Novembre 2016 - N°6
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FOZ VI
Edito Contribuer à l’élimination des violences faites aux femmes, c’est l’une des missions que se donne CULTURE EGALITE, Trop de femmes sont encore confrontées à la violence et en particulier à celle de leur compagnon. Elles ne doivent pas être laissées seules face à leur sentiment d’impuissance. Cette année, la campagne contre les violences s’adresse aux couples de jeunes. Les relations entre jeunes S’imaginent heureuses. Mais nous constatons que beaucoup trop de jeunes femmes se trouvent sous Emprise, que beaucoup trop de jeunes hommes confondent «amour de l’autre» et «possession de l’autre». Pour que nous vivions, hommes et femmes, des relations harmonieuses et égalitaires, ces jeunes gens doivent remettre en question les conduites qui enferment les jeunes femmes, limitent leur liberté, voire mettent en danger leur santé physique et mentale. Consulter les SMS de sa partenaire, limiter le nombre de ses ami-e-s, exiger de tout savoir, tout contrôler de ses agissements, sont des comportements d’autant moins acceptables qu’ils sont des prémices à un comportement violent. Culture Égalité tâche aussi d’aider les jeunes femmes à apprendre à détecter très tôt dans les «je t’aime, tu es à moi», «Nous ne formons qu’un», «C’est parce que je t’aime trop», etc., les comportements tyranniques, voire dangereux. T’aimer, oui ! T’appartenir, NON ! Telle est la résolution qu’elles doivent opposer fermement aux tentatives de pression et de manipulation. Un magazine télé, un journal, une page Facebook et un site, voilà les armes que s’est forgées Culture Égalité pour éduquer à d’autres rapports entre les femmes et les hommes, élaborer les instruments pour une éducation non sexiste, amener les femmes à conquérir l’autonomie. Bref pour lutter du dedans contre les violences faites aux femmes. Culture Egalité
Es ou Sav ?
Les militantes en faveur des droits des femmes ont choisi en 1981 la date du 25 novembre comme journée de lutte contre les violences, en mémoire des trois soeurs Mirabal, militantes dominicaines brutalement assassinées en 1960, sur les ordres du chef de l’État, Rafael Trujillo. Le 17 décembre 1999, l’Assemblée générale de Nations Unies a proclamé le 25 novembre Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes, et a invité les gouvernements, les organisations internationales et les organisations non gouvernementales à organiser ce jour-là des activités conçues pour sensibiliser l’opinion au problème.
Agenda Jeudi 17 Novembre Dans le cadre du programme Tchok En Doc, projection du film : Suzanne Roussi Césaire, une femme sur tous les fronts. 19 h - centre culturel de Rivière Salée. Vendredi 18 Novembre Intervention à la médiathèque de Sainte-Luce autour du thème de l’hypersexualisation sociale Vendredi 25 novembre Journée information, sensibilisation sur le campus de Schœlcher Samedi 26 novembre Caravane dans le Nord caraïbe Samedi 3 décembre Carbet de l’égalité «la jalousie dans le couple» Garage Popular Mercredi 7 décembre Échange débat avec Nadia Chonville : les droits humains Samedi 10décembre journée internationale des droits humains. Mobilisation de rue à Fort-de-France pour la journée internationale des droits humains
La jalousie peut tuer Une mère témoigne de la façon dont elle a aidé sa fille à sortir d’une relation destructrice. «A l’époque Laura était une jeune fille brillante, en première année de droit au Campus, à Schœlcher. C’est là qu’elle a rencontré Steven, lui aussi étudiant. Mère divorcée, avec un travail très prenant, j’avais très tôt habitué ma fille à être autonome et depuis qu’elle était étudiante, je la voyais en coup de vent. C’est sans doute pour cela que je n’ai pas remarqué tout de suite qu’elle passait le plus clair de son temps les yeux rivés sur son téléphone…pour ne rater aucun message de Steven. Très rapidement, nous ne pouvions avoir de conversation sans être interrompues par un «bip» lui signalant les messages de Steven. Au début, Laura répondait le sourire aux lèvres et puis les bips sont devenus de plus en plus nombreux et son sourire a disparu. Elle était concentrée, tendue. Elle s’est mise à maigrir, elle avait les yeux cernés. J’étais inquiète, mais j’ai mis cela sur le dos de ses études. Jusqu’au jour où sa meilleure amie m’a appelée pour me dire que Laura était «sous l’emprise» de Steven Désormais, si Steven n’avait pas cours, Laura séchait les siens pour rester avec lui, qu’elle ne sortait plus, ne voyait plus ses ami.e.s. J’ai attendu qu’elle rentre et, lorsqu’elle a filé sous la douche, j’ai pris son téléphone. Et ce que j’ai vu m’a glacée : Steven lui envoyait des centaines de messages par jour. Questions, menaces, déclarations enflammées, tentatives de culpabilisation se succédaient à un rythme dément. «Où es-tu ?», «Tu dois répondre IMMEDIATEMENT à mes texto»,«je t’ai vu parler avec un type, c’est qui?»,«Parfois je me demande comment je peux aimer quelqu’un d’aussi bête que toi»,«Salope, tu me détruis.Je vais t’éviscérer»«Pardon, mon amour, je t’aime trop »… Les réponses de Laura étaient, elles, de plus en plus longues, pleines d’excuses et de justifications. Pendant que je lisais les messages, le téléphone a bipé deux fois. 2 messages de Steven. Au deuxième, Laura est sortie de la salle de bain et m’a arraché son téléphone des mains. Ce n’était pas la colère que j’ai lue dans le regard de ma fille, mais la peur. Il m’a fallu un an pour arracher Laura des griffes de ce jaloux pathologique. C’est comme si elle était entrée dans une secte. Elle s’était épuisée à vouloir rassurer Steven et elle n’avait plus la force de résister au rouleau compresseur qui détruisait sa confiance en elle, donc sa capacité à vivre sans Steven. Ce n’est qu’après sa tentative de suicide que j’ai réussi, avec l’aide d’une psychologue, à la convaincre qu’elle était comme droguée de Steven et qu’elle devait se désintoxiquer pour sauver sa peau. Elle est partie en France reprendre ses études. Maintenant, elle milite dans une association qui aide les femmes victimes de violence. La jalousie d’un homme l’a poussée vers le suicide, alors elle sait : la jalousie est une violence.» Propos recueillis par Géraldine de Thoré
Le QUIZZ Dans notre relation avec l’homme qui partage notre vie,Quelles sont nos attitudes ? Interrrogeons -nous 1-Il veut contrôler tout ce que je fais. Je lui rends des comptes OUI / NON Je lui donne mon emploi du temps OUI / NON 2-Il veut toujours avoir le dernier mot et prendre toutes les décisions. La plupart du temps c’est moi qui fais les concessions. OUI / NON Je n’ose pas exprimer mes opinions OUI / NON 3-Il s’emporte quand les choses ne sont pas comme il le désire.Je me sens incapable OUI / NON J’essaie sans cesse de faire mieux et cela m’épuise. OUI / NON 4-Il est jaloux.Je pense que c’est parce qu’il m’aime OUI / NON Je ne sors jamais sans lui. OUI / NON 5-Il a tendance à me dénigrer et à m’humilier en public. Je n’ai aucune confiance en moi OUI / NON Je m’efface lorsque nous sortons ensemble OUI / NON 6-Il tente de m’isoler en m’éloignant de mon entourage et de ma famille. Je vois ma famille et mes ami-e-s en cachette OUI / NON Il a raison, il veut préserver notre couple OUI / NON 7-Il a été violent physiquement et aussi verbalement Je ne dis rien pour ne pas envenimer les choses OUI / NON J’essaie de me conduire de manière à ne pas provoquer sa colère OUI / NON 8-Il m’impose des relations sexuelles. OUI / NON C’est normal : c’est lui l’homme, il a des besoins OUI / NON
Quel que soit le nombre de OUI obtenu, il nous faut en parler, nous demander pourquoi nous n’osons pas réagir
TEMOIGNAGE Une femme a rompu le cercle vicieux FOZ : Dites-nous votre âge et pendant combien de temps vous avez subi les violences de votre mari ? Marie : J’ai 95 ans. Depuis que je me suis mariée à 21 ans et pendant 28 ans. FOZ : Comment avez vous pu mettre fin à ces violences ? MARIE : Grâce à mes enfants. Un jour, un de mes garçons a dit «stop». Je me souviendrai toujours de sa phrase : «Ou za bat li asé, siw menyeny ankô, mwen ka lélé ti koko koutla ta-la andidanw !». Les autres l’ont fait rester tranquille. Ces gens-là sont lâches... FOZ : Donc vous pensez que seule, vous n’auriez pas pu y arriver ? MARIE : Seule ? (silence) Je ne sais pas. C’était il y a longtemps, quand ton mari te battait, les gens ne se mêlaient pas. On trouvait ça presque normal ! Et puis, j’avais tellement peur de lui ! Dès qu’il arrivait à la maison, il me hélait : «Croupion !» Je tremblais. Et c’était parti pour un tour... FOZ : C’était un engrenage que vos enfants vous ont permis de rompre. Quand vous avez trouvé la force de partir, comment avez-vous fait ? MARIE : Patience et longueur de temps. J’ai bien préparé mon départ. Une religieuse m’a trouvé du travail, une maison. Alors c’est là que j’ai pu charroyer. FOZ : Donc, l’indépendance financière est importante pour rompre l’enfer ? MARIE : Oui, le travail ! Un endroit pour habiter aussi. On a besoin de ça. Parce qu’avec lui, c’était difficile. Il ne me donnait presque rien pour les enfants. Je devais me débrouiller. Sans quoi mes enfants n’auraient pas pu arriver dans la vie FOZ : Alors, le départ pour Fort de France ? MARIE: J’avais tout préparé. On savait la situation. J’ai envoyé une de mes filles voir le garde-champêtre pour lui dire que je partais. J’ai attendu que mon mari parte pour la pêche et j’ai pris le taxi avec mes enfants. FOZ : Si vous deviez donnez un conseil aux femmes qui sont victimes de violences conjugales, que leur diriez-vous ? MARIE : Une fois que c’est clair dans ta tête, il faut chercher de l’aide. On a besoin d’aide pour sortir de ça. Et puis, une fois qu’on a décidé, il ne faut pas reculer. Jeune, une fois j’étais déjà partie, mais, il a pleuré. Il a promis, alors je suis retournée. Mais, il ne faut pas. Quand je suis partie à Fort-de-France, je ne suis jamais retournée « an pyé John » comme il croyait. Je me suis battue pour mes enfants et tous ils sont arrivés dans la vie. Propos recueillis par Savitha
Fanm Ouvè Zié’w, notre magazine féministe sur Zouk TV à 22 heures, 4e mercredi du mois et le lundi suivant à 15h
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Specialiste
Violence à l'encontre des femmes pour une réelle prise en compte par les pouvoirs publics
Le Bourreau et la victime, un jeu vicieux
La lutte contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes reste encore une priorité. Certes, la législation a beaucoup évolué dans la société française comme ailleurs, mais pas suffisamment en ce qui concerne notamment les peines encourues par les agresseurs. Beaucoup trop de lois permettent encore des échappatoires pour les auteurs de violences. Il n’est pas rare que, par l’utilisation de notions comme circonstances atténuantes, précisions quant au consentement, discours confus des victimes, légitime défense, prescription pour dépôt des plaintes, la victime se voit suspectée et surtout obligée de justifier de sa «bonne foi» face à son agresseur lors des audiences, des interrogatoires. De plus, il a fallu attendre des années en France, pour reconnaitre le viol conjugal, l’inceste, les violences psychologiques, le harcèlement! Mais cette reconnaissance ne donne pas pour autant les moyens nécessaires pour protéger la victime. Beaucoup de départements manquent de moyens pour mettre en place les mesures de protection nécessaires: places en Centre d’Hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS) spécifiques pour les femmes victimes, téléphone d’alerte, soutien juridique, crédits aux associations, etc. La prévalence persistante de la violence contre les femmes témoigne du chemin encore à parcourir, et ce dans tous les domaines: espace privé, au travail, dans la rue, dans les établissements scolaires… Il faut permettre aux femmes, quelle que soit leur classe sociale, d’accéder à des soutiens juridiques et psychologiques gratuits pour les accompagner. Lors d’un divorce avec violences familiales, comme le prévoit la loi, faire sortir l’auteur des violences du domicile. Leur permettre de garder les enfants sans être contraintes de rester liées à leur bourreau pour des raisons matérielles (non versement de la pension, compte en banque joint, biens commun). En effet Il est difficilement pensable qu’un compagnon ou mari violent soit un père bienveillant. Les campagnes de prévention et de mobilisation doivent se renforcer pour changer les attitudes et influer sur les comportements parmi tous les publics : adultes, jeunes et institutionnels. les professionnels,les(formation, supports médiatiques…) Enfin, il faut œuvrer davantage pour une réelle prise en compte des violences sexuelles. Ces barbaries dont les femmes sont en majorité les victimes sont la plus grave violation des droits humains. Aux côtés de toutes les associations qui œuvrent pour l’élimination les violences envers les femmes, Culture Egalité continuera à renforcer ses actions et promouvoir les droits des femmes pour leur émancipation et leur liberté. Muriel Ameller
«Plus je dis à Une telle qu’elle doit porter plainte, moins elle entend ! Je crois qu’elle est bien contente de sa situation». Cette réflexion, on l’entend souvent. Une femme victime de violences doit-elle être laissée seule face à son bourreau ? Certes, c’est elle qui décide, mais après un long chemin qui l’amène à refuser l’inacceptable. Dans le n° 1 de MIBI, la revue de l’Association des psychologues martiniquais.e.s, la psychanalyste Françoise Rentz explique que dans la relation violente il y a 3 instances : l’agresseur, la victime et l’excuse invoquée. On entend souvent : « Cet homme est violent parce qu’il a beaucoup souffert dans son enfance» ou «parce qu’il est alcoolique». Il s’agit donc de soulager le bourreau de sa souffrance, au détriment de sa victime. Une victime qui accepte de payer le prix. Madame Rentz explique que, si les victimes sont « là comme des objets inertes», « liées par leurs liens affectifs à leur homme, à leur idée du couple, du mariage, de la famille» c’est qu’elles n’ont pas encore pris conscience que ce qu’elles subissent est inadmissible et qu’elles ne sont pas responsables. La victime ne cesse d’être victime que lorsqu’elle cesse d’accepter l’inacceptable... Et si elle finit par le faire, c’est qu’elle a reçu une aide. L’aide peut venir d’un.e psychologue. Toutefois, par le regard qu’il ou elle porte sur les victimes de violence, tout.e citoyen.ne peut aider à la résilience, à la prise de conscience et à la résistance. Car longtemps, notre société martiniquaise a justifié les violences ou a détourné les yeux. Aujourd’hui, elle le fait moins grâce à l’action des spécialistes et des associations qui luttent contre les violences faites aux femmes. Claudia Lecurieux
Fanm Ouvè Zié'w N°6 Direction de la publication : Huguette Bellemare Mise en page : Emmanuella Celestin Maquette: Jean -Baptiste Jeany Coordination du n°6: George Arnauld Rédactrices:Muriel Ameller, Claudia Lecurieux, Géraldine de Thoré Courriel : asso.culture.egalite@gmail.com Téléphone : 0696 53 7116 Facebook : Culture Egalité Site-web : www.cultureegalite.jimdo.com