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Le mardi 27 octobre 2009 - Volume 99 Numéro 07

C’est notre tournée pages 8&9


Nouvelles nouvelles@delitfrancais.com

MUNICIPAL

Crise éthique: qui croire? Vincent Allaire Le Délit

M

ontréal est en pleine crise d’éthique. Les trois principaux partis politiques municipaux que sont Union Montréal, Vision Montréal et Projet Montréal demandent à l’unisson une commission d’enquête publique sur la collusion dans le monde de la construction et sur les contacts des entrepreneurs avec les élus municipaux. Cette demande vient à la suite d’allégations qu’a faites Benoît Labonté, ex-bras droit de Louise Harel de Vision Montréal, à Radio-Canada le jeudi 22 octobre dernier. Monsieur Labonté a entre autres révélé qu’un système de pots de vin existerait où des entrepreneurs obtiennent des contrats de la ville de Montréal et versent en contrepartie de l’argent dans les coffres d’Union Montréal, le parti du maire sortant Gérald Tremblay. Benoît Labonté a aussi déclaré que le système de prête-noms serait utilisé dans les partis municipaux, dont Vision Montréal. Rappelons que Benoît Labonté était le numéro deux de ce parti avant de remettre sa démission le 18 octobre dernier à la demande de Louise Harel. Celle-ci avait fait cette requête après le refus de monsieur Labonté de se rendre dans les studios de TVA pour donner sa version des faits visà-vis des allégations qui avaient été portées contre lui dans les médias. Parmi celles-ci, on retrouve l’affirmation faite par le journaliste Fabrice de Pierrebourg sur le site RueFrontenac.com –le site Internet des employés en lock-out du Journal de Montréal– le 15 octobre dernier: selon de Pierrebourg, Benoît Labonté aurait reçu, en 2008, plus de cent mille dollars de l’entrepreneur Tony Accurso afin de financer sa propre accession à la chefferie de Vision Montréal. C’est finalement Louise Harel qui avait pris la tête du parti au début de juin 2009.

À moins de deux semaines des élections municipales, ces révélations de M. Labonté ont causé de vives réactions chez les partis politiques concernés. Gérald Tremblay a rejeté toutes les affirmations de Benoît Labonté, affirmant du même souffle qu’il était au courant depuis 2001 de malversations à l’Hôtel de Ville. Cette franchise détonne l’ignorance revendiquée qui caractérisait son discours plus tôt cette année, où le maire répondait à toute question d’éthique qu’il ne savait rien. Monsieur Tremblay affirme maintenant : «L’erreur, c’est de faire confiance à mon entourage. Je ne répéterai pas les mêmes erreurs.» Louise Harel réfute aussi toutes les affirmations avancées par Benoît Labonté en affirmant ne jamais avoir usé de prête-nom au cours de ses 27 années de carrière politique. Madame Harel dit qu’elle a, au contraire, fait adopter des règles transparentes de financement pour son parti, Vision Montréal, et dit avoir «la ferme conviction de pouvoir démanteler ce système [de copinage et de collusion] qui a cours à l’Hôtel de Ville.» Le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, sort indemne de tout ce chaos politique. Et ça se reflète dans l’esprit des Montréalais. En juin dernier, un sondage créditait Richard Bergeron de 7% des intentions de vote des Montréalais. Le 19 octobre, celui-ci avait gagné 23% des intentions de vote. Notons qu’il se retrouvait encore derrière Tremblay et Harel, qui récoltaient tous deux 37 % des suffrages. C’est toutefois une hausse importante pour ce jeune parti qui en est seulement à ses deuxièmes élections municipales. Qui croire? C’est à vous de forger votre propre opinion et d’aller voter le 1er novembre prochain. Et si vous vous sentez découragés par tout cela, rappelez-vous la citation de Winston Churchill : «La démocratie est le plus mauvais système de gouvernement, à l’exception de tous les autres qui ont pu être expérimentés dans l’histoire.»x

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Assemblée

CAMPUS

L’Assemblée générale de l’AÉUM atteint difficilement le quorum et le perd rapidement. Éléna Choquette Le Délit

M

ercredi dernier prenait place l’Assemblée Générale (AG) de l’automne de l’Association des Étudiants de l’Université McGill (AÉUM). Quoique huit résolutions y aient été présentées, seules quatre d’entre elles ont finalement pu être débattues et votées, faute de membres présents. La première motion à l’ordre du jour cherchait à favoriser l’emploi d’étudiant dans les services du bâtiment William Shatner. Si quelques craintes ont été exprimées par rapport au renvoi des employés actuels, la motion est tout de même passée aisément. Le but de la résolution n’est surtout pas de renvoyer ceux qui sont déjà employés, selon son auteur Sebastien Ronderos-Morgan, Viceprésident aux affaires externes de l’AÉUM. La motion vise plutôt les processus d’emploi qui auront lieu dans le futur. «On veut que les étudiants aient quelque chose de solide sur lequel s’appuyer lorsqu’ils postuleront [pour un emploi dans le bâtiment]», a-t-il souligné. Croyant que les questions environnementales galvaniseraient l’intérêt pour l’AG, l’AÉUM avait choisi de présenter la résolution sur l’usage de l’énergie relativement tôt à l’ordre du jour. Si elle vise une diminution de 40% de ses dépenses énergétiques d’ici 2015, il a été objecté que «c’est un pas qui est tellement difficile à franchir qu’il faudrait préalablement mener des études supportant le réalisme de la résolution». Pourtant, à la suite d’une intervention de la VP Clubs & services, Sarah Olle, à l’effet que «la résolution est importante ne serait-ce que pour l’engagement de l’Association envers la cause environnementale», celle-ci a été adoptée par l’Assemblée. Des positionnements polémiques La motion sur la pornographie a sans doute été la plus controversée des résolutions débattues. Il s’agissait de remplacer un article de la constitution actuelle, qualifiant la pornographie de systématiquement «sexiste, exploitante et dégradante», pour un autre qui ne «généralise [pas] incorrectement la nature de la pornographie.» Puisque l’AÉUM considère plutôt que «certains éléments pornographiques sont féministes [et] défient les paradigmes ordinaires», elle proposait un amendement ne prohibant que le contenu pornographique oppressif. En marge de l’Assemblée générale, Olle expliquait au Délit que le règlement avait été écrit pour «interdire la publication d’annonce publicitaires soumises par des services d’escortes et de strip clubs» au Tribune, journal de l’AÉUM. Pourtant, le conseil étu-

diant ne voyait plus «la nécessité de prendre une position aussi tranchée sur la question, d’autant plus que le règlement original avait des répercussions bien au-delà du Tribune.» La résolution a trouvé opposition en les quelques étudiants affirmant que «les McGillois ne devraient pas explorer la pornographie sur le campus universitaire, surtout parce qu’elle est intrinsèquement dégradante». La V.P. Affaires Universitaires, Rebecca Dooley, a rétorqué qu’il était essentiel de permettre à ceux qui produisent de la pornographie positive de se sentir bien à propos de ce qu’ils font. «Tout le monde n’a pas à aimer cela, mais certaines personnes l’apprécient, et nous devrions les respecter.» Quoique plusieurs aient qualifié la motion sur l’efficacité de l’espace dans le bâtiment Shatner de «divertissant» et de «pas sérieux», elle a tout de même animé un vif débat entre ses partisans et détracteurs. Statuant que l’AÉUM «devra installer une table à charnière sur le dos des portes de chaque toilette dans le bâtiment Shatner dans le but de permettre aux étudiant(e)s d’étudier tout en «effectuant leurs besoins personnels», la résolution a été largement rejetée par l’Assemblée. En réaction, plusieurs de ses défenseurs, dont son auteur, ont quitté l’Assemblée. C’est précisément à ce point que l’Assemblée a perdu le quorum, c’est-à-dire 100 étudiants, dont pas plus de 50% proviennent d’une même faculté. Les quatre autres résolutions –à savoir celles concernant l’usage du polystyrène dans le pavillon Shatner, le bail dudit pavillon, l’utilisation de fruits de mer écologiquement durables sur le campus et l’opposition au modèle d’autofinancement des frais de scolarité proposé par la Faculté de gestion– sont officiellement suspendues jusqu’à l’Assemblée Générale de l’hiver. Quelques comptes à rendre Le Président de l’AÉUM, Ivan Neilson n’en a pas moins profité de l’occasion pour présenter le rapport du comité exécutif aux quelques étudiants qui ont choisi de rester. Il a notamment assuré que le dossier des bouteilles d’eau, endossé au cours de la dernière AG, allait bon train. Selon lui, «à la fin de l’année 2009, il n’y aura officiellement plus d’eau embouteillée au Shatner». Il promet également d’assurer une meilleure communication des activités de l’association étudiante avec les étudiants, notamment par le site Web de l’Association. M. Neilson travaille aussi sur un projet de rénovation de la cafétéria du centre universitaire. «On veut un endroit spacieux pour les réunions officielles et les groupes étudiants, et la cafétéria représente pour l’AÉUM une opportunité qu’on ne peut manquer de saisir.»x

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2 Nouvelles

xle délit · le mardi 27 octobre 2009 · delitfrancais.com


générale désertée

Quelques papiers jaunes levés pour représenter tous les étudiants Frédéric Faddoul

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LOCAL

Manifestation anti-Bush

En marge de l’allocution de George W. Bush à Montréal du 22 octobre dernier, des manifestants ont dénoncé la venue du président américain controversé. Alexandre Ruiz de Porras Guédon

Le Délit

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uelque 200 personnes se sont rassemblées devant l’hôtel Reine Elizabeth où George W. Bush est venu faire une allocution jeudi dernier. Plusieurs collectifs et associations avaient appelé à la manifestation qui a duré environ trois heures. Les protestations se sont déroulées dans un calme relatif, encadrées par une escouade anti-émeute, des policiers à cheval et à bicyclette, ainsi que des chiens policiers, qui ont formé un mur devant l’entrée de l’hôtel. «Retourne dans ton ranch» et «George Bush tu nous en-

tends, Montréal te dis vas-t-en», n’étaient que quelques-uns des cris que scandaient les manifestants. Ces derniers s’étaient déplacés pour protester contre «la présence de George W. Bush à Montréal, mais aussi pour rejeter le courant d’idées qu’il représente et qui nous menace encore», pouvait-on lire sur des tracts distribués par des membres du collectif Échec à la guerre. Selon Marie-Claire, membre de ce collectif, «la Chambre de commerce [de Montréal] n’aurait pas dû inviter» M. Bush. Un autre manifestant, William Sloan, avocat et président de la section canadienne de l’Association américaine de juristes, a déclaré le président Bush comme «persona non grata», jugeant tout bonnement que George Bush «ne devrait pas avoir accès au territoire canadien». Faisant écho à de nombreuses pancartes brandissant des slogans peu flatteurs, Bernard Beaulieu, de Québec solidaire, et M. Sloan ont dit considérer «George Bush [comme] un criminel de guerre». Charles Lemieux, porte-parole du collectif Échec à la guerre, a déclaré qu’il «ne déplore pas, [mais qu’il] dénonce» la venue du président américain. M. Lemieux s’est reporté à 2003, lorsque «des dizaines et des centaines de milliers de Montréalais marchaient

ici même pour s’opposer à la guerre d’agression que [l’administration Bush] a déclenché contre l’Irak», qualifiant l’invitation de la Chambre de commerce de Montréal d’«affront». Le porte-parole du collectif a dressé un bilan très critique des huit années de présidence de «W». Il a énuméré religieusement les accusations portées contre le quarante-troisième président des États-Unis, qui à ses yeux représente «le déclenchement de deux guerres illégales contre l’Afghanistan et contre l’Irak, l’autorisation de la torture à grande échelle, l’autorisation de détentions arbitraires, les attaques contre les libertés civiles aux ÉtatsUnis, la détention d’immigrants aux États-Unis sans justification et sans procès, la négation des évidences scientifiques sur la question environnementale, le non-engagement dans Kyoto, les politiques néolibérales et tant d’autres». Outre ces accusations, M. Lemieux a surtout voulu «attirer l’attention sur la signification politique» de cette invitation. D’après lui, «le cercle de dirigeants à Montréal [...] et le milieu de l’industrie militaire de toute évidence redemandent des idées de George Bush». «De quoi se parlent-ils en ce moment entre deux bouchées de caviar», a-t-il

lancé, poursuivant que «les gens fortunés du Canada se payent George Bush non [pas] comme une curiosité, mais comme un porte-parole d’idées rétrogrades que des gens ici veulent réhabiliter». À l’écart de la manifestation, certaines personnes dénonçaient la manifestation elle-même. Alain Doucine, ancien élève en informatique à McGill et actuaire de formation, était de ceux-là. Il a qualifié les manifestants de «gens dangereux», de «fan club de Saddam Hussein» et d’«humanistes sélectifs» parce qu’ils «dénoncent Guantanamo, mais oublient les prisonniers politiques du régime de Castro». M.

Doucine a par ailleurs estimé que les manifestants auraient plutôt dû manifester contre le fait que «le Québec exporte de l’amiante chrysolite, une arme de mort massive à déflagration lente et cruelle, vers des pays abusant des libertés civiles» et d’autres torts semblables au lieu de s’en prendre à «l’alliance du monde libre». Les forces de l’ordre ont dû parer des chaussures lancées par des manifestants à plusieurs reprises. La manifestation s’est soldée par quelques arrestations et par la mise à feu du Star Spangled Banner et d’un pantin à l’effigie de George W. Bush par des manifestants quelque peu surchauffés.x

Alexandre Ruiz de Porras Guédon (2 photos) / Le Délit

LOCAL

«Non, je ne regrette rien» George W. Bush séduit la communauté d’affaires montréalaise lors d’une allocution présentée le 22 octobre dernier à l’hôtel Le Reine Elizabeth. Retour sur un discours oscillant entre principes, idéologie et vie quotidienne. Stéphanie Dufresne Le Délit

«J

’ai toujours été un grand amateur de sport; je savais même qui étaient le Rocket et le Pocket Rocket!» a lancé d’emblée un George W. Bush charmeur et farceur, qui s’était clairement fixé comme objectif de séduire un auditoire qui a dû alléger sa bourse pour l’écouter en personne –les billets coûtant entre 200$ et 400$ chacun. Dans une première partie de l’événement organisé par la Chambre de Commerce de Montréal, l’ex-chef d’État a diverti son public à grand renfort d’anecdotes et de blagues espiègles sur son retour à la «vie normale», sa famille et l’amitié canado-américaine. À plusieurs reprises, celui qui a été l’auteur des décisions controversées d’engager son pays dans les guerres en Afghanistan et en Irak a affirmé ne «rien regretter» et «être en paix avec lui-même» puisqu’il a toujours agi selon ses principes.

4 Nouvelles

Les propos du quarante-troisième président des États-Unis se sont approfondis lors de la deuxième partie de la conférence, articulée sous la forme d’une conversation avec John Parisella, futur délégué général du Québec à New-York, passionné de politique américaine et… fervent partisan démocrate! M. Parisella a notamment questionné l’ex-président sur la décision de son administration d’attaquer l’Irak alors que les fondements justifiant cette offensive étaient précaires: «Beaucoup ont eu l’impression que vous aviez perdu de vue l’objectif premier [de lutter contre le terrorisme]», a-t-il soutenu. Visiblement sur la défensive, M. Bush a défendu ce choix en soulignant le danger que posait le régime irakien pour la stabilité mondiale : «Même si le régime de Saddam Hussein ne possédait pas d’armes de destructions massives à l’époque, il cherchait à en acquérir et n’aurait pas hésité à les utiliser». Selon lui, la situation mondiale serait bien plus insta-

ble et dangereuse aujourd’hui si les États-Unis n’avaient pas pris l’initiative de renverser Saddam Hussein, «au cœur d’une coalition de plus de quarante-et-un États» a-t-il rappelé. «Sans notre intervention, nous serions aujourd’hui témoins d’une course à l’armement nucléaire entre les Chiites irakiens et les Sunnites iraniens». Idem pour la crise économique, qui, affirme-t-il, «aurait été de l’ampleur de la grande dépression des années 1930» si son administration n’avait pas agit préventivement pour tenter de l’endiguer. Questionné sur l’opération militaire en Afghanistan dont le Canada «soutient une part disproportionnée», George W. Bush a louangé les Canadiens pour leurs efforts. «Si nous abandonnons l’Afghanistan trop tôt, les terroristes vont se réorganiser et menacer notre sécurité. Il faut donner aux Afghans l’espoir que leur situation va s’améliorer», a-t-il affirmé, tout en reconnaissant que la situation est complexe et loin d’être réglée.

L’ex-président a tout de même fait preuve d’une pointe d’autocritique à la fin de l’entretien, estimant qu’il aurait pu faire mieux avec la réforme de la sécurité sociale et la politique d’immigration. «Mais je suis fier de ce que j’ai accompli; je n’ai pas vendu mon âme. Merci beaucoup», a conclu le principal intéressé, visiblement agacé, mettant ainsi fin abruptement à l’événement après quarante minutes. Malgré la controverse qu’a suscité George W. Bush lors de ses années à la présidence, l’homme a semblé charmer le public montréalais qui a accueilli ses propos d’applaudissements nourris. «Je ne suis pas du nombre de ses partisans, mais j’ai bien apprécié sa personnalité charmante et son humour!», a exprimé Jacob Kanter, l’un des quelques chanceux ayant obtenus un billet grâce au département de sciences politiques de McGill. «J’étais intéressé à entendre ce qu’il avait à dire pour sa défense, mais ça n’a pas changé l’opinion que j’ai de lui», a poursuivi M. Kanter. Nathalie Wilson,

elle aussi étudiante au baccalauréat en sciences politiques à McGill, a renchéri: «C’était intéressant de l’entendre directement, sans l’intermédiaire des médias. Il ne semble pas être cet homme stupide que les médias présentent». Opinion corroborée par son interlocuteur, M. Parisella, qui dit avoir rencontré «un homme de passion et de convictions». Bien qu’il ait apprécié la personnalité chaleureuse et le côté humoristique de M. Bush, M. Parisella est néanmoins resté sur sa faim en ce qui a trait aux questions de fond: «ses arguments pour défendre son bilan étaient restreints, […] il a bâti son raisonnement sur les informations qu’il avait à l’époque, mais certaines ne s’avèrent plus exactes». Bref, si le «show de personnalité» de l’ex-leader a su charmer le public, il n’a sûrement pas convaincu ses détracteurs par son discours qui manquait de profondeur. «Il a donné un spectacle, un bon spectacle!», a conclu M. Parisella. x

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ACTION CITOYENNE

Cri du peuple contre le réchauffement climatique à Montréal Photos: Guillaume Doré Texte: Julie Leroux Le Délit

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e 24 octobre dernier, à six semaines du Sommet de Copenhague, une foule considérable de Montréalais de tous âges s’est rassemblée sous la pluie à la Place des festivals à l’occasion de «La grande cacophonie de Stephen Harper sur le climat». Cet événement, qui s’est tenu si-

multanément dans plusieurs villes québécoises, était organisé entre autres par Équiterre, Greenpeace, la Fondation David Suzuki et Québeckyoto. Aux discours revendicateurs de trois organisateurs a succédé une cacophonie générale durant exactement 350 secondes. Le but de cette cacophonie était d’«illustrer le piètre travail mené par le gouvernement Harper depuis plusieurs années dans le dossier des changements climatiques», selon le site d’Équiterre.

Armés de tambours, de cuillers, de casseroles, de flûtes et de xylophones, les manifestants étaient unis non seulement par la colère, mais aussi par l’espoir de faire baisser la quantité actuelle de CO2 –évaluée à 390ppm– présente dans l’atmosphère à 350ppm, soit la limite sécuritaire pour notre planète et ses habitants. Des actions dans le même esprit ont eu lieu partout dans le monde la même journée. Pour plus d’information : www.350.org. x

CAPSULE JURIDIQUE

Vos droits 101 L’équipe de la CIJM

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ous arrivez à la caisse avec dans vos mains une belle télé à écran plat flambant neuve et une console PlayStation 3 tout aussi rutilante. Une fois les objets enregistrés par la caissière, le montant exigé vous fait douter… Que ce passera-t-il si jamais vos nouveaux jouets nuisent à vos études, ou pire encore, s’ils sont défectueux? Tout à coup, sentant votre incertitude, le commerçant, qui fait preuve d’un humanisme digne du prix Nobel de la paix, tente de vous réconforter en vous offrant d’acheter un plan de garantie prolongée. Avant de dépenser davantage, rappelez-vous que la loi exige que

le fabricant et le détaillant vous fournissent une garantie de base (dite garantie «légale») et que celle-ci est effective nonobstant la nouveauté du produit ou l’existence d’une garantie écrite. D’une part, selon la Loi sur la protection du consommateur (LPC), un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à l’usage auquel il est normalement destiné et ce, pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisations (art. 3738 LPC). D’autre part, le bien ou le service doit être conforme non seulement à la description qui en est faite dans le contrat, mais aussi à la déclaration et/ou au message publicitaire fait à son sujet par le

xle délit · le mardi 27 octobre 2009 · delitfrancais.com

commerçant ou le fabricant (art. 40-41 LPC). Finalement, sachez que le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d’exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur un vice caché du bien qui a fait l’objet du contrat, sauf si le consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire (art. 53 LPC). C’est bien beau tout cela, vous dites-vous tout bas, mais comment pourrai-je faire appliquer cette fameuse garantie de base si je n’ai pas de contrat écrit? Revenons-en à votre nouveau Playstation 3, pour lequel vous n’avez pas souscrit la garantie prolongée. Un bon matin, le tout nouveau Rockband déballé,

vous vous installez et allumez la machine et à votre grand désarroi, elle ne fonctionne plus. Dans l’éventualité où la compagnie refuserait de vous indemniser selon le plan de la garantie, votre recours commencerait par une mise en demeure. Cette lettre, envoyée par courrier recommandé, a pour objectif de dénoncer au fabricant ou au détaillant la nature du problème. Écrite d’un ton neutre, elle indiquerait votre intention de poursuivre un recours juridique si la compagnie ne répondait pas à votre demande à l’intérieur d’un délai raisonnable que vous aurez vous-même déterminé. Après la date d’échéance, vous auriez le droit d’intenter une action à la Cour des petites créances, à la condition que le montant de vo-

tre réclamation ne dépasse pas 7000$. Si vous avez plus de questions, n’hésitez pas à visiter le site de l’office de la protection du consommateur au www.opc.gouv.qc.ca ou passez nous voir à la Clinique d’information juridique de McGill au rez-de-chaussée du centre universitaire (Shatner Building). Vous pouvez aussi nous rejoindre au 514-398-6792. Pour de plus amples informations au sujet de la mise en demeure, vous pouvez vous référer au www.justice.gouv. qc.ca/FRANCAIS/sujets/glossaire/ mise.htm. En ce qui concerne la Cour des petites créances, vous retrouverez des informations pertinentes au www.educaloi.qc.ca/ cotecour/cour_quebec/division_ petites_creances/x

Nouvelles

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Controverses redaction@delitfrancais.com

Citation de En trois la semaine vitesses

Marie McCulloch / Le Délit

ÉDITORIAL

De l’apathie, des intérêts et des portefeuilles Stéphanie Dufresne et Éléna Choquette Rédactrice en chef et co-chef de section Société

«L

’assemblée générale de l’AÉUM: écourtée, reconduite» aurait pu être le titre de cet éditorial –pourtant, c’est celui d’un article publié par votre fidèle Délit le 16 octobre... 2007! Les difficultés à mobiliser les étudiants en nombre suffisant, et ce, pour toute la durée des Assemblées ne datent donc pas d’hier à l’AÉUM. Rappelons, pour la petite histoire, que les assemblées générales (AG) semestrielles ont été introduites dans la constitution de l’AÉUM en 2006, à la suite du grand succès de l’AG spéciale de grève tenue en 2005 dans la foulée de l’effervescente campagne pan-québécoise contre les coupures de 103$ millions dans le programme de prêts et bourses. Il faut dire que la mobilisation étudiante atteignait alors des sommets quasi-historiques, et McGill a «surfé» sur la vague. C’est dans ce contexte qu’un groupe d’étudiants a proposé, au printemps 2006, un amendement constitutionnel qui a rendu obligatoire la tenue d’une AG semestrielle. Les objectifs affirmés du comité à l’origine de la motion étaient de rendre l’AÉUM plus démocratique, plus accessible, moins bureaucratique. Il s’agissait également d’instaurer un mécanisme d’imputabilité pour les représentants étudiants qui prennent des décisions en nos noms. Ce tout nouveau pouvoir –et cette nouvelle responsabilité– mise dans les mains des étudiants n’a toutefois pas eu le succès escompté; la participation des membres est hautement inconstante depuis. Et c’est sans parler des divers groupes opposés à la démocratie directe qui ont, par le passé, œuvré activement à délégitimer les assemblées générales en introduisant des motions scandaleusement impertinentes. Pourquoi cette apathie apparemment inflexible de la population estudiantine mcgilloise pour la démocratie directe? Comment expliquer que des étudiants n’étreignent pas de tout corps ce pouvoir qui est placé entre leurs mains, et agissent ainsi dans leur désintérêt? Il est vrai que la culture des assemblées délibératives soit bien ancrée au Québec, mais pour ainsi dire étrangère aux associations étudiantes du Canada anglais d’où provient une grande part des mcgillois. Aucun doute non plus que nos élus ont leur part de responsabilité; ils auraient pu et dû promouvoir davantage l’événement. Il y a certes eu des groupes Facebook, des annonces dans le Tribune et le McGill Daily (quoique pas dans Le Délit, allez leur demander pourquoi), des manipulations et remanipulations de l’ordre des motions à voter dans le but d’appâter le plus d’étudiants. Malgré tout, «ça a échoué», et la vice-présidente aux affaires internes, Alex Brown, était la première à en convenir tout de suite après avoir perdu le quorum. Même si l’AÉUM avait recouvert les murs d’affiches et multiplié les courriels, il nous apparaît peu probable que le résultat eut été différent. Bien que la plupart des motions soumises à la délibération étudiante soient louables (à la notable exception de celle visant à installer des postes de travail dans les toilettes!), ce ne sont pas des enjeux d’envergure suffisante pour faire déplacer plusieurs centaines d’étudiants tous aussi débordés les uns que les autres. La démocratie participative est un processus noble et nécessaire, mais peu d’entre nous ont le temps de passer plusieurs heures à discuter de questions dont l’impact sera contingent. Si l’AÉUM souhaite réellement être la «voix officielle» des étudiants du premier cycle et, en corollaire, galvaniser la participation de ses membres, il n’y a pas trente-six solutions: il faut donner un pouvoir réel à cette instance et toucher les étudiants là où ça compte, c’est-àdire dans le portefeuille. Portefeuille réservé, à l’heure actuelle, exclusivement aux membres présents aux conseils législatifs essentiellement «parce que les personnes qui s’y trouvent maîtrisent les dossiers» dit Rebecca Dooley, VP affaires universitaires. Maîtrise des dossiers ou pas, c’est au conseil exécutif de vulgariser les dossiers cruciaux, aux retombées significatives, pour que nous en débattions avec eux. Concrètement, l’AG devrait être l’instance où les grandes orientations et les grands mandats de l’AÉUM sont décidés, incluant les grandes lignes budgétaires. Le président Neilson croit qu’au final, c’est peut-être seulement parce qu’«ils n’y voient pas l’intérêt» que les étudiants désertent l’AG. Il ne reste qu’à le leur donner, l’intérêt. x

6 Controverses

«Certaines personnes chantent dans la douche durant une demi-heure. Non, les enfants, trois minutes, c’est plus qu’assez. J’ai compté, trois minutes, et je ne pue pas.» - Hugo Chavez, président

du Venezuela, en s’adressant à ses collègues durant une rencontre du cabinet diffusée à la télévision. Chavez implore ses citoyens d’économiser l’eau et l’électricité, puisque le pays ne se développe pas assez rapidement pour répondre à la demande en énergie de tous les Vénézuéliens. Le leader vénézuélien a enjoint ses compatriotes d’adopter une attitude «plus communiste»: «Nous ne sommes pas au temps du jacuzzi.» Reuters.

Insolite La sangsue qui «stoule» Si les sangsues ont la réputation de nous coller à la peau, elles auront dorénavant également la réputation de faire coller nos crimes à notre peau. Une dame âgée qui s’est faite voler la somme de 550$ à son domicile en 2001 a pu connaître l’identité du voleur grâce à une sangsue –ou devons nous l’appeler «le témoin»– qui avait ingéré du sang du coupable au moment du crime. En effectuant des tests d’ADN sur le sang que contenait la créature, la police a identifié Peter Alec Cannon, 54 ans, qui a ensuite confessé son crime aux autorités. On parle d’une première en investigation médico-légale. AFP. Ça coûte cher le poil! Si nombreuses sont les femmes qui hurlent de désespoir en trouvant des poils d’origine masculine dans le fond de la baignoire ou de la douche, il y a toutefois des individus prêts à payer cher pour collectionner des poils… quand il s’agit des cheveux d’Elvis, bien entendu! Une mèche de cheveux ayant appartenu au King a été vendue aux enchères pour la somme de 18300$ suite au décès du collectionneur précédent, Gary Pepper, président du Tankers Fan Club. La mèche aurait été authentifiée par un expert en authentification de cheveux de célébrités, John Reznikoff, qui possède aussi des cheveux d’Elvis dans sa collection. Ok… sommes nous les seuls à trouver ça… anormal comme passion? Reuteurs Life!

en hausse NÉ POUR VOLER Un bébé garçon né à bord d’un vol d’AirAsia vient de gagner des vols gratuits à vie pour sa mère et lui-même. La mère, Liew Siaw Hsia, 31 ans, a commencé à avoir des contractions à bord de l’avion d’AirAsia mercredi dernier, lors d’un vol de l’île de Penang à Kuching, sur l’île de Bornéo. Le pilote avait amorcé une modification de la trajectoire pour permettre un atterrissage d’urgence, mais le bébé est né avant que l’avion ne touche le sol. Il reste à savoir ce qui sera inscrit sur le certificat de naissance du bambin! AFP.

au neutre SARDINES DANS L’ESPACE Passer dix-sept mois tassé comme une sardine dans une petite capsule spatiale avec cinq étrangers, ça vous dit? L’Agence spatiale européenne cherche quatre candidats, hommes et femmes, âgés entre 20 et 50 ans et mesurant moins de 185 cm (six pieds et un pouce) pour faire une simulation d’un vol vers Mars, un vol qui pourrait devenir réalité dans les prochaines décennies. Le but du projet: voir si des humains peuvent passer une très longue période de temps confinés dans un très petit espace, dans l’espace, avec d’autres gens. Une expérience similaire avait été faite à Moscou l’an dernier sur une période de 105 jours. Vous vous demandez combien de fous voudraient bien faire une telle expérience ? 5,600 personnes ont répondu à l’appel il y a deux ans. AFP.

en baisse LA LOI DU TAILLON Si l’on croyait que Gilles Taillon avait gagné de justesse la course au leadership de l’ADQ avec sa maigre majorité de deux votes, on vient de voir cette majorité diminuer de moitié. Il s’avère qu’un des deux votes déterminants avait été fait par téléphone au nom d’Omar Bongo; or, Bongo est un ancien dictateur gabonais et il est décédé le 8 juin 2009. Un mystère? Non! Tout simplement une bonne farce orchestrée par le journaliste Jean-René Dufort. Dufort avait d’abord essayé de se faire passer pour Simone de Beauvoir, pour Dora l’exploratrice, puis pour l’ancienne mairesse de Québec, Andrée Boucher, avant de réussir son coup avec Bongo. La Presse Canadienne

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CHRONIQUE

Volume 99 Numéro 7

le délit

Okinawa mon amour Fortune cookie

Guillaume Doré

Imaginez une île deux fois et demie plus grande que l’île de Montréal, dont la population s’élèverait aux trois quarts de celle de Montréal. Une île dont 18% du territoire serait occupé par des bases américaines qui abritent autant de soldats qu’il y a d’étudiants au premier cycle à McGill… Bienvenue à Okinawa au Japon. La présence de bases américaines à Okinawa a entraîné de nombreux problèmes, notamment la pollution auditive créée par les avions et les exercices militaires, et des accidents graves tels que l’écrasement d’un hélicoptère sur l’Université Internationale d’Okinawa en 2004. Les bases dérangent aussi énormément en raison des crimes violents perpétrés par des soldats en poste, notamment l’enlèvement et le viol d’une fillette de 12 ans commis par trois soldats américains en 1995. Enfin, d’autres reprochent aussi aux États-Unis d’avoir entreposé des armes nucléaires à

Okinawa avant que le territoire ne soit retourné au Japon en 1972 et soupçonnent que les Américains y aient fait transiter d’autres armes nucléaires après cette date, violant ainsi les principes antinucléaires japonais adoptés en 1971 et menaçant la population civile en cas d’accident. Si la population d’Okinawa et le nouveau parti au pouvoir au Japon souhaitent voir les bases militaires américaines disparaître, il semble qu’elles sont là pour encore longtemps. En 2006, le Japon et les États-Unis ont signé un accord prévoyant le déplacement de la base aérienne de Futenma, située au centre de la ville de Ginowan, l’objectif étant d’éloigner la base d’une zone urbaine. Le plan: déplacer la base aérienne sur le site du camp Schwab, à Nago… toujours à Okinawa. L’entente prévoit aussi la délocalisation de 8 000 soldats à Guam, en territoire américain, un transfert qui serait compromis selon Robert Gates, secrétaire de la défense américaine, si le Japon n’accepte pas la construction de la nouvelle base. L’entente signée en 2006 a été convenue entre Jun’ichirô Koizumi et son homologue George W. Bush. Les dirigeants au pouvoir en ce moment, Yukio Hatoyama et Barack Obama, pourraient infirmer cette décision; cependant, si Hatoyama et les habitants d’Okinawa préfèrent voir les troupes américaines quitter le Japon, d’autres sont d’avis contraire. Le gouverneur d’Okinawa, par exemple, a proposé de déplacer le site de la base à 50 m plus au large –pour protéger la population de la pollution sonore—plutôt que d’exprimer le souhait de voir les troupes se retirer.

Le seul journal francophone de l’Université McGill

Le déplacement du site militaire vers les côtes cause toutefois de nouveaux problèmes. En effet, les nouvelles infrastructures, qui comprennent une piste en V et possiblement un port de 214 mètres, seraient construites sur un terrain réclamé à la mer. Les citoyens de Nago ont donc peur que ces travaux ne détruisent l’écosystème local, puisque les eaux accueillent des récifs de corail, des dugongs, une espèce de mammifère marin menacée, et des tortues de mer. Si Gates déclare que le plan actuel est «la meilleure solution pour tout le monde», il est possible d’en douter. En fait, estil vraiment nécessaire que les États-Unis possèdent autant d’effectifs militaires dans le Pacifique? La réponse est assurément «oui» si vous approuvez l’attitude militariste des États-Unis; autrement, personne n’y gagne. Paradoxalement, la présence de bases militaires à Okinawa représente une source importante de revenus pour la région la plus pauvre du Japon… Cette semaine, deux fortune cookies pour Robert Gates: «Les guerres ont toutes sortes de prétextes, mais n’ont jamais qu’une cause: l’armée. Ôtez l’armée, vous ôtez la guerre.» - Victor Hugo «Donner la liberté au monde par la force est une étrange entreprise pleine de chances mauvaises. En la donnant, on la retire.» - Jean Jaurès x Vous voulez constituez une armée pour en détruire une autre? Laissez à notre chroniqueur un commentaire sous son article de notre site web flabant neuf!

CHRONIQUE

Un SnowAP amusant... en 2011? Le loup-garou du campus

Vincent Bezault

Vous aimez boire de la bière bon marché et trouer la couche d’ozone en musique? Alors vous serez probablement déçus d’apprendre que SnowAP 2010 a été annulé pour des raisons budgétaires. Rappelons le principe pour ceux qui ne connaissent pas cet évènement étudiant: il s’agit de planter une grande tente blanche sur le lower field en janvier et de la chauffer pendant dix jours pour y faire la fête à grand renfort de bière et de bands étudiants. Depuis 2007, tous les SnowAP ont été très déficitaires: la dette est passée de $2 500 en 2007 à $8 000 en 2008 et $15 000 en 2009! Les organisateurs, ne pensant pas pouvoir améliorer la situation cette année, ont préféré annuler la fête plutôt que de s’attaquer aux causes du problème.

Parmi les raisons du gouffre financier de SnowAP figurent les coûts de la tente et de la sécurité. Depuis 2007, la sécurité de McGill a remplacé celle de l’Association des Étudiants de l’Université McGill (AÉUM) et, entre 2007 et 2008, le coût de location de la tente a doublé. Tout cela se sent sur la facture. Mais pourquoi cette augmentation en 2009? Lorsque le McGill Tribune avait interrogé les responsables à la veille de SnowAP 2009, ils affirmaient pourtant attendre un déficit inférieur à $7 000! À la vue d’une estimation aussi erronée, il est naturel de suspecter une mauvaise gestion budgétaire. Cependant, la cause des pertes exceptionnelles de 2009 n’est pas à chercher du côté des coûts d’organisation. Il se trouve simplement que SnowAP n’intéresse pas grand monde. Depuis quatre ans, le nombre de visiteurs est en chute libre. Malgré tout, l’AÉUM a longtemps gardé l’espoir de pouvoir attirer plus d’étudiants en 2010. Cet espoir reposait sur la bière. En effet, le contrat d’approvisionnement de l’AÉUM touchant à sa fin, les négociations étaient ouvertes pour un nouveau contrat de trois ans. Le contrat, signé en août 2009, abolit la domination sans partage de la Boréale. Les évènements de l’AÉUM peuvent désormais aussi servir des produits de McAuslan, telles que la Belle Gueule et la Moosehead. C’est une réussite, puisqu’à l’Open Air Pub (OAP) de septembre 2009, 85% des bières vendues étaient des Moosehead. Mais il y a un «mais». Boréale, qui a fait une offre bien moins chère que ses concurrents,

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a demandé à être la marque la plus présente sur le campus. Ainsi, à l’exception de l’OAP, aucun événement tenu en dehors du Shatner ne pourra servir de produits McAuslan. SnowAP 2010 aurait donc du se contenter de Boréale, une fois de plus. Mais le désintérêt des McGillois pour SnowAP n’est peut-être pas qu’une affaire de boisson. Suffit-il vraiment de planter une tente pleine de bière pour faire un événement étudiant réussi? Lorsque l’euphorie de septembre n’opère plus, je crois qu’il en faut plus pour faire sortir les étudiants de leurs tanières. J’espère que l’annulation de cette année permettra une remise en question de SnowAP et que des idées originales permettront d’en faire un événement plus intéressant en 2011. Alors, chers lecteurs, n’hésitez pas à faire part de vos suggestions à l’AÉUM! Dernier détail pour ceux qui se demandaient le rapport avec la couche d’ozone: SnowAP émet une tonne de CO2 par jour pour se chauffer.x Vous aimez la bière bon marché, le fait de trouer la couche d’ozone, les grandes tentes blanches sur le lower field, les déficits, la sécurité qui coûte cher, les bands étudiants, les organisateurs, la fête, le McGill Tribune, l’AÉUM, la Boréale, l’Open Air Pub, et les événements étudiants annulés? Laissez un commentaire à notre loup-garou amateur de Moosehead en trouvant sa chronique sur notre nouveau site web!

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Controverses

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Société societe@delitfrancais.com

Il y a quelques semaines, Le Délit vous ouvrait la porte de trois restaurants à vocation particulière. Cette semaine, nous vous proposons de découvrir l’esprit qui anime quatre bars montréalais. Après avoir bien mangé, il est toujours agréable de digérer avec un bon verre! Second dossier d’une série de trois.

Whisky Café 5800, boul. Saint-Laurent (coin Bernard) Fêtant ses vingt ans cette année, le Whisky Café a été un des premiers lounges à Montréal et demeure un lieu de rencontre encore tout à fait à la mode. Il est bien fréquenté des amateurs de spiritueux, de leur femme, de leurs amis, des amis de leurs amis et des voisins d’en face qui, eux, ne sont pas nécessairement des fins connaisseurs en la matière. Il suffit d’un peu de curiosité et de bien vouloir prendre le temps pour raffiner ses goûts pour l’alcool, un verre à la fois. Alexandre Wolosiansky, propriétaire du Whisky Café, explique que l’esprit qu’il souhaitait créer dans son bar vient de sa préférence pour les verres pris dans les restaurants plutôt que dans les bars. Une ambiance plus posée, inspirée des brasseries européennes, d’où le nom de «café», plutôt que «bar», pour neutraliser le «whisky». Offrant plus de 450 produits, avec un large éventail de whiskies, le Whisky Café n’a rien du pub d’à côté: le lieu est propice à la dégustation, littéralement. Il offre trois verres de 1/2 once chacun, avec des fiches explicatives, afin que vos papilles puissent lentement reconnaître tous les arômes. Autrement, le prix d’un verre seul peut varier entre 8 et 20$. On en ressort fraîchement cultivé et on comprend, enfin, que le Davidoff Grand Cru #3 n’a rien à voir avec le parfum du même nom. Un des seuls cigar houses à Montréal, souligne Wolosiansky, le Whisky Café vous permet également d’apprécier (ou de découvrir, à défaut d’apprécier) cette fumée si différente de celle de la cigarette. Le cigare se caractérise par les mêmes termes que le café: léger, médium, corsé; cubain, mexicain, dominicain, jamaïcain; il y en a pour tous les goûts. Mais ne pensez pas économiser en chipant le cigare du placard de votre père pour le fumer au café: des frais de 10$ vous seront réclamés pour la coupe. Mieux vaut s’en tenir à la vaste sélection du lounge. Nez

Le Réservoir

Brasserie artisanale & Bistro 9, Duluth Est (coin Boul. Saint-Laurent) L’éclosion d’une multitude de microbrasseries dans la métropole au cours des dernières années est un phénomène remarquable. Ces établissements se distinguent les uns des autres grâce à la diversité et à la qualité de la bière qu’ils produisent, et le concept même de microbrasserie les rend beaucoup plus attrayants et chaleureux qu’un simple bar. En effet, le client se sent un peu comme un invité distingué: le personnel se doit d’être qualifié et de connaître dans les détails toutes les subtiles saveurs de leurs bières afin d’être en mesure de recommander la variété idéale pour chaque consommateur. Depuis quelques années déjà, Le Réservoir, qui a pignon sur la rue Duluth près de la rue Saint-Laurent, connaît un franc succès.

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sensibles, n’ayez crainte: le salon, adjacent à la salle principale, est pourvu d’un système de ventilation efficace. L’âme de ce bar est unique et se reflète dans le décor, la musique et les visiteurs. Une musique jazz, lounge ou contemporaine donne d’emblée le ton. Les mêmes murs et fauteuils de cuir meublent le café depuis 1989, lui conférant cette chaleur classique associée aux années 1920-1930, lorsque les hommes quittaient la table et leur femme pour s’isoler entre eux afin de siroter leur verre et de fumer leur cigare. Mais depuis, cette expérience s’est ouverte à tous, et le Whisky Café en est la preuve. Wolosiansky raconte qu’une fois, il a fait asseoir un jeune homme d’une trentaine d’années accompagné d’une jeune femme. Quelques minutes plus tard, le propriétaire a remarqué que ce couple discutait avec des hommes dans la cinquantaine assis à la table d’à côté. Le jeune homme a alors demandé à Wolosiansky de leur assigner une autre table… l’un des trois hommes étant son père! Wolosiansky affirme qu’il a su à ce moment-là que son bar avait atteint son objectif. Ceux d’entre nous qui n’ont jamais trempé la langue dans un scotch ou qui se demandent encore comment distinguer un whisky d’un gin seront enchantés de pouvoir se libérer de leur ignorance et d’épater la galerie au souper de famille à Noël. Ou encore de déguster autre chose que du Jack Daniel’s! Expérimenter le Whisky Café, c’est donc s’instruire d’une façon singulière. Par Amélie Lemieux; propos recueillis par Mai Anh Tran-Ho

Les raisons qui expliquent sa popularité? «Nous produisons nous-mêmes notre bière et nous offrons aussi une cuisine bistro élaborée», rapporte Julie Talbot, gérante du Réservoir. Il ne s’agit pas uniquement d’une brasserie: on y propose un excellent menu pour les lunchs du midi, les brunchs du samedi et du dimanche, et des snacks qui sont servis jusqu’à 23h. On y retrouve beaucoup de poissons et fruits de mer tels que des calmars, de la morue, de la pieuvre et de la raie, mais aussi du boudin, du bœuf et du poulet. Chacun y trouvera son compte, et les prix –très raisonnables– varient entre 10 et 15$ pour un plat principal. La particularité de ces plats réside dans le fait que leurs ingrédients sont des produits du Québec. «Nous avons quelques ententes avec des producteurs biologiques de la région de Montréal», précise Mme Talbot. La sensibilisation à l’environnement est-elle donc intrinsèque au Réservoir? «Avoir une philosophie verte est essentiel de nos jours, et nous voulons seulement être responsables. D’ailleurs, nous sommes l’un des seuls établissements à Montréal à avoir un dispositif à compost dans la cuisine.» Le Réservoir produit donc une dizaine de bières différentes: mais lesquelles sont des incontournables? «La India Pale Ale, la Noire et la Blanche sont parmi nos plus populaires.» De plus, puisqu’elles sont préparées sur place, l’absence d’intermédiaires permet de réduire les coûts: une pinte de bière ne vous en coûtera que 5,50$. Ceux qui ne sont pas férus de bière sont tout de même les bienvenus, puisque des cocktails classiques tels que le «gin tonic» et le «vodka canneberge» sont également offerts, et qu’on y propose aussi une variété impressionnante de vins d’importation privée. Le jour, l’ambiance du Réservoir est plutôt décontractée, favorable aux conversations et à l’atmosphère bistro. Toutefois, lorsque la nuit tombe, l’établissement revêt une personnalité beaucoup plus animée. La brasserie artisanale devient le repère parfait pour les gens de 20 à 35 ans qui veulent y prendre un verre, et même pour des personnalités du cinéma et de la télévision québécoise. «Les deux étages se remplissent assez rapidement et il n’est pas rare de voir des lines-up!», poursuit Julie Talbot. Cependant, que ce soit le jour ou bien le soir, Le Réservoir est un endroit authentique qui sait satisfaire sa clientèle. Par Xavier Plamondon

L T O U R N É E


La D E S B A R S

Baldwin Barmacie

Le Baldwin Barmacie, ce n’est pas que le rêve réalisé d’Alexandre Baldwin d’ouvrir son propre bar pour ses trente ans. C’est aussi un hommage à ses souvenirs et au Mile-End. Son histoire n’est plus secrète. Il grandit dans ce quartier où abondent les manufactures, dans «le monde pharmaceutique et d’entreprise». Il dit être «allé à la bonne école pour apprendre le métier»: il développe un souci pour la qualité au Whisky Café et acquiert une solide expérience dans la gestion de bar et de foule au Gogo Lounge. Baldwin trouvait prétentieux d’ouvrir un bar à son nom et a alors décidé de s’inspirer de sa grandmère, Mariette Baldwin, car «c’est un peu grâce à elle que je suis là où je suis maintenant», affirme-t-il. Il la retrouvait souvent à la pharmacie où elle travaillait, se rappelle Alexandre Baldwin, lorsqu’il plaçait les produits sur les étagères de sorte que «ça ait l’air plus vendeur». Ce sens de l’esthétique, il l’a donc toujours eu. «On se force toujours un peu plus quand il y a de la visite», dit-il. Se retrouver au Baldwin Barmacie, ce n’est pas qu’aller voir son médecin de famille, c’est aussi se retrouver dans le salon chez des copains. Le décor, «conçu maison», comme le souligne son propriétaire, réunit harmonieusement le propre épuré –comme dans une clinique– à la chaleur et au confort de la maison. Le Baldwin Barmacie découle de ses souvenirs de la pharmacie comme un lieu de rencontre, où sa grand-mère insufflait «l’ambiance», dit-il. Cette femme travaillante et appliquée, dont le mari est mort à la guerre en 1943 et qui a élevé toute seule ses deux enfants, avait toujours le sourire pour accueillir les clients. De son portrait accroché au mur, face au bar, grand-maman Baldwin veille au bon déroulement de la soirée. Ce tableau, qui peut surprendre lors de votre première visite, est l’élément qui donne à chaque détail son sens. Elle aimait les fleurs, d’où la décoration florale du Barmacie: des lampes «quenouilles» au bar, un lustre rappelant l’intérieur d’une fleur, des «tulipes» à la banquette, et un éclairage tamisé

115, Laurier Ouest (coin Saint-Urbain) jaune-orange. Le blanc pharmaceutique du comptoir se fond avec le blanc du mur de briques, et les tabourets au bar –semblables à des sièges de dentiste– contrastent avec les fauteuils taillés dans des barils de whisky et la banquette au toucher sixties. Le passé est revisité même dans le menu. Aux côtés des martinis, des pétillants, de la bière et du vin, il y a «sous ordonnance» le Mile-End d’autrefois et d’aujourd’hui, pour la somme de 8$: «Miss Baldwin» c’est grandmaman Baldwin; «Dr Ho», la médecin généraliste au-dessus de la pharmacie; «Lionel», un autre pharmacien; et «Mr Mo», le chien d’Alexandre Baldwin. Au Baldwin Barmacie, vous pouvez concocter votre propre boisson dans des flacons de six ou huit onces, comme ceux d’antan. Ces plus petits formats, c’est aussi pour ceux qui sortent le lundi ou le mardi soir et qui ne veulent pas dépenser une fortune pour de la qualité, et parce que «finir la bouteille n’est pas une obligation», rappelle Alexandre. Un grilledcheese, avec ou sans jambon, et du macaroni au fromage sont aussi offerts. Vraiment, c’est comme à la maison. Mentionnons aussi les toilettes écologiques qui recyclent l’eau des lavabos, et le fumoir, un préau séparé de la salle principale. La musique au Baldwin? Une «assiette de viande», explique Baldwin. «Le poisson serait du indie-rock, les petits pois du électro rock», le tout rehaussé «de vieux rock, d’électro, de hip-hop». «C’est fini le temps d’aimer une seule affaire», affirme Baldwin, c’est l’époque «des gougounes, jeans, chemises». Ceci, on le voit tout à fait chez ceux qui fréquentent le bar: que l’on soit décontracté ou en veston-cravate après le travail, on est entre de bonnes mains au Balwin Barmacie. Un remède aux maux de la vie quotidienne. Par Mai Anh Tran-Ho

Buvette chez Simone

Campée sur l’avenue du Parc depuis juin 2008, légèrement au sud de SaintJoseph, la Buvette Chez Simone se veut un bar à vin sympathique dans l’esprit du Mile-End. Ce qu’on y fait? Initier nos papilles aux différents cépages dans l’espoir de découvrir notre vin fétiche. Et, surtout, on apprécie la vie. Avant tout, il faut choisir sa bûche: que ce soit au comptoir, sur la banquette ou aux billots de bois vernis, l’ambiance est «amicale et sans prétention» selon un habitué. On s’installe autour de la cuvée de notre choix, la carte des vins griffonnée sur deux grands tableaux qui encadrent le lieu. La Buvette innove avec sa formule «Encercle, commande et régale-toi». C’est simple, un plateau d’assortiments de votre choix vous est servi, il ne reste qu’à le partager entre amis. En bons démocrates, on tente bien sûr d’«encercler», mais l’abondance des choix complique la chose, alors on hésite et on parle. Le serveur revient, l’ambiance a vu retarder notre quête: on parle encore parce qu’on s’y plaît. Une fois la commande déposée sur la table, on festoie jusqu’aux belles heures du matin. Voilà comment se passe une soirée Chez Simone.

Crédit photos: Frédéric Faddoul

4869, avenue du Parc (coin Saint-Joseph) Ce bar-refuge se distingue non seulement par son concept à la carte, mais aussi par son «rapport qualité-prix sans pareil», comme le mentionne Éric Bélanger, co-propriétaire de la Buvette chez Simone. «Et nous proposons un concept original: un bar à vin où il est possible de grignoter dignement.» Dignement, c’est-à-dire sans s’empiffrer: la modération a bien meilleur goût. Les étudiants au modeste appétit se réjouiront d’une demi-portion de salade grecque accompagnée de quelques cubes de Stilton ou de quelques tranches de rosette de Lyon. Pour ceux dont l’estomac gargouillerait davantage, un menu souper est à leur disposition. Merlot, Sauvignon ou Syrah, il y en a pour toutes les papilles, et chaque visite peut devenir l’objet d’une dégustation. En plus de sa gamme de cépages recherchés -le verre autour de 7$, la bouteille, plus coûteux, entre 40$ et 60$-, la Buvette chez Simone tient un bon lot de pompes à bière variées. La polyvalence de l’endroit transformera votre conception du 5 à 7 traditionnel. Tous se retrouvent, journée de travail terminée, dans un décor signé Zébulon Perron (American Apparel, Plan B). Au plafond, les lampes alimentées par des fils électriques oranges capteront sans nul doute votre attention, mais ce n’est qu’un des éléments de cette esthétique post-industrielle amalgamée à un ameublement tout de bois vieilli. Ceci ne s’étend toutefois pas jusqu’aux toilettes, minuscules il faut le dire. Chez Simone, l’ordre ne prime pas sur la convivialité. Des tables à droite, dans le fond, sur la petite mezzanine: le lieu se prête au «tire ta chaise et assis-toi». La musique va de pair avec les buveurs, le tempo variant du indie au populaire et à l’électro, et ce n’est pas surprenant de voir des gens se lever, danser et chanter le temps d’une chanson, comme dans une taverne. La Buvette chez Simone, pour des fins de journées non planifiées et bien arrosées. Par Amélie Lemieux

Société

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Arts&Culture artsculture@delitfrancais.com

ARTS VISUELS

La Dame de Shalott Le Musée des beaux-arts de Montréal présente la plus vaste rétrospective faite à ce jour sur le peintre William Waterhouse.

Une sirène (1900) Royal Academy of Arts

Véronique Martel Le Délit

A

u moment où l’impressionnisme est à son plus fort, un peintre refuse de suivre les Dugas, Renoir, Monet et Sisley: c’est John William Waterhouse, surnommé Nino. Il acquiert une certaine renommée, mais reste néanmoins peu populaire puisque son œuvre est en marge des courants de son époque, tels l’impressionnisme, le réalisme et le naturalisme. Bien qu’il admire les raphaélites –qui refusent l’académisme et voient en Raphaël la figure de l’artiste suprême–, il n’appartient pas à leur génération. Ces derniers préconisent le traitement réaliste des thèmes de la mort et de l’amour, tandis que Waterhouse, lui, ajuste ce réalisme à un monde provenant de la rencontre de plusieurs textes, folklores et mythologies. Le peintre utilise les techniques du naturalisme français pour traduire son imaginaire résolument romantique. Le Musée des beaux-arts de Montréal rend compte de cet univers unique et mystérieux à travers une rétrospective de l’artiste britannique. L’exposition s’ouvre sur dix tableaux exhibant les principales influences de Waterhouse. Les œuvres de Millais et de Gardner, entre autres, ainsi que le Saint Georges et le dragon de Briton Rivière, donnent le ton de l’exposition en présentant un certain mysticisme dans la représentation de la nature et des mythes antiques. La toile de Rivière évoque un sens du drame et de la composition théâtrale qui marque profondément toute l’œuvre de Waterhouse. La rétrospective est divisée en neuf sections montrant chacune un aspect différent de l’œuvre du peintre. Les murs et les plafonds des salles sont peints d’un noir jais

10Arts & Culture

profond qui contraste intensément avec le doré des cadres et avec le jaune et l’or utilisés dans les peintures. De grandes colonnades de style gréco-romain s’élèvent autour des toiles, accentuant encore l’aspect théâtral des tableaux de l’artiste. Cette théâtralité s’exprime dans l’illustration de femmes puissantes et envoutantes, surprises dans leur plus grande solitude, assises indolemment dans un jardin fleuri ou devant un cours d’eau à l’orée d’un bois sombre. Les œuvres de jeunesse de Nino dévoilent l’intérêt de celui-ci envers les thèmes mythologiques, qu’ils soient grecs ou bibliques, puisqu’ils permettent l’exploration du caractère surhumain, presque surnaturel de la tragédie. Ces personnages, essentiellement féminins, sont issus de mythes, de récits folkloriques, et d’œuvres poétiques et dramatiques –comme Miranda, de The Tempest de Shakespeare. Les femmes sont magnfiées, peintes avec douceur, dans une langueur sensuelle. Cette attention portée aux héros littéraires est d’ailleurs soulignée tout au long de l’exposition par la présence des recueils de poésie, de romans, de pièces de théâtre et de livres de contes près des toiles auxquels ils se rapportent. La rétrospective J.W. Waterhouse: Le Jardin des Sortilèges est ingénieusement réalisée et favorise une approche nouvelle de l’artiste et de ses toiles, trop souvent négligés, voire dénigrés. Le Musée souligne intelligemment la place centrale des oeuvres littéraires dans les toiles de Waterhouse, et réussit à plonger le spectateur dans l’ambiance mystérieuse et unique propre à ses créations. x J. W. Waterhouse: Le jardin des sortilèges Du 2 octobre 2009 au 7 février 2010 Musée des beaux-arts de Montréal 7,50$ (étudiants)

Circé offrant la coupe à Ulysse (1891) Royal Academy of Arts

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ARTS VISUELS

À la croisée des arts

Avec Le peintre comme graveur, le Musée des beaux-arts fait découvrir son importante collection de gravures et d’estampes de peintres impressionnistes. Habib Hassoun Le Délit

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résentée jusqu’au 6 décembre au Musée des beaux-arts du Canada, l’exposition Le peintre comme graveur: Estampes impressionnistes du Musée regroupe quelque 70 gravures de peintres réalistes, impressionnistes et postimpressionnistes, en grande majorité d’origine française. Si l’exposition n’a pas bénéficié d’une grande couverture médiatique, voire d’aucune, c’est qu’elle traite d’un médium peu connu à notre époque: l’estampe. S’étendant sur deux salles du troisième étage du Musée, la collection comprend des gravures de Renoir, Pissaro, Degas, Van Gogh, Manet, Monet, Signac, Cassatt, Millet, Corot, Cézanne et quelques autres artistes moins influents. Ce qui frappe à la première observation, c’est le caractère essayiste et référentiel des images sur papier: essayiste, parce que le matériel reste nouveau et expéri-

mental pour ces peintres; et référentiel, parce que les premières gravures faites par les peintres à cette époque étaient des représentations d’autres peintres. On a ainsi, à titre d’exemple, Renoir dessinant Rodin, Pissaro représentant Cézanne, et Degas traçant le portrait de Manet. On y retrouve aussi des portraits de Comte Lepic et d’Edmond de Goncourt, clins d’œil lancés à ces premiers défenseurs du groupe de graveurs. Aux côtés de ces nombreuses estampes présentant les principaux artistes et mécènes, l’estampe «artistique» prend une place importante. Cinq gravures de Manet, soit L’enfant et le chien, Le gamin, L’enfant portant un plateau, L’enfant aux billes de savon et Les chats, toutes conçues entre 1861 et 1868, apportent un nouvel éclairage sur le médium qui, autrement, paraîtrait strictement expérimental, scientifique et «commercial». On découvre ensuite Signac qui, quelques décennies plus tard, travaillera la gravure selon une toute autre finalité.

Dans Dimanche parisien (vers 1887), où une bourgeoise pose de façon anecdotique, un point de vue psychologique se dégage de la scène. L’intimité du personnage vient se coller au processus privé que nécessite le genre lui-même. C’est dans les estampes de Mary Cassatt que l’on distingue le mieux les influences japonaises sur la gravure française de cette époque. En parallèle à ces références, on trouve des gravures de tableaux connus de l’artiste, dont La toilette, La carte ou L’enfant au fauteuil, faites entre 1890 et 1903. On assiste aussi, dans Le peintre comme graveur, à la transformation de l’œuvre de Degas. Les lithographies illustrant les passe-temps urbains se transformeront avec les années et deviendront plus personnelles, jusqu’à toucher la sphère privée dans les deux magnifiques estampes La sortie du bain (vers 1880) et Les grands baigneurs (vers 1896). La deuxième salle regroupe presque entièrement des estampes de paysages de

THÉÂTRE

Voyage au bout de la maladie M

onté pour une première fois en 2008, l’opus commun d’Alexis Martin et Pierre Vadeboncoeur a connu un succès tel qu’il a justifié un retour sur les planches moins de deux ans après les premières représentations. Les deux auteurs, amis d’enfance, partagent une curiosité pour leurs domaines: l’urgentologue est fasciné par le théâtre et l’homme de théâtre, par la médecine. «Les auteurs certifient à 97% l’authenticité des situations médicales présentées», énonce le programme... et on ne s’en amuse que plus. Le texte du duo, efficacement mis en scène par Alexis Martin, suit l’intrigue amoureuse qui se développe entre l’infirmière Judith (Édith Paquet) et le Dr. Papineau (Stéphane Demers), qui travaillent ensemble la nuit, aux urgences d’un hôpital. Entre les réanimations et les crises d’hypochondrie, un patient hors du commun (Alexis Martin) arrive et changera le cours de la nuit –et de la vie– du Dr. Papineau. Parfois caustique, parfois émouvant et (presque) toujours juste, Sacré Cœur réussit à dépeindre sans lourdeur le milieu hospitalier. La scène est divisée en plusieurs sections par des rideaux d’hôpital, répondant à la multiplicité et à la proximité des trames narratives de la pièce. Les personnages, souvent caricaturaux, dévoilent progressivement des histoires et des psychologies complexes. On remercie notamment Muriel Dutil et Alexis Martin, qui réussissent à incarner plusieurs personnages avec humour sans tomber dans le grotesque. Pierre Lebeau est remarquable

dans le rôle du Dr. Zoubris, le psychiatre en vedette dans les capsules vidéos diffusées dans les salles d’attente de l’hôpital. Habile, la mise en scène connaît un seul raté, mais majeur: les deux jeunes enfants d’un patient sont représentés par les projections fixes de leurs visages sur deux pans de rideaux de l’hôpital. Leurs voix rappellent celles, aigrelettes au possible, des marionnettes de Passe-Partout, et choquent au point de détourner l’attention des spectateurs de leurs propos. Cette audace scénographique se démarque du reste de la pièce, qui allie simplicité et ingéniosité –les clip vidéos du Dr. Zoubris sont diffusés sur des télévisions disposées aux quatre coins de la salle. À l’image

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Le peintre comme graveur: Estampes impressionnistes du Musée des beaux-arts du Canada Où: Musée des Beaux-Arts 1380, rue Sherbrooke Ouest Quand: 10 septembre au 6 décembre Combien: Entrée libre

Théâtre de la grenouille

Le Nouveau Théâtre Expérimental présente Sacré Cœur, qui dissèque les entrailles d’un hôpital. Rosalie Dion-Picard Le Délit

Corot, de Pissaro et de Césanne. Quelques images sont intéressantes à explorer du point de vue de l’influence reconnaissable dans les peintures: Les Glaneuses et Les bêcheurs (vers 1855) de Millet, Le petit berger et Le Clocher (en 1855 et 1871) de Corot et L’exécution de Maximilien (1868) de Manet. De l’exposition ne reste rien que l’assouvissement d’une curiosité pour la technique méconnue de l’estampe et l’usage qu’en ont fait certains artistes célèbres. En outre, pour apprécier Le peintre comme graveur, il faut savoir apprécier l’art de l’estampe et reconnaître la beauté d’une œuvre inachevée ou fragmentaire. x

de la mise en scène, le jeu des acteurs s’avère sensible dans l’ensemble, mais parfois dérangeant. Le spectateur devra apprivoiser quelques inégalités dans le ton des jeux de Stéphane Demers et Édith Paquet. Malgré ces quelques détails, Sacré Coeur s’avère une oeuvre intelligente, habile, qui sait faire la satire de la nature humaine sans jamais rater sa cible. x

Venez participer aux auditions les 12 et 13 novembre!

Sacré Coeur Où: Espace Libre 1945, rue Fullum Quand: Jusqu’au 21 novembre Combien: 22$ (étudiants)

Pour plus d’information: Robert Etcheverry

theatredelagrenouille@hotmail.com

Arts & Culture

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ÉVÉNEMENT

LGBT: image + nation et questionnement identitaire

Pour sa 22e édition, le festival image + nation offre 11 jours de cinéma sous le signe de l’éclectisme.

Émilie Bombardier Le Délit

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u documentaire aux comédies musicales en passant par toute une sélection de films d’horreur, c’est une programmation fort diversifiée que présente, année après année, le festival montréalais de cinéma LGBT (pour Lesbian, Gay, Bisexual and Transgendered). Des œuvres de toutes les origines et de tous les genres imaginables sont ainsi rassemblées chaque automne afin de faire découvrir aux cinéphiles les multiples visages que peut prendre un questionnement sur l’identité sexuelle et sa place dans la société, de manière tantôt humoristique, tantôt dramatique. C’est donc pour le meilleur et parfois pour le pire que le festival image + nation contribue au rayonnement d’un cinéma indépendant, coloré et audacieux. Entre Hollywood je t’aime de Jason Bushman, qui était présenté le 22 octobre dernier pour donner le coup d’envoi au festival, et Drool, une comédie noire dans laquelle on retrouve Laura Harring (Rita dans Mulholland Drive) qui viendra clore celui-ci le 31 octobre prochain, les onze jours de programmation d’image + nation s’articulent autour de plusieurs volets bien diversifiés. D’abord, fidèle à la frénésie entourant l’Halloween, HomoHorreur rassemble des courts et des longs-métrages d’horreur de tous genres, parmi lesquels

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Zombies of Mass Destruction, film américain de Kevin Hamedani, et Weak Species de Dan Faltz. Cette 22e édition donne aussi naissance à un nouveau volet qui réunit sous le thème «Homoparentalité: Kids on film» une série d’œuvres cinématographiques et télévisuelles ayant pour sujet les familles LGBT, dont The Girl Bunnies. Hockey de la Canadienne Françoise Doherty, et Fruit Fly, une comédie musicale interminable et ratée qui n’est heureusement pas représentative de la qualité de la programmation du festival. Dans un registre plus dramatique, la série «Vies Vécues» vise quant à elle à sensibiliser le public à la réalité parfois très ardue des communautés LGBT dans certaines régions du monde. C’est d’ailleurs dans ce cadre que sera présenté le documentaire Beyond Gay: The Politics of Pride de Bob Christie, qui dresse le portrait du combat difficile que mènent plusieurs pour la reconnaissance des droits des homosexuels. Malgré les diverses directions que peut prendre la promotion du cinéma LGBT, le festival image + nation se fait d’abord et avant tout un lieu de diffusion pour de nombreux cinéastes indépendants, permettant ainsi la découverte de nouveaux talents et la redécouverte d’autres plus établis, dont les œuvres percutantes passent toutefois trop souvent inaperçues. Ainsi, on nous révèle notamment le réalisateur Pascal-Alex Vincent à travers son court-métrage Bébé Requin, présenté en première au

Patrick, Age 1.5

Schank

Gracieuseté IMAGE+NATION

Gracieuseté IMAGE + NATION

Festival de Cannes 2005, et surtout à travers son long-métrage Donne-moi la main, œuvre d’une grande beauté qui raconte avec une finesse et une sensibilité admirables la relation entre deux frères jumeaux. À cette programmation cinématographique présentée au centre Impérial, au cinéma du Goethe-Institute et au Théâtre du pavillon J.-A. de Sève de l’UQÀM s’ajoutent une table ronde rassemblant plusieurs cinéastes sous le thème «Nouvelle vague des jeunes voix LGBT au Québec», ainsi qu’une exposition de la photographe montréalaise J.J. Levine, qui rassemble les séries Switch (2009), Alone Time (2007) et One night stand (2007), questionnant chacune à leur façon l’identité et les rôles sexuels. Aussi hétéroclites qu’insolites, les œuvres présentées dans le cadre de la 22e édition du festival Image +nation se présentent, indépendamment du thème commun qu’elles abordent, comme les récits parfois drôles et parfois dramatiques d’une quête d’identité complexe que des cinéastes de talent savent décrire avec poésie. C’est donc un rendez-vous à ne pas manquer pour tous les cinéphiles à la recherche d’inédit en ce mois d’octobre un peu morose. x Festival image + nation Jusqu’au 1er novembre www.image-nation.org

Le Délit a vu pour vous:

Schank /présenté le mercredi 28 octobre Schank, le premier film de Simon Pearce, cinéaste anglais de 21 ans, fait certainement partie de ces œuvres hors-normes dont le festival permet la diffusion. Percutant, cru et d’une violence des plus troublantes, il dresse le portrait du combat que mènera Cal (Wayne Virgo) pour accepter et affirmer son homosexualité,

qu’il a longtemps refoulée dans la drogue et dans l’agressivité inhérente au gang de rue auquel il appartient. Supportée par un jeu d’acteurs assez juste, mais par des dialogues quelquefois banaux, la réalisation de celui-ci assume avec brio son côté amateur pour donner à l’ensemble un aspect terriblement réaliste. (É. Bombardier)

Patrik, Age 1.5, un film de la réalisatrice suédoise Ella Lemhage, raconte l’histoire d’un couple homosexuel qui désire ardemment adopter un enfant. Une fois leur demande acceptée, Göran et Sven attendent impatiamment l’arrivée du petit Patrik, un an et demi, tout en luttant au quotidien avec les préjugés envers les homosexuels.

Demeurant otpimistes malgré ces difficultés, les deux hommes sont ébranlés lorsqu’ils réalisent que le Patrik qu’ils ont adopté est un jeune bum homophobe de 15 ans –et non de 1.5 an! Malgré ses clichés et son jeu un peu trop surfait, Patrik, Age 1.5 montre la dure réalité des homosexuels dans ce pays scandinave. (J. Côté)

Patrik, Age 1.5 /présenté le samedi 31 octobre

Fig Trees /présenté le mardi 27 octobre Le réalisateur canadien John Greyson propose une documentaire expérimental des plus éclatés. Les initiés au travail de l’auteur reconnaîtront son style sans égal mariant ici l’activisme –dans la lutte contre le sida– au surréalisme. Fig Trees rencontre des acteurs importants de la lutte antisida qui, au cour du film, se font enlever –par

Gertrude Stein!– et transporter à Niagara Falls. Sur fond d’opéra, ce documentaire de Greyson nous laisse un peu perplexe mais surprend surtout. Et que dire de l’écureuil en peluche aux yeux lumineux qui chante? Il nous hante encore! Ne serait-ce que pour découvrir Greyson, Fig Trees vaut la peine d’être vu. (J. Côté)

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LITTÉRATURE

CHRONIQUE

Le bonheur derrière soi Broches, papier, Nous étions jeunes encore de Gilles Archambault: un vingtneuvième roman, une même voix intime qui résonne encore. Véronique Samson Le Délit

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ierre-André a vécu deux trahisons au cours de sa vie. Celle de son ami Maxime, qui lui a dérobé sa femme, Marthe. Puis celle de son amitié avec Maxime, qui l’a laissé dans l’ombre en se taillant dans le spotlight une place de metteur en scène. Exit ces idéaux de jeunesse qui les liaient depuis leurs études en lettres, depuis ce moment où ils se sont mis à rêver ensemble à une grande œuvre. Dès la première page de Nous étions jeunes encore, tout est joué. Pierre-André apprend d’une voix à la radio la mort de Maxime. Il n’est pas surpris qu’on en parle: Maxime a atteint une renommée internationale, alors que lui s’efface peu à peu, petit écrivain sans velléités de grandeur. Au téléphone, on lui demande un témoignage. Il bafouille, ne sait comment raconter cette amitié, vacillante depuis longtemps déjà. C’est ainsi que commence le roman, qui se déroule comme le témoignage intérieur, tout entier tourné vers le passé, que parvient à livrer Pierre-

André une fois le téléphone raccroché. Nous étions jeunes encore est le vingt-neuvième livre que nous offre Gilles Archambault, un auteur qui demeure malgré tout méconnu du public. Ce n’est pas le roman d’une vieillesse devenue sage, revenant avec un air de bienveillance et un sourire en coin sur les frasques de son enfance. C’est plutôt un roman sur la conscience d’être jeune, la conscience du temps qui passe et des choses qui s’effritent. C’est elle qui habite Pierre-André alors qu’il revisite ses souvenirs tour à tour dans l’appartement de Marthe, qui s’abandonne à son désespoir, et en compagnie de Philippe, un jeune ami journaliste et apprenti romancier. «Je vis d’avoir vécu», confie Pierre-André. Le bonheur est toujours derrière pour ce personnage attaché à la beauté de la vie, peut-être plus apte à la reconnaître dans son passé que les personnages des romans précédents de Gilles Archambault. Le présent n’existe plus pour Marthe, Philippe et Pierre-André, dont les réminiscences grugent constamment le récit, jusqu’à l’envahir entièrement. Sur ce point, l’écri-

ture d’Archambault est particulièrement efficace, liant à travers la voix intime de son protagoniste les divers temps qu’il traverse. Le roman élabore un jeu intéressant sur les points de vue, qui oscillent sans cesse entre celui de Pierre-André lorsqu’il est avec Marthe et celui, omniscient, qui relate ses rencontres avec Philippe. C’est toutefois le point de vue d’Éloïse, la fille de Marthe et Pierre-André, qui clôt le roman, comme le retentissement d’un dernier espoir de sortir de l’angoisse sourde qui a saisi ses parents. Dans ce dernier roman, Gilles Archambault semble au sommet de son art, si telle chose peut se dire d’un écrivain qui est –et c’est là un gage de la profonde sincérité de sa voix– égal à lui-même depuis ses débuts. Nous étions jeunes encore se lit d’un trait, comme un ardent appel à vivre claironné entre les lignes d’un récit simple et émouvant. x Nous étions jeunes encore Gilles Archambault Édition du Boréal 19,95$

ciseaux Le bâton

Ralph Elawani

En relisant de vieux numéros du fanzine garage What Wave aujourd’hui, je me suis remémoré une période de ma vie où il n’y avait pas d’outils technologiques aussi développés que Facebook et MySpace (ce que je connais de Twitter me donne à penser que c’est une version «diète» des deux autres, alors je n’en parlerai pas) à la disposition des groupes, et où nous devions nous démerder pour trouver des bands obscurs que nos amis ne connaissaient pas. Nous ne tomberons pas dans la nostalgie, tout simplement parce que ce n’est pas constructif, mais les souvenirs de cette époque m’ont fait réfléchir au contenu du Bâton pour cette semaine. Dans le but de tendre une frêle perche à la presse écrite, il me fait plaisir de vous présenter une chronique spécialement dédiée à un fanzine qui publiera son septième numéro le 29 octobre. Alors, without further ado, laissezmoi vous présenter le plus montréalais de tous les fanzines de la côte Ouest canadienne: Mongrel Zine, alias Mongréal Zine. Basé à Vancouver, Mongrel Zine est l’œuvre de Janelle Pramberg et de l’artiste Bob Scott (et d’une panoplie de contributeurs dont le montréalais Frank Fingers), qui rédigent, révisent, plient, coupent, brochent et publient cette littérature érudite pour le plaisir coupable de tous les amateurs de rock’n’roll qui veulent bien se risquer à la lire. Pourquoi le plus montréalais de tous? Bon, il est facile de comprendre que les meilleurs groupes canadiens des dernières années ont émergé à Montréal, mais la véritable raison de la «montréalité» de Mongrel Zine est que Bob a grandi à Montréal, avant de suivre sa maman jusqu’à Vancouver… de là son parti pris pour la métropole québécoise.

Depuis sa création, la copieuse brochure s’est fait les dents sur des artistes de tous genres, qu’ils soient représentants de la scène garage montréalaise comme Mark Sultan –alias BBQ–, Cpc Gangbangs et Skip Jensen, ou bien qu’ils soient des légendes oubliées par l’histoire de la musique –comme les Torontois The Scenics. Et puisque Mongrel est publié par une troupe de bizarroïdes fanas de tout ce qui est tordu, le bédéiste Rick Trembles (dont les critiques de films version bande dessinée pour adultes consentants se retrouvent toutes les semaines dans le magazine Mirror) s’est récemment retrouvé en couverture du magazine. Mongrel Zine a aussi pris la bonne habitude d’inclure une compilation CD-R dans tous ses derniers numéros, un peu comme le faisaient What Wave et des dizaines d’autres… avec des cassettes et des flexi-disques (ah, le flexidisque, un format qui gagnerait à revenir en circulation). Comme tout bon zine qui se respecte, Mongrel donne également dans la critique et publie dans chaque numéro une spacieuse section «Reviews» traitant des nouveautés sous toutes leurs formes, que ce soit le CD-R du groupe noise habitant dans un deux-et-demi crade dans le fin fond du Mile-End ou bien le plus récent album des Black Lips chez Vice Records. Si la presse écrite s’apprête à mourir, il semblerait qu’il y avait de l’interférence sur la ligne lorsqu’on a tenté de passer le message à Janelle et Bob, car chez Mongrel on ne se considère pas vraiment anachronique. Il va donc de soi qu’après avoir lu le Bâton cette semaine, votre premier réflexe devrait être de vous rendre chez Primitive (3830 rue St-Denis) ou bien chez Sonik (4050 rue Berri, à l’angle Duluth) pour vous procurer les six derniers numéros de Mongrel Zine. Finalement, faites donc plaisir à Bob en lui payant un voyage de retour à Montréal. Rendez-vous au http://www.bobscottartwork.ca et achetez-lui ses dernières pièces. Vous verrez, ça fait du bien de devenir mécène. Pour plus d’information, consultez le: http://mongrelzine.wordpress.com. x

Le 17 novembre, Le Délit s’offre un Spécial régionS Inspiré(e)? Pour y participer, écrivez à rec@delitfrancais.com

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Arts & Culture

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CAPSULE CAFÉ

CHRONIQUE

Temps mort met l’hiver en vedette

La nouvelle série Web de l’heure, pur produit québécois, ne manquera pas de charmer plus d’un internaute. Audrey Gauthier Le Délit

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ue feriez-vous si l’hiver ne s’arrêtait jamais? C’est la question à laquelle Temps mort se propose de répondre. Cette série, écrite et réalisée par Éric Piccoli, explore la survie d’un personnage dans la région de Rouyn-Noranda durant la saison hivernale. Ancré dans l’univers québécois, Temps mort réussit à rendre l’atmosphère de fin du monde des longs et froids hivers, et l’on s’attache facilement au personnage principal, prisonnier d’une catastrophe hivernale. En 2013, Joël quitte Montréal pour aller rejoindre sa famille. Ne pouvant continuer son périple, il se réfugie en campagne. Les conditions sont difficiles: dans ce monde immobile et sans vie, Joël retourne à son cahier de dessins pour tenter de garder la tête sur les épaules. Il attend la fin de l’hiver, que rien ne laisse présager. La série est constituée de dix épisodes de cinq minutes, respectant ainsi la capacité d’attention sur Internet, moins longue que pour les autres médias. Chaque vendredi, un épisode est mis en ligne sur le site Tempsmort.tv et il faut attendre la semaine suivante pour connaître la suite des tourments et découvertes de Joël. Le travail acharné de l’équipe de production a rapidement été récompensé. En plus d’être la première série Web diffusée lors du festival Fantasia 2009, la série Temps mort est maintenant disponible mondialement grâce à Daily motion. De plus, la compagnie

Mouviz propose de diffuser la série en France. Pour l’instant, il est possible de voir les cinq premiers épisodes sur Tempsmort.tv ou dailymotion.com Avertissement: cette série crée rapidement une dépendance! Le projet du réalisateur est avant tout de raconter une histoire sans artifice, et c’est justement ce qui fait son charme. Les effets spéciaux sont efficaces, sans exagération, les intrigues et les personnages

ne sont pas superficiels: tout est mis en place pour que le spectateur plonge tête première dans ce Temps mort. Voilà une série captivante et touchante, un véritable petit chefd’œuvre québécois. C’est à découvrir… avant la première tempête de neige. x

La pause culturelle

Julie Côté

Retrouvez Audrey Gauthier à l’émission Café le vendredi à 18 heures sur CKUT, 90,3 FM

Christopher Peterson

Christopher Peterson

14Arts & Culture

Le théâtre, un art ou un divertissement?

On voit souvent le théâtre comme un art élitiste réservé aux biens nantis de la société. Dans une certaine mesure, cela n’est pas faux. Qui peut bien se permettre d’aller au théâtre régulièrement? Vous le devinez donc, une bonne partie du public du théâtre est formé de gens en moyens, qui s’y rendent la plupart du temps pour se faire voir ou pour assister à un divertissement haut de gamme, rien de moins. À ce sujet, je ne vous apprends rien. Seulement, la question du divertissement dans l’art a de quoi troubler. Alors que le cinéma, surtout lorsque hollywoodien, ne cache pas son côté «pur divertissement», le théâtre chevauche malaisément entre sa vocation artistique et la nécessité de divertir. Faisons une mise en situation pour mieux comprendre le tout. Le spectateur se rend au théâtre, débourse quelque 20$ –si ce n’est plus– pour voir une pièce qu’il ne connaît souvent que de nom. Cette pièce est une reprise d’un grand classique qui a été adapté au point où le tragique (par exemple) de l’histoire a été mis de côté pour faire place à une mise en scène de béton qui ne laisse personne indifférent. Tout y est: le jeu des acteurs époustoufle, les décors et les costumes font briller les regards et le scénario, grâce aux quelques modifications apportées, est désopilant. La pièce est une réussite complète: le spectateur sort de la salle enchanté. La question que je me pose est celle-ci: le résultat aurait-il été aussi divertissant si on avait gardé le tragique dans la pièce? Mais qui peut bien s’intéresser au fait que la complexité de la pièce ait été mise de côté alors que les gens qui ont assisté à la représentation n’allaient y chercher que du divertissement? On peut réduire la question au simple fait que nul art ne peut survivre s’il ne divertit pas, mais la réponse est en fait à la fois complexe et évidente. On prend pour acquis que la plupart des institutions artistiques bénéficient de subventions gouvernementales, pourtant, ce n’est pas le cas pour

plusieurs d’entre elles. Les théâtres et les troupes qui n’ont pas la chance de vivre de subventions du gouvernement se voient donc dans l’obligation d’élaborer une recette qui vendra, quitte à laisser de côté ce qui pourrait être trop audacieux, contesté ou lourd à certains endroits pour le spectateur. On veut du bonbon, quelque chose qui plaira à coup sûr. Un art aussi noble que le théâtre doit donc, lui aussi, tendre vers la «prostitution sociale» pour survivre. Doit-on maintenant s’informer de la provenance des fonds d’une troupe de théâtre au même titre que de la mise en scène pour savoir à quoi s’attendre? Il faut noter que la question que je soulève ici s’applique surtout aux oeuvres que l’on reprend, que l’on adapte. Imaginez alors la situation des jeunes dramaturges qui tentent de créer quelque chose de novateur, au risque de choquer. Les portes leur sont-elles automatiquement fermées? C’est là qu’interviennent, heureusement, les organismes subventionnés par le gouvernement, pour le bienêtre de tous et de l’art dramatique. Souhaitons que les institutions théâtrales et les différentes troupes continueront de bénéficier de cette aide qui leur donne la liberté de créer. Amateurs de théâtre, restez à l’affût et informez-vous. Et puis redonnez-moi-en donc des nouvelles. *** Quelques propositions de sorties théâtre pour la semaine : Le Groupe de poésie moderne présente jusqu’au 31 octobre prochain De l’impossible retour de Léontine en brassière, dans la salle Jean-Claude-Germain du Théâtre d’Aujourd’hui. Allez voir la vidéo de la troupe sur le site du Théâtre d’Aujourd’hui pour vous donner une petite idée: www. theatredaujourdhui.qc.ca Scotstown effectue un retour à la Licorne du 27 octobre au 7 novembre. Pour ceux qui avaient manqué la pièce l’an dernier, vous avez maintenant la chance de vous reprendre et de voir cette pièce écrite, mise en scène et interprétée par Fabien Cloutier: www.theatrelalicorne.com Le Théâtre Agitato présente jusqu’au 28 octobre à la salle FredBarry du Théâtre Denise-Pelletier Le Projet Laramie, tiré de l’histoire vécue de Matthew Sheppard, un jeune homosexuel battu à mort en 1998. Pour plus d’information, voyez le film du même titre, et visitez le www.denise-pelletier.qc.ca x Vous aussi, vous aimez l’ârt, genre? Rejoignez Julie sur notre site ou écrivez-lui artsculture@delitfrancais

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LE ROMAN-FEUILLETON DU DÉLIT

Flagrant délit de tendresse Julie Côté Le Délit ÉPISODE 7 Résumé de l’épisode précédent : Après avoir lamentablement échoué son examen de mi-session, notre jeune freshman se rend au bureau de sa T.A., qui veut lui remettre les pendules à l’heure. Bien que partageant un désir réciproque, ils ne se permettent aucun écart: elle, surtout, est inquiète pour son poste en jeu, et lui n’ose pas franchir la barrière du bureau. La rencontre prend fin abruptement.

C

’est la mort dans l’âme qu’elle se rend, pour la énième année consécutive, à un insipide party d’Halloween chez une vague connaissance. Elle sait d’avance qu’elle passera aux yeux de tous comme la fille incapable de s’amuser. Déjà que deux bières suffisent à la mettre K.O., il faut en plus qu’elle ait le cœur émietté par la dernière conversation qu’elle a eue avec son bel étudiant, son beau brun. Dans une tentative de lui redonner le sourire, son amie Emma lui avait prêté ce ridicule costume de lionne, la forçant de ce fait à l’accompagner au party. «It matches your hair so well!» lui avait dit sa copine en faisant référence à sa tignasse de feu. L’effort avait été vain. Tout ce qui lui importait en cette morne saison, c’était son désir pour lui. Jamais auparavant n’avait-elle ressenti de telles pulsions. Il faut dire que son ex n’avait jamais rien fait pour que cela se produise… Son bel étudiant, lui, n’avait qu’à lever les yeux vers elle pour que… ouf! Vallait mieux ne pas y penser. Si seulement elle avait su dès le départ que son emploi de T. A. l’empêcherait de vivre le plus grand frisson qu’elle n’ait jamais ressenti! Si seulement… Arrivée au party, où Emma se dépêche vite de la délaisser, on lui fait ingérer quelques comprimés sans qu’elle comprenne bien de quoi il s’agit. De toute façon, à ce stade, rien ne peut empirer son désarroi. Elle se dépêche de caler sa bière, déjà tiède, comme pour se donner une contenance. L’effet se fait rapidement sentir. Assise sur le divan, elle sent le feu lui monter aux joues, lesquelles s’enflamment subitement quand elle aperçoit Ovila, s’approchant d’elle. N’y voyant pas clair, elle se laisse emporter dans un doux délire… *** Son voisin de classe le lui avait dit: «Man, if you ever want to get to know people around here, you gotta come to this Halloween party at my friend’s place!» Il avait obéit: ça lui changerait les idées. La tournure que l’histoire avec sa belle Anglaise avait prise le laissait à la

fois peiné et amer. Il se sentait tellement impuissant… Son cousin, hilare mais inquiet à l’idée qu’un membre de son entourage festoie en compagnie de maudits Anglais, l’avait malgré tout aidé à se confectionner un costume. Il était déguisé en «ancien temps», cela lui semblait suffisant. De toute façon, il avait apporté une caisse de douze de Belle Gueule pour passer le temps si jamais le party ne levait pas. Buvant sa bière nonchalamment, il voit près de lui une chevelure enflammée qui lui parait bien familière. La curiosité piquée, il s’en approche, fébrile. Devant lui, la plus belle lionne qu’il ait jamais vue. Ou est-ce une tigresse? Dans le désir de la dompter, il laisse tomber les conventions sociales pour s’approcher d’elle, la contempler. Impossible de résister, il l’embrasse, dans le cou d’abord. Elle se laisse faire, étrangement. Mieux, elle répond à ses avances. Il poursuit donc, l’entraînant dans l’une des chambres lorsque la tension atteint son paroxysme. Il la jette sur le lit, la rousseur de sa chevelure ne faisant qu’attiser son désir. Se rapprochant d’elle, il déchire le haut de son costume pour mordiller son épaule. Elle rugit de plaisir. La rauque voix de Jim Morrison se fait entendre dans la pièce avoisinante.

Emanuelle Jacques

Citrouilles et tragédie

You know that it would be untrue You know that I would be a liar If I was to say to you Girl, we couldn’t get much higher Comment résister à un tel savoir-faire. Jamais on ne l’a prise avec tant de fougue, tant d’assurance. Ne répondant plus d’ellemême, elle se laisse guider, son cœur battant la chamade. Elle lui enlève son haut d’habitant, révélant ainsi le torse musclé qu’elle avait déjà deviné sous les chemises du bel étudiant. Au son du clavier et des notes psychédéliques, elle ne peut plus décerner le réel de l’exaltation. The time to hesitate is through No time to wallow in the mire Try now we can only lose And our love become a funeral pyre Ce qu’elle est belle et féroce. Lui enlevant morceau par morceau son costume, il découvre ce qu’il a désiré depuis des semaines. Au rythme des bouts de tissus sauvagement arrachés, leurs deux corps fusionnent dans un élan passionnel. La nuit s’annonce des plus chaudes. Come on baby, light my fire Try to set the night on fire x Retrouvez les précédents épisodes du roman feuilleton sur notre site Internet. www.delitfrancais.com

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VERSION FRANÇAISE QUÉBÉCOISE DE LAW ABIDING CITIZEN


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