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art activities night! p. 3 Le seul journal francophone de l’université McGill.

de

rue

andré boisclair sourit p. 8 Volume 95, numéro 2

Le mardi 20 septembre 2005

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recherché: espace de prière p. 10 www.delitfrancais.com

On travaille en Targa depuis 1977.


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xLe Délit • 20 septembre 2005

Guérir le sida?

nouvellessanté

L’acide valproïque, médicament utilisé pour le traitement de l’épilepsie, semble aider à combattre le VIH. YNÈS WU

A

ujourd’hui, plusieurs m é d i c a m e n t s antirétroviraux sont efficaces pour traiter le sida en permettant d’interrompre le cycle de reproduction duVIH. Cependant, le virus n’est jamais complètement éliminé de l’organisme. Peu de temps après la contamination, des composantes du VIH se faufilent dans des cellules immunitaires CD4

et y restent quiescentes. Du fait que le virus est du coup lui-même au repos, il ne se reproduit pas, et les médicaments antirétroviraux n’ont pas d’effet sur lui. Par contre, lorsque les cellules qui le contiennent sont activées, la production du VIH est relancée: le virus n’est donc jamais complètement éliminé de l’organisme. Et pourtant…

Une recherche préliminaire semble dégager une piste de guérison pour les personnes atteintes du sida. Selon un article paru dans la revue médicale The Lancet, des chercheurs auraient administré à quatre sujets séropositifs des doses d’acide valproïque, un médicament principalement utilisé comme antiépileptique, qui semble pouvoir lever la quiescence des cellules

infectées en libérant celles-ci du virus. À peine sorti de ses réservoirs dans l’organisme, le virus peut être assujetti à l’action des antiviraux. Ce type de traitement vise donc à débarrasser entièrement l’organisme du VIH et ainsi empêcher les rechutes. En se basant sur cette initiative, l’hématologue Jean-Pierre Routy de l’Université McGill débute un essai clinique d’une durée d’un an sur un groupe de cinquante personnes afin d’établir un lien concret entre l’administration d’acide valproïque et l’éradication des réservoirs de VIH. Un résultat positif pour ce type de traitement au sein d’un groupe expérimental plus nombreux confirmerait que nous sommes sur la bonne voie vers un remède contre le sida. Cet essai se déroulera à l’hôpital Royal Victoria du Centre hospitalier universitaire de McGill, au Centre hospitalier de l’Université de Montréal et dans une clinique VIH privée. x

Pour plus d’information visitez le site web du McGill Reporter, au http:// www.mcgill.ca/reporter. La semaine internationale de la sensibilisation pour la santé mondiale sera organisée par la McGill Global AIDS Coalition (MGAC) et aura lieu sur campus du 25 au 29 septembre. Au programme: Le dimanche 25 septembre: Sida, la Marche pour la vie (Centre-ville). Le lundi 26 septembre:Tente info sur la malnutrition, Médecins sans frontières (Lower field). Le mardi 27 septembre: Journée Action Traitement et projection de film en partenariat avec CKUT (Lower field). Le mercredi 28 septembre: Distribution d’information sur les maladies négligées, vente de Samosa (Lower field), et une présentation sur la malaria par Dr. Maureen Malowany (19 :00 salle Lev Buckman, Shatner). Le jeudi 29 septembre: Sensibilisation sur la malaria et «mosquito net sleep-out » (Lower field).


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xLe Délit • 20 septembre 2005

Engagez-vous (au Parti libéral) qu’ils disaient...

éditorial

xLe Délit Le seul journal francophone de l’université McGill

À chaque début de session, l’AÉUM organise Activities Night

Volume 95 Numéro 2

DAVID DROUIN-LÊ

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e tout, pour tous les goûts. Cette expression caractérise bien la soirée de jeudi dernier dans l’édifice Shatner, où des milliers d’étudiants ont déambulé en quête d’une vocation nouvelle, vocation prestement offerte par les deux cents clubs et regroupements estudiantins présents. Tous ces étudiants ont courageusement bravé la cacophonie ambiante et l’odeur quelque peu nauséabonde envahissant progressivement les lieux et résultant du grand va-et-vient combiné à la ventilation déficiente. Voici donc un bref état des lieux.

Un rassemblement hétéroclite Aucune tendance générale ne s’est dégagée quant à la nature des clubs présents cette soirée-là. Bien sûr, les traditionnels clubs nationaux et religieux, en compagnie des associations sportives, tenaient le haut du pavé. Il était cependant parfois surprenant de constater l’emplacement, le nom, la vocation, de même que les techniques de recrutement de plusieurs autres clubs. Par exemple, un kiosque avait été installé pour la Montreal Blind Swimming Association et le club de bridge côtoyait l’Ultimate Club, voué à la promotion des sports extrêmes. Au niveau des techniques de recrutement, un grand nombre d’associations a rivalisé d’originalité dans le but avoué de vendre sa salade aux étudiants présents. Des offrandes de toutes sortes, autant alimentaires que matérielles (de l’antisudorifique et des condoms par exemple), étaient accordées à qui voulait bien entendre quelques minutes de discours propagandiste. Dans cette optique de mise en marché, un club voué à la promotion du recyclage a pris le nom de Gorilla Composting afin d’illustrer l’aspect guerrier de leur lutte en faveur du compostage de certains déchets. La McGill Rifle Association La palme de l’originalité tant au niveau du contenu que du contenant revient toutefois à la toute nouvelle MRA, acronyme de la McGill Rifle Association, pendant mcgillois du célèbre et non moins controversé groupe de pression américain en faveur des armes à feu, la National Rifle Association ou NRA. Afin d’attirer l’attention des badauds, le regroupement, dont le kiosque était situé devant les portes du Shatner, faisait jouer de

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La controverse Boisclair

rédaction 3480 rue McTavish, bureau B•24 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : (514) 398-6784 Télécopieur: (514) 398-8318 redaction@delitfrancais.com bureau publicitaire 3480 rue McTavish, bureau B•26 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone: (514) 398-6790 Télécopieur: (514) 398-8318 daily@ssmu.mcgill.ca rédacteur en chef david.drouinle@delitfrancais.com David Drouin-Lê chefs de pupitre-nouvelles nouvelles@delitfrancais.com Laurence Bich-Carrière Jean-Philippe Dallaire chef de pupitre-culture artsculture@delitfrancais.com Agnès Beaudry rédacteur-reporter Marc-André Séguin coordonnateur de la production production@delitfrancais.com Alexandre de Lorimier

la bruyante musique rock ainsi qu’un film mettant en vedette Charlton Heston, président de la NRA. Un écriteau de couleur jaune fluorescent accompagnait le tout et sur lequel était inscrite une citation philosophique de ce même personnage: «A gun in the hand of a good person is no danger to anyone except the bad guys». Interrogés par Le Délit, les deux membres fondateurs de la MRA, un Américain et un Néo-Écossais, affirment ne pas souhaiter nécessairement encourager l’usage des armes à feu, mais davantage la discussion sur des thématiques comme la législation gouvernementale et la problématique de la sécurité. La MRA projette néanmoins d’organiser des excursions de tir afin de sensibiliser ses membres (plus d’une centaine) aux usages bénéfiques de ces jouets pour adultes. Un biais en faveur du Parti libéral du Canada? En terminant, quelques mots sur les clubs à vocation politique. Étaient représentés ce soir-là, le Parti libéral du Canada, le Parti conservateur du Canada, le NPD ainsi que le Regroupement souverainiste. L’association Liberal McGill était celle qui jouissait de la

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Recyclage et art

visibilité la plus ostentatoire. Cela non pas seulement parce qu’elle comptait le plus grand nombre de membres au sein de la communauté mcgilloise, mais surtout parce qu’elle jouissait d’un emplacement central privilégié dans l’édifice ainsi que de trois tables complètes (à eux seuls!). Par opposition, les kiosques des trois autres associations politiques étaient relégués à un petit coin de la cafétéria et se voyaient contraints de partager presque côte à côte un espace d’une superficie deux fois moindre que celle occupée par la seule Liberal McGill. Interrogé par le Délit, le vice-président de l’AÉUM responsable de l’organisation d’Activities Night, Leon Mwotia, a affirmé qu’il ignorait tout de cette curieuse situation. En effet, selon M. Mwotia le processus d’attribution des emplacements était totalement aléatoire. De plus, l’espace accordé à chaque club devait être le même. Informé du statut privilégié dont Liberal McGill a joui dans les faits, le vice-président de l’AÉUM a répondu qu’il s’agissait là d’une «pure coïncidence». Il n’y a là aucune analogie à formuler avec le scandale des commandites, un ramassis de coïncidences que tous les responsables politiques ignoraient. x

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En quête d’un espace de prière

Le mois de la photo

Le Délit vous appelle. Réunion avec les collaborateurs mardi 16h30 au Shatner B•24.

coordonnateur de la photographie Philippe G. Lopez coordonnateur de la correction Pierre-Olivier Brodeur chef illustrateur Pierre Mégarbane collaboration Véronique Fauteux-Poulliot Lucille Hagège Marie-Noel Lévesque Félix Meunier Clémence Recoux Samuel St-Pierre Thériault Fannie St-Pierre-Tanguay Jean-François Sauvé Ynès Wu couverture Phillipe G. Lopez gérance Pierre Bouillon publicité Boris Shedov photocomposition et publicité Nathalie Fortune the mcgill daily editors@mcgilldaily.com Joshua Ginsberg conseil d’administration de la société de publication du daily Julia Barnes, David Drouin-Lê, Joshua Ginsberg, Rebecca Haber, Mimi Luse, Rachel Marcuse, Jeffrey Wachsmuth

L’usage du masculin dans les pages du Délit français vise à alléger le texte et ne se veut nullement discriminatoire. Le Délit français est publié la plupart des mardis par la Société de publications du Daily. Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et illustrations dont les droits avaient été auparavant réservés, incluant les articles de la CUP). Les opinions exprimées dans ces pages ne reflètent pas nécessairement celles de l’Université McGill. L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans ce journal. Imprimé par Imprimerie Quebecor, St-Jean-sur-Richelieu, Québec. Le Délit est membre fondateur de la Canadian University Press (CUP) et de la Presse universitaire indépendante du Québec (PUIQ). Imprimé sur du papier recyclé. ISSN 1192-4608

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xLe Délit • 20 septembre 2005 La

Du côté de l’étrange et de la bêtise humaine

voi de l x a raiso n

La fin des spin doctors

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JEAN-PHILIPPE DALLAIRE

ernard Landry qui frappe du poing en lâchant un «crisse» aux Beaux dimanches. André Boisclair qui ne nie pas les allégations de consommation de cocaïne alors qu’il était au Conseil des ministres. Jean Charest qui traite une députée péquiste de «chienne» en pleine Assemblée nationale. Les médias font leurs choux gras de ce type d’événements, alors que la population, elle, ne semble pas s’en formaliser. L’époque des faiseurs d’image serait-elle révolue? Sûrement pas. Il y a de cela deux ans, les médias s’étaient bien amusés des dérives verbales de Bernard Landry lors de la diffusion du documentaire À hauteur d’homme aux Beaux dimanches. En présentant l’homme tel qu’il était, l’œuvre eut cependant un effet contraire à celui auquel on aurait pu s’attendre. Lorsqu’ils voyaient M. Landry fulminer contre les journalistes, les Québécois découvraient une autre facette de celui qui a longtemps été perçu comme un intellectuel froid. La sympathie suscitée par la diffusion de ces images aura probablement eu un bon rôle à jouer dans la décision prise par M. Landry de lancer la Saison des idées plutôt qu’une course au leadership. On voit bien que la stratégie de communication qu’André Boisclair a choisi d’adopter à la suite des récentes révélations sur son passé trouble repose sur le pari de la «franchise». Considérant que ses frasques passées sont depuis longtemps largement connues dans les cercles politiques et médiatiques, il est illusoire de croire que M. Boisclair aurait pu les nier. Il lui valait donc mieux tenter d’en tirer profit en se présentant comme un homme nouveau. Celui auquel plusieurs reprochaient encore récemment une condescendance affichée demande maintenant pardon en plein rassemblement partisan. Qui l’aurait cru capable d’un tel acte de contrition? La transformation de mauvais plis en qualités que les politiciens tentent d’exploiter doit être vue comme une trace visible de l’œuvre des faiseurs d’image. D’ancien alcoolique dont le comportement se situait aux antipodes de celui du parfait chrétien, George W. Bush le born again christian n’est-il pas devenu celui en lequel la droite religieuse américaine place toute sa confiance? Paul Martin n’a-t-il pas tenté de tirer profit du scandale dont faisait l’objet son parti afin de vanter ses qualités de défenseur de l’intégrité en politique? De plus en plus de politiciens prennent le parti de la franchise.Alors que la population canadienne considère la classe politique comme la catégorie professionnelle la moins digne de confiance, tous devraient en prendre note. Loin de constituer des manifestations d’une perte de contrôle des experts en communications sur l’image publique de leurs poulains, les confessions de ces derniers servent de plus en plus de tremplin pour les rapprocher des gens ordinaires. Ou pour nous donner l’impression que nous connaissons enfin la Vérité sur le fait politique. Il reste maintenant à voir comment les faiseurs d’images réussiront à tirer profit d’un livre où Brian Mulroney traite Clyde Wells d’«enfant de chienne» et tient des propos acides sur Pierre-Elliott Trudeau et Kim Campbell. Et si André Boisclair obtiendra la confiance des Québécois sans nier les rumeurs qui feraient de lui un ex-cocaïnomane.

Quelques mois de solitude. Il n’en pouvait plus de ses deux «amis» qui s’étaient invités chez lui et refusaient de partir depuis plusieurs mois. Qu’à cela ne tienne, après une soirée houleuse, l’homme de Montpellier a fait la seule chose qui lui semblait possible pour retrouver sa solitude: mettre le feu à son studio. Résultat: plus de squatteurs et neuf mois de prison (Marianne) Cumul de vices. La Japan Tobacco vient de lancer un grand projet pour contrer la chasse aux fumeurs qui sévit de plus en plus au pays. En effet, le plus grand fabricant de cigarettes de l’archipel propose une espèce de loterie. Le principe est simple: pour participer au tirage, il suffit d’envoyer une carte postale au siège social. Les prix varient d’une séance dans un cinéma «fumeur» monté de toutes pièces pour l’occasion (puisqu’une nouvelle loi interdit la cigarette dans les établissements publics) et cinq kilos de lingots d’or… (AP) Un problème de taille. Défigurée par une injection de silicone, la Thaïlandaise Rawiwan Setarat ne s’est pas contentée de poursuivre sa clinique, non, elle a également exhorté un ministre qu’elle y avait vu attendre pour son élargissement pénien à venir témoigner en sa faveur: «Le problème de mon visage est plus important que celui de son pénis». Scandale en chambre! Le premier ministre Thaksin Shinawatra somme en vain le coupable de se nommer, allant même jusqu’à suggérer que «madame la Ministre de la Santé aille dans la pièce voisine examiner tous les sexes», ce que l’intéressée, Sudarat Keyurapan, a bien évidemment refusé. (The Nation/Libération). Les cassettes pornos du pape. L’évêque argentin Juan Carlos Maccarone ne s’était pas fait que des amis en aidant à l’arrestation de nombreux mafieux dont Carlos Suarez, ancien péroniste et caudillo bien connu. Leur vengeance a été originale: une cassette filmant les ébats de Maccarone avec Alfredo Serrano, un Argentin de 23 ans, a été envoyée à la Conférence épiscopale argentine et à Benoît XVI. Santiago d’Argentine est dorénavant un évêché libre, Maccarone ayant démissionné en demandant pardon à ses fidèles mais en dénonçant «un complot et une vengeance politique visant à le punir de son combat contre l’injustice» (AFP/Coming Out). Ras le pompon! Le décret du roi Mswati III qui depuis quatre ans obligeait les Swazies à porter sur leur bandeau un pompon rouge en signe de leur virginité vient d’être aboli. Résultat: un feu de joie de vingt mille pompons devant le palais de la reine-mère. L’enfer est sans doute pavé de bonnes intentions: Mswati III voulait faire la lutte au sida (40% des adultes sont séropositifs au Swaziland) en revalorisant une coutume ancestrale. Toute personne contrevenant aux cinq ans de chasteté prévus se voyait imposer une amende de 1 300 emalangeni (environ 200 dollars) ou un bœuf. C’était d’ailleurs le roi lui-même qui le premier s’était acquitté de cette amende pour avoir convolé deux semaines après l’édit avec Nonsetselelo Magongo, 17 ans (Le Monde.fr).

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nouvellesinsolite

En trois vitesses Droit devant La Corée du Nord s’engage à mettre fin à son programme nucléaire. Dans un accord signé le 19 septembre avec la Chine, la Corée du Sud, les États-Unis, le Japon et la Russie, la Corée du Nord s’est engagée à abandonner son programme nucléaire. On doit se rappeler que le pays, dirigé par le dictateur Kim Jong-Il, avait prétendu en février dernier s’être doté de l’arme atomique. En échange de cette promesse, la Corée du Nord a obtenu un engagement écrit des États-Unis à l’effet que ceuxci n’attaqueraient pas le pays. Les pays signataires ont également fourni certaines garanties énergétiques à la Corée du Nord et devraient normaliser leurs relations diplomatiques avec le pays. Comme quoi la diplomatie fonctionne parfois…

Au neutre L’Allemagne en pleine crise politique. Alors que tous les sondages la donnaient largement gagnante il y a de cela quelques mois, la chef du Parti démocrate chrétien allemand Angela Merkel n’a pas pu se distancier de façon significative de la formation du chancelier sortant Gerhard Schröder. Aucun des deux partis n’est en effet en mesure d’obtenir la majorité au sein de la chambre basse du Parlement en ne s’appuyant que sur ses alliés traditionnels. Bien que des scénarios de grande coalition sont présentement étudiés, les chefs des deux principales formations voient tous deux d’un mauvais œil la possibilité que leur adversaire prenne la tête de ce gouvernement. Peut-être devraient-ils tous deux contacter Paul Martin pour avoir son opinion sur les gouvernements minoritaires…

À reculons Des « commandos idéologiques » américains parcourront le monde. Préoccupé par l’image de son pays dans le monde, George W. Bush a récemment nommé une certaine Karen Hugues au poste de «sous-secrétaire à la diplomatie publique» (undersecretary for public diplomacy). Celle-ci aura pour mission d’expliquer la politique de lutte contre la terreur des ÉtatsUnis et leurs valeurs fondamentales dans le monde. Pour ce faire, elle compte implanter une stratégie de «réponse agressive», établir des équipes d’intervention rapide et des «commandos idéologiques». De quoi améliorer l’objectivité de l’information…

La citation conne de la semaine

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etite cochonne […] Tant pis pour toi!

Lors de son émission matinale L’avocat et le diable, diffusée au réseau TQS, l’animateur Gilles Proulx a commenté le viol d’une adolescente en disant que celleci, en se promenant «avec les seins presque à l’air» et avec sa «structure délinquante», s’était volontairement jetée dans la gueule du loup. Selon lui, «la petite niaiseuse» aurait pu choisir cent hommes, mais elle a été attirée par un «cochon» parce qu’elle était elle-même une «petite cochonne». Il a de plus qualifié l’adolescente de «petite garce», de «petite vache» et de «provocatrice». M. Proulx a poussé l’audace jusqu’à ajouter: «Tant pis pour elle». À la suite des critiques engendrées par ces propos, l’animateur a été suspendu par les réseaux TQS et Évasion, où il animait des émissions.


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xLe Délit • 20 septembre 2005

Propagande, amour et haine Chers lecteurs du Délit, Vous vous sentez seul dans cette marée anglophone? Vous êtes tanné du manque de représentation des étudiants francophones dans l’AÉUM? Vous cherchez des gens pour tripper ailleurs que dans les bars branchés de Crescent et de Peel? Eh bien, nous aussi! C’est pour répondre à ces préoccupations et à toutes les autres qui concernent les francophones (ou gens intéressés par cette dite culture) que le Réseau des francos existe. Il est primordial que les francophones puissent s’exprimer librement sur le campus de McGill. Profitez du Délit pour faire valoir votre point de vue. Venez nous voir au local 404 du Shatner pour faire vibrer la culture francophone à McGill. Présentez-vous à l’Assemblée Générale pour les élections des nouveaux exécutifs le 26 septembre 2005 au Club lounge, mais surtout, impliquez-vous!!! Plusieurs postes disponibles:président,vice-président externe, trésorier, secrétaire, et peutêtre coordinateur politique.

Venez aussi nous rencontrer ce mercredi 21 septembre 2005 (demain) à notre 4 à 7 au Gert’s (100% musique francophone bien sûr), et dites-nous ce que vous pensez! Alexandre Faguy et Marie Gagné, commissaires francophones et vice-présidents, Marie-Pierre Dallaire, trésorière. Cher Réseau des francos, On vous aime! La Rédaction Bonjour, Je suis une francophone de McGill et j’aime bien me renseigner tout en me bidonnant en lisant le Délit. Je vous félicite donc pour votre beau travail! En ce début d’année, je me demande s’il est possible de me joindre à votre équipe comme journaliste. Je suis plus qu’enthousiaste à l’idée d’écrire en français, un plaisir que je me suis rarement accordé ces dernières années en terre anglophone! Faitesmoi signe. Au plaisir de vous rencontrer. Véronique Aubin

courrierdeslecteurs

Chère Véronique, Nous te remercions pour tes beaux compliments. Le Délit, c’est jeune, c’est frais, c’est nouveau, et tant mieux si c’est aussi aimé. Si tu veux faire partie d’une équipe jeune et dynamique, viens nous voir ce mardi, 16h30, au local B-24 de l’édifice Shatner. Écrire dans le Délit, fais-le pour toi! La Rédaction Cher Délit, Bien que votre journal présente un contenu de qualité, je crois malheureusement utile de vous écrire pour vous faire savoir que le contenant m’apparaît parfois de mauvais goût. Même sans faire mention de la dernière couverture de l’année dernière (des bébés phoques ensanglantés), je crois que vous faites parfois trop de mauvaises blagues. Était-il nécessaire de mettre une Oh Henry! dans les mains de l’acrobate sur la couverture de la semaine dernière? De faire usage du mot «salope» dans l’avant-dernière page? De présenter les âneries d’un certain J.-P. Dallaire sous le titre pompeux de «Voix de la raison»?

Non mais, pour qui il se prend celui-là??? En bref, soyez sérieux! Un lecteur vexé 3e année de droit

pour ce numéro. Nous espérons que son influence aura eu moins d’impact et que tu en seras satisfait. Merci, La Rédaction

Cher lecteur vexé, L’ensemble des caractéristiques du dernier journal qui t’ont vexé a été pensé et imposé par Laurence BichCarrière. Nous avons donc tenté de la maintenir à l’écart du brassage d’idées

Note de ladite Laurence BichCarrière: C’est toujours la même chose, parce qu’on est la fille de service de la section nouvelles, on vous colle tout.Y’a une limite à avoir bon dos.

L’immense malaise et la couleur du silence

Sans commentaire

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LAURENCE BICH-CARRIÈRE

Moi je fais l’amour chez moi, alors que les gens prient chez eux.». Les mots sont forts mais l’étudiante s’empresse d’ajouter: «Dit crûment, bien sûr. C’est strictement mon opinion. Ça n’enlève rien à la valeur de mes amis pratiquants.» Les étudiants sondés sur le campus sont tout à fait prêts à exprimer une opinion, à la justifier, mais ils refusent catégoriquement d’être identifiés. Lorsqu’on leur demande pourquoi: «Je ne pense pas qu’il y a[it] des «fanatiques» prêts à me lapider, mais c’est une question très sensible émotionnellement et ça biaise le débat». Peur de se prononcer? Peur d’avoir tort? «C’est mon opinion et je crois qu’elle est basée sur des principes universellement reconnus. Mais ça demeure mon opinion.» mitige une étudiante en droit, qui justifie par ailleurs la présence d’une salle de prière sur une base laïque: «S’il y une salle avec des tables de billards, c’est parce que les

étudiants ont besoin de se détendre et de socialiser. Si la prière est un besoin, [alors] un espace devrait être disponible.» Elle trouve également difficile d’appuyer une fin sans partager les justifications de ceux qui en sont les plus fervents défenseurs. Cet autre, étudiant en génie, est plus cynique: «Il serait intéressant pour McGill d’offrir un espace [de prière] pour améliorer son image multiculturelle encore plus, mais je [crains] la menace d’un mini-lobby qui essaie de tirer des avantages en brandissant (un peu abusivement) l’épée des droits de l’homme.» Quoi qu’il en soit, l’escalade de la tension rend tout le monde mal à l’aise et on craint que la situation devienne intenable, irrésoluble. Il serait de par trop ironique d’en venir aux poings en prônant l’inclusion et l’intégration avec reconnaissance de la différence. Car la ligne est mince entre juste accommodement et éclatement des principes. Certes, les étudiants de Polytechnique et des HEC ont dorénavant des examens du lundi au dimanche, mais chaque concession a tenu du dilemme. Les demandes émanent d’associations religieuses particulières mais les solutions ne peuvent évidemment pas viser un seul groupe religieux. Pour s’en convaincre, on n’a qu’à se souvenir de l’espace de prière multiconfessionnel que l’Université de Montréal avait mis à la disposition de certains de ses étudiants sur Côte-Sainte-Catherine. À raison de cinq vagues de prieurs par jour, le rideau temporaire qui séparait alors le côté des hommes de celui des femmes est rapidement devenu permanent. «Je suis b’naïste et je ne me sentais plus le bienvenu», raconte Bruce Gomis, aujourd’hui ingénieur, qui se dit

pourtant un peu déçu que l’université ait simplement fermé le centre «qui ne servait plus qu’une religion». C’est une question très sensible, certainement, mais le durcissement des positions risque, à plus ou moins long terme, de mener à des aberrations comme celles qu’on a connues récemment. Ainsi, d’une part, vous avez l’association des ultra-laïques (ceux-là qui font une syncope ou partent en guerre à la vue du «r» de «religion» sans se rendre compte que c’est aussi le «r» de «ridicule») qui s’insurge de ce que la ville de Montréal veuille mettre

des sapins devant l’hôtel de ville dans le temps des fêtes. Résultat: on se retrouve avec un «arbre de vie» ou quelque autre bêtise au nom krishno-tantrique imaginé par un fonctionnaire en mal de compétences transversales. De l’autre, il y a la demande très sérieuse qui avait été faite à certaines facultés de médecine d’interdire la spécialisation en urologie aux femmes et en gynécologie aux hommes. Tout ça pour ne pas jouer avec le zouizoui du voisin.

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xLe Délit • 20 septembre 2005

De Kyoto à Montréal 2005

nouvellesinternational

Les changements climatiques à l’ordre du jour. FANNIE ST-PIERRE-TANGUAY

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u 28 novembre au 9 décembre prochain se tiendra à Montréal la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques. Celle-ci réunira près de 10 000 participants provenant des 191 pays signataires de la Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC), dont 189 sont également signataires du protocole de Kyoto. La rencontre s’inscrit dans le cadre des négociations internationales portant sur la lutte aux changements climatiques. Le principal objectif de la conférence sera d’entamer les négociations sur les suites à donner au protocole de Kyoto, dont l’échéance est prévue pour 2012. David Pagé, de l’organisme Équiterre (un partenaire local choisi par le Secrétariat des Nations unies),

identifie trois autres objectifs clés de l’événement: trouver comment compter sur les États-Unis et les pays avec des économies en transition (Inde, Chine, Brésil, Mexique, etc.), qui ne sont pas visés par les objectifs de Kyoto, comment s’adapter aux changements climatiques déjà perceptibles et comment financer l’effort des pays les moins avancés (PMA), en particulier les zones côtières. Ce sera la première fois qu’une telle conférence se tiendra en Amérique du Nord. Selon Steven Guilbault, directeur de Greenpeace Québec et porte-parole de la campagne Énergie-Climat, ceci pourrait augmenter la couverture de l’événement par les médias américains. Les États-Unis sont à eux seuls responsables de 25% des émissions globales de gaz carbonique

(CO2). Avec l’Australie, il s’agit du seul pays industrialisé à ne pas avoir ratifié le protocole de Kyoto. David Pagé note toutefois que «c’est principalement l’administration Bush qui ne s’engage pas; plusieurs villes et États américains ont déjà leur propre plan de réduction des gaz à effet de serre, notamment la Californie.» La Conférence évaluera donc la possibilité que d’autres paliers de gouvernement, comme les villes et États américains, puissent devenir signataires du protocole de Kyoto. Un automne bien rempli Plusieurs événements auront lieu à travers la province cet automne pour sensibiliser la population aux changements climatiques et souligner l’importance de la Conférence Montréal 2005. Entre

autres, Équiterre présentera le 26 octobre prochain au Palais des Congrès la conférence Alerte climatique, qui réunira Hubert Reeves et David Suzuki. Ce sera la première fois que ces deux grands scientifiques et environnementalistes canadiens se retrouveront sur la même tribune. Vous pouvez aussi noter à votre agenda le Rendez-vous citoyen Kyoto, proposé par l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA) en collaboration avec la Coalition Québec Vert Kyoto. Selon Caroline Payeur, chargée de projet, cet événement rassemblera plusieurs groupes environnementaux du Québec afin de sensibiliser la population aux enjeux liés aux changements climatiques. Différentes activités auront lieu

tout l’automne et culmineront par un forum de trois jours jumelé à un Carrefour des exposants les 25 et 26 novembre à l’UQÀM. Le Canada doit montrer l’exemple Steven Guilbeault affirme que le Canada devra jouer un rôle de leader lors de la conférence. C’est donc dire qu’une attention toute particulière doit être portée à la réduction des gaz à effet de serre au Canada, dont l’objectif était de diminuer ses émissions de 6% en dessous du niveau de 1990. Pourtant, elles ont augmenté de 24%. Pour cette conférence, MM. Pagé et Guilbeault souhaitent que les pays réfractaires à l’action concrète, comme l’Arabie saoudite, les ÉtatsUnis et le Canada n’entravent pas trop les négociations. x

Il était une fois dans Le Délit...

Le mardi 17 septembre 1991



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xLe Délit • 20 septembre 2005

Boisclair hanté par son passé

nouvellesnational

Le favori dans la course à la chefferie du Parti québécois regrette ses excès. MARC-ANDRÉ SÉGUIN

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Une couverture médiatique controversée Jean-Claude St-André, qui a récemment accusé M. Boisclair d’être le candidat de l’entreprise Gesca, a cependant critiqué d’autres éléments de sa campagne. «Regardez la couverture que le journal La Presse fait de la campagne électorale, les sondages qu’ils y présentent, et il est très clair que La Presse a statué que le prochain chef du Parti québécois est André Boisclair. Il me semble que c’est aux membres du Parti québécois à décider. […] Et évidemment La Presse est la propriété de Gesca, et Gesca est la propriété de Power Corporation et c’est Paul Desmarais qui est propriétaire de Power Corporation». L’allégeance fédéraliste de M. Desmarais est de notoriété publique. Il rappelle aussi la censure faite dans le journal La Presse à l’égard d’un article du journaliste Denis Lessard paru dans Le Droit (un journal appartenant aussi à Gesca) le 18 juin dernier faisant état des excès de M. Boisclair lorsqu’il était ministre. Dans la version du même article paru dans la Presse, le paragraphe faisant état de ses abus de cocaïne et d’alcool avait été retiré. «Il n’y a rien à y penser. Je constate simplement que La Presse a

www.andre-boisclair.org

a course à la chefferie au Parti québécois, lors de laquelle des propos durs ont récemment requis l’intervention de la chef intérimaire Louise Harel pour lancer que «débat ne veut pas dire combat», fait ressortir des mauvais passages dans la vie du candidat André Boisclair. Ses abus d’alcool et de cocaïne alors qu’il siégeait au Conseil des ministres sous le mandat de Lucien Bouchard sont revenus le hanter vendredi dernier, au moment du coup d’envoi officiel de la course au leadership du PQ. Ces abus, baptisés «erreurs de jeunesse» par la plupart des médias, risquent maintenant d’atteindre la popularité de M. Boisclair, placé en avance dans la course par les plus récents sondages. M. Boisclair cherchait vendredi dernier à rassurer les électeurs que cette époque était maintenant révolue: «Je suis quelqu’un qui a vécu sa jeunesse comme bien d’autres. J’ai eu du plaisir dans la vie. J’ai parfois fait certains excès, mais quand on regarde des choses qui ont pu se passer il y a de nombreuses années, faisons attention. J’approche la quarantaine aujourd’hui». Lundi, à sa sortie d’une conférence au cégep de Lévis, il a confirmé avoir pris de la cocaïne à quelques reprises, mais aurait nié de façon catégorique avoir exercé ses fonctions parlementaires sous l’influence de quelque substance que ce soit. Pierre Dubuc et Jean-Claude St-André – deux autres candidats dans la course au leadership joints par Le Délit – se sont abstenus de tout commentaire portant sur la vie personnelle du jeune candidat de trenteneuf ans. Au moment de mettre sous presse et après cinq jours de communications, M. Boisclair n’était toujours pas disponible pour répondre aux questions du Délit.

André Boisclair, porte-parole d’un dentifrice extra-blanchissant? Le Délit enquêtera sous peu...

censuré certains éléments de l’article écrit par Denis Lessard». Cet incident a d’ailleurs été rappelé par le chroniqueur Michel David, du quotidien Le Devoir, le 10 septembre dernier. À cet égard, le candidat Pierre Dubuc se fait plus hésitant. «Ce n’est pas prouvé. C’est sûr qu’il a une très bonne couverture médiatique de la Presse. On ne peut pas nier ça. Mais sous-entendre que c’est l’homme de Gesca implique plus qu’une bonne couverture. C’est prématuré pour moi, mais on verra comment ça se développe». Rejoignant en cela les propos de Pauline Marois, qui l’a récemment qualifié de «souverainiste mou», M. St-André soulève aussi des doutes sur les convictions souverainistes de M. Boisclair. «Je lui demande comment il fait pour se regarder dans le miroir en sachant qu’il tient des propos rassurants pour les fédéralistes. Il lui appartient à mon sens de répondre à la question». Présenté en retour comme un candidat «pur et dur», M.

St-André réplique «je ne vois pas en quoi avoir un message clair fait de quelqu’un un pur et dur». Born again souverainiste? M. Boisclair semble cependant vouloir durcir le ton afin de répondre à ses critiques, qui lui reprochent une certaine mollesse. Lors de son passage dimanche dernier à l’émission Tout le monde en parle sur les ondes de Radio-Canada, il a cherché à se présenter comme un candidat qui croit ardemment à la souveraineté du Québec. «C’est drôle ce genre d’attaque alors que j’ai été d’une fidélité incroyable non seulement à mon chef mais au programme du parti. Le jour où les autres candidats feront la démonstration qu’ils sont aussi fidèles à leur chef qu’ils devraient l’être au programme du parti, peut-être que j’accepterai de façon plus sérieuse des critiques comme celles-là». Il ajoute: «On a eu 33% d’appui à la dernière campagne

électorale. Il y a un lien de confiance à rebâtir et je m’y emploie à temps plein». Bien qu’il soutienne que le PQ n’est pas prêt à se lancer dans un référendum, il insiste sur l’importance de la souveraineté dans l’accomplissement de ses aspirations.Toujours sur les ondes de Radio-Canada, M. Boisclair a déclaré: «La souveraineté, c’est la capacité pour nous d’aller voter toutes nos lois, de percevoir tous nos impôts, de signer des ententes avec d’autres pays et c’est ce coffre à outils qui va faire en sorte, si on le gère intelligemment comme on a le talent pour le faire, que le Québec sera plus riche et plus heureux». Irrité par ce qu’il estime être une campagne de salissage, M. Boisclair aurait accusé hier, lors de son passage au cégep de Lévis, le clan de sa rivale Pauline Marois et l’équipe du Premier ministre Charest de faire circuler de fausses histoires afin de lui nuire dans sa campagne. x


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er 1 juillet: jour du recycart

cultureartsvisuels

Recycart: projet de récupération d’une journée de débarras. VÉRONIQUE FAUTEUX-POULLIOT

U

ne fête à deux temps, le premier juillet est probablement le seul congé férié où les gens en profitent pour travailler. Dès la matinée, et très souvent la veille, les Québécois commencent à packeter leurs meubles pendant que le reste du Canada s’apprête à se packeter la fraise (qui d’ailleurs est de saison). Étudiants en échange, nouveaux parents, personnes âgées et marâtres inquiètes s’échangent frénétiquement leurs appartements pour s’installer ailleurs. Cette journée de fête se transforme plutôt en foire du déménagement dans la province des Tremblay. Le soir venu, tous trouvent toutefois un prétexte pour célébrer: la Boréale apaise les muscles tendus et abreuve le cynisme des séparatistes qui débattent du sort de notre terroir, les fédéralistes célèbrent le crépuscule de leur fête nationale, une Labatt à la main. Mais pendant que les Ronas de ce monde se délectent des rénos qui s’annoncent et que les déménageurs font des affaires en or, Montréal prend une allure de capital de l’ordure. L’ivresse des nouveaux départs laisse place aux souvenirs qu’on délaisse sans se soucier des conséquences. On trie son passé sans arrière-pensée pour la ville ensevelie par les rebuts. Et bientôt, la ville est couverte de déchets divers, comme la neige recouvre les rues en hiver. Tout ce qui s’achète un jour se jette, et le premier juillet en est la preuve indéniable.

Événement politiquement engagé Né d’une aspiration à la fois politique, environnementale et culturelle, le recycart se présente comme un mouvement réactionnaire qui lutte contre le gaspillage en créant des œuvres artistiques à partir de meubles et autres objets abandonnés. Initié par un groupe mcgillois, ce nouveau courant artistique appelle la participation de tout individu intéressé à l’art et à l’environnement en incitant les gens à se rendre dans les rues pour tenter de redonner un ultime souffle de vie aux objets considérés périmés. De tous âges et de tous horizons, les participants se rendent sur le lieu de création avant tout pour s’amuser, bien que l’idée de fond soit politiquement engagée. En collaboration avec la ville de Montréal, qui a accordé son approbation à l’événement, ces créateurs de tous acabits (graffiteurs, photographes,peintres,menuisiers,comédiens, poètes et autres) envahissent les rues tôt la nuit et se réapproprient ce que d’autres ont laissé de côté: ils peignent sur des matelas, écrivent leurs poèmes à même les laveuses, décapent et restaurent une commode à même les rues, taguent leur effigie sur des causeuses, graffent leurs propos politiques sur des télévisions brisées. Le résultat est hétéroclite et spontané, une fiesta de laquelle la diversité retentit.Tout artiste ou écologiste y trouve son compte et la ville se réveille le lendemain redorée, décorée de ses propres déchets. Entre l’art pur et la politique, le recycart aspire à sensibiliser l’opinion générale quant à la surconsommation, qui semble être un des thèmes récurrents des œuvres des artistes. Raison d’être et thématique, la politique environnementale devient à la fois un sujet

de création et un cheval de bataille. Dans cette même mouvance politique gauchiste, le recycart vise aussi à restaurer le rôle de l’individu dans la communauté, en ce que les gens de tous les domaines sont invités à participer et à reprendre possession de leurs rues pour s’exprimer. Trop souvent les milieux urbains sont assaillis par des panneaux publicitaires et municipaux et les individus n’ont que très peu d’influence sur l’aspect extérieur de leur milieu. Le recycart offre ainsi la chance aux protagonistes de disposer librement de leur espace urbain, l’espace d’une journée, sans risquer de gonfler leurs factures d’Hydro-Québec par des lumières de Noël. Tribune gratuite pour les artistes D’un point de vue pragmatique, les fantaisistes bohémiens trouvent dans ce happening une importante tribune. Pour percer dans le milieu culturel, les créateurs sont fréquemment contraints à se conformer à l’establishment artistique afin de faire connaître leurs œuvres. Mouvement de masse, qui s’adresse autant à une clientèle populaire qu’esthète, le recycart se présente comme une alternative à l’art officiel. Tel un gigantesque musée d’art contemporain, Montréal se découvre aux yeux des curieux qui s’arrêtent pour contempler les œuvres nocturnes. Rares sont les abonnés des Beaux-arts, mais nombreux sont ceux qui

empruntent l’artère St-Joseph pour se rendre au travail. Pour les artistes, il s’agit là d’un excellent moyen de limiter les coûts matériels de la création artistique et d’exhiber leurs talents en plein public, sans endommager les infrastructures publiques. Un vernissage abordable autant pour l’artiste, le visiteur et les services d’entretien municipaux, car certaines œuvres sont rapportées par les artistes qui désirent poursuivre leurs ouvrages en studio, d’autres par les badauds ébahis par des créations particulières. Et ceci sans compter les meubles qui sont retapés pour servir dans un nouveau foyer. De concert avec le théâtre De l’art engagé s’il en est un, la pensée du groupe fondateur du recycart offre une alternative stylistique multidisciplinaire qui amalgame parfaitement les idées politiques contemporaines aux nécessités pluralistes et audacieuses de l’art moderne. C’est paradoxalement cet équilibre fragile entre la politique et le Beau qui fait de cet art un mouvement déconcertant et novateur. Au diapason de la philosophie du recycart, la pièce Les contes orduriers, de Dominique Henri, transpose justement une communauté de personnages naïfs dans un dépotoir saturé. Appuyés par un contenu idoine, les décors sont constitués exclusivement d’objets oubliés par le temps et les personnages véhiculent leur drame en faufilant systématiquement de

l’information sur l’état actuel de l’écologie mondiale. Ce projet parallèle montre les diverses applications du recycart et démontre les inépuisables ressources offertes par la réutilisation de matériaux jetés. Des décors construits sur des ruines: écologique et économique. À la lueur du premier événement qui a eu lieu l’été dernier dans le quartier Mile End, le mouvement du recycart n’a pas fini de donner une seconde vie aux rebus du déménagement et une nouvelle voix aux artistes montréalais de la scène underground. Écologiquement utile, embellissant pour la ville en pleine période touristique, culturel et inclusif (tous sont invités à y participer), le mouvement du recycart sera vraisemblablement réédité, aux dires de l’organisatrice. À la fois ludique et sérieux, le projet de recycart s’est récemment doté d’une adresse internet pour coordonner ses diverses activités. Entre les adeptes de l’environnement et de la création culturelle, le recycart offre un pont à quiconque s’intéresse à l’art de recycler. x Pour participer aux activités de recycart et à l’intervention du 31 juin et du 1er juillet 2006, vous pouvez entrer en contact avec les organisateurs grâce à l’adresse suivante : recycart@hotmail.com


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xLe Délit • 20 septembre 2005

nouvellescampus

Prière, colère et universitaires La fermeture de l’espace de prières crée encore des remous LAURENCE BICH-CARRIÈRE

L

’histoire remonte à 1998. L’Association des étudiants musulmans est en quête de local et s’adresse à l’AÉUM, elle-même aux prises avec des problèmes de logement. L’AÉUM relaie le problème à l’administration de l’Université qui offre un local, d’abord au Birks puis au Peterson Hall, selon des termes qui lui semblent nettement temporaires. Le bail est par ailleurs renouvelé plusieurs fois jusqu’au 31 mai 2005. C’est alors que, minuit à peine sonné, des gardes de sécurité de McGill viennent expulser les derniers étudiants et changer les serrures, un geste qu’Idil Issa, la porte-parole de la Muslim Students Association (MSA) qualifie de cauchemar «à la Cendrillon». Mais c’est loin d’être la fin: certes, depuis, le sous-sol du Peterson Hall abrite un laboratoire d’archéologie, mais McGill compte toujours environ 2 800 étudiants et employés musulmans dont 200 faisaient quotidiennement usage de la salle de prière. Faute de mieux, ceux-là prient à présent dans le gazon devant l’édifice MacDonaldHarrington. Et comme la fin de la belle saison approche, le problème se fait criant. Pas plus tard que la semaine dernière, les membres de la MSA ont tenté de remettre des lettres à la principale Heather MunroeBlum, sans même parvenir à se rendre jusqu’à sa secrétaire. Un sentiment de trahison et de dégoût face à ce qu’on percevait comme de l’hypocrisie régnait. Madame Issa a des mots durs pour cette attitude: «On peut y voir l’étendue du dédain qu’a l’administration pour nous. Nous ne sommes pas mieux que des parias». Sacro-sainte, la sécularité? Même si le groupe de travail conjoint étudie présentement les possibilités de trouver du financement pour l’achat d’une salle de prière hors campus à proximité, l’exécutif de la MSA croit que les relations avec l’administration «n’ont jamais été aussi mauvaises». Après les échecs du printemps (notamment la suggestion d’une salle de prière multiculturelle dont la configuration permettrait aux musulmans de s’agenouiller, ce qui n’est pas le cas dans la chapelle du Birks, qui, malgré son nom, est mise à la disposition des étudiants pour toutes les activités, qu’elles soient religieuses ou non) cet

C’était jusqu’à récemment, dans le sous-sol de ce pavillon que certains étudiants musulmans éxerçaient leurs devoirs de prière

été, la proposition d’un double bail, d’abord entre McGill et l’AÉUM puis entre l’AÉUM et la MSA a été refusée. Au nom de la laïcité. D’ailleurs, la formule du courriel d’Anthony C. Masi, viceprincipal intérimaire, du lundi 12 septembre dernier ne peut être plus claire. «McGill ne fournit pas d’espace sur le campus pour la pratique régulière des rituels, y compris la prière, pour tout groupe religieux.» Ce principe de laïcité, plusieurs étudiants semblent y tenir. Un étudiant en génie mécanique qui tient à préserver l’anonymat s’exprime ainsi: «[C’est une question] d’intégrité par rapport à certains principes de séparation de l’Église et de l’État qui devraient se refléter dans l’éducation. Le métro offre-t-il des espaces de prière? L’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau offre-t-il des espaces de prière? Non: ils sont publics et donc, séculiers!» (NDLR : après vérification, il y a bel et bien un espace de prière à l’aéroport Trudeau). Pour madame Issa, cet argument est fallacieux: «C’est creux! On a

fait de la sécularité une religion sur le campus.» Un peu plus tôt, elle disait: «Je pense que la réalité du multiculturalisme doit l’emporter sur ce faux principe de sécularité. En plus [de cette histoire d’espace de prière], il a récemment été question de la mention du mot «Dieu» dans une cérémonie d’ouverture: il y a simplement beaucoup trop de judéo-christianisme, d’histoire religieuse, de multiculturalisme pour qu’on puisse bannir la religion». À ce sujet, les idées vont dans tous les sens sur le campus. La plupart des étudiants évitent de se prononcer ou refusent simplement que leur nom soit publié, quelle que soit leur position. Interrogée par le Délit, Alexandra Mouracade, une étudiante en gestion, s’exprime ainsi: «Mon opinion personnelle est […] que la laïcité est une valeur primordiale, et j’entends par laïcité séparation entre sphères publique et privée en ce qui concerne la religion. Mais je pense aussi que ça dépend de la mission que se donne McGill: si son but est l’éducation, qu’elle s’y limite.» Il est manifeste

que c’est la position qui a sa faveur, mais elle ajoute aussi sec: «Par contre, si McGill prétend aider les étudiants à tous les niveaux, alors, il peut y avoir débat.» Et c’est justement ce sur quoi compte la MSA. Le beurre et l’argent du beurre Dans le courriel de monsieur Masi, on lisait que «McGill est reconnue pour la diversité de ses étudiants, de ses [professeurs] et de ses employés, pour ses relations harmonieuses et pour sa promotion active de la tolérance et de la compréhension. Nous accueillons des étudiants de plusieurs pays, de toutes les races, religions et croyances et nous sommes fiers de notre diversité». Pour la MSA, c’est exactement ce message qui sonnera le glas de la position de l’administration: pas besoin de traîner qui que ce soit en justice (l’École des technologies supérieures fait présentement face à la Commission des droits de la personne), c’est l’évolution naturelle de la situation qui la rendra

intenable. «[L’université] a pris une direction qu’elle ne pourra pas poursuivre», explique madame Issa. «Si elle veut de ces étudiants du monde et que ces étudiants ont tous des besoins différents, elle doit être prête à offrir une forme d’accommodement.» En substance, selon ses dires, si McGill veut garder son image pour les lecteurs du palmarès universitaire de la revue McLean’s, elle devra être prête à faire des concessions. «Nous n’avons plus vraiment confiance en [l’administration], mais nous avons confiance en ceci: nos demandes sont raisonnables, nous ne cherchons pas la destruction mais bien une solution, nous sommes ouverts et prêts à débattre avec ceux qui s’intéresseront au sujet.» Elle assure qu’il y aura d’autres lettres et d’autres brochures pour que «le côté qui n’a pas un accès direct à tous les étudiants» puisse les rejoindre. «Soyez assurés que d’autres lettres et d’autres tracts sont à venir», conclut-elle. x


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xLe Délit • 20 septembre 2005

Images photographiques imaginées

cultureartsvisuels

La neuvième édition du Mois de la photo se tiendra à Montréal jusqu’au 10 octobre. CLÉMENCE REPOUX Arthur Renwick/Leo Kamen Gallery, Toronto

Tah-ton-kah-he-yo-ta-kah (Sitting Bull), de la série Delegates: Chiefs of the Earth and Sky (2004) d’Arthur Renwick.

L

e Mois de la photo est un des principaux événements de l’année culturelle à Montréal, à ne rater sous aucun prétexte.Tout d’abord, ce festival réunit une soixantaine d’artistes incroyablement talentueux venus de tous les coins du monde. De plus, leurs œuvres sont présentées dans des expositions gratuites. J’ai bien dit gratuites. Cette année, le thème ainsi que la programmation sont tout à fait remarquables. Autant d’excellentes raisons de profiter des derniers «beaux jours» pour enrichir notre culture photographique aux quatre coins de la ville. Cette année le festival présente le thème «Image et Imagination». Nul n’approche l’art de façon neutre. Chacun d’entre nous a un passé, une personnalité, des rêves, des envies, des peurs, des doutes...Ainsi, chaque spectateur réagit différemment face à une œuvre d’art en fonction de qui il est. On pense rarement à la photographie comme étant un art où la subjectivité du spectateur entre en ligne de compte. En effet, la photographie est un art qui est vu comme une représentation du «réel» comme l’était la peinture dans le passé. Ce festival est justement là pour remettre en question ce stéréotype à travers un nombre incroyable d’expositions diverses et variées et d’événements plus intéressants les uns que les autres. Le festival s’organise autour de trois

principaux thèmes fondateurs. Le premier, intitulé «Visées de l’Imaginaire», explore la façon dont le spectateur s’introduit dans l’image. L’une des expositions phares de cette section est celle de Michael Snow qui a lieu à la Galerie de l’UQÀM jusqu’au 8 octobre. Le deuxième thème, «Refléter le soi, rejouer l’autre», explore une utilisation plus politique de la photographie dans la représentation de communautés et d’identités. L’exposition Noir et blanc sur les impatients, prise 2 est une «série d’autoportraits réalisés sous la direction de Gabor Szilasi par les participants d’un programme d’art thérapeutique en santé mentale», et se tient au Centre d’expression et d’interprétation de l’art thérapeutique et de l’art brut (100, rue Sherbrooke Est) jusqu’au 28 novembre. Le troisième thème, enfin, «Une façon de fermer les yeux», explore la relation entre l’influence que la photographie peut avoir sur l’imagination et l’influence que l’imagination peut avoir sur la photographie. L’invisible devient visible. À voir tout de suite: l’exposition Émanations au centre d’art Amherst, qui ne dure que jusqu’au 25 septembre. À noter aussi, Les Revenants, qui explore la photographie spirite, au MAI jusqu’au 5 novembre. En plus des expositions, le Mois de la photo offre nombre d’événements, encore une fois gratuits, incluant des visites guidées

Happé par la réalité

et des conférences de toutes sortes. À noter, un colloque ouvert au public aura lieu ce jeudi et vendredi (22 et 23 septembre) aprèsmidis à l’UQÀM et au Centre canadien d’architecture (CCA). Ne pas rater jeudi à 12h30 l’intervention de Michael Snow qui présente sa dernière collection, Windows, ainsi que jeudi soir à 19h l’intervention de Raymond Bellour qui parlera des œuvres de Snow. Enfin, auront lieu vendredi différents débats et conférences avec les artistes. D’autres événements vont émailler les prochaines semaines. La commissaire du festival, Martha Langford, présidera une visite guidée de l’exposition Natures vives. Ensuite, Édouard Lachapelle présentera une conférence sur l’histoire du portrait ce dimanche. Le 16 octobre aura lieu une table ronde sur le thème «Soi comme autre: photographie et performance». Enfin, le 16 novembre Mme Langford présentera une autre conférence: «Image & Imagination : encounters with the photograph works of Tracey Moffatt» au musée des beaux arts. x Pour plus d’information sur les différentes expositions, les conférences et le colloque, n’hésitez pas à consulter le site internet du Mois de la photo, le www.moisdelaphoto.com

cultureartsvisuels

Débraye!, une exposition engagée pour citoyens enragés. JEAN-FRANÇOIS SAUVÉ

www.quartierephemere.org

et engagée. On n’a qu’à penser à quel point l’automobile a façonné Montréal: des quadrilatères entiers ont été démolis pour faire place aux multiples chantiers autoroutiers, amenant par le même fait le développement périphérique des banlieues. Or, certains mouvements, dont l’ATSA, ou les gens derrière le projet de tramway sur l’avenue du Mont-Royal, prônent un retour vers un développement moins axé sur l’automobile. Justement, la dernière journée de l’exposition coïncide avec l’événement En ville sans ma voiture, où les rues avoisinant la galerie seront fermées pour l’occasion. Un périmètre du centre-ville sera également interdit à la circulation automobile pour cette troisième édition, toujours parrainée par l’AMT. Diverses activités auront lieu aux deux sites, se culminant par deux spectacles gratuits des Respectables au centre-ville. La fermeture des rues va permettre aussi aux intéressés de pouvoir profiter de la piste cyclable de Roadsworth aux abords de la Fonderie sans risquer de se faire frapper par une voiture,

www.quartierephemere.org

L

a hausse du prix de l’essence la charpente de la galerie (Citation, mastodonte. Ces violations font ne pouvait arriver à un de Doug Scholes, Dominique sourire car elles sont écrites avec un meilleur moment pour Toutant et Mark Lanctôt). La humour, parfois très cinglant, qui les gens derrière l’exposition pièce principale est destinée à exprime un ras-le-bol authentique. Débraye! qui se déroule jusqu’au nous réveiller, nous sortir de notre Élaborées à la fois pour faire réagir 22 septembre. Alors que certains torpeur. L’effet est saisissant. On et pour éduquer, on se surprend du automobilistes réclament temps qu’on passe à les lires. une diminution des taxes La seconde pièce est sur l’essence, d’autres beaucoup plus exiguë, avec utilisent ce phénomène des œuvres plus personnelles, pour réévaluer leurs en moins grand format. besoins en terme de Alors que la première partie déplacement, quitte à de l’exposition est située utiliser des moyens de dans une grande salle où transport alternatifs. les volumes sont très bien L’exposition, qui a lieu à exploités, la deuxième partie la Fonderie Darling dans souffre d’un manque de place le Vieux-Montréal, vise qui nuit à la compréhension justement à remettre en des œuvres. L’exiguïté de Attentat #10 à l’entrée de la Fonderie Darling question la prépondérance, la pièce atténue le message voire le culte, de l’automobile est déstabilisé par cette voiture qui véhiculé. Quelques œuvres semblent dans la société. Plusieurs artistes semble sur le point de s’écraser. empiéter les unes sur les autres, par contribuent à l’exposition et utilisent Une autre dimension de exemple, le très personnel Coussin les vastes espaces de la Fonderie l’œuvre de l’ATSA est ces fausses gonflable de Cindy Dumais. pour donner un plus grand coup contraventions qui remplissent On peut y voir un parallèle avec d’éclat. Dès l’entrée, on est frappé un mur gigantesque. Celles-ci l’exposition sur les années soixante en pleine figure par l’authentique étaient distribuées par des citoyens au Centre Canadien d’Architecture, VUS cabossé et calciné (Attentat à des conducteurs abusant de où l’influence de l’automobile sur le #10) de l’ATSA (Action Terroriste leur démarreur à distance, laissant paysage urbain montréalais fait aussi Socialement Acceptable), ainsi que tourner leur moteur au ralenti partie du propos, quoique d’une la Chevrolet Citation suspendue à ou simplement possédant un façon beaucoup moins brutale

Citation: simulation d’un accident cathartique

votre humble auteur écrivant ceci par expérience… x Débraye! Voitures à controverse est présenté à la Fonderie Darling (745, rue Ottawa) jusqu’au 22 septembre. Pour la journée En ville sans ma voiture, visitez le site de l’AMT (www.amt.qc.ca) pour l’horaire et les lieux des activités.



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xLe Délit • 20 septembre 2005

Résultat du test: positif

culturedanse

Furies alpha 1/24, la nouvelle création de la chorégraphe de danse contemporaine Estelle Clareton, est présentée à l’Agora de la danse du 21 au 24 septembre. MARIE-NOËLLE BÉLANGER-LÉVESQUE Rolline Laporte

L

orsque je vais à un spectacle, la première minute me révèle toujours si j’aimerai ou non la prochaine heure. Le test cette semaine s’est révélé positif : bravo à la compagnie Montréal Danse qui tente toujours de sortir des sentiers battus et qui a réussi encore une fois à m’impressionner. Furies alpha commence pourtant bien simplement: les six danseurs, trois gars, trois filles, se déplacent sur la scène. A priori, ce qui a attiré mon attention c’est le travail du scénographe François Vincent dans cette salle que j’adore de l’Agora de la danse: les rideaux en mailles de fer placés entre la scène et l’audience, les petites folies dans des costumes autrement fort habituels et cette fameuse porte blanche. Cette dernière agit tout le long comme le fil conducteur, sans pourtant que l’on puisse vraiment déterminer ce qu’elle symbolise: on la frappe, la fait

Une course à la créativité réussie par Estelle Clareton.

virevolter, on y grimpe, s’y couche, s’y accroche. Pendant une heure, les six danseurs se donnent à fond: pas de pause ou presque, on nous étourdit, sans un mot, on cherche notre attention dans tous les coins.

Encore une fois, je m’étonne de la proximité des corps, de cette façon de se toucher qui semble si familière sur scène et qui est pourtant tabou en société. Plus particulièrement, le synchronisme des danseurs révèle la

monotonie du quotidien dans une beauté incroyable. Comme le spectacle est presque entièrement en silence, la musique est de première importance. Dans le domaine de la danse contemporaine, celle-ci est parfois pénible, froide, ce qui rend généralement l’approche de ce type de danse plus difficile. Avec le compositeur Éric Forget, la réalité est toute autre: j’ai tout simplement adoré. Un mélange juste et précis d’électronique étourdissant et d’un piano réconfortant, adapté aux différents élans des danseurs, toujours très humain. Les élans sont dirigés, mais non dictés par la chorégraphe Estelle Clareton qui veut laisser de l’espace aux danseurs. Sa création est décrite comme étant «propulsée par une rage mêlée de tendresse, des alliances mouvementées, une monstrueuse séduction»: une rage de vivre qui révèle un amour pour

Mise à mort d’un théâtre moribond

la vie, le spectacle nous laissant remplis d’espoir. Comme ceci est bien le premier volet de ses vingtquatre études (expliquant le «1/24» du titre), la chorégraphe n’a pas fini de nous en donner! Profitez donc de l’ouverture de la saison de l’Agora de la danse pour partager ce mélange d’émotions entre amis. Une saison qui s’annonce bien et une session d’étude qui, l’on espère, le sera tout autant! La compagnie Montréal Danse présente Furies alpha 1/24 du 21 au 24 septembre à 20 h à l’Agora de la danse, 840, rue Cherrier (métro Sherbrooke). Les billets sont à 18$ pour les étudiants. Pour plus de renseignements, visitez le www. montrealdanse.com et le www. agoradanse.com.

culturethéâtre

Mise en scène décevante du texte de Louise Bombardier, Ma mère chien, au Théâtre d’Aujourd’hui. LUCILLE HAGÈGE minable des acteurs ne s’améliore pas ? De plus, nous sommes constamment assenés par une nudité excessive, comme une claque que nous sommes trop vieux et trop éduqués pour recevoir. La mise en scène part dans des directions inconnues, exagérant les personnages et laissant le texte languir derrière, soudain privé de contexte et désuet. Les jeux de scène, poussant le sexuel au-delà des limites du vulgaire, anéantissent la complexité et l’ambiguïté des relations mère-filles pourtant si centrales dans le texte. Mais surtout, les mille et uns détails scéniques qui semblent tombés des cieux restent incompréhensibles même si le spectateur se casse la tête. Nous, public féru de théâtre, nous nous sentons trahis par ce genre moderneux qui se complait à nous ignorer et dont l’idéal esthétique se passe de notre participation. Et alors que la mère malade se meurt sur scène devant un écran, soudain apparu de nulle part, où mugissent des crabes belliqueux (oui, des crabes), je lâche la trame, je laisse tomber et je quitte la salle peu après avec la frustration qui me ronge les parois du ventre. J’ai entendu dire une fois que si, au long d’une pièce, on vient à se demander si on est trop stupide pour comprendre le théâtre, c’est que l’on vient d’assister à du mauvais théâtre. Je ne sais pas si c’est vrai, mais il me semble que le théâtre sans spectateur ce

Yves Renaud

A

rgh ! La frustration ! Encore une fois, un jeudi soir à la sortie du théâtre, cette sensation d’aliénation totale. Après deux heures d’une pièce vulgaire, aux relents modernistes et dispendieux, nous osons à peine regarder le personnel de la billetterie dans les yeux. Rires gauches, regards en coin, on scrute la salle pour s’assurer que les autres spectateurs, eux non plus, n’ont rien compris. Et pourtant, le texte de Louise Bombardier, Ma mère chien, avait tout pour plaire. Avec une poésie sensuelle et tendre, on entre dans l’univers secret d’une chambre d’hôpital où une mère et ses deux filles se trouvent et se confondent à l’orée de la mort. Au chevet d’un lit trop blanc, on est propulsé dans le passé, dans la mémoire et le rêve, et du rêve au cauchemar. Dans cette pièce, la famille, ça se propage comme une maladie, dans toutes les directions du temps. Et au bout de ce voyage syncopé, on trouve le plus vilain des secrets de famille: la vieillesse, ou l’ultime trahison du corps. Mais alors, à quel moment est-ce que ces sujets tristes comme l’univers et profonds comme l’âme lâchent-ils le public, ce petit monde de curieux rendus vulnérables et attentifs dans l’attente du sublime? Est-ce dès le début, avec le décor bâclé, bourré de questions auxquelles le texte ne répond pas? Ou est-ce progressivement, alors que le jeu

La mise en scène de Ma mère chien, alourdie de détails superflus et déplacés, ôte son charme au texte de Louise Bombardier.

n’est plus du théâtre, mais du nombrilisme exacerbé. La mise en scène est un langage, aussi important que le texte lui-même. Dans cette représentation décevante de Ma mère chien au Théâtre d’Aujourd’hui, la mise en scène se parlait à elle-même et le texte n’a parlé à personne. x

Ma mère chien de Louise Bombardier, mis en scène par Wadji Mouawad, est présentée jusqu’au 8 octobre au Théâtre d’Aujourd’hui, 3900 rue Saint-Denis. Pour plus d’information, appelez au (514) 282-3900 ou visitez le www. theatredaujourdhui.qc.ca


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xLe Délit • 20 septembre 2005

Norma à l’opéra

culturemusique

L’Opéra de Montréal entame sa saison avec Norma de Vincenzo Bellini. AGNÈS BEAUDRY Yves Renaud

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amedi soir, la salle Wilfrid-Pelletier a levé le rideau sur Norma, le chef d’œuvre à la fois dramatique et romantique de Vincenzo Bellini, mis en scène par Stephen Pickover. Hasmik Papian, dans le rôle de Norma, a offert une prestation sublime, suscitant les bravos des spectateurs dès la fin de son premier chant. Norma est l’un des plus grands opéras italiens. Présenté pour la première fois en 1831, l’opéra de Bellini se classe parmi les premières mises en scène du mouvement romantique. Comme celles-ci, il ne manqua pas de faire scandale, brisant les règles traditionnelles des opéras de l’époque. Au-delà de la convention, Norma est aussi le prototype de l’héroïne romantique. L’histoire de Felice Romani, s’inspirant de la tragédie d’Alexandre Soumet, est celle d’une druidesse gauloise déchirée entre son amour pour le divin et celui qu’elle chérit pour le proconsul de Rome, Pollion (Antonio Nagore), père de ses deux fils. Ce dernier s’est lassé d’elle, tombant amoureux d’Adalgise (Kate Aldrich), jeune prêtresse gauloise. C’est par la confession de cette dernière que Norma apprend le méfait de son amant. Elle tentera et de vivre avec sa douleur, et de se venger, l’opéra culminant avec son propre sacrifice, Norma s’offrant au

La soprano Hasmik Papian, dans le rôle de la grande prêteresse, Norma suscite les acclamations du public.

bûcher avec Pollion afin de réparer leur faute commune. Les transports lyriques, les débats intérieurs auxquels se livre Norma ainsi

que sa position de conflit avec le monde et ses conventions font d’elle une héroïne romantique par excellence. Par conséquent, l’opéra n’échappe pas aux longueurs dont se parent souvent les œuvres romantiques. Elle a plus de beau que de redondant, mais en tant que pièce ayant été écrite dans une époque précédant l’application rigoureuse du concept d’avant-garde, ceux qui, comme moi, ont l’esprit entraîné à la recherche de l’originalité devront remouler leurs attentes afin de pouvoir apprécier la trame du drame romantique qu’est Norma. La soprano arménienne, Hasmik Papian, a envouté la salle samedi soir. Interprétant le rôle pour la première fois il y a dix ans, sa performance n’a pas manqué d’illustrer la maîtrise qui doit nécessairement découler d’une telle expérience. Le rôle est connu comme l’une des plus difficiles performances féminines et, malgré mon oreille inexpérimentée en matière d’opéra, je n’ai pas hésité à me joindre à la foule dans ses acclamations. À l’écouter, j’ai eu plusieurs fois des frissons: c’est d’abord par sa voix, mais aussi par son talent d’actrice qu’elle enchante. Malgré les contraintes du médium, Papian réussit à faire sentir à l’audience le déchirement de son personnage. Papian dit,

Préface

PIERRE-OLIVIER BRODEUR

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erdu dans ma bibliothèque, je me demande de quel côté prendre le problème suivant: comment écrire une chronique littéraire? La borner à une simple critique, dûment délimitée en introduction, résumé et jugement de l’œuvre paraît futile. Outre la lourdeur du mouvement classique d’introduction du sujet, le résumé semble frivole. On y combine sans cesse les mêmes variables et ce n’est plus qu’une question de savoir si la péripétie P1 met en scène le protagoniste (X) ou l’adjudant (Y), et de quelle façon elle modifie la situation initiale S0. Cela fait, on est censés se

trouver plus avancé pour tirer un jugement critique qui ne fait en général que se borner à de vagues remarques sur l’habileté avec laquelle l’intrigue est ficelée, pour masquer de quelle façon le critique se trouve embobiné, entortillé, empêtré dans l’œuvre. « Un livre qui se lit bien»… Avec la disparition du rêve de pierre de Baudelaire, d’un absolu esthétique, il est malaisé pour un critique de jouer le rôle de trieur qui jadis fut le sien. Qu’est-ce qui sépare deux œuvres, qu’est-ce qui fait qu’on devrait relire Baudelaire au lieu de se lancer sur le nouveau Dan Brown ? L’abîme entre ces œuvres, c’est celui de l’expérience de lecture, et c’est également là ce que doit transmettre un critique. Baudelaire, toujours lui, croyait que seule une œuvre d’art était une critique adéquate. Devant une symphonie, écrivez un sonnet. Car la vraie œuvre d’art est habitée de correspondances et se multiplie sans cesse dans l’œil du critique. À la lecture des Fleurs du mal (si vous me permettez de prendre un exemple choisi au hasard…) nous pénétrons dans un univers complet et complexe où les pensées du poète se déroulent en

dans un entretien avec Pierre Vachon: «Pour moi, c’est [Norma] une femme moderne, comme toutes les femmes d’aujourd’hui.» Et c’est ce qu’elle joue, éveillant un pathos inhabituel chez les spectateurs. Sous la direction musicale de Bernard Labadie, l’Orchestre Métropolitain du Grand Montréal a ouvert la soirée avec merveille et a très bien rendu les subtilités de la musique de Bellini. N’ayant jamais été à l’opéra, j’avoue que cela m’a vraiment plu. Pour ce qui est de mon opinion sur l’histoire, il s’agit d’une préférence plutôt personnelle, traitant de l’intérêt que l’un porte pour les intrigues tragiques. Mais que ce soit Norma, L’Étoile ou Aïda (aussi au programme de l’Opéra de Montréal cette année), je pense que qui n’est jamais allé à l’opéra devrait faire au moins une fois le détour pour comprendre ce qu’est cet art qui a occupé une place aussi importante dans l’histoire. Norma sera présenté à la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts les 21, 24, 26, 29 septembre, ainsi que le 1er octobre. Les billets sont en vente à partir de 43$ avec des prix spéciaux pour les 18 à 30 ans. Pour plus d’information, appelez au (514) 985-2258.

Calendrier McGill

Semaine du 20 au 27 septembre immenses fresques éphémères, nous déambulons dans les rues d’une ville à l’architecture magnifiquement dure et éclatante, bercés par le chant langoureux et lassant de la trop facile volupté. Et même la pluie qui tombe sans cesse, imitant les barreaux d’une prison, ne peut masquer le colosse qui domine ce panorama: l’idole laide et pathétique de l’humanité. À côté de cela, on a peine à trouver une raison valable pour lire Anges et démons, de Dan Brown. Un style qui n’évoque rien, sinon sa propre médiocrité et qui, en ce sens, se marie à merveille à une structure narrative aussi banale que convenue, dans laquelle évoluent des personnages sans âme ni texture. Un peu de recherche historique tente de pallier le manque d’intelligence de cette œuvre si stupide qu’on en vient à se demander si sa principale qualité n’est pas d’avoir été précédée du Code DaVinci. Cette intrigue minable où s’enchevêtrent superstitions chrétiennes et détails anecdotiques devraitelle être considérée comme un roman, ou un colossal gaspillage de papier? La question est lancée. x

Musique • 4 à 7 de musique 100 p. cent francophone - Réseau des Francos - mercredi 21 septembre – 16h – Pavillon Shatner, Bar Gert’s reseaudesfranco@yahoo.ca • Party de sortie pour le magazine Stationaery no 7 – musique de John Lennox et Lil’Andy - mercredi 21 septembre - 21h – bar La Salla Rosa – 8$ – www.stationaery.com/3 • Un Concert pour la Nouvelle Orléans - présenté par les étudiants et professeurs de la Faculté de Musique - œuvres de Liszt, Messiaen, Puccini, Kodaly, Chopin, Haydn, etc. - vendredi 23 septembre à 20h - Pavillon de Musique, salle Polack - don de 15$, 10$ étudiants - (514) 398-4547. Cinéma • Movies in the Parc – horaire et programmation sur les affiches placardées sur le campus – mardi 20 septembre au jeudi 22 septembre – 20h30 – campus principal, lower field – entrée libre – (514) 3986799 ou ce@ssmu.mcgill.ca. • Anna: from 6 to 18 – documentaire soviétique - McGill East European and Russian Film/ Documentary Series – mardi 27 septembre – 18h – Pavillon des Arts, salle 265 – (514) 398-6843 ou (514) 398-6120.

Lectures Publiques • MISC Lunch and Learn: How French Canadians became Québécois – Jean-Philippe Warren – apporter votre dîner – mercredi 21 septembre – 12h30 à 13h30 – McGill Institute for the Study of Canada (3463, rue Peel), salle 201 – entrée libre – (514) 398-8346 ou www.misc-iecm.mcgill.ca • Motivating Fictionalism Antony Eagle (Université Oxford) - Colloque du département de philosophie - vendredi 23 septembre à 16h - Pavillon Leacock, salle 927 - (514) 398-6060. • Shattered Motherhood: Women and the Holocaust – Sara R. Horowitz (York University) – Montreal Holocaust Memorial Centre, Simone de Beauvoir Institute et MCRTW – lundi 26 septembre – 19h – Pavillon Leacock, salle 232 – (514) 3983911 ext. 3 ou www.mcgill.ca/ mcrtw Visite Guidée • Stones and Beer Bike Tour - visite historique guidée à vélo suivie de dégustation de bières et produits locaux - mercredi 21 septembre à 16h à 21h - départ au Musée Redpath – 20$, 10$ étudiants – (514) 398-4086 ext. 409.

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xLe Délit • 20 septembre 2005 Thomas Hellman L’Appartement (Just in Time Records Inc.)

The Redwalls de nova (Capital Records)

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he Redwalls est un groupe qui vient de Deerfield en Illinois. Les membres du groupe sont tous très jeunes, la plupart ayant complété leur secondaire en 2003. L’album de nova est un album qui aurait facilement pu sortir en 1965. Le groupe est très influencé par les Beatles. C’est d’ailleurs en faisant des reprises de vieilles chansons de l’english invasion des années soixante que le groupe a commencé à jouer. Leur son ne s’est véritablement pas modifié et on croirait parfois encore reconnaître une parole de John Lennon ou un riff de George Harrison dans leur matériel original. L’album est quelque peu endormant, rien n’accroche vraiment l’oreille. Après environ quinze minutes, j’ai remarqué que le disque jouait encore. Je me suis mis à l’écouter et il faut dire que j’aurais préféré ne pas le faire. Ce n’est pas que l’album soit mauvais, mais seulement que toutes les chansons ressemblent à des chansons des Beatles sans le génie accrocheur de ceux-ci. Ceci nous laisse avec un rock pop sans âme et quelque peu stérile. Je ne comprends toujours pas le pourquoi de l’avertissement parental explicit content sur la pochette de l’album. The Redwalls semble être parfois à la merci de sa maison de disque (Capital Records) qui, lors de la signature du groupe, lui a fait changer de nom. The Redwalls est une reprise des Beatles. Ils font beaucoup penser à Oasis, pour qui ils ont fait la première partie du spectacle dans une tournée de la Grande-Bretagne cet été. L’album peut être apprécié si vous aimez vraiment le rock classique des années soixante, mais je vous suggère plutôt Rubber Soul des Beatles ou The Freewheeling Bob Dylan, qui pourront beaucoup mieux satisfaire vos oreilles. x SAMUEL ST-PIERRE THÉRIAULT

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e fils du fameux Hellman, professeur d’histoire ici à McGill, sort son premier album. On l’écoute d’abord pour sa poésie, ensuite pour l’accompagnement original et enfin pour la variété surprenante des chansons. Ce sont des paroles à l’Aznavour, à la Lama ou encore à la Brel («Mathilde», «Le trottoir») qui se fondent dans un Carla Bruni masculin dans «L’admirateur secret». C’est la poésie d’un séducteur, mais aussi celle d’un rêveur. La mélodie et la prononciation se scandent à merveille pour plaire à l’oreille. Il y a encore des petits accros, mais ils s’oublient facilement. Son «orchestre», si je puis me permettre de nommer ainsi un ensemble composé d’un contrebassiste (Tommy Babin), d’un pianiste (Olaf Gundel), d’un percussionniste (Remi Leclerc), d’une violoniste et d’un violoncelle (MarieSoleil Bélanger et Sheila Hannigan), donne à l’album un ton de mélodie nocturne urbaine. Sur la portée, ils repeignent les rues de Montréal sous lampadaire («Au coin de Duluth et demain», «La valse d’un soir»), ravivant ensuite le folklore violoneux dans «Jusqu’à la fin du monde». Versatiles, intéressants, amusants ou envoûtants, les musiciens ne se cachent pas derrière Hellman. Un album original non par la nouveauté de son style, mais par le mélange étonnamment réussit de plusieurs, gardant tout de même son unité, racontant son histoire, poème de Montréal, comme on en a tant vu de Paris: celuici est d’ici. x AGNÈS BEAUDRY

Dream Theater Octavarium (Atlantic/ WEA)

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ctavarium permet à Dream Theater de se rediriger vers le bon vieux métal progressif dont le groupe est maître depuis la sortie d’Images and Words en 1992. L’album est clairement plus mélodique que Train of Thought, qui avait laissé grand nombre d’amateurs perplexes. La transition avait attiré de nouveaux adeptes, mais représentait mal le son du groupe, plus complexe et moins violent. Les huit chansons sur Octavarium sont étrangement prenantes. De la balade «The Answer Lies Within» émane même une certaine émotion kitsch qui ne réussit pas tout à fait aux proggeurs de la Nouvelle-Angleterre. «The Root of All Evil» continue la série du batteur Mike Portnoy sur l’alcoolisme et comprend des passages des désormais classiques: «The Glass Prison» et «This Dying Soul». La pièce maîtresse vient sous la forme de la chanson-titre de vingtquatre minutes. Des comparaisons avec le Wish You Were Here floydien sont inévitables. On ne retrouvera pas ici la brutalité de l’album précédent ou la sophistication de Six Degrees of Inner Turbulence. Malheureusement, pas d’instrumental à l’«Erotomania» non plus. L’ouvrage fait à la fois un clin d’œil à la vieille garde du prog et aux nouveaux talents du rock tels que Muse, parfois même trop, comme «Never Enough» qui ressemble curieusement à «Stockholm Syndrome». La guitare de Petrucci et la basse de John Myung sont bien présentes, mais ce sont les mélodies de clavier de Jordan Rudess qui dominent les soixante-quinze minutes de l’album. De son côté, le chanteur James LaBrie remplit la commande même s’il ne semble pas avoir l’endurance des efforts précédents. Somme toute, le nouvel opus des virtuoses du métal progressif américain mérite plusieurs écoutes et devrait intéresser les amateurs du groupe sans pour autant atteindre Awake ou Scenes From a Memory: Metropolis Pt. II. x ALEXANDRE DE LORIMIER


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xLe Délit • 20 septembre 2005

Art et décadence À Montréal comme ailleurs, de nombreuses friches industrielles se sont transformées en véritables terrains de jeu pour les artistes de rue qui jonglent avec abandon, décrépitude et décadence...

Photos par Philippe G. Lopez


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