Le seul journal francophone de l’université McGill
Volume 94, numéro 8
Le mardi 9 novembre 2004
www.delitfrancais.com
On pastiche le Daily depuis 1977.
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Le Délit x 9 novembre 2004
Une question inconstitutionnelle? Le référendum de l’AÉUM pourrait être caduc. Marie-Pierre Dallaire
M
ercredi dernier s’est terminé le référendum étudiant de l’AÉUM. Avec un taux de participation de 18,7 p. cent, celui-ci est considéré comme valide. Par conséquent, dès l’hiver 2005, la cotisation de base de chaque étudiant à l’AÉUM sera haussée de 3 $ et annexée au taux d’inflation. Cette hausse a été appuyée par près de 60 p. cent des étudiants. De plus, le conseil étudiant de première année a été élu et des hausses de frais ont été approuvées pour les étudiants à temps partiel de la faculté des sciences. Cependant, les résultats des questions concernant la Société de Publication du Daily (SPD), lesquelles demandaient aux étudiants de se prononcer à savoir si la SPD devait être reconnue indépendante de l’AÉUM et s’il devait être possible de se faire rembourser les frais de 5 $ associés à celle-ci (opt-out), ont été retenus par l’AÉUM. En effet, la SPD a émis un communiqué au Conseil judiciaire stipulant l’inconstitutionnalité de la question sur le droit de s’exclure de la SPD, une démarche tout à fait légale. De plus, cette question a été incluse au référendum sans même que l’AÉUM ne joigne les membres de la SPD, laquelle est pourtant, il faut le rappeler, une société indépendante. Puisqu’une clause de la constitution de la SPD stipule qu’un étudiant désirant modifier la constitution de la SPD doit absolument contacter un membre du conseil d’administration pour ce faire,
les questions référendaires seraient inconstitutionnelles. Bref, tout ceci est présentement entre les mains du Conseil judiciaire de l’Université. La perte d’autonomie de la SPD représenterait sa subordination à l’AÉUM et, du même coup, une perte de liberté de presse, puisqu’elle serait sujette aux pressions des différentes instances universitaires. Le passage d’une clause d’opt-out rendrait les sources de revenu de la presse indépendante plus instable et offrirait à l’AÉUM un moyen détourné de faire pression sur la SPD. En effet, la SPD pourrait-elle encore se permettre de dénoncer les abus de l’Association et de l’Université si les membres lésés pouvaient décider à tout moment de faire pression sur le corps étudiant pour qu’il retire son financement? Pour le moment, aucune censure de la part de l’Université ne peut être effectuée sur la SPD, qui jouit d’une totale indépendance. x
9 novembre 2004 x Le Délit
éditorial
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Le Délit
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Le journal francophone de l’université McGill
Internet: par-delà les frontières.
3480, McTavish, bur. B-24 Montréal (Québec) H3A 1X9
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rédactrice en chef Valérie Vézina chef de pupitre-nouvelles Philippe G. Lopez chef de pupitre-culture Flora Lê rédacteur-reporteur Eleonore Fournier coordonnateur de la mise en page David Drouin-Lê coordonnateur de la photographie Éric Demers coordonnateur de la correction Julien Vinot chef illustratrice Jany Lemaire
D
’emblée, je dois vous avouer que je suis de ceux qui ne connaissent que les rudiments de l’informatique. Comme j’aime bien le dire, tant que mon ordinateur n’explose pas lorsque je l’ouvre, ma mission est accomplie. Mais, je dois avouer: l’informatique… Quelle révolution! Je me rappelle encore, j’avais treize ans lorsque, à la maison, le premier ordinateur est entré: un 486. Une innovation devenue une antiquité à peine dix ans plus tard. Avec l’ordinateur, que de temps économisé à écrire ses travaux, à jouer aux cartes! Avec l’ordinateur, j’ai vite découvert l’Internet. Média par lequel on peut tout trouver en une fraction de seconde (les 312 000 documents comprenant le mot «délit» trouvés en 0,31 secondes sur google me donnent des frissons dans le dos. Merde, c’est vraiment rapide) n’importe quoi, n’importe où dans le monde. Internet, c’est aussi le chat. Chater. Une autre belle innovation qui permet une autre belle économie de temps. Existe-t-il un autre mode de communication par lequel on peut «parler» avec dix amis différents en même temps et ce, sans avoir à bouger d’un poil? Le clavardage a ses avan-
tages. On peut discuter de tout et de rien, avec des gens de partout à travers le monde. On peut entretenir une relation avec des gens à l’autre bout de la planète, avec ceux au coin de la rue aussi. Et cette cruelle réalité m’a sauté en plein visage, il y a quelques jours de cela. Une amie est au Sénégal depuis deux mois. Elle nous écrit parfois de longs courriels nous décrivant son stage, son quotidien. Le genre de messages envoyés à toute sa liste de contacts, sans message personnalisé; le genre qu’on déteste recevoir. Enfin, quoi qu’il en soit, l’autre jour, je me connecte banalement sur msn et soudain une fenêtre m’annonce sa venue. Surprise et perturbée, sachant qu’elle est si loin, on se met à jaser. Ce fut pour moi un moment fort chargé en émotions. Parler avec son amie perdue dans un petit village sénégalais, ça faisait aucun sens. J’ai d’abord ressenti une grande joie intérieure. Puis, j’ai réfléchi. Elle et moi avons grandi dans le même village. On restait à cinq minutes à pied et parfois, le seul moyen où l’on arrivait à se dire les «vraies affaires», c’était via l’Internet. Absurde, non? Ça m’a mis à l’envers après que l’on ait fermé notre fenêtre de conversation Sénégal-Montréal.
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Caribou ou coquelicot
Je suis de ceux qui croient à l’humanité en l’homme. Je ne répugne certes pas la technologie, mais je me demande jusqu’où elle va. Incroyable tout ce qu’Internet peut permettre. Et ça me dépasse. Ça me dépasse que l’être humain s’il veut obtenir maintenant une œuvre d’Aristote n’ait plus besoin d’aller à la bibliothèque du coin. Ça me dépasse que les amitiés en soient réduites à quelques mots échangés sur le chat. Certes, il est beaucoup moins gênant de dire ce que l’on pense de quelqu’un sans avoir à faire face à sa réaction immédiate. Certes, il est beaucoup plus facile de se confier sans avoir ce malaise de la présence de l’autre. Mais, ne serions-nous réduits qu’à ce contact connecté? Et je suis aussi coupable que vous. Combien de relations ai-je via le net? Difficile à dire, et ça me fait peur. Oui, Internet: une belle ouverture sur le monde. Oui, le chat, une belle ouverture aux autres. Mais l’autre serait-il simplement réduit à ce fil qui nous relie au reste de l’univers ou vaut-il encore la peine de se soucier de ce contact si primitif, de ce contact humain? x
Bush... encore pour 4 ans
Entrevue avec Derek Hess
webmestre Bruno Angeles couverture Éric Demers
gérance Pierre Bouillon publicité Boris Shedov photocomposition et publicité Nathalie Fortune le McGill Daily Daniel Cohen Conseil d’administration de la Société de Publication du Daily: Marie-Eve Clavet, Emily Kingsland, Eugene Nicolov, Jeff Carolin, Jean-Olivier Dalphond, John Jeffrey Wachsmuth, Daniel Cohen, Valérie Vézina, Joshua Ginsberg L’usage du masculin dans les pages du Délit français vise à alléger le texte et ne se veut nullement discriminatoire.
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collaboration Alexandre de Lorimier Marie-Pierre Dallaire Jasmine Bégin Marchand Laurence Bich-Carrière Félix Meunier Éric Ross Ynès Wu Franco Fiori Jean-Loup Lansac Alexandre Vincent Marie-Noëlle Bélanger-Lévesque Philippe Mannasseh David Pufalh Virginy Lavallée Pascal Sheftesty Borhane Blili-Hamelin
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Qu’est-ce que le RIDM?
Vous n’avez rien à faire ce mardi à 16h30? Venez au Délit: réunion local B-24 du Shatner.
Le Délit français est publié par la Société de publications du Daily. Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et illustrations dont les droits avaient été auparavant réservés, incluant les articles de la CUP). Les opinions exprimées dans ces pages ne reflètent pas nécessairement celles de l’Université McGill. L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans ce journal. Imprimé par Imprimerie Quebecor, St-Jean-sur-Richelieu, Québec. Le Délit est membre fondateur de la Canadian University Press (CUP) et de la Presse universitaire indépendante du Québec (PUIQ). Imprimé sur du papier recyclé. ISSN 1192-4608
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04 Le Délit x 9 novembre 2004 nouvellestechnologie Espionnage sur Internet: y a-t-il lieu de s’inquiéter? Les méthodes d’espionnage se raffinent et se répandent à une rapidité inquiétante. Eric Ross
C
e phénomène n’est sans doute pas étranger aux revenus affriolants associés aux pratiques importunes de piratage. Les logiciels et programmes qui engendrent l’espionnage constituent une menace grandissante alors qu’Internet atteint une popularité inégalée et est appelé à jouer un rôle de premier plan notamment au niveau du marché international. Ils s’infiltrent souvent sans votre consentement et, par conséquent, nombreuses sont les victimes ignorant leur installation sur le disque dur. Une façon courante de contaminer notre système informatique est par l’acquisition de logiciels de partage de fichiers (musicaux ou autres). Les économiseurs d’écran et autres
gratuités du genre risquent de conduire aux mêmes résultats gênants. L’opinion des experts est unanime, la solution au problème doit être composée de trois volets, soit une meilleure éducation des consommateurs, la préparation d’une contre-attaque efficace de la part des ingénieurs informatiques ainsi que l’élaboration de projets de loi en matière de justice criminelle. Ce dernier aspect viserait évidemment la dissuasion des éventuels contrevenants. Il faudrait idéalement envisager la création d’un réseau de surveillance international administré en collaboration par les gouvernements impliqués et espérer la participation d’une majorité de pays de façon à pouvoir inculper les
fautifs qui proviennent de diverses régions du globe. Un projet ambitieux, direz-vous, mais dont la nécessité semble désormais facilement justifiable. En attendant, les propriétaires de PC équipés de Windows XP peuvent compter sur le support technique de Microsoft Corp. qui distribue présentement aux membres enregistrés une mise à jour portant le nom de «Service Pack 2» et contenant des outils d’immunisation perfectionnés dont un pare-feu. La richissime entreprise recommande toutefois un nettoyage complet du système avant de procéder à l’installation afin d’éviter toute complication subséquente. De nombreux programmes sont dis-
ponibles à cet effet sur Internet dont le prix et l’efficacité varient. Ceux de Webroot Software Inc. («Spy Sweeper») et LavaSoft («Ad-Aware») sont généralement appréciés et, s’ils n’affranchissent pas entièrement l’ordinateur de ses fichiers indésirables, permettent d’obtenir des résultats généralement satisfaisants. Pour un rendement optimal, la réinstallation complète du système n’a toutefois pas son égal. Mais bien sûr, cela demande un certain temps et des connaissances minimales que tous ne possèdent pas. Plusieurs études effectuées auprès d’utilisateurs des réseaux Internet démontrent que fréquemment, et ce parfois de façon involontaire, la sécurité des systèmes est négligée.
En effet, l’absence de protection par un pare-feu, un logiciel antivirus qui n’est pas à jour ou une attitude insouciante face aux nombreux incitatifs visant l’acquisition de matériel douteux sur Internet sont autant de constatations évoquant l’urgence d’informer davantage le public sur les comportements à adopter et les ressources à utiliser pour protéger ses investissements. Le portrait semble donc plutôt rassurant mais encore rempli de promesses à tenir. Gageons toutefois que tout sera mis en œuvre pour protéger les consommateurs de manière à conserver la réputation des produits de ceux qui sont concernés dans cet épineux dossier.x
nouvellescontroverse
Les nouvelles pièces de 25 sous Chaque semaine, le Délit choisit un sujet controversé. Au hasard sont tirés le nom des journalistes devant défendre respectivement le pour et le contre.
POUR
J
’aimerais d’abord souligner l’excellente initiative de la Monnaie royale du Canada. Par son geste novateur et débordant d’originalité, cette noble société de la couronne a su mettre un peu de piquant dans notre morne existence automnale. En effet, avec les feuilles presque toutes disparues de nos beaux érables et nos pelouses devenues jaunâtres, l’apparition d’une couleur vive en ce début de novembre ne peut être que bien accueillie. Le rouge éclatant, ornant désormais les pièces de 25 sous, permet de rehausser notre moral chaque fois que nous devons effectuer nos gestes de consommation les plus banals comme téléphoner, acheter un café ou simplement nourrir un parcmètre. Néanmoins, au-delà de l’aspect purement esthétique du geste, il faut aussi regarder toute la puissante symbolique historique et pédagogique de l’apposition de ce coquelicot rougeâtre sur la pièce de monnaie la plus utilisée au pays. Le coquelicot mis en valeur sur celle-ci est le symbole par excellence pour nous rappeler notre noble victoire lors de la Première Guerre mondiale et nous souvenir de nos concitoyens morts sur les champs de bataille. Toujours en accomplissant les gestes les plus usuels, nous pouvons nous remémorer tous ces grands Canadiens ayant bravement, courageusement et surtout volontairement défendu (avec parfois un peu d’aide de la conscription, je le reconnais) la grandeur de l’Empire britannique en ces temps agités, un empire juste et porteur de valeurs démocratiques comme les États-Unis aujourd’hui. En terminant, il ne faudrait pas oublier le second aspect symbolique du geste autant, sinon davantage, important que le premier. La Monnaie royale du Canada étant une entité du bienveillant et intègre gouvernement fédéral, elle a pour mission essentielle de promouvoir l’unité du plus beau pays du monde et de contribuer à lutter contre ces vils personnages aux sombres desseins que sont les séparatistes canadiens-français de la province de Québec. La mise en circulation de cette merveilleuse pièce de collection aura pour effet de renforcer l’unité du pays dans le cadre d’une autre opération de nécessaire information comme l’a été le programme des commandites. x
C
CONTRE
Cette semaine: David Drouin-Lê et Laurence Bich-Carrière s’affrontent dans le ring. Il est à noter que les positions exprimées ne sont pas nécessairement partagées par leur auteur.
eux d’entre vous qui auraient été cloîtrés dans un monastère ou dans un village mennonite ces trois dernières semaines auront une petite surprise en allant chercher leur café chez Tim Horton’s (ou à défaut, en regardant l’acteur payé pour le faire dans une «plogue» publicitaire éhontée): une pièce-jouet pourrait se glisser dans votre monnaie. Trente sous factice, croyez-vous? Erreur. Malgré son coeur rouge coquelicot, le nouveau vingt-cinq sous «Remember-Souvenir» a cours légal autant que n’importe quel vieux caribou. Le 21 octobre dernier, la Monnaie royale canadienne (MRC) organisait, en grande pompe avec gouverneure générale à l’appui, une cérémonie de trois heures et d’un millier d’invités, dont le point culminant était le dévoilement d’une «pièce [sic] de circulation colorée, spécialement conçue pour rendre hommage aux anciens combattants [du] Canada dans la défense de la liberté». Quinze mille «piasses» de show pour une «pièce» de pacotille. Du discours de l’honorable John McCallum, ministre du Revenu, on retient «première mondiale» «procédé révolutionnaire» et «résiste à trois ans d’usure normale». Espérons que ses prévisions budgétaires soient meilleures que ses pronostics numismatiques parce qu’il faut bien moins qu’un détergent chimique pour égratigner le fier symbole: une caissière de Tim Horton’s à l’ongle longuet suffit amplement. Tim Horton’s justement gagne au change (sans mauvais jeu de mots) avec la pub d’enfer faite sur le dos des vétérans auxquels rien n’est versé. C’est John McCrae qui doit se retourner dans sa tombe: c’est sur leur sang qu’ont poussé les coquelicots de In Flanders Fields. Quoi qu’il en soit, la MRC vous offre un rouleau de quarante 25 ¢ coquelicot pour la modique somme de quatorze dollars: une aubaine! La Banque du Canada remplace la série Les oiseaux du Canada dont les canards, les perdrix et les sarcelles avaient bercé notre enfance par L’épopée canadienne et ses merveilleux dispositifs de sécurités (les faux billets de vingt côtoyaient les vrais le jour de leur mise en circulation). Et la MRC vient ajouter l’insulte à l’injure avec des 25 ¢ cheap. C’est un pas de trop dans la conspiration vers l’argent Monopoly™. x
9 novembre 2004 x Le Délit
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nouvellesorthographe
Ciel, mon français! Où l’Office de la langue française nous apprend que 285 millions de francophones ne savent plus écrire depuis 1990.
Laurence Bich-Carrière
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imanche matin, opération crêpes Suzette. Je suis tranquillement en train de casser des œufs dans de la farine lorsqu’on m’assène: «‘paraît que l’OLF a supprimé les accents circonflexes». Je suis peut-être une bigote, mais quand je suis en train de faire de la pâte à crêpe et qu’on me dit que les accents circonflexes n’existent plus, je me demande sérieusement ce que je suis en train de faire. Heureusement, le mélange doit reposer: je me «garroche» sur le site de l’Office où j’apprends
que, dans un souci de réforme orthographique, «l’accent circonflexe disparaît sur les lettres i et u (ex.: il parait, flute, traitre)», sauf s’il permet une distinction (il croît/il croit, mûr/mur)». Exit donc le chapeau sur la flûte, le mois d’août ou la bûche de Noël! De la bière en fût pas d’accent? Du moût de pommes pas d’accent? Un goûte-vin pas d’accent? Une soûlographie pas d’accent? Supprimons les cédilles, ça leur donnera une leçon! Ajoutons que certains exemples prêtent malheureusement à confusion: ainsi, un linguiste «réformé»
qui dira «être soul» sera probablement perçu comme «branché gospel» plutôt que foncièrement éméché. De même, un ascète prêchant «les joies du jeune» pourrait se trouver neuf mois plus tard avec un tas de nouveaux petits fidèles parce qu’on aura confondu le jeune, l’enfant avec le jeûne, le carême. Notons quelques petits problèmes. Primo, personne n’est au courant. La preuve: cette réforme a été proposée en 1990 (!). Quatorze ans plus tard, l’OFL croit bon de préciser sur son site qu’elle est en période de transition et qu’à l’instar
d’emprunter le réseau de la STM. N’attendez pas le circuit 144 de l’avenue des Pins si c’est pour vous rendre jusqu’à l’avenue du Parc. Une bonne marche de santé fera l’affaire. Encore plus si vous sortez du… centre sportif. Maintenant pourquoi payer une carte de bus si c’est pour marcher ? C’est une question noble, particulièrement si on considère les hausses successives, même si on nous répète ad nauseam que les tarifs à Montréal sont les moins élevés de l’Amérique et bon. 38 p. cent en sept ans, ce n’est pas toujours causé par l’inflation. Les retards En fait, le problème est que peu de personnes considère le transport en commun comme une
de l’Académie française, elle ne peut pénaliser aucune des graphies (mais allez l’expliquer au prof de votre petit frère qui a décidé d’écrire «dixmille-deux millepattes dégoutés»). Une réforme d’une telle ampleur ne saurait réellement avoir lieu sans consensus, à tout le moins sans le concert d’une majorité. «Faudra-t-il traduire Günter Grass en allemand?» titrait le quotidien Der Spiegel, alors que le gouvernement allemand proposait un projet similaire en 1998 et l’adoptait la même année. Ce qui ne l’a pas empêché d’être décrié.
solution possible aux problèmes de congestion et de pollution. Le nombre de voies réservées frise le néant. Celle du boulevard Pie IX a été considérée trop dangereuse et subséquemment fermée. Celle de l’autoroute 13 fermée aussi, puisque… personne ne l’utilisait. Les plaintes fusaient… Il n’est pas normal d’avoir une belle voie goudronnée et de ne pas pouvoir l’utiliser, disait-on. Plutôt que de voir le problème dans son ensemble, se demander si le covoiturage pourrait fonctionner, on rejette l’idée systématiquement, donnant des contraintes d’horaire, mais sans faire de réels efforts pour tenter l’expérience. La lenteur Je me suis surpris récemment
Résultat: les Conseils de la langue française ont préféré une attitude frileuse pour éviter de se mettre à dos les guildes des écrivains. Car comme le fait remarquer la linguiste Henriette Walter, «si les auteurs, leurs éditeurs et les professeurs n’ont pas envie de suivre la réforme, la réforme ne sera pas suivie, l’usage présent restera et l’on apprendra à lire en écriture ancienne parce qu’il serait simplement impensable de mettre à la poubelle tous les classiques». x
à devoir utiliser un véhicule pour partir de mon patelin à Dorval pour me rendre sur le Plateau, alors que j’emprunte habituellement le bus. Je suis en effet arrivé sur place vingt-deux minutes plus tôt que d’habitude. Sauf que je n’avais pas encore trouvé de parking. Après de nombreux faux espoirs causés par des emplacements réservés aux détenteurs de vignette ou encore par ces innombrables bornes fontaine, je trouvai une place à six coins de rue de ma destination. Temps total: trois minutes de moins. Et je n’ai pas eu l’occasion de lire mon livre de l’ancien sénateur Paul Wellstone pendant tout ce temps. Mouais… Comme quoi le système, sans être parfait, peut fonctionner. Encore faudrait-il y croire. x
Félix Meunier
O
n peut remarquer depuis quelque temps un certain mécontentement des usagers de la STM. Les bus sont en retard. Ils ne passent pas souvent. Ils sont bondés. Le métro est toujours en panne. C’est lent. Il faut réserver des jours à l’avance pour obtenir un transport adapté. Et l’hiver n’est même pas encore arrivé.
La fréquence Cet homme, à qui le quotidien La Presse offrait récemment une tribune, se plaint, attendant sur l’avenue du Parc au coin de Laurier, que trois bus pleins l’ont ignoré. La STM n’est évidemment pas blanche comme neige. Elle a adopté une approche très «transport aérien» où la game est de jauger la demande et de sur-
vendre au besoin, pour obtenir un taux de remplissage maximal. Ses études de logistique des transports se sont améliorées. Il est toujours bien agréable de voyager seul dans un avion ou encore en bus, mais n’est-ce pas signe d’une mauvaise gestion dans ces cas? Avait-on vraiment besoin d’un bus à cette heure? Pourtant, ce même usager qui grelotte sur l’avenue du Parc n’a-t-il pas pensé aux différentes possibilités qui s’offrent à lui? Le boulevard Saint-Urbain et son circuit de bus est deux rues plus loin. Saint-Denis, dix rues plus loin. Le métro, onze rues plus loin ou à dix minutes. La marche serait-elle devenue caduque? La patience est une sage vertu, j’en conviens, mais la paresse est un sombre vice également. La débrouillardise est certes un atout quand vient le temps
Un membre anonyme de la Société des chiâleurs de Montréal.
06 Le Délit x 9 novembre 2004 nouvellesinternational
George Bush l’image L’importance de l’artificiel dans les éléctions américaines. Eleonore Fournier
L
e 2 novembre, des dizaines d’étudiants se sont retrouvés au Gert’s, pour regarder les élections américaines. Pendant les nouvelles, tout le monde parlait, buvait, se promenait. Pourtant, à dix heures, l’attention générale s’est dirigée vers l’écran: le Daily Show de Jon Stewart commençait. Stewart se déclare «faux journaliste», et son show est actuellement mieux coté chez les jeunes que les émissions de nouvelles et les journaux. L’humoriste a un impact politique réel. Démocrate dévoué, il dit que Bush a fait beaucoup de tort à l’Amérique et essaye de faire passer son message. Il contribue à influencer son jeune public contre le président américain et les encourage à voter. Mais, d’après lui, il est humoriste avant tout, car il offre une opinion informée plutôt que du journalisme. Pourtant, on peut de moins en moins faire la différence entre le vrai et le faux journalisme. Les médias se sont rendu compte que leur rôle d’intermédiaire entre les politiciens et le public leur permet de transformer les faits. Et, comme le démontre les cotes du Daily Show, c’est ce que le public veut. L’artificiel est devenu plus attirant que le réel, même dans la politique. Pourquoi les Américains ontils réélu George Bush? Parce qu’il donne l’impression d’être sûr de lui, il prétend avoir des valeurs américaines et parle régulièrement avec Dieu. C’est son image, minutieusement élaborée par ses conseillers, qui lui redonne le pouvoir, car aujourd’hui, les images sont plus importantes que ce qu’elles représentent. Derrière son sourire inoffensif et son calme suffisant se cache un homme dont les décisions ont causé des dizaines de milliers de morts et qui n’exprime aucun regret. Ses hommes ont tué, ont torturé, et continuent aujourd’hui encore. Les droits des Américains diminuent de plus en plus, les médias et les professeurs à l’université sont censurés, des citoyens et immigrants se font emprisonner arbitrairement, l’éducation devient lavage de cerveau. On dirait un dirigeant violent et répressif. «Mais non, dirat-il à la télévision, je suis le président de la nation la plus démocratique du monde». Les médias soit-disant sérieux nous transmettront fidèlement ses paroles, en oubliant de parler du désastre qu’il a causé. Leonard Moore, professeur d’histoire politique et sociale américaine à McGill, pense que
Bush a besoin de se cacher derrière son image pour faire oublier sa timidité, sa faiblesse, et son incompréhension de la politique américaine. «Il ne comprend pas ce qu’il fait, et il est dépendant de la religion et du pouvoir comme il l’a été de l’alcool». Depuis la présidence de Ronald Reagan, les républicains sont devenus maîtres en manipulation médiatique. Ils ont pu faire élire Bush, «la plus grande faillite de l’histoire américaine», selon le professeur Moore, pour un deuxième mandat, alors que John Kerry avait le soutien international. De plus, soutient-il, l’image et la présentation d’un candidat est un facteur déterminant lors de son élection. Au cours du premier débat présidentiel télévisé, en 1960, on a pu voir l’importance de l’apparence pour l’opinion publique. Richard Nixon, faible, fatigué, mal rasé a été mis sous la table par le jeune John F. Kennedy, qui avait l’air frais et bien dans sa peau. Depuis, les candidats ont pris soin d’être bien habillés et maquillés avant de paraître en public. Le professeur Moore ajoute que même la démarche de Bush est calculée. «Il marche comme un ‘’jock’’, comme s’il venait de lever des poids au gymnase et que ses bras étaient encore gonflés, ou alors comme s’il était prêt à dégainer». C’est parce qu’il veut avoir l’air du protecteur des États-Unis qu’il entretient son image de «tough guy». Le leadership de Bush a été commercialisé, comme un produit quelconque. En sondant l’opinion populaire, les compagnies publicitaires américaines ont pu, depuis les années 1920, créer des stratégies de marketing qui permettaient de vendre des produits inutiles, et souvent nocifs. Aujourd’hui, des compagnies similaires vendent des politiciens, misant sur la présentation plus que sur la qualité. Et la semaine dernière, le public a acheté un homme qui avait calculé chaque geste, chaque sourire devant la caméra; une machine bien rodée grâce à des conseillers comme Karl Rove qui ont mené une grande campagne publicitaire. Alexis de Tocqueville, en 1831, parlait de la politique américaine en tant que divertissement populaire. Il a encore raison, et c’est cela que Jon Stewart a bien compris. L’information médiatique est de plus en plus une mascarade. De nombreux médias ont transmis des nouvelles allant contre l’image de Bush, mais la majorité des Améric-
ains ne les a pas crus. La propagande et le mensonge qui ont été retransmis par la chaîne de télévision Fox et le journal Weekly Standard, entre autres, ont suffi pour les convaincre, car ce ne sont pas les faits qui im-
portent, mais la façon dont ils sont présentés. Alors, il semble que les médias ont servi davantage à nous éloigner du réel qu’à nous en rapprocher. Depuis le 2 novembre, Jon
Stewart rit jaune, mais c’est grâce à Bush qu’il est devenu si célèbre, et il pourra s’en moquer pendant encore quatre ans. x
9 novembre 2004 x Le Délit
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cultureentrevue
Derek Hess et l’art du «Stress» Âme déchirée? Amour engourdi? Tensions étouffantes? Voir... toutes les plaies du passé naître de nouveau sur sa peau. Sentir... tout à coup son coeur tiré des quatre coins par ses maux. Tels sont les émotions qu’on retrouve avec une intensité sans précédent dans les dessins de Derek Hess, artiste et illustrateur originaire de Cleveland, Ohio. Ynès Wu
B
ien que le nom de Derek Hess ne semble pas être une connaissance familière, ses œuvres sont pourtant omniprésentes. Cela fait déjà bien une décennie que Hess s’est consacré au design des posters de concert rock, en ayant créé des centaines pour des groupes de musique incluant entre autres Pink Floyd, Pearl Jam, Thursday et Dillinger Escape Plan. De plus, son nom est associé également à différents domaines artistiques dont l’illustration de couverture de CD (Converge, R.L. Burnside) et plus récemment à la création d’impressions en beaux-arts. Depuis, Derek Hess s’est bien établi dans le monde artistique ayant non seulement des œuvres exposées au Rock and Roll Hall of Fame mais également au musée du Louvre. Envoûté depuis sa jeunesse par les aventures de Captain America et inspiré des œuvres de Gil Kane, il a survécu haut et bas pour en arriver à ce qu’il est aujourd’hui, traduisant maintenant toute son énergie créative à établir un paysage visuel inspiré par la musique hardcore et ses expériences personnelles. L’an 2000 marque un point tournant dans le style de Hess: un style imprégné d’émotions crues et honnêtes s’est développé à partir d’une série d’impressions intitulée «Stress». J’ai été absolument fascinée par les œuvres subséquentes à cette série; par l’aspect universel des émotions et l’intensité incomparable qui en ressortaient. Une entrevue avec Derek Hess cette semaine m’a permis d’apprécier ce qui s’est passé derrière cette transition et les idées qui ont gouverné ses œuvres. Les feux rouges de l’amour dessinent le changement «Il ne faut jamais être satisfait; dès qu’on est satisfait, on devient stagnant». C’est exactement ce que ressentait Derek Hess, il y a quatre ans. Bien que sa carrière n’ait pratiquement jamais connu plus de succès, il trouvait que ses œuvres commençaient à toujours chanter la même chanson et devenaient trop faciles à imiter. Il s’est rendu compte également que ses dessins originaux étaient tellement plus honnêtes et plus intenses que les œuvres finales. Derek Hess n’était pas à l’aise de ne pouvoir retrouver la fraîcheur et la vitalité des pièces originales. En ce temps-là, une relation amoureuse tombe également à l’eau. L’amour, dit-il, est souvent «une disposition à ignorer ce qui est réel. De voir
les feux rouges et choisir de foncer quand même». À cause de cette naïveté, on prend des coups par la suite et on les mérite bien. Suite à cette déception amoureuse, Hess commença donc à se concentrer de plus en plus sur ses dessins originaux qui permettent d’extraire ses émotions et de les transmettre aussi fraîches que possible sur papier. Bien que les blessures se sont cicatrisées depuis, ce style aux lignes pures, simples et perçantes est resté une signature de ses pièces de beaux-arts. Du soi à l’universel Derek Hess fait une distinction entre l’illustration et l’art. Selon lui, l’illustration porte à l’interprétation des idées d’autrui alors que l’art serait plutôt une représentation honnête de soi. Ainsi il dit: «Je suis mon art et cela me rend effectivement vulnérable de temps en temps. Bien entendu, je ne me promène pas partout avec un béret noir, mais il n’y a pas de doute que ce que je dessine définit qui je suis». En fait, grâce à son utilisation du corps humain, on peut tous plus ou moins s’identifier à son art. Derek Hess se rend bien compte que le choix de la figure humaine aide à frôler l’universalité des émotions et des expériences humaines. Chaque pièce se rapporte certes à sa vie privée; cependant même si les «gens ne savent pas exactement de quoi il s’agit, ils peuvent tout de même s’identifier à un sentiment collectif, à un noyau ou à un fil commun». Quand l’artiste porte la forme entière de l’humaine condition Derek Hess parle également du fardeau et des pressions qui pèsent sur chaque personne, thème qui est amplement reflété dans ses œuvres. De ses impressions émane un sentiment universel de notre monde contemporain par lequel chaque personne se sent de plus en plus dénudée et vulnérable au sein de la société. Chacun pense devoir lutter contre des tensions internes aussi bien qu’externes, écrasé par ses propres bagages mais également par un fardeau collectif, qu’il soit social ou politique. «C’est certain que je porte beaucoup de mes propres soucis, mes propres fardeaux, comme tout le monde d’ailleurs», dit-il. «Ces problèmes sont surtout spécifiques à moi, ce sont mes bagages. C’est quelque chose qui est reflété dans mon art.
Gravure intitulée Valentine. Elle a été inspirée à Derek Hess des paroles d’une chanson de Henry Rollins «I got my arms wrapped around myself, you have your arms around someone else.»
Mais je pense qu’il y a également un très grand fardeau dans notre société, de nos jours. Je pense qu’il y a un fardeau universel qui règne partout autour de nous et en nous. Quand les gens s’identifient à mon art, il se peut que ce soit d’un point de vue social ou simplement qu’ils attachent leurs propres problèmes à l’image». Quels sont les problèmes pesant sur la vie moderne selon Hess? Il cite surtout des problèmes environnementaux, mais évidemment s’attarde également
sur l’état politique des États-Unis, qui se «dirigent de plus en plus vers la droite et aussi deviennent de plus en plus intolérants». Il faut dire que la conscience pèse lourd pour cette presque-moitié américaine qui vient de perdre de nouveau sa voix. Néanmoins, Derek Hess fait sa part en créant un art qui est une partie intégrale de l’esprit humain. Si un livre doit être la hache qui brise la mer gelée en nous, son art rempli sans aucun doute cette
fonction. Les œuvres de Hess dépeignent l’homme moderne, dépouillé de sa chair avec son âme exposée dans toute sa vulnérabilité mais aussi dans toute sa force: une âme qui possède encore l’habileté de se redresser et de se diriger vers de meilleurs jours malgré tous les obstacles. x Pour plus d’information sur Derek Hess et son art, visitez le site web www.derekhess.com
08 Le Délit x 9 novembre 2004 nouvellesinternational
DANGER: MINES L’action contre les mines antipersonnelles en Bosnie-Herzégovine. Jasmine Bégin Marchand
L
qui représente un quart de la population. Dans ces données ahurissantes, on compte un bon nombre de réfugiés qui, de retour dans leur pays d’origine, sont loin de retrouver la sécurité de l’avant-guerre. Car si la guerre est terminée, sous le sol se trouvent des milliers de mines pour rappeler aux habitants que le danger de l’après-guerre, lui, est toujours présent. Heureusement, le danger relié aux mines n’est pas passé inaperçu aux yeux des gouvernements. Dans plusieurs pays, la production et l’emmagasinage de mines antipersonnelles sont interdits. De plus, le 3 décembre 1997, un grand pas a été fait dans le dossier contre les mines: initiée par le Canada et entrée en vigueur le 1er mars 1999, la convention d’Ottawa impose l’interdiction totale des mines antipersonnelles, le déminage des zones contaminées d’ici dix ans, la destruction des stocks de mines ainsi que l’assistance aux victimes. Cette convention fut signée par 142 États parties. Depuis, 37 millions de mines antipersonnelles ont été détruites, 1 milliard de dollars a été investi dans la lutte contre les mines, et trois pays ont récemment achevé le déminage complet, soit le Honduras en octobre 2004, Djibouti en avril 2004 ainsi que le Costa Rica en janvier 2003. De plus, le nombre de victimes par mine antipersonnelle par année a baissé considérablement.
Jasmine Bégin Marchand
es mines antipersonnelles dans les pays dans l’aprèsguerre représentent un danger considérable pour les habitants. Depuis la guerre en BosnieHerzégovine, plusieurs organismes se sont impliqués afin d’aider la population à vivre dans un environnement sécuritaire. Comme plusieurs jeunes étudiants, Julie Boudet a participé, en tant que représentante canadienne, au programme de Jeunes Ambassadeurs pour l’action contre les mines. Ce n’est que récemment qu’elle est revenue de Bosnie-Herzégovine. Mercredi dernier, l’étudiante en droit international à l’UQÀM présentait une conférence sur ce programme de la Croix-Rouge ainsi que sur l’effet des mines sur la population. En Bosnie-Herzégovine, où la conférencière a passé la majorité de son programme, on évalue à 2 000 kilomètres carrés l’espace contaminé de mines antipersonnelles alors qu’en Croatie, approximativement 1 630 kilomètres carrés sont contaminés par encore plus de mines qu’en Bosnie, le pays ayant le plus de points stratégiques durant la guerre. Ces mines enterrées ont d’énormes impacts sur la population des pays touchés. En BosnieHerzégovine, 1 366 communautés sont touchées directement ou indirectement par la présence des mines. Soit 1 378 807 personnes, ce
Julie Boudet témoigne de son expérience.
Et comment ça se passe en Bosnie? Plusieurs actions sont entreprises: par exemple, la destruction des stocks, la sensibilisation dans les écoles, l’éducation aux mines, l’assistance aux victimes ainsi que le déminage. Ce dernier se fait stratégiquement. En effet, afin de décider quel territoire déminer en premier, on évalue l’impact de chaque territoire sur la population. Jusqu’à présent, la majorité des missions de déminage a été menée afin de fa-
voriser le rapatriement des réfugiés et l’agriculture. Il est important de s’assurer du déminage total d’un champ car, une mine ou quarantecinq, le danger reste le même. Enfin, la Croatie et la Bosnie se sont fixé comme objectif d’avoir terminé le déminage pour 2009 et 2010. D’ailleurs, cette année, nous célébrons le cinquième anniversaire de la convention d’Ottawa; à mi-parcours, une autre convention, cette fois en Australie, aura lieu afin
de faire le point sur la situation des différents pays et sur les mines antipersonnelles. Un dossier à suivre. x Vous trouverez de plus amples informations sur l’action contre les mines sur le site www.minesactioncanada. org ainsi que sur le site officiel de la Croix-Rouge www.redcross.int, où l’on retrouve le magazine de ce mois-ci, portant sur les mines.
courrierdeslecteurs
À la défense de l’indépendance
En réaction à l’article «La séparation est-elle encore à l’ordre du jour?», nous avons reçu plusieurs commentaires. Patrick Sabourin écrit: «Je ne vois pas comment le concept de souveraineté dans un monde «interdépendent» serait de moins en moins «pertinent». Les États-Unis font tout pour éviter de partager leur souveraineté, alors que le Canada fulmine à l’idée de la perdre. Même s’il est vrai que l’interdépendance économique des États compromet en partie leur souveraineté, il n’en demeure pas moins que ceux-ci cherchent immanquablement à préserver leur droit à l’autodétermination. D’autre part, la comparaison entre le Canada et l’Europe est tout à fait inadéquate. Les pays d’Europe s’unissent de façon volontaire en négociant les règles d’adhésion et le contrat qui les lie. La constitution canadienne n’a jamais été soumise à un référendum (comme ce sera le cas de la constitution européenne
en France). De plus, le Québec n’a jamais signé la constitution canadienne. Ce qui signifie que le pacte fédératif canadien est illégitime. Au niveau international, c’est le Canada qui négocie les traités tels que l’OMC et la ZLEA. Le poids démographique du Québec dans le Canada est sous la barre des 25 p. cent depuis déjà un bon moment. Comment le Québec pourra-t-il tirer son épingle du jeu dans une pareille conjoncture Pour ceux qui croient encore que la langue française est mieux protégée au sein du Canada, est-il nécessaire de rappeler que la Cour suprême du Canada a invalidé une partie importante de la Charte de la langue française: le chapitre 3 en 1979, la «Clause Québec» en 1984 et la loi sur l’affichage en 1988? Faut-il rappeler que les immigrants au Québec s’orientent à plus de 60
p. cent vers l’anglais? Que l’anglais est toujours prédominant dans les secteurs clés au Québec, comme les affaires et l’éducation (voir l’article en pièce jointe)? Que le taux d’assimilation des francophones hors Québec est ridiculement élevé? Quant à la fiscalité QuébecCanada, il ne suffit pas d’aligner des colonnes de chiffres pour déclarer le Québec «gagnant». Il faut aussi voir comment l’argent est dépensé. La politique de développement de l’industrie aérienne canadienne a, par exemple, permis au gouvernement canadien de concentrer les vols à Toronto au détriment de Montréal (avec le désastre de Mirabel dont Ottawa est directement responsable). Les pertes économiques pour Montréal sont incalculables». Francis Halin, quant à lui, fulmine:
« …Je ne saisis pas l’utilité du titre La séparation est-elle encore à l’ordre du jour?… L’article «Numéro Un» du Parti québécois est de mettre en branle le projet de pays, de République québécoise… Bien sûr qu’elle est à l’ordre du jour… Qui plus est, elle est sa raison d’être, le titre de cet ordre du jour pour continuer cette subtile métaphore… «Le gouvernement fédéral fait beaucoup de concessions» soutient l’auteure de l’article. En fait, je pense que lorsqu’on apprend que ce même gouvernement, lors du deuxième référendum en 1995, a nommé proprement «programmes des commandites» ce qui constitue en soi la grosse arnaque politique de l’histoire du Canada, je ne vois pas de quelle concession il s’agit!!! Le camp du Non disposait de neuf fois plus d’argent sale pour faire campagne! En clair, comme le men-
tionne un article du Devoir du 29 octobre dernier, c’est «250 millions de dollars en cinq ans, dont 100 millions en honoraires et en commissions à une poignée d’agences de publicité entretenant des liens étroits avec le Parti libéral du Canada»!!! Dites-moi maintenant en quoi «le gouvernement fédéral fait beaucoup de concessions»!!! Non seulement 1) ils ont volé l’argent pour faire campagne contre le Oui, mais 2) ils en ont mis dans leur poche plusieurs dizaines de milliers. Bravo les concessions. Enfin, je dirai qu’au Québec les politiciens se rapprochent davantage de leurs semblables en République française… Ils ne sont pas tous avocats. Ils sont philosophes (souvent). À nous maintenant de voter populairement pour une République du Québec au plus vite. Question d’amour aussi».x
9 novembre 2004 x Le Délit
culturefestival
09
Les RIDM: pour les passionnés du réel
La 7e édition des Rencontres internationales du documentaire de Montréal se déroulera du 11 au 21 novembre. Virginy Lavallée
L
e documentaire a longtemps été mis de côté au profit des films de fiction: on ne lui accordait pas l’attention méritée et il se retrouvait souvent au fond des grilles horaires, ou encore sa réalisation était impossible à cause du manque de subventions. Pour ceux qui se passionnent pour ce genre cinématographique, cela représentait un problème réel. C’est pourquoi en 1997, les cinéastes de la Coalition documentaire ont cru nécessaire de mettre sur pied un événement qui avait pour but autant de défendre cette forme d’art que d’en faire la promotion et de la faire découvrir à un public plus grand qui n’avait pas nécessairement accès à la projection de documentaires. Cette démarche semble prendre encore plus d’importance dans un espace culturel comme celui du Québec, puisque l’histoire de la cinématographie québécoise a commencé avec le cinéma-vérité qui visait à la colonisation et à un retour à l’agriculture, et que certains de nos plus grands cinéastes appartiennent au domaine du documentaire, notamment Michel Brault et Gilles Groulx (Les Raquetteurs) de même que Pierre Perreault (Pour la suite du monde). Les premières Rencontres eurent donc lieu en 1998 et n’ont cessé depuis de défendre l’espace de création et de diffusion qui leur revient. Cette année, les RIDM profitent de la popularité croissante du documentaire, qui est devenu un
culturecinéma
Tarifa Traffic sera présenté dans la série Territoires du réel, et retrace le sort de milliers d’immigrants qui tentent de traverser le détroit de Gibraltar.
L’épreuve du feu est un film de Bernard Émond qui raconte l’incendi vu par les pompiers et les sinistrés.
produit culturel (c’est-à-dire qu’il est finalement rentable) et qui a connu quelques succès au box-office, pour tenter de rejoindre un public grandissant qui commence non seulement à apprécier l’art du réel, mais sait de plus en plus reconnaître la beauté du récit qui s’y cache. Peut-être parce que l’heure est
aux grands questionnements et aux inquiétudes politiques, ou peut-être parce que le documentaire semble devenir la voix d’un raisonnement ou d’une propagande soutenant celle-ci (on pense notamment à Michael Moore), les RIDM s’ouvrent cette année sur le thème de récit du monde. Bien loin de vouloir
Danse ta vie
s’en tenir à ce seul genre de documentaire (politique de propagande), les rencontres présentent aussi des films-essais poétiques, des films militants dénonciateurs, des films autobiographiques et des portraits qui constituent les cinq grandes catégories de la sélection officielle: Caméra au poing, Parcours intimes, Territoires du réel, Dossiers noirs et Nouveaux regards du Québec. Se retrouveront également à l’affiche des documentaires hommages à deux cinéastes disparus, soit Jean Rouch et Esther Valiquette, de même que trois profils de documentaristes qui ont marqué notre époque, la Française Claire Simon, le Québécois Bernard Émond et le Torontois Ron Mann. Puis, comme il est difficile de passer à côté des nombreux films qui ont pris pour sujet les États-Unis à l’heure de la chasse aux terroristes, on retrouvera aussi une catégorie Gros plan dont le titre est Les États-Unis, vérités et mensonges et qui nous présente huit films abordant un aspect différent de la polémique, et ce, grâce au regard de cinéastes américains, anglais, autrichiens, canadiens et norvégiens. Le public aura de plus la chance de participer à des projections-conférences, à des projections-débats, à des tables rondes et à des classes de maître, de même qu’à des projections spéciales pour le jeune public et le public sourd. Il est bien difficile de ne pas trouver parmi ce grand nombre d’activités
offertes (pour lesquelles des prix étudiants sont disponibles) celle qui nous convient le mieux et cette sélection séduira tous ceux qui se passionnent pour le cinéma du réel. Les Rencontres sont aussi orientées vers tous les curieux qui ne s’y connaissent pas encore beaucoup, mais qui s’intéressent aux films qui n’ont pas peur de poser des questions sans toutefois toujours apporter les réponses, des films qui font réfléchir et qui développent notre esprit critique, qui amènent à notre attention une réalité qui nous était étrangère ou une poésie qui nous échappait, mais qui ne manque jamais ne nous toucher. Il vaut la peine de se pencher sur ce genre pour l’importance qu’il a comme médium de transmission de connaissances ou comme outil pamphlétaire; la meilleure façon de le découvrir est encore de s’y plonger et les Rencontres internationales du documentaire de Montréal semblent l’occasion rêvée de s’initier à cette forme de cinématographie qui est depuis longtemps ancrée dans notre culture. x Les RIDM auront lieu du 11 au 21 novembre 2004 à la Cinémathèque québécoise et à l’Université Concordia. Pour consulter la programmation: www.ridm.qc.ca. Pour réserver ses billets: (514)844-2172 ou 1-866844-2172.
Un scénario incohérent fait sombrer CQ2 dans l’oubli. David Pufahl l y a quelques semaines, Carole Laure est venue faire la promotion de son dernier film dans le cadre de l’émission Tout le monde en parle. Il s’agissait de CQ2 (Seek You Too), un film sur le pouvoir qu’exerce la danse contemporaine sur une adolescente frondeuse. Ce film avait été diffusé à Cannes lors de la Semaine de la Critique et avait gagné le grand Rail d’or. La réalisatrice avait alors réussi à me convaincre de voir CQ2 à sa sortie, pour en faire la promotion. Malheureusement, je me vois obligé d’en faire la critique. Rachel (Clara Furey, la fille de Carole Laure), une adolescente qui fuit sa mère et son beau-père, est à la recherche d’un autre modèle familial. Elle croit l’avoir trouvé en la personne de Jeanne (Danielle Hubbard), une professeure de danse contemporaine récemment sortie de prison. Jeanne invite l’adolescente à rester dans une auberge gérée par son ancien amoureux Steven (Jean-Marc Barr). Elle va ainsi l’initier à la danse et Rachel y trouvera l’exutoire de son
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mal de vivre. Enfin Odile (Mireille Thibault), une mère de famille qui s’était liée d’amitié avec Jeanne lors de son séjour en prison, vient rejoindre les deux femmes et va à son tour aider Rachel dans sa quête. Pour la réalisatrice et scénariste Carole Laure, l’intrigue n’est qu’un prétexte pour nous montrer de belles chorégraphies. Mais pour que le spectateur puisse s’émerveiller devant ces images, l’intrigue doit tenir debout le moindrement. Beaucoup d’éléments de l’histoire sont introduits brusquement pour disparaître presque aussitôt. Par exemple, au début du film, on révèle que Rachel a des dettes importantes en rapport avec la drogue. Bizarrement, on n’en parle plus de tout le reste du film. Aussi, plusieurs personnages secondaires n’ont aucune véritable fonction dans la dynamique du scénario. Emmanuel Bilodeau, par exemple, a un petit rôle de dix minutes où il réussit à composer un personnage excentrique à partir de presque rien. S’il avait eu une influence quelconque envers l’intrigue,
sa performance ne serait pas gaspillée comme elle l’est effectivement. En fait, le plus gros problème du scénario réside dans le fait que les personnages n’évoluent pas du tout. Pendant toute la durée du film, Rachel reste toujours aussi frondeuse. On a beaucoup de misère à sympathiser avec elle. Elle danse très bien, mais je n’ai pas vu de réelle connexion entre sa danse et son comportement dans la vie de tous les jours. Ces scènes perdent donc toute crédibilité. Paradoxalement, les scènes de danse qui m’ont le plus inspiré sont celles où il n’y avait aucune musique. Ce n’est pas parce que la musique n’était pas bonne, au contraire; j’ai vraiment apprécié la musique du film, mais surtout lors des scènes dramatiques. Lorsqu’on voit les chorégraphies prendre forme, les effets sonores représentant les mouvements des danseurs m’ont impressionné par leur solitude. Malgré le fait que Clara Furey soit une danseuse professionnelle et non une actrice, elle était plutôt
Rachel (Clara Furey) est en fuite dans CQ2 (Seek You Too)
convaincante dans son rôle de fille à problèmes. Tout comme le rappeur Eminem l’avait fait dans 8 Mile, elle a livré une performance très crue. Quant à Danielle Hubbard, dans le rôle de la seconde mère de Rachel, elle est aussi très bonne et crève l’écran avec une sensualité exacerbée. D’un autre côté, Jean-Marc Barr ne laisse transparaître aucune émotion authentique. Je n’ai pas
cru à sa prestation une seule seconde. Je suis persuadé que les intentions de Carole Laure étaient nobles. Elle voulait nous faire voir la puissance et la beauté de la danse. Malheureusement, la cible est totalement ratée. La danse contemporaine est une belle chose, mais pour que je puisse croire en sa puissance, il me faut à tout le moins une histoire crédible. x
10 Le Délit x 9 novembre 2004 culturethéâtre
Justice ou non?
C’est à vous de juger dans Le Procès présenté au Théâtre du Nouveau Monde. Valérie Vézina ment réagiriez-vous? C’est là, la beauté du Procès, ce don qu’il a de nous plonger dans la peau de Josef K., brillamment interprété par Alexis Martin. Le malaise s’installe. On souffre. On devient peu à peu de plus en plus cinglé. Dans ce monde absurde qu’il côtoie, seul K. semble sain d’esprit, semble défendre la vérité. Rien autour de lui n’a plus de sens, tout est dérision, folie pure et simple. Que lui reste-t-il, si ce n’est la mort? C’est justement ce qui choque, ce qui perturbe. Les mots de Kafka ont encore tout leur sens dans notre monde moderne. Quand le juge (Pierre Lebeau) révèle à Kafka que l’issue d’un procès ne se décide pas au tribunal, mais bien dans les coulisses, on reste bouche bée devant une révélation aussi troublante que vraie. Le Procès, c’est l’histoire de chaque homme. Ça nous touche, en plein cœur. Grâce à une mise en scène magistrale orchestrée par François Girard, Le Procès vient démolir ces bases que l’on croyait si solides, vient remettre en question le sens de la vie. Tout d’abord, la pièce se déroule sans interruption, comme si on lisait le roman, qui d’ailleurs
fut adapté pour le théâtre par Serge Lamothe. Deux heures sans entracte. Deux heures fébriles, crispés sur son siège. Lumière et musique s’accentuent tout au long de la pièce jusqu’à agresser le spectateur, à le rendre fou! D’un tic-tac de l’horloge, montrant le temps qui passe et la longueur que peuvent prendre les procédures judiciaires, aux sons stridents, telles des craies sur un tableau noir, tout est mis en œuvre pour que le simple spectateur devienne K., pour que l’absurdité fasse surface. Et le tout est réussi avec brio. Avec ses seize interprètes sur scène, son texte si vrai, Le Procès est une pièce à voir. Pour comprendre peut-être toute l’absurdité de certains concepts que l’on chérit tant, telle la justice. Pour aussi se laisser emporter par le jeu sublime des comédiens. Je ne vous en dirai pas plus… Allez voir, pour juger par vous-mêmes…x Le Procès est présenté au TNM jusqu’au 27 novembre et en supplémentaires du 30 novembre au 2 décembre. Pour plus d’information, (514) 866-8668 ou consultez le www.tnm.qc.ca
Yves Renaud
«
Quelqu’un avait dû calomnier Josef K. […]» Ainsi commence Le Procès… Dans un murmure, cette phrase est répétée indéfiniment, phrase tirée du roman de Franz Kafka. Et dans le roman, on y plonge directement. Pièce sans entracte, où les scènes sont des chapitres, où le texte de Kafka ressurgit à chaque instant. Pièce brillante, dont la mise en scène magistrale coupe le souffle. Cinq heures du matin. Josef K. est tiré de son sommeil par deux gardes qui lui disent qu’il est accusé d’un grave crime dont il ignore le motif. Alors commence le procès absurde de M. K. Rencontres avec l’inspecteur, le juge d’instruction, l’avocat. Rencontres toutes plus futiles les unes que les autres, qui sèment le doute en Josef K. Imaginezvous un instant dans ses souliers. La justice vous accuse d’un crime, toute la ville semble au courant qu’on vous a collé un procès sur le dos, mais vous, vous ignorez ce que vous avez fait. Employé modèle à la Banque, vous n’avez rien à vous reprocher, peut-être est-ce justement ce pourquoi on vous accuse. «L’ennemi numéro un», vous l’êtes, mais qu’avez-vous donc fait? Com-
Alexis Martin et Pierre Lebeau: tout simplement brillants dans Le Procès.
culturethéâtre
Quelle intimité?
Jusqu’au 19 novembre, la troupe Omnibus présente L’Intimité d’Emma Haché, une pièce qui fait réfléchir.
Marie-Noëlle Bélanger-Lévesque e mot «intimité» évoque en moi des images de douceur, de tendresse… La pièce de théâtre L’Intimité pourtant, ne semble pas aborder ce terme dans son sens conventionnel, mais semble plutôt en explorer les limites et capacités. La pièce se déroule ainsi: Alex (Marc Béland), soldat canadien, rencontre Frauke (Markita Boies) en Allemagne pendant la Deuxième Guerre mondiale, mais le couple échoue en sol canadien pour la naissance de leur enfant. Jusque là, rien de très impressionnant. Il s’agit de leurs peurs, leurs douleurs, leurs traumatismes qui nous percutent. Quoi de plus dérangeant que deux êtres qui ne se sentent vivre que lorsqu’ils frôlent la mort? De là, une interdépendance souvent contraire à une recherche personnelle d’intimité. Il y a, fort heureusement, Jean Asselin qui allège l’atmosphère avec son interprétation de multiples personnages, qui sont, en fait, de véritables caricatures: on y ren-
L
contre, par exemple, un politicien dont la campagne électorale est subventionnée par une compagnie de cigarettes et un psychologue qui n’écoute que pour l’argent. Pourtant même ici, on hésite à rire, car quelle satire de notre société! Le moins qu’on puisse dire, c’est que ces comédiens de talent, connus au théâtre, à la télévision ou au cinéma, ne se donnent pas à moitié. À la fin de la pièce, ils me semblaient vidés émotionnellement, et pour cause! L’auteure Emma Haché, jeune Acadienne, met dans la bouche de ses personnages des mots lourds de sens, lourds de questionnement. Elle le fait avec talent: pour L’Intimité, elle reçut en 2003 la Prime à la création du Fonds Gratien Gélinas et en 2004 le prix Bernard-Cyr de la Fondation pour l’avancement du théâtre francophone au Canada. C’est ce talent que la metteure en scène Francine Alepin met en valeur. La troupe Omnibus, colocataire du théâtre Espace Libre avec l’École
de Mime qui l’alimente et qu’elle alimente, met l’emphase, depuis sa fondation en 1970, sur la gestuelle du corps. L’Intimité le reflète par les mouvements quasi-chorégraphiques des acteurs. Du beau travail aussi côté décor et éclairage: on ne cesse d’être surpris! La musique est positivement dérangeante, parfaitement adaptée à la pièce. Je ne dirais pas que je n’ai pas aimé. En fait, c’était vrai, intense. Je sens seulement que j’aurais peut-être préféré ne jamais voir cette pièce… C’est qu’elle aborde des sujets sur lesquels je préfère ne pas me pencher: la fragilité de la vie, la bêtise humaine, la vieillesse, ce vide qu’on a parfois en soi. Je suis cependant consciente de l’importance d’en discuter et, pour cela, j’applaudis la pièce, je chéris les personnages, j’admire l’auteure. J’imagine que telle est la différence entre aimer une pièce pour ce qu’elle est et non pas pour ce qu’on voudrait qu’elle soit. Le message a parfaitement bien passé: j’en suis sortie avec un
La pièce de Emma Haché explore les capacités et les limites de l’intimité.
«quelque chose» sur le cœur, un peu troublée, mais plus sereine, comme si on venait de m’apprendre la vie ou cette «intimité» de soi… À voir donc. x
La pièce L’Intimité est présentée jusqu’au 19 novembre à l’Espace libre, 1945, rue Fullum (métro Frontenac). Pour réservation, (514) 521-4191. Les billets sont au coût de 18 $ pour les étudiants. Pour plus d’information visitez le www.mimeomnibus.qc.ca
9 novembre 2004 x Le Délit
cultureopéra
«Une note éclatante»
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Ariane à Naxos, pour la première fois à Montréal. Miroslav Artaud
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orme d’art souvent considérée à tort comme étant classique et conventionnelle, l’opéra peut également impressionner l’esthète par la pluralité de ses tournures surprenantes, légères et déstabilisantes. Avec Ariane à Naxos, l’Opéra de Montréal fait peau neuve en présentant un genre à cheval entre le burlesque et la tragédie. La pièce du compositeur allemand Richard Strauss est interprétée pour la première fois par la compagnie montréalaise, qui poursuit son opération charme auprès des jeunes par cette production audacieuse, tout comme en font foi les réductions de 60 p. cent offertes aux 18-30 ans. Pièce unique, autant dans le traitement métathéâtral que dans le mariage incertain du vaudeville au drame. Dès les premiers accords de l’orchestre réduit (dirigé par Jacques Lacombe), le spectateur se trouve plongé dans un vernissage moderne, où un nabab excentrique convie ses invités à un spectacle d’un genre inqualifiable: de l’opera seria dans lequel des acteurs de commedia dell’arte sont appelés à improviser une farce. Pis encore, les artistes de la seria apprennent sur le fait les exigences grotesques du mécène. L’incompatibilité de la juxtaposition transporte les protagonistes dans une symphonie de quiproquos et d’ac-
culturethéâtre
crochages. Le Beau et le grandguignolesque s’entrechoquent au son des voix opposées qui s’harmonisent. Le caractère inusité de la pièce s’explique donc par le fait que les protagonistes sont conscients de leur condition d’acteur-chanteur, pendant que la dichotomie entre deux formes divergentes s’affirme. Tiraillé entre l’histoire absurde vécue par les acteurs, le récit tragique ou comique de leurs personnages respectifs, le spectateur ressort inéluctablement déboussolé et diverti par le récit. Dans l’opéra tragi-comique interprété par les artistes du richard, Ariane, fille de Minos, se retrouve sur l’île de Naxos, où Thésée l’avait abandonnée. Trois nymphes prennent connaissance de la fragilité de la jeune femme et veillent sur elle, appréhendant que ses heures ne soient comptées. Zerbinette et ses acolytes (ils incarnent les acteurs de la commedia all’improvviso) s’affairent à la consoler du mal qui l’afflige. Alors que la pièce semble se diriger tout droit vers le drame, voilà que Bacchus (dieu romain du vin), qu’Ariane avait pris pour un messager de l’au-delà, vient délivrer la femme de son désespoir. Cette fin inusitée prend une tournure doublement comique par les moqueries des acteurs de la comédie à l’italienne, qui profitent de la con-
fusion pour s’amuser aux dépens de la prima donna. Au niveau musical, Strauss acquiert une richesse musicale marquée par la variété de ses techniques et la liberté stylistique accordée par le propos mi-sérieux, mi-burlesque. Cette musique marquée par les envolées lyriques des personnages, l’alternance des soli et des tutti et des citations musicales, permet à l’auteur d’optimiser les possibilités offertes par l’orchestre réduit commandé par le genre classique, mais contraint la ligne musicale à de nombreuses coupures rythmiques. Les fioritures instrumentales demeurent trop souvent accessoires aux voix pour permettre au seria d’atteindre le paroxysme de sa profondeur. Visuellement, la mise en scène savamment orchestrée par Chris Alexander réussit à puiser parfaitement les éléments comiques permis dans le répertoire de la commedia et rend le spectacle aussi agréable à l’œil qu’à l’oreille. Le brio du directeur et l’agilité des protagonistes rivalisent parfaitement avec la voix d’Aline Kutan (Zerbinette), dont la justesse ne trouve d’égal que dans la profondeur du baryton John Fanning (Maître de musique). Par ses retournements inattendus, la fantaisie du propos, la qualité de la distribution et de la chorégraphie, Ariane à Naxos consti-
Ariane à Naxos, un opéra tragicomique qui séduira le néphyte.
tue certainement une porte d’entrée idéale au néophyte. Pour une rare fois à l’Opéra de Montréal, le spectateur rit alors qu’il pense pleurer. x Ariane à Naxos est présenté les 11, 13 et 17 novembre à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Pour réservation, (514) 842-2112. Pour plus d’information, www.pda.qc.ca
Un miroir juste et percutant
Christian Bégin en clown et Martin Drainville en homme canon nous présentent dans Circus minimus un huit clos coup de poing sur le cynisme de notre société.
C
’est au Théâtre d’Aujourd’hui que Christian Bégin présente sa première pièce, Circus Minimus, un drame pathético-comique entre un clown mal engueulé et un homme canon fatigué, à la veille de la fermeture définitive du cirque où ils travaillaient depuis trop longtemps. Une mise en scène de Dominic Champagne avec Christian Bégin et Martin Drainville. Une pièce contre le cynisme, à voir absolument. Christian Bégin est un homme de conviction. Passionné de théâtre, il travaille d’arrache-pied pour que son art ait au moins une vitrine qui lui convienne, autant pour les artisans que pour les spectateurs. Vous êtes sûrement peu à avoir lu sa missive dans le journal Voir, il y a deux ans. Vous êtes probablement plus nombreux à l’avoir vu à Tout le Monde en parle, il y a de ça quelques semaines. Le débat d’idées a vite tourné au «pointage de doigt» parce que Christian Bégin avait nommé quelques personnes dans sa sortie. Le débat d’idée fut relégué en-dessous du tapis. Si vous allez voir cette pièce de théâtre dans le but d’y admirer des têtes tombées, de chercher des coupables de l’inertie, vous serez déçus et choqués. Déçus, parce que les responsables ne sont jamais nommés. Choqués, parce que le responsable c’est vous! Chacun de nous
en fait. «Ceux à qui le chapeau fait, mettez-le!» de dire Bégin. Il avoue avec la plus grande franchise que «le chapeau se met à moi aussi». Ne cherchant aucun coupable, Bégin vise notre cynisme, notre inertie qui est en train de nous bouffer tout rond. Lorsqu’on lui demande s’il y a une date ou un moment où ce cynisme est apparu, il répond: «Vite, vite comme ça, je te répondrais peut-être après le référendum de 80, il y a beaucoup de choses qui ont changé ici au Québec, dans notre façon d’appréhender le monde, dans notre rapport avec nos rêves, ce à quoi on rêvait collectivement. Il y a eu une espèce de désillusion, une naissance du cynisme qui nous a amené en humour dans l’absurde, la facilité et le désengagement. Il y a eu de moins en moins d’engagement dans la parole, dans la prise de position. On surfe beaucoup là-dessus depuis. Malheureusement, la vague a pris de l’ampleur». Suite à ce constat de cynisme, il nous pose la question: «On fait quoi?» Ce questionnement sera la trame de fond de la pièce. Encore une fois, si vous allez voir cette pièce pour qu’on vous donne des réponses à cette question, vous serez doublement déçus. Les réponses ne sont pas dans la pièce. Elles sont dans vos têtes. Hé oui! Le théâtre ce n’est pas un quiz! Il faut se forcer de temps
en temps pour trouver les réponses. L’insistance du questionnement, la question qui revient sans cesse, sous une même forme ou parfois sous différentes formes, a eu pour effet sur moi de pousser le questionnement dans mon propre univers. Est-ce que ça tourne en rond? Peut-être pour certains, mais pas pour moi. Christian Bégin nous prouve avec sa première œuvre que cette interrogation est nécessaire. Rencontré la semaine dernière, il confiait: «Ce n’est pas le mandat de l’art de donner des réponses. Le mandat de l’art, quel qu’il soit, c’est de poser des questions, c’est de solliciter l’intelligence de ceux qui consomment cet art, pour qu’euxmêmes fassent leurs propres réponses. Il y a un prêt à penser qui nous envahit de partout, les gens ont de plus en plus de difficulté à aborder le monde d’une façon singulière». Martin Drainville, dans ce spectacle, est très juste. Son personnage est de prime abord très calme. Il l’est d’ailleurs la plupart du temps. Mais lorsqu’il se fâche et qu’il remet son acolyte à sa place, Drainville prouve qu’il est l’homme de la situation. Ceux qui croyaient que le pauvre petit ne serait que le faire-valoir d’un comédien colérique peuvent respirer tranquille. Il est efficace. Il prouve une fois de plus qu’il est un maître dans le champ du non-dit. Le langage de la pièce est cru,
Yves Renaud
Alexandre Vincent
Divagations cyniques d’un clown et d’un homme canon dans la première pièce de Christian Bégin Circus minimus.
je le concède. Mais après quelques minutes, on s’habitue. Je crois, par contre, que le langage de Bégin est très approprié pour le propos qu’il tient. La langue évoque la pauvreté intellectuelle des deux personnages. Elle évoque notre pauvreté intellectuelle et notre pauvreté de langage. Ce qu’il y a de flagrant dans cette pièce de plus, c’est la liberté. Elle y est abordée de plusieurs points de vue fascinants, notamment celui des artisans. J’étais convaincu que ce travail n’aurait pu être fait ailleurs qu’au théâtre. Il y a tellement de liberté de création qui se dégage de ce spectacle, ça en est foudroyant. L’auteur en est lui-même très
conscient: «Le théâtre, dit-il, c’est un espace de liberté total. Tu n’as aucune contrainte. Personne ne te dit quoi écrire dans quel paramètre, si ce n’est ton metteur en scène et tes compères de travail qui t’aident à bonifier ton œuvre, à la clarifier, mais jamais pour censurer ou répondre à certaines normes. C’est un terrain de jeu total.» x Circus minimus est présenté jusqu’au 18 novembre au théâtre d’Aujourd’hui, 3900, rue Saint-Denis. Informations et réservations: (514) 282-3900 ou consultez le www.theatredaujourdhui.qc.ca
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Le Délit x 9 novembre 2004
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n pas de côté Loco Locass pour les Loco Amour oral Locass, qui, avec (Audiogram) leur nouvel album Amour Oral, délaissent quelque peu le style revendicateur féroce pour se cantonner dans un genre musical plus propre et moins audacieux. Selon Biz, l’un des rappeurs du trio, cet album aspirait à s’éloigner du «criage adolescent» de Manifestif, le premier opus de la formation. Force est d’admettre que sur ce point, il aura eu raison. Le son d’Amour Oral est très épuré, résultat d’un travail de studio beaucoup plus (trop?) long. L’amateur de la première heure pourra donc être surpris lorsqu’il entendra certaines envolées lyriques faisant davantage penser à du Daniel Bélanger qu’à du rap. On est donc loin de la décharge initiale causée par la formation, il y a déjà plus de quatre ans. Si les Locos peuvent encore affûter leur flow, les paroles, par contre, n’ont rien perdu de leur pertinence ou de leur force. La poésie dense et coulante du groupe est encore une coche au-dessus de ce qui se fait dans le genre. Et rien que pour ça, Amour Oral est quand même une réussite. Certaines collaborations viennent également pimenter l’album, dont une particulièrement réussie avec Karim du prometteur groupe Syncop. Sur le plan des thématiques, les Loco Locass ratissent encore large dans l’éventail altermondialiste, avec des textes engagés sur l’émancipation nationale, l’antiaméricanisme, les motards et le pot. En définitive, si la version CD des pièces peut décevoir par son manque de fougue, l’album n’en est pas moins promis à un avenir plus radieux sur la scène. À constater le 12 novembre prochain, au Club Soda. x Jean-Loup Lansac
Pause David Sylvian C’est là que le jeu prend vie. Bien Blemish des disques sont fades: reliques délavées (Samadhi Sound) d’une époque qui refait surface par le billet du manque de créativité d’un artiste. Dans ce cas, le jeu du critique est simple: mettre le disque dans un emballage de mots (étiqueté, bien sûr) permettant au lecteur de se faire une idée claire de la relique délavée dont il est question. Lorsqu’un disque brille, cependant, l’histoire en est autrement. Le critique fait alors face à un dilemme: forcer la main et pousser l’artiste dans un sachet comme s’il s’agissait encore d’un disque à peine digne d’un supermarché à CD ou bien tenter de le respecter et laisser l’œuvre respirer. La deuxième option exige un plus grand flou dans la représentation: moins de comparaisons, d’assimilations, de javellisations. La conséquence principale est que le lecteur se fait une moins bonne idée de ce que «contient» le disque. Ici, la beauté de Blemish s’impose. Vite Blemish est construit en huit tableaux: huit fenêtres sur un cocon que Sylvian parvient subtilement à tisser. Une couleur partagée: celle de la solitude. Les pièces sont presque nues, dépouillées de tout excès. Dans quatre des scènes, la voix de Sylvian raconte ses poèmes, en partage l’espace avec des ambiances abstraites et minimalistes de sa création. Le tout se fait de façon calme, envoûtante.Trois des autres scènes sont partagées avec la guitare du maître de l’improvisation libre Derek Bailey: toujours la même solitude, mais aussi l’angoisse, la tension, la houle et le vent. Reste la dernière pièce. L’album est lourd du calme de l’hibernation; la dernière pièce est légère du calme de l’éveil. Christian Fennesz prend alors pour quatre minutes le contrôle de l’espace sonore qui se ficelle, là encore, autour de la voix de Sylvian. Enfin, au sujet des textes, ils sont superbes d’un bout à l’autre: je vous laisse le soin de le découvrir. x
cultureconcert
Singing for Absolution
Dans un concert grandiose, MUSE déclenche l’Apocalypse au Métropolis. Philippe Mannasseh 0h30. Le Métropolis est envahi par une horde de fans, entassés les uns sur les autres, attendant le grand moment: l’entrée en scène du groupe de rock britannique MUSE. Après presque deux heures d’attente et une première partie médiocre (The Evening), le groupe arrive enfin sur scène et, contrairement à toute attente, se lance sur les airs symphoniques de «Butterflies and Hurricanes». La foule se déchaîne et offre au groupe un accueil aussi agité qu’émerveillé. Quel bonheur de voir les trois incroyables musiciens, infatigables, jouer en boucle leurs plus grands hits! Le trio, en tournée depuis bientôt 2 ans, en est à son troisième opus, Absolution. Après «Showbiz» et «Origin Of Symmetry», cet album sur la fin du monde définit mieux le groupe et l’impose en mastodonte du genre. Pour ceux qui n’auraient pas eu le plaisir de les écouter, leur musique ressemble à une grande symphonie opératique…de rock! Mais revenons au concert. La setlist a réussi à diversifier un peu la formule parfois trop redondante du tour Absolution. Dès les premières minutes, on avait déjà eu droit à l’électrifiant riff de «New Born», aux ébats du public durant «The Small Print» et aux improvisations sur «Muscle Museum». Ce n’est pas par hasard que le groupe vient de se faire sacrer meilleure live act par le magazine Q. Mathew Bellamy, leader du groupe, maîtrise parfaitement sa voix et a une singulière présence sur scène. Armé de sa guitare et de sa voix stridente, il transforme chaque chanson en une expérience inoubliable pour le public. J’étais bien au centre de la foule,
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et croyez-moi, ça bougeait fort: en avant, en arrière, on cogne par-ci, on saute par-là, on crie, on chante, on tombe… Débute alors la plus belle partie du spectacle. Ils nous prouvent à nouveau que «Citizen Erased» est destinée à être jouée live: ces dix minutes de chanson, alternant éclats de guitares et caresses de piano, m’ont, une fois encore, littéralement coupé le souffle. Mais ceci n’était qu’un prélude à la bouleversante «Ruled By Secrecy», qui s’impose en véritable poème auditif, avec un inoubliable solo au piano. Sans nous laisser souffler, le groupe enchaîne avec une chanson inédite, objet de récentes rumeurs sur les forums internet, qui s’avère une excellente réalité.Voilà qui promet pour le prochain album ! Ça repart de plus belle avec un puissant enchaînement: «Apocalypse Please», «Hysteria», «Plug In Baby», «Time Is Running Out». Un seul mot me vient à l’esprit: Énorme! Au bout d’une heure de jeu à peine, le groupe quitte la scène, après un incroyable «Bliss», garni de changements et d’improvisations. La foule insatiable n’est pas prête à les lâcher et s’agite… encore! Ils reviennent – on s’y attendait – avec un dernier coup de maître: «Stockholm Syndrome». La chanson était la parfaite fin à ce spectacle déchaîné. Arrivent ensuite les classiques ballons blancs (taille XXL), signature des concerts de MUSE avec l’explosif riff final, qui a duré plus de cinq minutes. Il faut aussi mentionner l’étrange rituel de fin de concert, qui consiste à démonter violemment la batterie et se jeter dans le public. Un concert grandiose, à l’image du groupe. x
Borhane Blili-Hamelin