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EÇONS MONDE ARABE LES RÉVOLUTIONS EN 8 LEÇONS
de LE PLUS
de Jeune Afrique
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 51e année • N° 2640-2641 • du 14 au 27 août 2011
SYRIE CÔTE D’IVOIRE BACHAR, SEUL ÉCONOMIE : GÉNÉRATION OUATTARA CONTRE TOUS ?
jeuneafrique.com om
ENQUÊTE FEMMES ET POLITIQUE
CONGO
Poussée sé de croissance Spécial 20 pages
La nouvelle vie
des
ALGÉRIE, MAROC, TUNISIE, SÉNÉGAL, CÔTE D’IVOIRE, CAMEROUN, GABON, RD CONGO… • Avec le vent de la contestation, pour vivre heureux, ils vivent de plus en plus cachés • L’exil doré des Libyens de Djerba • Paris, la guerre des palaces ÉDITION INTERNATIONALE France 6 € • Algérie 320 DA • Allemagne 8 € • Autriche 8 € • Belgique 6 € • Canada 11,90 $ CAN • Danemark 60 DKK • DOM 6 € Espagne 7,20 € • Éthiopie 95 Birr • Finlande 8 € • Grèce 8 € • Italie 7,20 € • Maroc 40 DH • Mauritanie 2000 MRO • Norvège 70 NK • Pays-Bas 7,20 € Portugal cont. 7,20 € • RD Congo 11 $ US • Royaume-Uni 6 £ • Suisse 11,80 FS • Tunisie 6 DT • USA 13 $ US • Zone CFA 3200 F CFA • ISSN 1950-1285
Dossier
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INTERVIEW
Santé
Kiyoshi Adachi Chef de l’unité
de la propriété intellectuelle à la Cnuced
FORMATION
Docteur ès finances
Ambitions
MAGHREB
en laboratoire À Casablanca, Alger et Tunis, de véritables fleurons de l’industrie pharmaceutique ont émergé en une dizaine d’années. Certains, pour qui le marché national devient trop étroit, regardent déjà au-delà de leurs frontières. MICHAEL PAURON
A SOURCE : J.A., CLASSEMENT DES 500 PREMIÈRES ENTREPRISES
vec un marché d’environ 3 milliards d’euros en 2010 et estimé à 3,5 milliards à l’horizon 2015, le Maghreb s’impose comme l’une des zones les plus dynamiques du continent. L’Algérie arrive même à la troisième place, derrière l’Afrique du Sud et l’Égypte, avec plus de 1,7 milliard d’euros en 2010. Pas étonnant que la plupart des multinationales du secteur soient déjà implantées dans la région : Sanofi-Aventis (Maroc, Tunisie, Algérie), GlaxoSmithKline (Maroc, Algérie), Actavis (Algérie), Pierre Fabre (Tunisie, Algérie), Pfizer (Tunisie, Maroc, Algérie)… La liste est longue et comprend aussi des groupes saoudien (El Kendi), cubain (Heber Biotic) et jordanien (Hikma). Mais l’industrie « maghrébo-maghrébine » a aussi su se faire une place, et de véritables fleurons sont nés. Leader en Algérie en termes de chiffre d’affaires, Biopharm était d’abord un distributeur, avant de se lancer dans la production en 2005 pour suivre l’évolution du marché tout en répondant à une politique nationale: avec l’interdiction d’importer des
TOP 10 RÉGIONAL DES PRODUCTEURS DE MÉDICAMENTS RANG EN AFRIQUE
9 13 14 17 18 23 28 30 32 34
SOCIÉTÉ
BIOPHARM LAPROPHAN SAÏDAL SANOFI-AVENTIS MAROC MAPHAR SOTHEMA PROMOPHARM ADWYA WINTHROP PHARMA SIPHAT
N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
CHIFFRE D’AFFAIRES 2009 (en millions d’euros)
233 157 134 128 127 92 45 38 33 32
médicaments déjà produits localement, l’industrie algérienne a été considérablement favorisée. Derrière Biopharm, Saïdal s’est imposé comme le premier producteur algérien de génériques et de médicaments sous licence, dans le cadre de coentreprises avec de grands groupes mondiaux – Pfizer, Sanofi et Dar Eddawa. Avec 4 200 salariés et un chiffre d’affaires de 115 millions d’euros en 2010, le groupe, coté à la Bourse d’Alger et détenu à 80 % par l’État, possède 20 % de part de marché en volume. Pour son patron, Boumediène Derkaoui, le pays a le potentiel pour accueillir de nouveaux investisseurs, nationaux ou étrangers: « Le marché algérien ne produit que 35 % de ses besoins, et l’objectif du pays est d’atteindre 70 %. » INCURSION TUNISIENNE. Saïdal multiplie donc
les investissements, à travers un plan 2010-2014 de 160 millions d’euros. « Les appels d’offres pour deux nouvelles usines, à Alger et Constantine, devraient être lancés à la fin de l’année », précise le PDG. En outre, le groupe possède 44 %, aux côtés d’un fonds d’investissement saoudien, du capital de Tassili Arab Pharmaceutical Company, dont l’usine, située dans la zone industrielle de Rouïba, « démarrera dans douze mois », selon le dirigeant. Objectif : détenir 25 % du marché en chiffre d’affaires et 40 % en volume d’ici à 2014. Et si le groupe a remporté des appels d’offres au Niger, en Guinée et en Mauritanie, « pour l’heure, nous nous concentrons sur le marché local », assure Boumediène Derkaoui. Dans le sillage de Saïdal, Laboratoire pharmaceutique algérien et Pharmaghreb sont autant de challengeurs. Le second a d’ailleurs signé un partenariat avec le numéro un tunisien Adwya (28 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2010 et 8 % du marché national). L’accord commercial de dix ans prévoit la production et le marketing de leurs produits génériques respectifs. Car contrairement à leurs voisins algériens, les opérateurs tunisiens ambitionnent de s’étendre hors de leurs frontières, trop étroites pour la vingtaine d’entreprises qui se partagent un marché de 500 millions d’euros. « Nous satisfaisons aujourd’hui JEUNE AFRIQUE
TUNISIE
ÉQUIPEMENT
CHIRURGIE
La maintenance Opération esthétique souffre de carences à Dakar
PORTRAITS
Des patrons bien portants
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OUSSAMA AYOUB/TOROMORO/MAXPPP
Amen, du col blanc à la blouse blanche
entre 50 % et 55 % des besoins du pays, et on ne pourra guère faire mieux », estime le docteur Nabil Saïd, PDG d’Industrie pharmaceutique Saïd. Pour le directeur général d’Adwya, Atef Zehani, « le salut passe par l’exportation ». Il ambitionne ainsi de réaliser 5 % de son chiffre d’affaires à l’étranger d’ici à trois ans : « Aujourd’hui, nous exportons peu, principalement vers la Libye et l’Algérie, mais l’Afrique subsaharienne nous intéresse. » Sur le territoire national, trop atomisé, il prévoit « des fusions et des acquisitions, à moyen terme ». LUCRATIFS GÉNÉRIQUES. Pour conquérir de nou-
veaux territoires, le marocain Sothema a quant à lui opté pour une filiale à Dakar: West Afric Pharma a démarré en avril. Le groupe part du même constat que ses homologues tunisiens. « Avec 35 entreprises, le Maroc est devenu très concurrentiel, et de plus en plusdemultinationalesviennentnousconcurrencer sur le générique », explique Mohamed Qrayim, porte-parole du numéro un marocain (80 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2010). La production de génériques est l’activité la plus lucrative, la plus prometteuse (seulement 27 % du marché chérifien), et la plus ouverte à l’export, contrairement aux médicaments sous licence. Et l’introduction prochaine de tests obligatoires de bioéquivalence dans la réglementation marocaine, afin d’atteindre l’objectif fixé par les autorités de 60 % de génériques d’ici à 2015, « devrait profiter aux fabricants locaux », selon le cabinet d’analyse financière BMCE Capital. Une décision bienvenue JEUNE AFRIQUE
car, pour Mohamed Qrayim, l’État n’incite pas assez l’industrie locale. « Nous sommes passés d’un taux de satisfaction de la demande intérieure de 80 % en 2006 à 70 % aujourd’hui », relève-t-il, pointant du doigt les importations massives des multinationales et la forte concurrence des génériques asiatiques. Quel avenir pour les industries de ces trois pays? « Certaines entendent s’implanter via des filiales en Afrique subsaharienne. D’autres vont privilégier des partenariats transnationaux avec les industries des pays développés », relève Kiyoshi Adachi, chef de l’unité de la propriété intellectuelle à la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced, lire interview pp. 131-132). Une chose est sûre : l’intérêt des géants internationaux pour les opérateurs d’Afrique du Nord renforce un peu plus leur capacité à devenir, un jour, des champions mondiaux. ●
! LE GROUPE SAÏDAL s’est imposé comme le premier fabricant algérien de génériques et de médicaments sous licence.
LA RÉVOLUTION ÉGYPTIENNE NE REFROIDIT PAS GSK AU CAIRE, LE PRINTEMPS ARABE n’aura pas apaisé les appétits des multinationales de l’industrie pharmaceutique. Ainsi, le géant américain GlaxoSmithKline (GSK) n’a pas remis en cause ses 60 millions d’euros d’investissements prévus sur les cinq prochaines années. Le groupe construira deux usines de production, augmentant un peu plus son hégémonie : à ce jour, il demeure le plus gros fabricant du pays, avec 23,1 % du marché égyptien. Celui-ci est estimé à 3,5 milliards d’euros à l’horizon M.P. 2014, selon le cabinet Business Monitor International. ●
SOURCE : JEUNE AFRIQUE, CLASSEMENT DES 500 PREMIÈRES ENTREPRISES AFRICAINES
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Vers une politique sanitaire commune aux 6 États membres INITIATIVE POUR LA PROMOTION DE LA RECHERCHE ET DES RESSOURCES HUMAINES EN SANTÉ EN AFRIQUE CENTRALE, IPREHSAC, 2011-2015
Le site du CIESPAC à Brazzaville.
Promouvoir une amélioration qualitative et quantitative des ressources humaines et la recherche en santé en vue du développement sanitaire de l’Afrique centrale. VISION 2015 1. Faire du CIESPAC un centre régional d’excellence pour la formation et la recherche ; 2. Mettre en place un système de surveillance épidémiologique des maladies ; 3. Renforcer les capacités des pays d’Afrique centrale à la maitrise de la gestion des ressources humaines en santé.
Pôle Rec Recherc Recherche herche herc he au au CIESPAC CIESPA CIESPA ESPAC C (en (en constr co construction). nstructi nstr uction). ucti on).
CIESPAC Centre Inter États d’Enseignement supérieur en Santé Publique d’Afrique Centrale
PROGRAMME DES FORMATIONS 2011 - 2012
Un atelier de formation.
I- Atelier de formation sur « les statistiques à l’usage des médecins et biologistes ». Période : 14 – 26 novembre 2011 Public cible : Médecins et biologistes Partenaire : École de Santé Publique de Nancy II- Initiation à la surveillance des vecteurs du paludisme et des maladies re-émergentes (ISV-Palu). Période : 6 février – 2 mars 2012 Public cible : Agents techniques de santé des programmes / projets et institutions de recherche Partenaire : OMS
Vision 2015 du CIESPAC
ORGANISATION DE COORDINATION POUR LA LUTTE CONTRE LES ENDÉMIES EN AFRIQUE CENTRALE
III - Cours d’Epidémiologie d’intervention et d’Informatique en Afrique Centrale (CEPIAC-2). Période : 7 mai – 9 juin 2012 Public cible : Acteurs de la lutte contre le Paludisme et chercheurs Partenaire : Agence de Médecine Préventive IV - Atelier de formation des personnels de santé des foyers aux techniques de diagnostic et de lutte contre la Trypanosomiase Humaine Africaine. Période : 18 – 27 juin 2012 Public cible : Personnes impliquées dans la lutte contre la THA Partenaire : Union Africaine (PATTEC)
BP 15665 - Yaoundé, Cameroun - Tél. : (+237) 22 23 22 32 Fax : (+237) 22 23 00 61 - E-mail : contact@oceac.org www.oceac.org
Dossier INTERVIEW
Kiyoshi Adachi
C HEF
DE L ’ UNITÉ DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE À LA
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C NUCED
« Certaines entreprises sont prêtes à devenir des acteurs mondiaux »
JEUNE AFRIQUE : Quels sont les principaux obstacles pour développer l’industrie africaine, en particulier dans les pays subsahariens ? KIYOSHI ADACHI : L’industrie phar-
maceutique en Afrique est principalement impliquée dans la formulation de médicaments génériques et dans le conditionnement. Le principal obstacle à son développement est le manque de ressources humaines qualifiées dans les domaines pertinents de la production, tels que des chimistes, des pharmaciens et des techniciens, qui ont de l’expérience dans la formulation et la fabrication de médicaments. Mais il y a d’autres freins : l’absence d’infrastructures de base (énergie fiable,
eau potable, routes…) ; la nécessité de mettre à niveau les autorités de réglementation des médicaments ; et la nécessité de donner un accès rapide et rentable aux principaux intrants, comme les ingrédients pharmaceutiques actifs – la plupart sont importés de Chine et d’Inde. En matière d’investissements, quelle est la tendance ?
Il n’existe pas de données fiables et complètes pour mesurer précisément si l’investissement dans le secteur a connu ou non une croissance. Néanmoins, les divers événements auxquels nous assistons suggèrent certaines tendances. Tout d’abord, les ! « Les investissements producteurs transfrontaliers dans africains de nombreux pays souhaitent a f r i c a i n s s u i v e nt PRENDRE PIED SUR majoritairement un TOUT LE CONTINENT. » axe sud-sud – surtout en provenance de Chine et d’Inde, qui sont aujourd’hui les principaux investisseurs –, par opposition à un axe nord-sud. Ensuite, le fait que certaines entreprises africaines se plaignent de ne pas parvenir à satisfaire la demande de leurs marchés à travers le continent suggère que le mouvement d’expansion
DR
Au sein de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced), il est le spécialiste de l’industrie pharmaceutique africaine. Investissements étrangers, rôle des États… Pour J.A., il aborde aussi bien les tendances que les perspectives d’un secteur en pleine mutation.
est lancé : les producteurs africains souhaitent prendre pied sur tout le continent. En troisième lieu, un certain nombre de coentreprises créées sont le fait d’un fabricant étranger et d’un distributeur local, même sans expérience. Les multinationales considèrent donc qu’il est ● ● ●
À LA RECHERCHE DE MATIÈRES PREMIÈRES PAS CHÈRES PARACÉTAMOL, QUININE, IBUPROFÈNE… « Pour un même produit, les tarifs peuvent aller du simple au triple! » relate Mohamed Qrayim, porte-parole de Sothema, au Maroc. Les matières premières représentent entre 10 % et 70 % des prix de fabrication, d’où l’importance de trouver un fournisseur compétitif. Les grossistes eux-mêmes, comme Quimdis en France, Marchesini en Belgique, Groninger en Allemagne ou Bram en Italie, se tournent quant à eux de plus en plus vers l’Asie. Premiers producteurs au monde, la Chine et l’Inde sont devenus l’objet d’acquisitions de la part de JEUNE AFRIQUE
multinationales qui veulent sécuriser leurs approvisionnements. D’autres laboratoires plus modestes cassent leurs coûts en passant par leurs partenaires, dont les commandes en grandes quantités permettent des économies d’échelle. C’est le cas d’Industrie pharmaceutique Saïd, enTunisie, qui se fournit exclusivement chez l’américain Bristol-Myers Squibb, pour qui il fabrique la marque Upsa. Rien que pour l’Algérie, laTunisie et le Maroc, le marché des matières premières pharmaceutiques est estimé à plus de M.P. 700 millions d’euros. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Dossier Santé rentable de s’installer et de former des employés.
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Pourquoi certaines entreprises asiatiques, qui produisent à bas coût chez elles et exportent déjà leurs produits sur le continent, viennent y ouvrir des usines ?
Comme les entreprises en Inde et en Chine commencent à exporter une plus grande proportion de leur production vers les pays développés au détriment de l’Afrique, investir directement dans la production locale des pays africains leur semble le moyen le plus sûr de conserver la mainmise sur l’approvisionnement du continent, et d’en tirer les bénéfices. Un certain nombre de changements dans l’environnement mondial sont également à l’origine de ces flux. Par
1,7 %
C’est la part de l’Afrique (soit 14 milliards de dollars) dans le marché mondial de l’industrie pharmaceutique
pour les fabricants africains, en vue de réduire le risque de détérioration lors du transport des capsules fabriquées en Chine. Ces mouvements opportunistes n’ontils d’intérêt que les bénéfices ?
L’approvisionnement mondial en médicaments repose principalement sur le secteur privé. Il n’est donc pas surprenant que les entreprises soient d’abord motivées par le profit. Mais la production locale augmente aussi la disponibilité et la diversité des médicaments de bonne qualité, ce qui est bénéfique pour la population. Comment cohabitent secteur privé et secteur public ?
De nombreux pays maintiennent des entreprises publiques, mais beaucoup
La production locale augmente la disponibilité et la diversité des médicaments. exemple, le régime international de la propriété intellectuelle, modifié en 2005, a interdit à des pays tels que l’Inde de produire légalement des génériques de médicaments brevetés ailleurs. Les grandes entreprises indiennes cherchent donc une base dans les pays les moins développés, qui sont dispensés de l’application de cet accord. La coentreprise entre l’indien Cipla et Quality Chemicals Industries, en Ouganda, pour produire des antirétroviraux génériques est un bon exemple. Un autre facteur important est la réduction des risques : dans le cas de l’Éthiopie, une entreprise chinoise a opté pour la fabrication locale de gélules
de fabricants de médicaments en Afrique sont des entreprises à capitaux publics et privés ou des joint-ventures entre entreprises nationales et étrangères. En général, le secteur public est surtout impliqué dans la production de vaccins. Compte tenu des taux de pauvreté en Afrique, les États ont tendance à être des acheteurs importants des productions d’entreprises locales où les normes de qualité ont été respectées. En définitive, quel doit être le rôle des États pour permettre à la production locale de se développer ?
Renforcer la capacité locale de production est une tâche collective. Le
gouvernement a un rôle central à jouer en rassemblant tous les organismes, les ministères et les acteurs du secteur privé, pour agir de manière coordonnée et cohérente. Le gouvernement a aussi le devoir de s’assurer que les politiques d’aide publique au développement, en vertu desquelles les médicaments sont souvent donnés, et les politiques qui soutiennent la production locale de médicaments soient mises en œuvre de manière concertée. Le gouvernement – et en particulier l’autorité de réglementation pharmaceutique – est chargé de s’assurer que les médicaments produits par le secteur pharmaceutique répondent à une certaine efficacité et aux normes de sécurité. En exigeant que certaines normes soient respectées, il peut aider à ce que l’industrie locale joue un rôle dans la satisfaction de la demande intérieure, avec des médicaments abordables et de bonne qualité. Pensez-vous que certaines sociétés africaines soient en mesure de devenir des leaders mondiaux ?
Il existe d’abord un besoin d’augmenter la disponibilité des médicaments au sud du Sahara. Cette demande offre donc des opportunités de croissance et d’expansion pour les firmes pharmaceutiques en Afrique. Les multinationales occidentales cherchent en outre des fabricants de génériques de qualité, dans les pays en développement, pour baisser leurs coûts et maintenir leur rentabilité. L’achat par GlaxoSmithKline en 2009 d’une participation dans le sudafricain Aspen montre que certaines entreprises sont prêtes à devenir des acteurs mondiaux. ● Propos recueillis par MICHAEL PAURON
FLOXAL’MED, un nouveau complément dans l’oxygène médical
L’oxygène médical est un produit vital dans les milieux sanitaires. Sa disponibilité permanente est une nécessité pour le soin des patients. Air Liquide offre une solution complémentaire aux modes d’approvisionnement liquide et gazeux qui, parmi d’autres avantages, rend l’oxygène disponible à toute heure répondant aux besoins des hôpitaux.
Entretien avec le professeur Idrissou Abdoulaye, Directeur du Centre national hospitalier et universitaire Hubert M. Maga à Cotonou.
La solution Floxal’Med d’Air Liquide répond aux attentes du CNHU de Cotonou en trois perspectives importantes. En premier lieu, la qualité du produit : en l’absence de disponibilité locale d’oxygène médical sous forme cryogénique, la solution Floxal’Med conçue autour de la technologie PSA produit de l’oxygène à usage médical 93 % conforme à la pharmacopée européenne garantissant une qualité pharmaceutique contrôlée en continu. En second lieu, la continuité de fourniture : le CNHU confronté aux problèmes de consommation sans cesse accrue d’oxygène avec des coûts de plus en plus importants, a sollicité Air Liquide Bénin pour des solutions appropriées à la situation. C’est alors que, dans le cadre d’un contrat, la société Air Liquide a proposé à l’hôpital
une solution complète mieux adaptée que la fourniture en bouteilles, en passant par l’analyse des besoins croissants du CHNU en Oxygène médical, le dimensionnement des équipements, l’installation et la mise en place des secours appropriés, l’exploitation et la maintenance préventive suivant un programme préétablit. Ainsi, Air Liquide assure la fiabilité et la continuité de la fourniture totale permettant à l’hôpital de se concentrer sur les soins aux patients. Les équipements de production et leur back up restent la propriété d’Air Liquide qui s’engage à fournir les services tels que décrits ci-dessus. En troisième lieu, l’économie : comparée à la solution précédente de fourniture en bouteille la solution Floxal’Med apporte une économie substantielle au sens large du terme. Economie financière, en offrant une réduction importante des dépenses permettant à l’hôpital de mieux gérer les budgets et d’investir dans l’acquisition d’appareils médicaux sophistiqués. Une utilisation rationnelle des ressources techniques permettant aux services de maintenance et la pharmacie de se consacrer à d’autres tâches au service des patients.
Avec FLOXAL’MED, plus qu’un prestataire, mieux qu’un fournisseur, AIR LIQUIDE est un véritable partenaire. ●
Assistance pour analyser les risques et choisir une solution sûre et économique,
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Gamme de générateurs modulaire adaptée à votre consommation,
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Fourniture d’oxygène à une pureté de 93±3 % pour usage médical conforme a la pharmacopée européenne,
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Secours en Oxygène 99,5 %, prêt à utilisation pour garantir fiabilité et continuité de fourniture,
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Contrôle qualité et maîtrise des procédés,
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Télésurveillance et assistance technique 24/24h,
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Maintenance préventive des installations.
Air L Liquide-Sobegi (Bénin), Route de Porto-Novo, Pk3, 06 B.P, 674 Cotonou (Bénin) Tél. : +229 21 33 10 75 - +229 21 33 06 30 Fax : +229 21 33 10 54
Communiqué
Air A Liquide Pty, Healthcare department - Cnr. Vereeninging & Andre Marais Road, PO Box 124200, Alrode 1451 - Tél. : +27 (0)11 389 7000 - Fax : +27 (0) 11 617 7534
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Dossier Santé HÔPITAL
Sous-traités dans l’urgence Le français Denos Health Management gère deux structures à Benghazi, fief des insurgés libyens.
S
i Denos Health Management entend bouleverser le milieu de la gestion hospitalière dans les pays à développement intermédiaire, pour l’instant c’est davantage le Printemps arabe qui bouscule la société, basée en France. Il faut dire que celle-ci a démarré ses activités en septembre 2009, dans la Libye de Kaddafi, en signant un contrat de cinq ans pour la gestion du grand hôpital de… Benghazi. Alors que la ville est devenue le fief des opposants au « Guide », l’établissement s’est transformé en hôpital de guerre,
accueillant dans un premier temps les victimes de l’offensive de l’armée libyenne, puis les blessés venant du front, plus à l’ouest. « Il y avait 2 000 personnes qui y travaillaient, aujourd’hui il y en a 400, dont une dizaine de médemillions d’euros Chiffre cins », explique Pierre Vincent, d’affaires fondateur de Denos.
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en 2010
PARTAGE DE SAVOIR-FAIRE.
La mission de Denos au sein du Benghazi Medical Center ? Gérer l’hôpital de manière opérationnelle et administrative, mais aussi partager son savoir-faire et former les équipes, avec l’aide de médecins
et d’infirmiers venus de l’étranger. Le Benghazi Medical Center regroupe aujourd’hui neuf nationalités. Denos gère aussi un hôpital privé à Benghazi et deux autres à Oman. « Notre vocation est de répondre aux besoins croissants des structures de santé dans ces pays et de transmettre le savoir, précise Pierre Vincent. On met à disposition des équipes d’experts, de consultants, de personnels de sa santé et de praticiens hospitaliers co confirmés. » La concurrence existe. « Nous étions quatre sur l’appel d’offres de Benghazi, il y avait notamment des Britanniques et des Sud-Africains », raconte Pierre Vi Vincent, avant de nuancer : « Mais l’hôpital, peu de monde s’y intéresse, car c’est compliqué. » Premier opérateur francophone, Denos espère à terme pénétrer les marchés d’Afrique de l’Ouest. ● MICHAEL PAURON
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C’est le nombre de médecins pour 100 000 habitants en Afrique (contre plus de 300 en France)
Dossier
FORMATION
Docteur ès finances Pour diriger un établissement, mieux vaut être un bon administrateur plutôt qu’un médecin chevronné… Cela s’apprend notamment à l’Institut supérieur du management de la santé, à Dakar.
D
’
après les chiffres publiés par la revue Academic Medicine en octobre 2009, sur les 6 500 hôpitaux américains, seuls 235 étaient dirigés par des médecins (soit 3,6 %, alors que ce taux était de 35 % en 1935). En France, la proportion serait plus faible, et quasiment nulle dans le secteur public. Dans la plupart des pays africains, en l’absence de plan de carrière pour les médecins, ces derniers bataillent dur pour conserver la gestion des structures de santé, souvent financées par les États. La crise économique est passée par là: les pouvoirs publics ont décidé que les établissements seraient gérés comme des entreprises privées. Une personne prend en charge cette délicate mission : il s’agit du
des solutions permettant de mobiliser et de diversifier les sources de financement. Entermesd’évolutiondecarrière, le gestionnaire d’hôpital débutant se voit d’abord confier une structure départementale, puis régionale, et peut envisager, au bout de dix ans, de rejoindre une entité plus Le patron de l’hôpital est chargé importante, des ressources humaines, du comme un budget, de la logistique… centre universitaire hospitalier gestionnaire d’hôpital, qui est soit (CHU). Dans les établissements un médecin ayant suivi un curdes grandes villes, il peut d’abord sus de gestion, soit un gestiongérer une unité ou un service, et naire qui découvre l’univers de la avoir sous sa responsabilité une santé. Compétences attendues : quinzaine de personnes. être capable d’anticiper les enjeux de l’économie de la santé, savoir DÉBUTANTS BIENVENUS. En porter de gros projets, être apte à Afrique, des formations de gestionnaires d’hôpital se mettent progresla concertation, à la négociation, au management… Le gestionnaire sivement en place. Ainsi à Dakar, d’hôpital est chargé des ressources l’Institut supérieur de management de la santé (ISMS, une entité du humaines, du budget et de la logistique. Il doit par ailleurs imaginer Centre africain d’études supérieures JEUNE AFRIQUE
Entre 250 000 et 400 000 F CFA C’est le salaire mensuel de départ d’un gestionnaire d’hôpital
en gestion) recrute sur concours des étudiants à bac + 4, issus non seulement de l’Union économique et monétaireouest-africaine(UEMOA), mais aussi de toute l’Afrique francophone,jusqu’àMadagascar.Outrele niveau, c’est le projet professionnel du candidat qui fait la différence. Les personnes retenues ont souvent une première expérience du management de structures de santé, mais les débutants sont aussi les bienvenus. Le programme prévoit des cours relatifs à la santé: épidémiologie, économie, management… Pour un coût de quelque 3 millions de F CFA (environ4575euros),lecursussedéroulesurdouze mois, dont quatre sont consacrés à un stage. L’institut accueille parfois des groupes, dont la formation est prise en charge par des organismes tels que la Banque africaine de développement (BAD, 26 Maliens formés en 2003) ou l’Organisation mondiale de la santé (OMS, 16 Mauritaniens). Mais ses effectifs restent faibles, certaines promotions comportant moins de cinq élèves. L’ISMS envisage en outre la création de deux nouveaux programmes, l’un en alternance, l’autre à distance, en partenariat avec l’Université du Québec à TroisRivières (Canada). Généralement, les gestionnaires d’hôpitaux formés à l’ISMS s’insèrent plutôt bien. Cadres supérieurs rémunérés entre 250 000 et 400 000 F CFA par mois suivant les pays, ils intègrent généralement le secteur public, mais sont aussi demandés dans les ONG. Dans les pays où il n’existe pas de formation spécifique, lorsqu’ils sont nommés comme gestionnaires, certains médecins suivent des programmes courts dans des écoles nationales d’administration ou des écoles normales. ● CLARISSE JUOMPAN-YAKAM N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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30 %
C’est la part du tourisme médical dans le chiffre d’affaires du secteur de la santé en Tunisie
Dossier
NICOLAS FAUQUÉ
doute pas de la fiabilité du concept: « Les hôpitaux privés ont un avenir certain, car le secteur public n’a pas tous les moyens. Il assure déjà la formation des médecins ainsi que la prise en charge des indigents et des assurés de la Caisse nationale d’assurance maladie. Le principe de l’hôpital privé, c’est de proposer des forfaits de soins aux patients et de servir de relais au secteur public. Avec les clients Comar, nous appliquerons aussi le principe du ticket modérateur. Par ailleurs, l’organisation et la formation continue du personnel médical et paramédical, ainsi que les équipements de pointe, garantiront la qualité des prestations. » ! UN ÉTABLISSEMENT EL AMEN, section cardiologie, à Mutuelleville (nord de Tunis). TUNISIE
Amen, du col blanc à la blouse blanche Le groupe de la famille Ben Yedder s’étend de la finance… aux services de santé. Déjà à la tête d’un réseau de cliniques, sa filiale spécialisée a fait sien le concept d’hôpital privé. Explications.
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résent dans plus de deux cents entreprises de promotion immobilière, actif dans le crédit-bail avec une filiale en Libye et une stratégie d’expansion au sud du Sahara, le groupe Amen, fondé par la famille Ben Yedder, est aussi le premier opérateur privé en matière de services de santé. Il a développé, via sa filiale Amen Santé, le seul réseau de cliniques en Tunisie (les cliniques El Amen à Mutuelleville, La Marsa, Béja et Gafsa). Détenu majoritairement par la Compagnie méditerranéenne d’assurances et de réassurances (Comar, autre filiale d’Amen) et Amen Bank, la division santé gère actuellement trois cents lits – l’équivalent d’une importante unité hôtelière. Le tourisme médical, qui assure 30 % du chiffre d’affaires du secteur en Tunisie, a donné de l’ambition à Amen Santé. En créant en novembre 2010 l’Hôpital privé El Amen, doté d’un capital d’environ 6 millions d’euros, la filiale ouvre de JEUNE AFRIQUE
nouvelles perspectives au groupe. Objectifs : la réalisation, la gestion et l’exploitation d’établissements sanitaires et hospitaliers. « À la différence d’une clinique, le concept d’hôpital privé permet d’avoir des médecins à plein temps, afin d’assurer la continuité des soins et de proposer des prestations de qualité, du fait que toutes les spécialités sont toujours opérationnelles. Et il n’y a pas à attendre que les spécialistes arrivent : ils sont déjà là », précise Mohamed Ben Hmida, directeur général d’Amen Santé. Implantésurl’emplacement stratégique de l’ancienne ambassade des États-Unis, dans le centre de Tunis, l’Hôpital privé El Amen, qui ouvrira en 2013, représente un investissement de 22,5 millions d’euros, dont 20 % sont financés par la Société financière internationale (SFI, filiale de la Banque mondiale). Malgré les perturbations dues à la révolution tunisienne, les études techniques sont largement entamées, et Mohamed Ben Hmida ne
Ouverture en 2013 L’Hôpital privé El Amen disposera de 350 lits et de 60 médecins à temps plein, dans le centre de la capitale
PÔLE DE RECHERCHE. Au-delà du
volet soins, l’Hôpital privé El Amen projette d’être le premier centre hospitalier universitaire (CHU) privé en Tunisie, en développant l’enseignement de la médecine et de diverses spécialités in situ. « Les compétences ne sont plus à prouver, et nous mettrons à profit la notoriété de la médecine tunisienne pour former des étudiants tunisiens, africains et arabes », poursuit Mohamed Ben Hmida. Moins onéreuse qu’en Europe, cette plateforme d’enseignement offshore table sur la qualité de l’encadrement et la proximité géographique pour être attrayante. « Cela nous permettra aussi de lancer, à long terme, un pôle de recherche scientifique pour compléter l’ensemble des prestations du label Amen, déjà perçu comme un gage de sécurité par les patients, les médecinsetlesinstitutionsétrangères en Tunisie », conclut le directeur général. Enfin, Amen Santé compte
Comme dans le public, la continuité des soins sera assurée dans toutes les spécialités. mettre à profit son savoir-faire pour s’implanter en Mauritanie et en Libye. À terme, la filiale envisage une introduction en Bourse. Une première pour un groupe de services de santé en Tunisie. ● FRIDA DAHMANI, à Tunis N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Dossier Santé
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Et quand malgré tout la machine tombe en panne ? Tout dépend des aptitudes des techniciens, qui varient d’un pays à l’autre et, dans le même État, de la capitale aux régions.
MASHID MOHADJERIN/REDUX-REA
ABSENCE DE FORMATION. Entre
! SALLE D’OPÉRATION dans un établissement de Lomé (Togo). ÉQUIPEMENT
La maintenance souffre de carences Toujours plus sophistiqués, les appareils médicaux sont aussi de plus en plus difficiles à entretenir. Et le manque de moyens et de personnel qualifié n’arrange rien aux affaires des établissements de santé.
«
J
e voudrais savoir quel est le cursus à suivre pour faire de la maintenance de matériel médical et quels sont les pays qui offrent cette formation. » Cette demande, postée en février sur un forum d’étudiants africains et restée à ce jour sans réponse, est symptomatique du flou qui règne dans le secteur. La maintenance du matériel médical est un sérieux dilemme pour de nombreux établissements de santé sur le continent. Un dilemme qui ne se posait pas autant avec les appareils d’avant les indépendances, moins sophistiqués. « Les machines étaient robustes et résistaient aux conditions climatiques extrêmes », explique le docteur Jean Théophile Banzouzi, coordonnateur Europe de l’ONG Médecins d’Afrique. Aujourd’hui, plusieurs d’entre elles fonctionnent toujours, et seul le manque de consommables, qui ne sont parfois plus fabriqués, pousse N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
les établissements à les mettre au rebut. « En biochimie, vous n’avez plus les mêmes réactifs. Certaines radios ne sont pas compatibles avec les scanners anciens. Et le papier thermique utilisé pour le monitoring des femmes enceintes n’existe plus, tout comme certains fusibles », énumère le chercheur en pharmacologie, chimiethérapeutique et biologie.
Les nouvelles machines sont plus sensibles à la chaleur, à l’humidité et à la poussière. Quand les appareils sont remplacés, ce sont des équipements électromécaniques, plus sensibles à la chaleur, à l’humidité et à la poussière – un cocktail qui favorise des micro-courts-circuits –, qui les supplantent… Pour limiter la casse, les établissements doivent donc trouver des solutions de fortune : par exemple, limiter l’usage des appareils lors des fortes chaleurs.
1972 et 1989, à Lomé, le Centre de formation en santé publique de l’Organisation mondiale de la santé enseignait, parmi d’autres apprentissages, l’entretien et la réparation du matériel électro-médical. Les personnels venaient s’y recycler, améliorer leurs connaissances. Au total, deux cent quarante-deux apprentis d’Afrique de l’Ouest, d’Afrique centrale et d’Afrique australe y ont reçu une formation diplômante, indique le professeur François Gado Napo-Koura, coordonnateur adjoint du centre de formation, chargé des activités pédagogiques et scientifiques. Reste que ces modules d’enseignement ne sont plus dispensés depuis des années. Pénurie d’élèves ou manque de fonds ? La réponse fait encore débat. Et quelle alternative ? Plusieurs pays, dont le Togo, disposent désormais d’un pôle « maintenance » dans leur ministère de la Santé. Et certains, comme la Côte d’Ivoire, organisent par exemple la remise à niveau de leurs techniciens en France. Dans le cadre des acquisitions d’appareils, lors des appels d’offres, l’aspect formation du personnel est certes bien présent, et, parfois, pour emporter le matériel, certaines entreprises proposent la maintenance gratuite pendant les deux premiers mois, ou la formation gratuite du personnel. Mais, dans le cas contraire, ces deux volets optionnels du contrat sont évités, car ils ont un coût important: entre 3 % et 5 % du prix de la machine, selon sa taille et sa complexité, pour le volet formation ; et en moyenne 10 % – voire jusqu’à 20 % ou 30 % quand il y a des consommables – pour la maintenance. Résultat : faute de moyens, les établissements se débrouillent en interne pour réparer – au risque d’aggraver la situation. ● HABIBOU BANGRÉ JEUNE AFRIQUE
Quel est le meilleur traitement? La vie écrit les questions. Nous cherchons les réponses. Nos innovations permettent de traiter des millions de personnes qui souffrent, tout en améliorant leur qualité de vie. Nous leur donnons de l’espoir.
Nous innovons la santé
Dossier Santé ! Ouverte en mars 2010, LA CLINIQUE ÉLYSÉE-DAKAR souhaite attirer des patients issus de toute la sous-région.
MARC DEVILLE POUR J.A.
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CHIRURGIE
Opération esthétique à Dakar
Prothèses mammaires, liposuccions, liftings… Pour ces interventions, plus besoin d’aller en Europe. L’offre s’étoffe dans la capitale sénégalaise, qui abrite même la première clinique spécialisée d’Afrique de l’Ouest.
C
’
est une villa cossue, cachée derrière de hauts murs blancs, à quelques pas de l’Assemblée nationale. Ouverte en mars 2010, la clinique ÉlyséeDakar est, en Afrique de l’Ouest, la première structure privée exclusivement spécialisée dans la chirurgie et la médecine esthétiques. Un marché porteur dans la sousrégion, alors que, jusqu’à présent, la demande ouest-africaine peinait à être satisfaite localement. JeanJacques Caraco, anesthésiste et
patron de la clinique, explique : « 80 % de notre clientèle a déjà eu recours à la chirurgie esthétique dans les pays occidentaux. Les 20 % restants n’auraient pas fait le pas d’aller à l’étranger mais, puisque l’offre est là, ils essaient. » Avec une trentaine de patients chaque mois, la clinique n’a pas encore atteint l’équilibre financier. « Mais le bouche à oreille fonctionne », ajoute Jean-Jacques Caraco. Même constat à l’Ordre national des médecins du Sénégal (ONMS). « Beaucoup de praticiens
commencent à s’y intéresser. Et la demande existe, les gens veulent s’occuper de leur bien-être », confirme Cheikh Ahmadou Bamba Diop, son président. Dans la capitale sénégalaise, les deux cliniques privées les plus huppées font déjà venir, plusieurs fois par an, des spécialistes français pour opérer les patients. Partout, les demandes sont les mêmes : prothèse mammaire, liposuccion du ventre, lifting… Avec des tarifs de 20 % à 30 % moins élevés qu’en France, « et des prestations équivalentes » selon les praticiens français, le marché est amené à se développer. Fini les billets d’avion et l’hébergement à financer pour aller à Londres, à Paris ou à New York. « DIAYE FONDÉ ». À la clinique Élysée-Dakar,80%despatientssont sénégalais – dont la moitié d’origine libanaise –, et les autres sont des expatriés, notamment des Français. L’objectif est d’attirer également
Les deux établissements les plus huppés font venir, plusieurs fois par an, des spécialistes français. une clientèle ouest-africaine. Pour le moment, parmi les visiteurs issus du reste du continent, l’équipe de la clinique Élysée-Dakar a opéré des personnes venant de Mauritanie, de Côte d’Ivoire, de RD Congo et d’Afrique du Sud.
MARC DEVILLE POUR J.A.
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Plus de 90 % des clients sont des femmes. Leurs demandes de chirurgie et de médecine esthétiques sont les mêmes que celles ayant cours en Occident, avec tout de même quelques particularités. « Pour les Africaines de 50 à 60 ans, les opérations ne se font pas vraiment sur la poitrine, car les seins ne sont pas considérés comme un symbole de féminité. En fait, nous opérons surtout les fessiers », précise Jean-Jacques Caraco. Car le diaye fondé, à savoir des fesses rebondies, a davantage la cote. Quant aux patients hommes, ce sont essentiellement des chefs d’entreprise, des artistes ou des
professionnels de l’audiovisuel, âgés d’une cinquantaine d’années. Ils viennent principalement pour se faire enlever les poches sous les yeux et relever les paupières. ET L’HÔPITAL PUBLIC? Le secteur
public s’intéresse également à la chirurgie esthétique. Le centre hospitalier Aristide-Le Dantec, à Dakar, a ainsi pour projet d’ouvrir un service spécialisé. « Ici et dans la sous-région, la demande est là, car le niveau de vie augmente. De plus en plus de femmes me demandent des ventroplasties ou des opérations mammaires. Le problème, c’est que nous avons besoin de
! Avec des tarifs entre 20 % et 30 % moins élevés qu’en France et DES PRESTATIONS
ÉQUIVALENTES,
le marché est amené à se développer.
formateurs au Sénégal », relève le docteur Cheikh Tidiane Touré, spécialiste en chirurgie générale. La direction de la clinique Élysée-Dakar souhaite de son côté faire de la capitale sénégalaise le haut lieu du tourisme médical en Afrique de l’Ouest, avec « un package hébergement-avionopération et activités pour les accompagnateurs», énumère JeanJacques Caraco. Reste la question de la légalité. À l’ONMS, on regrette de ne pas avoir été consulté pour l’ouverture de la clinique. Un avis pourtant obligatoire, selon son président. ● AURÉLIE FONTAINE, à Dakar
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PORTRAITS
Des patrons bien portants
À Durban, Douala et Dakar, ils dirigent des laboratoires de référence – ou en passe de le devenir.
Célestin Tawamba Cinpharm (Cameroun)
DR
Stephen Bradley Saad Aspen Pharmacare (Afrique du Sud)
À
N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
En rachetant en 2006, grâce à un prêt de 8 milliards de F CFA, les laboratoires locaux du français Rhône-Poulenc, il devient le premier producteur de médicaments d’Afrique centrale. Il s’associe avec l’indien Cipla (déjà présent en Ouganda, au Kenya et au Ghana) pour le transfert de technologie. Un partenariat « gagnant-gagnant » pour Cinpharm, selon son patron, qui espère à terme être complètement indépendant. ● M.P.
Amadou Ouattara West Afric Pharma (Sénégal)
L
eaderauMaroc,Sothemaaconcrétisé ses ambitions d’expansion en devenant actionnaire majoritaire de West Afric Pharma, à Dakar. D’un investissement de 5 millions d’euros, l’usine mettra ses premières boîtes sur le marché d’ici à septembre. La
DR
47ans,StephenBradleySaadestà la tête du plus grand groupe pharmaceutique africain. Ce comptable de formation n’en est pas à son galop d’essai. Stagiaire au début des années 1990 chez PricewaterhouseCoopers, c’est au chevet d’une petite entreprise du secteur qu’il sent aussitôt le potentiel du marché. Il jette son dévolu sur Quickmed, dont il devient copropriétaire avec Gus Attridge. Accusant un déficit de 24 millions de rands (2,4 millions d’euros actuels), la société est fusionnée avec Covan, qui fabrique du sérum pour les yeux. La nouvelle entité est baptisée Zurich, et revendue 75 millions de rands en 1993 à Adcock Ingram. À l’âge de 29 ans, Saad se retrouve alors à la tête d’un pactole de 20 millions de rands. Dans la foulée, les deux partenaires rachètent l’université privée Varsity College (1,5 million de rands), qu’ils cèdent en 1997 pour 100 millions de rands… La même année, ils créent Aspen. Coté à la Bourse de Johannesburg, le groupe affiche aujourd’hui une capitalisation de 5 milliards de rands (500 millions d’euros) et produit 40,6 % des médicaments antiVIH du pays. ● MICHAEL PAURON
VINCENT FOURNIER/J.A.
P
atron du holding Cadyst-Invest, Célestin Tawamba, 45 ans, veut faire de l’Afrique centrale un pôle de production de médicaments génériques. Superviseur d’audit chez Ernst & Young dans les années 1990 en France, il revient au Cameroun en tant que directeur financier de la société forestière Hazim. C’est le patron de cette dernière qui, en se portant garant auprès des banques locales, lui permet d’obtenir son premier prêt, en 2001, pour se lancer dans l’agroalimentaire. Production de farine, de pâtes alimentaires, franchise Panzani… Célestin Tawamba atteint en quelques années un chiffre d’affaires de 35 milliards de F CFA (53 millions d’euros).
direction a été confiée à Amadou Ouattara. Ce Malien de 49 ans est un habitué du secteur. Après trois années d’études, il quitte les bancs de la faculté de médecine de Bamako pour devenir délégué médical puis directeur régional (Guinée, Mali, Burkina, Sénégal) chez l’américain Bristol-Myers Squibb. En 2003, il intègre le français Innotech International en tant que responsable Afrique, jusqu’à fin 2010. « Les besoins de la région sont énormes, confie-t-il. Il suffit de regarder les appelsd’offresdesÉtats,descentainesde milliards de francs CFA chaque année! » Aujourd’hui à la tête d’une usine capable d’alimenterengénériques(antiparasitaires, antidiarrhéiques…) les huit pays de l’Unionéconomiqueetmonétaireouestafricaine (UEMOA), Amadou Ouattara espère bien prendre quelques parts de marché aux multinationales. ● M.P. JEUNE AFRIQUE
Experts de l’Afrique
La Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial de cacao
Ecobank est présent en Côte d’Ivoire et dans plus de pays africains qu’aucune autre banque au monde Bénin • Burkina Faso • Burundi • Cameroun • Cap-Vert • Congo (Brazzaville) • Congo (République Démocratique) Côte d’Ivoire • Gabon • Gambie • Ghana • Guinée • Guinée-Bissau • Kenya • Libéria • Malawi • Mali • Niger Nigéria • Ouganda • République Centrafricaine • Rwanda • São Tomé e Príncipe • Sénégal • Sierra Leone Tanzanie • Tchad • Togo • Zambie • Zimbabwé Présence internationale : Dubaï, Johannesburg, Luanda, Paris
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