Histoire du lazatet d'Aspretto, d'une quarantaine à l'autre

Page 1

Histoire

Beate Kiehn

du lazaret d’une quarantaine à l’autre

Colonna

d’Aspretto

à Ajaccio

Édition

Association le Lazaret Ollandini


Cet ouvrage est disponible Ă la vente sur le site du lazaret Olllandini www.lazaretollandini.com


Histoire du lazaret d’Aspretto à Ajaccio d’une quarantaine à l’autre



Beate Kiehn

Histoire du lazaret d’Aspretto à Ajaccio d’une quarantaine à l’autre

Colonna édition/Association le lazaret Ollandini


Avertissement au lecteur Nous avons délibérément choisi la graphie moderne : « Aspretto », et non pas « Aspreto », comme il est parfois écrit dans divers documents aux XVIIIe et XIXe siècles, voir encore aujourd’hui. Nous avons volontairement respecté l’orthographe originale de toutes les citations, et laissé les fautes de français, d’orthographe ou de graphie.

Du même auteur : « Jean Ollandini, pionnier du tourisme corse » Musée de la Corse/Colonna. édition - 2006. « Quelques voyageurs germanophones de la fin du XVIIIe au XIXe siècle en Corse », in « La Corse et le tourisme » Musée de la Corse - 2006.


ร Franรงois Ollandini



LORSQUE, AU SEUIL D’UN MILLÉNAIRE, Marie-Jeanne et moi nous nous installâmes au lazaret, j’en savais bien peu sur son histoire : quelques dates, quelques événements comme le décès de la petit Felicita, enterrée dans le petit cimetière... Sinon, comme tout Ajaccien, je savais qu’il avait été construit à la demande des pêcheurs de corail ajacciens, qu’il avait peu servi, mais aussi, et pour cause, qu’il était ruiné depuis des années… des lieux communs en somme. Mais la beauté du lieu retenait déjà toute mon attention, et suffisait à mon bonheur. Curieux par nature, j’ai voulu en savoir plus et j’ai demandé à Beate Kiehn – qui venait de terminer un livre sur mon père, Jean – de faire des recherches pour retracer l’histoire de ce bâtiment à la vocation si mystérieuse pour beaucoup d’entre nous… un lazaret ! Qu’est-ce à dire ? Deux années à peine sont passées que Beate, ethnologue de formation, me remet le fruit de ses recherches dans les bibliothèques et les archives de Corse, mais aussi de Toulon, de Paris et de Marseille. Elle a su suivre le fil d’Ariane pour reconstituer la vie tourmentée du lazaret d’Aspretto, depuis sa création au milieu du XIXe

siècle, jusqu’à nos jours, allant jusqu’à y inclure la toute

récente partie de cette vie cent cinquantenaire, celle qui touche aux réalisations que j’ai souhaité faire au lazaret ! Ainsi, grâce à ce travail, le lazaret a son histoire au même titre que d’autres monuments dits historiques. Le lazaret n’est-il pas d’ailleurs inscrit à l’Inventaire des Monuments historiques, depuis 1977 ? Sans doute, le lazaret valait-il, lui aussi, son histoire, que voici… François Ollandini



PESTE… CHOLÉRA… FIÈVRE JAUNE… l’histoire des hommes est rythmée par les épidémies qui ont ravagé les populations tout au long des siècles, en Orient comme en Occident, et jusqu’au milieu du XXe

siècle, malgré la connaissance que peuvent avoir eue médecins

et savants de ces fléaux millénaires. Comment les a-t-on combattus au cours des siècles, mais surtout comment s’en est-t-on préservé ou prémuni dans le monde, en France et en Corse en particulier, tel sera notre propos à travers l’aventure – de sa construction au milieu du XIXe siècle à sa reconstruction à la fin du XXe –

du lazaret d’Aspretto…

appelé aujourd’hui « lazaret Ollandini ». Pour comprendre la présence d’un lazaret à Ajaccio, il faut revenir au passé des hommes en général, et bien sûr à celui de nos ancêtres en Corse, qui n’ont pas échappé aux terribles ravages des pandémies. Comment notre île aurait-elle pu y échapper, elle qui était régulièrement et systématiquement abordée par les envahisseurs venus de toute part ? Au Moyen-Âge, ces épidémies ont conduit les hommes à s’interroger sur l’origine du mal, mais aussi les médecins et les savants à trouver les moyens de les contrôler, sinon de les prévenir, de les contenir sinon de les éradiquer, de les repousser aussi quand ils le pouvaient. La première de ces découvertes fut sans doute l’invention de la « quarantaine », voila pour la notion de « temps », de durée, puis très vite on comprit qu’il fallait isoler encore plus ceux que l’on avait déjà isolés, et l’on inventa les lazarets, voila pour la notion d’« espace », de séparation. Nous verrons ensuite comment ces notions ont été mises en pratique en Corse, à Ajaccio en particulier, puisque, nous le verrons aussi, seul, véritablement, le lazaret d’Aspretto a rempli ces fonctions. Mais revenons d’abord à la quarantaine et aux lazarets…



CHAPITRE I

naissance difficile I – Quarantaines et lazarets 1 – L’origine de la quarantaine En 1347, après une absence de six siècles, la peste réapparaît en Europe comme un incendie dévastateur. Son passage fut si terrible qu’elle s’inscrit dans la mémoire collective sous le triste nom de « peste noire » ou « la mort noire ». Pourtant, de nombreuses épidémies de ce type suivront, causant à chaque passage une hémorragie démographique, comme la peste de Marseille en 1720. Mais la peste noire fut la plus sinistre. Venue d’Asie, elle tua près de vingt-cinq millions de personnes, soit un tiers de la population européenne.

Ce fléau eut des conséquences durables sur le plan socio-économique. Jusqu’au XIVe siècle, la peste était considérée comme une punition envoyée par Dieu aux hommes pécheurs, et que l’on combattait par les prières et la fuite physique. Les médecins étaient impuissants face à cette maladie dont ils furent autant victimes que leurs patients. Or, durant la « peste noire », il devint de plus en plus évident que le fléau se trans1. Substance ou matière vivante par laquelle se fait la contagion.

mettait par contage 1 et qu’il y avait un lien entre le

1


déplacement des personnes et le développement de l’épidémie.

des représentants officiels, chargés de sur-

Les autorités tentèrent alors d’y faire face et les premières dis-

veiller les frontières, l’état sanitaire des

positions collectives furent mises en place localement : on

lieux d’isolement et de la cargaison des

interdisait l’entrée des pestiférés ou des suspects dans la ville,

navires. En 1397, l’ancien couvent de l’île

on repoussait les bateaux venant du Levant 2, on séquestrait

de Mljet fut transformé en lazaret de qua-

les malades ou on les expulsait de l’agglomération pour qu’ils

rantaine. Ce fut probablement le premier

meurent… ou guérissent plus loin, dans la campagne.

lazaret au monde.

Quelques villes, non portuaires, fermèrent énergiquement leurs portes à tous les étrangers. Toutes ces mesures tempo-

L’origine du mot vient de Venise où le pre-

raires étaient prises pour enrayer la pandémie, c’est-à-dire

mier établissement sanitaire d’isolement

pour arrêter sa progression, mais non pour la prévenir.

fut nommé « le lazaret » (en italien « lazzaretto », en vénitien « lazareto »). En

Ce fut à Raguse (l’actuelle Dubrovnik) que naquit l’idée de la pré-

vénitien, il existe également la forme alter-

vention. Du fait de sa position géographique et de ses liens

native « nazareto ». Certains présument

commerciaux avec l’Asie Mineure - l’Afrique et le Levant - la

alors qu’il s’agit d’une déformation de l’îlot

ville était particulièrement et régulièrement exposée et éprouvée

« Santa Maria di Nazaret », site où le laza-

par des épidémies successives. La peste y sévit en 1357-58, en

ret fut construit. D’autres font plutôt

1361, en 1363 et, à plusieurs reprises, entre 1371 et 1374. 3 Consi-

allusion à la Bible : Lazare, ce pauvre cou-

dérant qu’une interruption du trafic maritime prolongée serait

vert d’ulcères assis à la porte du mauvais

trop nuisible au commerce et à la ville, le Grand Conseil de

riche et guéri par Jésus. En italien ancien

Dubrovnik instaura un système de protection qui freina le com-

« lazzaro » signifie aussi « ladre, lépreux »

merce sans l’interrompre complètement. Il décida, en 1377, que

et on pourrait également faire un rappro-

les indigènes et les étrangers qui avaient séjourné dans des

chement entre la lèpre et la peste : les deux

régions « épidémiques », auraient accès à la ville et à ses alen-

maladies se caractérisent par des érup-

tours après avoir passé un mois à l’île de Mrkan (pour les navires)

tions cutanées sur la peau, faisant penser

ou dans la localité de Cavtat 4 (pour le trafic routier) afin d’y subir

à celles de Lazare.

une « purification ». Tout contact avec la population locale était strictement interdit et ceux qui ne respectaient pas cette ordonnance étaient isolés durant un mois, et, de plus, condamnés à une forte amende. Les personnes isolées logeaient dans des baraques sommaires. Peu après, Venise suivit ce modèle, en fixant l’isolement à quarante jours. La quarantaine était née.

Malgré ces dispositions, Dubrovnik fut à nouveau victime de l’épidémie. Les mesures furent alors renforcées. On désigna

2

2. Pays situés sur la côte orientale de la Méditerranée. 3. Grmek, Mirko D. Les débuts de la quarantaine maritime. In Buchet, Christian. L’homme, la santé et la mer. Paris : Honoré Champion Éditeur, 1997, p. 39-59. 4. Cavtat est située sur une presqu’île à 18 km au sud de Dubrovnik.


Ce système de protection fut progressivement adopté par d’autres villes portuaires, avec la création d’une administration de santé particulière et permanente, avec une réglementation et par l’édification de bâtiments spécialisés. Des lazarets furent construits à Venise (1423), à Gênes (1467), à Marseille (1526), à Livourne (1595) à Toulon (1657), à Nice (1669). Jusqu’au XIXe siècle on continua à construire, agran-

dir et améliorer ces installations sanitaires,

VUE CAVALIÈRE RELATIVE À UN PROJET DE LAZARET

car la présence d’un lazaret, dans un port, devenait indispensable pour les échanges

Outre les mesures sanitaires, n’oublions pas le rôle très pré-

commerciaux avec le Levant et la Barba-

gnant de la religion lorsque se manifestait la peste : dès la plus

rie 5. Si, au départ, la réglementation et la

haute Antiquité, le mythe grec attribue aux flèches d’Apollon la

gestion restaient locales, elles furent à par-

souillure apportée à Thèbes par le héros Œdipe ; dans l’Eu-

siècle, ajustées et soumises à

rope chrétienne, la peste, châtiment divin, est censée appeler

l’autorité suprême des pays. En France,

les hommes à se repentir : lorsqu’elle frappe Rome, au VIe siè-

seules les villes de Marseille et de Toulon

cle, le pape Grégoire 1er ordonna une procession solennelle

avaient le droit de donner accès aux

pour invoquer la Vierge. La Madone restera, au cours des siè-

navires venant directement des pays

cles, « l’avocate » principale auprès de Dieu. De nombreux

musulmans. 6 C’est ainsi que peu à peu

saints lui prêtèrent main-forte ensuite comme Saint Sébastien

s’est structurée une sérieuse administra-

– qui subit le supplice des flèches ordonné par Dioclétien – et

tion sanitaire de défense épidémiologique

Saint Roch qui au XIVe siècle guérit les pestiférés. À ces inter-

à travers le monde et qui perdure encore

cesseurs importants s’ajoutèrent des saints thaumaturges

au XXe siècle.

locaux. Au XVe siècle, les processions des « flagellants » exhor-

tir du

XVIIe

taient les populations à la repentance. Ces pratiques d’exorcisme collectif prirent aussi la forme de terrifiants troubles sociaux : la panique générale désignait aisément comme boucs émissaires, les étrangers et les communautés « différentes » : on pourchassa et on massacra les mendiants, les transporteurs de marchandises suspectes, les 5. Nom donné jadis à l’Afrique du Nord. 6. En 1622, Marseille et Toulon pour les navires venant des pays musulmans, et en 1669, Marseille exclusivement pour les navires venant du Levant.

« gens du voyage », les juifs considérés comme des « empoisonneurs » de puits ou d’onguents ; ils furent exterminés par milliers en France, en Allemagne et en Russie…

3


Saint Roch « Né et mort à Montpellier (Hérault) dans la première partie du XIVe siècle. Vers l’âge de vingt ans, ayant perdu ses parents, Roch partit pour Rome en pèlerinage. Il avait auparavant fait deux parts de ses biens, distribuant l’une aux pauvres, confiant l’autre à la garde de son oncle. Il […] s’arrêtait là où quelque épidémie sévissait, y soignant les malades et souvent les guérissant par le signe de la croix. Il séjourna de longues années dans la Ville éternelle, puis décida de revenir en France liquider le reste de sa fortune. En cours de route il fut atteint de la peste et se réfugia, non loin de Plaisance, dans une forêt, pour ne contaminer personne. Il y serait mort de faim sans un bon chien qui venait, chaque matin, lui apporter un pain dérobé à la table de son maître. Celui-ci, intrigué par cette bête qui volait avec tant de régularité, la suivit dans la forêt ; il y trouva le malade, devint son ami et apprit de lui à améliorer sa conduite. « C’est saint Roch et son chien », dit-on de deux personnes qu’on voit toujours ensemble. Cela vient de ce que les peintres qui ont représenté saint Roch – Rubens, le Tintoret, Annibal Carrache, Louis David et les autres – n’ont jamais manqué de mettre ce bon chien, son ami, dans leurs tableaux. Montpellier était en proie à la guerre civile, quand Roch y arriva. Pris pour un insurgé, il fut conduit au gouverneur, qui était précisément son oncle. Ni lui ni personne ne le reconnurent tant ses pénitences l’avaient changé ; et Roch se tut, comme le Sauveur avait fait dans sa passion. Il fut jeté en prison ; on l’y oublia ; et il y mourut de misère au bout de cinq ans. Ce fut, dit-on, sa grand-mère qui l’identifia après sa mort, à la vue d’une tache de vin, en forme de croix, qu’il portait depuis sa naissance sur la poitrine. » Englebert, Omer. La fleur des Saints. Paris : Albin Michel, 1998, p. 267

2 – l’organisation de la quarantaine Mais revenons d’abord à la quarantaine elle-même. Aujourd’hui, on a tendance à considérer les quarantenaires, à tort bien sûr, comme des malades, alors qu’ils sont simplement « mis à l’écart » par prévention. La quarantaine était une mesure sanitaire dans l’intérêt de la santé publique, c’est-à-dire pour préserver la population locale d’une épidémie éventuelle. Elle fut appliquée d’abord contre la peste, plus tard contre le choléra puis contre la fièvre jaune. Le lazaret était uniquement réservé aux gens qui voyageaient, et ce n’était pas leur état qui déterminait leur internement mais le lieu d’où ils venaient. Tout individu, bien portant ou malade, qui arrivait d’un pays où régnait une épidémie, était automatiquement soumis à la quarantaine. Si une maladie contagieuse se déclarait durant le séjour au lazaret, la personne atteinte y restait internée jusqu’à son entière guérison. Notons au passage, qu’à l’époque, on tenait déjà compte de deux faits : la transmission de la peste et l’incubation, car un individu apparemment en bonne santé pouvait être porteur de la maladie.

À Dubrovnik, la quarantaine était appliquée pendant un mois. Venise exigea un prolongement à quarante jours ; cette règle fut généralisée par la suite. Mais pourquoi REPRÉSENTATION DE FÊTE PATRONALE LE

4

SAINT-ROCH,

16 AOÛT

quarante jours ? Les explications possibles


sont multiples. La période de l’incubation

D’ailleurs, la durée réelle de la quarantaine variait dans les diffé-

de la peste ne dure que 6 jours. Il est donc

rents ports où l’on n’isolait pas seulement les personnes, mais

peu probable, même si la durée exacte

aussi, la marchandise et le navire. Quant à la cargaison (la mar-

n’était pas connue à l’époque, que le choix

chandise), on en distinguait deux : la marchandise « susceptible »

de quarante jours soit le résultat d’une

(tous les textiles, fourrures et poils) et la marchandise « non sus-

observation empirique. Reste à chercher

ceptible » (les denrées alimentaires, les métaux, les plantes

l’origine dans le domaine mystico-religieux

tinctoriales). La première était considérée comme la plus dange-

ou dans des anciennes théories médicales.

reuse car capable d’abriter des germes contagieux plus longtemps

Dans la Bible, référence obligée du monde

que le bâtiment et les individus. Par exemple, à la fin du XVIIIe siè-

médiéval, les quarante jours symbolisent

cle, un bateau qui arrivait à Gênes venant d’un port où régnait la

une période de purification. Ce délai de

peste, était soumis à la quarantaine durant 35 jours pour les per-

temps est attribué au séjour de Moïse sur le

sonnes à bord, 36 jours pour le navire et 50 jours pour la

mont Sinaï, au jeûne du Christ dans le

marchandise. 8

désert et au Carême avant la fête de

BATEAU À VAPEUR, VERS 1930

Pâques. Les médecins médiévaux pensaient que le quarantième jour aurait été la limite entre les maladies aiguës et les maladies chroniques et qu’une fièvre qui durait plus longtemps que quarante jours ne pouvait plus être pestilente ; ils croyaient aussi qu’une femme en couches courait pendant quarante jours le risque d’une fièvre puerpérale. D’autre part, pour les alchimistes, les cycles de quarante jours avaient une importance particulière (les « mois philoso-

Quelle que soit son origine et sa durée, la quarantaine était tou-

phiques ») durant lesquels se produisaient

jours trop longue pour une personne en bonne santé : deux

certaines transmutations.

7

semaines auraient été suffisantes. Pourtant elle resta maintenue durant des siècles et ce ne fut qu’au XIXe siècle qu’elle fut remise

7. Grmek, Mirko D. 1997, p. 42. 8. Panzac, Daniel. Quarantaines et lazarets. Aix-en-Provence : Edisud, 1986, p. 46. 9. En Corse la première liaison maritime à vapeur fut instaurée en 1830, assurant le service de la correspondance entre l’île et le continent. 10. Par exemple, en 1848, la France donna à tous les bâtiments en provenance de Grèce, du Maroc et des Îles ioniennes « libre accès », c’est-à-dire l’entrée aux ports sans aucun contrôle sanitaire.

en question. Un élément décisif fut la généralisation des bateaux à vapeur. 9 La navigation rapide abrégea considérablement le temps des traversées et la quarantaine, qui durait souvent plus longtemps que le voyage lui-même, pénalisait trop l’économie. Les législations sanitaires des pays furent alors peu à peu modifiées et la durée des quarantaines fut réduite, parfois même supprimée, selon les provenances. 10

5


3 – L’administration sanitaire en France au XIXe siècle

ordres un certain nombre d’employés rému-

En France, la plupart des épidémies arrivaient par la mer ;

– d’appliquer la législation sanitaire ins-

c’est pourquoi, du

XVIIe

au début du

XIXe

siècle, les lazarets

furent construits près des ports. Chaque établissement appliquait sa propre législation sanitaire, définie par les autorités politiques de la Province ou de l’État. En 1821, cette politique sanitaire fut bouleversée par l’arrivée de la fièvre jaune qui

nérés. Il avait la responsabilité :

taurée par les autorités politiques. – de surveiller les côtes pour éviter tout accostage clandestin. – de s’occuper de l’équipage et des passagers des bateaux échoués.

frappa Barcelone et la Catalogne car, cette fois-ci, le fléau

– de veiller sur le fonctionnement du laza-

arrivait par voie terrestre. Le gouvernement français, sous

ret aussi bien sur le plan administratif

Louis XVIII, prit immédiatement des mesures sanitaires en

que sur l’état de santé des personnes

établissant un cordon sanitaire le long de la frontière terres-

internées.

tre avec la Catalogne. Il créa ensuite une commission

– de contrôler les navires arrivant au port

sanitaire centrale, placée directement sous l’autorité du

(état de santé de l’équipage et des passa-

ministre de l’Intérieur, qu’il chargea d’une enquête sur les

gers, inspection de la marchandise) et

lazarets afin de lui proposer les modèles de construction les

d’organiser la quarantaine si nécessaire.

mieux adaptés quant à la distribution et la disposition des

– de désinfecter éventuellement marchan-

différentes parties des bâtiments. Les propositions ainsi réu-

dise et courrier.

nies guideront les architectes dans la conception de leurs projets, le gouvernement désirant construire de nombreux

La procédure de réception d’un bâtiment,

lazarets dans toute la France.

arrivé dans un port, se déroulait ainsi :

Une étape décisive fut la loi votée le 3 mars 1822 relative à

d’abord le capitaine du navire se rendait

la police sanitaire. Ce fut le premier texte officiel légiférant

seul, en canot, au bureau de consigne.

véritablement les taches de cette institution, qui seront pré-

À une distance respectueuse, il prêtait ser-

cisées et confirmées dans l’ordonnance du 7 août 1822.

ment sur un évangile qu’on lui tendait

Désormais, les mesures de la police sanitaire seront entière-

(souvent à travers une grille).

ment réglementées par le gouvernement, d’abord par le

Puis il jetait sa patente de santé dans un

Ministre de l’Intérieur, puis par le Ministre du Commerce,

récipient rempli de vinaigre d’où le res-

de l’Agriculture et des Travaux Publics.

ponsable du bureau la retirait avec des

Les lazarets étaient les véritables phares de la protection

pincettes. La patente était un certificat XVIIe

sanitaire en Europe. Dans les ports, dotés d’un tel établissement,

sanitaire, obligatoire dès le

la police sanitaire était représentée par le « bureau de Santé »,

C’était un formulaire 11, délivré dans

siècle.

composé des Intendants dont le nombre variait selon l’importance du port et de son trafic maritime. Jusqu’en 1850, ce comité d’administrateurs gérait bénévolement ce service et avait sous ses

6

11. À partir du milieu du XVIIIe siècle, ce formulaire est imprimé et à compléter.


La patente de santé était le document de base signifiant les mesures à appliquer envers le navire, l’équipage, les passagers et la marchandise. Mais le capitaine devait aussi répondre à un interrogatoire sur le voyage : la condition physique des personnes à bord ; les incidents et les rencontres durant la traversée ; la nature de la cargaison. Ce n’est qu’à partir de tous ces renseignements que l’Intendant décidait de la durée de la quarantaine ou du libre accès, car même parti d’un port avec une patente nette, surtout venant du Levant ou de la Barbarie, un navire était toujours suspect d’un point de vue sanitaire. Malgré les punitions sévères dont était menacé tout transgresseur des lois sanitaires (fortes amendes, prison, travaux forcés, peine de mort), les infractions étaient fréquentes : délivrance de patentes de santé de complaisance, compromission d’élus locaux, débarquements clandestins d’hommes et de marchandise, ou chaque port d’escale par le consul de la

stratagème pour échapper à la loi, comme celui échaffaudé par

nationalité du navire en question. Il y avait

Barberi lors du retour d’Égypte au profit de Napoléon (voir p. 8).

trois types de patentes de santé :

Ce laxisme avait parfois des conséquences désastreuses : il fut à

– la patente « nette » signifiait qu’il n’y

l’origine, par exemple, de la peste à Marseille en 1720, qui tua

avait pas de peste dans le port de départ

50 000 personnes, soit la moitié de la population. La méfiance

ou ses alentours ;

des agents sanitaires concernant la provenance de lieux suspects

– la patente « soupçonnée » ou « tou-

était donc fort compréhensible.

chée » quand le port de provenance

Quand les Intendants jugeaient nécessaire une quarantaine, ils

n’était pas touché de peste, mais que des

proposaient aux passagers soit de la passer à bord du navire, soit

rumeurs circulaient, ou si le port avait

à terre, dans un lazaret quand il existait. La quarantaine à terre

des relations avec des régions où régnait

était plus courte, mais aussi plus coûteuse, car les passagers

une épidémie ;

étaient logés et nourris sur place et à leurs frais. L’équipage res-

– la patente « brute » quand le port de

tait généralement à bord pour s’occuper de la marchandise qui

départ ou ses environs étaient frappés

devait être ouverte et exposée sur le pont (deux à six jours), sur-

par la peste. Cette patente redevenait

tout quand il s’agissait d’une marchandise « susceptible ». 12 La

« nette » quarante jours après la dispa-

purge consistait à chasser les miasmes épidémiques à l’aide du

rition de la maladie.

vent et des courants d’air, et on remuait la cargaison fréquemment. Durant toute cette opération, des gardes de santé veillaient,

12. c’est-à-dire tous les textiles, fourrures et poils.

à bord, pour empêcher tout contact avec d’autres navires. La marchandise était ensuite débarquée et enfermée soit au lazaret dans

7


un enclos à part, soit dans un hangar isolé. Le navire était ensuite

le personnel et les quarantenaires. Ces der-

nettoyé et désinfecté avec une préparation soufrée. Les lazarets

niers logeaient dans des chambres qui

des villes portuaires se trouvaient toujours au bord de la mer et à

donnaient sur une cour équipée d’un point

l’écart de l’agglomération. Le principe fondamental d’un lazaret

d’eau. Une partie des bâtiments, bien isolée,

est son isolement. De l’extérieur, ces établissements sanitaires

abritait les pièces réservées au personnel

ressemblaient à une prison ou à une sorte de forteresse, avec

(bureaux, chambres des gardes etc.). Le

leurs hautes murailles souvent aveugles. Pour limiter encore le

directeur du lazaret logeait sur place et son

contact avec l’extérieur, certains lazarets étaient même entourés

appartement était situé de manière à pou-

d’une deuxième enceinte. Un embarcadère reliait les bâtiments

voir surveiller l’ensemble de l’établissement

à la mer. À l’intérieur de l’enceinte, plusieurs parties étaient soi-

placé sous sa responsabilité.

gneusement divisées pour garantir la séparation physique entre

Napoléon échappe à la quarantaine 1 Le 24 août 1799, le général Bonaparte quitte secrètement l’Égypte pour rejoindre la France. Quelques semaines plus tard, longeant les côtes de la Sardaigne et de la Corse, la flottille, poussée par un vent violent, se réfugia dans le golfe d’Ajaccio. Le 29 septembre, les Ajacciens aperçurent de très loin les voiles de ces navires. La houle était forte sous les rafales du mistral et les bateaux louvoyaient, au lieu d’avancer au mouillage. La population, attentive, se montrait intriguée par ces manœuvres. Le Conseil Sanitaire, apprenant l’approche de ces navires, dépêcha la grande felouque corsaire pour procéder aux formalités d’arraisonnement et reconnaître les navires et leur provenance. Le « Ça ira, » armé en course, un canon à la proue, commandé par Roch Donzella, s’approcha ainsi du premier bâtiment, la « Muiron ». Après quelques palabres de courtoisie, Roch Donzella demanda son identité à l’officier auquel il s’adressait : - Général Berthier. - D’où venez-vous ? - D’Égypte. - Avez-vous des nouvelles de Bonaparte ? Pour toute réponse, Bonaparte parut à la coupée :

8

« Vive le général Bonaparte ! » s’écria l’équipage et hissa spontanément tous les pavillons. Puis, le patron Donzella donna l’ordre de tirer le canon et monta à bord de la « Muiron ». À quai, les spectateurs surveillaient avec curiosité cette agitation inaccoutumée qu’ils ne comprenaient pas. Mais sitôt la felouque rentrée dans le port, l’heureuse nouvelle fit le tour de la ville jusqu’au clocher de la cathédrale. « C’est Napoléon ! C’est Napoléon ! » Ce fut une allégresse générale et l’exubérance éclatait d’autant plus vive que les pires nouvelles avaient été répandues sur le sort de l’armée d’Égypte et celui de son chef. Ce retour inespéré s’annonçait à tous comme une manifestation céleste.

ral sur ses victoires. La proposition fut accueillie favorablement. Barberi s’empressa d’offrir sa chaloupe qui, bientôt entourée d’un cortège d’embarcations, amena les membres du Conseil sanitaire vers la Muiron. À l’approche des barques, les matelots de la frégate lancèrent des cordes. Barberi monta, les autres suivirent. Aussitôt, ce fut l’escalade générale et l’envahissement complet du bord.

Mais, pas de débarquement sans libre entrée et l’attente était longue. Le Conseil Sanitaire se réunit et décida, après une discussion véhémente, que Napoléon ne pouvait pas quitter le navire. En fait, quelques adversaires politiques de Bonaparte faisant partie du Conseil s’opposèrent au débarquement en se retranchant derrière la loi. Ce fut sans compter sur la ruse de leur président, Jean-Baptiste Barberi, tout dévoué à Napoléon. Il proposa aux membres du Conseil Sanitaire d’aller au moins féliciter le géné-

Profitant de la circonstance, Jean-Baptiste Barberi invita tous les passagers à débarquer. Ainsi fut écartée la redoutable quarantaine. Si, à quelques semaines près, les événements avaient mal tourné, peut-être Barberi aurait-il payé ce stratagème de sa tête, ou, tout au moins, de sa liberté. 2 Son dévouement participe de l’histoire de France puisqu’il précipita le retour de Bonaparte. Son arrivée inattendue à Paris, à l’insu du Directoire, favorisa l’instauration du Consulat.

Pouvait-il être désormais question de quarantaine : puisque l’isolement était rompu et le contact mille fois répété ? Il aurait fallu mettre tout le monde en quarantaine, y compris ces Messieurs de la Santé !


II – Situation de la Corse dans ce contexte… 1 – Les épidémies en Corse La Corse ne fut jamais épargnée par la peste. Celle-ci s’y déclara à plusieurs reprises, en 1348, en 1360-1370, en 1405, en 1528-30, en 1596 et en 1652 causant parfois des baisses démographiques brutales. 13 Elle apparut pour la dernière fois en 1945 à Ajaccio. LA PESTE À MARSEILLE

Au XVe siècle, la sérénissime République de Gêne mit en place une administration sanitaire comparable à celle de la France. Des commissaires de santé étaient chargés de contrôler et de surveiller les arrivages maritimes. Seuls les navires ayant une patente nette, dont la santé des hommes à bord et l’état de la marchandise n’inspiraient aucune inquiétude, étaient admis à 1. Barbaud, Ch, Carbo, L. Le retour d’Égypte. Revue des Études Napoléoniennes, 11e année, Tome II, novembre-décembre 1922. 2. Les ennemis de Bonaparte ne pardonnèrent point à Barberi. L’été suivant, quand les raisins finissaient de mûrir, le 3 messidor au VIII (22 juin 1800), deux semaines après la journée de Marengo, sa vigne fut dévastée et sur le terrain, on laissa un papier insultant : « Et maintenant, ô Barberi, va te faire payer par tes Bonaparte de merde ! » (Justice de paix d’Ajaccio). Bonaparte sut reconnaître le service rendu par JeanBaptiste Barberi. Il accepta d’être parrain d’une de ses filles, Marie-Angèle. (Baptisée le 25 août 1805 à Saint-Roch. Parrain et marraine : l’Empereur Napoléon et l’Impératrice Joséphine ; par procuration : André Ramolino et Madeleine, née Bacciochi, sa femme.) Il nomma son fils aîné, Joseph-Marie, payeur de la Guerre du Golo, à Bastia. Mais par suite de difficultés avec des fournisseurs qui n’avaient pas tenu leurs engagements envers lui, Joseph-Marie fut, en 1811, relevé de ses fonctions par le général Morand. Le père, pour rembourser la dette dut vendre ses propriétés à Vannucci et Grégory (de Bastia) et sa maison de ville à Joseph Pugliesi et Étienne Conti (d’Ajaccio). L’ancien payeur ne cessa de garder rancune à l’Empereur. Il se retira à Paris, ne revint plus à Ajaccio, et mourut, vers 1835, décoré de l’ordre du Lys. De cette famille, plus aucun descendant direct en Corse.

libre pratique. Les bâtiments venant d’une région où sévissait la peste, étaient refoulés ou, plus tard, mis en quarantaine et leurs occupants logés dans des baraques qu’on brûlait ensuite. Malgré les infractions, cette mesure de protection a contribué à enrayer, parfois même à éviter, l’expansion des épidémies sur la terre corse. En outre, la dévotion locale ajoutait à ces mesures sanitaires celles, non négligeables, de la protection divine… La peste en effet, surgit une nouvelle fois à Ajaccio, le 15 novembre 1656, amenée par un bateau en provenance de Gênes. Devant la panique générale, le commissaire de la République et les notables locaux organisèrent sur le champ un « vœu » solennel instaurant Notre Dame de la Miséricorde,

13. Par exemple, la peste de 1360-70 tua presque un tiers de la population insulaire. Gherardi, Paul. Encyclopaedia Corsicae. Editions Dumane, 2004. Volume IV. Aspects de la médecine au temps de Gênes., p. 433.

9


dite « a Madunuccia », comme protectrice spéciale contre ce fléau de Dieu et la ville en fut heureusement épargnée. Le 18 mars sera marqué depuis cette année-là à Ajaccio par des festivités populaires et notamment par la célébration d’une messe solennelle suivie d’une procession à travers la ville, manifestations auxquelles la population participe massivement encore aujourd’hui.

2 – nécessité d’un lazaret à Ajaccio À la fin du XVIIIe siècle, la ressource économique la plus importante de la ville d’Ajaccio était encore la pêche du corail. Cette activité était pratiquée depuis des centaines d’années dans les eaux littorales

Pour conjurer les épidémies, le culte de la « Madunuccia » vint ainsi conforter et s’associer à celui de Saint Roch, vénéré depuis longtemps dans l’île toute entière.

de Corse ou de Sardaigne mais aussi le long des côtes africaines. En 1768, Gênes céda la Corse à la France ce qui entraîna des changements radicaux dans ce métier. En fait, dès 1774, les autorités françaises

A Madunuccia

interdirent aux insulaires d’exploiter le

Le culte de Notre Dame de la Miséricorde, affectueusement nommée par les Ajacciens « A Madunuccia » (la petite Madone), prit au XVIIe siècle dans la ville une dimension particulière à l’occasion de la grande peur de 1656. La célébration en fut cependant introduite peu auparavant, en une plus discrète occasion : selon le capitaine Sgiò Pietro Orto, c’était la Vierge, (dont une statuette ornait à l’époque la porte de sa maison), qui, d’un ordre formel, avait miraculeusement interrompu une sanglante rixe dans le voisinage ; un autel, et plus tard, une statue votive apportée de Gênes, vinrent consacrer, en l’église des Jésuites, la reconnaissance du capitaine. En 1645, lors de la messe dite « de fondation », fut évoquée, par un prédicateur inspiré, l’apparition, un siècle plus tôt, à un paysan originaire de Sagone, de la Madone, laquelle s’exprima alors d’un seul mot : « Misericordia ! ». Ce double prodige inspira tout naturellement au clergé et aux magistrats de la ville (« les Magnifiques Anciens ») le recours à la Vierge pour conjurer la peste de 1656. Ainsi fut désormais officialisé le culte de Notre Dame de la Miséricorde, ou Madunuccia, dont la statue fut transportée plus tard dans la cathédrale. Par la suite, elle ne manqua pas de manifester sa bienveillante protection en d’autres graves circonstances : la ville résista aux assaillants corses, révoltés contre la domination génoise ; plus tard encore, en 1747, elle échappa miraculeusement à un bombardement anglo-sarde : en actions de grâces, une deuxième statue fut alors érigée aux portes de la ville. En 1803, cette statue fut installée dans la façade d’une très ancienne maison de la place Foch où elle séjourne désormais. On célèbre encore aujourd’hui, le 18 mars, en la cathédrale d’Ajaccio, la grand-messe et la procession de la Madunuccia, précédées la veille de litanies adressées à la Madone de la place Foch. REPRÉSENTATION DE LA LORS DES CÉRÉMONIES DU

MADUNUCCIA,

18 MARS

corail sur les côtes de Corse sous prétexte que les fonds maritimes s’épuisaient et qu’une durée de cinq ans était nécessaire pour les régénérer. Cet arrêté, qui provoqua une vive émotion dans la ville, fut d’autant plus injuste que les concurrents napolitains continuaient, eux, à y pêcher tranquillement. En réalité, cette interdiction ne dura que quatre ans, mais fut lourde de conséquences pour les Ajacciens : presque un tiers de la population vivait de la pêche au corail et cette mesure entraîna une crise économique considérable. De nombreux corailleurs cessèrent leur activité, d’autres s’engagèrent dans la Compagnie Royale et Perpétuelle d’Afrique, qui exploitait le corail en Barbarie. 14 Ainsi, la pêche éloignait-elle de leur île, pour six

14. Pour plus de détails voir Pomponi Francis. Histoire d’Ajaccio. Ajaccio : La Marge, 1992, p. 148-152.


longs mois (de mars à septembre), les

Ce fut l’arrêté du 23 Nivôse

marins travaillant alors dans les eaux sep-

an IX [13 janvier 1801] qui

tentrionales d’Afrique ; au retour s’ajoutait

projeta l’établissement d’un

la contrainte de purger la quarantaine.

lazaret à Ajaccio. L’arrêté

Celle-ci se faisait à Marseille, Livourne ou

du Consulat du 8 Floréal

Gênes. C’était une obligation très contrai-

an X [28 avril 1802]

gnante pour les corailleurs, car à la durée

ordonna sa construction

d’isolement elle-même, s’ajoutait celle de la

aux Îles des Sanguinaires,

traversée, et les frais de séjour au lazaret

précisément sur l’île Mezzu

(payés avec du corail) étaient à leur charge.

Mare. Les autorités locales

Depuis longtemps, les corailleurs d’Ajaccio

prévinrent

souhaitaient la construction d’un lazaret.

pêcheurs de corail qu’ils

Leur vœu figurait déjà dans les cahiers de

pourraient purger leur qua-

alors

les

ACTE DU GOUVERNEMENT PROJETANT AJACCIO

L’ÉTABLISSEMENT D’UN LAZARET À

Doléances pour les États Généraux de

rantaine, sur place, au retour

1789. Marseille, seule ville française habi-

des Côtes d’Afrique. Le 26 août 1802 arriva la première gon-

litée à recevoir les bateaux venant

dole à Ajaccio alors que le lazaret n’était même pas encore

directement des pays musulmans, s’y

conçu. Fort embarrassé de cette situation, l’Administrateur

opposa. Mais à Ajaccio, estimant qu’il fal-

Général de l’île, André-François Miot, qui était aussi à l’époque

lait aller vite pour redresser la situation

président de la Commission de Santé, prit un arrêté qui per-

des corailleurs, on décida de ne pas tenir

mettait aux pêcheurs de purger malgré tout leur quarantaine

compte de ce veto. Malgré cet empresse-

dans l’île des Sanguinaires sous la surveillance d’un membre

ment bien compréhensible, le lazaret des

des Conservateurs de Santé et de nombreux gardes. Reste à

Sanguinaires ne sera inauguré que bien

savoir comment cette quarantaine a pu se dérouler !!!

plus tard !!! LES PÊCHEURS DE CORAIL

Cet ouvrage est disponible à la vente sur le site du lazaret Olllandini www.lazaretollandini.com

11


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.