix de l’eau utilisée dans l’industrie étaient mieux réglementés, cela favoriserait une première prise de conscience. ». Rendez-vous en 2011 pour voir comment la Chine accueillera l’empreinte eau de l’ISO.

• Flore Coppin

1. Professeur de management des ressources en eau l’Université de Twente aux Pays-Bas. 2. Créé par le World Business Council for Sustainable Development (WBCSD). 3. Publié par UNESCO-IHE.

水足迹标准 “中国每年人均水足迹约700立方米。” 生态足迹即碳足迹的概念是在

水足迹:要求和指南。ISO14046将

提出多年后才统一起来,因此最近

补充现有的建立在生命周期评价

提出的水足迹概念还需要不断完

和碳 足迹评 估工作基础上的标

善。必维国际检验集团新产品发展

准。这个标准将包含许多像参数

主管王迎利向我们介绍了这一新工

(考虑到生产和整个供应链)之类

具的相关情况。

的复杂因素和相对因素(一定的水

最早提出水足迹概念的荷兰学 者Arjen Y. Hoekstra认为,水足迹是

Ce réseau international, cousin Global Footprint Network, regroupe une centaine de partenaires (institutions académiques, ONG, agences gouvernementales, entreprises,…) qui développent les standards de la comptabilité de l’empreinte eau et ses outils de calcul. www.waterfootprint.org

Empreinte eau de quelques aliments Soja : 1800 l. pour 1 kg Maïs : 900 l. pour 1 kg Bière : 75 l. pour 1 verre Riz : 3400 l. pour 1 kg Thé : 30 l. pour 1 kg

代表着不同的压力)。

消费者或生产者直接或间接用水

王迎利指出, “中国大陆可再

的一个指标。个人、团体或企业的

生水的利用率约10%,而发达国家

水足迹是指为了生产个人和团体消

已经超过70%。以色列是再生水利

费的商品和服务或企业消费的产品

用率最高的国家,100%的生活污

所需的淡水资源总和。

水和72%的市政污水均得到回用。

王迎利认为,水足迹的核算有

目前在中国,由于污水回用无利可

助于为产品、组织、国家或个人能

图,所以对企业厂商缺乏吸引力。

效的提高及可持续发展的评估提

如果对工业污水的价格更好地加

供有意义的数据。由生态足迹概念

以管理,这将有助于形成初步的认

衍生而来的水足迹概念是为了满

识。”2011年让我们拭目以待,看

足消费者了解更多相关信息(通过

看中国如何迎接ISO组织的水足

产品的标签)和保证依赖于水资

迹国际标准。

源生产的安全需要,尤其是食品业

Le Water Footprint Network

资源数量根据消费水的不同地区

和纺织业,在一些国家里,这些行 业发展有限或受到威胁。一些组

水足迹网

织开发了一系列计算水足迹的工

水足迹网类似于全球生态足迹

具,比如世界可持续发展工商理事

网,汇集了100来家合作伙伴

会开发的全球水工具和UNESCO-

(包括学术研究机构、非政府组

IHS出版的《企业水足迹会计准

织、政府部门、企业等),致力

则》。另外,还有横跨公共与私营

于开发水足迹的会计标准和计算

组织领域的“CEO水之使命”倡 议,旨在建立一个行动框架,使企 业负起在水资源使用中的责任。 国际上还需要由ISO组织尽早 将各个水足迹标准进行统一,使不 同企业在计算水足迹时结果更具 可比性,王迎利解释道。ISO组织 计划于2011年正式发布ISO14046-

方法。www.waterfootprint.org

一些食物的水足迹 1公斤大豆:1800升 1公斤玉米:900升 1杯啤酒:75升 1公斤大米:3400升 1公斤茶叶:30升

octobre 2010 / Connexions 113


DOSSIER

专栏 branes - sont selon nous des impasses écologiques : que faire des concentrats, ces pollutions hyper-concentrées qui restent à la fin du processus de dépollution, et quel est le coût de leur élimination ? Selon nous, les rejets sont des ressources qui ne sont valorisables qu’en passant par des solutions biologiques vivantes comme les solutions végétales du Jardins Filtrants. Celles-ci font preuve de très grandes performances et nécessitent de faibles coûts de gestion et de maintenance qui peuvent diviser par deux le coût du traitement de l’eau.

C. : Pourriez-vous nous décrire en quoi consiste le projet de Jardins Filtrants du quartier de Jinhe à Wuhan ? T. J. : En 2007, Phytorestore a été mission-

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né par le groupe d’aménageur Topéak pour l’écoquartier Jinhe de Wuhan, suite à un appel d’offre lancé par le ministère l’Environnement chinois pour la réalisation de quartiers écologiques modèles. Le jardin filtrant du quartier de Jinhe à Wuhan. 武汉金河(音译)地区的过滤花园 Le projet de Jinhe a d’ailleurs gagné le Prix national du quartier écologique modèle en 2008. Phytorestore est intervenu comme « Ecoligal Landscape Designer » en collaboration avec deux cabinets d’architectes allemand Le jardin filtrant, une gestion alternative des eaux polluées et australien. Nous avons apporté notre expertise en optimisant de nouveaux asurbaines pects de design écologique : création de couloirs de ventilation naturelle, d’une Phytorestore est une jeune tore ? réserve naturelle au bord d’un lac... Parmi entreprise française inno- Thierry Jacquet : Nous partons du principe les innovations, nous avons intégré une vante spécialisée dans la que la ville est un ensemble de boucles nouvelle gestion de l’eau axée sur la réudépollution par les plantes écologiques qu’il faut gérer localement et tilisation après traitement via des Jardins et le paysage écologique. que les espaces paysagers Filtrants. Ce quartier de Créatrice du concept de urbains doivent être reconWuhan génère en moy« En Chine, il Jardins Filtrants- des espaces verts uti- nus comme des lieux de enne 10 000 m3 d’eaux lisant la phytoremédiation pour dépolluer restauration des ressources faut allier le usées par jour et la strades eaux usées - l’entreprise investit dans naturelles et non comme savoir faire tégie a consisté à mettre la R&D en association avec des équipes des espaces verts quelen place deux systèmes scientifiques du CNRS de Grenoble et conques. La solution des très créatif distincts de gestion des dépose entre un et deux brevets par an à usines de retraitement des français et eaux. Les eaux grises 1 l’international. Phytorestore dispose d’une déchets par leur suppres- soit 6 000 m3 par jour agence de représentation en Chine depuis sion nous apparaît comme l’excellence - sont collectées dans 2005 et y réalise en moyenne un à deux une impasse héritée de l’ère un système particulier technologique chantiers par an, du design au suivi de industrielle. Aussi, grâce en pied d’immeuble qui d’innovations chantier. aux analyses du cycle de permet leur réutilisation Thierry Jacquet, le directeur et fondateur vie, transparaîtra bientôt la scientifiques. » pour des usages très de Phytorestore nous présente le projet de nécessité de traiter les cosensibles (climatisation, jardin filtrant que l’entreprise a installé dans produits chimiques utilisés lavage de routes, eaux le quartier de Jinhe à Wuhan. pour le traitement des eaux. Aujourd’hui, techniques etc.), les eaux noires2 - soit Connexions : Pourriez-vous nous présenter le les meilleures innovations technologiques 4 000 m3 - par jour sont traitées dans un peconcept du Jardin Filtrants que propose Phytores- - comme, par exemple, les filtres mem- tit parc filtrant de 8 000 m2 en bord de fleu-

Des stations d’épuration vertes

114 Connexions / octobre 2010


L’eau 水

Source : Phytorestore

ve dans un grand parc paysager récréatif. La réutilisation de 6 000 m3 d’eaux grises traitées permet d’économiser par conséquent 6 000 m3 d’eau potable en moins.

C. : Selon vous, ce type de solutions alternatives a-t-il de l’avenir en Chine ? T. J. : La phytoremédiation des eaux usées se développe très bien à l’étranger et beaucoup plus qu’en France où les barrières administratives et le lobbying industriel sont des facteurs sclérosants. Il est très intéressant de voir comment la Chine peut très vite essayer des nouvelles technologies, puis prendre du recul. La Chine connaît

une très forte évolution dans les techniques de phytorestoration même si pour l’instant les approches américaines restent dominantes. La mise en place de nos filtres plantés a dans un premier temps souffert des confusions engendrées par les « constructed wetlands » (simples bassins plantés extensifs avec de nombreuses limites en terme d’espaces et de performances), mais depuis deux ans notre technologie est mieux reconnue. Ainsi, durant l’Exposition Universelle, les Jardins Filtrants ont été utilisés par le Pavillon de la France pour traiter ses eaux usées. Cette visibilité nous

a déjà permis d’être invités à participer à d’importants appels d’offres pour des stations d’eaux usées pour des zones de plus d’1,5 millions d’habitants. Le fait d’avoir réalisé plusieurs projets à Shanghai (dépollution de rivières à Quingpu, jardins filtrants pour le centre de R&D de l’Oréal à Pudong, ect....) nous permet d’avancer peu à peu en Chine, avec la patience du jardinier…

Propos recueillis par Flore Coppin

1. Les eaux grises sont les eaux usées non-industrielles produites par les activités domestiques. 2. Les eaux noires, plus polluées que les eaux grises, contiennent diverses matières plus difficiles à éliminer.

octobre 2010 / Connexions 115


姊妹省份 RÉGIONS JUMELLES

Le Guangxi, future plateforme d’intégration économique entre la Chine et l’ASEAN La province du Guangxi bénéficie des politiques nationales en faveur des provinces de l’intérieur et constitue une tête de pont du renforcement des liens économiques et financiers avec les pays du Sud-Est asiatique. Par Alain Berder, chef de la Mission économique à Canton

Des ressources naturelles importantes En 2009, le PIB du Guangxi a atteint 771 milliards de Rmb, niveau qui situe cette région autonome au dix-huitième rang national (sur 31 provinces, régions et municipalités autonomes). 62% de sa population, qui compte 51 millions d’habitants, réside en zone rurale, et 38% dans les centres urbains (rapport inverse du Guangdong respectivement 33% et 67%). Le revenu disponible urbain a progressé de 12% en 2009 à 15 451 Rmb (2272 USD) contre 10,6 % en zone rurale (3 980 Rmb). Le commerce extérieur du Guangxi reste peu développé en raison de sa géographie montagneuse, du sous-développement des transports et du faible montant des investissements étrangers (1 Md USD en 2009) bien qu’en progression par rapport à 2007 (684 M USD) et 2008 (971 M USD). En 2009, il a enregistré un déficit commercial de 3,7 Mds USD malgré la progression des exportations 116 Connexions / octobre 2010

Pékin

Shanghai

Guangxi Canton Hong-Kong

Guangxi en chiffres Superficie : 236 700 km2 Population : 51 millions d’habitants PIB : 711 Mds de Rmb (2009)

(manganèse, véhicules à moteur — 7,5 % de la production chinoise —, équipements mécaniques…) qui ont représenté 4,9 Mds USD (+27,4%) alors que les importations étaient en hausse de + 6,8 % à 8,6 Mds USD.

Son économie repose encore principalement sur l’exploitation des ressources naturelles qui représente 55 % du PIB contre respectivement 20% et 25% pour l’industrie (IAA, métallurgie, industrie pharmaceutique, automobile, pétrochimie…) et les services (tourisme —principalement Guilin — logistique, électricité…). Le Guangxi bénéficie par ailleurs de certains atouts. Il détient 20 % des réserves chinoises de bauxite et a d’ailleurs développé une industrie de l’aluminium en valorisant ses importantes ressources hydroélectriques (8,9% de la production chinoise) alors que son industrie sucrière représente 64,2% (2008) de celle de sucre raffiné (contre 60,7% en 2007). Go West Policy Malgré un effet de base certain, la forte croissance du Guangxi en 2009 (+ 17,9%) s’explique par les politiques de soutien des autorités de Pékin en faveur des provinces de l’intérieur. La région fait partie des 12 provinces de


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GUANGXI 广西

Vue sur Nanning, la capitale du Guangxi. Le Guangxi fait partie des 12 provinces bénéficiant de la politique de soutien Go West Policy. 广西省省会南宁。广西省是享受国家西部大开发政策的12个省份之一。

l’Ouest et du Centre pour lesquelles les autorités centrales ont lancé en 2005 une politique de soutien, la Go West Policy. Elle a conduit à des investissements massifs dans les infrastructures et au maintien des politiques préférentielles — notamment en matière fiscale — pour attirer les investisseurs étrangers. En avril 2005, la China Development Bank a ainsi approuvé un prêt de 11 Mds de Rmb pour le développement de la zone économique de la baie de Beibu située à la frontière avec le Vietnam, dans l’ancien golfe du Tonkin, afin d’encourager les entreprises d’Etat chinoises à y investir. Cette zone englobe les villes de Beihai (une des 14 villes ouvertes en 1984, devenue lieu de villégiature des cadres du PCC), Qinzhou (où PETROCHINA a inauguré en 2010 une raffinerie d’une capacité de 10 millions de tonnes) et Fangchengang (où CGNPC construit une centrale nucléaire). Elle devrait devenir à terme l’un des principaux centres de l’industrie pétrochimique de Chine du Sud (projet de raffinerie de

SINOPEC à Beihai, doublement de la capacité de la raffinerie de Qinzhou,…). Les retombées de la politique du « double transfert » En décembre 2008, la Commission Nationa le à la Réforme et au Développement ( NDRC ) a adopté un programme de modernisation de l’économie du Guangdong à l’horizon 2020. I l v i se à f avori ser l ’a rrivée d’investissements étrangers dans les industries de haute technologie et les services à valeur ajoutée et, de façon concomitante, à déplacer les industries à forte intensité de main d’œuvre vers les régions moins développées du Guangdong et les provinces de l’intérieur. Les effets de cette politique s’ajoutent à ceux de la précédente : depuis 2005, plus de 200 membres de la Fédération des Industries et du Commerce du Guangdong ont investi 29 Md s de R mb (4,3 Md s USD) dans le Guangxi. Les 4/5ème des entreprises implantées sur la zone de « processing trade » de Beihai sont

originaires des provinces de la bande côtière (principalement du Guangdong), le 5ème restant provenant de Hong Kong, Taïwan et Macao. Le rôle de l’accord sur le China-ASEAN Free Trade Area Pour les autorités de Pékin, le Guangxi (au même titre que la province de Hainan) constitue une tête de pont de leur politique en faveur du renforcement des liens économiques et financiers avec les pays du Sud-Est asiatique en raison notamment de sa frontière avec le Vietnam. L’accord de libre-échange entre la Chine et l’ASEAN (CAFTA, China-ASEAN Free Trade Area) entré en vigueur au 1er janvier 2010 porte sur 7 000 produits représentant 90 % de leurs échanges. Dans une première étape, il s’applique aux six principaux pays de l’ASEAN (Brunei, Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour et Thaïlande). Le commerce avec l’ASEAN représente 35% des échanges commerciaux du Guangxi dont 80% avec le Vietnam (importation de charbon notamment). Les

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姊妹省份 RÉGIONS JUMELLES

Le tourisme est l’une des activités économiques les plus importantes de cette région.

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banques de l’ASEAN sont par ailleurs encouragées à ouvrir des filiales dans le Guangxi afin de contribuer à l’utilisation du yuan pour les paiements transfrontières. Le développement des infrastructures de transport Selon le Président de la région autonome Zhuang du Guangxi, M. Ma Biao, le renforcement des infrastructures de transport constitue un axe majeur de la stratégie de développement économique de cette région. 25 lignes ferroviaires (représentant 4 000 km) et 23 autoroutes (représentant 3 100 km) sont prévues et certaines déjà en construction. En avril 2008, les autorités ont annoncé qu’elles consacreraient un budget de 233 Mds de Rmb au secteur des transports, soit le triple des investissements destinés à ce secteur au cours des cinq dernières années. Il s’agit en particulier de la ligne ferroviaire à grande vitesse qui reliera en 2012 Nanning et Canton en trois heures (au lieu de 13 h en 2010) et de celle également en construction entre Nanning et Kunming. Des lignes ferroviaires permettront aussi de relier Nanning aux trois villes de la baie de Beibu en 1 heure à partir de 2012. Nanning : un essor étroitement lié à l’intégration économique régionale En 2000, le PIB de Nanning (7 millions d’habitants) était de 37 Mds de Rmb. 118 Connexions / octobre 2010

En 2010, il devrait atteindre 180 Mds de Rmb (contre 150 Mds Rmb en 2009), soit un quintuplement en 10 ans. Au cours de cette décennie, les revenus fiscaux ont été multipliés par 8 et les investissements en capital fixe par 13 (148 Mds Rmb en 2010 contre 11 Mds Rmb en 2000). La croissance économique de Nanning bénéficie du renforcement des échanges avec l’ASEAN. Elle accueille chaque année au mois d’octobre le salon China ASEAN Expo (CAEXPO) auquel participe l’ensemble des pays de l’ASEAN et la plupart des provinces et municipalités chinoises. Son statut de capitale régionale la place au centre de la stratégie de développement économique du Guangxi. Elle devrait ainsi se doter d’une nouvelle gare TGV (investissement de 6 milliards de Rmb) et d’un nouvel aéroport international (investissement de 6 milliards de Rmb). En 2012, de nouvelles lignes ferroviaires la relieront à Canton et aux trois principales villes de la baie de Beibu alors qu’elle constituera le point de convergence de 6 nouvelles autoroutes actuellement en construction. Nanning s’est dotée d’un nouveau quartier d’affaires situé à proximité du parc des expositions de CAEXPO (construit par un architecte allemand) et d’ouvrages d’art (musée des Minorités nationa les, siège du

旅游业是这个地区的主要经济来源之一。

Gouvernement régional) à la hauteur de ses ambitions. La France : un des principaux investisseurs étrangers L a centra le t hermique (720 M W ) construite en BOT (1997 – 2015) par EDF (et initialement Alstom) à Laibin demeure l’un des principaux investissements étrangers dans le Guangxi. Elle a donné lieu à la création de deux sociétés : FIGLEC (filiale à 100 % d’EDF et propriétaire de la centrale thermique) et SYNERGIE (partenariat associant EDF International et deux acteurs locaux de la distribution). La centrale de « Laibin B » représente 6,7 % de la production électrique du Guangxi (15% du thermique). Parmi les principaux investissements français au Guangxi, citons ceux de VEOLIA Water à Liuzhou (eau potable), de NEX ANS (câbles) et de ROQUETTE (polyols) à Nanning et de LESAFFRE à Laibin (levure). La PME DUVAL MESSIEN dispose à Nanning d’une société d’assemblage de composants de paratonnerres. Plusieurs entrepreneurs individuels se sont implantés à Nanning (chocolatier lyonnais) et à Guilin (restauration, hôtellerie). Plus récemment, la société Guangxi Vent a lancé le projet de construire un quartier français à Nanning.


GUANGXI 广西 Présence ancienne et actuelle de la France dans le Guangxi. 永福 (1837-1917), qui fut finalement, mais non sans mal, vaincu par l’Amiral Courbet en 1885. La France retrouve dans le Guangxi le rang qu’elle occupait autrefois, à la grande satisfaction des autorités de la Région autonome qui y recensent 44 projets d’implantation français, dont les plus importants sont à Laibin 来滨, avec la centrale thermique dont l’exploitation est confiée à EDF jusqu ‘en 2015 et, tout récemment, l’usine de levures Lesaffre, inaugurée officiellement le 29 juin 2010 en présence de l’Ambassadeur de France, M. Hervé Ladsous. Selon le « Président » (gouverneur) de la Région autonome, M. Ma Biao (il appartient à l’ethnie Zhua ng ), la Fra nce y occupera it le cinquième rang au nombre des investisseurs étrangers. Sinon à cause de nos liens anciens, les autorités de la Région autonome considèrent à juste raison que la France a un rôle important à jouer dans le

Guangxi. C’est ainsi que nous étions en 2009, le seul pays occidental représenté à la foire annuelle Caexpo à Nanning. La région Nord Isère répondra présente à nouveau cette année. La région PoitouCharentes est jumelée avec le Guanxi. Un partenariat a été établi entre le département de la Seine et Marne et la ville de Nanning. Les 5 consulats d’Asie du Sud-est implantés dans le chef-lieu de la Région autonome : Birmanie, Cambodge, Laos, Thaïlande et Vietnam, soulignent l’importance des échanges entre le Guangxi et les pays de l’Asean. Les autorités de Pékin ont en effet dévolu à la Région autonome un rôle pivot avec cette vaste région où des accords de libre échange (CAFTA) ont été mis en œuvre au début de l’année 2010. J e a n -R a p h a ë l P e y t r e g n e t Consu l Génér a l

de

Fr a nce

à

C a nton

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La France a des relations anciennes avec cette partie de la Chine qui correspond à la « Région autonome de l’ethnie Zhuang du Guangxi » 广西壮族自治区. Notre présence dans cette région, qui doit son nom et son statut au fait qu’elle était au début de la République populaire de Chine essentiellement habitée par l’ethnie Zhuang (aujourd’hui un peu plus d’un tiers de la population), remonte à la guerre sino-française (1881-1885). Plusieurs vestiges du passé, tels que d’anciens consulats, bureaux de poste, églises, etc. bien entretenus et signalés par les autorités locales, rappellent aux visiteurs que la France y était même très présente : à Wuzhou 梧州, Beihai 北海, Longzhou 龙州 ou encore Zhanjiang 湛江 (à l’époque le Guang xi et le Guangdong ne formaient qu’une seule province dite des « deux Guang » 两 广 ). On y trouve aussi dans la ville de Qinzhou 钦州 la résidence du redoutable chef des Pavillons Noirs, Liu Yongfu 刘

Un échangeur routier à Nanning. Le renforcement des infrastructures de transport est un axe majeur de la stratégie de développement du Guangxi. 南宁立交桥。加强交通设施建设是广西发展的一大重心。

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姊妹省份 RÉGIONS JUMELLES

L’équipe de l’entreprise Lesaffre à Shanghai.

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L’électricité de Laibin B, moteur du développement du Guangxi

法国乐斯福集团驻上海的工作团队

La levure est un procédé connu depuis la nuit des temps, mais seules quelques entreprises comme Lesaffre, société familiale créée en 1853 dans le Nord de la France, aujourd’hui leader mondial du marché des levures de panification, maîtrisent parfaitement d’un point de vue industriel. Une expertise qui permet à l’enseigne française d’être l’un des principaux acteurs du secteur en Chine. Pour sa nouvelle usine à Laibin dans la province du Guangxi, qui a démarré en janvier 2010 et qui vient d’être inaugurée le 29 juin, Lesaffre s’est associé avec le grand groupe chinois sucrier Donta. Si cette joint-venture, tenue majoritairement par Lesaffre à 60%, est si importante, c’est parce que « développer nos parts de marché en Chine est notre priorité », explique Sylvain Parpaite, tant sur le segment de la boulangerie (40% du marché chinois) que de celui du pain vapeur chinois, le « mantou » (60 % du marché chinois). Lesaffre avec sa marque phare Saf Instant et Donta, avec sa marque Danbaoli, sont parfaitement complémentaires sur ces 2 segments. Lesaffre, qui est aussi le leader mondial dans le secteur des extraits de levure, en produira également sur ce site, via sa filiale BioSpringer-Ypinxian. L’objectif est donc bel et bien de gagner des parts de marché en Chine et de « croiser davantage le fer avec la concurrence locale ». C’est pour se donner les moyens de cette ambition que les deux partenaires ont consenti cet investissement de 450 millions de Rmb. Si Sylvain Parpaite nomme ce développement « Laibin phase 1 », c’est parce que l’offensive ne s’arrêtera pas avec l’implan120 Connexions / octobre 2010

tation de ce nouveau bastion. « L’objectif est de doubler la production dès 2012 », souligne-t-il. Plusieurs facteurs ont conduit au choix d’une implantation industrielle dans la province du Guangxi. D’abord, pour la proximité de plusieurs sucreries du groupe Donta, qui fournit un produit dérivé du sucre, la mélasse, nutriment essentiel pour la multiplication du champignon. Ensuite la proximité avec le marché du Sud-est de la Chine et un accès facile au delta de la rivière des Perles, point de départ pour les exportations. Enfin, « nous entretenons d’excellentes relations avec les autorités locales », qui nous apportent tout leur soutien, par exemple en nous facilitant certaines démarches administratives. Le Guangxi « n’est donc pas qu’une province rurale et touristique : elle s’ouvre au secteur industriel et son développement est soutenu par l’Asean ». Une région potentiellement intéressante pour l’entreprenariat puisque « les salaires, les coûts d’investissements y sont pour l’heure moins élevés que dans le Guangdong par exemple ». L’ambition de Lesaffre est avant tout portée par les perspectives de développement du marché chinois qui, accéléré par l’occidentalisation du mode de vie, le changement des habitudes alimentaires, la modernisation des boulangeries, la multiplication de grandes enseignes industrielles chinoises ou étrangères, « deviendra le 1er marché mondial d’ici à 2020 ». Dans ce contexte, gageons que Lesaffre continuera à investir en Chine, pour accompagner cette croissance et conforter sa place de leader mondial.

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De la levure dans le Guangxi, nouvelle implantation de Lesaffre en Chine

La centrale thermique Laibin B.

来宾电厂B厂

La centrale thermique de Laibin B est l’une des grandes réalisations françaises dans la région autonome Zhuang du Guangxi, en Chine du sud. Le contrat de type BOT (Build Operate et Transfert) signé entre la Figlec (filiale à 100% d’EDF) et le gouvernement local stipule que la structure sera cédée en 2015. Mais pour l’heure, c’est Synergie, une autre filiale à 85% d’EDF, qui exploite le site. Et une poignée de chiffres suffisent à mesurer l’importance de Laibin B. Ainsi, avec ses deux unités de 360 MW, soit une puissance totale de 720MW, elle fournissait en 2000 à elle seule 15% de l’énergie de la province (et représente aujourd’hui encore 15% de l’énergie d’origine thermique, le Guangxi étant mieux doté en moyens de production notamment hydraulique). Pour générer une telle quantité d’électricité, pas moins de 7 000 tonnes de charbon sont brûlés quotidiennement lorque la centrale fonctionne à pleine puissance. « Notre parc à charbon a une capacité de 180 000 T », précise Jean-Luc Lusven, le responsable de l’exploitation de la centrale, qui déplore que l’approvisionnement en combustible constitue « une problématique majeure tant pour la quantité que pour la qualité qui n’est pas toujours conforme aux spécifications requises. ». L’impact de la centrale sur le développement du Guangxi est sensible. Ainsi, l’implantation du site à la fin des années


1990 a permis la création d’emplois qualifiés, dans cette province dont l’économie était surtout fondée sur l’agriculture. Des profils professionnels rares, donc convoités qui, dans les premiers temps, ont été difficiles à fidéliser : difficile pour le conjoint de trouver du travail localement, faiblesse des infrastructures de santé et d’éducation, etc. « En 2004, le turnover atteignait 14%. Aujourd’hui il est inférieur à 1% ». Une nette amélioration permise par la mise en place de mesures incitatives, le renforcement des « postes sensibles et le recrutement d’ingénieurs fraîchement diplômés. ». Même si la centrale a obtenu la qualification environnementale ISO 14001, les principales difficultées rencontrées actuellement par la centrale concernent le respect de la réglementation vis à vis des émissions de SO2 (oxydes de soufre), cette réglementation ayant récemment évolué et conduit à des limites beaucoup plus sévères qu’au moment du lancement du projet. La construction récente d’une usine de désulfuration des fumées devrait à court terme résoudre ces difficultés. « Même si actuellement, l’usine ne fonctionne pas de manière optimale, la situation devrait bientôt revenir à la norme ». Jean-Luc Lusven admet passer beaucoup de temps à la centrale. Quant à Laibin même, son attachement est réel. Ses loisirs, il les consacre notamment au sport : « Le vélo en particulier. Et la nage. La nature est agréable ici », apprécie-t-il. « Il y a des balades intéressantes ; un bon potentiel touristique. » : Mais dans cette ville de 600 000 habitants , même si des améliorations sont tangibles, des manques en matière de santé et d’éducation demeurent. Une amélioration à laquelle Figlec et Synergie participent à leur manière. Les Français ont en effet initié une démarche au profit d’écoles primaires. Un mécénat dont profitent plus particulièrement deux établissements proches, qui ont reçu des équipements et qui ont été rénovés. « Des formateurs en informatique ont également été envoyés. Pour les élèves qui sont parfois jusqu’à 70 par classe, les conditions de travail sont difficiles. » Une initiative citoyenne que le deuxième plus gros contributeur de la province en termes de taxes pourrait d’ailleurs approfondir à l’avenir.

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GUANGXI 广西

Roquette se situe parmi les leaders mondiaux de la nutrition humaine et animale. 罗盖特是全球食品及动物营养领域的领先企业.

La Chine : une cible immanquable pour Roquette « Nous achetons des céréales ou des tubercules. Notre métier consiste à transformer, par des procédés industriels, ces ingrédients en produits qui restent naturels. » En décrivant son activité professionnelle, Thierry Laurent, le directeur général Asie de Roquette, est pour le moins prosaïque. Pour autant, bien vite, on devine l’envergure réelle du groupe : situé parmi les leaders mondiaux dans les ingrédients pour la nutrition humaine et animale, il occupe également une place de choix « dans le développement de la biotechnologie. Nous sommes en particulier numéro 1 ou 2 dans certaines spécialités issues de l’amidon ou de ses co-produits (amidons modifiés, polyols, glucose, maltodextrines). » Une position qui permet à Roquette de travailler « en partenariat avec des grandes firmes alimentaires ou pharmaceutiques, pour lesquelles nous développons les ingrédients de demain, alimentaires ou pour la chimie bio-sourcée », c’est à dire la chimie verte. Selon Thierry Laurent, l’implantation de Roquette en Chine était incontournable : « Attractif par sa taille, le marché local impose qu’on y soit actif aussi par le développement de la concurrence qu’il génère : j’ai coutume de dire qu’on peut décider de ne pas y être présent, mais qu’on l’ignore à son grand péril… ». Dans cette perspective, après une première implantation directe dans la province du Jiangsu (Roquette China), le groupe a enraciné sa position par la prise de contrôle de Guangxi Nanning Chemical Pharmaceutical, qui « nous a donné une présence en Chine dans le mannitol, un produit dans lequel Roquette est leader mondial et souhaitait localiser son activité. ».

Pour le directeur Asie du groupe français, la province du Guangxi permet de fonctionner sur « une base de coûts relativement plus basse que d’autres provinces côtières. Par ailleurs, on y est généralement bien reçu et il semble que l’on puisse y bénéficier de certaines aides liées à la politique du Go West. ». Toutefois précise-til, ces caractéristiques n’ont « pas été une motivation importante pour nous ». Principal point faible de la région : « La tradition industrielle y est moins développée que dans le Nord ou le Centre du pays, ce qui peut nuire à la productivité et demande des efforts initiaux de formation un peu plus grands. ». Une caractéristique heureusement contrebalancée par le fait que « la compétence scientifique et universitaire présente dans le Guangxi est tout à fait intéressante dans nos industries. » C’est d’ailleurs un enjeu crucial pour l’enseigne française, qui emploie d’ores et déjà 1 400 collaborateurs en Chine : « Nous avons des profils très variés, des plus industriels aux prof ils commerciaux ou fonctionnels. Nous avons les mêmes défis que toutes les entreprises internationales : les ressources humaines sont essentielles dans tous les pays du monde, et le contexte chinois de croissance accélérée les rend d’autant plus délicates à rassembler. ». Habitué à gérer les nombreux aléas inhérents au business dans ce pays, Thierry Laurent, circonspect, ne prétend pourtant pas pouvoir donner de conseils pour réussir : « La Chine est un monde en soi, on doit prendre le temps et mettre l’énergie nécessaire. Le reste est affaire d’écoute et de professionnalisme »...

M a n u e l R a m b au d

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旅游 TOURISME

普瓦捷未来影视城Kinémax馆

Futuroscope : le Kinomax

普瓦图-夏朗德大区 普瓦图-夏朗德大区位于巴黎盆地(bassin  Parisien)和阿基坦盆地(bassin  Aquitain)之间。其内陆地 区的宁静氛围令人陶醉,与坐拥美丽岛屿和金色沙滩的大西洋沿岸那欢腾的氛围形成鲜明对比。除 了毋庸置疑的自然风光优势,普瓦图-夏朗德大区还拥有建筑瑰宝。从普瓦捷(Poitiers)一直到桑特 (Saintes),甚至该沿线以外的地方,这片阳光明媚的地区拥有一批迷人的罗曼风格教堂。普瓦图-夏朗 德大区以举办众多的艺术节而自豪,这里是一片名副其实的艺术土壤,无论何种艺术均能包容接纳! “在这片平原……一种高贵的贵族气质不可思议的映入您的眼帘并且进入您的心房,令您永远不能对那些再 平常不过的美景无动于衷”。

Jérôme et Jean Tharaud

如果您有兴趣阅读更多的旅游资讯文章可登陆www.michelin.com.cn本版文章及图片由“米其林地图和旅游指南”提供,版权专有。未经 米其林事先书面许可,任何个人或企业不得以复制、转载(包括网上转载)或其他任何方式使用其中的任何内容(包括文字和图片)。 米其林保留对任何未经授权的使用追究法律责任的权利。如需转载或发现文章中有不妥之处或有任何意见和建议,请发电子邮件至: map.guide@michelin.com

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本专栏内容由米其林旅游出版公司提供


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Poitou-Charentes 普瓦图-夏朗德大区

拉罗歇尔,宗教战争时期新教的堡垒

La Rochelle, bastion du protestantisme pendant les guerres de religion

大区简介:

都市的优点,同时也保留了自身的人文

来世界影视乐园成为可能!

面积:2.58万平方公里

特色。这里的文化活力体现在那些大学

瓦龙(Oiron)

人口:约174万

生身上,在大街小巷和露天咖啡座上随

文 艺 复 兴 风 格 的瓦 龙 城 堡 ( C h â t e a u

包含省份:夏朗德省(Charente)、滨海夏

处可见他们的身影!普瓦捷的市中心以

Renaissance  d’Oiron)是德塞夫勒省的骄

朗德省(Charente-Maritime)、德塞夫勒省

圣母教堂为核心分布,拥有中世纪街区

傲,它成功的实现了一个大胆的设想:将

(Deux-Sèvres)和维埃纳省(Vienne)

和步行街,令您能够惬意地漫步徜徉。

古代艺术与当代艺术相结合。文艺复兴风

大区旅游局网址:

圣母教堂(Notre-Dame-la-Grande)这座罗

格的侧翼画廊装饰得富丽堂皇,悬挂的油

http://www.poitou-charentes-tourisme.com

曼风格的教堂坐落在夏尔·戴高乐广场

画题材取材于特洛伊战争。而距此不远

(place  Charles-de-Gaulle),昔日这里曾经

的几个大厅却在彰显当代艺术,例如:怪

普瓦图地区(Le Poitou)

建有一座高卢罗马人的异教神殿。教堂是

兽馆(cabinet des Monstres) 展示着托马

普瓦图地区地处海岸内陆,避开了海滩及

典型的普瓦图建筑,精美绝伦的教堂正立

斯·格林菲尔德(Thomas Grünfeld)令人称

海滨度假地的喧嚣繁闹。普瓦图沼泽地带

面建于12世纪,以众多雕像和浅浮雕作为

奇的创作。

颇具忧郁气质,生活节奏更为缓慢和宁

装饰,是最完整的一面“展示立面”之一。

猛禽的芭蕾

静。若想体验完全不同的氛围,您可以前

实际上,教堂的正立面仿佛一纸“雕刻书

绍维尼(Chauvigny)拥有不下5座城堡,

往普瓦捷未来世界影视乐园(Futuroscope

页”,在上面能够清晰明了地阅读到《圣

这些城堡的遗迹如今 依然俯瞰着城

de Poitiers),寻求刺激的游客绝对不会失

经》的内容。

市。它们 构成恢 宏壮 观 而且令人印象

望!

未来世界影视乐园(Parc du Futuroscope)

深刻的布景,尤其是每年 4月至10月的

普瓦捷(Poitiers)

距离普瓦捷以北10公里,您将进入一座拥

猛禽 训练 表演时,各种各 样的猛禽 都

普瓦捷是维埃纳省的首府,也是普瓦图-

有未来主义风格建筑的游乐园,接触到一

会以一种令人不安的方式盘 旋在 城堡

夏朗德大区的首府。普瓦捷具有所有大

个高科技的游乐世界。寓教于乐,这在未

遗址上空。

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旅游 TOURISME

雷岛的沙丘

Dune de l’île de Ré

••• 尼奥尔(Niort)

的当属圣皮埃尔大教堂(la cathédrale St-

的最高教堂。

一座城堡主塔,在左岸俯瞰着尼奥尔塞夫

Pierre,建于12世纪)。

拉罗什富科(La Rochefoucauld)

尔河(la Sèvre Niortaise)。这座拥有诸多方

漫画!

城市上方矗立着一座精美的城堡。这座昔

塔的宏伟建筑内如今不再关押囚犯,而是

近年来,昂古莱姆在每年的1月底都会因

日的中世纪堡垒在16世纪经过大规模的

陈列着当地的考古发现。

为国际漫画节(Festival international de la

美化装饰,两侧建有高大的石板瓦圆塔。

潮湿的沼泽地带

bande  dessinée)而热闹非凡。当您信步

城堡内的图书馆以藏书丰富而闻名于世,

尼奥尔是出发探访普瓦图沼泽地带,尤

徜徉时,会发现墙壁上画的不是“幸运

里面收藏有一件名副其实的瑰宝:由法国

其是“ 绿色 威尼斯 ”地区( la  « Venise

的卢克”(Lucky  Luke),就是“布尔和比

哲学家狄德罗(Diderot)编纂的《大百科全

verte »)的理想地点。若想更好的品味这

利”(Boule et Bill),或者是“布拉克和莫

书》(Encyclopédie)原件。

些地方的魅力,最适宜的方式莫过于乘坐

蒂梅”(Blake et Mortimer)、 “傻小子加斯

科尼亚克(Cognac)

一叶小舟安静而缓慢的探索漫游。

东和莱奥·普吕内尔”(Gaston Lagaffe et

科尼亚克为其所在地区名扬世界所做的

Léon Prunelle),以及其他漫画人物。

贡献毋庸置疑,这里酿造的金黄色饮品

德罗讷河畔欧布泰尔

同样享有盛誉。奥塔尔(Otard)、轩尼诗

夏朗德省以平和为特色:平缓的地势和原

(Aubeterre-sur-Dronne)

(Hennessy)、马爹利(Martell)这些著名的科

野,柔和的光线及色调……

在蓊郁的绿荫环境中,德罗讷河畔欧布泰

尼亚克白兰地酿造公司都敞开各自的酒库

昂古莱姆(Angoulême)

尔令人提前体验到法国西南部的特色。它

接纳参观客,为白兰地爱好者揭开这种名

“建在一块圆锥形的岩石顶部”,巴尔扎

的魅力当然来自那些妆点有木阳台的漂亮

贵烧酒的神秘面纱。1200平方米的科尼亚

克(Balzac)在小说《幻灭》(Les  Illusions

的老房子。然而最为壮观的无疑当属圣让

克白兰地艺术博物馆(Le musée des Arts

perdues)中曾经这样描绘昂古莱姆。在上

岩石教堂(l’église rupestre St-Jean)。它是

du cognac)展示与这种烧酒相关的不同职

城有城墙保护的迷人小巷中,隐藏着一

由丘陵上的一块石灰岩石开凿而出的,于

业和技术。

批漂亮的古代建筑,其中最为引人注目

12世纪建成,是法国境内由整块岩石建造

皮诺葡萄甜酒的诞生

夏朗德省(La Charente)

124 Connexions / octobre 2010


Poitou-Charentes 普瓦图-夏朗德大区 16世纪,一位葡萄酒酿造者无意间将葡

映在绿荫中的豪华别墅和维多利亚风格

Nicolas)静静注视着老港船坞内来来往往

萄汁遗留在一个装有少许科尼亚克白兰地

的宅邸赋予鲁瓦扬独一无二的特点。这个

的船只。它修建于14世纪,带有枪眼和堞

的大酒桶中。由于发现这只酒桶中并未发

惹人瞩目的地方曾经接待过埃米尔·左拉

眼的高大墙壁赋予它堡垒的气势。塔楼俯

生任何发酵现象,他便将其遗弃在酒库深

(Emile Zola)、萨沙·吉特里(Sacha Guitry)以

瞰着加比街区(quartier du Gabut),这里的

处。几年之后,他却惊喜的发现,这只酒桶

及毕加索(Picasso)。毕加索于1940年在此

房屋拥有色调艳丽的彩绘木立面,从塔顶

中产生了一种甜味葡萄酒,酒味浓郁而且

地创作了《海滨酒吧》(Le Bar des Bains)。

放眼望去,能够饱览锚地、小海湾以及艾

果香四溢!夏朗德皮诺葡萄甜酒就这样诞

然而在1945年,盟军的轰炸摧毁了鲁瓦

克斯岛(l’île d’Aix)的美景。

生了……

扬的大部分地区。战后,鲁瓦扬依据克洛

老城区(Quartier ancien)

德·费雷(Claude

滨海夏朗德省 (La Charente-Maritime)

Ferret)的设计规划得以

大钟门(la porte de la Grosse-Horloge)是老

重建。在“大海岸”(la Grande côte)的岩

港和老城区之间的通道,哥特风格大门上

石地上,汹涌的海浪拍打着格拉沃角(la

的钟塔建于18世纪。大钟位于钟塔内,在

桑特(Saintes)

pointe de Grave)、科尔杜昂灯塔(le phare

两座塔楼上面的海洋装饰物之间。

这座具有2000年历史的古城曾经是旧省

de Cordouan)以及弧线灯塔(le phare de la

音乐狂潮

圣通日(la

Saintonge)的首府,它位于滨海

Courbe),景象蔚为壮观。

拉罗谢尔的老港每年围绕法国国庆日都

夏朗德省中部。在高卢罗马时代遗留的古

动物园(Parc zoologique)

会举办一个为期6天的音乐节。名为Les

迹中,尤其值得注意的有日耳曼尼库斯许

坐落在一片松树与橡树林中的拉帕尔米

Francofolies的音乐节将话筒交给那些法

愿拱门(l’arc votif de Germanicus)以及稍微

尔动物园(la Palmyre)非常引人注目。这座

语区的艺术家们,无论他们是否有名,都

远离老城的高卢罗马圆形剧场。考古博物

14公顷的动物园中生活着大约1600只各种

可以在户外举办融合了摇滚乐、综艺节目、

馆(Le musée archéologique)还保留有一些

各样的动物:熊、猎豹、狮子、狼、狮子、斑

爵士乐、说唱音乐在内的音乐会。

公元1世纪末一辆高卢罗马战车上令人称奇

马、大羚羊、黑斑羚。人们在这里还能看

雷岛(Ile de Ré)

的部件。

到爬行动物、大象、河马以及许多拥有漂

雷岛是著名的地标,无论是谁都会被岛上

欧奈(Aulnay)

亮羽毛的鸟类。

爬满紫藤的白色房屋所吸引。保护圣马丁

欧奈的圣皮埃尔教堂(L’église St-Pierre)是

奥莱龙岛(Ile d’Oléron)

德雷(St-Martin-de-Ré)城镇的防御工事曾

普瓦图罗曼风格艺术的建筑杰作,入选联

一旦越过卢瓦堡(le Fort Louvois,也称

由沃邦(Vauban)重建,它们见证了这座城

合国教科文组织世界遗产名录。人们在教

为“勒沙皮堡Fort du Chapus)之后,奥莱

镇昔日的重要军事地位。

堂的雕塑中能够辨认出神话传说中的各

龙大桥(le pont d’Oléron)便径直通往法国

种动物形象、耶稣基督的使徒和信徒以及

本土的第二大岛屿:奥莱龙岛。岛上低矮

普瓦图-夏朗德大区的美食

《启示录》中描绘的老者。

的白色石灰房屋以蜀葵、金合欢、欧洲夹

普瓦图-夏朗德大区的大厨们极具才华:

圣 乔 治 - 德 迪 多 讷 ( St- G e orges- de -

竹桃作为妆点,使这座岛屿成为一道靓丽

他们运用当地的海产品和陆地食材烹饪美

Didonne)

的风景。位于法国西部海岸的这座岛屿保

味。而且数量众多!

这是一座掩映在松树林中的海滨度假地,

留了原始风貌,吸引了众多帆板冲浪者前

菜肴

它有充足的理由吸引家庭前来度假:长长

来。不要忘记这里还有一座博雅尔堡垒

夏朗 德 人喜欢 烹饪 一 道 海 鱼 浓 汤 ( l a

的细沙海滩既适合玩沙滩帆车和放风筝,

(fort

Boyard),它那熟悉的身影在成为一

chaudrée)。这款鱼汤成功的混合运用海

也适宜游泳、垂钓或者漫步。

档电视游戏节目的拍摄场地之前,曾经在

鳗、牙鳕、鳎鱼、鲽鱼,并且加入白葡萄

您知道吗?

1871年关押过巴黎公社的成员。

酒烹制而成。另外一道夏朗德菜肴穆克拉

文艺复 兴风 格 的科 尔 杜昂灯塔 ( le

拉罗谢尔(La Rochelle)

德贻贝(la mouclade)用小洋葱调味汁将贻

phare Renaissance

de Cordouan)稳固

拉罗谢尔的居民享受着毋庸置疑的高质

贝调味,并且浇上奶油酱汁食用。沿海地

地 耸立在吉伦 特河口的一 块 岩石小岛

量生活。除了筑有防御工事的迷人老港之

带还盛产龙虾、海鳌虾、螃蟹,喜食虾蟹

上 ,它是欧洲最古老的灯塔。高达7层

外,拉罗谢尔的魅力还体现在老城区的隐

的人们定会感到欣慰不已。普瓦图沼泽地

的 灯塔 不 知 疲 倦 的 监 视 着 吉 伦 特 省

秘小巷、沙吕耶公园(parc Charruyer)蜿蜒

带(Marais

和滨海夏朗德 省的 海岸,风雨无阻 。

的林荫小径,以及海滩上。

水手鳗鱼块(la  bouilliture或者matelote

鲁瓦扬(Royan)

老港(Vieux Port)

d’anguilles),以红葡萄酒和各种香料烹

在“美好时代”(la Belle Epoque)期间,掩

庄严雄伟的圣尼古拉塔(la

tour

St-

poitevin)的特色菜肴是著名的

制而成。除了可以绝妙搭配烤鱼的

•••

octobre 2010 / Connexions 125


旅游 TOURISME •••盐花之外,雷岛还出产一种紧实的上

电话:05 49 88 35 04

电话:05 46 41 28 43

好土豆。普瓦图-夏朗德大区还是畜牧养

价格:19-28欧元

价格:21欧元

殖区:这里的牛、羊、猪的肉质鲜嫩,普瓦

您可在餐厅愉悦的氛围中品尝当地菜肴。

菜单依据每天的市场供应而定。

图羔羊肉经常被用在当地菜肴的烹饪中。

住宿

安德烈餐厅(André)

乳制品

欧洲酒店(Europe)

地址:Pl. de la Chaîne

作为羊群饲养区,普瓦图-夏朗德大区还出

地址:39 r. Carnot

电话:05 46 41 28 24

产各种各样质量极佳的农场、手工、工业

电话:05 49 88 12 00

价格:30-35欧元

化制作的新鲜或者发酵的干酪。这里还是

邮箱:hoteldeleurope@wanadoo.fr

人们在此可以品尝海鲜。

法国第一大山羊干酪产区。

客房数量:88间

住宿

甜点

价格:50-83欧元

法国-英国和尚普兰酒店(Hôtel  France-

非常 有名的 干 酪 圆 蛋 糕 ( tour teau

这间酒店位于市中心,客房舒适,装饰风

Angleterre et Champlain)

fromagé)是普瓦图地区的特产,它以白色

格多样:当代风格、路易·菲利普时期风

地址:20 r. Rabaud

的牛奶干酪制成,而更为传统的则用山羊

格(Louis-Philippe),等等。

电话:05 46 41 23 99

干酪制作。人们将它当作餐后甜点食用,

大酒店(Le Grand Hotel)

邮箱:hotel@france-champlain.com

或者在举行婚礼、祝酒时品尝,同样还有

地址:28 r. Carnot

客房数量:36间

名为普瓦图碎饼(le broyé du Poitou)的糕

电话:05 49 60 90 60

价格:60-115欧元

点,它来自维埃纳省。

邮箱:grandhotelpoitiers@wanadoo.fr

这栋漂亮的昔日私人宅邸内还隐藏着一个

科尼亚克白兰地、皮诺葡萄甜酒、葡萄酒

客房数量:41间

迷人的花园。

科尼亚克白兰地是全世界精致生活的象

价格:67-82欧元

波尔多酒店(Le Bordeaux)

征,深受外国人喜爱。这种白兰地是一种

装饰艺术(Art déco)风格的酒店拥有温馨

地址:43 r. St-Nicolas

智慧的制作方法的结晶,它的琥珀颜色和

的环境和舒适的客房。

电话:05 46 41 31 22

独特风格在橡木大桶中陈化时形成。人们

佩 里 尼 城 堡 酒店 ( H ôtel - Château  d e

网址:www.hotel-bordeaux.com

可以将其当作餐前开胃酒或者饭后消化

Périgny)

客房数量:22间

酒饮用。夏朗德葡萄甜酒源于科尼亚克白

地址:Périgny – 86190 Vouillé

价格:58-67欧元

兰地,它可以是白色或者玫瑰色。这种酒

电话:05 49 51 80 43

酒店所在的街道充满活力,客房收拾的无

口感香甜,味道浓郁,果香四溢,适宜作

邮箱:info@chateau-perigny.com

可挑剔。

为开胃酒冰镇饮用。

客房数量:39间

鲁瓦扬(Royan)

价格:70-138欧元

旅游局

实用地址

这座建于15世纪的城堡酒店坐落在一座

地址:Rond-point de la Poste

普瓦捷(Poitiers)

庭园中,是一处宁静的港湾。

电话:05 46 05 04 71

旅游局

拉罗谢尔(La Rochelle)

网址:www.royan-tourisme.com

地址:45 pl. Charles-de-Gaulle

旅游局

餐饮

电话:05 49 41 21 24

地址:Pl. de la Petite-Sirène

市政府驿站餐厅(Le Relais de la Mairie)

网址:www.ot-poitiers.fr

电话:05 46 41 14 68

地址:1 r. du Chay

餐饮

网址:www.larochelle-tourisme.com

电话:05 46 39 03 15

苦艾酒小餐馆(Le Bistro de l’Absynthe)

餐饮

价格:15-32欧元

地址:36 r. Carnot

拈丝女工餐厅(La Moulinière)

舒适的餐厅内提供传统菜肴。

电话:05 49 37 28 44

地址:24 r. Saint-Sauveur

住宿

价格:9-28欧元

电话:05 46 41 18 16

沙滩之梦酒店(Hôtel Rêve de Sable)

人们喜欢在这间怀旧氛围的餐馆中品尝乡

价格:14.50-24欧元

地址:10 pl. Foch

土菜肴。

餐厅的菜品以海产品为主,首推贻贝。

电话:05 46 06 52 25

普瓦图人餐厅(Le Poitevin)

小拉罗谢尔人餐厅(Le Petit Rochelais)

网址:www.revedesable.com

地址:76 r. Carnot

地址:25 r. Saint-Jean-du-Pérot

客房数量:11间

126 Connexions / octobre 2010


Poitou-Charentes 普瓦图-夏朗德大区 价格:48-75欧元 酒店接待热情周到,光线充足,地理位置 理想。 昂古莱姆(Angoulême) 旅游局 地址:7 bis r. du Chat 电话:05 45 95 16 84 网址:www.angouleme.fr

French Chamber of Commerce and Industry in China 2009-2010 Directory

餐饮 帕尔玛餐厅(Le Palma) 地址:4 rampe d’Aguesseau 电话:05 45 95 22 89 价格:13-28欧元。 客房数量:9间 价格:45-50欧元

ANNUAIRE CCIFC 2009-2010 Chambre de Commerce et d’Industrie Française en Chine

供应西班牙特色菜和较为传统的菜肴。 腌酸菜餐厅(La Chouc’) 地址:16 pl. du Palet 电话:05 45 95 18 13 价格:28-33欧 除了腌酸菜,人们在这里还可以品尝到美 味的当地菜肴,依据每日的集市供应烹饪 而成。 住宿 金麦穗酒店(L’Epi d’Or) 地址:66 bd René-Chabasse

Exposition universelle Shanghai - 2010

Pavillon de la Chine

电话:05 45 95 67 64 邮箱:epidor@wanadoo.fr 客房数量:33间

中国法国工商会年鉴 www.ccifc.org

价格:47欧元 实用的酒店,距离集市不远。 欧洲人酒店(Européen) 地址:1 pl. G.-Perrot 电话:05 45 92 06 42 邮箱:europeenhotel@wanadoo.fr 客房数量:31间

About 1 200 French companies all over Mainland China More than 3 500 contacts Bilingual French/English – Chinese

价格:49-64欧元 酒店距离城 墙咫 尺之 遥 ,客房令人愉

悦。。

Contact : Patricia RUAN ruan.patricia@ccifc.org

octobre 2010 / Connexions 127


© Imagine China

中国旅游 TOURISME CHINE

Au Guangxi, il est possible de voyage tout au long de l’année.

Féerie du Guangxi Le Guangxi, pays de la minorité Zhuang, offre des paysages d’une beauté exceptionnelle qui attirent les touristes du monde entier : les pitons de roches karstiques et les grottes de stalactites de Guilin, les rizières en terrasse de Longsheng sculptées par les paysans Zhuang et Yao et les réserves naturelles proches de la frontière du Vietnam. Nanning, sa capitale, moins connue que Guilin, est elle-même entourée d’une végétation tropicale au vert luxuriant. Une province en plein essor touristique ! L’Eldorado autour de la rivière Li Les paysages karstiques le long de la rivière Li ont fait rêver de tous temps les peintres et poètes chinois, qui voyaient dans ces pitons rocheux des symboles ou manifestations de divinités célestes. Le 128 Connexions / octobre 2010

rêve se poursuit aujourd’hui par l’attrait sans cesse grandissant des touristes de tout horizon pour cette petite région, devenue un véritable Eldorado. Guilin, la croisière sur la rivière Li et Yangshuo, point d’arrivée des bateaux, sont les principales attractions du Guangxi vendues par les organisateurs de voyage. La beauté presque irréelle du paysage et la douceur du climat ne sont pas un leurre et valent sincèrement le déplacement. En dehors de la croisière très touristique sur la rivière Li qui ne peut être parcourue légalement que par des navettes officielles, il y a moyen de découvrir la région de manière plus originale : ballades à pied et en vélo dans les villages environnants de Yangshuo, rafting sur des radeaux de bambou sur la rivière Yulong, traversées de rivières à bord de vieux bateaux de pêcheurs, circuits d’escalade des pitons rocheux, trekking le long des rivières, vol

en montgolfière au dessus des montagnes célestes, kayak au village des éventails de Fuli, cours de cuisine dans une cour carrée à Yangshuo… Le spectacle de son et lumière « Impression Liusanjie » avec 600 danseurs et choristes créé par le cinéaste Zhang Yimou dans le cadre surnaturelle des douze pitons de Yangshuo et la traditionnelle pêche aux cormorans au clair de lune sont les activités favorites des touristes dans la région… Une panoplie de loisirs vous est ainsi offerte pour passer des vacances relaxantes entre amis ou en famille. Une véritable transformation du pays des Zhuang. Une hôtellerie attrayante Dans les années 90, Yangshuo était un petit village organisé autour d’une rue principale, la « Western Street » qui conduisait à l’embarcadère, bordée de petits cafés, de boutiques de batik et de marchés de fleurs... C’est dans cette ambiance roman-


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© Imagine China

Guangxi 广西

广西适宜全年旅游。

tique et baba cool que deux Français, les frères jumeaux Luc et Christophe Vincent ont décidé il y a quelques années de s’implanter, d’ouvrir un restaurant de cuisine française « Le Vôtre » et de réhabiliter une ancienne demeure de mandarins du 18e siècle pour y recevoir des hôtes de passage. Depuis, leur hôtel, le Hongfu Palace (www.yangshuohongfuhotel.com), est devenu un endroit insolite et unique dans une ville moderne qui s’étend sur toute la plaine encerclée par les pains de sucre. Aujourd’hui, la tendance du tourisme écologique est de rechercher des « retreats » et « ecolodges », loin des bruits de la horde de touristes qui débarquent chaque jour dans la « Western Street ». De charmants petits hôtels de charme ou maisons d’hôtes se sont ainsi construits sur les rives de la rivière Li ou Yulong, à quelques kilomètres autour de Yangshuo avec des vues exceptionnelles sur le paysage karstique. Quel-

ques-uns, comme le Outside Inn (www. yangshuo-outside.com) ou le Li River Retreat (www.li-river-retreat.com), sont tenus par des couples étrangers, qui ont décidé de s’installer au pays. Il y a l’embarras du choix pour trouver des chambres avec vue sur la rivière. Pour un public plus sophistiqué, le très couru Hôtel of Modern Art (HOMA) (www.guilinhoma.com) situé entre Guilin et Yangshuo est un bon choix, offrant un parc privé de plus de 200 sculptures modernes. Ce complexe design a reçu l’homologation de la chaîne Relais & Châteaux. Les rizières sculptées de Longsheng En remontant vers la province du Guizhou, sur la route des minorités Dong, Zhuang, Yao et Miao, se trouvent les rizières en terrasse, sculptées depuis plus de 650 ans par les paysans aux costumes traditionnels. Dans cette région, 75% de la population est non-Han et les traditions

paysannes s’y perpétuent. Lors de mon premier passage dans les années 90, l’Echine du Dragon (Longsheng) n’apparaissait pas sur les cartes et était un hameau de quelques maisons en bois. Aujourd’hui, les villages des Zhuang, Dong et des Yao ont gardé leur caractère et les habitants se réjouissent de montrer leur artisanat aux quelques touristes qui s’y aventurent. Les photographes y accourent pour capter les rythmes des saisons. N’hésitez pas à parcourir des kilomètres dans les petits chemins à travers les collines, tous les points de vue sont superbes. La région restera protégée tant que les minorités garderont leur mode de vie. Longsheng abrite déjà quelques « ecolodges » plein de charme, dont le Li-An Lodge, (www.lianlodge.com) créé en 1997 par un photographe chinois. Un excellent investissement a long terme !

V é ro n i qu e

d ’A n t r a s

octobre 2010 / Connexions 129


© DR

协会 associations

Shanghai Young Bakers : une formation en alternance unique en Chine

Shanghai Young Bakers

Quand de jeunes orphelins chinois apprennent le métier de boulanger grâce au soutien d’une ONG française Depuis 2009, Shanghai Young Bakers s’engage à former des jeunes orphelins défavorisés à un métier à bonne valeur ajoutée en Chine pour améliorer leurs perspectives d’avenir. Quand Wang Li s’est vue offrir la possibilité de suivre une formation en boulangerie française à Shanghai, elle n’a pas hésité une seconde. La jeune femme de 22 ans, orpheline originaire de l’Anhui, avait déjà travaillé dans une usine de jouets de la province du Guangdong durant 2 ans avant d’intégrer la formation offerte par l’ONG française Shanghai Young Bakers. Aujourd’hui diplômée et forte de l’expérience de son stage à la boulangerie Paul de Shanghai, Wang Li s’apprête à partir étudier en France où l’ONG, avec le soutien de l’Ecole Française de Boulangerie d’Aurillac, va lui permettre d’intégrer un CAP boulangerie avant de revenir apporter ses compétences aux nouvelles promotions. 130 Connexions / octobre 2010

Former à la boulangerie de jeunes Chinois orphelins défavorisés en leur offrant un diplôme avec une vraie valeur ajoutée dans un domaine porteur1, c’est le défi que se sont donnés de jeunes Français engagés vivants à Shanghai. Shanghai Young Bakers a été initié en 2008 par des membres de la Jeune Chambre Economique des Français de Shanghai qui se sont inspirés du succès d’une entreprise sociale formant des orphelins en apprentissage au Vietnam. Depuis, le projet vole de ses propres ailes sous la forme d’une association de solidarité internationale enregistrée en France et hébergée en Chine par l’ONG hongkongaise2 Chi Heng qui travaille à la formation des enfants les moins favorisés en Chine. Le

programme bénéficie du soutien et des conseils du Consulat Général de France à Shanghai, de la Mission Economique et de la Shanghai Charity Fondation. La Fondation Carrefour3 est le principal mécène depuis les débuts de l’association en 2008. Thomas Méron, le nouveau coordinateur volontaire de l’ONG, vit depuis 5 ans en Chine où il a travaillé pour une entreprise française. Il a décidé de donner de son temps en s’engageant à plein temps dans un projet caritatif. « Le domaine de la boulangerie m’intéressait depuis longtemps, le côté « entreprise sociale » de l’ONG et la possibilité de me rendre utile pour aider de jeunes Chinois défavorisés à s’insérer dans la vie professionnelle sont les raisons


© DR

© Imagine China

海上青焙坊:中国唯一的工学交替制培训

principales qui m’ont incité à me lancer dans cette aventure. », nous explique-t-il. Thomas est entouré par une équipe d’une quinzaine de volontaires chinois et internationaux, d’une éducatrice chinoise et d’un boulanger français. Une formation en alternance unique en Chine La vingtaine de jeunes adultes (moitié d’hommes et moitié de femmes) qui sont choisis pour chaque session de formation sont tous des orphelins recrutés par les trois ONG partenaires du programme : Les enfants de Madaifu, la fondation Chi Heng qui travaille dans les regions affectees par le SIDA, et la fondation Half the Sky. Les jeunes ont entre 18 et 23 ans et sont originaires des provinces du Henan, de l’Anhui, du Gansu, ou du Shaanxi. La plupart des enfants ont arrêté leurs études au collège, et de surcroît, leur avenir professionnel n’est pas assuré une fois qu’ils sont devenus adultes. Shanghai Young Bakers leur offre la possibilité de suivre un programme pédagogique en alternance tous frais payés (logement, nourriture, matériel etc.). Durant

l’année scolaire, les jeunes sont suivis quotidiennement par une éducatrice chinoise qui leur apporte le soutien nécessaire pour organiser leur travail et résoudre les difficultés liées à l’adaptation à la vie dans une grande ville comme Shanghai. Le programme, qui s’inspire du CAP de boulangerie français, dure un an et alterne cours et pratique sur le terrain de stage. Les cours de boulangerie française, dispensés par un boulanger français bilingue, sont sponsorisés par Lesaffre, une entreprise française implantée à Shanghai, leader mondial dans le domaine de la levure et de la panification. Par ailleurs, les élèves suivent des cours de pâtisserie chinoise et de remise à niveau scolaire dans un lycée hôtelier chinois partenaire qui leur délivre un diplôme officiel reconnu partout en Chine. Deux semaines par mois, les élèves suivent un stage dans des entreprises qui soutiennent l’association comme Sofitel, Grand Mercure, Hilton, Crowne Plaza, Paul, La Grange, Carrefour, Da Marco etc. Dans l’idéal, à la fin de la formation, les stagiaires sont embauchés par les sociétés

qui les ont accueillis. Afin d’aider les étudiants qui n’auraient pas trouvé d’emploi, l’ONG organise tous les ans un forum de recrutement où des entreprises sont invitées à interviewer les jeunes candidats. Cette année, plus de la moitié des étudiants a trouvé un emploi à Shanghai à l’issue de la 2ème session de la formation qui s’est terminée fin juin. « Par ailleurs, certains jeunes décident de rentrer dans leur lieu d’origine après la formation pour y chercher du travail car ils manquent souvent de repères dans une grande ville comme Shanghai et ils préfèrent se sentir proches de l’orphelinat où ils ont grandis.», explique Thomas Meron. Prochain objectif : pérenniser le projet en ouvrant un fournil-école indépendant. Le programme séduit les entreprises partenaires et il est efficace au regard des résultats obtenus avec les élèves, mais les coûts liés à l’organisation de la formation sont très élevés. L’ambition à court terme est donc de devenir plus indépendant financièrement et de trouver de nouveaux partenaires, c’est-à-dire les mécènes qui aideraient à financer le projet où les entreprises qui pourraient accueillir des stagiaires. Dans cet objectif, l’association souhaiterait ouvrir un fournil pour y dispenser les cours de boulangerie et proposer aux entreprises des activités de team-builing durant lesquelles les employés apprendraient à faire du pain avec les étudiants de Shanghai Young Bakers. Parallèlement, en envoyant certains étudiants en France étudier en CAP, l’association envisage que ces derniers deviennent les professeurs des nouvelles recrues en Chine. « Et pourquoi pas, nous confie Thomas Meron, ouvrir à terme d’autres fournils-écoles pour les orphelins ailleurs en Chine ».

F lor e C oppi n

1. Lire Connexions numéro 50 : www.connexions.ccifc.org/ index.php/fre/Menus/Precedents-numeros/Numero-50 2. Sur le statut des ONG en Chine lire l’article publié sur le site de l’ambassade de France en Chine : http://www.ambafrancecn.org/Etat-des-lieux-des-ONG-chinoises.html 3. www.fondation-internationale-carrefour.org

Shanghai Young Bakers Site Internet www.shanghaiyoungbakers.com Contact Thomas Meron tmeron@shanghaiyoungbakers.com

octobre 2010 / Connexions 131


文化 CULTURE

David Gourhan, un contre regard

Le photographe David Gourhan qui fréquente la Chine depuis dix ans dit essayer de ne pas aller à la recherche de ce qu’il croit connaître de ce pays, où photographiquement « on peut toujours trouver confirmation de ses a priori, bons ou mauvais », mais plutôt de laisser se révéler autant que possible la Chine par elle-même. Il nous propose ici une série réalisée sur la ligne de train Canton-Pékin où c’est le point de vue du photographié qui est central, dans une sorte d’échange entre lui et le sujet. Tous les ans pour Chunjie, la fête du nouvel an, des dizaines de millions de Chinois prennent le train pour retourner dans leur famille, traversant parfois la Chine de part en part. Plutôt

132 Connexions / octobre 2010

que de les saisir directement dans un face à face, ces images tentent de rendre leur regard, sur leur propre pays et que chacun partage dans un trajet en train. Ces voyageurs traversent, souvent comme n’importe quel étranger, des provinces qu’ils ne connaissent pas, des paysages qu’ils ont rarement eu l’occasion de voir. La nuit, ils croisent eux aussi des villes dont ils ignorent le nom, des routes en construction, des rizières et des terres sèches, une Chine mouvante qui se révèle aussi à eux.

Site Internet : http://david-gourhan.photoshelter.com N ic o l a s S r i di


© David Gourhan

© David Gourhan

© David Gourhan

© David Gourhan

© David Gourhan

© David Gourhan

Le photographe à la une 封面摄影

octobre 2010 / Connexions 133


Theatre interculturel 跨文化戏剧

© alexandra.lacroix@gmail.com

文化 CULTURE

« la Princesse Maleine » de Maeterlinck jouée par des personnes malvoyantes 由视障人士表演的梅特林克的作品《玛莱娜公主》

Le voyage interculturel d’un atelier théâtral en Chine Connexions est allé voir pour vous « la Princesse Maleine » de Maeterlinck, une pièce que l’association chinoise Hongdandan et le metteur en scène J-C. Blondel ont créé dans le cadre d’un atelier théâtral interculturel avec des personnes malvoyantes chinoises et françaises. Créer un atelier théâtral à Pékin avec pour objectif de monter un spectacle rassemblant des amateurs de théâtre malvoyants chinois et français, voici le défi original et ambitieux que s’est donné Hélène Steinitz. La jeune femme, professeur de philosophie, passionnée de théâtre et engagée depuis plusieurs années auprès d’associations caritatives, vit à Pékin où elle est journaliste pour Radio Chine International. « Nous avons voulu montrer que la personne handicapée possède une forte source de créativité et qu’elle est capable de créer quelque chose de beau. La différence, au théâtre comme dans la vie, n’est pas un obstacle mais une richesse qui est une source de créativité et d’unité. Par exemple, les personnes handicapées ont en général une formidable capacité à créer du lien, c’est une valeur ajoutée incontestable qui devrait contribuer à leur intégration dans l’entreprise1… ». La Princesse Maleine A l’origine du projet, des rencontres humaines et artistiques dont notamment celle de l’association chinoise Hongdandan1 avec le metteur en scène J-C. Blondel 2 . 134 Connexions / octobre 2010

Grâce à l’aide financière d’Air Liquide et d’EDF ainsi qu’à la générosité de la galerie pékinoise Yishu 8, le chantier a pu aboutir et le résultat est à vrai dire assez époustouflant. Le choix de la pièce « La Princesse Maleine » de Maeterlinck n’est pas un hasard. Le thème de la cécité y est omni-présent : les personnages principaux ne voient pas ou plus leurs angoisses et leurs pulsions intérieures. Ils sont donc incapables de prendre les bonnes décisions car ils ont perdus leurs repères. Le texte rassemble également des thématiques communes au-delà des différences : la vie, la mort, la frontière, les limites… ces éléments permettent aux acteurs de déployer toute leur créativité dans l’interprétation des dimensions interculturelles. La mise en scène est à l’image de la sensibilité des acteurs malvoyants : les bruits, la musique, le toucher sont les f ils conducteurs sensoriels vers le monde intérieur des personnages. Les acteurs, connectés à leur intériorité, font passer dans leur voix des émotions très fines et durant le spectacle, la lumière diminue petit à petit jusqu’à ce

que presque plus rien ne soit visible. Les spectateurs se laissent ainsi surprendre par d’autres éléments sensoriels sans anticiper ce qui va se passer, ils sortent peu à peu de l’hégémonie de la vue... Une expérience interculturelle Durant l’atelier, « la sensibilité particulière des acteurs chinois nous a surpris. Dans la pièce, il y a beaucoup de correspondances entre les éléments naturels et le monde intérieur des personnages. La culture chinoise faisant grand cas de l’harmonie entre l’homme et la nature, les acteurs s e s ont b e a u c oup a t t a c hé s à c e t aspect du texte et ont fait une grande introspection. », raconte Hélène Steinitz. Par ailleurs, le problème de la langue (pour rappel l’atelier a duré 3 semaines avec des personnes aveugles qui ne parlaient pas la même langue) qui au début semblait un obstacle s’est transformé en un prétexte d’inventivité dans la quête de la compréhension de l’autre, « les acteurs sont devenus « musiciens », puis une communication souterraine s’est mise en place pour évoluer vers une grande complicité. ». Les projets futurs Après le succès de l’atelier interculturel et des deux représentations à la galerie Yishu 8 de Pékin3, le metteur en scène JC Blondel a décidé de monter la pièce en Chine avec des acteurs chinois aveugles professionnels. La pièce est déjà prête et recherche des financements. Par ailleurs, les deux équipes de l’atelier interculturel espèrent avoir l’occasion de collaborer de nouveau ensemble pour créer un atelier théâtral permanant destiné à des lycéens chinois malvoyants. Selon Hélène Steinitz, « en Chine, encore trop peu d’activités de loisir ou de développement personnel sont proposées aux handicapés ; ce type d ’initiative ne peut qu’être encouragé. ». Espérons que les mécènes seront encore au rendez-vous pour aider à financer ces projets.

F l o r e C o ppi n

1. A ce sujet, lire l’article de la rubrique Tendances RH p. 22. Association chinoise de malvoyants qui se consacre au développement culturel, s’est associée au metteur en scène Lin Zhaohua pour créer Les aveugles de Maeterlinck. Site : http:// hongdandan.nppcn.com. 2. De la Compagnie Divine Comédie qui a joué en Chine dans le cadre du festival Croisements 2009 Le Partage de midi de Claudel. 3. Deux representations ont eu lieu les 12 et 13 août 2010 à Yishu8.


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Comprendre et appliquer Sun Tzu ou La pensée stratégique chinoise : une sagesse en action, Pierre Fayard, Ed. Dunod, 2e édition enrichie, 224 pages, 18 € « La stratégie est comme l ’eau qui fuit les hauteurs et remplit les creux… ». Cette citation est extraite du plus ancien traité de stratégie connu au monde « L’art de la guerre » de Sun Tzu ( Sun Zi) , devenu la « bible » laïque de nombreux décideurs et manageurs dans le monde. Trop souvent, cependant, il est difficile pour le lecteur profane de dépasser les clichés et autres images superficielles pour pouvoir accéder au sens profond de cette philosophie pratique. Le but de cet ouvrage est justement de fournir les clés de lecture pour comprendre et mettre en œuvre les principes d’action que délivre cette sagesse ancienne. Il présente une introduction générale à la pensée stratégique chinoise, d’origine militaire évidemment, suivie d’une explicitation des 25 stratagèmes traditionnels commentés par Sun Tzu accompagnés d’exemples concrets. Le lecteur pourra retenir de cette culture stratégique ancienne une compréhension plus fine des situations, un usage de l’astuce et de l’originalité pour décrypter les changements, un souci d’économie comme d’efficacité, au service de son activité professionnelle comme de la conduite de sa vie personnelle. Sun Tzu, Stratégie et séduction, Pierre Fayard, Editions Dunod, 212 pages , 19 euros Ce livre de stratégie n’est pas un livre de recettes, son ambition est plus grande. En puisant dans les cultures d’Orient et d’Occident, il a la prétention de stimuler et invite le lecteur à partager des horizons. Son désir de séduction est de troubler par des oppositions et des rapprochements puisés aux différentes sources de sagesse ou de pensée. Certes, Sun Tzu et la pensée chinoise y figurent à la première place mais aux côtés des traditions française, japonaise, britannique ou américaine. L’argument majeur consiste à enrichir les capacités de séduction à partir d’un regard extrême-oriental, mais sans s’y limiter. La structure de l’ouvrage reprend les treize chapitres de « L’art de la guerre ». Les commentaires qui les accom-

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Par Laurent Ballouhey

pagnent constituent l’essentiel du texte, tous inspirés des traditions stratégiques évoquées ci-dessus ayant trait à la séduction et parfois illustrées de courtes anecdotes significatives. Dans la stratégie de séduction, la liberté d’esprit est essentielle. La dialectique entre l’insolite et conventionnel est au cœur de la pensée stratégique inspirée de Sun Tzu, pour qui tout peut servir, y compris la faiblesse, pour l’emporter. Mais en recherchant l’harmonie finale, plutôt que l’affrontement direct. Une grande divergence, La Chine, l’Europe et la construction de l’économie mondiale, Kenneth Pomeranz, Traduit de l’anglais par Nora Wang, Ed. de la Maison des sciences de l’ homme / Albin Michel, 35 euros , 558 pages Alors que certaines régions d’Asie et d’Europe avaient atteint vers la fin du XVIIIe siècle un niveau de développement comparable, pourquoi est-ce en Grande-Bretagne et non en Chine qu’eut lieu la révolution industrielle, et pourquoi les deux mondes commencèrent-ils alors l’un à prospérer et à se moderniser et l’autre à stagner et même à décliner ? Les similitudes et les points de convergence l’emportaient en effet entre certaines « régions-centres » de l’Ancien Monde, comme le delta du Yangzi en Chine, la plaine du Kantô au Japon, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas ou le Gujarat en Inde, qui tous présentaient des « ressemblances étonnantes ». Les produits de luxe étaient aussi répandus au sein des diverses classes sociales de Chinois et de Japonais que parmi les Européens, fait remarquer l’auteur. La Chine importait de nombreux articles de luxe venus d’Europe ou les fourrures de Russie. L’Europe était même distancée dans certains secteurs du développement économique. Ces différentes régions connaissaient toutes deux des limites comparables et la production de l’époque risquait de ne pas répondre à la croissance démographique. Dans ces circonstances similaires, se demande l’auteur, pourquoi donc l’Europe eut-elle le privilège de donner naissance à la révolution industrielle et non la Chine ou une autre région d’Asie ? Pour deux raisons essentielles et sans lien entre elles, explique-t-il : la disponibilité des ressources en charbon et l’exploitation économique du Nouveau Monde sont bien les deux phénomènes à l’origine de cette « grande divergence » qui durera deux


作品赏析Vu de l’esprit Par Laurent Ballouhey

En espérant un fils… La masculinisation de la population siècles. La Grande-Bretagne disposait en effet d’importants gisements de charbon au centre des lieux de l’activité économique, tandis que les ressources chinoises, aussi importantes fussent-elles, étaient situées loin des grandes régions de production du delta du Yangzi. La seconde explication est à trouver dans la mise en exploitation de l’Amérique coloniale qui était riche en matières premières mais sans population pour les utiliser ni les consommer. Cet ouvrage innovant qui relève de l’« histoire globale » oblige de dépasser les cadres nationaux pour conduire des recherches comparatistes en prenant en compte les « régions-centres ». Mais avant tout, il nous donne à lire une histoire « décentrée », transnationale, dans un monde « décloisonnée », au sein desquels ni l’Europe, ni la Chine ne sont situées au centre unique des processus historiques. Et il balaie complètement la vision fantasmée d’un occident éclairé et supérieur face à un reste du monde obscurantiste et incapable de modernité. Voyage vers l’Ouest , Hommage à Ella Maillart, Ouvrage collectif de textes et photos, Ed. Lieux Dits, 142 pages, 16 euros C’est en 1935 qu’Elsa Maillart arrive en Chine pour couvrir en journaliste les événements de Mandchourie pour le journal ‘Le Parisien’. Refoulée aux marges de Pékin, elle décide de repartir en traversant la Chine d’est en ouest en compagnie du journaliste britannique Peter Fleming. A l’issue de ce long périple de 7 mois dont 5 à cheval, chacun écrira l’histoire de son voyage. Pour lui, ce sera Courrier de Tartarie (publié en 1936 et traduit sur le champ en 1938 chez Gallimard, aujourd’hui réédité chez Payot), et pour elle, ce sera ‘Oasis Interdites’ ( Payot aussi) qui deviendra un livre culte pour tout explorateur en partance pour ces terres lointaines du Xinjiang. Ce nouveau « voyage vers l’Ouest », décrit ici avec textes et photos d’artistes ou de chercheurs, plus de 70 ans après ces deux protagonistes historiques, n’est pas seulement un carnet de voyage, mais une œuvre fragmentée d’exploration d’un territoire et d’une identité. Une transhumance moderne à travers les oasis et le désert du Taklamakan et un encouragement à chacun de partir à la recherche de soi. Elsa Maillart écrivait alors : « Courir le monde

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chinoise, Isabelle Attané , Editions de l’Ined, 225 pages, 25 euros Malgré la modernisation économique des trois dernières décennies, une fille chinoise reste dotée d’une moindre valeur qu’un fils, tandis qu’un garçon bénéficie de certains atouts liés à son sexe, dont les filles sont dépourvues. Et ceci tant dans l’imaginaire que dans la réalité de la vie quotidienne chinoise. En conséquence de ce statut défavorisé, les filles naissent moins nombreuses et meurent en pourcentage plus important que les garçons. Au contraire de l’évolution démographique dans le reste du monde, la société chinoise se masculinise dans une forte proportion. La situation des femmes s’est donc, de ce point de vue là, nettement dégradée. Alors que les femmes chinoises s’étaient largement émancipées depuis l’avènement de la nouvelle Chine en 1949, de graves entorses à leurs droits sont maintenant constatées, et d’abord au principal d’entre eux, celui d’exister. A la suite d’une sélection prénatale du sexe, quelque 500 000 filles seraient chaque année éliminées. Celles qui survivent sont mises en concurrence avec les garçons et à leur détriment en ce qui concerne l’accès à l’éducation, à la santé et à l’emploi. De l’autre côté de la balance, on constate que la masculinisation démographique de la Chine est un processus lent mais spectaculaire. La proportion d’hommes au sein de la population augmente de façon régulière depuis 40 ans, ce qui fait de la Chine le pays le plus « masculin » au monde. A plus d’un titre, le cas chinois, à l’instar du cas indien qui connait un phénomène similaire, constitue un cas d’école pour les démographes. Ceux-ci s’interrogent, non sans inquiétude, pour savoir si ce processus de masculinisation qui caractérise ces deux pays ne risque pas d’affecter à terme les équilibres sociaux et démographiques au niveau mondial.

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图书精选Coup de coeur Par Laurent Ballouhey

La plaine, Bi Feiyu, traduit du chinois par Claude Payen, Ed. Philippe Picquier, 476 pages, 21,50 euros

••• ne sert qu’à tuer le temps. On revient aussi insatisfait qu’on est parti. Il faut faire quelques chose de plus ».

Comme le héros de ce long roman, Bi Feiyu, désormais

Un livre par exemple, comme celui-ci ou un autre. La fabrique des femmes, Du village à l’usine : deux jeunes chinoises racontent , Leslie Chang , traduit de l’anglais (américain) par Florence La Bruyère, Ed. Belfond, 460 pages, 22 euros Pendant trois ans, la journaliste américaine d’origine chinoise Leslie Chang a enquêté sur la condition des femmes migrantes en suivant deux jeunes filles débarquées de leur campagne natale pour travailler à Dongguan, une énorme ville-usine du delta de la rivière des Perles, entre Canton et Hong Kong. Comme près de 200 millions de compatriotes aujourd’hui, Min et Chun Ming sont de celles qui ont choisi de tenter leur chance à la ville plutôt que de rester au village déserté, hormis des vieux et des enfants, et où elles seraient de toute façon surnuméraires. Ce document, entre le reportage et le journal intimiste évoquant avec émotion les liens de solidarité et d’amitiés naissantes entre ces femmes seules, nous décrit les dures conditions de vie et de travail dans ce monde des « citésusines » tentaculaires vues à travers les yeux des ouvrières. Elles connaissent des journées harassantes pour une centaine de yuans par mois, la solitude, le découragement, mais aussi elles découvrent des horizons nouveaux que le village jamais n’aurait pu leur apporter. Grâce à une ténacité hors du commun et à une soif d’émancipation, elles réussissent à sortir de leurs difficultés, à nourrir de grandes ambitions et à se forger des qualités qui hissent ces « émigrées de l’intérieur » à la hauteur d’individus à part entière. Cette enquête remarquable et émouvante nous font comprendre que si les femmes chinoises ne soutiennent pas encore « la moitié du ciel », comme le veut le slogan, elles représentent bien la moitié de la terre jaune.

reconnu comme l’un des meilleurs romanciers de sa génération, a passé son enfance à la campagne dans le sud de la Chine. Le jeune paysan Duan Fang rentre au Village des Wang après deux ans d’absence. Il ne s’agit pas ici d’un migrant parti chercher du travail à la ville. Nous sommes au lendemain qui déchante après les bouleversements dus à la « Révolution culturelle ». Toutes les hiérarchies ont été inversées, si bien que le notable de la veille est devenu le proscrit du jour. Bi Feiyu nous présente un tableau foisonnant de personnages bariolés, tel ce « médecin aux pieds nus » qui met du soda dans les flacons de sérum physiologique, ou de cet usurpateur qui a occupé l’habitation du riche propriétaire terrien et qui se sent poursuivi par son fantôme. Jadis un « droitier » rééduqué avec succès (sic) veut interpréter la nouvelle société à travers la grille d’explication de Karl Marx. L’amour n’est pas absente de cet étrange monde : la belle Manling, « jeune instruite » envoyée réformer son idéologie auprès des paysans, devenue une active militante au service du secrétaire du Parti, s’éprend follement du héros Duan Fang. Si la société est travaillée et malmenée par le renversement de toutes les valeurs, les actions humaines n’en restent pas moins guidées par des moteurs qui semblent inchangés dans le temps : le désir de pouvoir, de possession, le besoin d’amer et de nourrir les rêves les plus inaccessibles. Tout autour, dans les champs et les rizières, la vie continue au travers du cycle des saisons, qui conduit des moissons de l’été à la neige de l’hiver avant le renouveau du printemps suivant. Toute la Chine rurale est là. Ou plutôt, devrait-on dire, était là. Et demain ?

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