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Emploi
est l’inauguration. Officiellement motivée par le refus du contenu haineux et provocateur des messages présidentiels, elle est si tardive qu’on suspecte à bon droit l’existence d’autres motivations, moins éthiques; par exemple, la crainte de se retrouver accusé de complicité de putsch. On peut se féliciter de la décision prise par Facebook et consorts, au nom d’un certain pragmatisme, mais elle appelle deux réflexions. La première, c’est que casser le thermomètre n’a jamais fait baisser la fièvre. La seconde, c’est qu’une décision majeure de censure a été prise, dans le champ du débat public, par des entrepreneurs n’ayant d’autre légitimité que celle de leur propre succès commercial. La démocratie représentative a sans doute ses défauts mais s’il faut choisir entre elle et cette nouvelle aristocratie de classe, ce sera vite fait.
Des lois pour (re)façonner la République
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En France, nous n’en sommes pas là. Quoique… Le trumpisme est hélas pandémique et prolifère aux quatre coins de la planète, sous de multiples variantes. La France a la sienne. Notre pays est riche de souffrances et de mécontentements ; il abonde en démagogues, en extrémistes aux fronts bas et en entrepreneurs de haine, les uns comme les autres ayant pignon médiatique sur rue. Son modèle démocratique s’essouffle et peine à dégager les voies d’un avenir meilleur, voire d’un avenir tout court. Sa population subit des violences policières et les soubresauts d’un gouvernement qui les nie, puis les couvre, parfois les découvre et, finalement, les recouvre. Cette incapacité à leur trouver une issue démocratique signe en fait un rapport dégradé, vertical et de plus en plus antagonique entre l’État et les citoyens, singulièrement ceux qu’il considère comme indûment agités. Au fil des mois, sa liste de suspects s’est allongée : gilets jaunes, syndicalistes, supposés «séparatistes», manifestants écologistes, migrants sans papiers, mauvais républicains, passants ordinaires… Corrélativement à des flirts à peine dissimulés avec des personnalités d’extrême droite, confortablement protégé par un état d’urgence sans fin, l’exécutif provoque une avalanche de projets de lois qui visent à façonner la république à l’image qu’il s’en fait, image qui n’a rien pour (nous) plaire. Le dernier en date, sous couvert d’en conforter les principes et le respect qui leur est dû, bouscule carrément le socle de la république. Pour le résumer d’une phrase, il ne s’agirait plus pour vous et moi d’obéir aux lois mais d’y adhérer, sans réserve, sans esprit critique ni arrière-pensées… Donald Trump saturait le débat public sous ses tweets électriques. Emmanuel Macron le met au pas au rythme d’une mécanique parlementaire hors sol. On peut préférer une méthode à l’autre et, nettement mieux, trouver les deux détestables. Quoi qu’il en soit, le réel est là, turbulent … ▼
emploi SeuleS, leS grandeS entrepriSeS…
Les prévisions des économistes de L’ofce ou de La Banque de france n’annoncent aucune améLioration de L’empLoi pour 2021.
/max PPP T iffre e m an d yl
Sur le front de l’emploi, l’année 2021 risque de ne pas apporter de bonnes nouvelles. Le taux de chômage pourrait en effet atteindre 10,6% de la population active et le nombre de demandeurs d’emploi augmenter de quelque 766 000 personnes. C’est la conclusion d’une étude menée pour l’Observatoire français des conjonctures économiques (Ofce) par Bruno Ducoudré, responsable du pôle Modélisation de l’économie française et de son environnement international, et par Éric Heyer, directeur du département Analyse et prévision. Selon eux, les facteurs qui ont permis l’an dernier au marché du travail de résister à la chute historique d’activité (– 9,5 %) joueront moins. La baisse de la productivité enregistrée au début de la pandémie et le très fort recours au chômage partiel tout au long de 2020 ne seront en effet pas au rendez-vous cette année. L’an passé, la diminution de la productivité avait permis de sauvegarder 200 000 emplois, et les milliards dépensés pour maintenir les contrats de travail permettaient encore, fin décembre, de garder 1636000 salariés dans les effectifs des entreprises. Selon les deux économistes, ces chiffres ne s’élèveraient plus, dans onze mois, qu’à respectivement 50 000 et 246 000 personnes. Au-delà, notent-ils, malgré le soutien des pouvoirs publics, beaucoup d’entreprises pourraient ne pas résister aux effets d’une récession brutale. Au total, estimentils, 180000 emplois pourraient sombrer pour cause de faillite, contre zéro en fin d’année dernière. Qu’en sera-t-il réellement ? En ce début d’année, il n’est que quelques certitudes: la Banque de France approuve le raisonnement de l’Ofce et, la Cgt l’assure, sans soutien de la consommation et sans réduction du temps de travail, la situation sociale hexagonale risque d’être plus catastrophique encore. Pour le reste, le moral des grandes entreprises françaises est au beau fixe. Selon un sondage révélé le 12 janvier par le quotidien Les Échos, 60 % de leurs dirigeants pensent pouvoir sortir de la crise d’ici douze mois en reconnaissant tout de même «ne pas compter sur l’activité en France pour rebondir mais tabler sur une reprise à l’étranger» pour y parvenir. M. H. ▼