Guide d’identification des
Guide d’identification des
par Romain Néron, agronome-botaniste, Herbier du Québec, Direction de la phytoprotection, Ministère de l’agriculture, des pêcheries et de l’alimentation du Québec (MAPAQ) Jean-Pierre Deland, agronome, Club environnemental et technique atocas Québec (CETAQ) Isabelle Drolet, agronome, CETAQ Jacques Painchaud, agronome, Direction régionale du Centre-du-Québec, MAPAQ
avec la collaboration de Sam Chauvette, agronome, Centre d’expertise et de transfert en agriculture biologique et de proximité (CETAB+)
Le réseau de partage des connaissances Réunissant plus de 500 membres experts et bien positionné dans le secteur agricole et agroalimentaire québécois, le CRAAQ est un chef de file en matière de réseautage, de production et de diffusion de contenus. Le CRAAQ offre à sa clientèle des ouvrages spécialisés, parmi lesquels des guides de production et d’identification, des trousses de démarrage et des fiches techniques. Son fonds d’édition compte plus de 250 publications issues des travaux de ses quelque 35 comités et commissions ou réalisées en partenariat avec les organisations du milieu. De par ses publications, ses nombreux services en ligne ainsi que ses colloques et autres évènements rassembleurs, le CRAAQ est sans contredit la plaque tournante du savoir agricole et agroalimentaire!
LE CENTRE DE RÉFÉRENCE EN AGRICULTURE ET AGROALIMENTAIRE DU QUÉBEC
CRAAQ.QC.CA
Avertissements Au moment de sa rédaction, l’information contenue dans le présent guide était jugée représentative du secteur de la canneberge au Québec. Son utilisation demeure sous l’entière responsabilité du lecteur.
Il est interdit de reproduire, imprimer, traduire ou adapter cet ouvrage, en totalité ou en partie, sous quelque forme ou par quelque procédé que ce soit, incluant la photocopie et la numérisation, sans l’autorisation écrite préalable du Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec.
Le Guide d’identification des Mauvaises herbes de la canneberge est distribué par le CRAAQ
Pour plus d’informations ou pour commander : Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec 418 523-5411 | 1 888 535-2537 | www.craaq.qc.ca | client@craaq.qc.ca
Imprimé au Québec PPTF0114 ISBN 978-2-7649-0246-2
Dépôt légal - Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2013 Dépôt légal - Bibliothèque et Archives Canada, 2013
5pYLVHXUV VFLHQWLÀTXHV Michelle Garneau, botaniste, Herbier Louis-Marie, Université Laval Caroline Turcotte, agronome, Direction régionale de l’Estrie, MAPAQ
Conception graphique Jérôme Harrisson-Gauvin, jeromehg.com
Remerciements France Allard, technicienne, CETAQ Claire Fecteau, technicienne, Herbier du Québec, Institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA) Kathleen Thibodeau, coordonnatrice activités et communications, Association des producteurs de canneberges du Québec (APCQ)
Nous remercions les producteurs qui nous ont permis de visiter leur ferme pour la prise des photos au cours de la réalisation du guide.
Ce guide a été réalisé grâce à une aide financière du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec dans le cadre du Programme de soutien au développement de l’agriculture biologique.
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Crédits photographiques Photographe : Romain Néron, MAPAQ Autres photographes : Sam Chauvette, CETAB+ : 21A, 28C, 28E, 29H, 29I, 31F, 37I, 43H, 46D, 47A, 47B, 51A, 51C, 55E, 55F, 60I, 63D, 65A, 65B, 65E, 69A, 70F, 70G, 71C, 73D, 74A, 74B, 75B, 76I, 78D, 81A, 82I, 86C, 91F, 91G, 93A, 93B, 93C, 93D, 94D, 95D, 102A, 103C, 105D, 109F, 109H, 118A, 118B, 118C, 118D, 118E, 119B, 119C, 119D, 121B, 121D, 124K, 125E, 128C, 128D, 129I, 133A, 137A, 138A, 138C, 138D, 140A, 140B, 145J, 158H, 167H, 177K, 179F, 179J, 182B, 182C, 182D, 185C, 187H, 187I, 191A, 191B, 191C, 191D, 194E, 205C, 205D, 206A, 209A, 209B, 209D, 220H, 216C, 217E, 217F, 217G, 217H, 221A, 221E, 221F, 225A, 225B, 225C, 225E. Normand Dignard, Ministère des ressources naturelles : 134G, 136E, 136F, 136G, 136H, 136I, 136J, 137B, 137G, 139E, 139F, 139G, 139H, 139I, 142E, 141F, 142G, 142H, 142I, 142J, 142K, 144F, 144G, 144H, 144I, 147E, 147F, 147G, 147H, 147I. Isabelle Drolet, CETAQ : 18A, 19A, 19B, 19C, 20A, 20B, 22A, 22B, 22C. Hilary Sandler, University of Massachusetts-Amherst, Cranberry Station : 213A, 213B, 213D, 214E, 214F, 214G, 215H.
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Avant-propos
Le Québec est la principale région de production de canneberges biologiques au monde. En 2012, près de 15 % des superficies cultivées en canneberges au Québec étaient sous régie biologique. L’un des principaux facteurs limitant le développement de cette production est le contrôle des mauvaises herbes. La compétition importante occasionnée par les mauvaises herbes en régie de culture biologique est souvent la cause des rendements inférieurs à ceux obtenus en production conventionnelle. La première étape pour élaborer une méthode de lutte efficace contre ces plantes nuisibles est l’identification précise des espèces rencontrées. L’élaboration du guide se base sur l’expérience acquise par les spécialistes du Club Environnemental et Technique Atocas Québec et du Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec. La collecte d'informations sur l’importance des espèces présentes dans les champs de canneberges sur le plan agronomique a été réalisée au cours des années. Le guide comprend une description des caractéristiques botaniques permettant l’identification des mauvaises herbes à plusieurs stades de croissance. Un sommaire des informations portant sur la biologie, le mode de propagation et les moyens de contrôle est aussi présenté. Les espèces jugées d’importance agronomique secondaire, c’est-à-dire peu nuisibles à la culture, sont présentées avec moins de détails. De nombreuses photographies illustrent les principales caractéristiques ainsi que le type d'infestation que cause la plante sur le terrain. Ce guide d'identification des mauvaises herbes comprend toutes les espèces problématiques présentes dans les plantations de canneberges. Il constitue un outil de référence utile pour tous les conseillers et les producteurs de canneberges du Québec, plus particulièrement ceux œuvrant en culture biologique. De plus, ce guide sera utile aux producteurs en leur permettant de mieux cibler leurs interventions en régie de culture et en leur fournissant les indications nécessaires pour utiliser judicieusement des moyens de contrôle pouvant aider à diminuer la quantité de mauvaises herbes dans le cadre de la lutte intégrée.
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Table des matières
Introduction 5
Avant-propos
9
Les mauvaises herbes dans la production de canneberges biologiques
10
Caractéristiques des groupes de plantes
13
Régie des mauvaises herbes en production biologique de canneberges
23
Mode d’emploi du guide
Plantes à feuilles larges, herbacées annuelles strictes 27
Bident feuillu
38
Molugo verticillé
28
Bident penché
40
30
Chénopode blanc
Renouée à feuilles de patience
31
Chénopode glauque
41
Renouée persicaire
32
Érechtite à feuilles d'épervière
42
Renouée poivre d'eau
44
Renouée sagittée
34
Herbe à poux
46
Renouée scabre
36
Impatiente du cap
47
Spargoute des champs
Plantes à feuilles larges, herbacées hivernantes ou vivaces 51
Achillée mille-feuille
77
Lobélie gonflée
52
Apocyn à feuilles d'androsème
78
Lotier corniculé
53
Aralie hispide
79
Lycope d'Amérique
55
Asclépiade de Syrie
81
Lycope à une fleur
56
Aster à ombelles
83
Lysimaque terrestre
57
Aster simple
85
Salicaire commune
59
Épilobe à feuilles étroites
86
Millepertuis de Fraser
61
Épilobe à feuilles très étroites
89
Millepertuis du Canada
63
Épilobe glanduleux
90
Millepertuis elliptique
65
Eupatoire maculée
93
Millepertuis majeur
66
Eupatoire perfoliée
94
Millepertuis nain
67
Fraisier des champs
95
Millepertuis commun
68
Framboisier sauvage
96
Onagre vivace
69
Gaillet palustre
97
Oxalide d’Europe
71
Gnaphale des vases
98
Penthorum faux-orpin
72
Immortelle
99
Petite oseille
73
Liondent d’automne
102 Pissenlit
74
Linaire du Canada
103 Plantain majeur
75
Liseron des haies
104 Potentille ansérine
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105 Potentille de Norvège
119 Trèfle blanc
106 Potentille simple
120 Trèfle jaune
108 Ronce des Alléghanys
121 Tussilage pas-d’âne
111 Ronce hispide 114 Rorippe d'Islande
122 Verge d'or à feuilles de graminée
115 Sanguisorbe du Canada
125 Verge d'or du Canada
116 Spergulaire rouge
126 Vergerette du Canada
118 Stellaire à feuilles de graminée
128 Vesce jargeau 130 Violette lancéolée
Plantes à feuilles larges, ligneuses 133 Bouleau à feuilles de peuplier
146 Peuplier faux-tremble
135 Bouleau blanc
148 Saule baumier
137 Cassandre caliculé
149 Saule de Bebb
138 Érable rouge
150 Saule discolore
140 Kalmia à feuille d'andromède
151 Spirée à larges feuilles
141 Peuplier à feuilles deltoïdes
152 Spirée tomenteuse
143 Peuplier baumier Plantes à feuilles étroites Graminées annuelles
189 Carex à long rhizome
157 Digitaire astringente
191 Carex blanchâtre
159 Digitaire sanguine
192 Carex de Crawford
160 Échinochloa pied-de-coq
193 Carex oligosperme
162 Panic capillaire
196 Carex verdâtre
Graminées vivaces
Scirpes
164 Agrostide blanche
197 Scirpe à ceinture noire
166 Agrostide scabre
198 Scirpe à nœuds rouges
169 Calamagrostide du Canada
199 Scirpe souchet
171 Chiendent
Joncs
173 Glycérie du Canada
201 Jonc brévicaudé
175 Léersie faux-riz
202 Jonc des crapauds
178 Muhlenbergie feuillée
203 Jonc épars
181 Panic laineux
205 Jonc filiforme
182 Pâturin annuel
206 Jonc grêle
183 Pâturin des prés
Autres
184 Pâturin palustre
207 Linaigrette dense
185 Roseau commun
208 Souchet hispide
Carex 188 Carex à balais
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Autres végétaux 213 Cuscute 216 Onoclée sensible 219 Prêle des champs 221 Quenouille à larges feuilles 222 Hépatique des fontaines 224 Mousse de spaigne 225 Polytrics Conclusion 226 Annexe 1 231 Bibliographie 232 Glossaire 234 Index
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Les mauvaises herbes dans la production de canneberges biologiques
Une mauvaise herbe se définit comme étant une plante qui pousse spontanément en un lieu donné dans une culture spécifique. Une foule d’espèces peuvent être considérées comme des mauvaises herbes, tout est question de contexte. Cependant, les mauvaises herbes les plus nuisibles sont celles qui sont les mieux adaptées au milieu mis en place pour chaque culture. Dans le cas de la production de canneberges, plusieurs espèces sont spécifiques, c’est-à-dire que l’on ne les trouve que dans cette culture. Ce sont des espèces qui ont un développement et des préférences biologiques semblables à ceux de la canneberge. Une bonne partie de ces plantes sont des espèces indigènes, communes dans les milieux où sont implantés les champs de canneberges. D’autres sont des mauvaises herbes communes en agriculture qui sont souvent introduites accidentellement. La présence de mauvaises herbes dans les bassins de culture de la canneberge constitue un problème inévitable auquel le producteur doit faire face. Ces plantes font compétition avec les plants de canneberges pour l’eau, la lumière, l’espace et les nutriments. Certaines peuvent aussi dévier ou décourager les pollinisateurs ou favoriser le développement d’insectes nuisibles. De plus, les mauvaises herbes aident à maintenir l’humidité dans les champs occasionnée par la pluie, l’irrigation ou la rosée et peuvent ainsi favoriser le développement de maladies. En outre, certaines mauvaises herbes peuvent causer des désagréments et un ralentissement des manœuvres lors de la récolte. Leur présence peut causer des pertes de rendement significatives. La première étape pour l’élaboration d’un programme de gestion efficace des mauvaises herbes est l’identification précise des espèces présentes dans les champs. Elle permet une meilleure évaluation du risque associé à l’infestation et elle aide à faire un choix judicieux de la méthode de contrôle à utiliser. De plus, l’identification de l’espèce aide à comprendre l’origine de la plante et dans bien des cas, à mettre en place des moyens de protection efficaces. Des conseils pratiques touchant la prévention, la gestion des champs et les méthodes de désherbage sont mentionnés. L’utilisation d’une combinaison de stratégies dans un programme de lutte contre les mauvaises herbes permet un meilleur contrôle. Finalement, la cartographie des infestations et leur suivi dans le temps permettent d’évaluer l’efficacité des méthodes de contrôle utilisées. Tout comme les plantes en culture, les mauvaises herbes ont leurs propres exigences pour leur établissement, leur croissance, leur reproduction, bref leur développement. Dans bien des cas, l’apparition de nouvelles espèces peut être un indicateur de problèmes structuraux dans les champs. À titre d’exemple, la présence de joncs ou de scirpes est une indication de mauvais drainage, la présence de gaillets ou d’impatientes est une indication d’un surplus d’eau, celle de plantains, un indice d’une compaction du sol, etc. La correction de ces problèmes structuraux est la première étape à envisager pour la répression de ces espèces. Optimiser les conditions de croissance améliorera la compétitivité de la canneberge.
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Caractéristiques des groupes de plantes
Les plantes se caractérisent par leur mode de reproduction et leur longévité. Elles se reproduisent à l’aide de graines (plantes à fleurs) ou de spores (par exemple, les fougères et les champignons). Les plantes à graines se divisent en deux groupes que l’on reconnaît par l’apparence de leurs feuilles, soit les plantes à feuilles étroites (monocotylédones) et les plantes à feuilles larges (dicotylédones). Les plantes sont soit annuelles, bisannuelles ou vivaces. Les plantes vivaces comprennent des plantes herbacées et des plantes ligneuses. La graine est la structure qui contient et protège l'embryon végétal. Elle provient de la transformation de l'ovule fécondé au centre d’une fleur. Elle est généralement renfermée dans un fruit. La graine protège l’embryon grâce à son enveloppe souvent durcie. Elle contient les réserves nécessaires au développement de la plantule. La graine permet la dissémination de la plante. La spore est un organe de reproduction qui est adapté à la dispersion et à la survie pendant de longues périodes dans des conditions défavorables. Les spores sont produites par des structures particulières, les sporanges (plantes dépourvues de fleurs). Les spores sont généralement unicellulaires, semblables à une poussière. Les fougères, les prèles, les hépatiques et les mousses sont des plantes produisant des spores. Les plantes à feuilles étroites sont pour la plupart des monocotylédones, c’est-à-dire des plantes à fleurs dont la graine n’a qu’un cotylédon (première feuille de la plantule). Ce groupe de plantes se caractérise aussi par l’apparence longue et étroite de ses feuilles dont les nervures sont plus ou moins parallèles. Ce groupe comprend les graminées, les carex, les scirpes et les joncs. Toutes ces plantes sont des herbacées. Les plantes à feuilles larges sont des dicotylédones, c’est-à-dire des plantes à fleurs dont la graine contient deux cotylédons (deux premières feuilles de la plantule). Ce groupe de plantes se caractérise aussi par l’apparence et la forme généralement élargie de ses feuilles dont les nervures peuvent être disposées comme les dents d’un peigne, de chaque côté de la nervure centrale, peuvent partir d’un même point comme un éventail ou être réticulées. Finalement, d’un point de vue pratique, les plantes à feuilles larges peuvent aussi être qualifiées de plantes herbacées ou de plantes ligneuses. Les plantes herbacées sont celles dont la partie supérieure se renouvelle chaque année ou celles dont les feuilles persistent et dont la tige n’est pas lignifiée. Les plantes ligneuses sont celles dont la partie supérieure persiste au fil des ans et dont la tige est de la nature du bois.
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CYCLE DE VIE Les plantes annuelles : elles réalisent leur cycle de vie complet (germination, floraison, production de semences et mort) en une seule année. Les plantes annuelles germent généralement au printemps et produisent des graines au cours de l’été ou de l’automne de la même année. La plante meurt après la production de graines. Dans certains cas, il arrive que la plante effectue son cycle biologique sur plus d’une année, elle est alors appelée une annuelle hivernante. Dans ce cas, la graine qui germe tard en saison produit une rosette de feuilles ou une pousse végétative qui persiste durant l’hiver et qui reprend vie la saison suivante pour fleurir et terminer son cycle vital. Les plantes annuelles se reproduisent uniquement par les graines. Elles ont la capacité de produire de grandes quantités de graines, leur permettant de se disséminer facilement. Plusieurs graines peuvent rester viables dans le sol pendant de nombreuses années et germent lorsque les conditions sont favorables. Présence des annuelles dans les plantations de canneberges : La majorité des mauvaises herbes annuelles nécessitent un sol meuble, beaucoup d’éléments nutritifs et de la lumière pour germer et pousser. Des infestations d’annuelles peuvent être problématiques, spécialement dans les nouvelles plantations et dans les parties dénudées des champs en production où elles concurrencent les boutures de canneberges. Elles peuvent provoquer des problèmes considérables en raison de leur croissance rapide. Si on ne les maîtrise pas efficacement, elles réduiront la qualité de l’implantation et de l’expansion des plants de canneberges et diminueront sensiblement le rendement du champ de canneberges pour les années suivantes. Les plantes annuelles ne sont généralement pas des mauvaises herbes problématiques dans les champs de canneberges bien établis. Les plantes bisannuelles : le cycle de vie complet (germination, floraison, production de semences et mort) s’accomplit en deux années. Les graines de ces plantes germent au printemps, produisent une rosette de feuilles et restent à l’état végétatif au cours du premier été. Elles hivernent sous forme de rosettes et au cours de la saison suivante, fleurissent et produisent des graines. La plante meurt à la fin de la deuxième saison de croissance. Comme les espèces annuelles, les plantes bisannuelles se reproduisent uniquement par les graines qu’elles produisent en grand nombre. Présence des plantes bisannuelles dans les plantations de canneberges : les mauvaises herbes bisannuelles sont peu fréquentes dans les champs de canneberges. Elles sont plus faciles à contrôler et moins compétitives que les plantes annuelles et les plantes vivaces. Les plantes vivaces : une plante vivace est une plante dont le développement et la floraison s’étendent sur plusieurs années. Ces plantes produisent habituellement des fleurs et des graines chaque année, tout en augmentant leur système végétatif de sorte qu’elles peuvent se propager efficacement par les deux moyens. On reconnaît plusieurs types de plantes dans ce groupe : les plantes cespiteuses, celles qui produisent des talles formant parfois des touffes, les plantes rhizomateuses (produisant des tiges souterraines plus ou moins enfouies : les rhizomes) et les plantes stolonifères (produisant des tiges rampantes à la surface du sol : les stolons). D’autres plantes vivaces peuvent aussi produire des tubercules ou des bulbilles qui se séparent du plant-mère et contribuent ainsi à leur dispersion et à leur propagation. De plus, les sections de rhizomes, de stolons ou de tiges peuvent aussi contribuer à la propagation. Certaines plantes vivaces combinent plusieurs modes de propagation.
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Présence des vivaces dans les plantations de canneberges : la grande majorité des mauvaises herbes présentes dans les champs de canneberges en production sont des plantes vivaces. Le développement végétatif des plantes vivaces est généralement assez lent suite à leur germination. Cependant, certaines espèces, particulièrement celles bien adaptées aux conditions de croissances de la canneberge, ont la capacité d’envahir un champ très rapidement. Ces plantes peuvent alors nuire de façon importante à la production de canneberges si un contrôle rigoureux n’est pas appliqué.
MOYENS DE DISSÉMINATION Les mauvaises herbes peuvent être introduites dans les champs de différentes façons : • Par les boutures : lorsque l’implantation de nouveaux champs se fait à partir de boutures contenant des graines ou des fragments de mauvaises herbes. • Par l’eau : l’un des vecteurs de dissémination des mauvaises herbes les plus importants dans la production de canneberges puisque l’eau circule d’un champ à l’autre lors de l’inondation des bassins de culture pendant la récolte ou pour la protection hivernale. • Par l’humain : plusieurs manipulations peuvent contribuer à la dispersion de graines ou de fragments végétatifs. Des opérations de régie de culture ou de récolte, réalisées à l’aide de machinerie passant d’un champ à l’autre, peuvent disséminer les graines de mauvaises herbes ou des fragments de celles-ci. Il est préférable que les entrées aux champs soient limitées. • Par le vent : facteur important de dissémination des graines, parfois sur une grande distance, voire même plusieurs dizaines de kilomètres (ex. : la vergerette du Canada). • Par les animaux : certaines graines ingurgitées par les animaux passent dans leur système digestif tout en demeurant viables. Elles peuvent ainsi être transportées en des lieux très éloignés (ex. : les oiseaux).
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Régie des mauvaises herbes en production biologique de canneberges CARACTÉRISTIQUES DE LA CULTURE La canneberge est une plante acidophile de la famille des éricacées (comme le bleuet) qui se développe dans des sols acides dont le pH se situe entre 4,0 et 5,0. Elle peut survivre dans des situations extrêmes, soit sous des conditions de grande sécheresse ou d’inondation. Morphologiquement, elle est constituée de deux parties distinctes : les stolons qui servent à la propagation végétative de la plante, et les tiges dressées qui portent les fleurs et les fruits et qui ont tendance à être productives seulement une année sur deux pour la majorité des variétés. Les tiges dressées alternent donc entre une année productive et une année végétative. Comme beaucoup de plantes à fleurs, le bourgeon floral de la canneberge se forme durant l’été et doit subir un traitement au froid pour pouvoir se développer. Les plants de canneberges prennent du temps à s’implanter. En général, le plein potentiel de production n’est atteint qu’à la cinquième année après leur implantation. Les premières années servent donc à l’établissement et à l’occupation de l’espace de production. Durant ces années, l’espace libre entre les plants peut être occupé par les mauvaises herbes, particulièrement les plantes annuelles. Rapidement, dès la deuxième ou troisième année d’implantation, la flore des plantes nuisibles se modifie en faveur des vivaces.
SOURCES DE CONTAMINATION ET PRÉVENTION Certaines pratiques agricoles propres à la production de canneberges ainsi que la végétation environnante du site de production peuvent favoriser la contamination des champs par les mauvaises herbes. Voici différents facteurs à considérer pour la prévenir : • La végétation en périphérie de la ferme – Éliminer la végétation envahissante en périphérie de la ferme (ex. : les épilobes). • La végétation sur les digues – Ensemencer les digues lors des travaux de consolidation avec des plantes non envahissantes pour la culture. – Bien entretenir la végétation sur les digues entourant les champs. • La composition des haies brise-vent – Choisir judicieusement les espèces composant les haies brise-vent (ex. : les peupliers, les saules et les bouleaux sont à éviter). • Le sol servant à la formation des bassins – Effectuer les travaux d’excavation avec soin afin de s’assurer que le lit de culture soit exempt de graines ou de fragments de plantes. • Les boutures – Éviter d’utiliser des boutures contaminées par des graines de mauvaises herbes ou des fragments de plantes lors d’une implantation. • Le sablage – Effectuer le sablage avec du sable dépourvu de graines ou de fragments de plantes.
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• La circulation de l’eau sur la ferme – Éliminer les graines de mauvaises herbes qui flottent en surface, suite à l’inondation des champs au moment de la récolte, avant le transfert de l’eau vers d’autres champs. MÉTHODES DE PRÉVENTION Il existe plusieurs méthodes de prévention qui peuvent être utilisées par les producteurs de canneberges afin de minimiser l’établissement de mauvaises herbes dans les champs. Les méthodes connues et actuellement recommandées sont énumérées au tableau 1, alors que les avenues de prévention à évaluer sont présentées au tableau 2. Les méthodes de prévention suggérées sont brièvement définies à la suite de chacun des tableaux.
Tableau 1 : Méthodes de prévention recommandées • Régie du sol pour la confection des bassins • Optimisation du drainage • Bonne gestion de l’irrigation lors de l’implantation • Gestion de l’eau de la récolte et élimination des résidus • Acidification du sol par le soufre • Entretien des digues des canaux et des plans d’eau • Nettoyage de l’équipement • Densité de plantation adéquate • Qualité et propreté des boutures • Maintien des plants vigoureux Régie du sol pour la confection des bassins Lors de la réalisation d’un nouveau champ, il importe d’enlever une épaisseur de 15 à 30 cm de terre de surface afin d’éliminer la végétation présente ainsi qu’une grande partie des graines, des rhizomes, des stolons et des tubercules. Si du sable doit être ajouté par la suite, il est préférable d’utiliser du sable excavé plutôt que du sable de surface qui peut contenir des organes de propagation de mauvaises herbes. Optimisation du drainage L’aménagement de fossés, une disposition et un nombre adéquat de drains souterrains et le maintien de la nappe d’eau à une bonne distance de la surface du sol peuvent minimiser l’incidence des mauvaises herbes. La majorité des mauvaises herbes problématiques dans la production de canneberges préfère les milieux humides. Leur croissance sera donc réduite si un drainage adéquat est effectué. Un bon drainage favorisera également la vigueur des plants de canneberges, leur compétitivité par rapport aux mauvaises herbes et leur permettra un établissement plus rapide.
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Bonne gestion de l’irrigation lors de l’implantation À mesure que les racines de canneberges se développent dans la partie supérieure du sol, la quantité d’eau utilisée lors des irrigations peut être graduellement diminuée pour forcer le développement racinaire. De cette façon, la partie supérieure du sol est maintenue plus sèche, rendant ainsi la germination des graines de mauvaises herbes plus difficile. Gestion de l’eau de récolte et élimination des résidus Plusieurs graines de mauvaises herbes peuvent être transportées par l’eau d’inondation lors de la récolte. Lorsque l’eau utilisée pour la récolte passe d’un champ à l’autre, il est préférable, quand la configuration des champs le permet, de commencer la récolte dans les champs les moins infestés de mauvaises herbes pour finir dans les champs les plus infestés. Cette bonne gestion de l’eau permettra de diminuer le transport de graines d’un champ à l’autre. Le retrait des débris flottants pendant et après la récolte permet d’éliminer les graines présentes dans ces rebuts. Les débris devraient être amenés à une distance d’au moins 400 mètres des champs puisqu’ils peuvent représenter une source d’infestation de mauvaises herbes occasionnée par le transport des graines par le vent. $FLGLÀFDWLRQ GX VRO SDU OH VRXIUH Contrairement à la plupart des mauvaises herbes, la canneberge est plus compétitive dans un sol acide (jusqu’à un pH 4). Le maintien d’un pH bas, favorable à la culture de la canneberge, découragera donc la croissance de plusieurs espèces indésirables, telles que les légumineuses qui sont sensibles aux valeurs de pH acides. Entretien des digues, des canaux et des plans d’eau Il est souhaitable d’engazonner les digues, les abords des canaux ainsi que des réservoirs avec des plantes qui ne représentent pas de risque d’infestation dans les bassins de canneberges. Ces plantes pourront faire de la compétition et ralentir l’implantation de mauvaises herbes plus problématiques sur ces lieux. Il est recommandé d’entretenir les digues, les abords des canaux et les contours des réservoirs en fauchant au moins deux fois par année, avant la production de graines. La végétalisation des contours de réservoir avec des espèces comme le myrique baumier et le saule hybride est avantageuse puisque ces plantes sont résistantes aux glaces qui ont tendance à éliminer d’autres espèces végétales peuplant le pourtour des réservoirs. Nettoyage de l’équipement Il est préférable de bien nettoyer l’équipement qui a été utilisé dans un champ infesté de mauvaises herbes afin d’éliminer les graines et les fragments de rhizomes ou de stolons et ainsi prévenir le transfert de mauvaises herbes dans les champs peu ou non contaminés. Densité de plantation adéquate L’utilisation d’une forte densité de boutures, de 4,5 à 9 tonnes métriques/ hectare (2 à 4 tonnes/acre) lors de la plantation et toute autre action favorisant une couverture rapide du champ par les plants de canneberges aidera au contrôle des mauvaises herbes.
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Qualité et propreté des boutures Les graines et les fragments de mauvaises herbes présents dans les boutures lors de l’implantation sont une source importante d’infestation de mauvaises herbes dans les nouveaux champs. C’est la principale source d’introduction de nouvelles mauvaises herbes sur un site. Il est préférable de s’assurer que les boutures proviennent d’un champ exempt de mauvaises herbes. Pour ce faire, il est recommandé de visiter le champ avant que les boutures ne soient prélevées. Le développement d’un système de certification des boutures, assurant l’absence de mauvaises herbes, serait souhaitable, particulièrement pour la production de canneberges biologiques. Maintien des plants vigoureux Des champs bien entretenus réduiront la propagation des mauvaises herbes. Une bonne régie, tant pour la fertilisation et la lutte contre les ravageurs (insectes et maladies) que pour l’irrigation (besoins en eau et protection contre la sécheresse et le gel) et le drainage, aide à obtenir des plants compétitifs et ralentit le développement des mauvaises herbes. La compaction du sol peut nuire à la santé des plants de canneberges et favoriser l’envahissement de certaines espèces de mauvaises herbes. Il est donc important de s’assurer d’avoir un sol suffisamment aéré. L’obtention d’un couvert végétal dense et uniforme de plants de canneberges crée un écran à la lumière limitant la croissance des mauvaises herbes. Il est recommandé de replanter rapidement les sections où le sol est dénudé pour empêcher l’établissement des mauvaises herbes.
Tableau 2 : Méthodes de prévention à évaluer • Nettoyage des boutures avant la plantation de nouveaux bassins • Usage de boutures en multicellules Nettoyage des boutures avant la plantation de nouveaux bassins Aucune méthode de nettoyage des boutures susceptibles d’être contaminées par des graines ou des fragments de mauvaises herbes n’a été testée jusqu’à présent. Le développement d’un tel équipement serait d’une grande utilité pour diminuer l’introduction de mauvaises herbes lors de l’implantation. Usage de boutures en multicellules Au Québec, la production de plants en multicellules a permis d’augmenter la disponibilité de certaines variétés. La culture in vitro permettant un développement exempt de toute contamination extérieure a été utilisée dans la province de Terre-Neuve. Les coûts de la production de plants en culture in vitro et de l’implantation de plants en multicellules sont toutefois plus élevés.
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DÉPISTAGE DES MAUVAISES HERBES Le dépistage des mauvaises herbes dans les champs de canneberges se fait de préférence à l’aide de la cartographie. Cette technique permet d’obtenir, pour un champ donné, la liste des espèces présentes et un portrait du degré d’infestation pour chacune des espèces d’importance principale. La cartographie est essentielle à la mise en place d’un véritable plan de gestion des mauvaises herbes. La cartographie d’un champ est présentée au producteur sous forme d’un tableau sur lequel sont inscrites les espèces présentes et leur abondance. Pour les infestations localisées, un schéma permet de préciser leur emplacement au champ. La cartographie peut être adaptée aux besoins du producteur. Elle doit au moins tenir compte des espèces à fort potentiel de nuisance. Les priorités de contrôle sont établies selon le potentiel de nuisance connu de la plante. Lorsqu’une nouvelle espèce est introduite sur un site, il peut devenir impératif de procéder à l’éradication de l’espèce avant sa propagation. La priorisation peut aussi tenir compte des problèmes particuliers d’un producteur et de son programme de gestion. Le potentiel de nuisance de chaque espèce est déterminé en considérant les quatre critères décrits plus bas. Un pointage de 8, 4, 2 ou 1 est attribué à chaque gradation décroissante d’un critère. Le total des points obtenus sert à déterminer le potentiel de nuisance de l’espèce : 4 à 7 points / potentiel faible, 8 à 15 points / potentiel moyen, 16 à 23 points/ potentiel élevé, 24 à 32 points / potentiel très élevé (voir le potentiel de nuisance des différentes espèces à l'annexe 1). Les critères utilisés pour déterminer le potentiel de nuisance sont les suivants : • L’impact de la mauvaise herbe sur les plants de canneberges : destruction des plants de canneberges (8) ; réduction de leur vigueur (4) ; diminution du rendement (2) ; peu d’effet (1). • Type biologique de la mauvaise herbe : plante vivace semblable à la canneberge, produisant des rhizomes ou des stolons inextricables (8) ; plante vivace ayant un port bien différent de la canneberge, produisant des rhizomes ou des stolons (4) ; plante vivace ou bisannuelle, formant une talle ou produisant peu de rhizomes ou de stolons (2) ; plante annuelle (1). • Capacité d'envahissement de la mauvaise herbe : forte production de stolons ou de rhizomes, propagation par les sections de plantes ou structures végétatives (bulbilles), par les graines (8) ; faible développement de stolons ou de rhizomes, propagation par les fragments de plantes, par les graines (4) ; propagation par les graines seulement, beaucoup de graines (2) ; par les graines seulement, peu de graines (1). • Difficulté de contrôle de la mauvaise herbe : résistante à l'acidité et aux inondations, difficile à arracher (8) ; résistante à l'acidité et aux inondations, facile à sarcler (4) ; sensible à l'acidité et aux inondations, difficile à sarcler (2) ; sensible à l'acidité et aux inondations, facile à arracher (1). Cette méthode est une adaptation de la charte de priorités développée au Massachusetts (Else et al. 1995).
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MOYENS DE LUTTE BIOLOGIQUE Les techniques de répression des mauvaises herbes sont peu nombreuses en production biologique de canneberges. Les pratiques de prévention demeurent le moyen de contrôle le plus efficace. Aucun herbicide biologique n’est actuellement homologué pour la production de canneberges. Puisque la canneberge est une plante pérenne, qui finit par couvrir complètement la surface des champs, il est impossible d’envisager des systèmes de rotation des cultures pour le contrôle des mauvaises herbes ou l’utilisation de barrières physiques (paillis végétal, paillis de plastique), d’engrais vert et de sarcloirs. Les moyens de lutte utilisés contre les mauvaises herbes en production de canneberges biologiques sont présentés au tableau 3. Des pratiques non encore éprouvées, mais qui constituent à notre avis des pistes de solution à évaluer pour faciliter la répression des mauvaises herbes sont présentées au tableau 4. Les moyens de lutte suggérés sont brièvement définis à la suite de chacun des tableaux.
Tableau 3 : Moyens de lutte biologique recommandés • Sarclage manuel (au printemps, en été ou à l’automne après la récolte) • Fauchage de la partie aérienne avant la production de graines • Sablage • Combinaison du fauchage et du sablage • Traitement thermique à l’aide de brûleurs
Sarclage manuel Le sarclage à la main est la principale technique de lutte contre les mauvaises herbes dans la production biologique de canneberges. Elle peut être utilisée pour contrôler les mauvaises herbes annuelles, présentes en grand nombre au moment de l’implantation, ou pour contrôler les mauvaises herbes vivaces. Pour ces dernières, il est important d’arracher du sol tous les organes souterrains tels que les rhizomes, les tubercules, etc. L’arrachage de ces organes est plus facile lorsque le sol est humide. L’éradication des mauvaises herbes est également plus facile lorsqu’elles sont au stade de plantule. Sarclage manuel lors de l’implantation.
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Sarclage manuel sur rampe dans un champ en présence de fruits.
Pour les mauvaises herbes ligneuses telles que les petits arbres, les producteurs utilisent généralement différents types de crochets pour les aider à arracher le plant et ses racines. Le sarclage manuel de ces jeunes arbres semble être considérablement facilité lorsqu’il est effectué suite à l’inondation pour la récolte. Les conditions du sol rendent alors cette opération beaucoup plus facile. Sarclage au printemps : éliminer les mauvaises herbes présentes en début de saison telles que les joncs, les carex, les scirpes et les autres espèces dont le feuillage est persisSarclage d'un jeune arbe après la récolte. tant. L’arrachage à la main des petits arbres peut également être fait au printemps et au début de l’été lorsque leur densité le justifie. Sarclage en été : cette technique est principalement utilisée au moment de l’implantation. Les mauvaises herbes annuelles peuvent être éliminées de cette façon. Le sarclage d’été s’effectue également dans les champs en production à l’aide d’une passerelle, afin d’éviter le piétinement des plants de canneberges au moment de la floraison, de la nouaison ou de la fructification. Pour certaines mauvaises herbes vivaces comme la verge d’or à feuilles de graminée et l’asclépiade de Syrie, il est préférable d’effectuer l’arrachage au début de leur floraison, avant qu’elles commencent à reconstituer leurs réserves racinaires. Sarclage à l’automne : les jeunes arbres, les petits arbustes et les ronces sont facilement arrachés après la récolte alors que le sol est pratiquement saturé d’eau. Fauchage de la partie aérienne avant la production de graines Dans les champs en implantation fortement infestés de mauvaises herbes, le fauchage et la récolte mécanisés des inflorescences de mauvaises herbes dépassant les plants de canneberges est une méthode de contrôle efficace. Le fauchage est réalisé avant la maturation des graines et au moment où les réserves nutritives de la mauvaise herbe sont au niveau le plus bas. Le fait de
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couper la partie aérienne à ce stade stimule la plante à émettre de nouveaux organes aériens et diminue fortement les réserves nutritives de la plante. Dans les champs en production, le fauchage doit être réalisé manuellement, de préférence à l’aide d’une rampe. En éliminant la partie supérieure des mauvaises herbes, le fauchage diminue l’enchevêtrement des tiges dans la récolteuse et les risques d’endommager les fruits et les plants de canneberges lors de la récolte. Il est recommandé de détruire les inflorescences fauchées et récoltées.
Fauchage et récolte des mauvaises herbes dans un champ en implantation
Sablage L’application de sable sur les champs à tous les 3-4 ans permet d’améliorer la vigueur des plants de canneberges et de réduire le développement de certaines mauvaises herbes telles que l’agrostide scabre et certaines espèces annuelles comme les digitaires. De plus, des études américaines montrent qu’une application homogène d’au moins 2,5 cm de sable permet la répression de la cuscute. Combinaison du fauchage et du sablage Dans des jeunes champs de canneberges fortement infestés de mauvaises herbes, la combinaison du fauchage de la partie aérienne des mauvaises herbes tel que défini ci-haut, avec un sablage durant l’hiver, peut aider à réduire l’impact de certaines espèces de mauvaises herbes au champ. Lorsque le fauchage mécanisé est combiné à un recouvrement par une bonne couche · 20 ·
de sable au printemps suivant, l’épuisement de la plante est encore plus important. Une série de ces traitements consécutifs finit par épuiser la mauvaise herbe tout en favorisant le développement de la canneberge.
Sablage en hiver
Traitement thermique à l’aide de brûleurs Trois types de brûleur ont été expérimentés pour la répression des mauvaises herbes difficiles à contrôler dans la production de canneberges biologiques comme les ronces (Rubus sp.) et les joncs (Juncus sp.). Les brûleurs testés sont : le brûleur à flamme vive, à infrarouge et à infrarouge avec éperon. Ces brûleurs ont tous eu un effet répresseur sur les joncs, notamment lorsque l’exposition était prolongée (6 à 9 secondes avec le brûleur à flamme vive) mais ont été inefficaces sur les ronces. En incluant le coût du traitement dans l’évaluation, le brûleur à flamme vive semble être le plus avantageux. Le coût des traitements localisés avec des herbicides en production conventionnelle est comparable à celui du brûleur à flamme vive dans la production biologique (Sandler, 2011).
Tableau 4 : Moyens de lutte biologique à évaluer • Traitement localisé au vinaigre • Traitement localisé à l’eau chaude Traitement localisé au vinaigre Des essais expérimentaux ont démontré l’efficacité du vinaigre blanc (12 %) pour lutter contre certaines mauvaises herbes vivaces. Il doit être appliqué de manière localisée, dans le sol près du collet des plants de mauvaises herbes, à l’aide d’un injecteur spécifiquement conçu pour cet usage. L’acidité du vinaigre provoque un brûlement des racines des mauvaises herbes traitées. Ce produit est efficace pour lutter contre les plantes vivaces ayant une forme de croissance en talles ou touffes compactes, de la famille des graminées, des cypéracées (scirpe et carex) et des joncacées. Il est peu efficace pour les plantes à longs rhizomes ou stolonifères. Le vinaigre n’a pas encore été homologué et cette homologation est nécessaire pour l’utilisation légale de la technique. Vérifier avec votre agronome les développements quant à l’homologation de ce produit.
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Traitement localisé à l’eau chaude Des traitements localisés à l’eau chaude ont été utilisés pour la première fois au cours de la saison 2010. Cette technique consiste à injecter de l’eau à une température près du point d’ébullition au niveau du système racinaire des mauvaises herbes. Elle semble donner de bons résultats pour la répression de certaines espèces de plantes herbacées vivaces (ex : ronces). Des essais supplémentaires s’avèrent nécessaires afin de mieux évaluer son efficacité sur différentes espèces.
Injection d’eau chaude à la base des plants de ronces
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Mode d’emploi du guide
REGROUPEMENT DES ESPÈCES D'un point de vue pratique, les plantes peuvent être classées en deux groupes: les plantes à feuilles larges et les plantes à feuilles étroites. Elles peuvent également être classifiées selon leur cycle de vie: annuelle, bisannuelle ou vivace. Les plantes à feuilles larges sont soit des plantes herbacées, soit des plantes ligneuses. Finalement d'autres espèces ayant un développement particulier sont groupées sous «Autres végétaux ». Les mauvaises herbes présentées dans ce guide sont classifiées en plusieurs groupes, sur la base de leurs caractéristiques morphologiques : • Plantes à feuilles larges herbacées annuelles strictes • Plantes à feuilles larges herbacées hivernantes ou vivaces • Plantes à feuilles larges ligneuses • Plantes à feuilles étroites – Graminées annuelles – Graminées vivaces – Carex – Scirpes – Joncs – Linaigrette et souchet • Autres végétaux – Cuscute – Onoclée, prêle et quenouille – Hépatique et mousses INFORMATIONS RELATIVES AUX ESPÈCES En général, les espèces sont présentées sur deux pages. La première montre la plante adulte et les caractéristiques permettant son identification, la deuxième, les particularités des stades végétatifs et des plantules. De plus, pour la majorité des espèces, une photo illustre le type d’infestation que peut causer la plante dans un champ de canneberges. Les espèces les plus nuisibles sont décrites sur trois ou quatre pages alors que les espèces occasionnelles ou de moindre importance sont présentées sur une page. Pour chaque espèce, l’information suivante a été répertoriée : ,GHQWLÀFDWLRQ nom français, nom anglais, nom latin, famille botanique Potentiel de nuisance :
faible
moyen
élevé
très élevé
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Description botanique : port de la plante, caractéristiques des tiges, des feuilles, des fleurs, des fruits et description sommaire des plantules. Pour certaines espèces, des informations supplémentaires sont présentées sous l’item « Particularité » : caractère botanique complémentaire, souvent au regard de la propagation ; sous l’item « Note » : information d’ordre biologique et sous l’item « Commentaire » : information se rapportant à une autre espèce. Conditions de croissance favorables : caractéristiques du milieu favorisant le développement de la plante. Prévention et répression : interventions à faire pour éviter l’introduction et la propagation de la plante dans les champs. Les méthodes de contrôle connues sont présentées. Dans certains cas, des modifications à apporter à la régie des champs sont suggérées.
COMMENT FAIRE UNE BONNE IDENTIFICATION Pour réaliser l’identification d’une plante, la première étape est de faire une bonne observation de celle-ci pour l’associer à un des groupes de plantes décrit plus haut. L’observation de la tige, de la forme des feuilles et des caractéristiques végétatives (présence de stolons, de rhizomes, de rosettes de feuilles), permettra de la classifier parmi les plantes herbacées ou les plantes ligneuses, parmi les plantes à feuilles étroites ou à feuilles larges et parmi les plantes vivaces ou annuelles. Par la suite, il faut comparer le spécimen à chacune des espèces présentées dans le groupe correspondant. Il importe d’accorder une attention particulière à la forme et à la disposition des feuilles, aux caractéristiques de la tige et des fleurs ou encore des fruits, si présents. Il faut aussi comparer l’allure générale de la plante. Dans certains cas, l’observation des organes de propagation végétatifs (stolons ou rhizomes) aide à identifier l’espèce. L’observation attentive du site permet de sélectionner les individus les plus faciles à identifier (en général ceux portant des fleurs). Dans certains cas, particulièrement pour les plantules, il est possible de retrouver les plants mères qui, même desséchés, sont souvent très utiles à l’identification.
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Plantes à feuilles larges, herbacées annuelles strictes
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Plan Pl ante t s à fe te f ui uill lles ll es large es es, s her e ba bacé cé cée ées es annuelles strictes
Bident feuillu Devil’s beggarticks — Bidens frondosa Astéracées
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C
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A. Plant en début floraison. B. Fleur : capitule et bractées. C. Feuille type. D. Plantule. E. Base d’un plant et racines.
Espèce indigène. Plante annuelle. Floraison estivale. Description botanique : tige dressée, 60 à 100 cm de hauteur, plante entièrement glabre. Feuilles opposées, composées de 5 folioles à marge dentée. Fleurs jaunes réunies en capitule dépourvu de rayons ; 4 à 8 bractées (fausses feuilles) sous-tendent chaque capitule. Fruit, un achène (graine) aplati muni de crochets. Conditions de croissance favorables : cette plante est bien adaptée aux milieux humides et tolère les milieux régulièrement asséchés. Elle colonise différents types de sol incluant les sols organiques. Prévention et répression : sarcler les plants avant la formation de graines. Nettoyer les abords des champs et des canaux d’inondation.
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Bident penché Nodding beggarticks — Bidens cernua Astéracées
A
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C
E
A. Colonie en champ. B. Pubescence de la tige et base des feuilles. C. Feuille type. D. Fleurs : capitule pourvu de rayons. E. Feuilles opposées sur la tige.
Espèce indigène. Plante annuelle. Floraison estivale. Description botanique : tige dressée, 30 à 80 cm de hauteur, couverte de longs poils raides ; souvent rougeâtre. Feuilles opposées, très allongées, à marge dentée ; elles peuvent être soudées par la base autour des nœuds de la tige. Fleurs jaunes, réunies en capitule de grande taille (jusqu'à 4 ou 5 cm de diamètre), comportant généralement 8 rayons (parfois sans rayons) ; de grandes bractées vertes ressemblant à des feuilles étroites sont étalées sous les capitules. Plantule munie de cotylédons de forme allongée. Particularité : les capitules sont penchés à maturité.
Conditions de croissance favorables : cette plante est bien adaptée aux milieux humides. On la trouve souvent dans les fossés en bordure des champs. Elle colonise différents types de sol incluant les sols organiques. Prévention et répression : sarcler les plants avant la formation de semences. Nettoyer les abords des champs et des canaux d’inondation.
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F-G. Plantule. H. Plantule complète. I. Colonie en bordure d’un champ. J. Infestation.
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