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Association féministe martiniquaise

Mars 2016 -N°4

EDITO

Ce numéro spécial 8 mars est consacré au féminisme. Mais qu’est-ce que le féminisme ? Si cette appellation date du XIXe siècle, on peut considérer que féminisme il y a eu dès lors qu’un groupe de femmes a réclamé l’égalité de traitement avec les hommes. Ainsi, de l’astrophysicienne Hypathie, en 370 après JC, à Angelas Davis, dans les années 60, à la Nigérianne Chimamanda Adichie, de nos jours, le féminisme adopte maints visages et formes, mais exige toujours la même chose : l’égalité politique, sociale et économique entre les êtres humains, quel que soit leur sexe. Une égalité qui loin d’être acquise – les femmes sont toujours, ici et ailleurs, plus pauvres, plus opprimées, plus tuées que les hommes – est même menacée : le droit à l’avortement, voire à la contraception remis en cause… Le féminisme c’est aussi une façon de vivre. Alors être féministe, ça change quoi dans ma vie quotidienne ? 3 femmes nous ont répondu. Le féminisme, c’est un projet politique qui concerne aussi le plus grand défi du XXIe siècle : sauver notre planète grâce à un développement durable, solidaire et égalitaire entre le Nord et le Sud, mais aussi et avant tout, entre les femmes et les hommes.

Samedi 5 Mars 8h-12h :

Rue Piétonne à Fort-de-France, Luttes et droits des femmes Le féminisme, c’est un engagement. Nous le rappelons dans Avec Culture Egalité ces pages en évoquant la mémoire de deux grandes figures du féminisme martiniquais, Jane Léro qui aurait eu 100 ans et d’autres associations de défense des droits humains, Aides Martinique - Kap caraïbes – Konbit : cette année et Yvette Mauvois qui nous a quitté.e.s en décembre. 10h, temps fort : prestation du Théâtre de l’Opprimé avec Konbit « Nous devrions tous et toutes être des féministes », clame l’écrivaine nigérianne, Chimamanda Adichie. A Culture de 9h à 13h : À l’Espace Camille Darsières, Egalité, nous le pensons aussi. projection de notre documentaire : Suzanne Roussi, Césaire, un femme sur tous les fronts Les militantes de Culture Egalité Venez nous connaître. venez discuter avec nous. ---------Émission de télévision FANM OUVÈ ZIÉ’W Tous les 4ème mercredis de chaque mois, sur ZOUK TV : Prochain RDV : Mercredi 23 Mars à 22H Rediffusion le lundi à 15h --------Carbet le 9 avril 2016 à 17h au Garage Popular, 121 rue Lamartine à Fort de France. Soirée de réflexion, formation, d’échanges entre femmes sur le thème : « Les femmes viennent-elles de Vénus et les hommes, de Mars ?»


Etre féministe, ça change quoi dans la vie 3 Témoignages « Le féminisme c’est une manière de vivre individuellement et de lutter collectivement » disait Simone de Beauvoir. L’impact des luttes collectives des femmes se voit dans notre législation (droit de vote, avortement…), mais à l’échelon individuel, être féministe qu’est-ce que ça change ? Dans nos relations amoureuses, dans notre travail, au sein de notre famille ? Quelques témoignages.

• Mimi, 29 ans, vendeuse en prêt-à-porter. « Je pense que je suis devenue féministe le jour où je me suis détachée du besoin de plaire pour réfléchir à ce qui me rendait vraiment heureuse. Au lieu de m’escrimer à vouloir absolument être en couple, j’ai compris que pour l’instant, j’ai envie de vivre pour moi, sans mari et sans enfants. Je veux m’amuser, voyager, reprendre des études. Et maintenant, je le fais, même si, autour de moi, ma famille et mes amis s’inquiètent.

• « En devenant féministe, j’ai compris que je devais m’assumer financièrement et du coup, mes rapports avec mon compagnon sont plus libres », explique Magali, 38 ans, infirmière libérale. « Avant, j’attendais d’un homme qu’il gagne de l’argent – plus que moi – et qu’il soit ambitieux. Avec le père de mes enfants, ça n’allait pas. Ambulancier, il se satisfaisait d’un petit salaire et sans me consulter, il s’était mis en ¾ temps le mercredi après-midi, pour s’occuper des enfants. Pourtant, c’était toujours moi qui me tapais le ménage et les courses ! Je gagnais presque trois fois plus d’argent que lui et ma famille me poussait à quitter ce profitè... Devenir féministe m’a permis de sortir du modèle traditionnel et d’accepter que c’était moi qui avais de l’ambition et pas lui. J’aime mon compagnon, c’est un bon père et un mari attentionné. J’ai discuté avec lui pour un partage plus équitable des tâches ménagères. C’est difficile, mais on y arrive tout doucement. »

• Ludivine, 20 ans, étudiante. « J’ai compris que la jalousie, ce n’est pas une preuve d’amour. Quand mon copain me faisait une scène pour que je change de tenue avant de sortir ou parce que je parlais avec un autre garçon, je me sentais aimée. Et moi, je faisais pareil avec lui. Maintenant, j’ai changé. Je m’habille comme je veux, je parle avec qui je veux. Je veux une relation basée sur la confiance et le respect mutuel. Mon copain n’a pas compris ça et on a cassé. Tout le monde me désapprouve, mais moi je sais ce qu’il me faut. Si la personne en face ne comprend pas, c’est qu’il ne me convient pas ». Propos recueillis par Géraldine de Thoré, pour Culture Egalité

Le féminisme – Quelques idées reçues Le féminisme, c’est un mouvement qui veut donner le pouvoir aux femmes. Non, le féminisme souhaite l’égalité entre les deux sexes. Nous militons pour que les femmes aient droit aux mêmes chances que la moitié masculine de l’humanité. A ce jour, ce n’est pas le cas. Le féminisme ne concerne que les femmes. Le féminisme est un projet politique qui vise à construire une société plus juste, plus solidaire, plus humaine où tous les êtres humains, quelle que soit leur ethnie ou leur sexe, puissent vivre dans la dignité. Nous refusons qu’il y ait domination des hommes sur les femmes, mais aussi des pays du Nord sur ceux du Sud, des riches sur les pauvres… C’est donc un projet qui touche à l’économie, la politique, l’écologie, l’école, la santé… Il concerne tous les humains et pas seulement les femmes.

Les féministes pensent qu’un homme et une femme, c’est pareil. Oui et non. Oui, parce que nous pensons qu’il est juste qu’une société offre le même traitement à tous ses membres, quel que soit leur sexe. En ce sens, et d’un point de vue social, politique, économique, les femmes et les hommes devraient être pareil-le-s. Ce n’est pas encore le cas, mais nous luttons pour cela. Par contre, il est indéniable que les hommes et les femmes sont physiquement, différents …tout comme les noirs sont différents des blancs, les gros, des maigres, les roux, des bruns, etc. Vouloir l’égalité, ce n’est pas souhaiter abolir les différences, c’est veiller à ce que ces différences, quelle que soit leur nature, soient une richesse et non la justification d’une oppression. Les militantes de Culture Egalité


Engagées pour un développement durable

ES OU SAV ? 1- Qu’ont écrit les Françaises Théroigne de Méricourt et Olympe de Gouges en 1791 ? □ Le Manifeste du féminisme □ La Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne □ Etre une femme.

Des femmes, agricultrices, consommatrices, citoyennes, se mobilisent pour un projet alliant développement durable et égalité des sexes. Le climat se réchauffe et les conséquences sont désastreuses à court terme et mortelles à long terme. Pourquoi, les femmes seraient-elles plus concernées que les hommes ? D’abord parce que, dans les pays en voie de développement – ceux qui sont les plus frappés par les désastres climatiques – les femmes sont souvent plus nombreuses à travailler la terre que les hommes (60 à 80% des aliments consommés au sein des familles sont produits par les femmes) et pourtant ne sont pas propriétaires de la terre et/ou n’ont pas accès aux marchés. Comme l’explique Sophie Charlier, du Monde selon les Femmes « Les femmes vont s’occuper des chèvres, les nourrir, les soigner, récolter le lait. Mais ce sont les hommes qui commercialisent le produit, et empochent les bénéfices».

2- Comment s’appelait le mouvement féminin né au XIXe siècle, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, luttant pour le droit de vote des femmes ? □ Les suffragettes □ Les chiennes de garde □ Les voteuses 3-Quand la France a-t-elle instauré le caractère officiel de la célébration de la journée des droits des femmes ? □ En 1945 □ En 1956 □ En 1982 4- « On ne naît pas femme, on le devient » : qui est l’auteure de cette phrase?

□ Rosa Luxemburg Pour l’écoféministe indienne Vandana Shiva, si « il est impé- □ George Sand ratif que les énergies fossiles restent dans les sols, il est aus- □ Simone de Beauvoir si impératif que nous dépassions les structures patriarcales et 5-En France, une femme a toujours pu travailler sans bornées qui définissent notre économie, notre science et notre l’autorisation de son mari : société. » Car être une femme, pauvre, de couleur, dans le milieu rural, c’est être « l’opprimée » de la grande marche de □ Vrai la mondialisation. Vandana Shiva s’attaque ainsi au géant de □ Faux l’agrochimie Monsanto et défend depuis plus de 30 ans une agriculture respectueuse de la terre, des humains et des femmes 6- Depuis 1958, en France, avec la 5éme République, agricultrices, car c’est de cela qu’il s’agit dans les discussions combien de femmes ont été première ministre ? autour du climat. □1 □5 Mais les femmes ont aussi un impact important sur la consom- □ 7 mation car elles sont souvent les prescriptrices d’achats au sein de la famille. Consommer à tout va, jeter, tout cela est une 7-Une loi en matière d’égalité hommes/femmes a été source de pollution importante. adoptée le 23 mars 2006 par le Parlement. Le thème en Alors que pouvons-nous faire ici, en Martinique, pour laisser est : une île propre et encore plus belle à nos enfants ? □ Le droit pour les femmes de travailler sans l’autorisaConsommer moins. Avons-nous vraiment besoin de tout ce qui tion de leur mari encombre nos placards et tiroirs ? Certainement pas. En ache- □ Le droit pour les femmes de travailler dans les métiers bâtiment tant moins, nous jetons moins, nous créons moins de déchets du □ L’égalité salariale qui défigurent la Martinique. 8/ Il existe un texte de loi stipulant la féminisation des Consommer différemment. Il existe en Martinique un en- noms de métiers, des fonctions, des grades et des titres. semble de petit-e-s producteurs et productrices qui proposent Ex ; maçon, maçonne/auteur auteure… aux consommateur-trice-s des produits beaucoup moins chers qu’en grande surface. Un exemple parmi d’autres, les paniers □ Vrai de Marlène grâce auxquels, pour 20 euros, vous pouvez nourrir □ faux 2 adultes et deux enfants de légumes et de fruits locaux et bio des femmes et pendant une semaine. Retrouvez les coordonnées de Marlène, 9-La loi tendant à favoriser l’égal accès et aux fonctions électoraux mandats aux hommes des ainsi que des trucs, astuces et adresses pour consommer diffé- électives dite « loi sur la parité » a été votée : remment sur notre page Facebook. □ Le 6 juin 2000 S’engager. Dans le monde, de nombreux groupes de femmes □ Le 6 juin 1981 ont pour objectif de réduire notre impact sur l’environnement □ Le 6 juin 2002 en adoptant des modes de vie plus sobres, plus solidaires, plus conviviaux et en consommant avec plus de bon sens. Rejoi- 10/ Elle a participé à la revue Tropiques avec notamment Aimé Césaire, René Ménil… il s’agit de : gnez-les. □ Suzanne Roussi Césaire □ Jane LERO Sylvie Javaloyes, pour Culture Égalité □ Yvette Mauvois


Des femmes d’engagement !

Jane Léro aurait eu 100 ans le 8 février 2016 Yvette Guitteaud Mauvois est morte à 93 ans le 25 décembre 2016 Qui étaient ces femmes ? Jane Léro et Yvette Mauvois sont des pionnières du mouvement féministe en Martinique et incarnent l’idée d’engagement. Jane Apolinaire Léro est née le 8 février 1916, en pleine guerre mondiale, dans une famille de petits commerçants lamentinois. Cinquième d’une famille de 8 enfants, elle fait ses études au Pensionnat Colonial de jeunes filles, à Fort de France. Elève très douée, elle ne partira pas en France pour ses études supérieures, alors que ses deux frères, eux, auront cette chance. Cette injustice, qu’elle reçoit comme une gifle, va être à l’origine de sa prise de conscience : parce qu’elle est une femme, elle n’a pas eu droit aux mêmes opportunités, au même traitement qu’un homme. Le 11 juin 1944, on retrouve Jane, âgée de 26 ans, à la tête d’un groupe de femmes de sensibilité communiste, appelant à la création de l’Union des Femmes de la Martinique. Elle en sera la présidente jusqu’à son départ en France, en 1949, pour poursuivre ses études d’assistante sociale. Elle créera les comités de l’Ermitage et des Terres Sainville – des quartiers populaires de Fort-de-France. Elle meurt tragiquement le 17 Juillet 1961.

Yvette Mauvois

Jane Léro

Yvette Mauvois est née le 26 août 1922 à Fort-de-France. En 1945, elle rejoint l’Union des Femmes de la Martinique, après le discours de la jeunesse au théâtre municipal de Fort-de-France, le 25 mars 1945. On est à deux mois des élections municipales où les femmes votent pour la première fois. L’arrivée, dans cet immédiat après-guerre, d’Yvette Mauvois, de Jane Léro, de Solange Fitt Duval ou de mesdames de Montaigne et Eugène redonne un second souffle à l’UFM. En petits groupes de 3 à 5 femmes, elles font du porte à porte pour exhorter les femmes à exercer avec discernement le droit de vote nouvellement acquis, c’est à dire à ne pas suivre sans réflexions les injonctions des prêtres et des journaux de droite… Yvette Mauvois participera également à la création des premières crèches, organisera les premières consultations de PMI (Protection Maternelle Infantile). Ces deux militantes féministes ont enraciné leur engagement dans les luttes pour les droits des femmes, mais ont aussi soutenu les combats quotidiens du petit peuple pour sa survie, les luttes syndicales. Jane Léro et Yvette Guitteaud Mauvois doivent rester des exemples, qui éclairent et guident nos luttes féministes, pour l’émancipation totale des femmes de la Martinique et du monde.

George Arnauld, pour Culture Égalité

REPONSES AU JEU 1.La Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne Toutes deux proches des Girondins, elles connurent une fin tragique, Théroigne de Méricourt devenant folle après avoir été fouettée nue par des partisanes de leurs adversaires et Olympe de Gouge étant décapitée. 2.Les suffragettes Le mouvement des “suffragettes” a été fondé en 1903 par Emeline Pankhurst et sa fille Christabel. A travers ce mouvement violent et politique, elles ont posé, parfois de manière tragique, la question des Droits civiques des femmes dans la société occidentale. 3.1982 Si les Nations Unies ont commencé à observer la Journée internationale des droits des femmes le 8 mars 1975, ce n’est qu’en 1982 que le gouvernement français sous Mitterrand instaure le caractère officiel de cette journée. 4.Simone de Beauvoir Simone de Beauvoir a soulevé la question de la condition féminine avec la publication en 1948 du “Deuxième Sexe“, où elle dénonce l’infériorité ressentie par les femmes et les invite à se libérer du joug du conditionnement historique. 5.Faux Ce n’est que depuis 1965 (il y a 51 ans) qu’une femme est libre de travailler sans l’accord de son mari. 6.1 En effet, une seule femme a été première ministre, il s’agit d’Edith CRESSON, première ministre de F. Mitterrand de mai 1991 à avril 1992. 7.La loi relative à l’égalité salariale a été adoptée le 23 mars 2006 L’objectif principal de cette loi est de supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans un délai de cinq ans, en recourant à la négociation dans les branches professionnelles et les entreprises. Il y a donc 10 ans et l’écart de salaire est encore de 25 %. 8.Vrai Une première circulaire datée du 11 mars 1986 par Laurent FABIUS est restée lettre morte, et 12 ans plus tard sous le gouvernement de Lionel JOSPIN, une nouvelle circulaire du 6 mars 1998 voit le jour. 9.6 juin 2000 Une loi est votée pour assurer la parité dans le domaine politique. Désormais, l’accès aux mandats électoraux et aux fonctions électives devra concerner autant d’hommes que de femmes. La loi s’applique aux élections municipales, seulement si les communes concernées possèdent plus de 3500 habitants. Elle prend également effet sur les élections régionales, sénatoriales (selon une proportionnalité), et européennes. 10.Suzanne Roussi Césaire Famn Ouvè Zié’w N°4 Direction de la publication : Culture Egalité Mise en page : Yamina Louis Rédactrices : George Arnauld, Huguette Bellemare, Rose Bonheur, Sylvie Javaloyès, Géraldine de Thoré Courriel :asso.culture.egalite@gmail.com Téléphone : 0596 58 42 17 / 0696 33 66 92 Facebook : Association Féministe Culture Egalité Site : www.cultureegalite.jimdo.com


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