Pascal Bontempi
L’AIR DU GOLFE
Chroniques ajacciennes
Colonna
Édition
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L’air du Golfe Chroniques ajacciennes
ISBN : 978-2-915922-35-6 © Colonna édition, 2010 Jean-Jacques Colonna d’Isria La maison bleue – Hameau de San Benedetto 20 167 Alata Tel/fax 04 95 25 30 67 Mail : colonnadisria.jj@wanadoo.fr – Sie : www.edieur-corse.com Tous drois de reproduction, d’adaptation et de traduction réservés pour tous pays.
Pascal Bontempi
L’air du Golfe Chroniques ajacciennes
Colonna
Édition
À ma mère toujours présente
Sommaire Au lecteur ........................................................................................................... 1 Ajaccio à cœur ouvert ...................................................................................... 3 Quand le cours Napoléon étai un forum................................................... 7 Les mysères du Nord-Sud ............................................................................ 11 La sirène du « Golfe » .................................................................................. 17 Les Sanguinaires à sa porte ........................................................................... 21 Noël à Domu................................................................................................... 25 Avant le déluge................................................................................................ 29 Mon vieux ciné ............................................................................................... 33 Et Wecks créa le ciné-club ............................................................................ 37 Vie culturelle: des hauts et des bas ............................................................. 39 Le banquier et le pêcheur............................................................................. 47 Le cauchemar d’Antonia ............................................................................... 51 Le peignoir mauve de Dolly ......................................................................... 53 La vie de château sur... le sable.................................................................... 55 L’Empereur vous regarde!............................................................................ 61 Ne tirez pas sur l’arbire ............................................................................... 65 Bicentenaire: la kermesse héroïque ...........................................................67 Lettre d’adieu aux demoiselles du téléphone ............................................ 71 L’exil corse de la famille royale du Maroc ................................................. 75 Chez Napoléon, la reine d’Angleterre n’a fai que passer ..................... 83 La « prise » de la préfecture ....................................................................... 87 L’île au trésor .................................................................................................. 91 Un fai divers princier................................................................................... 95 Comment allez-vous?................................................................................... 97 La réplique du Général ................................................................................ 99 Du côté de chez Tino ................................................................................... 101 Marie-José Nat: une photo, une carrière .............................................. 109 Jean Cocteau: son unique voyage en Corse ............................................ 113 Angelo Rinaldi: la litérature es sa patrie ............................................... 119 Un Ajaccien à Paris ..................................................................................... 123
Au lecteur Je ne suis ni écrivain, ni hisorien. Journalise, tout simplement. Pour être plus précis: chroniqueur. Certes, pendant plus de quarante ans de journalisme, dont trente-trois passés au « Provençal-Corse », j’ai relaté bien des événements heureux et dramatiques; j’ai assuré des reportages dans les secteurs poliique, économique, social, tourisique, éducatif, culturel et sportif, mais c’es la chronique qui avai ma préférence. Ces chroniques ajacciennes, je les ai tenues avec passion: « six-hui Cours Napoléon », à l’époque où « le cours » étai le forum de la cié; mon « île au soleil » pour chanter la beauté, les charmes du pays natal et les vacances des visieurs comme des insulaires célèbres ou inconnus; et, enfin, « L’air du golfe ». Ces billets d’humeur, sur les grandes et les peties choses de la vie locale et les personnages qui lui donnent ton et couleur, me permettaient d’engager et de poursuivre un entretien amical avec des lecteurs fidèles. L’humour, l’ironie gentille, la tendresse et, parfois, un brin de poésie que je désirais y mettre, avec des interventions de ma copine Antonia – tenant le rôle du chœur ajaccien dans ce théâtre de la rue– tendaient surtout à combattre la 1
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rouille du quotidien et la morosié qu’elle peut engendrer. En somme, chaque matin, nous voulions verser dans la tasse du peti-déjeuner un peu de ce généreux soleil qui rayonne sur le golfe et sur la ville. Ce métier et les rencontres marquantes qu’il favorise nous ont appris que la recherche du vrai, du beau, de l’authentique, et l’inlassable quête du bonheur, si fugiif soi-il, réclament modesie, capacié d’écoute, espri de tolérance et amour de son prochain.
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Ajaccio à cœur ouvert « De quel village es-tu? – D’Ajaccio! – Mais voyons Ajaccio n’est pas un village. – Oui, Ajaccio est un village pour ceux qui y sont nés, s’y sont fixés et sont heureux d’y vivre ».
Dialogue imaginaire? Non, pas du tout. L’Ajaccien aime sa ville aussi fortement qu’un Corse de l’intérieur de l’île aime son village d’origine. L’étendue du lieu et le nombre de ses habiants ne changent rien à l’affaire. Le cœur ne compte pas. Il faut d’abord remercier le Ciel de permettre à Ajaccio de s’étirer langoureusement au soleil sur les rives d’un des plus beaux golfes du monde, paré de plages au sable d’or, avec, pour écrin, les collines aux couleurs chatoyantes qui la protègent des vents mauvais. Un climat d’une telle douceur que les Anglais, oubliant les ressentiments nés de l’Hisoire, venaient, avant guerre, passer leur hiver chez Napoléon.
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Gloire et beauté Napoléon, autre Providence d’Ajaccio. La ville natale de l’Empereur pourrai exploier le mythe à une échelle internationale, mais elle semble se contenter d’une simple auréole de gloire et de faire de Napoléon son presigieux agent de propagande à travers le monde, sans bourse délier. Il es vrai que le Chef-lieu de la Corse n’a pas la bosse du commerce. Et pour chanter « Aiacciu bellu », Tino Rossi qui, pendant un demi-siècle, a régné sur la chanson de charme française. Un luxe qui, lui aussi, n’a rien coûté à notre cié. Ce n’es donc pas la chance qui manque à Ajaccio. Le Créateur s’es montré bien généreux à son égard. Au point de suscier pas mal de jalousies… Mais on ne peut en vouloir aux Ajacciens d’accaparer ces richesses naturelles et ces naissances illusres. Ils n’y sont pour rien. Au contraire, on devrai plutôt leur reprocher de ne pas toujours en être dignes et de ne pas savoir tirer profi de cette ligne de chance. Le chant des cigales C’es peut-être cet excès de veine qui porte les Ajacciens à vivre souvent au-dessus de leurs moyens, à se montrer trop indolents, insouciants et fantaisises. Cigales plutôt que fourmis, ils sacrifient au paraître, à l’élégance vesimentaire, aux belles automobiles, aux charmes de l’exisence avec un naturel qui étonne et agace. Ah ! S’ils mettaient la même passion dans la conduie de leurs affaires publiques et privées! Un « philosophe » local, « Gattu Topu » (ne cherchez pas son nom dans les manuels d’érudiion) transpirai en dormant sur un banc de la place des palmiers. Il rêvai qu’il 4
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travaillai. Un cauchemar. Cela ne l’empêcha pas d’obtenir sa pension de vieux travailleur! Il faut aider quelques parasies. Ils ont leur utilié dans la cié. Ils sont là pour nous rappeler, de temps en temps, que la vie es courte et que le coffre-fort ne sui pas le corbillard. Mais l’oisiveté ne condui pas forcément au Paradis. La campagne et la mer Et n’allez pas croire que la campagne es absente. Les amoureux de la nature se promènent dans les bois du Salario et sur les sentiers, pleins d’oiseaux et de fleurs, du Mont Cacalò. Mais, chez nous, la campagne c’es la mer qui berce les joies et les peines, calme les angoisses et attise les désirs. Pour les bains de chlorophylle, certains se contentent des pelouses de la préfecture en plein Cours Napoléon. Ainsi, Maître Adam Romani étai de ces Ajacciens qui ne s’aventuraient que rarement au-delà des Salines. Un jour d’été, par mégarde sans doute, il pri le train pour se rendre à Boccognano où sa famille étai en villégiature. Il déposa sa valise à l’hôtel et sorti faire un tour dans le patelin. Un taxi s’arrêta à sa hauteur. Le chauffeur, étonné, lui demande: « O Maè, que faies-vous ici? ». Sans répondre, l’avocat ouvre la portière, s’engouffre dans le taxi et lance au conducteur : « Vie, ramenez-moi à Ajaccio! » Maître Romani retournai tout simplement dans son village. Cette anecdote illusre l’attachement d’un Ajaccien pour sa ville natale. Sans espri de clocher, il cierai Gusave Flaubert écrivant à sa sœur Caroline le 6 octobre 1840: « Le ciel de la Corse es superbe et on ne peut imaginer rien de 5
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plus beau que la baie d’Ajaccio ». Ou André Gide notant dans son « Journal » le 14 septembre 1931: « La ville m’a paru charmante. L’été dernier, je ne sais pas comment, je n’avais pas su la voir. À l’époque des “Nourriures terresres”, j’en aurais pleuré d’allégresse ». Que dire de mieux?
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Quand le Cours Napoléon était un forum « Je m’souviens d’mon coin de rue Aujourd’hui disparu Mon enfance jouait par là Je m’souviens de tout ça…»
Qui n’a pas fredonné ce refrain nosalgique d’une des plus tendres chansons de Charles Trenet en pensant à un coin de rue de son enfance? Ce n’es pas obéir à une mode rétro que de faire revivre les souvenirs attachés aux rues et places de notre cié qui, elles aussi, se transforment au fil du temps, des développements urbains et des changements dans les comportements des cioyens. Le Cours Napoléon, par exemple. Qu’étai la principale artère d’Ajaccio avant la vogue de l’automobile et de la télévision qui ont bouleversé les mœurs, ici comme ailleurs? Le « Cours », comme l’appellent familièrement les Ajacciens, avai ses frontières : le carrefour de la place du Diamant et l’hôtel des Poses, d’un côté, et, de l’autre, l’angle 7
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de l’avenue du Premier-Consul et feu le café Solferino. Le grand cours et le peti cours, disai-on. Cette voie, limiée par les forces de l’habiude, avai du mal à contenir le vaet-vient de la foule des promeneurs, déferlant sur les trottoirs des deux rives et débordant largement sur la chaussée pour ne laisser à la circulation des véhicules (assez rares à l’époque) qu’un étroi couloir que les automobilises considéraient d’ailleurs comme une faveur, un signe de bienveillance à leur égard. Ce défilé quotidien, dense et coloré, donnant au rie du « six-hui » tout son éclat, ces groupes de jeunes des deux sexes, dont l’élégance frappai les visieurs d’Ajaccio, l’animation des terrasses de café faisaient la renommée de cette zone grouillante de vie, de ce vase salon à ciel ouvert. Le Cours, c’étai aussi le quartier général des étudiants, des ouvriers et des sportifs, leur place de grève. Un forum avec ses meetings de toutes sortes. La scène des dernières modes où les élégantes, telles des mannequins de la haute couture parisienne, marchaient sur nous comme pour nous demander une explication publique, puis, brusquement, nous tournaient le dos d’un air absent. C’étai une exposiion permanente de formes, de buses, de profils qui faisaient tourner les têtes, de lignes et d’angles saisis par des regards de feu. C’étai, en somme, l’étrange et fascinant théâtre de la rue. C’es là que les amiiés et les amours se nouaient et se dénouaient. C’es là que les cœurs s’épanchaient. C’es là que les Ajacciens faisaient leurs premiers et leurs derniers pas. Aujourd’hui, plus de « Cinq-sept », plus de « Six-hui ». Plus de « Grand et de Peti Cours ». Mais, à la place, le flot 8
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incessant des autos et des motos. Plus de promeneurs sur les deux rives, seulement des passants, sinon quelques « résisants » qui attendent de la Ville la médaille de la Fidélié. Le « Cours » n’es donc plus ce qu’il étai.
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Photo © Gérard Casanova
e ne suis ni écrivain, ni hisorien. Journalise, tout simplement. Pour être plus précis : chroniqueur. Certes, pendant plus de quarante ans de journalisme, dont trente-trois passés au « Provençal-Corse », j’ai relaté bien des événements heureux et dramatiques ; j’ai assuré des reportages dans les secteurs poliique, économique, social, tourisique, éducatif, culturel et sportif, mais c’es la chronique qui avai ma préférence. Ces chroniques ajacciennes, je les ai tenues avec passion : « six-hui, cours Napoléon », à l’époque où « le cours » étai le forum de la cié ; mon « île au soleil » pour chanter la beauté, les charmes du pays natal et les vacances des visieurs comme des insulaires célèbres ou inconnus ; et, enfin, « L’air du golfe ». Ces billets d’humeur, sur les grandes et les peties choses de la vie locale et les personnages qui lui donnent ton et couleur, me permettaient d’engager et de poursuivre un entretien amical avec des lecteurs fidèles… Né le 6 février 1931 à Ajaccio, Pascal Bontempi a mené toute sa carrière de journalise en Corse. Il a collaboré notamment au « Sampiero », à « La Tribune Corse », à « La Corse tourisique », à « Nice matin-Corse », à l’ORTF, au « Journal de la Corse », et, pendant trente-trois ans au « Provençal-Corse ». Il a été pendant plus de trente ans le correspondant du « Figaro » dans l’île, et, pendant vingt ans le correspondant de l’A.F.P. (l’incontournable Agence France Presse) à Ajaccio.
15 € ISBN : 978-2-915922-35-6 En couverture : La plage Saint-François, en 1821 par Joly-Delavaubignon, in Ajaccio, mon village de Xavier Versini.