Carlos Augusto Giraldo

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christian berst art brut carlos augusto giraldo codex textes de / texts by jaime cerón & manuel anceau


© carlos pintor, 2019


christian berst art brut présente presents carlos augusto giraldo codex

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christian berst avant-propos jaime cerón préface manuel anceau essai preface jaime cerón œuvres works


captures d'écran du film "Carlos Augusto Giraldo : codex" (13'30") coproduit en 2020 par christian berst art brut et Paula Diaz screenshots of the movie "Carlos Augusto Giraldo: codex" (13'30") co-produced in 2020 by christian berst art brut and Paula Diaz



christian berst art brut


L'art brut est l'expression d'une mythologie individuelle, affranchie du régime et de l'économie de l'objet d'art. Ces oeuvres sans destinataire manifeste sont produites par des personnalités qui vivent dans l'altérité – qu'elle soit mentale ou sociale. Leurs productions nous renvoient tantôt à la métaphysique de l'art c'est-à-dire à la pulsion créatrice comme tentative d'élucidation du mystère d'être au monde - tantôt au besoin de réparer ce monde, de le soigner, de le rendre habitable.

Art Brut is the expression of an individual mythology liberated from the system and economy of the art object. This work, produced with no clear audience in mind, is created by individuals who live in "otherness", be it psychological or social. Sometimes it draws our attention to the metaphysics of art - the creative urge as an attempt to elucidate the mystery of existence - and at others, to the need to repair the world, to care for it, to make it habitable.


christian berst avant-propos


Le syndrome d’Asperger, dont il est atteint, confère à cette irrépressible pulsion créatrice une précision maniaque. Tout y est parfaitement exact, et ne nous paraît abscons que par la superposition et l’entrechoquement des divers savoirs et des multiples perceptions de la réalité qui s’y font jour. Giraldo s’attelle à une tâche encyclopédique, couchant ses traités imagés sur des papiers fins ou des feuilles de calque qu’il assemble fréquemment en codex. Parallèlement, il tient dans un registre séparé l’inventaire détaillé de toute sa production. Ce qui lui permet à la fois de contempler les chemins qu’il a déjà parcourus, et mesurer ceux qui lui restent à arpenter. Dans ses dessins, l’impression d’hétérogénéité, quant à elle, ne témoigne finalement que de l’abolition de toute hiérarchie épistémologique. En mettant la réalité et la fiction sur un même plan, Giraldo paraît vouloir créer les conditions de la sérendipité, s’ouvrant la porte d’un savoir hybride nouveau.

carlos augusto giraldo codex

Dès l’enfance, Carlos Giraldo - qui vit depuis toujours avec ses parents dans la banlieue de Bogota – s’est mis à consigner fiévreusement ses visions syncrétiques dans des cahiers.

C’est ainsi que l’histoire des civilisations anciennes est tangentée par l’astrologie, la 2e guerre mondiale est rejouée par les Simpsons et les sciences occultes viennent légender les planches anatomiques. D’ailleurs, ce dernier ensemble qu’il regroupe sous la thématique de « L’Arbre de vie », est frappant à plus d’un titre. D’abord parce que, contrairement aux traités du XVIIe siècle qui s’évertuaient à dévoiler les organes et les réseaux du corps par strates gigognes, Giraldo opère par fusion ou par transparence. Tandis que l’Homme de Vitruve de jadis a fait place à des silhouettes féminines alanguies et portant talons hauts. En fait, Giraldo ne donne pas forme à une, mais à des myriades de mythologies individuelles qui témoignent, selon lui, que « tout est ordonné. Et l’ordre de l’univers est parfait ».

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jaime cerón préface un dehors qui sera dedans et un demain qui fut hier : les images de carlos giraldo

Jaime Cerón, né à Bogotá en 1967, est diplômé en histoire et théorie de l'art de l'Université nationale de Colombie. Son travail s'est centré sur l'enseignement, la critique, le commissariat d’expositions, la recherche théorique et la gestion culturelle, qu'il a développé simultanément et continuellement, de 1994 à aujourd'hui. Il a été directeur des arts plastiques du district de la capitale, conseiller en arts visuels au ministère de la Culture et conservateur de la Fondation Misol pour les arts. Entre 2016 et 2020, il a été directeur adjoint des Arts à Idartes. Il est actuellement commissaire et critique d'art indépendant.


carlos augusto giraldo codex

"Toutes les civilisations traversent un cycle de vie, comme la vie d'un être humain." carlos giraldo

Générer des images semble le principal outil dont dispose Carlos Giraldo pour interagir avec toutes les dimensions de la réalité. Dès son enfance, cette impulsion s'est manifestée par la nécessité de s'approprier et d'interpréter toutes les sources de visualité qu’il a progressivement rencontrées pour réaliser des dessins qui exploraient les choses apprises à l'école ou vues à la télévision. Ce qu'il s'approprie de toutes ces sources ce sont non seulement des thèmes ou des codes de représentation visuelle, mais aussi les récits qu'ils communiquent.

cas de l'art, ce n'est que jusqu'au XXe siècle qu'il a commencé à être interprété comme une activité autonome. Auparavant il ne semblait qu'une étape transitoire du processus de création - une étude – ensuite formalisée par un autre médium ou une autre activité. Nous regarder voir

Selon les discours psychanalytiques, en naissant nous expérimentons la situation curieuse dans laquelle nous sommes incapables de séparer le monde qui nous entoure de notre propre perception de celuiTrès tôt, il a compris que le dessin n'est pas ci. Nous avons du mal à identifier où finit le un monopole exclusif dans le domaine de monde et où commence notre humanité. À l'art, mais plutôt une pratique sociale qui la naissance, nous possédons un moi indifa traversé les connaissances et les disciférencié du monde. Seul l'accès au langage plines les plus diverses et qui a façonné de nous permettra de nous en séparer promultiples activités humaines. C'est un outil gressivement. clé des mathématiques, de l'ingénierie, du design industriel ou de l'architecture, ainsi Dans le contexte occidental moderne, l'acte que des sciences naturelles, des jeux vidéo, de voir semble prédominant pour appréou des fondamentaux de l'écriture, parmi hender la réalité. Bien que notre corps utide nombreux domaines possibles. Le deslise quatre autres canaux perceptifs - l'odosin a été utilisé socialement surtout pour rat, l'ouïe, le toucher et le goût - pouvant mobiliser des idées, à tel point que, dans le

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tout autant nous amener à ressentir une engageons dans les conventions sociales connexion ou une compréhension simi- qui structurent la culture dans laquelle nous vivons, nous apprenons ce que nous laire, la vision s’avère primordiale. « devrions » et ce que nous « ne devrions Lorsque nous comparons nos canaux pas » voir. Pour les artistes, le processus de perception à ceux des animaux, nous de création d'images implique une négoremarquons à quel point le corps fixe ciation entre ce qu'ils imaginent que le une marque déterminante sur notre com- monde est, et ce que le monde lui-même préhension du monde. Même ainsi, il faut pourrait devenir ; étant donné que la réaconsidérer que ledit corps ne peut exister lité qui existerait derrière cette image ne en dehors des représentations culturelles peut être que supposée, elle est au-delà qui le traversent et le constituent, à tel point de l'expérience du corps. Si nous n'avions que l'image que nous avons du monde est que des images du monde, nous pourrions projetée sur l'écran généré par les codes donc dire que le monde n'est rien de plus culturels que nous utilisons pour le rendre qu'un lieu imaginaire. intelligible. Sources croisées L'expérience de voir consiste à s'immerger dans les « dimensions sociales du champ Pour en revenir aux images de Giraldo, il est visuel » et les « dimensions visuelles du important de considérer le vaste ensemble champ social ». Ainsi, lorsque nous nous de dessins réalisés pendant son enfance.

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dessin d'enfant de Giraldo children's drawing by Giraldo


ses images ne peut être retracée que par les faits, les situations et les références ayant retenu son attention et qui lui ont peu à peu révélé la possibilité d'échanger leurs lieux et leurs significations ; au point que le monde semble n'être qu'une dimension imaginaire dans laquelle sont présents, avec égale pertinence, les récits issus de la connaissance scientifique et ceux pouvant être construits par la fantaisie.

Ce large entrelacement d'événements aux origines si hétérogènes a donné naissance à une série de livres écrits comme une étape préalable à l'élaboration de ses images. Énorme effort épistémologique, ces ouvrages cherchent à interpréter des notions telles que la circularité du temps et l'évanescence de l'espace, et ils impliquent Il y a environ un siècle, les artistes surréa- la recherche de figures mythiques aux exislistes étaient fascinés par les implications tences équivalentes dans différents récits philosophiques du corps sans tête, qui se culturels ayant émergé à des moments et manifestaient principalement dans la pos- des lieux différents de l'histoire. Au cours sibilité de la remplacer par autre chose. de la première décennie du XXIe siècle, GiPour cela, ils ont passé en revue toutes raldo se consacre donc à l'écriture de ces les formes de masques ayant existé au trois livres volumineux, et quelques années cours de l'histoire, ainsi que les représen- plus tard il assume la tâche de les réviser tations culturelles visant à rapprocher ce de manière exhaustive. qu’il y a de plus élevé dans l'être humain de quelque chose d’inférieur. C'était une ten- Les titres qu'il leur a donnés sont « Le tative de confronter le rationalisme qu'ils Dixième Avatar », « L’Atlantide » et « Le semblaient considérer comme la cause Troisième Conflit Mondial ». Dans ce derdu malaise culturel européen. L'intérêt de nier, Giraldo utilise des récits similaires à Giraldo pour « l’acéphale » est né d'une im- ceux utilisés à la télévision pour consigner pulsion similaire, qui a pris les caricatures ce qui s'est passé pendant les deux guerres mondiales, afin d’entrecroiser le passé et comme point de départ. l'avenir. Cette narration anticipe un retour Il est frappant de constater qu'il n'y a pas des principaux conflits guerriers de l'hisde références directes à ses propres ex- toire de l'ère moderne qui s’articulent sucpériences quotidiennes ni à ses réflexions cessivement aux différentes mythologies subjectives. La présence de Giraldo dans de la fin du monde occidental et sont com-

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Beaucoup d'entre eux ont commencé avec l'album de la Coupe du monde de football 1994 ; celui-ci lui a permis de comprendre les possibilités narratives de l'utilisation de vignettes ou de points de vue hétérogènes, tels que des prises de vue aériennes, des gros plans, des détails ou des projections visuelles en perspective. Dans ces images, il est troublant de voir que les footballeurs semblent porter une armure et qu'ils n'aient pas de tête ou qu’ils arborent des têtes d'animaux, ce qui s'est aussi produit lorsqu’il dessinait d'autres types de personnages. Au même moment, ont également commencé à apparaître des images d'architecture, d'avions et de bateaux, ces dernières faisant allusion aux navires utilisés lors de la colonisation américaine.

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[...] Les images qui émergent de ces récits franchissent continuellement les seuils du temps et de l'espace, et assimilent un énorme arsenal de codes de représentation visuelle qui ont été utilisés dans différents types de représentations culturelles à l'intérieur et à l'extérieur du champ de l'art. [...]


Un autre aspect étonnant– entre autres de cette série de dessins de Carlos Giraldo est la polyvalence par l’utilisation de différentes conceptions de la représentation de l'espace physique ; celle-ci les fait apparaître comme des compendiums de toutes les façons de traduire en images Les images qui émergent de ces récits l'expérience spatiale. De plus, cela semble franchissent continuellement les seuils impliquer que tous ces outils développés du temps et de l'espace, et assimilent un pour rendre compte de la façon dont l'esénorme arsenal de codes de représenta- pace est vécu à travers l'histoire - au sein tion visuelle qui ont été utilisés dans diffé- des différentes cultures qui l'ont constitué rents types de représentations culturelles sont interchangeables et peuvent avoir la à l'intérieur et à l'extérieur du champ de l'art. même signification. L’envers de l'espace

Le temps qui s’écoule d'avant en arrière

Dans sa vaste série de dessins « L'Arbre de la Vie », qu'il a commencé à développer en 2009 et qu'il continue d'explorer à ce jour, Giraldo combine différentes représentations graphiques associées à l'idée du sacré, ainsi que différents cadres de référence. Il s’agit de diagrammes géométriques ou de références plus lisibles à des personnages ou des emblèmes du sacré. C'est ainsi que les corps sont transparents, révélant à la fois leurs organes internes et d'autres types d’attributs de l'être humain, plus d'ordre métaphysique, pouvant impliquer une autre idée d'intériorité dans le corps. Il réalise même ces œuvres sur des papiers translucides, ce qui lui permet de composer des images en dessinant des lignes colorées des deux côtés du papier, de sorte que l'intérieur de l'une est l'extérieur de l'autre, et la surface du dessin montre qu'il y a un « au-delà ».

Ses dessins autour de la Seconde Guerre mondiale, qui ont commencé à prendre forme en 2006 et continuent à se développer aujourd'hui encore, s’inspirent de certains épisodes historiques du régime nazi, ainsi que de diverses légendes liées au même sujet. Ce sont des images complexes faites au crayon noir et mettant en scène des épisodes spécifiques de la guerre, ou enquêtant sur la légende de la fuite d'Hitler de l'Allemagne. Moyennant une élaboration minutieuse avec des détails surprenants, Giraldo transforme les personnages des Simpson en protagonistes de ces histoires réelles ou fictives, ce qui rend inquiétants des faits historiques connus.

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plétés par toutes les catastrophes naturelles imaginables. Elle cherche à affirmer l'idée du temps comme un cycle en spirale, permettant différents types de retours et de récurrences, mais aussi un nouveau départ.

Tout au long de son processus de création, l'ensemble des situations d'origine scientifique, historique, mythique, artistique ou

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fantastique qu'il a appris à connaître n’a cessé de grandir et s’est ainsi incorporé à son processus de création pour générer une collection d'images et de récits qui n’a cessé de s’amplifier. Cette collection de différentes visualités a également incorporé les façons de représenter l'espace et les possibilités de naviguer dans le temps.

mondial), il est surprenant de constater qu'il a développé des pratiques artistiques très proches du travail d'artistes colombiens et étrangers. Un premier trait qui le rapproche de la scène artistique contemporaine colombienne est son intérêt pour le dessin et sa motivation à explorer ses options de manière exhaustive. En ce sens, il y a une certaine proximité avec le travail Un aspect supplémentaire que je voudrais de José Antonio Suarez, un artiste colommentionner est la manière dont ses images bien qui dessine de manière presque obbouleversent l'expérience des choses qui sessionnelle depuis le début des années nous sont familières. Il y a un peu plus d'un 1980, enregistrant les événements les plus siècle, Sigmund Freud écrivait son célèbre divers de l'expérience mondiale. Dans un article sur le mot « Unheimlich », qui en an- premier temps, il a réalisé ces dessins glais se traduit par « uncanny », en français dans des cahiers et plus tard dans diverses par « étrange » et en espagnol par « sinies- séries, générant un travail absolument extro ». Dans cet article, Freud mentionne tensif souvent réalisé en petits formats. comment ce mot allemand fait allusion étymologiquement à quelque chose qui bien Au cours des années 90, il a été fréquemque familier, proche ou connu a cessé de ment discuté en quoi l'expérience cultul'être en raison de certaines circonstances. relle ayant façonné la réalité matérielle en Dans le mot anglais un sens similaire peut Amérique latine au cours du siècle dernier être observé, tandis que les termes utilisés semblerait plus postmoderne que moen français ou en espagnol font allusion à derne. Pour un artiste comme Carlos Gil'émotion de vivre « le refoulé qui revient ». raldo, la coexistence de modèles culturels C'est quelque chose de très proche qui a hétérogènes, la juxtaposition d'époques dû être réprimé par une expérience trau- historiques disparates ou la validité de matique. Une grande partie de l'art du diverses représentations culturelles n'est siècle dernier a proposé un questionne- pas une élaboration théorique mais un ment du réel, du connu, du familier à des mode de vie. De ce fait, nombre de ses fins analytiques ou critiques, générant des images rappellent des configurations spaimages qui nous dérangent par leur nature tiales de la Transvanguardia italienne ou du Néo-expressionnisme allemand. En sinistre. ce sens, son intérêt pour des sources visuelles aussi disparates que l'art égyptien L'envers du regard ou la bande dessinée peut être considéré Bien que Carlos Giraldo n'ait pas suivi de comme proche du Revivalisme de cerformation poussée à l'histoire de l'art mo- taines méthodes propres à l’art des années derne et contemporain (à la fois local et 90. Cependant, avec des séries comme


Beaucoup d'images de Carlos Giraldo suscitent une expérience inquiétante chez ceux d'entre nous qui les observons, car

elles nous permettent d'y projeter nos propres fantasmes et nos obsessions. Elles nous permettent de regarder la réalité avec un parti pris et de nous immerger dans sa dimension imaginaire.

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« El Árbol de la Vida », il semble avoir élucidé une manière particulière d'interpréter de façon syncrétique les deux sources les plus lisibles de son travail, la science et la fantaisie, et de leur côté sombre.

dessin d'enfant de Giraldo children's drawing by Giraldo

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manuel anceau essai d’Impérissable clarté : carlos augusto giraldo

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enseignant et écrivain. Il s’intéresse très tôt à l’art brut et a collaboré à de nombreux projets en rapport avec ses artistes comme Rouge ciel, un essai sur l’art brut, film de Bruno Decharme (2009), Adolf Wölfli: Creator of the Universe (2013), postface de Ruines de Perrine Le Querrec (2017), la rédaction d'essais pour la galerie christian berst art brut, etc.


"Je méprise cette poussière qui me compose et qui vous parle ; on pourra la persécuter et faire mourir cette poussière ! Mais je défie qu'on m'arrache cette vie indépendante que je me suis donnée dans les siècles et dans les cieux." Louis Antoine de Saint-Just

Frappante de prime abord dans ces cahiers dessinés est la sécheresse du trait, l’évaporation concertée de tout fluide – comme s’il ne s’agissait que de montrer, de toute chose, visible ou invisible, profane ou sacrée, l’ossature, l’armature secrète. Tel, au fond du réservoir asséché, surgit le village noyé, qu’on ne voyait pas ; qu’on ne pouvait pas voir ; dont plus personne même ne se rappelait (tant la mémoire humaine est à courte vue) l’existence.

l’on y tient, tant ce que l’on devine hanter ces feuilles est la hantise de la poussière, ce même dégoût, presque, aussi hautain, aussi superbe, de la périssabilité du monde terrestre, qu’un Saint-Just, jadis, exprimait, dans une formule fameuse : « je méprise cette poussière qui me compose et qui vous parle »…

Qu’alors c'est comme si Carlos Augusto Giraldo, sur toute chose où ses doigts de calculateur-poète se posent, n’avait de Ici rien ne tremble, rien ne respire ; rien ne cesse d’en ôter tout voile éphémère, en une crie. Ni sang ni larme. L’on dirait d’un parc, œuvre qui se présenterait, au final, comme aux allées d’impeccable rectitude, mys- une tentative (bien plus émouvante qu’elle térieusement semé de statues de papier ne semble, précisément parce que l’émocalque. tion y est empêchée, bâillonnée au premier cri, ou soupir) de tout baptiser (cités L’art de Giraldo tenant tout entier dans la perdues, femmes mortelles, sculptures contention, c’est peu dire que les motifs antiques…) du nom d’Impérissable. y sont époussetés – jusqu’au « délire », si

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Il n’est que de voir ce squelette chaussé d’escarpins ; rien ne pourra faire que cette femme ne se souvienne de la chair qui la mouvait, si belle. (Le puritanisme de Giraldo en la montrant auréolée et en prière, dans une fusion si caractéristique de son « style », accroît la beauté de la Dame.)

Il n’est pas ; il ne peut y avoir de feuille morte à l’arbre Giraldo ; « arbol de la vida » est son blason : héraldique dont la netteté de contours sert, d’abord, à nourrir les racines de cet arbre d’un suc parfaitement distillé, raffiné avec la rigueur du chimiste, l’évidente maîtrise de qui sait calculer avec génie les proportions. Fondant chair et veines et os dans un même sarcophage de verre Giraldo embaume ces femmes ; exalte, mais comme à basse température, son désir.

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Décalquées semble-t-il pour une bonne part de revues plus ou moins « érotiques » (notez je vous prie l’abondance de femmes à la main discrètement posée sur le sexe), les silhouettes féminines giraldiennes sont autant de « belles au bois dormant » : sous le cercueil de verre la chair ne se corrompt pas. Impossible de la confondre avec la boue, les feuilles mortes.

Mais aussi bien Giraldo semble-t-il dessiner de très loin : c’est particulièrement sensible quand, délaissant pour un instant ses femmes vitrifiées, montées sur vertèbres comme d’autres sur échasses, et sur lesquelles son désir se reflète, froid, comme dans un labyrinthe de miroirs – il évoque (ou plutôt : convoque, d’un ton sec, impérieux) l’Histoire. Ici c’est en prêtre-astronome, comme aux temps antiques, que Giraldo semble décrire les phases de l’histoire humaine. Les civilisations mochicas, incas et mayas, le miracle égyptien… entre autres : autant d’astres éteints, dont Giraldo rallume la splendeur, non tant pour les faire, naïvement, « revivre » (aucune trace chez lui d’une quelconque nostalgie), que pour leur faculté (de par leur prestige immense) à se placer d’emblée au point focal de la lentille, là où les rayons de l’imaginaire et du réel se rencontrent – pour ne faire qu’un. Il n’est pas jusqu’à la légendaire civilisation atlante, ou la cité « pré-colombienne » d’Akakor, aux splendeurs (si elles ont jamais existé) à jamais perdues, dont notre astronome ne proclame que, sans elles, rien ne peut se comprendre de l’aventure


Quelle Force ? Ici pourrait surgir Dieu mais Giraldo, s’il respire de toute évidence dans un monde chrétien régi par le conflit entre « péché » et « rédemption », ne paraît pas si pressé qu’Il surgisse, arbitre du jeu : ce serait en finir avec le ressassement et c’est sans doute de pouvoir continuer à vivre avec ce ressassement (qu’il sait consubstantiel à son propre souffle – comme tous les poètes) qui préoccupe Giraldo, et non d’en finir avec lui ; d’où le recours (par définition appelant à l’énumération interminable des « correspondances », comme au jeu des ricochets) à une mystique toute de syncrétisme avoué. (Laquelle n’est pas sans faire penser à ce que peut produire un « New Age » de plus ou moins bon aloi.)

prendrait pas la raison d’une telle variété d’apparences, comme d’une encyclopédie des Lumières, au sens littéral d’un spectre lumineux, si l’on ne voyait pas que le but de Giraldo, ce qui le taraude, l’exaspère peut-être c’est (telle est mon hypothèse) : d’éviscérer l’humain, de lui arracher la matière périssable dont il est fait – non pour le meurtrir, le torturer dans une énumération sadique de ses propres malheurs (l’infini catalogue de ses propres ruines) mais à la seule fin d’en extraire, à toute force, le Cœur impérissable.

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humaine ; comme si, de son point de vue, décrire l’apparent mouvement (si erratique du reste) des « civilisations » se succédant nécessitait de tenir compte autant des masses cachées, que des masses visibles. Mieux : qu’il n’est pas d’influences à négliger, que tout en ce monde (je parle bien de ce monde terrestre duquel Giraldo, en extra-lucide, se fait le chroniqueur infatigable) est pris dans la même orbite – de subir la même attraction d’une Force unique.

Il n’en finira jamais de compter et recompter les étoiles du ciel et les grains de sable de la terre celui qui, dans ces cahiers aux allures d’éphémérides, ne cesse de faire s’unir haut et bas, chair et esprit, luxure et piété, mythe et histoire.

Femmes écorchées, diagrammes occultes, temples antiques punaisés comme autant de « posters », j’en passe – on ne com23


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Non le cœur (minuscule « secret » de la sans retard, dans le même élan de la penforme) logé en chaque figure, chaque sil- sée et du geste. houette ce serait faire œuvre de dessinateur, peintre, etc. L’ambition de Giraldo semble tout autre : c’est une ambition d’un occultisme grandiose, qui ne se donne de moyens « clairs » (ici d’abord le dessin, avec une prédilection pour le décalque) que pour mieux traquer, découvrir en son antre obscur ce « Cœur » enfoui, dont on devine que, quel que soit le nom qu’on lui donne, il ne peut s’agir que d’une clé sorcière, donnant à celui-là qui s’en saisirait pouvoir de faire surgir, et disparaître, à volonté, toute forme passée, présente et future. Le trait de Giraldo s’il est aussi tendu, ne serait-ce pas qu’il est comme la corde d’un arc ? Et certes ici les flèches abondent, que l’on prend pour des flèches donnant à lire les dessins mais qu’on aurait peut-être avantage à voir ainsi que de vraies flèches, allant droit vers la cible. Que l’on juge de cette admirable silhouette de femme où s’indiquent, par force flèches, les temples sacrés du corps humain : ce que font ici ces flèches, lancées par notre chasseur féru d’analogies, relève je crois de la véritable chasse, qu’ainsi le trait « agit », ou veut réellement agir, réellement veut transpercer la peau du « sujet » (la poupée-silhouette, aux fils colorés de veines et d’organes internes) ; tel qu’en magie bien comprise, le recours forcené aux correspondances fait de ce dessin (il en est beaucoup d’autres, de même facture), non certes un simple exposé de « connaissances occultes », mais la mise en œuvre effective d’une vision voulant agir de suite,

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Il se peut du reste que c’est bien là ce que Giraldo rêve, dans ces rêves éveillés, de tenir en main : ce Cœur ouvrant comme une clé magique tous les « cœurs » ; mieux : que c’est là ce qu’il croit, peut-être, tant qu’il exécute ses « codex », ainsi qu’un prêtre aztèque, tenir, dégouttant d’encre (et de jouissance inavouée), dans sa main ; une main si sûre, par ailleurs, de son geste. (Il ne peut pas avoir la main qui tremble, celui qui, sur l’autel de pierre de la feuille blanche,


Et c’est ce qui fait de cette œuvre une aventure si émouvante, nimbée de la brume des explorations les plus acharnées, les plus intimes : enfoui dans la jungle des veines, pris dans la banquise des os – voici le temple sacré gisant au « cœur » du mystère féminin.

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sacrifie les formes passées, présentes et futures du monde pour en extraire le Cœur, secret des secrets.)

Le guide plisse les yeux ; il montre, il indique là-bas ce temple. La sueur ne coule pas sur ses tempes ; mais il souffle, longuement, un long souffle, qui veut dire : je méprise, moi, cette poussière qui me compose et qui vous parle ; mais cette vie que je me suis faite, aux cieux de l’Impérissable, je vois dans vos yeux (où règne aussi bien la poussière) qu’elle est déjà cette étoile que vous étudiez, dont vous admirez qu’elle puisse être aussi bien située, déjà, dans la constellation de la Splendeur.

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chez jorge alberto cadi | at jorge alberto cadi’s place, 2019

Zdeněk Košek par Jaromír Typlt, 2014 captures d'écran du film "Carlos Augusto Giraldo : codex" (13'30") coproduit en 2020 par christian berst art brut et Paula Diaz screenshots of the movie "Carlos Augusto Giraldo: codex" (13'30") co-produced in 2020 by christian berst art brut and Paula Diaz


texts in english


carlos augusto giraldo codex

jaime ceron preface an outside that will be inside and a tomorrow that was yesterday: the images of carlos giraldo

Jaime Cerón, Bogotá 1967 He studied fine arts at the National University of Colombia where he completed a Master's Degree in Art History and Theory. His work has been focused on teaching, writing art critics, curating, theoretical research, and cultural management, which he has developed simultaneously and continuously, from 1994 to the present. He has been a fine art Manager of the Capital District, visual art Advisor of the Ministry of Culture and Curator of the Misol Foundation for the Arts. Between 2016 and 2020 he was deputy director of the Arts at Idartes. He is currently a curator and independent art critic. 28


"All civilisations pass through a life cycle, like the life of a human being." carlos giraldo

Generating images seems to be the main tool available to Carlos Giraldo for interacting with the different dimensions of reality. Since childhood, this impulsion has been manifested in his need to appropriate and interpret all the sources of visuality that he has experienced over the years in order to make drawings that explore things he learnt at school or has seen on television. What he appropriates from all these sources are not only themes or codes of visual representation, but also the narratives that they communicate.

to be interpreted as an autonomous activity. Before, it seemed only to be a transitory phase of the creative process – a study that would then be formalised by another medium or another activity. Watching ourselves see

According to psychoanalytic discourse, when we are born we experience the curious situation of being incapable of separating the world around us from our perception of it. We find it hard to identify where the world ends He understood at an early age that drawing is and our humanity begins. At birth, we possess not a monopoly of the realm of art, but rather a self that is not differentiated from the world. a social practice that has passed through the It is only access to language that enables us to most diverse forms of knowledge and disci- gradually separate ourselves from it. plines and that has shaped multiple human activities; It is a key tool for mathematics, engi- In the modern western context, the act of neering, industrial design and architecture, as seeing seems the predominant way of apwell as for the natural sciences, video games prehending reality. Although our body uses and the fundamentals of writing – among four other perceptual channels – smell, heaa host of possible fields. Drawing has been ring, touch and taste – that are just as capable used socially, above all, to mobilise ideas – to of leading us to feel a similar kind of connecsuch an extent, indeed, that, in the case of art, tion or understanding, sight remains primorit was not until the 20th century that it began dial. 29


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[...] The images that emerge from these narratives are constantly crossing the thresholds of time and space, and assimilate an enormous arsenal of codes of visual representation that have been used in different types of cultural representations inside and outside the field of art. [...]


When we compare our channels of perception to those of animals, we see the extent to which the body makes a decisive mark on our understanding of the world. Even in this regard, we must consider that the body cannot exist outside the cultural representations that run through it and constitute it, to such an extent that the image we have of the world is projected onto the screen generated by the cultural codes we use to make it intelligible.

draws other kinds of figures. At the same time, images of architecture, aeroplanes and boats began to appear, the latter alluding to the ships used during the colonisation of the Americas.

About a century ago, the Surrealist artists were fascinated by the philosophical implications of the headless body, which are manifested mainly in the possibility of replacing it with something else. For that, they went through all the forms of masks that The experience of seeing consists in immer- had existed in history, as well as the cultusing ourselves in the “social dimensions of ral representations tending to connect the visual field.” Thus, when we engage in what is most elevated in the human being the social conventions that structure the to something inferior. It was an attempt to culture we live in, we learn what we “should” confront the rationalism that they seemed and “should not” see. For artists, the process to see as the cause of the European cultuof creating images implies a negotiation ral malaise. Giraldo’s interest in the acéphale between what they imagine the world is and arose from a similar impulse, one that took what the world itself could become, given caricatures as its starting point. that the reality that would exist behind this image can only be supposed, being beyond It is striking that there are no direct refethe body’s experience. If all we have is rences to his own everyday experiences images of the world, then we could say that or his subjective ideas. Giraldo’s presence the world is nothing more than an imaginary in the images can be retraced only via the events, the situations and the references that place. held his attention and that gradually revealed to him the possibility of changing their places Crossed sources and meanings, to the point that the world To come back to Giraldo’s images, it is impor- seems to be merely an imaginary dimension tant to consider the big set of drawings he occupied, with equal pertinence, by narramade as a child. Many of them started with tives issuing from scientific knowledge and a 1994 World Cup picture album, which gave others that could be constructed by fantasy. him an understanding of the narrative possibilities of using vignettes or heterogeneous This extensive interlacing of events with viewpoints such as aerial views, close-ups, heterogenous origins gave rise to a series details or visual projections in perspective. of books written as preliminaries to the elaIn these images it is troubling to see that boration of his images. Created at the cost the footballers seem to be wearing armour of great epistemological effort, these books and that they have no head, or have ani- seek to interpret notions such as the circumals’ heads, which also happens when he larity of time and the evanescence of space,

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and they involve research into mythic figures with equivalent existences in different cultural narratives that emerged at different times and in different places in history. During the first decade of the 21st century, Giraldo therefore devoted himself to writing these three voluminous books, and a few years later he took up the task of exhaustively revising them.

bodies are transparent, revealing at once their internal organs and other kinds of attributes of the human being that are more metaphysical in nature and able to imply another idea of interiority in the body. He even makes these works on translucent paper, which enables him to compose images by drawing coloured lines on both sides of the paper, so that the interior of one is the exterior of the other, and The titles he gave them are “The Tenth Ava- the surface of the drawing shows that there tar,” “Atlantis” and “The Third World War.” In is a beyond. the third, Giraldo uses narratives similar to the ones used on television to talk about what Another surprising aspect of this series of happened during the two world wars, in order drawings by Carlos Giraldo – among others to interweave past and future. This narrative – is its versatility through the use of different anticipates a return of the main wars from the conceptions of representation of physical modern era, which are successively articula- space; this makes them come across as ted with the different mythologies of the end compendiums of the ways of translating spaof the western world, to which are added all tial experiences into images. Moreover, this the natural catastrophes imaginable. It seeks seems to imply that all these tools developed to affirm the idea of time as a spiralling cycle, to show how space has been experienced allowing for different kinds of returns and re- through history – in the different cultures that currences, but also a fresh start. have constituted it – are interchangeable and can have the same meaning. The images that emerge from these narratives are constantly crossing the thresholds of Time flowing from fore to back time and space, and assimilate an enormous arsenal of codes of visual representation that His drawings around the Second World War, have been used in different types of cultural which started taking shape in 2006 and are representations inside and outside the field of still developing today, are inspired by certain episodes in the history of the Nazi regime, art. as well as by various legends relating to the The other side of space same subject. These are complex images made with a black pencil, showing speciIn the vast series of drawings “The Tree of fic episodes in the war or investigating the Life” that he started developing in 2009 and legend of Hitler’s flight from Germany. By his that he is still exploring today, Giraldo com- meticulous elaboration and surprising details, bines different graphic representations asso- Giraldo transforms the characters of the ciated with the idea of the sacred, as well as Simpsons into the protagonists of these true different frames of reference. These are geo- or fictive stories, which makes known historimetrical diagrams or more legible references cal facts newly unsettling. to figures or emblems of the sacred. Here,


Throughout the process of its creation, the number of situations of scientific, historical, mythical, artistic or fantastical origin that he has got to know has grown constantly; they have become a part of his creative process, generating a collection of images and narratives that has got ever bigger. This collection of different visualities has also incorporated ways of representing space and the possibilities of navigating through time. A supplementary aspect that I would like to mention is the way his images turn our familiar experience of things on its head. A little more than a century ago, Sigmund Freud wrote his famous article on the “ Unheimlich,” translated into English as “uncanny,” into French “étranger” and into Spanish as “siniestro.” In this article, Freud mentions how this German word alludes etymologically to something that is normally familiar, close or known but has ceased to be so because of the circumstances obtaining. In the English word a similar meaning can be observed, whereas the terms used in French and Spanish allude to the emotion of experiencing “the return of the repressed.” This is very close to what must have been repressed by a traumatic experience; Much of the art of the last century proposed to question the real, the known and the familiar to analytical or critical ends, generating images that disturb us by their uncanny nature. The other side of the gaze Although Carlos Giraldo has not followed any in-depth courses on the history of modern and contemporary art (both local and global), it is surprising to observe that he has developed artistic practices that are very close to the work of Colombian and foreign artists. A first feature that connects him to the contem-

porary Colombian art scene is his interest in drawing and his desire to exhaustively explore its options. In this sense, there is a certain proximity to the work of José Antonio Suarez, a Colombian artist who has been drawing almost obsessively since the 1980s, recording the most diverse events in the global experience. To begin with, he made drawings in notebooks and later produced various series, generating an extensive body of work often done in small formats. In the 1990s, there was a great deal of discussion about the way in which the cultural experience that had shaped material reality in Latin America over the past century seemed more postmodern than modern. For an artist like Carlos Giraldo, the coexistence of heterogeneous cultural models, the juxtaposition of disparate historical periods and the validity of various cultural representations was not a theoretical construct but a way of life. Consequently, many of his images recall the spatial configurations of the Italian Transvanguardia or German Neo-Expressionism. In this sense, his interest in visual sources as disparate as Egyptian art and comics can be considered as close to the revivalism characteristic of certain artistic tendencies of the 1990s. However, with series like “ El Árbol de la Vida” he seems to have elaborated a particular way of interpreting the two most legible sources of his work, science and fantasy, and particularly their dark side. Many of Carlos Giraldo’s images arouse a feeling of uncanniness among those who observe them, for they enable us to project our fantasies and obsessions onto them. They allow us to look at reality from an angle and to immerse ourselves in its imaginary dimension.

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carlos augusto giraldo codex 34 captures d'écran du film "Carlos Augusto Giraldo : codex" (13'30") coproduit en 2020 par christian berst art brut et Paula Diaz screenshots of the movie "Carlos Augusto Giraldo: codex" (13'30") co-produced in 2020 by christian berst art brut and Paula Diaz


l'arbre de vie the tree of life

Les oeuvres présentées dans ce catalogue sont extraites de l'ensemble intitulé El Arbol de la vida (L'Arbre de vie), achevé en 2013. Chaque dessin a été réalisé au stylo à bille sur papier ou papier calque, et mesure 20 x 32 cm. The works presented in this catalog are a set of drawings from the book El Arbol de la vida, (The Tree of life) completed in 2013. Each drawing was made with ballpoint pens on paper or tracing paper, and their size is 20 x 32 cm (8 x 12.75 in).


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[...] In the vast series of drawings “The Tree of Life” that he started developing in 2009 and that he is still exploring today, Giraldo combines different graphic representations associated with the idea of the sacred, as well as different frames of reference [...] jaime cerón


[...] Dans sa vaste série de dessins « L'Arbre de la Vie », qu'il a commencé à développer en 2009 et qu'il continue d'explorer à ce jour, Giraldo combine différentes représentations graphiques associées à l'idée du sacré, ainsi que différents cadres de référence. [...] jaime cerón

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[...] Il n’est que de voir ce squelette chaussé d’escarpins ; rien ne pourra faire que cette femme ne se souvienne de la chair qui la mouvait, si belle. (Le puritanisme de Giraldo en la montrant auréolée et en prière, dans une fusion si caractéristique de son « style », accroît la beauté de la Dame.) . [...] manuel anceau 81


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[...] Here, bodies are transparent, revealing at once their internal organs and other kinds of attributes of the human being that are more metaphysical in nature and able to imply another idea of interiority in the body. [...] jaime cerón

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[...] C'est ainsi que les corps sont transparents, révélant à la fois leurs organes internes et d'autres types d’attributs de l'être humain, plus d'ordre métaphysique, pouvant impliquer une autre idée d'intériorité dans le corps. [...] jaime cerón

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[...] He even makes these works on translucent paper, which enables him to compose images by drawing coloured lines on both sides of the paper, so that the interior of one is the exterior of the other, and the surface of the drawing shows that there is a beyond. [...] jaime cerón


[...] Il réalise même ces œuvres sur des papiers translucides, ce qui lui permet de composer des images en dessinant des lignes colorées des deux côtés du papier, de sorte que l'intérieur de l'une est l'extérieur de l'autre, et la surface du dessin montre qu'il y a un « au-delà ». [...] jaime cerón

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[...] By putting reality and fiction on the same level, Giraldo seems to want to create the conditions for serendipity, opening the door to a new hybrid knowledge. [...] christian berst

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[...] En mettant la réalité et la fiction sur un même plan, Giraldo paraît vouloir créer les conditions de la sérendipité, s’ouvrant la porte d’un savoir hybride nouveau. [...] christian berst

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vue de l'exposition in the flesh christian berst art brut, 2020 view of the exhibition in the flesh, christian berst art brut, 2020

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série sur papier calque series on tracing paper

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[...] Fondant chair et veines et os dans un même sarcophage de verre Giraldo embaume ces femmes ; exalte, mais comme à basse température, son désir. [...] manuel anceau

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christian berst art brut catalogues publiés published catalogues


le fétichiste anatomie d'une mythologie textes de marc donnadieu et magali nachtergael, édition bilingue (FR/EN), 250 p., 2020

éric benetto in excelsis texte de christian berst, édition bilingue (FR/EN), 212 p., 2019

zdeněk košek dominus mundi textes de barbara safarova, jaromír typlt, manuel anceau, édition bilingue (FR/EN), 250 p., 2020

anton hirschfeld soul weaving texte de nancy huston et jonathan hirschfeld, édition bilingue (FR/EN), 300 p., 2018

in abstracto #2 texte de raphaël koenig, édition bilingue (FR/EN), 264 p., 2020

lindsay caldicott x ray memories texte de marc lenot, édition bilingue (FR/EN), 300 p., 2018

albert moser scansions textes de bruce burris et philipp march jones, édition bilingue (FR/EN), 200 p., 2020

misleidys castillo pedroso fuerza cubana #2 texte de karen wong, édition bilingue (FR/EN), 300 p., 2018

jacqueline b. l’indomptée texte de philippe dagen, édition bilingue (FR/EN), 280 p., 2019

jean perdrizet deus ex machina textes de j.-g. barbara, m. anceau, j. argémi, m. décimo, édition (FR/EN), 300 p., 2018

jorge alberto cadi el buzo texte de christian berst, édition bilingue (FR/EN), 274 p., 2019

do the write thing read between the lines #2 texte de éric dussert, édition bilingue (FR/EN), 220 p., 2018

japon brut la lune, le soleil, yamanami textes de yukiko koide et raphaël koenig, édition bilingue (FR/EN), 264 p., 2019

giovanni bosco dottore di tutto #2 textes de eva di sefano et jean-louis lanoux, bilingue (FR/EN), 270 p., 2018

anibal brizuela ordo ab chao textes de anne-laure peressin, karina busto, fabiana imola, claudia del rio, 240 p., 2019

john ricardo cunningham otro mundo édition bilingue (FR/EN), 180 p., 2017

josé manuel egea lycanthropos II textes de graciela garcia et bruno dubreuil, édition bilingue (FR/EN), 320 p., 2019

hétérotopies architectures habitées texte de matali crasset, édition bilingue (FR/EN), 200 p., 2017

au-delà aux confins du visible et de l’invisible texte de philippe baudouin, édition bilingue (FR/ EN), 220 p., 2019

pascal tassini nexus texte de léa chauvel-lévy, édition bilingue (FR/EN), 200 p., 2017


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gugging the crazed in the hot zone édition bilingue (FR/EN), 204 p., 2017 in abstracto #1 texte de raphaël koenig, édition bilingue (FR/EN), 204 p., 2017 dominique théate in the mood for love texte de barnabé mons, édition bilingue (FR/EN), 200 p., 2017 michel nedjar monographie texte de philippe godin édition, bilingue (FR/EN), 300 p., 2017 marilena pelosi catharsis texte laurent quénehen, entretien laurent danchin, édition bilingue (FR/EN), 230 p., 2017 alexandro garcía no estamos solos II texte de pablo thiago rocca, édition bilingue (FR/EN), 220 p., 2016 prophet royal robertson space gospel texte de pierre muylle, édition bilingue (FR/EN), 200 p., 2016 josé manuel egea lycanthropos textes de graciela garcia et bruno dubreuil, édition bilingue (FR/EN), 232 p., 2016 melvin way a vortex symphony textes de laurent derobert, jay gorney et andrew castrucci, édition (FR/EN), 268 p. 2016 sur le fil par jean-hubert martin texte de jean-hubert martin, édition bilingue (FR/EN), 196 p., 2016 josef hofer transmutations textes de elisabeth telsnig et philippe dagen, édition bilingue (FR/EN), 192 p., 2016 franco bellucci beau comme... texte de gustavo giacosa, édition bilingue (FR/EN), 150 p., 2016

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soit 10 ans états intérieurs texte de stéphane corréard, édition bilingue (FR/ EN), 231 p., 2015 john urho kemp un triangle des bermudes textes de gaël charbau et daniel baumann, édition bilingue (FR/EN), 234 p., 2015 august walla ecce walla texte de johann feilacher, édition bilingue (FR/EN), 190 p., 2015 sauvées du désastre œuvres de deux collections de psychiatres espagnols (1916-1965) textes de graciela garcia et béatrice chemama steiner, bilingue (FR/EN), 296 p, 2015 beverly baker palimpseste texte de philippe godin, édition bilingue (FR/EN), 148 p., 2015 peter kapeller l’œuvre au noir texte de claire margat, édition bilingue (FR/EN), 108 p., 2015 art brut masterpieces et découvertes carte blanche à bruno decharme entretien entre bruno decharme et christian berst, édition bilingue (FR/EN), 174 p., 2014 pepe gaitan epiphany textes de johanna calle gregg & julio perez navarrete, bilingue (FR/EN), 209 p., 2014 do the write thing read between the lines textes de phillip march jones et lilly lampe, édition bilingue (FR/EN), 2014 dan miller graphein I & II textes de tom di maria et richard leeman, édition bilingue (FR/EN), 2014 le lointain on the horizon édition bilingue (FR/EN), 122 p., 2014


james deeds the electric pencil texte de philippe piguet, édition bilingue (FR/EN), 114 p., 2013

joseph barbiero au-dessus du volcan texte de jean-louis lanoux, édition bilingue (FR/EN), 158 p., 2011

eugene von bruenchenhein american beauty texte de adrian dannatt, édition bilingue (FR/EN), 170 p., 2013

henriette zéphir une femme sous influence texte de alain bouillet, édition bilingue (FR/EN), 2011

anna zemánková hortus deliciarum textes de terezie zemánková et manuel anceau, édition bilingue (FR/EN), 146 p., 2013

alexandro garcia no estamos solos texte de thiago rocca, édition trilingue (FR/EN/ES), 2010

john devlin nova cantabrigiensis texte de sandra adam-couralet, édition bilingue (FR/EN), 300 p., 2013

back in the U.S.S.R figures de l’art brut russe texte de vladimir gavrilov, édition bilingue (FR/EN), 2010

davood koochaki un conte persan texte de jacques bral, édition bilingue (FR/EN), 121 p., 2013

harald stoffers liebe mutti texte de michel thévoz, édition bilingue (FR/EN), 132 p., 2009

mary t. smith mississippi shouting textes de daniel soutif et william arnett, édition bilingue (FR/EN), 121 p., 2013

made in holland l’art brut néerlandais texte de nico van der endt, édition bilingue (FR/EN), 2009

albert moser life as a panoramic textes de phillip march jones, andré rouille et christian caujolle, édition (FR/EN), 208 p., 2012

american outsiders the black south texte de phillip march jones, édition bilingue (FR/EN), 2009

josef hofer alter ego textes de elisabeth telsnig et philippe dagen, édition bilingue (FR/EN), 2012 rentrée hors les normes 2012 découvertes et nouvelles acquisitions édition bilingue (FR/EN), 2012 pietro ghizzardi charbons ardents texte de dino menozzi, trilingue (FR/EN/IT), 2011 guo fengyi une rhapsodie chinoise texte rong zheng, trilingue (FR/EN/CH), 115 p., 2011 carlo zinelli une beauté convulsive texte par daniela rosi, édition trilingue (FR/EN/IT), 72 p., 2011


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remerciements acknowledgements manuel anceau, elisa berst, sophie bonnet, adriana bustamante, paula diaz, walter escamilla, antoine frérot, lola jallet, selma khallaf, carmen et daniel klein, lise longo cotelo, clara marques henriques, alice pepey, zoé zachariasen.

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christian berst art brut Ce catalogue a été publié à l’occcasion de l’exposition carlos augusto giraldo : codex à christian berst art brut, du 13 février au 14 mars 2021. This catalog has been published to mark the exhibition carlos augusto giraldo : codex at christian berst art brut from February 13 to March 14, 2021.

design graphique et réalisation graphic design and production élodie fabbri & élisa berst traduction translation charles penwarden (EN) clara cabarrocas (ES)

3-5 passage des gravilliers 75003 paris contact@ christianberst.com

du mercredi au dimanche 14h à 19h ou sur rendez-vous



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