Édition du 4 septembre 2018

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Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill

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Mardi 4 septembre 2018 | Volume 108 Numéro 1

On collectionne les pierres précieuses depuis 1977


Volume 108 Numéro 1

Éditorial

Le seul journal francophone de l’Université McGill

rec@delitfrancais.com

RÉDACTION 2075 Boulevard Robert-Bourassa, bureau 500 Montréal (Québec) H3A 2L1 Téléphone : +1 514 398-6784

Décloisonner la diversité Lara Benattar Le Délit

C

ette semaine, où chacune et chacun s’apprête à prendre ou à reprendre sa place sur le campus, l’on entendra sans doute que l’Université brille par la diversité de son corps étudiant et des disciplines qui y sont enseignées. Mais cette diversité ne perd-elle pas sa valeur si les différentes entités qui la constituent se côtoient sans se connaître? Si le dialogue entre les disciplines à l’intérieur d’une même faculté reste envisageable et encouragé, bien plus que dans le système universitaire français par exemple, le débat entre les différentes facultés reste rare. Pourtant, en dehors de l’université, les disciplines s’entrecroisent, nulle action, nulle recherche d’une personne ne se déploie en étant isolée de celles des autres. Cependant, en cours d’anthropologie, il est fréquent de critiquer les modèles d’objectivité et de rationalité ainsi que les méthodes scientifiques souvent pris pour acquis dans les sociétés occidentales, sans que les élèves de science puissent voir, au sein de leur programme, leurs croyances confrontées. Les élèves de commerce

apprennent par coeur des formules toujours plus complexes en cours de finance alors même que ceux et celles du programme d’environnement s’attachent à les déconstruire en montrant les dégâts environnementaux qu’une foi sans faille en eux provoque. Aussi, notre quotidien est de plus en plus personnalisable: publicités ciblées, phénomènes de bulles sur les réseaux sociaux, replis identitaires, etc. L’entresoi est aussi confortable qu’il peut être dangereux: il semble crucial de continuer à essayer de dialoguer. Le dialogue interdisciplinaire est aujourd’hui plus crucial que jamais: il faut faire se croiser les connaissances, venant notamment des sciences — dites — humaines et des sciences — dites — naturelles pour mieux sentir les causes et les potentielles conséquences de nos choix et de nos croyances. Nombreux s’accordent à dire qu’il en va de la survie de notre espèce, pour transitionner vers des modes de vies moins destructeurs pour les territoires dans lesquels elles s’inscrivent. Partager ses connaissances et son témoignage est aussi essentiel pour faire appréhender les risques de hausse des tensions que la crise environnementale va sans doute engendrer. En ce sens, la presse étudiante tient un rôle essentiel:

celui de partager à ses lectrices et ses lecteurs des informations variées, venant diversifier les connaissances récoltées sur les bancs et les slides de l’Université. Celui aussi de permettre à chacun de s’habituer à parler en son nom en mobilisant ses connaissances pour développer une réflexion personnelle, et éviter par là les écueils du «par coeur» et du bachotage. Enfin, la presse étudiante permet de ne pas prendre pour acquis, de prendre de la distance par rapport à l’institution mcgilloise face à laquelle nous sommes en général dans une posture passive de réception du savoir. Mais, pour dialoguer, encore faut-il qu’il y ait des voix. Le Délit s’attache à diffuser celles que l’on n’entend — presque — jamais sur le campus de McGill, celles de la communauté francophone. Sur plus de 20 900 élèves au premier cycle, plus de 8 200 ont le français pour langue maternelle. Si près de 20% des élèves de tous les cycles parlent français, et que l’Université est installée dans une province où le français est la seule langue officielle, la majorité des ressources et des rapports de l’administration ne sont toujours pas, ou mal traduits. Le Délit s’évertue à la fois à palier et à dénoncer le manque de représentation des personnes francophones.x

Rédactrice en chef rec@delitfrancais.com Lara Benattar Actualités actualites@delitfrancais.com Astrid Delva Juliette De Lamberterie Antoine Milette-Gagnon Culture artsculture@delitfrancais.com Grégoire Collet Évangéline Durand-Allizé Société societe@delitfrancais.com Katherine Marin Philosophie philosophie@delitfrancais.com Simon Tardif Coordonnateur de la production production@delitfrancais.com Sebastien Oudin-Filipecki Coordonnatrices visuel visuel@delitfrancais.com Alexis Fiocco Béatrice Malleret Multimédias multimedias@delitfrancais.com Vacant Coordonnateurs de la correction correction@delitfrancais.com Niels Ulrich Amine Baouche Webmestre web@delitfrancais.com Mathieu Ménard Coordonnatrice réseaux sociaux reso@delitfrancais.com Julie Mollard Événements evenements@delitfrancais.com Madeleine Gilbert Contributeurs Juliette Mamelonnet, Justin Nelissen, Louise Hourcade, Valentina Leoni, Fernanda Muciño Couverture Alexis Fiocco Béatrice Malleret BUREAU PUBLICITAIRE 3480 rue McTavish, bureau B•26 Montréal (Québec) H3A 0E7 Téléphone : +1 514 398-6790 ads@dailypublications.org Publicité et direction générale Boris Shedov Représentante en ventes Letty Matteo Photocomposition Mathieu Ménard The McGill Daily coordinating@mcgilldaily.com Lydia Bhattacharya Conseil d’administration de la Société des Publications du Daily Lydia Bhattacharya, Léandre Barôme, Tony Feng, Boris Shedov, Nouèdyn Baspin, Julian Bonello-Stauch, Lara Benattar

Les opinions exprimées dans les pages du Délit sont celles de leurs auteur·e·s et ne reflètent pas les politiques ou les positions officielles de l’Université McGill. Le Délit n’est pas affilié à l’Université McGill.

2 Éditorial

L’usage du masculin dans les pages du Délit vise à alléger le texte et ne se veut nullement discriminatoire. Les opinions de nos contributeurs ne reflètent pas nécessairement celles de l’équipe de la rédaction. Le Délit (ISSN 1192-4609) est publié la plupart des mardis par la Société des publications du Daily (SPD). Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et d’illustrations dont les droits avant été auparavant réservés). L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans le journal. Imprimé sur du papier recyclé format tabloïde par Imprimeries Transcontinental Transmag, Anjou (Québec).

le délit · le mardi 4 septembre 2018· delitfrancais.com


Actualités

introduction

actualites@delitfrancais.com

(S’)informer pour se former Brève présentation de la section Actualités. Juliette de lamberterie, Astrid delva et Antoine milette-gagnon

Le Délit

L

a section «Actualités» se veut les yeux et les oreilles du Délit en couvrant les sujets affectant la vie des Mcgillois·e·s, sur le campus ou en dehors. Dans cette section, il s’agit d’aborder différentes façades de l’actualité: ce qui se passe sur le campus, les aléas de la politique étudiante de McGill, ou de son administration, mais aussi l’actualité montréalaise, québécoise, et canadienne, ainsi que celle d’autres pays du monde francophone. La section offre donc à ses contributeurs·rices l’occasion de se pencher, en tant que repor-

ters, sur une multitude d’évènements ponctuant la vie universitaire et ses alentours. À l’heure des fausses nouvelles et des opinions se substituant aux faits, la section «Actualités» poursuit l’idéal ambitieux d’offrir un portrait juste et équitable de la vie mcgilloise et montréalaise. Beaucoup de nouvelles n’étant couvertes que par les journaux mcgillois, une responsabilité incombe alors au Délit — et à la section «Actualités» en particulier —, celle d’offrir un compte-rendu de celles-ci aux étudiants francophones, et ce le plus objectivement possible.

Tout comme l’ensemble du Délit, la section «Actualités» a pour but de briser la «bulle mcgilloise». Elle permet en effet aux contributeurs·rices de développer des aptitudes extracurriculaires, leur donnant l’occasion de connecter de manière plus directe avec l’université et le Québec, que ce soit par des entrevues avec des acteurs clés de la vie universitaire ou en échangeant avec les étudiant·e·s lors d’un vox pop. Diverses rubriques permettent aux contributeurs·rices de couvrir l’actualité de manière variée:

Campus/Montréal/Québec: Intrigues politiques à l’AÉUM, réponses de l’administration face aux enjeux touchant les étudiant·e·s, élections québécoises ou politique fédérale, cette rubrique vise à offrir un portrait détaillé des évènements touchant les étudiant·e·s d’une façon ou d’une autre.

des évènements marquants survenant dans les pays étrangers membres de la francophonie.

Entrevue: Les entrevues donnent l’occasion aux contributeurs·rices de poser directement des questions à ceux et celles qui influencent la vie mcgilloise.

Satire: La satire permet aux contributeurs·rices de tourner en ridicule l’actualité. Il est possible d’ «inventer» des nouvelles (un peu à la manière du Gorafi) tout en restant en lien avec l’actualité mcgilloise, montréalaise, québécoise ou canadienne.

Monde francophone: Une rubrique internationale regroupant

Vox pop: Une poignée de propos recueillis par un reporter, souvent sur le campus. La rubrique a pour but d’exposer les opinions brutes d’étudiants sur certains sujets pressants de l’actualité.

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LePeterson.com le délit · mardi 4 septembre 2018 · delitfrancais.com

Actualités

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Campus

Cet été à McGill Juliette de lamberterie, Astrid delva et Antoine milette-gagnon

Le Délit

Un comité spécial du Sénat étudie les relations professeurs-élèves.

À

Un besoin de clarté

la fin du semestre d’hiver 2018, l’administration de McGill annonçait son projet de créer un comité spécial ayant pour objectif «d’explorer et [de] soumettre au Sénat des recommandations quant à la façon dont l’Université McGill doit considérer […] les relations entre le personnel enseignant et la population étudiante». Sa composition s’est précisée au cours de l’été; il sera dirigé par Sinead Hunt, conseillère principale à l’équité et l’inclusion, et rassemble huit membres choisis par le Sénat, dont trois professeurs, issus des facultés de science, de médecine, et d’arts, trois étudiants, et deux élèves suppléants, pouvant remplacer un membre en cas d’absence. Une place d’élève suppléant·e est encore vacante.

Quant au règlement actuel, l’institution n’interdit pas formellement les relations intimes entre un étudiant et un membre du corps enseignant; dans le texte de présentation du comité, l’on nous rappelle que les étudiants majeurs «sont légalement capables de consentir à une relation intime avec un autre adulte». Toutefois, l’on nous rappelle que cette relation est soumise à «un déséquilibre de pouvoir». Ces deux visions étant conflictuelles, le comité devrait tenter de clarifier les droits de chacun·e. Les membres du comité ont pour impératif de se rencontrer une fois par mois, et ce depuis le 1er juin 2018. Un rapport final sera rendu d’ici le 1er décembre 2018, lors d’une réunion du Sénat.x

Le professeur Ahmed Fekry Ibrahim poursuit un professeur et une étudiante.

A

hmed Fekry Ibrahim, professeur adjoint (Assistant professor en anglais) à l’Institut d’études islamiques, a déposé en juin dernier une poursuite pour diffamation contre une étudiante mcgilloise, Sarah Abdelshamy, et contre Pasha Khan, également professeur adjoint à l’Institut. La poursuite réclame 600 000 dollars, notamment pour causes de perte

d’emploi, perte de possibilité professionnelles et perte de joie de vivre du plaignant. La poursuite indique que Prof. Ibrahim est maintenant considéré «comme un prédateur sexuel, un violeur, un harceleur» alors que de nombreuses allégations circulaient à son sujet depuis 2015. En effet, le professeur était dépeint explicitement comme un prédateur sexuel sur une série

d’autocollants apposés sur le campus de McGill, un article du McGill Daily et des allusions à Prof. Ibrahim de façon anonyme. Le professeur concerné admet toutefois avoir entretenu une relation intime «consentante» avec une étudiante. Professeur adjoint, Ahmed Fekry Ibrahim s’est vu refuser sa demande de titularisation en mai 2018. La poursuite soutient

que les allégations circulant à propos de Prof. Ibrahim sont en lien avec ce refus. Une vague de soutien Un mouvement de solidarité pour l’étudiante poursuivie s’est alors propagé sur les réseaux sociaux avec le mot-clic #ImwithSarah. L’AÉUM a également publié une déclara-

tion dénonçant formellement la poursuite, affirmant qu’elle consiste en une «intimidation flagrante face à la capacité des étudiant·e·s à parler haut et fort et à se protéger mutuellement face à la violence sexuelle alors que notre institution a échoué de façon répétée». L’Université McGill a refusé de commenter, l’affaire étant toujours devant les tribunaux.x

L’AÉUM change sa politique de couverture des soins dentaires.

L

e 11 juin 2018, l’Association étudiante de l’Université McGill a décidé de voter la réduction de la prise en charge des frais dentaires des étudiants internationaux couverts par l’ASEQ (Alliance pour la santé étudiante au Québec)/ Studentcare. En effet, la prise en charge fixée jusqu’à 750 dollars de couverture pour des frais annuels de 100 dollars par étudiant

a été réduite à 500 dollars. La décision a été votée à la majorité avec une abstention. Cette décision est motivée par la potentialité d’un déficit de 320 000 dollars qui toucherait le budget de l’AÉUM si les coûts liés aux 18 000 étudiants n’étaient pas réduits. Le choix des frais dentaires s’explique par des statistiques du président de l’AÉUM, Tre Mansdoerfer qui a

déclaré au McGill Tribune que 5% des étudiants couverts par Studentcare dépassent les 500 dollars de frais dentaires sur les 12 mois de prise en charge. Des questions soulevées Au sein de l’AÉUM, les avis sont majoritairement favorables à cette mesure, mais la vice-présidente des affaires externes,

Marina Cupido, a tout de même mis en garde Tre Mansdoerfer contre le risque de laisser des étudiants seuls face aux frais supplémentaires qu’ils auraient à payer. Afin de permettre aux étudiants de donner leur avis sur la question, l’AÉUM s’est engagée à organiser un référendum pendant le semestre de printemps sur la remise en cause des 750 dollars

de prise en charge et la possibilité de revenir à l’ancien régime si la majorité le souhaite, selon des informations obtenues par le McGill Tribune. Rappelons qu’une mauvaise santé dentaire n’engendre pas seulement des maladies buccales mais aussi des risques de maladies cardiovasculaires et respiratoires. Une raison pour prendre ce changement au sérieux.x

Campus : Shatner en travaux jusqu’au printemps 2019; l’activité reprend à McIntyre.

L

e bâtiment Shatner est fermé depuis le 17 mars 2018 pour diverses rénovations. Les travaux nécessitant la fermeture du bâtiment incluent la ventilation, la distribution électrique, l’amiante, de nouvelles toilettes, le remplacement des grilles d’entrées et du dallage et autres améliorations, comme annoncé sur le site Web de l’AÉUM.

4 actualités

Délais dans les travaux La fermeture du bâtiment a un impact sur la vie étudiante du campus, forçant la relocalisation de plus d’une vingtaine de clubs pour la fin de l’année dernière. Le bâtiment Shatner aurait dû rouvrir ses portes au cours du semestre d’hiver 2019 avec une réouverture partielle com-

prenant le bar Gerts à l’automne 2018. Toutefois, l’AÉUM annonce dans un communiqué le 14 août 2018 que l’édifice demeurera fermé toute l’année scolaire 2018-2019 pour cause de retard. L’association soutient qu’elle octroiera des fonds pour rembourser les dépenses de location de locaux alternatifs aux clubs affectés par la situation.

Incendie à McIntyre Le bâtiment McIntyre a été la proie des flammes lors d’un incendie déclaré le 12 juillet 2018. L’édifice abritant la Faculté de médecine de l’Université McGill a dû être temporairement fermé. Les services d’incendie n’ont rapporté aucun blessé lors de l’évènement.

Les étages supérieurs partant du 7e sont de nouveau opérationnels tandis que certains des étages inférieurs resteront fermés pour plusieurs mois. En attendant la fin des rénovations, il est probable que des cours soient donnés ailleurs afin de permettre aux étudiants de commencer le semestre.x

le délit · mardi 4 septembre 2018 · delitfrancais.com


McGill : Comment ça fonctionne ?

le délit · mardi 4 septembre 2018 · delitfrancais.com

Actualités

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Société

Au menu en Société societe@delitfrancais.com

En ce début d’année, voici une brève introduction à cette vaste section. katherine marin

Le Délit

L

a section Société est plutôt difficile à définir. Si on la laissait aller librement, elle prendrait toutes sortes de formes, compte tenu de son nom qui englobe autant de thèmes et de sujets qui puissent exister. Cependant, cette année, nous tâcherons de lui redonner ses couleurs journalistiques, c’està-dire de donner une place toute

spéciale aux articles d’opinion, et aux avis aussi diversifiés que possible. Tous les sujets peuvent et doivent être traités, toujours en gardant la question suivante en tête: «Pourquoi, dans la société d’aujourd’hui, ce sujet devrait-il attirer collectivement notre attention?». Implication de la section Comme le nom de la section l’indique, les articles et tous les écrits doivent rester le plus

près de nous, de notre quotidien et des enjeux auxquels nous faisons face, parfois sans nous poser trop de questions. Cette partie du journal aspire, elle, à ne rien laisser passer sous le radar, à tout questionner. C’est pourquoi les entrevues et les enquêtes trouvent leur place en ces pages: elles permettent de garder un contact direct avec l’actualité et donnent sa raison d’être à la section en laissant au lectorat le plaisir

de développer, à partir des faits, sa propre pensée.

« Cette partie du journal aspire, elle, à ne rien laisser passer sous le radar (...) »

Le rôle du lectorat En tant que lectrice et lecteur, il semble d’autant plus important de rester critique face à tout ce que l’on lit. C’est en développant sa propre opinion que des articles de qualité voient le jour. Ainsi, vos commentaires sont importants, tous comme vos idées de sujets ou de thèmes que vous aimeriez lire ou écrire vous-mêmes.x

Des squelettes dans le placard À McGill, on se souvient... du mieux qu’on peut.

katherine marin

C

Le Délit

’est une année tumultueuse qui a pris fin en avril dernier dans les universités québécoises, et McGill n’a pas été épargnée; la montée des violences sexuelles en milieu universitaire (entre autres) a créé une vague d’empathie et de colère dans le corps étudiant. On lisait d’ailleurs, l’an dernier, dans l’édition de la rentrée du Délit, un texte dénonçant la culture du viol bien vivante au sein des universités. Certains enjeux traversent les années et semblent parfois insurmontables, mais connaître ces enjeux est sûrement la première étape vers une rémission. Voici donc, en bref, les problématiques que les étudiants et étudiantes devront considérer avec humilité et force pour commencer l’année du bon pied.

l’université. En effet, au milieu des années 20, alors que la communauté juive bénéficiait enfin d’un accès équitable à l’èducation supérieure, elle s’est cognée sur une porte fermée: on augmenta la moyenne d’entrée à 75% pour celle-ci, alors qu’elle était de 60% pour les anglo-saxons. Cette mesure fut prise dans le but de «protéger» l’accès à l’éducation des AngloSaxons. Le faux pas de l’AÉUM n’a réussi qu’à raviver une flamme qui semble avoir été étouffée des années plus tôt. Mutisme administratif Il y a à peine cinq mois se tenait une manifestation sur le

«Certains enjeux traversent les années et semblent parfois insurmontables, mais connaître ces enjeux est sûrement la première étape vers une rémission. » son discours ce jour-là. Les plaintes du corps étudiant ont finalement été entendues et prises en compte par l’administration, mais seulement après que celle-ci eut été mise au pied du mur. Depuis le 17 avril, l’administration rencontre les

Qu’on ait été témoin d’un acte discriminatoire ou d’une grossière maladresse, le vote visant à retirer trois étudiants ayant potentiellement des opinions pro-israéliennes lors de l’assemblée générale de l’Association étudiante de l’université McGill n’a réussi qu’à déterrer le douloureux passé de

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« les primes nou-

vellement attribuées aux médecins spécialistes semblent contrevenir aux racines éthiques de la profession. »

« J’espère seulement que cette liste ouvrira les yeux des freshmen, et rafraichira la mémoire des ancien·ne·s » Le fantôme antisémite

au milieu des décisions de l’actuel ministre de la Santé, M. Gaétan Barrette. Ainsi, les primes nouvellement attribuées aux médecins spécialistes semblent contrevenir aux racines éthiques de la profession. De plus, bien que

pas en la performance de chacun·e, mais bien en la quantité de professionnel·le·s disponibles. Il est aussi difficile de ne pas mentionner le malaise d’être géré par un ministre qui voit la fin de son règne arriver, et qui se prépare un coussin de soie pour amortir sa chute. Le sujet sera creusé plus en profondeur au cours de la session.

Des plaies ouvertes

Béatrice Malleret campus de McGill: des étudiantes et étudiants protestaient contre le mutisme de l’université face aux accusations de violence sexuelle, de l’atmosphère qui plane sur le campus et donc face à son incapacité chronique à honorer la loi 151. C’est d’ailleurs ce que Connor Spencer, alors vice-présidente des affaires externes à l’AÉUM, mentionnait dans

étudiant·e·s en charge de l’AÉUM toutes les deux semaines. Malaise en médecine Avec le début des cours vient la campagne électorale, avec la campagne électorale viennent les décisions prises à la volée. Le étudiant·e·s en médecine se voient pris

ces primes puissent s’apparenter à une véritable caverne d’Ali Baba pour les futur·e·s médecins, elles pourraient aussi être source d’anxiété chez les étudiant·e·s, mettant une charge de plus sur leurs épaules. Je parle ici d’une possible compétition entre collègues, d’une pression à la ponctualité alors que le problème ne réside peut-être

Je comprends bien que présenter une liste officieuse des problèmes auxquels le corps étudiant fait face risque de tourner le couteau dans la plaie, mais le passé nous apprend encore aujourd’hui que le silence ne guérit rien, au contraire. Je comprends bien que tous les enjeux cités ci-haut demandent bien plus d’un paragraphe pour commencer à en faire le tour et je n’ai pas l’arrogance de croire que mes résumés soient exhaustifs. J’espère seulement que cette liste ouvrira les yeux des freshmen, et rafraichira la mémoire des ancien·ne·s, puisque se souvenir constitue le seul moyen de ne pas répéter les erreurs du passé. Bien que cela puisse sembler évident, on l’oublie souvent.x

le délit · mardi 4 septembre 2018 · delitfrancais.com


Opinion

Quels objectifs se fixer? «Tous les conseils que j’aurais aimé connaître en première année.» JUliette mamelonnet

L

Le Délit

e jour de l’An n’est pas le seul moment où des résolutions sont prises. Lorsque nous sommes étudiant·e·s, les rentrées scolaires sont aussi des instants clés où nous nous fixons des objectifs. On se promet de se surpasser, de relever tous les défis qui croiseront notre route avec courage. Lorsque l’on commence un nouveau cycle, cependant, tout est nouveau, et se perdre dans l’océan d’opportunités qui s’offrent à nous est chose facile. Étant maintenant en dernière année, c’est sans prétention que je livre quelques conseils aux nouveaux étudiant·e·s francophones, lesquels, j’espère, pourront être utiles.

à savoir ce qui vous plaît pour déterminer la carrière vers laquelle vous aimeriez vous diriger ; l’université regorge d’opportunités amateures ou professionnelles intéressantes. Il est important que vous sachiez que, peu importe le parcours que vous choisirez, les programmes de maîtrise et de doctorat demandent des lettres de recommandation en lien avec votre choix de carrière, ainsi qu’un curriculum vitae qui soit le porte-parole de votre motivation. Ne per-

lettre de motivation, mettre en page un CV, besoin de maîtriser le logiciel Excel, une envie de méditer – par exemple – c’est l’occasion!

C’est le minimum requis pour entrer dans n’importe quelle université à la maîtrise.

3.3, ce chiffre gagnant…

Étudier dans une université anglo-saxonne comporte l’avantage majeur suivant: l’absence de hiérarchie entre l’enseignant·e et l’élève. Les professeur·e·s se considèrent comme des personnes ayant une expérience plus importante que la vôtre, et non pas comme des êtres supérieurs.

Si trouver le métier pour lequel vous êtes faits est un vrai casse-tête, et participer à des activités extrascolaires représente pour vous une perte de temps, misez sur vos notes: un·e postulant·e dont les résultats scolaires seraient en dessous du

Abordez TA et professeur·e·s

«Aujourd’hui la tendance – surtout dans les universités américaines – est au profil et non aux compétences.»

Investissez-vous Il est crucial — et je pèse mes mots — que vous cherchiez

«Ne perdez pas de temps : découvrez vos centres d’intérêts, vos talents, et investissez-vous à l’université (...)» Prenez soin de vous

Ayez confiance en vous Selon moi, il est important que vous preniez pleinement conscience que vous n’êtes pas là par hasard. Vous avez la possibilité d’assister à des classes données par des professeur·e·s expert·e·s dans leur domaine — ce qui signifie que l’université pense que vous avez toutes les compétences pour comprendre le cours: ayez confiance en vos capacités. Aussi, les personnes qui sont à vos côtés en classe font partie d’une des vagues étudiantes les plus prometteuses de leur génération. Tout comme vous, ils ont gagné à la sueur de leur front leur place dans l’auditorium. Mon premier conseil est donc le suivant: vous êtes unique et êtes une mosaïque de faiblesses et de forces. Ne gâchez pas votre temps à compter l’argent de votre voisin quand vous avez un diamant caché dans votre poche. Ne vous dénigrez pas et ne tentez pas de vous comparer entre vous. Si la compétition est un moteur puissant à court terme, sachez que l’entraide est ce qui vous permettra d’aller le plus loin possible, en plus de créer des amitiés sincères.

compromis. Il est important de solliciter leur aide si vous avez du mal à attaquer une dissertation ou un projet, ils vous donneront des pistes. Par ailleurs, ce sont eux qui vous noteront, et non le professeur. S’il vous arrive d’écrire vos travaux en français, sachez cependant que l’enseignant·e pourrait lui-même vous noter! Leur demander de l’aide montrera votre engagement et vous permettra de connaître leurs exigences.

Eléonore Nouel dez pas de temps: découvrez vos centres d’intérêts, vos talents, et investissez-vous à l’université dans des activités extrascolaires en lien avec votre projet professionnel. Les choix ne manquent pas : club de débats, journalisme, théâtre, musique, projets de recherches… Exploitez les services Le montant que vous avez payé pour votre première année n’est sans doute pas passé inaperçu. Cela dit, l’argent (que dis-je ? la fortune !) que vous avez investi permet de financer entre autres des services rà l’université : si vous avez besoin de consulter un médecin, un psychologue, besoin de conseils pour écrire une

le délit · mardi 4 septembre 2018 · delitfrancais.com

«Les comités de recrutement et d’admissions recherchent des personnes passionnées qui n’ont pas peur des défis»

minimum requis mais dont les expériences professionnelles seraient dignes d’intérêt peut recevoir une lettre d’admission à un master prestigieux. L’inverse est peu probable. Aujourd’hui la tendance – surtout dans les universités américaines – est au profil et non aux compétences. Les comités de recrutement et d’admissions recherchent des personnes passionnées qui n’ont pas peur des défis, et non des encyclopédies sur pattes. Si votre CV manque d’expérience, assurez-vous de maintenir votre CGPA à 3.3/4 soit B+.

Vous pouvez donc aller leur parler sans crainte pendant leurs heures de bureau et débattre sur un sujet du cours qui vous a surpris·e, intéressé·e ou même choqué·e. Ces experts sont à votre disposition pour répondre à vos questions: quelle chance ! Par ailleurs, vos teaching assistants (TA) peuvent aussi être d’une grande aide. Ce sont des personnes d’à peu près votre âge. Si vous êtes trop gêné·e pour aborder votre professeur, les teaching assistants constituent donc un bon

L’université est un endroit passionnant : elle regorge de personnes extraordinaires, d’opportunités à foison, de cours captivants… Une ombre au tableau: parfois, votre corps ne tient pas le rythme et l’anxiété commence à vous provoquer des symptômes qui vous handicapent. Il est important de faire une pause quand votre cerveau n’est plus productif. Faire du sport en revanche, vous aidera mentalement et physiquement. Le plus gros écueil des étudiants en période de stress est de se convaincre qu’ils n’ont pas le temps de prendre une pause quand ils en auraient pourtant bien besoin. Votre santé mentale est précieuse, et il est capital de la ménager : votre corps n’est pas une machine. Mon dernier conseil sera donc de miser sur l’organisation pour ne pas tout faire à la dernière minute afin de minimiser votre stress: faites vos lectures quand on vous demande de les faire (elles sont essentielles lors des examens: 50% des questions portent sur les notes du cours, l’autre moitié sur les notes des lectures), essayez de prendre le temps de faire vous-même votre repas afin de vous alimenter de manière saine, et essayez de faire du sport ! Le Fitness Center de McGill ouvre à six heure du matin et ferme à vingt-deux heure, et l’entrée ne coûte que 30$ par semestre. x

société

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Philosophie

«La philosophie nous éveille à ce que l’existence du monde et la nôtre ont de problématique en soi, à tel point que nous soyons à jamais guéris de chercher...» Maurice Merleau-Ponty

philosophie@delitfrancais.com

Introduction

Démystifier l’école philosophique Une introduction à la nouvelle section Philosophie. Simon Tardif

Le Délit

N

e jamais perdre à l’esprit la formule latine primum vivere deinde philosophari (vivre d’abord, puis philosopher). Quoique la dernière partie entraîne une meilleure condition de la première, il n’est jamais trop pertinent de rappeler que l’action précède le fastidieux exercice de la contemplation ou encore celui de la méditation. Pour autant, la philosophie, lorsqu’elle procède d’un art de vivre, s’enseigne et peut améliorer nos vies. Il ne faudrait donc pas nous arrêter à une caricature sans cesse renouvelée du travail philosophique. Arthur Schopenhauer, dans sa célèbre critique de la philosophie universitaire, se targuait de dire que «seule la lumière qu’on a allumée pour soi-même peut éclairer ensuite les autres». Cette nouvelle section du Délit envisage les choses de cette manière.

(ontologie, métaphysique, esthétique, éthique, morale, logique), plus loin encore de ses philosophies volontairement obscures, renseigne sur le sens des limites, cette vertu maîtresse à toute existence et à toutes les communautés. Pour mener à bien ce programme, la section met à la disposition des contributrices et contributeurs quatre chroniques. Disons. Entrevue À propos de cette chronique, peu de choses sont à mentionner. Les entrevues de la section «Philosophie» ont pour particularité d’être faites avec des spécialistes de la chose philosophique. Loin d’être pédantes,

assassin de la section. Petit manuel d’instruction. L’écriture d’une mythologie relève d’une certaine méthode visant à lire le réel à partir du langage qui le déforme. Tout mot étant déjà, d’une certaine façon, un symbole représentant un objet, une idée, un état, etc., les mythes apparaissent tel un métalangage, c’est-à-dire un second sens superposé par-dessus le langage originel. Barthes l’exemplifie de la façon suivante: dans un livre de grammaire, la phrase «Les pommes que j’ai mangées étaient rouges.» a un sens littéral, faisant ici référence à la rougeur des pommes. Pour autant, la véritable signification de la phrase est plutôt: «Je suis un exemple d’accord de participe passé avec

Primum vivere deinde philosophari. Se rappeler la pensée de différents philosophes, de manière à réactualiser certains thèmes qui leur étaient chers, s’inscrit en cela dans un effort d’éclaircissement. Les philosophies qui nous intéressent sont celles de femmes et d’hommes qui ont cru bon penser pour eux afin de penser pour tous, ou encore celles qui, selon la maxime de Sénèque, ont vécu pour autrui afin de vivre pour eux-mêmes. Tout cela dans l’optique de vivre et rien d’autre. C’est pourquoi cette section «Philosophie» ne s’adresse pas exclusivement aux étudiants en philosophie. Nous ne le dirons jamais assez: notre effort n’aspire qu’à inviter au décloisonnement d’un domaine trop souvent critiqué et si peu transformé. Essentiellement, cette section s’efforce de proposer des ouvertures, voire de légères introductions, à des pensées qui n’auraient peut-être jamais fait leur entrée dans des vies qui pourtant pourraient y recourir. Cette section et son éditeur sont donc les porteurs d’un programme et ne s’en cachent pas: il faut s’intéresser à la chose philosophique pour la raison que l’on ne peut en faire l’économie qu’au danger d’ignorer les saines limites du monde. La philosophie, loin de ses gros et parfois rebutants mots

8 Philosophie

puis à comprendre la manière dont le mythe est vécu en société jusqu’à finalement devenir «naturel» ou «allant de soi». La mythologie tire une part significative de sa force et aussi de l’efficacité de son emploi de la croyance du vrai que l’on peut en avoir. Ceux pour qui la mythologie occupe et organise le quotidien n’entendent évidemment pas la mythologie comme nous pouvons l’entendre dans toute sa particularité barthienne, c’est-à-dire d’être une symbolique performative; pour ceux chez qui la mythologie règne, elle porte le nom de vérité. Nul masque, nulle nuance: la mythologie est un paramètre du monde cru-pour-vrai. Par exemple, la méritocratie : existet-il réellement une telle chose ? Les données probantes nous amènent à penser le contraire, pourtant subsiste cet incroyable autocar de campagne électorale sur lequel figure cette promesse: «travaillez si fort que vous ne pourrez qu’atteindre vos buts». De quoi rêver. Dans la mythologie Le monde où l’on catche, Barthes montre que le catch recèle en réalité une dimension mythique: il y a des catcheurs Héros, des catcheurs Vilains, une Victoire, une Défaite, une Justice. Barthes met l’accent sur la nature excessive du spectacle du catch, le comparant à une véritable Comédie humaine. Bien entendu, les spectateurs savent qu’il s’agit d’un spectacle...ou plutôt l’oublient-ils ?

Luce Engérant

« Les philosophies qui nous intéressent sont celles de femmes et d’hommes qui ont cru bon penser pour eux afin de penser pour tous » elles invitent à connaître la pensée de philosophes du Québec et à comprendre les dimensions de la recherche philosophique contemporaine. Plus précises dans leurs sujets, elles visent à ponctuellement pousser d’un cran la complexité de questions qui ne sont pas si simples, mais demandent souvent à être explicitées, tel que savait merveilleusement le faire un philosophe comme Henri Bergson. Mythologie La mythologie, ce poignard

avoir.» La phrase est vidée de son sens originel afin de signifier autre chose, et ce de façon intentionnée. Quelle analyse en tirer ? Barthes distingue plusieurs étapes afin de démythifier le mythe. Il convient d’abord de défaire la signification du mythe, de comprendre l’imposture et la déformation du réel par le langage (un peu à la manière du philosophe Alain Deneault dans Gouvernance),

La chronique «Mythologie» vise à appliquer cette méthode à la société contemporaine, à la politique, à la publicité, au quotidien banal (entre autres) afin d’en déceler les idéologies aliénantes. Le génie de cette méthode tient justement du fait qu’elle s’applique à toutes les parcelles du discours public pour en dévoiler les mécanismes, et donc la performativité à partir de laquelle les mythes interagissent avec la psyché populaire, les habitudes, les traditions, etc. Portrait de philosophe Petit favori de votre éditeur, le portrait de philosophe est l’arme de pointe de la vulgarisation philosophique. Le portrait peut avoir quelque chose d’assez large. Certaines personnes préfèreront décrire l’aspect technique d’une partie de sa pensée à des fins pratiques, tandis que

d’autres préfèreront appliquer l’un des aspects particuliers d’une pensée à une problématique bien contemporaine. Le portrait est un exercice excitant en cela qu’il est le partage d’un monde que l’on a d’abord découvert pour soi-même. La lecture de Platon vous a marqué d’une manière toute spéciale et a changé votre rapport au discours? Venez en parler. La philosophie nietzschéenne a su vous ouvrir la compréhension tragique? Endiablez-nous de votre rapport tous azimuts à la chose. Le portrait est l’ouverture principale vers d’autres horizons. Prose d’idée La prose d’idée est un genre d’article aux accents plus poétiques. Cette chronique permet d’aborder des sujets de manière plus ouverte. Elle est un exercice de style pour autant que celui-ci soit performatif. Le style n’est rien sans les effets qu’ils suscitent. La prose d’idée procède d’un rythme, d’une marche; elle entend, lorsque réussie, créer une sympathie compréhensive des lecteurs à son objet. La structure libre offre à l’autrice ou à l’auteur le cadre libéré propre à une pensée qui ne saurait se contenter du droit au but. Parfois, l’objet que nous avons à penser demande à ce que l’on sache se mettre à sa hauteur; les méthodes conventionnelles d’écriture manquent parfois en cela. Dans une certaine mesure, les textes de Montaigne, de Nietzsche ou encore de Bachelard peuvent être considérés comme des formes accomplies de proses d’idées. Un texte exploratoire aux carrefours des essais, discours, dialogues, entretiens, ou encore des lettres. x Suggestions de lecture : 1- La fin du courage (Cynthia Fleury) 2- Le régime des passions (Clément Rosset) 3- Nous, fils d’Eichmann (Günther Anders) 4- La crise de la culture (Hannah Arendt) 5- Le rire (Bergson) 6- La société du spectacle (Guy Debord) 7- Leçons et conversations (Wittgenstein) 8- Mythologies (Barthes). 9- Le Manuel (Épictète)

le délit · mardi 4 septembre 2018 · delitfrancais.com


Culture artsculture@delitfrancais.com

Rencontre avec Culture Bienvenue dans la section Culture! Accroche bien tes yeux et ta ceinture, car le voyage ne sera pas de tout repos. Au péril des idées reçues, nous t’embarquons dès maintenant sur la route de la découverte de l’art montréalais et québécois. Et rappelle-toi, ce qui compte, c’est le chemin, pas l’ar(t)rivée... Dans ces pages, tu trouveras chaque semaine une fourmillère de créations; une prose endiablée, des accords sous tension, des photos pour résolution, des idées qui se heurtent et s’écoutent, des arts en veux-tu en voilà (et on sait que tu en veux). Au rythme des collages, des peintures, des rimes pigmentées, des compositions de lignes et de sons, nous te proposerons aussi des entrevues de gens dangereusement passionnants, des suggestions et avis sur l’actualité culturelle montréalaise, des brouillons, des esquisses de pensées, des textes, comme celui-ci, tentant des envolées sans voler bien haut. Et puis surtout, il y aura toi. On l’espère. De l’art, des projets, des critiques et des opinions, des témoignages et des idées: tout est bon à nous confier. Au Délit, et dans cette section tout particulièrement, nous avons à coeur de promouvoir les jeunes talents, et c’est avec un plaisir réel que nous t’écouterons et te publierons. Chaque semaine, nous attendrons tes écrits, tes dessins animés ou tes natures mortes, tes vidéos, tes photos et toutes les créations qui te font vivre et nous font exister. Chaque semaine aussi, nous te proposerons des sujets, te donnerons l’occasion de rencontrer des artistes en tous genres. Dans notre agenda polyphonique, nous inscrivons d’autres objectifs. Parmi eux, celui de faire vivre la francophonie, et faire entendre les voix de toutes celles et ceux qui la représentent. Car la francophonie et l’art sont autant de manières de promouvoir l’inclusivité sur notre campus, de célébrer le patrimoine culturel québécois et d’étayer l’effervescence de sa créativité. Alors, ami·e francophone, n’hésite plus : voici ton micro. Pour contribuer, c’est très simple: il te suffit de nous contacter directement à artsculture@delitfrancais.com.

visuel: niels ulrich

Littérature

Stéphanie Mailer a disparu Retour sur le dernier roman policier de Joël Dicker. Sebastien OUDIN-FILIPECKI

Le Délit

A

près La Vérité sur l’Affaire Harry Québert (Grand Prix du Roman de l’Académie Française et Goncourt des Lycéens) et Le Livre des Baltimore, l’auteur de romans à succès genevois Joël Dicker nous entraîne, une fois encore, sur la côte est des États-Unis et plus précisément dans la charmante petite ville d’Orphea, nichée au cœur des Hamptons.

décide donc de reprendre son enquête à zéro, quitte à mettre Orphea sens dessus dessous. Il pourra alors compter sur l’aide précieuse de son collègue et ami Derek Scott et d’Anna Kanner, jeune cheffe adjointe de la police locale. Si La Disparition de Stéphanie Mailer nous tient en haleine jusqu’au bout et nous fait frénétiquement tourner les

pages, il y a quand même une chance que l’on soit déçu·e. La fin tant attendue (tel le fameux «drame» dans Le Livre des Baltimore) ne semble pas à la hauteur de nos espérances. On ferme le bouquin avec l’impression d’avoir lu un mélange des deux précédents polars de Dicker. Le scénario semble être toujours le même: il y a

En attendant Goldman

Une recette qui marche Pour le capitaine Jesse Rosenberg, tout s’annonce pour le mieux. Après vingt ans de bons et loyaux services au sein de la police d’État, le voilà prêt pour une retraite bien méritée. Mais, c’est sans compter Stéphanie Mailer, journaliste ambitieuse (qu’on imagine bien gagner le prix Pulitzer) qui lui annonce fièrement qu’il s’est planté dans une enquête il y a vingt ans de cela et que le meurtrier court toujours. Voilà de quoi intriguer Jesse, d’autant plus que la jeune femme disparaît sans laisser de traces peu de temps après cette révélation. Ce dernier

le délit · mardi 4 septembre 2018 · delitfrancais.com

20 ans s’est passé un événement qui a dramatiquement bouleversé la vie des protagonistes. Ces derniers, alors qu’ils croyaient savoir ce qu’il s’était passé, doivent tout remettre en question et se lancer dans une nouvelle enquête afin de faire éclater la vérité. La recette est bonne, mais après y avoir goûté deux fois, la magie n’opère plus.

editions de fallois

Toutefois, si c’est le premier livre de Joël Dicker que vous choisissez de lire, vous ne serez pas déçus. La Disparition de Stéphanie Mailer reste indéniablement un très bon polar. L’intrigue demeure palpitante, le suspense est hitchcockien, les personnages sont attachants et une multitude de rebondissements guette le lecteur à chaque page. Donc, aucun risque de s’ennuyer, et surtout, impossible de fermer l’œil avant d’avoir découvert le fin mot de l’histoire. On espère tout de même que Marcus Goldman (héros des deux premiers romans) ne prendra pas de vacances trop longues, car on ne l’oublie pas et il risque de nous manquer. x

culture

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LIGNE DE FUITE «

Quand je ne crée pas, je ressens de l’inquiétude. Je ne sais pas encore si la créativité est un muscle ou s’il faut la laisser respirer, mais j’ai parfois cette anxiété de la page blanche, du manque d’idée.

»

dessin

Louise Hourcade

LOUISE HOURCADE

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Valentina Leoni

»

VALENTINA LEONI

J’ai toujours eu une imagination assez débordante et je ressens un besoin presque vital de m’exprimer sur papier. Je fais aussi de l’art parce que j’aime partager les sujets qui me tiennent à cœur, en les rendant visuellement sensibles.

peinture

10 culture

le délit · mardi 4 septembre 2018 · delitfrancais.com


U

n carnet de création mettant en avant les artistes présenté·e·s ici, ainsi que d’autres, est à paraître courant septembre. Seront publiées les oeuvres et les courtes entrevues de jeunes créatif·ive·s qui choisissent l’art pour s’exprimer.

JUSTIN NELISSEN créations de vêtements

le délit · mardi 4 septembre 2018 · delitfrancais.com

culture

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l


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