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Timothée S. Stuart & Cheryl Bostrom
Enfants à risques, enfants à promesses Pour un autre regard sur l’éducation
Préfaces de Jean-Marie Petitclerc & Dany Hameau
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Titre original en anglais : Children at Promise: Nine Principles to Help Kids Thrive in an at Risk World Copyright © 2003 by Timothy S. Stuart & Cheryl G. Bostrom © 2013, Éditions CLC France BP 9 – F-26216 Montélimar Cedex Tél. : +33 (0)4 75 90 20 50 editions@clcfrance.com – www.clcfrance.com ISBN : 978-2-7222-0231-3 ISBN Epub : 978-2-7222-0179-8 En partenariat avec : Famille Je t'Aime Association Familiale Protestante membre de l’UDAF 68 17 avenue Maréchal Foch - F-68500 GUEBWILLER Tél. +33 (0)3 89 62 10 11 – Fax +33 (0)3 89 62 11 00 fja@famillejetaime.com - www.famillejetaime.com Traduit de l'anglais par Martine Bontems Relecture : Aurélie Lalire Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés. Couverture et mise en page : Pierre Glassmann
(Photographies utilisées : © Denis Omelchenko & Ollyy , shutterstock.com)
Impression : IMEAF, F-26160 La Bégude de Mazenc Mars 2016 – N° d’impression :
Enfants à risques, enfants à promesses Pour un autre regard sur l’éducation
Timothée S. Stuart & Cheryl Bostrom
Table des matières Préfaces................................................................................ 7 Introduction...................................................................... 13 Première partie : La perspective « à promesses » ................. 21 1. Le concept « enfant à promesses » : une nouvelle façon de penser.23 2. Nous vivons dans un monde « à risques » .............................39 3. La peur est la contrefaçon de l’amour....................................55
Deuxième partie : Conditions préalables à la croissance...... 73 4. Adversité et souffrance peuvent faire grandir.........................75 5. La confiance entre un adulte bienveillant et un enfant..........99
Troisième partie : Caractère issu de la promesse................ 125 6. Persévérance........................................................................127 7. La responsabilité de nos actes .............................................139 8. L’optimisme........................................................................153 9. La motivation à partir de l’identité.....................................167 10. L’intégrité...........................................................................183 11. Le service............................................................................195 12. Le jeu.................................................................................209
Conclusion....................................................................... 219 À propos des auteurs......................................................... 223
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Préfaces Ce qui caractérise toute pratique éducative, c’est le regard porté sur l’enfant. Ce regard porté par Timothée S. Stuart et Cheryl Bostrom est un regard empreint de bienveillance. Il consiste à ne jamais enfermer l’enfant dans une représentation construite à partir de ses comportements ou de ses performances de l’aujourd’hui. Combien il est différent de dire à l’enfant : « Tu as commis un délit » – ce qui peut refléter la réalité – et « tu es un délinquant », une formule qui impacte son avenir, en l’enfermant dans une image négative. Combien il est différent de dire à l’enfant : « ta copie est nulle » – ce qui peut être vrai selon le référentiel de notation – et « tu es nul », formule qui nie toutes les ressources de l’enfant, et l’empêche de pouvoir rebondir ! L’essentiel des formations que je dispense dans le monde de l’éducation spécialisée, réside dans cette conversion du regard. Et tel est l’essentiel du message transmis par les auteurs : ne pas parler d’enfants à risques, mais d’enfants à promesses. Un tel regard sur l’enfant est conforme à l’Évangile. La plus belle parabole jamais écrite sur l’éducation n’est-elle pas celle de la graine appelée à devenir un grand arbre. Considérer l’enfant avec le regard de Dieu Père, c’est toujours croire en sa capacité de grandir. Tout enfant, quelles que puissent être les difficultés rencontrées en chemin, est appelé à réussir sa vie. J’aime, pour ma part, effectuer 7
une distinction entre le fait de réussir dans la vie, c’est-à-dire sous le regard des autres, et de réussir sa vie, et j’aime la définition que les auteurs donnent de cette notion : « apporter une contribution positive au bien de chacun. » Cette vraie réussite, – telle est la conviction largement développée dans cet ouvrage –, est à la portée de chaque enfant confronté à l’adversité et avec lequel nous avons noué une relation authentique et bienveillante. Les auteurs insistent sur les bienfaits, sur le plan éducatif, de la confrontation à l’adversité. En ce sens, ils vont à l’encontre de cette « pensée unique », largement développée dans notre société contemporaine, qui viserait à vouloir éviter à l’enfant toute confrontation à la souffrance. Ceci est sans doute lié à ce que nous, adultes, avons du mal à supporter la souffrance de l’enfant. Alors nous avons tendance à vouloir lui faire éviter cette expérience, ce qui va souvent de pair avec une attitude de surprotection. Nous voulons ne lui faire courir aucun risque. Mais une éducation sans risque est l’éducation la plus risquée qu’il soit, car elle forme des irresponsables ! Nous ne dirons jamais assez combien le principe de précaution, appliqué au champ éducatif, cause de véritables ravages, lorsqu’il s’agit de vouloir éviter à tout prix à l’enfant toute expérience malheureuse. L’important, en éducation, consiste à aider l’enfant à relire les expériences de manière à ce qu’il soit capable d’en tirer les leçons. L’enfant apprend ainsi qu’il y a des solutions possibles, nous disent les auteurs, et qu’il faudra persévérer pour les appréhender et les mettre en œuvre. L’adversité interprétée par l’adulte lui apprend ainsi la persévérance, une vertu parfois un peu oubliée aujourd’hui. Ceci nécessite de la part de l’adulte une constante bienveillance. Tous les travaux actuels menés sur la résilience, – autrement dit la capacité pour l’enfant victime de traumatismes psychologiques
importants, de pouvoir rebondir –, montrent que celle-ci n’est rendue possible que par la rencontre d’un adulte au regard bienveillant, que l’on nomme tuteur de résilience. Les convictions de Timothée S.Stuart et Cheryl Bostrom rejoignent tout à fait les intuitions pédagogiques de St Jean Bosco, considéré par l'Église catholique comme père et maître de la jeunesse, et dont nous fêtons cette année le bicentenaire de la naissance. Lui insiste aussi sur la confiance, clef de voûte de la relation éducative. « Sans bienveillance, pas de confiance ; sans confiance, pas d’éducation possible. » C’est ainsi que l’on a pris l’habitude de résumer sa pensée pédagogique. Il s’agit de faire confiance à l’enfant, ce qui va de pair avec l’espérance mise en lui. Il s’agit d’aider l’enfant à garder confiance en lui, en particulier dans l’adversité. Mais il s’agit aussi que l’adulte soit digne de confiance. Ceci nécessite qu’il soit juste, droit, honnête et sincère, ce que les auteurs nomment « intègre ». Un autre point de convergence réside dans l’intérêt du jeu, considéré comme une véritable activité éducative, et non comme simple divertissement. Il me reste à souhaiter que de nombreux parents, animateurs, éducateurs, enseignants lisent cet ouvrage de Timothée S.Stuart et Cheryl Bostrom, tant il renouvelle le regard porté sur eux. Dans notre société contemporaine où tant d’enfants sont broyés, maltraités ou surprotégés, où l’avenir de tant d’autres est compromis à cause d’images négatives attachées à eux, combien il est important de diffuser ce message : voir dans tout enfant, considéré à tort comme enfant à risques, un enfant à promesses !
Jean-Marie Petitclerc, Salésien de Don Bosco. 9
Qui saura dire le pouvoir bienfaisant et profondément mobilisateur d’une parole de bénédiction qui tombe à point nommé ? Probablement pas celui qui remarque chez les autres leurs défauts plutôt que leurs qualités, leurs lacunes plutôt que leur potentiel à réussir et qui ne pourra que débiter des paroles négatives, blessantes et destructrices, en collant une étiquette sur le front des autres, écrite à l’encre de Chine indélébile… À ne plus savoir qui est Dieu, on ne sait plus qui est l’homme, ni ce qu’il vaut véritablement. Nous vivons dans un monde de brutes et de haine et nous baignons dans une culture de moquerie et de dérision qui dénigre la personne, la rabaisse et la méprise. Et si l'agression verbale est moins réprimée que la violence physique, elle n'en fait pas pour autant moins de dégâts ! Nos petits chérubins, depuis la cour de récréation de nos écoles maternelles, entendent et puis répètent le message suivant : « T'es nul, t'es bête, t'es moche » (et je vous fais grâce ici de tous les petits noms d'oiseaux dont la langue de Victor Hugo est pourvue et dont nos petits séraphins connaissent le répertoire qu'ils retiennent encore plus facilement que les tables de multiplication…). Curieusement, la pédagogie manque parfois cruellement là où l’on s'attendrait à la trouver : chez les parents, les enseignants, les éducateurs, les gens d’Église… Même si l'on a du mal à donner ce que l'on n'a pas reçu, il n’en demeure pas moins qu’il y a un minimum vital en deçà duquel nous ne pouvons plus fonctionner correctement. Enfants à risques, enfants à promesses est un livre qui dévoile un avenir fait d'espérance et qui laisse entrevoir un nouvel horizon insoupçonné chez un enfant catalogué « à risques » alors qu'il recèle un précieux potentiel. Étayé sur les récentes découvertes de la psychologie, frappé au coin du bon sens, corroboré par l'expérience et agrémenté de multiples anecdotes personnelles, la force de ce livre réside dans la réaffirmation d'une vérité toute simple mais que nous oublions si facilement dans nos cultures latines : nous apprenons davantage par les compliments que par les critiques et nous 10
évoluons positivement et plus rapidement grâce à l'encouragement que nous recevons d'autrui. Toute la question est de savoir quel regard nous posons sur autrui : nous arrêtons-nous à ses lacunes présentes et évidentes ou parvenons-nous à discerner chez lui un potentiel appelé à se réaliser ? La thèse du livre repose sur le fait que considérer l'enfant à promesses plutôt qu'à risques est bénéfique pour tout le monde. Pour autant, il n'est pas question de verser dans l'angélisme car l'adversité est nécessaire pour amener l’enfant à évoluer dans son être intérieur, avec l’appui d’un adulte attentionné qui développe une relation de confiance avec lui. Dès lors, tous les espoirs sont permis : l'enfant trouvera les ressources nécessaires pour persévérer, assumer ses responsabilités, faire preuve d'optimisme, de motivation, d'intégrité, d'esprit de service et d'engagement. L'histoire de Jean Valjean (Les Misérables, Victor Hugo) rappelée au début du chapitre 9 de ce livre est bouleversante : la confiance rédemptrice accordée à un voleur catalogué comme criminel va faire de lui – homme cassé – un être transformé, reconstruit et engagé au service du prochain. Cette faveur imméritée que la Bible appelle la « grâce » constitue précisément le besoin numéro un de chaque être humain, car tant que cette grâce ne nous a pas touchés, nous restons condamnés et enfermés dans l’échec de notre passé.
Dany Hameau, Pasteur, auteur, conférencier.
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Introduction Une de nos plus grandes joies est d’entrevoir la personnalité de nos enfants et la personne qu’ils sont en train de devenir. (Tim) Quand ma fille Grâce défend sa poupée contre une agression de ses frères, je vois une pure « promesse » ! Elle tient tête à ses deux frères, oubliant qu’elle n’est pas de taille à s’opposer à eux. Elle saisit la batte de hockey la plus proche et se prépare sans crainte à lutter. Je pense que son zèle ressemble à celui de son ancêtre pirate, Grâce O’Malley (ancêtre côté maternel, bien sûr !), qui combattait au large des côtes irlandaises il y a quatre cents ans. Dans l’attitude protectrice de Grâce, je découvre un aspect de sa personnalité et je peux déjà voir en elle la mère – ou la hockeyeuse professionnelle – qu’elle pourrait devenir un jour. Entre-temps, mon fils Elliot âgé de huit ans insiste pour emporter son livre d’expériences lors de nos sorties familiales à Whidbey Island pour pouvoir y insérer méticuleusement les échantillons de nature qu’il ramasse. Je ne peux m’empêcher de sourire devant ce petit aperçu de sa personnalité et d’imaginer les découvertes scientifiques qu’il pourrait faire un jour. Et en regardant Ian, le frère jumeau de Grâce, qui se blottit sur le divan et parle avec sa mère qui vient de lui lire une histoire, je pense à la veinarde qui aura un jour cet homme fort et doux pour mari. 13
Enfants à risques, enfants à promesses
(Cheryl) Lorsque je regarde notre fils et notre fille partir pour l’université, je revois les traits de caractère que mon mari Blake et moi avons vu grandir en eux durant leur enfance. Et, comme mon collègue Tim, j’imagine comment ces caractéristiques se manifesteront dans leurs futures familles, carrières et vies sociales. Je considère ces enfants tels qu’ils étaient, tels qu’ils sont à présent, et tels que mon imagination imprégnée de foi les envisage dans l’avenir. Notre enthousiasme pour les enfants ne concerne pas seulement ceux de nos propres familles. Nous avons durant de nombreuses années été tous deux enseignants, entraîneurs et référents, et avons obtenu des diplômes (un doctorat d’enseignement pour Tim, une maîtrise pour moi) afin d’être mieux équipés pour travailler avec et pour des enfants. J’ai enseigné et entraîné pendant de très nombreuses années des élèves de la 5e à la 1ère, travaillant avec des enfants de diverses origines ethniques et provenant de milieux divers, de très privilégiés à défavorisés. Mon mari et moi avons accueilli des douzaines d’enfants, certains à court terme pour des cours particuliers, d’autres en placement à plus long terme. (Tim) J’ai été professeur d’université, enseignant secondaire et administrateur pour des étudiants favorisés et défavorisés, et dans des endroits variés : un internat huppé en Suisse et une réserve d’Indiens, par exemple. Durant mes loisirs, j’ai entraîné des équipes diverses du point de vue de l’âge et des capacités, de la ligue de championnat de volley lycéen à l’équipe des minimes de football. Nos erreurs et nos succès dans ces domaines très différents nous ont convaincus de ceci : Indépendamment de l’arrière-plan de leur vie personnelle et du cadre dans lequel nous vivons avec eux, dans nos foyers, en classe ou sur le terrain de sport, les enfants ont besoin que nous ayons à leur égard une attitude empreinte d’espérance pour leur avenir.
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Introduction
Malgré la difficulté, nous voulons considérer tous les enfants dans une perspective prometteuse et les aider à réaliser leur potentiel profond. Mais comment faire ? Certains des enfants que nous avons connus semblaient avoir tous les atouts, pourtant ils n’ont pas réussi à employer correctement leurs possibilités. D’autres ont subi de terribles traumatismes, pourtant ils ont dépassé leur statut de victimes et apporté une contribution positive à leur famille et à leur communauté. Il semble que ni avantages, ni désavantages, ni risques, ni protection contre les risques, ne permettent à eux seuls de prédire si oui ou non les jeunes gens vont, en grandissant, apporter une contribution positive à leur société. (Tim) Ceci étant dit, j’ai décidé d’en apprendre davantage. - Pourrais-je identifier la constellation de facteurs qui ont donné aux enfants la possibilité de réussir, indépendamment des circonstances de leur existence ? - Y avait-il un fil conducteur, un paradigme commun à tous ces jeunes gens ? Dans un monde où les conditions de vie sont aussi disparates, comment et pourquoi pourrais-je, en toute légitimité, espérer que tous les enfants ont la possibilité de réussir ? À partir de toutes ces questions et d’une phrase écrite en 1991 par le Dr Beth Blue Swadener, le concept des « traits de caractère prometteurs » (AT-PROMISE en anglais) a commencé à prendre forme dans mon esprit. Dans le cadre de mon travail à l’université de l’état de Washington où je formais les futurs enseignants du Northwest Indian College dans la réserve de Lummi, je suis tombé sur une citation de Swadener dans un manuel de cours. Avec l’idée de détruire l’étiquette « à risques » devenue si courante dans les sphères éducatives, le Dr 15
Enfants à risques, enfants à promesses
Swadener suggérait ceci : « Au lieu de voir les enfants et les familles comme étant à risques, il faudrait voir tous les enfants et toutes les familles comme étant à promesses « at promise ». Ces mots m’ont sauté au visage. Peut-être avaient-ils un profond impact sur moi parce qu’ils étaient en forte contradiction avec l’expression prédominante « à risques », qui contient un jugement et une perspective négatifs auxquels je ne voulais pas croire. Quelle qu’en soit la cause, lorsque j’ai entendu le terme « à promesses », j’ai su qu’il exprimait l’espoir que j’avais pour mes étudiants. Je l’appréciais, donc j’ai commencé à l’utiliser. Cet été, alors que je dirigeais en Suisse une équipe internationale d’enseignants, j’ai commencé à utiliser ce terme pour tenter de donner une note positive au programme. Je voulais que mes enseignants voient tous les élèves comme des jeunes « à promesses » plutôt qu’ « à risques » À ma grande joie, l’expression a pris. Plus tard, deux enseignants de mon équipe sont venus me voir pour me demander de parler du sujet et d’expliquer comment considérer les enfants comme étant « à promesses » et non « à risques ». Ils disaient que l’idée les avait tellement émus qu’ils voulaient que je la partage avec des enseignants à San Antonio. Le retour positif et l’intérêt suscité lors de la conférence au Texas m’ont amené à entreprendre quelques recherches informelles sur le sujet « enfants à promesses ». J’ai commencé à interviewer des gens que je considérais comme ayant réussi, non parce qu’ils avaient réussi en matière de richesse, de succès ou de popularité, mais parce qu’ils étaient impliqués dans leur communauté de vie et lui apportait, moralement et socialement, une contribution positive. Quand j’ai demandé à ces personnes quels étaient, à leurs yeux, les facteurs essentiels de leur réussite, je m’attendais à l’une de leurs 16
Introduction
réponses : elles identifiaient comme clef de leur succès la relation avec un parent encourageant, un entraîneur ou un enseignant. J’ai été cependant surpris d’entendre qu’elles identifiaient un second facteur récurrent : elles affirmaient que l’adversité les avait aidées à réussir ! Tant qu’elles n’avaient pas été confrontées à une grande épreuve, elles ne s’étaient pas senties équipées pour pouvoir apporter une contribution positive au monde qui les environnait. Elles ont reconnu le manque d’adversité comme l’un des facteurs qui aurait pu les empêcher de réussir. J’ai bientôt pris conscience que la réussite et la capacité de ces personnes à s’impliquer dans la société étaient le résultat de l’interaction de l’adversité et de la relation entre eux et un adulte qui avait eu confiance dans leur réussite. Tous avaient expérimenté une bonne dose d’adversité et tous avaient eu dans leur vie au moins une personne qui croyait en eux, les encourageait, et les poussait à accomplir davantage que ce qu’ils se croyaient capables de faire. C’est ainsi que le terme « enfants à promesses » est né. Plus tard, j’ai élargi mes recherches pour soutenir une thèse de doctorat sur ce sujet, examinant, statistiques à l’appui, la corrélation entre la relation de confiance à un adulte encourageant et la capacité d’un enfant à percevoir les bienfaits de l’adversité. Puis j’ai demandé à mon co-auteur, Cheryl Bostrom, de s’associer à la rédaction de ce livre. Son expérience en tant qu’enseignante, écrivain, mentor et parent, sa formation en psychologie et notre consécration commune à la vérité biblique, ont contribué au développement des idées et soutenu le projet. Notre collaboration a permis d’élargir et de valider le concept « à promesses ». Ensemble, nous espérons communiquer ce concept aux parents et enseignants, ainsi qu’à des hommes et femmes, partout dans le monde, qui s’occupent de jeunes.
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Enfants à risques, enfants à promesses
C’est dans ce but que nous offrons ce livre aux lecteurs. - Dans les chapitres 1 à 3, nous expliquons le concept « à promesses » et nous montrons qu’il est plus juste et encourageant de voir les enfants comme étant à promesses plutôt qu’à risques. Nous y présentons l’acrostiche* AT-PROMISE (A- T- P- R- O- MI- S- E) pour aider les lecteurs à se souvenir des éléments de base de cette vision. - Dans les chapitres 4 et 5, qui couvrent la partie « A - T » de l’acrostiche, nous expliquons que la combinaison de l’adversité et d’une relation de confiance (trust en anglais) avec un adulte est nécessaire pour la réussite d’un enfant. - Dans les chapitres 6 à 12, nous explorons les sept facteurs de réussite contenus dans le concept « PROMESSE » en anglais PROMISE) : - P-ersévérance - R-esponsabilité - O-ptimisme - M-otivation - I-ntégrité - S-ervice - E-ngagement (implication) dans les loisirs La théorie et la pratique ont démontré comment chacun de ces facteurs contribue à la capacité de réussir de l’enfant. Ces sept chapitres examinent la corrélation entre ces différents facteurs, les principes sous-jacents, leur place dans le paradigme « à * Acrostiche : poésie composée de telle sorte qu’en lisant dans le sens vertical la première lettre de chaque vers, on trouve le mot pris pour thème, le nom de l’auteur,... 18
Introduction
promesses » et leur nécessité tant pour les enfants que pour les adultes. Nous espérons, par cette étude, encourager d’autres adultes, parents et éducateurs, autant que nous l’avons été, à considérer chaque enfant dans une perspective prometteuse.
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Première partie _________________________
La perspective « à promesses »
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Chapitre premier
Le concept « enfant à promesses » : une nouvelle façon de penser Quelque grand que fût votre grand-père, c’est à vous d’accomplir votre propre croissance. Abraham Lincoln Devant une tasse de café, Larry a commencé à raconter son histoire à contrecœur. « Je ne sais pas pourquoi tu veux m’interviewer. Je n’ai pas d’histoires fumeuses à te raconter au sujet de mon enfance. D’ailleurs, c’est à peine si j’ai eu une enfance ! J’étais le cinquième d’une fratrie de huit. Mes parents avaient traversé la période de la Crise de 1929 qui avait laissé une empreinte indélébile sur leur vie…
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Enfants à risques, enfants à promesses
Mon père n’a jamais surmonté le fait d’avoir tout perdu et il a consacré le reste de sa vie à travailler. Il était électricien, un gars intelligent sans aucun doute, mais il s’est tué à la tâche. Il pensait que c’était là le rôle d’un père. Et ma mère… je pense qu’elle n’a jamais vraiment aimé les enfants… elle ne leur a jamais consacré de temps. Ainsi, mes parents n’ont pas eu beaucoup d’influence positive dans ma vie et ils ne m’ont pas poussé dans une direction particulière. - Quel a été alors le point décisif pour que tu changes ? Cette question l’a surpris. Il nous a regardés comme si nous l’avions pris au dépourvu. Puis il a dit : - Je me souviens d’un moment décisif dans ma vie. J’entrais en classe de seconde. Jusque là, de l’école primaire à la classe de troisième, j’entendais toujours les mêmes remarques : « avec ton intelligence, tu devrais être capable d’obtenir de bonnes notes mais tu ne fais tout simplement pas vraiment d’efforts ! » À l’approche des périodes de recrutement pour le foot et le baseball, j’améliorais mes notes juste assez pour que ma candidature soit retenue. Le reste du temps, je me débrouillais tout juste pour ne pas échouer. J’avais un professeur d’algèbre nommé Dan Blackwell. Un soir après la classe, il m’a convoqué et m’a dit : « Larry, il est évident que tu as la capacité de faire ces devoirs de math, mais tu ne fiches rien ou tu ne fais aucun effort. Voici ce que je vais faire : si tu viens me voir après les cours pendant une heure deux soirs par semaine, je t’aiderai à rattraper le niveau en algèbre ». Et c’est ce qu’il a fait. Je l’ai vu pendant presque six mois, deux fois par semaine, après les cours, pendant une heure. Il m’a donné des cours particuliers en math. C’était la toute première fois qu’un adulte s’intéressait à moi. Il m’encourageait et nous sommes devenus de très bons 24
Le concept « enfant à promesses » : une nouvelle façon de penser
amis. Avec son aide, j’ai remonté mes notes d’algèbre de 5/20 à 19/20. Parce que j’avais appris que je pouvais réussir, toute ma perspective a changé. À partir de là, je ne pense pas avoir obtenu moins de 18/20 dans aucune matière. Il est évident que j’ai eu pas mal de connaissances à rattraper, mais j’ai pu poursuivre mes études à l’université. En y repensant, j’estime que Dan n’a pas passé tellement de temps avec moi ; il a dû investir pour moi une cinquantaine d’heures, mais c’est cette relation qui a tout simplement donné une toute nouvelle direction à ma vie ». L’histoire de Larry n’est pas exceptionnelle. Des millions d’individus pourraient vous raconter leur propre histoire, démontrant toujours comment adversité et relation interagissent dans la vie des gens pour les propulser vers la réussite. L’expérience de Larry, comme celle de tant d’autres, illustre notre prémisse que derrière tout individu qui réussit vraiment, il y a une histoire « à promesses » : c’est-à-dire une histoire qui comprend de l’adversité et l’implication d’au moins un adulte bienveillant dans sa vie quand il était enfant.
Définition de la réussite En lisant cette histoire, peut-être vous êtes-vous dit que le professeur de Larry n’aurait pas eu le même impact sur vous. Vous pensez que vous n’êtes pas aussi intelligent que lui ; aucune leçon particulière, aucun encouragement n’aurait fait grimper votre moyenne à 18, tout au plus peut-être à 12 ; vous ne croyez pas que cette combinaison « adversité et relation » conduise nécessairement chacun à la réussite. Vous avez raison : certaines définitions de la réussite nous en excluent. Tout le monde ne peut pas avoir 18 ou 20/20. De même, chacun ne peut pas être riche, doué, beau, puissant ou célèbre. Mais qu’en est-il si nous donnons une autre définition à la réussite ? Existe-t-il une véritable réussite significative à la portée de chacun ?
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Enfants à risques, enfants à promesses
Le concept « à promesses » dépend de cette autre définition. La voici : réussir sa vie signifie « apporter une contribution positive au bien d’autrui ». Cette société comprend toutes les communautés dans lesquelles nous vivons : famille, voisinage, cité, état, nation et monde. Nous croyons que ce genre de réussite est le résultat d’un développement de qualités morales, c’est à dire du caractère qui résulte de l’interprétation positive de l’adversité dans le contexte d’une relation de confiance. La réussite de Larry ne réside pas dans ses bonnes notes ou dans ses exploits sportifs, mais dans le fait qu’il a fini par utiliser les leçons apprises au travers de son enfance douloureuse et de sa relation avec Dan Blackwell. Avec Dan, Larry n’apprenait pas seulement comment réussir sa scolarité. Il apprenait aussi que ses progrès étaient possibles parce que quelqu’un s’occupait de lui, confiant dans sa réussite ; ainsi a-t-il appris à s’occuper des autres. Par la suite, il a utilisé ses connaissances pour aider des familles à se sortir de l’endettement. À l’heure actuelle, il consacre ses ressources à apprendre à des gens à gérer leur argent avec sagesse, de manière à avoir plus de temps et de ressources pour l’essentiel – à savoir les relations et l’aide aux autres. Larry Burkett a-t-il réussi ? Nous le pensons, mais ce n’est pas parce qu’il est célèbre comme auteur et présentateur à la radio : Larry a réussi parce qu’il contribue au bien-être moral et social des autres, y compris de ceux qui écoutent ses émissions et s’instruisent avec ses livres. Ce genre de succès est à la portée de chaque enfant qui expérimente à la fois l’adversité et une relation empreinte de sagesse, de bienveillance et de confiance. Chaque enfant a en lui le potentiel, la promesse innée de connaître la réussite qui consiste à aider d’autres personnes. Certes, nous ne pouvons pas avoir l’assurance qu’un enfant choisira la réussite, mais nous avons l’espérance inextinguible que
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Le concept « enfant à promesses » : une nouvelle façon de penser
la « vraie » réussite – comme nous l’avons définie précédemment – est à la portée de chaque enfant confronté à l’adversité et avec lequel nous avons une relation authentique et bienveillante.
Votre histoire personnelle Chaque vie est marquée, d’une façon ou d’une autre, par la relation et l’adversité. Certains grandissent dans un milieu généreux, sain et encourageant ; d’autres ont eu une enfance privée de soutien et hérissée d’expériences difficiles, défavorables ou même de sévices. Beaucoup se situent quelque part entre les deux, ayant connu une bonne dose d’amour et de souffrances, dans des proportions variables, tout au long de leur vie. Quel que soit votre cas, ce sont les points de rencontre entre les défis et la relation positive avec quelqu’un qui s’est occupé de vous, qui servent de catalyseur au développement de votre caractère. Et c’est ce caractère qui est à la base d’une véritable réussite. Comme nous l’avons vu avec Larry, ceux qui ont grandi dans des conditions défavorables évoquent inévitablement comme clef de leur réussite la relation avec une personne qui s’est intéressée à eux. Quant à ceux qui ont reçu une bonne éducation et qui ont été bien soutenus dans leur enfance, ils indiquent l’entrée de l’adversité dans leur vie comme étant la clef de leur réussite. Nous vous mettons au défi de sonder votre propre vie pour voir si c’est vrai pour vous. Si votre enfance était plutôt caractérisée par une relation encourageante, nous pensons que c’est au moment où vous avez rencontré des difficultés et dû y faire face que vous avez grandi de façon significative. 27
Enfants à risques, enfants à promesses
Si votre enfance était plutôt caractérisée par la souffrance et l’adversité, nous supposons que le point décisif a été celui où, dans un moment particulièrement difficile, quelqu’un qui croyait en vous est entré dans votre vie et vous a donné de l’espoir. C’est le cas pour nous.
Un nouveau concept Dans notre société, nous croyons souvent que nous devons éviter l’adversité. Nous avons vu comment la souffrance peut détruire les enfants, et nous savons que le bouleversement familial et social est à la fois la source et le résultat de circonstances ou de choix qui font souffrir. Nous croyons donc à tort que toute souffrance est mauvaise et que si nous voulons que nos enfants réussissent, nous devons les mettre à l’abri de toute adversité. Parfois nous le décidons consciemment, d’autres fois, inconsciemment ; et bien que nous reconnaissions intellectuellement l’utilité de l’adversité, nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour éviter à nos enfants le mal-être provoqué par les épreuves. Nous essayons régulièrement de les protéger de deux manières : - Si nous sommes assez favorisés, nous les inondons de moyens matériels et nous pensons qu’en les comblant de biens et de facilités, ils seront gardés de toute souffrance. - Pour protéger les enfants défavorisés de l’adversité de ce monde, beaucoup de parents, d’enseignants, d’employés des services sociaux réclament plus de plans d’action et de moyens – mais pas nécessairement des moyens humains – , des personnes qui vont établir avec eux des relations de confiance. L’adversité nous fait peur ! Mais si nous nous laissons aller à une vision basée sur la peur, nous essayons de protéger nos enfants de la souffrance soit par des biens matériels, soit par une assistance. 28
Le concept « enfant à promesses » : une nouvelle façon de penser
La peur nous conduit à placer nos enfants dans un énorme système qui les enferme, un réseau complexe, comme si leur vie-même en dépendait. Nous craignons que nos enfants ne puissent pas survivre sans ces structures d’aide. Mais cette façon de penser est erronée : nos enfants n’ont pas besoin d’un système d’aide lourd et compliqué ; ils ont besoin de nous ! Pour entrer dans cette perspective « à promesses », nous devons changer radicalement notre réflexion et devons abandonner notre attitude basée sur la peur qui nous conduit à considérer les provisions matérielles et l’assistanat comme plus importants que les personnes. Nous devons développer avec les enfants une relation de confiance qui pourra les aider à interpréter l’adversité et l’utiliser comme matériau de construction pour leur réussite. Le paradigme « à promesses » suggère que tout comme Il utilise l’adversité et les relations pour nous façonner, Dieu exige aussi adversité et relations pour façonner la réussite d’un enfant. Et c’est exact ! Nous-mêmes et les enfants dont nous nous occupons, avons besoin de l’adversité et des relations pour développer tout notre potentiel.
La situation réelle Nos jeunes vivent dans un monde imparfait et plein de risques. Ils rencontreront un jour ou l’autre des gens et des circonstances qui pourront les induire en erreur, les décourager, les blesser, leur nuire, les effrayer, les irriter, les vaincre ou même faire d’eux des victimes, endommageant peut-être leur potentiel de réussite future. Quel que soit notre désir de le faire, il ne nous est pas possible – et ce ne serait pas sage – de les protéger de toute souffrance car l’adversité est nécessaire à la croissance d’un enfant.
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Enfants à risques, enfants à promesses
Le concept « à promesses » offre une profonde espérance D’une part, la pensée « à promesses » reconnaît le fait que tout enfant naît dans ce monde avec une nature défectueuse, imparfaite, une nature qui sera parfois attirée vers des pensées et des conduites malsaines. Toute personne ayant travaillé ou vécu avec des enfants sera d’accord avec le journaliste et auteur G.K.Chesterton qui affirme que « le péché originel est la seule doctrine chrétienne perceptible ». Chaque enfant est effectivement à risques et vit dans un monde à risques. D’autre part, le point de vue « à promesses » est fondé sur le dessein de Dieu pour notre vie et pour celle des enfants dont nous nous occupons ensemble avec Lui. « Car je connais, moi, les desseins que je forme à votre sujet, dit l’Eternel, desseins de paix et non de malheur, afin de vous donner un avenir fait d’espérance. » (cf. la Bible, Jérémie 29 v.11). Dieu a de bonnes choses en réserve pour Ses enfants, même s’ils doivent passer par des souffrances pour les atteindre. Si nous Lui faisons confiance pour qu’Il nous montre le chemin qui nous y mène, Dieu nous aide à mettre à profit toute adversité que nous traversons pour qu’elle serve à notre croissance personnelle et à la croissance communautaire. Comment ? Nous décidons d’abord de faire confiance à Dieu afin qu’Il utilise l’adversité que nous avons endurée pour forger notre caractère. Ensuite, sous Sa direction et avec Sa puissance, nous faisons de notre mieux pour aider des jeunes à faire de même. Il est certain que nous ne pourrons pas par notre propre force changer ni les circonstances ni leur conduite, mais Dieu le peut. (cf. la Bible, Romains 5 v. 3 à 5) : « … Bien plus, nous nous glorifions même dans les tribulations, sachant que la tribulation produit la persévérance, la persévérance la fidélité éprouvée, et la fidélité éprouvée l’espérance. Or, l’espérance ne trompe pas, parce que l’amour de Dieu est répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné ».
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Le concept « enfant à promesses » : une nouvelle façon de penser
Cela ne signifie pas que nous aimons la souffrance pour ellemême, mais cela veut dire qu’aussi terrible que soit la circonstance douloureuse à laquelle nous sommes exposés et quelle qu’en soit la durée, nous pouvons supporter la douleur et l’attente à cause de l’espérance et de la perspective de la réussite qui peut en découler. Ce concept est difficile à accepter sans une base de foi. Aucune masse de théories ou de recherches ne peut nous convaincre de persister dans un espoir sans réserve pour des enfants. Sans la foi, nous parvenons à un seuil de douleur et de désespérance au-delà duquel il est humainement impossible d’espérer. Arrivés à ce point, sans formule qui marche à tous les coups, nous laissons tomber les enfants dont nous nous occupons. L’attitude « à promesses » n’est pas seulement une formule magique qui marche ; heureusement, elle est plus que cela : c’est un ensemble de principes basés sur la foi et appliqués avec amour à l’enfant que nous accompagnons, étayés par la théorie et la recherche pédagogique et psychologique. Elle est fondée sur le fait que nous avons un Dieu qui nous aime, qui aime nos enfants, et qui désire absolument qu’ils réussissent. Par bonheur, ce n’est pas nous qui décidons de l’efficacité de notre accompagnement ; le champ d’action, les moyens et le contrôle de Dieu dépassent de loin les nôtres ; en fin de compte, c’est Lui qui agit avec nos enfants et son emploi du temps est différent du nôtre. Il comprend bien mieux que nous leur libre-arbitre. Et Il nous rassure absolument en nous disant que nous ne sommes pas les maîtres de la situation, mais que c’est Lui qui la contrôle. Malgré cela, Dieu nous invite à prendre notre part : nous avons à découvrir la promesse déposée au cœur de chaque enfant. Nous pouvons mettre en œuvre les principes que Dieu nous a enseignés pour aider les enfants dont nous nous occupons à choisir des conduites et des attitudes qui peuvent les mener à la réussite. Souvenez-vous, notre définition de la réussite n’inclut ni l’opulence financière ni une position sociale en vue. 31
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Bien plus, nous pouvons les aider à développer le caractère qui les poussera à contribuer positivement au tissu moral et social de la société. Nous décidons donc : - de reconnaître que nos enfants eux-mêmes sont potentiellement à risques en tant que personnes imparfaites dans un monde imparfait ; - de recentrer notre attention sur la promesse qui est en eux, laquelle les définit plus correctement qu’aucun risque potentiel ; - d’affirmer la perspective qui reconnaît la nature à risques des enfants et qui pourtant déclare que chaque enfant contient une promesse. Il est important de savoir que les risques et promesses des enfants ne sont pas dosés dans la même proportion. Parce que nous croyons que nos enfants sont destinés à ressembler à leur Créateur, nous faisons confiance à leurs degrés divers de capacité de penser, de décider, de discerner le bien et le mal, de se souvenir du passé, d’envisager l’avenir, et d’aimer. Parce qu’ils sont créatures de Dieu, ils ont la formidable capacité de développer un caractère semblable au Sien, qu’ils soient surdoués ou handicapés mentaux, athlètes ou paralysés, émotionnellement stables ou traumatisés. Ceci nous laisse espérer qu’ils seront capables de surmonter les difficultés et de grandir en les traversant. Dieu offre à tous les enfants l’aptitude de pouvoir s’élever audessus de l’adversité et de réussir, non seulement malgré elle, mais à cause d’elle. Dans la mesure où ils Lui sont réceptifs, Il agit en eux, utilisant toutes leurs expériences et relations passées, présentes et futures, 32
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spécialement celles qui sont douloureuses, dans le but de construire leur caractère et leur réussite. Nous savons que la promesse en eux est plus forte que tous les défis auxquels ils peuvent faire face. Quand nous nous concentrons sur la promesse dont chaque enfant est dépositaire et que nous lui montrons comment la développer, les dangers de son environnement potentiellement sources de souffrances peuvent devenir des agents de construction de son caractère. Selon les Dr Lawrence Calhoun et Richard Tedeschi, qui ont créé le terme de croissance post-traumatique et fait d’amples recherches sur ce sujet, une telle croissance « est mise en œuvre par un ensemble d’événements qui produisent de la détresse psychologique et qui peuvent aussi accroître les risques de nouvelles difficultés psychologiques… Le traumatisme conduit à une remise en question et une réévaluation de nombreuses hypothèses importantes tenues pour vraies auparavant ; nous voyons que dans les suites d’un traumatisme, la détresse et la croissance coexistent dans la personne ». Par conséquent, au lieu de nous attendre à ce que les enfants s’écroulent si on n’éloigne pas la souffrance, nous nous attendons à ce qu’ils rencontrent les difficultés de la vie, puis à les voir croître et réussir à cause d’elles. Pourquoi ? Parce que nous allons faire le voyage avec eux et leur montrer la voie.
Les neuf principes en interaction Pendant douze mois, nous avons interviewé beaucoup de gens pour tenter de développer pleinement des principes du paradigme « à promesses » dignes de confiance. Au cours de ces interviews, nous avons demandé à des individus aux histoires très variées d’identifier les facteurs clefs qui ont contribué à leur réussite. Certains sont des personnes très en vue ; d’autres sont des anonymes. Cependant tous correspondent à notre définition de la réussite. De ces entretiens ont émergé des thèmes récurrents, résumés ici dans les neuf principes « à promesses » qui sont à la base de ce livre. 33
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L’acrostiche AT-PROMISE peut aider les lecteurs à mémoriser ces principes clefs alors qu’ils apprennent à les mettre en pratique dans leurs relations avec des jeunes. Les deux premières lettres, A et T, représentent les deux grands principes de base : A : l’Adversité est un catalyseur pour la croissance du caractère d’un enfant ; elle est essentielle à sa réussite. T : Trusting relationship : une relation de confiance avec un adulte concerné aide l’enfant à interpréter l’adversité et à développer son caractère selon la promesse qu’il porte en lui. Ces deux éléments – adversité et relation de confiance – interagissent pour créer un environnement fertile essentiel à la croissance positive et au développement de l’enfant. Il est mieux équipé pour une croissance réussie et enrichissante lorsqu’il vit des épreuves difficiles dans le contexte d’une relation bienveillante avec un adulte qui s’occupe de lui. Les sept autres principes représentent les traits de caractère qui résultent de l’interaction, dans la vie d’un enfant, de l’adversité et d’une relation de confiance avec un adulte. Chacun de ces principes peut contribuer puissamment à sa capacité de réussite. Nous pouvons les mémoriser avec l’acrostiche suivant : P : La Persévérance nous rend capables de supporter l’adversité et d’entretenir l’espérance. R : Assumer la Responsabilité de nos actions nous garde de blâmer les autres et nous enseigne que nos choix ont des conséquences. O : L’Optimisme nous fait espérer des perspectives positives dans la souffrance. M : La Motivation que nous avons à partir de notre vraie identité nous pousse à vivre en tant qu’individus créés à l’image de Dieu, et non comme des gens étiquetés d’après leurs avantages ou leurs déficits. 34
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I : L’Intégrité nous sert de guide pour vivre honnêtement même si personne ne nous voit et même si notre vie est pénible. S : Le Service nous rend humbles en détournant notre attention de nous-mêmes vers les besoins d’autrui. E : L’Engagement dans la relation lors des loisirs favorise l’intimité, le repos, la guérison, et la joie. - Sans un adulte concerné, un enfant peut vite être dépassé, vaincu par l’adversité. - Sans adversité, une relation affectueuse peut gâter un enfant. - S’il ne développe pas les éléments du caractère dont il a la promesse, l’enfant n’a pas l’entraînement nécessaire pour réussir. - L’absence de l’un de ces principes – adversité, relation de confiance, caractère – peut retarder la maturation du potentiel d’un enfant.
Que pouvons-nous faire ? La mesure dans laquelle nos enfants développent ces traits de caractère dépend en grande partie de trois facteurs que nous pouvons contrôler : - Le temps qu’un adulte concerné passe à construire une relation de confiance avec l’enfant. - Le nombre de traits de caractère – énumérés dans la liste page précédente – que l’adulte lui-même peut offrir à l’enfant en s’investissant dans la relation. - La manière dont l’adulte interprète et explique l’adversité à l’enfant. Plus nous passons de temps avec un jeune, plus nous avons de temps pour créer avec lui une relation de confiance et exercer sur 35
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lui une influence positive et constructive. Plus nous cultivons notre propre caractère, plus nous pouvons être un modèle pour l’enfant et lui être de bon conseil. Nous n’avons cependant pas le contrôle de la réceptivité ni de la résistance de l’enfant, que ce soit vis-à-vis de l’adulte concerné ou de la vérité de Dieu. Cela dépasse notre entendement, Dieu laisse chacun de nous libre de Lui faire confiance et d’apprendre de Lui, ou bien de se méfier de Lui et de refuser de Le laisser l’instruire. Nous ne maîtrisons pas non plus le temps de Dieu. Certaines « pâtes » de vérité que nous enfournons dans un jeune cœur peuvent mettre vingt ans ou plus pour finir de cuire ! Ce n’est pas parce que nous ne voyons pas de résultats positifs du temps investi dans des enfants que la pâte ne cuit pas. Il faut peut-être des années de chaleur produite par l’adversité pour terminer la cuisson. C’est passionnant d’aider des enfants à croître. C’est aussi douloureux. Nous connaissons autant la joie que la souffrance en vivant, en travaillant, en jouant et en patientant aux côtés des jeunes dans nos familles, nos écoles ou institutions. L’adversité fait partie de la vie de nos enfants. À l’instant même où nous rédigeons ces lignes, nous souffrons à cause de nos enfants, avec eux et pour eux. Cette souffrance fait partie de la croissance, la nôtre et la leur, tandis que nous aidons nos enfants à grimper vers l’accomplissement de l’incroyable promesse inscrite en eux…
Un appel à l’action La perspective « à promesses » est une approche pratique, digne de confiance et pleine d’espérance en vue de l’accomplissement de la promesse déposée dans les profondeurs de la personnalité des enfants. Cette façon de voir s’applique à tous les enfants, scolarisés à domicile, ou inscrits dans des écoles, petites ou grandes, privées ou publiques, de la maternelle à l’université, ou à ceux qui ont terminé leurs études. 36
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C’est un appel à l’action et une vaccination tant contre l’impuissance que contre une épidémie de pessimisme qui se répand parmi la jeunesse et que le Dr Martin Seligmann identifie dans son livre « l’enfant optimiste ». Cet appel demande à chaque adulte concerné de s’impliquer et de s’investir délibérément dans la vie d’un enfant. Si nous nous demandons quels sont les dangers auxquels nos enfants font face, commençons par considérer les multiples risques auxquels ils sont confrontés.
Souvenez-vous - Derrière chaque individu qui réussit vraiment, il y a une histoire « à promesses » : une histoire faite d’épreuves, d’adversité, et de la rencontre d’au moins un adulte concerné qui s’engage dans la vie de l’enfant ; - À partir de là, réussir signifie contribuer positivement au tissu moral et social de la société ; - Quand nous nous concentrons sur la promesse inscrite dans le cœur d’un enfant et que nous lui montrons comment la développer, les dangers venant de son environnement, potentiellement sources de souffrances, peuvent devenir des agents de construction de son caractère.
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Enfants à risques, enfants à promesses Vous êtes futur parent, parent, grand-parent, éducateur, enseignant... ? Vous vous interrogez sur l’avenir des enfants dans notre monde incertain et bousculé ? Cet ouvrage vous propose de porter un regard neuf et positif sur la question : au lieu de voir l’avenir des enfants conditionné par les déterminismes sociaux et familiaux, au lieu de les marquer d’une étiquette, vous êtes invités par les auteurs à discerner les promesses qu’ils portent en eux et à leur permettre de les concrétiser. Selon Timothée S. Stuart et Cheryl Bostrom, Dieu a déposé en chacun(e) d’entre eux une promesse qui ne peut éclore que s’ils sont confrontés à des difficultés, à une adversité, qu’un adulte bienveillant – parent ou tiers – les aidera à surmonter. Et si vous étiez vous-même l’adulte qui aidera l’un(e) d’entre eux à faire éclore ces promesses ? Préfaces de Jean-Marie Petitclerc et Dany Hameau.
Éducation
11,90 € TTC ISBN : 978-2-7222-0231-3
Réf. : CLCE150 www.clcfrance.com