SENEGAL Ao没t 2005
CARNET DE VOYAGE
LE PERIPLE :
>>> Un bon paquet de kilomètres à pied, en pirogue, mobylette et autres "car rapide"
*** Note 1 : emmener un appareil numérique là-bas pendant 1 mois en routard serait du délire (vol, sable, eau, puis de toutes façons : pas d'électricité ni de quoi télécharger ou presque) et comme on voulait pas trimbaler dix mille appareils jetables, bin on a pris zéro photos. C'est un peu l'échec, mais je vais quand même agrémenter le récit de quelques photos glanées sur le ouaibe. Note 2 : de nombreux sénégalais m’ont tapé sur le système, et je me suis peut-être trop attardé sur ces passages dans le récit, passant sous silence les autres sénégalais, beaucoup plus nombreux, qui se sont montrés d’une infinie gentillesse. Je dis ça, parce qu’en lisant mon texte, quelques internautes amoureux du Sénégal n’ont pas beaucoup apprécié cet aspect. D’autres n’ont pas été gêné et ont même beaucoup aimé… En tous les cas, rassurez-vous, tout ça n’est qu’un effet d’optique du récit : j’adore le Sénégal et ses habitants. Le ton du texte est aussi un peu spécial. Enfin bon, bref, bonne lecture ! ***
Reprise du carnet de voyage : C’était il y a 10 ans. J’avais 10 ans. Et maintenant, j’en ai 20. Enfin, bref, je vais pas vous faire chier avec ça, mais, voilà, disons que je suis retourné au Sénégal, ce pays que j’avais quitté il y a 10 ans et où j’avais vécu 4 ans, de 6 à 10 ans donc. Ok, pas taper, j’arrête ! On est parti à deux, avec Charles, un pote depuis la 3ème en Guyane. En fait, je suis parti seul, et lui ne m’a rejoint là bas qu’un jour après, à cause d’une sombre histoire de bagages paumés par Air Canada. Bah, ouais, lui arrivait de St Pierre et Miquelon, le truc pas compliqué, quoi. Enfin bon. Déjà, le départ : mémorable. Le lendemain des 50 ans de mon père. Soirée arrosée de la tête aux pieds, avec un mélange éminemment sympathique et pourtant trop méconnu : champagne / calva. Et attention, du calva local, du pur, du dur, de celui qui pique les yeux et fait mal au crâne avant même que la bouteille ne soit ouverte. Bref, au petit matin, la charte de qualité est certifiée AMACC (Appellation Mal Au Crâne Contrôlée). Et je dois prendre le train. C’est la luuuutttte !!!! Arrivé à l’aéroport, la gueule de bois s’estompe et là, je tombe sur une femme que je connais très bien et que j’aime beaucoup, mais elle, étonnamment, ne me reconnaît pas du tout. Putain, mais qui c’est celle là déjà ? Ah ! Oui. C’est Muriel Robin. En train de zoner et de gueuler dans l’aéroport d’Orly Ouest. Forcément, je la connais, mais elle, non. Enfin bon. Me voilà dans l’avion, un Airbus A320 bien pourri aux fauteuils déglingués de la TAP Air Portugal. Dire que j’ai casqué 700€ pour ça ! La scène du repas est mémorable. Ici, pas de caddy servant des plateaux-repas. Plutôt un portugais bien poilu qui, du fond de l’avion, beugle : -21 B !
-Ouais ! Ouais ! Ch’uis là ! Et voilà le portugais, Helder pour les intimes, qui te balance un immonde sandwich au thon / purée, tel un quarterback qui te fait une passe de 45 mètres sur un terrain de football américain. Evidemment, 9 fois sur 10, la réception est mauvaise et le touchdown est loupé. Et un sandwich de plus encastré dans le hublot, un ! Enfin, c’est plutôt fun. J’attrape le mien. Mais il est tellement infâme que je crois que j’aurai aussi bien fait de le louper… On arrive à Lisbonne. Bah ouais, je fais Paris-Libonne, puis Lisbonne-Dakar, ça revient moins cher (m’enfin, 700€ quand même). Le pilote est une truffe comme j’en ai rarement vue. Au terme de la descente, il doit rester genre 2 ou 3 mètres d’altitude et le type passe en vol horizontal, juste au dessus de la piste. On doit bien manger les ¾ du tarmac sans toucher, je me dis « Putain mais tu le poses ton avion en forme de bite ?! » et voilà que ce con se met à moitié en travers et pose enfin son avion avec une lourdeur éléphantesque. Et puis, comme il doit rester grosso merdo à peine une centaine de mètres de piste, il ouvre en grand les inverseurs de poussée et écrase le freins autant qu’il le peut, du coup l’avion pile à 45°, les ceintures se tendent à craquer et on jurerait que le train avant va péter et que le nez va racler. Miracle, on s’en sort. Bienvenue à Lisbonne. J’ai 3 heures d’attente en transit. Chier. 15 minutes plus tard, je vois passer le pilote, tout sourire. Un petit nabot avec ses santiags qui claquent, aux longs cheveux bouclés et avec un pare-brise chromé en travers de la gueule en guise de lunettes de soleil. Beau spécimen. Retour dans l’avion, encore un Airbus A320 tout pourri, mais au moins ce coup-ci y’a des caddy. Mais ces truffes, au lieu de se répartir le service, préfèrent monter les deux caddy en série et se retrouvent systématiquement à être deux à servir une seule et même personne. Putain, la TAP, elle commence vraiment à me taper sur les nerfs. Il est 1h du matin, on approche de Dakar. Depuis quelques minutes déjà, j’ai reconnu l’endroit, avec le Phare des Mamelles dont le faisceau tournoie au dessus de la ville et de l’océan. Ca me fait bizarre de le revoir, ce phare. L’atterrissage se fait sans encombre. Après maintes formalités, me voilà lâché dans la zone. Des tas d’emmerdeurs et d’arnaqueurs qui m’abordent et me proposent des solutions de change soi-disant sans contrepartie ou qui tentent ouvertement de te faire les poches. Très peu pour moi, merci ! Evidemment, le distributeur de billets est en rade et je dois négocier avec un taxi pour qu’il accepte mes euros. Ca me coûte une petite fortune, mais pas question de traîner ici. Déjà que l’auberge où je vais devait m’envoyer un taxi, bravo. Le keum roule comme un ouf, sans phares, et y’a pas de ceintures. On se retrouve à 4 taxis à rouler de front, occupant les 2 voies. Et, putain, 3 autres taxis qui font pareil en face ! Je ferme les yeux et serre bien les fesses, j’entends un déluge de klaxons et d’insultes, ça balance dans tous les sens et quand je rouvre les yeux, on est passé. Je sais pas comment, mais on est passé. Le truc de ouf. Je suis enfin à l’auberge. Il est 2h30 de mat et je m’effondre dans mon lit pour dormir toute la nuit. Enfin, presque, parce qu’on est en pays islamique et que la prière, c’est sacré ! Le lendemain, je redécouvre avec plaisir la plage du Phare des Mamelles où j’avais passé tant de temps. Je monte tout en haut du phare et, de là, je vois la Cité Mermoz, avec sa grande tour et ses petits immeubles jaune-ocre où j’habitais. Drôle de sensation. Charles doit arriver ce soir. En attendant, je profite des vagues et du paysage.
Ce con de Charles n’avait pas vu la pancarte à son nom du taxi que je lui avait fait envoyer. Du coup, 1h de retard, j’ai bien cru qu’il ne viendrait jamais ! Enfin bon, j’étais en train de mater The Big Lebowski à la télé, et, évidemment, j’étais effondré de rire tellement c’est un putain de bon film. Charles arrive enfin. Cet enculé, qui a déjà eu son billet gratos grâce à ses Miles Air France, a en plus été surclassé en Première grâce à la bourde de… Air Canada ! Gros bâtard au cul toujours aussi bordé de nouilles. Enfin bon, ouf, je me voyais pas rester seul au Sénégal pendant un mois ! Le lendemain, on veut aller plonger aux Almadies. Charles ne trouve rien de mieux à faire que de se faire soutirer 50 € par un certain Momo et son joli tour de passe-passe que j’avais vu venir à des kilomètres mais Charles n’avait pas cru bon de m’écouter. C’était un cadeau empoisonné, soi-disant gratuit, et paf, à peine 5 minutes plus tard, grosse embrouille et enculage télescopique, tour de magie à la David Copperfield. Bravo l’artiste, enfin, ce coupci, Charles a compris. Le soir, on fonce chez Joëlle, la mère d’un vieil ami, Romaric. On était ensemble en CP. Ca nous rajeunit pas tout ça… Elle nous accueille chaleureusement et ça fait du bien après le coup de ce connard de Momo. Le lendemain, on va à l’île de Gorée au large de Dakar. Très bel endroit, on en profite pour faire de l’apnée au dessus d’une putain d’épave. Très beau, mais aussi très profond, et pas question de faire les cons en apnée. Du coup, on reste un peu sur notre faim… Mais bon ! On tombe sur un keum qui veut nous refourguer des Channel N°5 et des stylos Mont Blanc, à des prix défiant toute concurrence bien évidemment car les articles sont, disons, tombés du camion. Mais qu’est-ce qu’on en a à branler ? lui dis-je.
La plage de Gorée
On quitte Dakar pour aller à Toubab Dialao. On traverse l’immense forêt de Baobab. Des arbres monstrueux. Trop stylé.
Un baobab parmi tant d'autres.
On arrive dans un hôtel magnifique appelé Sobo Badê. Trop trop beau, en bord d’une plage immense, avec des superbes vagues. Que du bonheur, et on se fait péter le bide au resto… Le soir, on va dans un cybercafé. Faut voir la gueule du truc. Dix vieilles épaves de PC posées entre deux rangées de parpaings à ciel ouvert, et pourtant ça marche… Et plutôt bien même ! Le lendemain, à la plage, un type ultra chelou regarde avec un peu trop d’insistance notre pochette où y’a notre thune et nos papiers. Un moment, il me sort :
-Elle est à toi, la pochette, là ? -Bah… Ouais ! Pourquoi ? -Bah… Pour la tirer !!! dit-il, mort de rire. Hallucinant, le mec, mais au moins il est honnête. J’éclate de rire et finalement il s’en va, le sourire jusqu’aux oreilles. Le lendemain, direction la ville de Mbour où l’on trouve la mythique enseigne Tefess. Mbour Tefess. Une ville de pêcheurs. Ca pue la mort. Avec nos gros sacs en forme de bite sur le dos, on est vite harcelé par les arnaqueurs. On visite le Marché. Je me retourne, et là je vois Charles en train de se faire accrocher au poignet le même genre de cadeau que celui de Momo. Putain mais te laisse pas faire merde! Je chope le mec, le bouscule, arrache le bracelet et lui renvoie dans la gueule. Putain, les lourds ! Maintenant on a la paix.
Mbour Tefess - Village de pêcheurs
On se barre, direction la Pointe Sarène. On cherche un camping prétendument magnifique dans un « joli petit village typique » dixit le Guide du Routard. Mouais. Des parpaings et une plage top crade. Ze plan pourri. On se casse !!! On arrive donc à Joal-Fadiouth, dans l’hôtel du fils d’un ami de Joëlle. Accueil super. Ville crade, mais en bord d’une rivière et de la mangrove, d’où l’on peut partir en pirogue. On fait deux super balades en pirogue à la perche, dont l’une avec un guide qui nous explique longuement comment préparer le viagra local à base de… bite de tortue séchée. No comment. On tombe aussi sur un énorme Mbar (un varan) en train de nager à fond les ballons devant notre pirogue. Trop bon. Il y a aussi une petite île artificielle, faite en coquillages. C’est super crade. L’île d’à côté, par contre, est propre, somptueuse même, pleine de verdure et d’immenses baobabs plantés sur des morceaux de coquillages parfaitement blancs. En fait, c’est le cimetière des habitants de la première île. Superbe visite. Le soir, Stéphane, le gérant, nous paye d’immenses coups à boire. On se flingue des whiskies cocas et deux bouteilles de vins. Totalement allumés, on commence à se mater des VCD pirates de reggae et de rap. On se fend la poire devant un des prétendus fils de Bob Marley, qui se fait appeler « Damian Junior Gong Marley ». Gong. Putain, trop bon. Et puis on se fout de la gueule de ces gros cons de rappeurs, avec leur panier à salade sur la tête, la casquette à l’envers, leur manteau de fourrure ridicule, leur pantalon sous les genoux, en train se de choper les burnes toutes les 2 secondes, histoire de bien vérifier qu’elles sont toujours là… Gros délire. Délüre ? Maintenant, direction Djilor, dans le Sine Saloum, un gigantesque fleuve serpentant dans la mangrove. On loge au Domaine des Cajous. C’est extra. Une gigantesque pailloterestaurant en paille, en forme d’impluvium: un trou en pente au centre où s’écoule la pluie pour arroser un patio. Le tout en bordure du Saloum, avec un grand ponton. Au bout, un abri, des hamacs, un plongeoir et un canoë. Trop bon. On nage un coup puis on se laisse dorer au soleil, allongés sur le ponton. J’entends un drôle de bruit de flotte. Je tourne la tête et vois un gigantesque Mbar d’au moins 1.5m qui fait des ronds dans l’eau et me regarde bizarrement. Tout noir, tacheté de jaune, la bête a vraiment de la gueule. Un sacré dinosaure. Je dis à Charles de se lever très lentement, mais à peine a-t-il bougé que le Mbar disparaît dans les eaux sombres en faisant claquer sa longue queue pour nous asperger. On reste comme deux ronds de flan. Cassés. On prend le canoë et on part se balader. Charles s’occupe de ramer à l’allée. On fonce de l’autre côté du bras de rivière, mais, arrivés au milieu, on racle le fond et pas moyen de porter le canoë vu que c’est de la vase. Galère. On est bon pour faire tout le tour. On finit par arriver à une petite île super sympa mais, brusquement, des hurlements d’oiseaux qui nous tournent autour et nous foncent dessus super violemment. Ils protègent leur nid tout proche, et, putain, ce sont pas des parents indignes. Faut voir la raclée qu’ils nous mettent, ils nous foncent dessus, bec en avant, griffes ouvertes ! Devant leurs assauts répétés, on met les voiles… Et c’est à moi de ramer pour le retour mais, bien évidemment, je me suis fait enculé à sec : j’ai le vent et le courant contre moi, le soleil dans la gueule et en plus il commence à y avoir des vagues… Quelle galère, on manque de se retourner toutes les 10 secondes. J’arrive au campement, lessivé. Bonne nuit les amis.
Le Sine-Saloum. C'est complètement beau :)
Le lendemain, on passe la journée sur la pirogue de Hibou, qui nous fait visiter des kilomètres de bras de mangrove. C’est magnifique, avec tous ces poissons qui sautent dans tous les sens et tous ces oiseaux. Martin-Pêcheurs, Pellicans, et plein d’autres dont je connais pas le nom, ils nous frôlent, c’est limite s’ils nous percutent pas. Trop bon. Le soir, on mange un Tiéboudiène (riz au poisson) chez Hibou. J’ai le réflexe de prendre un Imodium (ralentisseur intestinal) tout de suite, Charles fait le malin et n’en prends pas. Le lendemain, qui c’est qui a la diarrhée ? C’est pas moi. Au petit matin, je me pose sur le ponton pour profiter du lever de soleil sur le fleuve. Pas un bruit, à part les oiseaux, et le soleil nous inonde de pures couleurs. C’est trop beau. Tiens, hop, cinq pélicans de plus de 2m passent juste à côté de moi. Sympa. Aujourd’hui, on passe encore la journée sur la pirogue de Hibou. Il nous emmène jusqu’à Toubakouta. Charles lutte toute la journée contre son estomac. Comme la veille, on voit de supers belles choses. Tout est calme. Soudain, un poisson ridicule en forme de trompette jaillit de l’eau en frétillant du cul et se tape comme ça au moins 500 mètres avec nous par bonds itérés successifs. Trop l’air con, le truc. Mort de rire. Et là, c’est la pluie. D’abord, une petite pluie de grosse tarlouze efféminée, qui se change en une pluie ma foi fort correcte, avant de devenir franchement un truc de mec. Et sévèrement burné, le mec. Au début, c’est fun. Au bout d’une heure, on est congelé. On se planque sous la bâche tels deux clandestins immigrés yougoslaves, terrés comme des rats. Mais ça tombe tellement qu’on risque de couler, alors on est obligé d’écoper comme des malades. Ca s’arrête enfin. Mais voilà que ça reclaque. Enorme orage. Mémorable.
Façon pirogue sur le Saloum.
On arrive à Toubakouta. Super campement chicos, le Keur Saloum, au bord du fleuve, avec un impluvium gigantesque et une superbe piscine à débordement. Mais on a pas trop les moyens, alors on va dormir aux Coquillages, juste derrière, miteux mais pas cher. On décide d’aller bouffer au Keur Saloum quand même, histoire de profiter du lieu… Mauvaise idée. En fait, ce n’est même plus chicos : ça pue carrément le fric. Il n’y a là que de gros toubabs (blancs) pétés de thunes qui pelotent de jeunes sénégalaises de 18 ans, en hurlant haut et fort leurs exploits à la pêche au barracuda. Tous cons, tous bourrés, ici pour pêcher et chasser des espèces protégées. Pauvres types. En plus, la bouffe est reuch est franchement pas top. Plan pourri, quand tu nous tiens… Dès le lendemain, cassos. Direction : Missirah, 30 bornes au sud de Toubakouta. Il pleut des cordes. On met une heure à pied pour rejoindre la gare routière en ayant manqué de se vautrer dans la merde glissante à peu près tous les deux mètres. Arrivé devant l’unique taxi, ce gros connard nous demande un prix exorbitant pour aller jusqu’à Missirah. Je lui dis d’aller se faire foutre et qu’on se débrouillera autrement. Hop, on demande à deux gars en mobylettes toutes pourries de nous emmener, ils acceptent pour 10 fois moins cher. Et en plus, c’est fun de chez Marcel Fun, limite smiley kéblo même. En effet, il pleut des cordes, on est à l’arrière d’une mob déglinguée, avec nos énormes sacs/bites et nos bidons de flotte, la piste n’est plus qu’une étendue de boue glissante et collante, toute rouge, on slalome comme des oufs entre
les arbres, on manque de se vautrer en permanence, on se fait des sessions d’aquaplaning de psycho, les singes dans les arbres autour de nous hurlent comme des fous et nous suivent en sautant de branche en branche, et là, vlan, on se vautre à fond les ballons dans la merde, mais c’est tellement mou et puis au fond on dépasse pas les 30 km/h, donc on a rien et on est mort de rire. Charles se crame quand même la jambe avec le pot, mais rien de bien méchant. Même les singes ont l’air de se foutre de notre gueule !! Trop bon. Evidemment, le moteur a bu la tasse, alors on met du temps à redémarrer, mais, putain, c’est vraiment trop trop bon. On arrive au gîte à Missirah, on est les seuls clients depuis longtemps (comme d’hab’ en saison des pluies). Faut voir la tronche de la patronne quand elle nous voit arriver, maculés de boue de la tête aux pieds : -…Mais… Putain… Vous avez fait quoi ? Vous sortez d’où dans un état comme ça ? -Bah… on est venu en mob (smiley kéblo mode ON) !! -Ah les cons (morte de rire) !! No comment. Et il pleut. Encore et toujours. On passe deux journées à jouer au Scrabble et à boire du Coca, sous l’œil étonné des singes à moitié en train de se bastonner pour les 2-3 trucs qu’on leur donne à manger. La nuit, on entend les hyènes hurler. Le soir, on bouffe des mangues flambées. Notre guide guette la moindre accalmie pour nous emmener en forêt. Ah ? Une fenêtre de tir ? C’est parti ! Trois heures de jungle, à voir des termitières de six mètres de haut, des varans monstrueux, des oiseaux tout chou, et puis une armada de phacochères paniqués à notre approche au point qu’ils en paument leurs gamins… que l’on retrouve un quart d’heure après, stressés à mort, dans les hautes herbes. Ces cons là se couchent, se croyant invisibles. On s’approche à moins d’un mètre, et voilà que ces trucs là hauts comme trois pommes se lèvent et se barrent en hurlant et en sautant comme des piles électriques. Trop bon. On se taille en Casamance, l’extrême sud verdoyant du pays, mais pour ça il faut traverser la Gambie. Là, faut se choper un Visa. C’est trop la lutte. Tous les douaniers ont une super sale gueule de chez Fernand De La Salle Gueule, ils prennent un malin plaisir à te faire attendre des plombes, ils sont tous corrompus à mort et se gardent la moitié de la thune des Visas, en plus ils sont crades à en gerber, à la limite on se demande s’ils ne chient pas par terre ces gros porcs là… Enfin, on a nos Visas. On trace, on change quinze fois de taxis, on prend le bac, on arrive à Banjul, capitale de la Gambie. Là, on parle le broken english et tout le monde essaye de te faire les poches, alors, nous, avec nos gueules de blancs et nos bites sur le dos, c’est trop la lutte. Je sens un mec fouiller dans mon sac, je me retourne et le voit en train d’essayer de se tirer avec ma paire de jumelles. Je lui dit : -Rends-moi ça, connard ! -OK, OK ! Et il me la rend, tout penaud. Ca, c’est fait. On prend encore je sais pas combien de taxi, on traverse la Gambie et, évidemment, on crève. Heureusement, dans les campagnes, les gens sont super gentils et se plient en quatre pour nous aider à repartir. Ca fait plaisir. Les petits villages sont tout simplement magnifiques. On traverse un village où règne un bon gros boxon
et un type à l’air super pas cool du tout nous arrête et nous braque avec un fusil. Méchante poussée d’adrénaline : ouh, putain, c’est pas bon, ça. En fait, c’est la fête du village, le fusil n’est pas chargé et c’est « pour rigoler ». Putain, très très drôle. Le soir, on arrive enfin à Kafountine, dans un campement hôtel tenu par un vieux blanc rasta totalement allumé. Cool, mais allumé. Ca s’appelle A la nature. Moi, j’aime bien, mais Charles trouve pas ça top. C’est vrai que c’est poussiéreux, mais ça a de la gueule, des cases simples, mais un putain de restaurant avec impluvium, patio, pont suspendu, et vue sur l’océan. On rencontre ici le seul français de tout notre périple, un conseiller d’orientation à Caen. On tombe aussi sur un couple de boliviens super sympas. La nuit, Charles en a tellement ras le bol du campement que je l’entends hurler, en pleine nuit : -I’M BOB JACKSON !!! (cf. Jim Carey dans Karate Instructor, un de nos gros délires du mois). Je me dis : putain, là, gros craquage, il dort pas et commence à gueuler Bob Jackson…Gros dossier. En fait, le lendemain, il se souvenait de rien : il avait beuglé ça en dormant. Fun. On se casse vers un autre campement : l’Esperanto. Magnifique, derrière les dunes de la plage, dans la plaine verdoyante, sur une rivière. Et y’a personne. On est seul de chez seul. Peinardos. Paco, le vigile, nous accueille coolos et nous emmène faire une pure ballade en vélo, à travers les rizières, jusqu’au village de Kassel. C’est hyper beau. On se prend des sodas et on lui paye un coup. Mais après, il nous emmène en pirogue pour une ballade pourrie comme c’est pas possible : à peine une heure, à ramer dans la vase, avec un pseudo-guide de mes couilles qui n’a pas décoché un seul mot tout du long et qui faisait semblant de ramer, cet espèce d’enculé. Paco, prétendant qu’il fallait quelqu’un d’expérimenté pour diriger la pirogue, s’est mis à l’arrière pour contrôler le cap. Résultat : on a passé notre temps, avec Charles, à l’avant, à essayer de compenser les erreurs de trajectoires de ce gros boulet qui nous envoyait systématiquement dans la mangrove, à peu près tous les dix mètres. En plus, comme l’autre trou du cul ramait pas, on s’épuisait comme des malades. Et là, il nous pose sur une espèce d’île moisie à la con. Là, je lui dit de nous ramener tout de suite, parce que, vraiment, ça suce. Et au retour, on apprend qu’en plus d’un soda, cette enflure de Paco s’est payé des cigarettes sur notre gueule. Pas gêné le mec, c’est pas pour ce que ça coûte, mais vraiment, la raclure. En ville, on croise des rastas défoncés à bloc, qui nous expliquent que ici en Casamance, tout est nice, peace and love. Allez, c’est ça, ta gueule, tu pues. Le lendemain, on zone le long de la plage, jusqu’à une vieille épave coréenne toute rouillée de 50 mètres. Ambiance vaisseau fantôme, avec les vagues qui claquent contre la coque et qui font résonner toute la structure et l’eau qui se vaporise en geysers évanescents… Sympa. On se barre à Ziguinchor qui s’avère être une ville toute pourrie alors on trace vite fait jusqu’à l’extrême extrême sud du Sénégal : le Cap Skirring. En chemin, dans le taxi-brousse, je tombe sur un mec qui me fait exploser de rire. A un moment, on s’arrête. Le type descend s’acheter un truc à bouffer. On repart. Et puis un mec se met à beugler en courant derrière comme un dératé : on l’a oublié ! On freine, il monte dans le taxi, avec un sourire jusqu’aux oreilles, en beuglant : -J’AI MES MANGUES !!! J’AI MES MANGUES !!! J’AI MES MANGUES !!! Puis il enchaîne : -Y’a des bars à Cap Skirring ?
Son voisin répond : -Bah… Ouais ! Plein ! -AAAAHHHH !!!! C’est bon, ça !!!! lâche t-il, rayonnant de bonheur, tout en sueur, en gobant ses mangues à pleines dents. Bon, faut vivre la scène, hein, là, ça a pas l’air, mais à voir c’est à mourir de rire. Enfin, bref, on arrive au Cap Skirring. Là, c’est vraiment trop trop beau. Les plus belles plages du Sénégal. Des kilomètres de cocotiers, de palmiers et de sable blanc. Zéro touriste en cette saison. Des vagues extra buenos. On est logé dans un petit hôtel très sympa et pas cher du tout. On bouffe bon et copieux au village pour moins de 0.7 €. Y’a même Internet. Le long de la plage, des tas d’hôtels abandonnés lors de la guerre civile d’il y a quelques années, ou tout simplement en faillite. Il faut dire qu’ils avaient vu trop grand : des hôtels de 300 piaules ! En tous cas, pour nous, c’est l’hallu. Ces bâtiments gigantesques et magnifiques, abandonnés. On visite tout de fond en comble, il reste même les climatiseurs, le matos informatique. C’est géant et désert à la fois, il plane une putain d’ambiance, c’est trop fort. Tantôt, ça a l’air abandonné depuis 50 ans (certains bâtiments), tantôt ça a l’air d’avoir été entretenu jusqu’à hier (certaines haies). C’est super bizarre. Mais qu’est-ce que c’est bon ! On continue de marcher vers le sud. On atteint des dunes gigantesques que l’on escalade, et, au-delà, des rizières à perte de vue. Et, encore au-delà, la Guinée-Bissau ! C’est somptueux. Le soleil commence à décliner et les rizières se teintent d’un ocre orangé du plus bel effet. Un putain de beau paysage. Mais il faut rentrer avant la nuit. En plus, le ciel se bouche, et on se prend un énorme grain. Une pluie torrentielle, des éclairs tout proches prêts à nous carboniser, et puis la marée est montée. Du coup, certains caps sont inondés, on doit se frayer un chemin entre les rochers, branlés dans les vagues. On lutte presque pour notre survie mais, putain, c’est trop bon. J’entends un cri étouffé, je me retourne, et je ne vois plus qu’un bras qui sort de l’eau, tenant fermement quelque chose : Charles s’est pris une magistrale branlée par une vague, mais il a réussi à sauver la pochette avec nos passeports et nos thunes. Ouf. On arrive à la plage de notre hôtel, le soleil finit de se coucher derrière la mer et un cap bardé de cocotiers, la pluie s’est calmée et les nuages s’estompent. Le panorama est magnifique, avec cette lumière rouge sang et ces arbres malmenés en contre-jour qui se découpent comme des ombres chinoises, on croirait voir le logo de Jurassic Park. Et ce soleil rouge qui se reflète dans cette mer démontée en filtrant à travers les nuages, c’est vraiment trop beau. On est épuisé. Super happy, mais vraiment crevé. Vivement qu’on se couche.
Le Cap, façon Jurassic Park.
Le lendemain matin, on grille Claude, le gérant, en plein petit-dej’. Il est 6 heures du mat’ et lui se tape une figue et… une pleine bouteille de rosé. Il enchaîne sur le Pastis, toute la matinée. Respect. On rencontre un couple d’espagnols super cools qui parlent très bien le français et l’anglais. Ils nous donnent un super bon plan : marcher sur le plage jusqu’à Djembering puis jusqu’à Kachouane. Top Bilan au Cap Skirring donc. On sera quand même tombé sur un connard qui nous sortait le grand jeu, style « on est tous les meilleurs amis du monde, je vais te présenter toute ma famille, sinon à quoi ça sert l’amitié ? ». Le gros enfoiré qui voulait qu’une chose : nous emmener faire un tour hors de prix dans sa pirogue toute pourrie. Il commence alors à nous sortir des trucs en latin, histoire de se la péter, genre « alea jacta est » et autres « veni vidi vici » et encore un tas de conneries. Il arrête pas de nous dire que, ici, tout est « tranquille », il nous sort ce mot toutes les dix secondes. Il me pète grave les couilles alors je lui sors : -Tranquille, tranquille ! T’arrêtes pas de nous dire ça, n’empêche que, nous, tu nous laisses pas tranquilles depuis une plombe ! Allez ta gueule et casse toi !!
Ca, c’est fait. La nuit, on regarde le match France / Côte d’Ivoire avec le retour de Zidane. On se marre paske Djibril Cissé ne fait que des conneries. Un vrai boulet. Toujours est-il que la France explose la Côte d’Ivoire, 3-0. A l’origine, ce devait être France / Sénégal. Sachant qu’en ce moment, les Ivoiriens sont bien plus forts que les Sénégalais, on les aurait atomisés genre 5-0 et là, nous deux, français au fond du Sénégal, on aurait plus eu qu’à se terrer comme des clandestins dans notre piaule en attendant que ça passe, histoire de pas se faire lyncher par la population locale. Ils sont très susceptibles, surtout en ce qui concerne le foot, et plus encore si la France a quelque chose à y voir. Ouf, ça n’était que la Côte d’Ivoire. Le lendemain matin, très tôt, pour profiter de la fraîcheur de la matinée, on est parti. On a 25 bornes à se bouffer avec les bites sur le dos. 15 bornes de sable, 10 bornes de rizières inondées. En fait, vu qu’il aura plu toute la journée, on aurait pu partir bien plus tard, mais bon. On marchera pendant 5 heures, quasiment non-stop. Sur la plage, on tombe sur un mec qui nous demande : -Vous allez où comme ça ? -A Kachouane. -A Kachouane ? … A pied ? -Bah… ouais ! -…Vous allez en chier !! lâche t-il, mort de rire. Vu que le mec est un gros baraqué qui bosse dans les rizières, on se dit que s’il dit qu’on va en chier, c’est qu’on va vraiment en chier. Mais bon, on est pas des pédés. Bon. Plus loin, on tombe sur deux cadavres de dauphins. L’un est tellement avancé qu’il ne reste que le squelette encastré dans la peau tannée et solidifiée qui ne sent même plus. L’autre pue franchement. Il y a aussi tout un tas d’autres squelettes de dauphins disséminés sur la plage. Fun. On arrive à Djembering, magnifique village ombragé sous des gigantesques arbres fromagers séculaires, aux longues branches sinueuses et aux troncs monstrueux. On monte sur une des collines et là, un putain de panorama. On continue vers Kachouane. Pour ça, il faut traverser un véritable dédale de rizières inondées. Deux jeunes du village vont nous guider. Et on marche pendant 2 plombes, avec parfois de l’eau jusqu’à la taille, dans la campagne inondée et les rizières. C’est somptueux et en plus il y a un tas d’oiseaux. Vraiment magique. On finit par arriver, épuisés, à Kachouane. J’ai les jambes dé-mon-tées. On offre le déjeuner à nos deux valeureux guides. C’est un campement tout simple à l’énergie solaire, avec douche au seau. Le village est super beau, les gens hyper gentils et accueillants, le tout en bord du fleuve Casamance où l’on peut se baigner. Un havre de paix. On mange super bien et copieux : riz, frites, poissons et mangues, le tout avec de pures sauces. Eclatage de bide. On rencontre Anna et Miguel, deux espagnols (décidément que des espagnols… eh oui c’est « leur » saison !). Ils sont tous les deux totalement barrés. Anna est actrice au théâtre, elle fume tellement qu’on jurerait entendre Dark Vador, et elle joue dans des pièces russes de 10 heures d’affilée. Miguel est un drogué complet (il a fait des initiations shaman, le truc de ouf) et est reporter photographe animalier. Son appareil vaut 2000 € mais ces photos sont loin d’être trop. Enfin bon. Deux sacrés personnages. Ils nous conseillent d’aller à l’île de Karabane, puis à Oussouye. La journée, on part en pirogue voir l’île aux oiseaux. En fait, c’est un bout de mangrove dans un bras du fleuve, où sont regroupés des milliers d’oiseaux qui viennent là pour nicher. Y’a des tas d’oisillons, certains se vautrent à l’eau, les parents passent leur temps à aller les chercher,
y’a des nids qui n’ont, disons, pas prévu la marée haute et qui se retrouvent sous l’eau, avec les parents qui zonent pour récupérer les oeufs partis à la dérive. Y’a des oiseaux trop bons, des cormorans qui font sécher leurs ailes, des pélicans qui se vautrent lors de l’approche finale de leur branche (à mourir de rire), des oiseaux avec un bec de spatule et l’air plus niais tu meurs, surtout lorsqu’ils s’envolent et oublient de replier leurs longues jambes. Là, ça loupe pas, ils s’emmêlent dans les branches et se plantent comme des bites. Trop trop bon.
Paysage typique de la Casamance.
Maintenant, avant Oussouye, direction l’île de Karabane, que nous ont conseillée tous les espagnols jusqu’ici. Et c’était une belle connerie. Déjà, on est logé au Barracuda, espèce d’hôtel miteux, avec des pieux pour Pokémon (à la limite, plié en deux, je rentre dedans, mais vraiment à la limite), des sanitaires pourris (tu chies juste sous la douche, et y’a pas de PQ. Heureusement que j’avais mon Guide du Routard pour me servir…). Et puis, l’île. Crade comme c’est pas possible. Y’a même un énorme cochon crevé sur la plage. Une infection. Et puis ici y’a des espèces de connards qui disent haut et fort que Karabane est la plus belle île du monde, que le ministre est passé l’autre jour et que les caméras du monde entier l’ont entendu dire que l’île était magique. Le genre de connard qui me sort, hyper sérieusement : -Mais toi, ça se voit, tu apprécies l’endroit. Je suis sûr que t’as qu’une envie : venir t’installer ici, au plus vite, avec tes enfants !!
Nan mais j’hallucine. Et il enchaîne sur les « vibrations du bonheur qui habitent Karabane ». Et il continue, en m’expliquant que ici, « tout est partage, bonheur, fraternité et compassion ». Que « tout vient du cœur ». Nan mais quel pauvre type. En plus, il y croit à ces conneries. Bon, on est coincé là jusqu’au lendemain. Direction Oussouye, mais avant, on doit passer en pirogue par Elinkine. Là, des gros connards de flics qui nous font chier une heure en faisant sembler de vérifier nos papiers. Encore de supers sales gueules. Putain, ras le bol. Hop ! Direction Oussouye en taxi-brousse. On doit être cinquante pour vingt places. Nous voilà à Oussouye. On se pose dans un pur campement, avec une gigantesque terrasse, magnifique, donnant sur le fleuve, mi-rizière, mi mangrove. Sublime. La bouffe est top et pas cher du tout. Le lendemain matin, on va visiter une mini usine, très artisanale, de transformation de la noix de Cajou. On tombe sur un guide super sympa. On goûte le fruit de la noix de Cajou, gros et juteux et qui sent trop bon la fraise. Mais le coup… Anesthésiant à mort ! Moi, je connaissais, alors j’ai à peine mordu, mais Charles, lui, s’est jeté dessus. Il a passé la journée à beugler que j’aurai pu le prévenir et à cracher. Cassé. On goûte aussi le vin de Cajou, le truc qui passe bien au début, mais, très vite, t’as ton organisme qui te dit « Eh ! Oh ! T’arrêtes les conneries » et du coup, ça passe plus. Manque de pot, on nous ressert de grands verres. Et branlère… Et on enchaîne sur le vin de mangue. Houlà. Le truc crémeux à mort, pétillant, fermenté à bloc. Gros malaise… Heureusement, on s’en sort vivant. Sur le retour, des tonnes de gamins nous assaillent, l’un me fait tellement suer que, d’un coup, je gueule : -Mais putain !! Lâche moi !!! Et le gamin de 3-4 ans qui n’avait jusque là pas dit un mot, part en courant en hurlant : -Mais putain !! Mais putain !! Mais putain !! Mais putain !! Je crois que je viens de lui apprendre une nouvelle expression… Et y’a pas de quoi être fier. Enfin bon.
Oussouye. Le genre de case où l'on vous fait boire du vin de mangue...
Le temps passe. Il faut penser à remonter sur Dakar. Je repars dans 4 jours. Et je dois confirmer mon vol de retour 72 heures avant, sinon, je peux pas monter dans l’avion. Bon, je les appelle. Ces enfoirés ne répondent pas. Putain, fais chier ! Bon, on repart sur Ziguinchor, et, de là, on décide de rentrer à Dakar dans la nuit. Evidemment, ces enfoirés de Gambiens ont augmenté les taxes à mort, du coup, on est obligé de contourner le Gambie. Hop ! Ca nous fera 800 bornes entassés dans un taxi-brousse. La galère. On est censé arriver vers 3h du matin. On démarre avec 2 plombes de retard parce qu’un connard était monté sur le toit pour fouiller nos affaires. Grosse embrouille, la population locale le lynche et lui pète la gueule et nous dit de porter plainte. Alors on vérifie nos sacs. Mais rien n’a été volé. Bon, on peut enfin démarrer. Au dernier moment, le connard qui a fouillé nos affaires décide de quand même monter. Hop, comme si on était pas déjà assez serré comme ça. Cette enflure, on l’appellera « Djibril Junior Gong Cissé ». Je sais plus trop pourquoi, mais c’est en rapport à Damian, le fils de Bob Marley et ce boulet de Djibril Cissé. Enfin bref, ce mec nous pètera les burnes jusqu’au bout. A un arrêt bouffe, il commence à peloter la serveuse, puis il se fait engueuler par tout le monde (comme d’hab’), alors il va pisser en travers de la route, se met à cracher partout et à vomir. Un taré, ce type. Notre chauffeur n’est pas mal non plus dans le genre. Un énorme connard, genre gros gorille, qui te regarde avec une super sale gueule et qui passe une seule musique locale en boucle, affreuse, crachée à donf par un baffle d’avant-guerre. L’horreur. Et on trace. A donf. De nuit, sans phares, ou presque. On doit bien rouler à 150
km/h en slalomant comme des malades entre les trous. Oh ? Un trou trop large pour être évité ? Allez ! On accélère et on se le prend à fond ! KA-BAM !!! Un choc monstrueux, à se demander comment le mini bus s’est pas pété en deux. Et on continue de foncer, serré comme des sardines. On voit toutes sortes de bestiaux traverser, terrorisés, devant nos phares faiblards : phacochères, singes, chiens, skons… enfants ? Putain, des gamins se jettent limite sous nos roues, le chauffeur ralentit pas d’un pet, gros gros stress et monstrueuses poussées d’adrénaline. Bon, à part ça, moi, je suis à la place du passager, à la fenêtre, ça va, il fait frais. Charles est juste derrière. Un moment il me demande : -Eh, il est où le moteur sur cette brêle ? -Juste sous toi… -Ah ! C’est pour ça, alors ! -Pour ça… quoi ? -Je sens la chaleur remonter à travers mes tongs. Un truc de malade ! Je suis mort de rire. Quelques minutes plus tard, Charles me sort : -Putain c’est un truc de ouf ! Mes tongs sont en train de fondre ! L’horreur ! Et j’ai un vent brûlant qui me remontre en travers des couilles et de la gueule ! J’vais crever ! Re-mort de rire. Moi, je suis dans le vent frais, ça va, c’est cool. Je me retourne et je vois Charles en train de fondre. Trop drôle. Encore Charles : -Rhâââ j’en peux plus ! Putain, je te jure, c’est limite si le plancher réémet pas la chaleur en rayonnant ! Je te jure, le sol commence à rougeoyer ! C’est un vrai sauna roulant ce truc ! Bon, ça y est, il commence à délirer, le pauvre. Mais jusque là, c’était la partie fun et folklo. Le reste sera moins drôle. Car ce con de chauffeur, en bon routier, n’a pas emmené d’essence de secours. Du coup, on doit attendre que les pompistes réouvrent. Ce sera à 6h du matin. Il est 2h. Putain 4 plombes à attendre. On se pose dans le village le plus ignoble de toute l’Afrique, et ce gros enculé se pose juste dans la mare de merde du village. Je l’aurai tué. Pas moyen de descendre sans patauger dans la merde. Putain, mais quel enfoiré, sérieux ! En plus, dehors, ça commencer à cailler sévère. Ce connard de chauffeur, lui, sait où loger et est parti dormir peinard. Nous, on reste là, comme des cons. Il y’a des vieillards dans le bus. Il pourrait y avoir une femme enceinte, ce sale con en aurait rien à branler. On remonte dans le bus, espérant pioncer un coup ! Mais le petit con d’apprenti du chauffeur a fermé toutes les portes pour pioncer peinard ! L’ENCULE !! Avec Charles, on tambourine pendant deux heures avant qu’il nous laisse entrer. Putain de nuit de merde. A 6h, on repart. Ce pédé de chauffeur revient, tout frais après avoir dormi, lui ! Et le voilà qui nous mets les chants islamiques à donf avec sa sono de merde. Putain, je l’aurai buté. Ca se dit religieux et ça fait des coups pareils aux gens ? Pauvre type !! Et il enchaîne sur sa musique locale. Au secooouuuurrsss !!!! On roule toute la journée. La chaleur est accablante. A chaque arrêt, je cours à un télécentre pour appeler la TAP et confirmer mon vol. Ces connards ne répondent toujours pas. Putain, je vais pas pouvoir rentrer ! Il est 20h, on est bloqué dans les embouteillages à cause des
inondations. On attend encore 2 plombes et puis on craque, on saute du bus après avoir récupéré nos sacs, on court sous la pluie battante, on franchit les digues de sacs de sables, on court avec de l’eau jusqu’aux genoux. La zone ultime. On chope un taxi. On arrive chez Joëlle. Enfin. Bilan : 28h de trajet pour 800 bornes. Soit… même pas 29 km/h de moyenne. Enfin, on est arrivé. Pas trop tôt, on est claqué.
Un "car rapide". Paye ton style :)
Très tôt le matin, je fonce à l’agence TAP. Evidemment, ces connards sont fermés, on est samedi. Le vigile m’apprend qu’ils étaient ouverts toute la semaine, mais qu’ils ne répondaient pas au téléphone. Pourquoi ? Il en sait rien ! Putain les raclures ! Mais comment je fais, moi ? Plein de clients sont dans mon cas, quelle bordel… Bon. J’appelle la TAP en France, espérant trouver quelqu’un : -Bonjour, c’est pour confirmer un vol. -Confirmer quoi ? -Un vol ! Vous êtes une compagnie de transports aériens, vous avez oublié ? -Ah, mais, monsieur, pas besoin ! Ca ne sert à rien de reconfirmer votre vol !
-Vous déconnez ? Ca fait 48 heures que je me fais un sang d’encre et que je lutte parce que votre agence à Dakar est incompétente au plus haut point et vous, vous me dites « pas besoin » ? -C’est cela, monsieur ! -Dans ce cas, peut-on m’expliquer pourquoi vous m’avez envoyé un mail comme quoi la confirmation était obligatoire ? Vous vous rendez compte du bordel que vous foutez ? Tout le monde flippe pour son vol, ici, je suis pas le seul. -Ah… Désolé, c’est un ancien mail qui n’a plus raison d’être. Veuillez dire aux autres qu’ils n’ont pas besoin de reconfirmer. -C’est vous qui n’avez pas lieu d’être. Au revoir. Putain, les rats. Enfin, au moins, j’aurai mon avion. Le lendemain matin, on part passer la journée à l’île des Madeleines, un parc naturel protégé. Une île magnifique au large de Dakar, loin de soucis de la veille. On y va en petite pirogue ultra rapide dans des creux de 4 mètres, on décolle comme c’est pas permis. Smiley kéblo. On longe l’île volcanique, manquant 2-3 fois de se faire éclater la tronche contre la paroi. Puis on rentre dans le cœur de l’île, effondré sous les eaux. Un superbe lagon, blindé de poissons. On chope nos masques et nos tubas, et c’est parti ! Des centaines de poissons multicolores, de la petite girelle à l’énorme poisson perroquet, en passant par une monstrueuse murène de 1.5m qui me regarde, entortillée sur son rocher, la gueule béante, les dents pourries proéminentes, avec une super sale gueule. Ok, j’ai compris, toi, faut pas te faire chier ! On continue à nager, on sort de l’île, on longe ses bords. Y’a des sacrées vagues. On descend, peinards, jusqu’à 10 mètres, on slalome entre les poissons et les oursins gros comme des ballons de football. Oh, des poissons chirurgiens. Et, là, deux énormes diodons. Un diodon, c’est un gros poisson plein d’épines avec un bec, et, dès qu’il flippe, pour faire peur à son agresseur, il se gonfle jusqu’à 10 fois sa taille. Et ce qui est trop bon, c’est que son corps gonfle, certes, mais pas ses nageoires. Du coup, après, il est là en train de lutter comme une bête pour essayer de se barrer, mais avec ses pauvres nageoires, il se traîne à 0.5 km/h et il a trop l’air con de chez con. Allez hop, session fun. Je lui fonce dessus, le coince, le touche. Mais pas de réaction. Bon, allez, hop, bourre-truffe, bourre-glotte. Toujours pas de réaction ! Putain, il suce ! Alors je lui sors le grand jeu et je lui fous un coup de pied « Bob Jakson » retourné dans la gueule. Matrix-style, quoi. Toujours pas de réaction. Putain l’enculé. Bon allez, plus d’air, il faut remonter. Je lâche des énormes bulles et je remonte avec elles en tournoyant, sous la surface nacrée de la mer qui ondule sévèrement. C’est trop beau. Je tends le bras, et, d’un cassage net et précis, je fends les grosses bulles grandes comme des assiettes de 30 cm en de multiples petites bubulles. C’est trop bon et trop beau. Maintenant, on fait le tour de l’île. On escalade des rochers gigantesques, jusqu’à 40 mètres au dessus de l’eau. Il y a tous un tas de lézards et des milliers d’oiseaux. Les vagues monstrueuses se vaporisent à grand bruit sur les falaises. A force, des grands trous ont été creusés, des canaux mêmes, les vagues s’y jettent, et au milieu des flux et reflux et des grosses bastonnades de vagues, il vaut mieux pas y être, mais le spectacle est grandiose. On monte encore. Charles veut s’approcher du bord, juste au dessus des vagues, 60 mètres en contrebas. Je luis dis de pas faire le con, la roche est hyper friable. Mais il le fait quand même. Moi, je flippe à mort et j’ai le vertige pour deux. Bon, allez, moi je redescends. Je fais quelques pas et j’entends un gros bruit de roche qui roule et Charles qui hurle !! Putain, le con !! Je me retourne et vois Charles, qui
redescendait aussi, qui me tombe en travers de la gueule après avoir roulé sur un rocher. J’essaie de le rattraper, mais pas moyen, le voilà en train de se gaufrer comme une merde et de se faire super mal contre les rochers. Je lui dis : -Putain, mais t’es vraiment con, hein ! J’ai trop flippé ! Et t’imagines si ça avait pété quand t’étais au bord ?! -Ok, Ok, c’est bon, j’arrête les conneries, dit-il en se relevant, tout boiteux. Enfin, bref, bonne journée. Il ne me reste plus qu’à acheter un cadeau pour maman, et moi je me paie trois baobabs bonzaï, c’est trop bon. Y’en a un qui a trop une forme de grosse teub de 30 cm : deux racines en formes de boules, un joli tronc, et un gland bien feuillu et turgescent. Je ramène aussi des clopes. Evidemment, comme un con, j’oublie mes clés et mes baobabs. Mais comme Charles rentre 24h après moi, il m’emmène tout ça. Et voilà.