JA 2701 DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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MALI À quoi joue Sanogo? Le capitaine putschiste de Bamako se rêve en de Gaulle malien et en libérateur du Nord. Mais il y a bien loin de la coupe aux lèvres…

HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 53e année • No 2701 • du 14 au 20 octobre 2012

jeuneafrique.com

SAHARA ENQUÊTE SUR DES MAROCAINS À PART DOSSIER AU CŒUR DU CIEL AFRICAIN Spécial 16 pages

HOLLANDE ET L’AFRIQUE

« Ni leçons ni repentance » Démocratie, gouvernance, Algérie, Tunisie, Sahel… En marge de son premier voyage sur le continent,

le président français s’est confié à J.A. ÉDITION INTERNATIONALE ET AFRIQUE SUBSAHARIENNE

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Ce que je crois BÉCHIR BEN YAHMED • bby@jeuneafrique.com

SAMEDI 13 OCTOBRE

En attendant le 6 novembre

C

OMME VOUS, je constate le fait sans lui trouver une explication satisfaisante : l’élection présidentielle américaine, qui ne devrait concerner que les citoyens des États-Unis, suscite, tous les quatre ans, un énorme intérêt dans la plupart des pays du monde. Les médias audiovisuels et la presse écrite du monde entier commencent à relater ses principales péripéties dès les primaires des deux principaux partis qui se déroulent plusieurs mois avant le vote lui-même. À l’approche du scrutin, sentant que s’accroît la curiosité de leurs lecteurs et auditeurs, ils donnent à l’événement une place et une importance démesurées, dont aucun autre pays n’ose même rêver pour ses propres joutes électorales… ■

Nous sommes à trois semaines du mardi 6 novembre, jour où les Américains – moins de 50 % de ceux qui sont en âge de voter se donnent la peine de le faire – iront aux urnes pour élire leur président1. Cette année, ils ont le choix entre – le démocrate Barack Obama, président en exercice depuis quatre ans. C’est le premier Africain-Américain à occuper la fonction et il aspire naturellement à être réélu pour un second et dernier mandat. S’il n’était pas réélu ce serait une énorme régression. – Et le républicain Mitt Romney, qui se bat, lui, pour s’installer dans le Bureau ovale de la Maison Blanche, à la place d’Obama et récupérer ainsi le poste pour son parti. Jusqu’au début de ce mois d’octobre, les meilleurs connaisseurs de la scène américaine estimaient tous • que grâce à sa campagne électorale, qu’on jugeait bonne, le président Obama avait de grandes chances de l’emporter, et ce en dépit de la mauvaise santé économique du pays, responsable d’un chômage qui baisse trop lentement et se situe encore juste au-dessous de 8 % de la population active, • que son challengeur Mitt Romney faisait une mauvaise campagne, émaillée de gaffes, et qu’il ne pouvait gagner qu’en parvenant à imputer le mauvais état de l’économie à la gestion de son adversaire. JEUNE AFRIQUE

Jusqu’au début de ce mois, les sondages donnaient à Barack Obama une avance confortable et à son camp une grande sérénité. ■

Sur ce, intervient le premier débat télévisé entre les deux hommes. Il s’est tenu le 3 octobre, a attiré près de 70 millions de téléspectateurs et a été gagné haut la main par Mitt Romney ! Ce fait inattendu semble avoir changé ou même bouleversé la donne. Est-ce une simple anicroche ou bien un tournant de la campagne dont les effets se feront sentir le jour du vote ? Pour le moment, nul ne le sait. À la mi-octobre, la situation des deux candidats se trouve en tout cas inversée : Romney est offensif et a le vent en poupe, tandis qu’Obama voit ses positions menacées. À ce jour, il est encore sur la défensive, et dans les sondages son avance sur son concurrent a fondu comme neige au soleil… Je crois pour ma part qu’il ne s’agit que d’un incident de parcours : Obama et son camp ont largement le temps et les moyens d’en effacer les effets. Et que le 6 novembre prochain, en dépit de la crise économique dont leur pays n’est pas sorti et du taux de chômage élevé qui en découle, les Américains donneront à Barack Obama le second mandat qu’il sollicite. Je ne vous cacherai pas que je le souhaite, car je pense qu’Obama, bien qu’il ait déçu sur beaucoup de plans ceux qui ont cru en lui, sera pour les ÉtatsUnis et pour le monde un meilleur président que ne peut l’être Romney. ■

Mais mon pronostic se fonde sur d’autres raisons, qui sont, elles, objectives et structurelles et que je vous soumets ci-dessous. 1) Aux États-Unis, les électeurs refusent rarement – tout à fait exceptionnellement – un second mandat au président qui le sollicite. Au cours du XXe siècle, ce cas de figure ne s’est produit que deux fois : en 1980 et en 1992, lorsqu’ils n’ont réélu ni le démocrate Jimmy Carter ni le républicain George H. Bush. ■ N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


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Ce que je crois 2) Lentement mais inexorablement, par les effets conjugués de l’immigration et de la croissance démographique interne, les États-Unis sont en train de devenir un autre peuple : le « pays blanc » constitué pour l’essentiel d’immigrés venus d’Europe, les fameux wasp2, se transforme peu à peu en « pays de couleur ». En 2011, les naissances d’enfants blancs ont représenté, pour la première fois de l’histoire de ce pays, moins de 50 % du total des naissances. Le phénomène s’est confirmé en 2012 et il est appelé à s’accentuer car le taux de fécondité des Africains-Américains et surtout des Hispaniques est nettement plus élevé que celui des Blancs. Cela signifie qu’à moyen terme les Américains de race blanche, qui formaient la majorité de la population – plus de 60 % encore aujourd’hui –, deviendront minoritaires ; d’ici deux décennies, l’Amérique non blanche – Africains-Américains, Latinos et Asiatiques – sera de plus en plus majoritaire parmi les 350 à 400 millions de citoyens que comptera alors le pays. Or, traditionnellement, ce sont les Blancs qui vont le plus aux urnes et votent républicain en majorité ; les autres votent démocrate à une plus grande majorité : 67 % à 70 % pour les Hispaniques et 88 % pour les Africains-Américains (jusqu’à 95 % pour Obama).

minorités, y compris les Hispaniques et les Juifs, dont les deux tiers l’ont préféré à John McCain. Des États comme le Nevada, le Colorado, le Nouveau Mexique ont voté et voteront Obama ; la Californie elle-même, l’État le plus peuplé de l’Union, connu jadis pour être celui de Richard Nixon et de Ronald Reagan, fief des républicains jusqu’en 1988, est passée aux démocrates depuis Bill Clinton en 1992 et votera Obama en novembre prochain. ■

De cette impressionnante évolution démographique, les analystes tirent deux conclusions de taille : Déjà en cette année 2012, le républicain Mitt Romney et son coéquipier sont grandement désavantagés par leur inaptitude à attirer les votes des minorités de couleur, en particulier les Hispaniques (qui sont 52 millions) et les Africains-Américains (44 millions), soit au total le tiers de la population des États-Unis. Le Parti républicain aura encore plus de mal dans le futur à gagner une élection présidentielle, car les Blancs qui votent pour lui en majorité seront, en proportion, de moins en moins nombreux. Électoralement, ils pèsent moins en 2012 qu’en 2008 et pèseront de moins en moins tous les quatre ans… ●

En 2008, Barack Obama a obtenu le vote d’une grande partie des Blancs, mais s’il a été élu c’est grâce à « l’autre Amérique », celle des non-Blancs et des

1. Ainsi que les 435 membres de la Chambre des représentants et le tiers des 100 membres du Sénat. 2. White Anglo-Saxon Protestant (Anglo-Saxon blanc et protestant).

Humour, saillies et sagesse Pour vous faire sourire, grincer des dents – ou réfléchir –, ici, chaque semaine, une sélection subjective, la mienne, de ce qui a été dit ou écrit au cours des siècles par des hommes et des femmes qui avaient des choses intéressantes ou drôles à nous dire. B.B.Y.

Ì L’échec est le fondement de la réussite. Lao-tseu Ì L’homme n’est pas fait pour travailler. La preuve, c’est que ça le fatigue. Georges Courteline Ì C’est un drôle de pays, la France, où les négociations ont toujours lieu après le déclenchement des grèves et non avant. Françoise Giroud Ì Le premier des bons ménages est celui qu’on fait avec sa conscience. Victor Hugo Ì Le temps ne s’occupe pas de réaliser nos espérances ; il fait son œuvre et s’envole. Euripide N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

Ì Jeunesse ne vient pas au monde elle est constamment de ce monde. Paul Éluard Ì L’arbitraire est une arme à un si grand nombre de tranchants que ceux qui la tiennent s’y couperont éternellement les doigts. Henri Rochefort Ì Contre le racisme, il faudrait que toutes les femmes sur terre accouchent d’un petit Noir une fois dans leur vie… Brèves de comptoir Ì Les esprits sont comme les parachutes. Ils ne fonctionnent que quand ils sont ouverts. Louis Pauwels

Ì La souris ne peut connaître le jour de jeûne du chat. Maxime africaine Ì En automne, je récoltai toutes mes peines et les enterrai dans mon jardin. Lorsque avril refleurit et que la terre et le printemps célébrèrent leurs noces, mon jardin fut jonché de fleurs splendides et exceptionnelles. Khalil Gibran Ì En général, les hommes savent ce qu’ils veulent et les femmes ce qu’elles ne veulent pas. Marie Valyère Ì Un sot trouve toujours un plus sot qui l’admire. Nicolas Boileau JEUNE AFRIQUE


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Éditorial

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Marwane Ben Yahmed

FRANCE-AFRIQUE HOLLANDE, DE KINSHASA À TUNIS Dans un entretien à bâtons rompus avec J.A., le président français évoque l’Afrique subsaharienne, qu’il va découvrir, et le Maghreb, dont il est plus familier.

Ghannouchi, l’illusionniste

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E DOUTE A LONGTEMPS PLANÉ, il n’est aujourd’hui plus de mise. En tout cas plus concernant Rached Ghannouchi, chef emblématique des islamistes d’Ennahdha, qui s’était pourtant évertué jusqu’ici à rassurer ses compatriotes et la communauté internationale. À longueur d’interviews ou de déclarations, il n’avait que les mots « tolérance », « ouverture », « modernité » et « liberté » à la bouche. Vantait sans cesse les mérites du modèle turc, jurait qu’il ne voulait rien imposer à qui que ce soit et que l’islam prôné par son mouvement ne devait inquiéter personne. Mais voilà, il s’est pris les babouches dans le tapis. Internet a fait le reste : il tombe le masque dans deux vidéos qui font désormais le tour de la Toile.

Un discours aux antipodes de celui tenu dans les interviews qu’il nous a accordées en août dernier (J.A. no 2692-2693) ou en janvier… 1990, il y a plus de vingt ans (J.A. no 2653). Mais Ghannouchi n’est ni Janus ni atteint de troubles de la personnalité. L’homme le plus influent du pays est peut-être aussi le plus malin, un véritable Houdini de la politique. Il a longtemps su cacher son jeu. Mais la modernité, qu’il ne semble guère goûter, vient de lui jouer un bien mauvais tour. Une caméra, qui n’était pas cachée – tous les entretiens de Ghannouchi sont filmés par son staff –, internet, les réseaux sociaux et patatras ! Le cheval de Troie s’est transformé en éléphant dans un magasin de porcelaine. Et c’est tant mieux : le fond de la pensée de Ghannouchi ne sera plus jamais ce triangle des Bermudes où tant de ses détracteurs se sont perdus. Maintenant, les choses sont claires. Et les Tunisiens pourront enfin choisir en toute connaissance de cause. Merci l’artiste… ● N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

38 PHOTOS DE COUVERTURES : ANTONIN BORGEAUD POUR J.A. ; REBECCA BLACKWELL/AP/SIPA ; VINCENT FOURNIER POUR J.A.

Dans la première, il s’entretient avec deux salafistes. La seconde est un enregistrement téléphonique avec le cheikh Béchir Ben Hassen, figure des extrémistes religieux. En guise du « serrage de vis » à leur égard annoncé, Docteur Rached y cède la place à Mister Ghannouchi, et ses propos font froid dans le dos. En résumé, il reconnaît que les islamistes ne sont pas encore assez puissants pour imposer leurs vues, malgré le chemin parcouru depuis la révolution. Qu’il convient donc de « compléter ce capital en envahissant le pays avec des associations, des écoles. Partout ! » Il enjoint les salafistes à la patience : « Maintenant, on n’a pas une mosquée, on a le ministère des Affaires religieuses ! On n’a pas une boutique, on a l’État ! Donc il faut attendre, ce n’est qu’une question de temps. […] Mais pourquoi êtes-vous pressés ? » Et de citer l’échec du Front islamique du salut (FIS) algérien, qui aurait dû faire de même. Alger appréciera… Les laïcs ? Des suppôts de l’ex-RCD de Ben Ali. La police, l’armée, l’administration ? Aux mains de ces derniers. La charia ? Bientôt… Son projet ? Une théocratie à bâtir pierre par pierre et en catimini.

MA MALI À QUOI JOUE SA SANOGO ? Pas question est pour lui d’occuper les seconds rôles… Le chef des putschistes du 21 mars est convaincu que ses hommes et lui peuvent reprendre le Nord. Et tant pis s’ils sont les seuls à y croire.

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L A SEM A IN E D E J EU N E A F RIQ U E

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France-Afrique Hollande, de Kinshasa à Tunis Malala Yousafzai Plus forte que les talibans François Lonsény Fall Il dit non à Conté mais oui à Condé Croissance mondiale L’Afrique au-dessus des nuages Congo Charles Zacharie Bowao rattrapé par le souffle du 4 mars Unesco Otage du Proche-Orient Santé Continent enfumé Art Les Africains en queue de peloton Rwanda Kagamé : éloge de la rébellion Jordanie Démonstration de force Tour du monde

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G RA N D A N G L E

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Reportage Les Sahraouis

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Ce que je crois Par Béchir Ben Yahmed Confidentiel

JEUNE AFRIQUE


Dans Jeune Afrique et nulle part ailleurs GRAND ANGLE

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En racontant l’histoire d’un résistant africain méconnu, l’écrivain rend hommage à un homme et fustige une nation oublieuse : « La France n’a jamais reconnu ses héros noirs. »

Enquête sur des d Marocains i à partt Entre mirage d’indépendance et rêves d’autonomie, les habitants du Sud peinent encore à trouver leur place.

66 ALGÉRIE LES ANNÉES CHADLI Le troisième président algérien restera comme celui qui introduisit le multipartisme…

LITTÉRATURE TIERNO MONÉNEMBO

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DROIT DES AFFAIRES CES AVOCATS QUI CONSEILLENT L’AFRIQUE De Paris à Toronto, les cabinets internationaux scrutent le continent à la recherche des bonnes affaires.

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DOSSIER AÉRIEN LES FLOTTES AFRICAINES DÉCOLLENT Selon les analystes, le nombre d’avions de ligne bondira de 600 à plus de 1400 dans les vingt années à venir.

Spécial 16 pages

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AFRIQUE SUBSAH A R I E N N E

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ÉC O N O M IE

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Mali À quoi joue Sanogo ? Gabon Interview de l’ancien Premier ministre Casimir Oyé Mba RD Congo Pauvres députés ! RD Congo Revoilà Ndongala Guinée équatoriale Très cher Julio Iglesias Burkina Faso Les fantômes de Sankara

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Droit des affaires Ces avocats qui conseillent l’Afrique Écotourisme Du potentiel en réserve Banque Grand bond en avant pour Orabank Développement Claude Périou revient à la maison Santé Karim Bendhaou, docteur « biotech » Bourse Casa a le blues Baromètre

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MAGHREB & M OYE N - O R I E N T

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D O SSIER

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Libye Micmac à Tripoli Tribune Cinq Algériens et un changement Maghreb-Europe Vers un « new deal » Tunisie Injustes noces Algérie Les années Chadli

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Aéronautique Les flottes africaines décollent

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EUROPE, AMÉR I Q U E S, ASIE

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France L’amère pilule du lendemain États-Unis Caméléon diplomatique Parcours Dudu MacPherlin, rebondir toujours Japon Sayonara, Tokyo Enquête Itinéraire d’un enfant perdu

JEUNE AFRIQUE

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C U LT U RE & M ÉD IA S Littérature Interview de Tierno Monénembo Médias Marie-Christine Saragosse, la pacificatrice Cinéma L’humanité de Moussa Touré La semaine culturelle de Jeune Afrique VOUS & NOUS Courrier des lecteurs Post-scriptum

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Côte d’Ivoire Rapport et démentis

AFRIQUE DU SUD SABC 24 EN STAND-BY

Initialement prévu pour début septembre, le lancement de la chaîne d’information panafricaine du groupe public SABC, provisoirement baptisée SABC 24, a été reporté sine die. Les tensions internes au Congrès national africain (ANC, au pouvoir), à quelques mois de la grande conférence de décembre, pourraient expliquer en partie ce contretemps. Dotée d’un budget de 16 millions d’euros pour la première année, la chaîne a commencé son dry run (essais internes non diffusés) et prévoit à terme la création d’un service francophone. CANAL+ JIHAD EN CHAÎNE

Islam radical, les jihadistes en embuscade, tel est le titre de l’enquête qui sera N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

diffusée le 29 octobre à 22h35 sur Canal+ dans l’émission Spécial Investigation. Salafistes, jihadistes, qaïdistes : le documentaire s’intéressera aux mouvances radicales dans quatre pays au cœur de l’actualité islamiste : la Tunisie, la Libye, le Liban et la Syrie. MAROC COHABITATION PARLEMENTAIRE

Président du conseil national du Parti Authenticité et Modernité (PAM, opposition) et chef du groupe parlementaire, Hakim Benchemass mène actuellement campagne pour succéder à son camarade Mohamed Cheikh Biadillah à la présidence de la Chambre des conseillers dans les prochaines semaines. La coalition gouvernementale n’ayant pas de candidat commun, le PAM

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ccusé dans un prérapport d’experts indépendants travaillant pour l’ONU d’avoir eu un entretien avec des pro-Gbagbo, le capitaine Sanogo, chef de la junte malienne, a envoyé la semaine dernière deux émissaires à Abidjan pour rencontrer Guillaume Soro au Golf Hôtel. Objectif : passer le message qu’il ne s’associerait pas à un projet de déstabilisation. Réponse du président de l’Assemblée : « Ne vous mettez pas en travers du travail de reconstruction en Côte d’Ivoire, vous pourriez avoir des ennuis avec la communauté internationale. » La divulgation le 6 octobre par RFI de ce prérapport avant son examen au Conseil de sécurité a par ailleurs suscité une vague de réactions des proGbagbo (Charles Blé Goudé, Marcel Gossio, Nady Bamba…), qui ont contesté les allégations portées à leur encontre (participation à des réunions politiques et financement d’une rébellion). La seconde épouse du président Gbagbo a même engagé un nouvel avocat, le Parisien Alexis Guedj, pour la défendre. Selon lui, « ces allégations préparent la voie à des initiatives que le gouvernement ivoirien paraît vouloir prendre contre les exilés réfugiés à l’étranger ». Du côté du ministère français de la Défense, on confirme que des réunions entre pro-Gbagbo se sont tenues en Gambie et au Ghana cet été, mais on doute du soutien financier de Nady Bamba à des opérations armées menées depuis le Ghana et le Liberia. Les supposés liens entre les militaires pro-Gbagbo et les jihadistes d’Ansar Eddine n’ont pas, non plus, pu être recoupés. ●

! NADY BAMBA, la seconde épouse de Laurent Gbagbo.

a bon espoir de rééditer sa victoire de 2009. RD CONGO SOS CENI

Abdou Diouf, le secrétaire général de la Francophonie, espérait le vote de deux lois en RD Congo avant le sommet de Kinshasa, du 12 au 14 octobre. Si la création d’une Commission nationale des droits de l’homme a été adoptée le 10 octobre, LE CHIFFRE

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C’est le nombre de voitures rappelées par Toyota en Afrique en raison d’un défaut mineur sur les lève-vitres de ses

la réforme de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), elle, attendra. L’opposition demande une composition paritaire du bureau de la Ceni et la mise sur pied d’une commission plénière pour le contrôler, tandis que la majorité présidentielle propose une composition calquée sur les équilibres de l’Assemblée. Les conditions posées par François Hollande modèles Yaris, Auris, RAV4 et Corolla. L’opération concerne notamment 14 511 véhicules en Algérie, 8 737 au Maroc et 2 689 en Afrique de l’Ouest francophone. À l’échelle mondiale, le problème touche 7,4 millions d’automobiles.

JEUNE AFRIQUE


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Politique, économie, culture & société

Conseil de sécurité Kigali frappe à la porte LE RWANDA OCCUPERA-T-IL L’UN DES CINQ SIÈGES du Conseil de sécurité de l’ONU dévolus aux membres non permanents pour la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 ? Premier élément de réponse le 18 octobre, jour du vote à l’Assemblée générale au cours duquel les pays candidats doivent recueillir les deux tiers des voix des présents pour être déclarés élus. Sur le papier, le Rwanda a toutes ses chances, puisqu’il est l’unique

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THÉÂTRE DEUX CONGOLAIS EN AVIGNON

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Artiste associé de la prochaine édition du Festival d’Avignon (juillet 2013), le Congolais DieudonnéNiangounaainvité son compatriote DeLaVallet Bidiefono à monter sur les planchesdelacitédesPapes. Le chorégraphe originaire de Pointe-Noire présentera Au-delà, une pièce qui évoque le rapport à la mort, car, explique-t-il, « elle nous accompagne au quotidien dans mon pays ». I LY

HOLLANDE À ALGER PROGRAMME CHARGÉ L’Élysée finalise actuellement les préparatifs de la visite du président français en Algérie qui devrait avoir lieu au début de décembre. Une visite de deux jours avec un programme chargé. François Hollande aura un entretien en tête à tête avec le président Bouteflika au cours duquel il devrait aborder plusieurs sujets (relation bilatérale, crise au Sahel, Syrie, coopération méditerranéenne…), fera un discours devant l’Assemblée nationale, prononcera une adresse à la jeunesse algérienne et rendra visite à la communauté française. Il devrait aussi faire un geste qui reste à déterminer (remise des clés de la ville d’Alger ou du canon de Baba Merzoug gardé dans l’arsenal de la ville de Brest, dédommagement des victimes des essais

nucléaire…). « Nous sommes prêts à faire un vrai geste, mais on sera aussi sensibles à l’accusé de réception », explique un proche du chef de l’État. En d’autres termes, la France n’éludera pas la question mémorielle – un débat qui prendra encore plusieurs années – mais souhaite inscrire la relation bilatérale dans une nouvelle dimension : un rapport d’égal à égal et de coopération multiforme (dialogue politique, défense et sécurité, enseignement, jeunesse, économie, énergie…).

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pour venir à Kinshasa sont en tout cas loin d’avoir été remplies : le procès Chebeya n’a pas repris et la réforme de la Ceni est mal engagée.

postulant po présenté par le groupe africain – lequel détient un siège réservé au sein du Conseil. Mais des manœuvres de dernière minute émanant de certains membres me permanents peu dési désireux de voir accéder en leur sein un pays qu’ils accusent d’ingérence en RD Congo ne sont pas à exclure. À noter que les règles onusiennes prévoient un nombre indéfini de tours de scrutin jusqu’à ce que la majorité des deux tiers soit atteinte. ●

UNION AFRICAINE DLAMINI-ZUMA CHOISIT SON « DIRCAB »

C’est un quadra burkinabè que la Sud-Africaine et toute nouvelle présidente de la Commission de l’Union africaine (UA), Nkosazana Dlamini-Zuma, a choisi comme directeur de cabinet : Jean-Baptiste Natama. Celui-ci secondait jusqu’à présent Sékouba Konaté, l’ex-chef de l’État guinéen, au poste de haut représentant adjoint de l’Union africaine pour l’opérationnalisation de la Force africaine en attente ! JEAN-BAPTISTE NATAMA, directeur de cabinet de la présidente de la Commission de l’Union africaine.

(FAA). Il est l’un des rares francophones à figurer dans l’entourage immédiat de Dlamini-Zuma. CHOCOLAT IVOIRIEN CEVITAL TRÈS GOURMAND

Les négociations laborieuses entre Charles Kader Gooré, président du groupe CKG Holding, et le chocolatier français Cémoi autour de la reprise de la SN Chocodi, filiale de CKG Holding, ont mis en selle un nouvel acquéreur : Cevital. Le puissant groupe agroalimentaire privé algérien, qui prépare son implantation en Côte d’Ivoire dans le sucre, le riz et l’huile, a ouvert des discussions pour la création d’un partenariat avec SN Chocodi en vue de relancer l’usine de transformation de fèves de cacao. À Abidjan, Hamed Zarour, administrateur-directeur général de la Compagnie internationale pour le commerce et l’agroindustrie (Cica), partenaire local de Cevital, suit le dossier de près. MALI DICKO DIT STOP

Jusque-là interlocuteur privilégié des islamistes qui contrôlent le Nord-Mali, le Haut Conseil islamique (HCI) de Mahmoud Dicko ne compte plus négocier avec le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), qui contrôle Gao. « Ce ne sont pas des Maliens qui sont à sa tête et on ne discute pas de l’avenir du pays avec des étrangers, lâche-t-on au sein du HCI. De plus, nous ne voulons pas de la charia telle qu’elle est appliquée dans le Nord. » N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


La semaine de Jeune Afrique

FRANCE-AFRIQUE

Hollande, de Kinshasa à Tunis Dans un entretien à bâtons rompus avec J.A., quelques heures avant de s’envoler pour sa première tournée sur le continent, le président français évoquait l’Afrique subsaharienne, qu’il s’apprêtait à découvrir, et le Maghreb, dont il est plus familier. Confidences d’un homme curieux et attentif. FRANÇOIS SOUDAN

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icolas Sarkozy avait à peine et lu attentivement les fiches préparées par ses lu, dans l’avion qui l’amenait collaborateurs. Posture « normale » d’un président moins à Dakar, le texte tant controversé de son fameux discours, modeste qu’il n’en a l’air, pour un voyage forrédigé par la plume fiévreuse cément peu banal, chaque chef d’État français et passéiste d’Henri Guaino. étant attendu au tournant de sa première tournée François Hollande, lui, aura pris son temps. Non subsaharienne. Lors de l’entretien à bâtons rompus seulement pour relire, annoter et faire circuler qu’il a eu avec J.A. au soir du 11 octobre, François la teneur de ses allocutions des 12 et 13 octobre Hollande n’a pas caché ses hésitations prélimien terres sénégalaise et congolaise – la mouture naires à se rendre chez son homologue congolais, définitive en a été avalisée à l’aube du vendredi 12, Joseph Kabila : y aller, dit-il en substance, aurait alors que le président se rendait à pu donner l’impression que rien l’aéroport –, mais aussi pour s’imn’avait changé par rapport à la poli« Ma vision, prégner des réalités d’un contitique suivie par ses prédécesseurs, c’est ni nent qu’il connaissait mal. Quatre mais ne pas y aller, c’était infliger un camouflet au régime et en définijours avant son départ, François repentance, ni Hollande a donc reçu à déjeuner afropessimisme, tive « envoyer un mauvais message à l’Afrique ». Les pressions de la plusieurs intellectuels africains ni leçons totalité des chefs d’État d’Afrique de Paris, dont les historiens Elikia M’Bokolo et Mamadou Diouf, ainsi francophone et l’insistance d’Abdou à donner. » que des défenseurs des droits de Diouf, patron de la Francophonie, l’homme, auxquels il a confié qu’en ont fait le reste. Si le président frandehors de la Somalie des années 1970 (où il a çais s’est finalement rendu à Kinshasa, c’est, dit-il, effectué un court stage de futur énarque), de parce qu’il fallait montrer le soutien de Paris à un la Sierra Leone des années 1980 (ou plutôt de pays qui « fait face à une agression extérieure » ses plages de sable blanc, fréquentées comme (sous-entendu : rwandaise), parce qu’il a estimé touriste) et de quelques escapades au Sénégal, qu’il lui serait possible de « dire et faire certaines l’Afrique restait encore pour lui terra incognita. choses » – ce qui a effectivement été le cas – et Il a donc posé des questions, écouté les réponses parce que les conditions démocratiques préalables N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

SEYLLOU/AFP

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JEUNE AFRIQUE


à sa venue sont sinon remplies, tout au moins en voie de l’être. Pour le reste, le successeur de Nicolas Sarkozy semble s’étonner du reproche de « deux poids et deux mesures » formulé tant par les chefs d’État visés par l’affaire dite des biens mal acquis que par les autorités de Kinshasa, dont il a jugé la gouvernance « inacceptable ». Pourquoi, à cette aune, ne pas critiquer le Qatar, qui ne tolère ni partis, ni électionsnationales,niopposition,etdontl’essentiel des achats immobiliers en France est effectué par la famille de l’émir ? « L’Afrique est un continent pour lequel nous avons une grande affection et une grande considération. Une grande partie parle notre langue. Je dirais même que le français est une langue africaine. C’est aussi un continent où la France a eu des responsabilités et une histoire qu’il faut savoir regarder avec honnêteté et lucidité. JEUNE AFRIQUE

! AVEC LE CHEF DE L’ÉTAT SÉNÉGALAIS, MACKY SALL, à son arrivée à Dakar, le 12 octobre.

C’est parce que nous en attendons beaucoup que nous sommes plus exigeants à son égard. Ses chefs d’État ne doivent pas en prendre ombrage, bien au contraire. » Qui aime bien châtie bien : il n’est pas sûr que cette réponse convainque les intéressés. BONNE VOLONTÉ. Avant d’entamer son périple de

deux jours au sud du Sahara, François Hollande avait reçu à l’Élysée, ces quatre derniers mois, une petite dizaine de leaders du continent selon un timing précis : « J’ai souhaité commencer avec le président en exercice de l’Union africaine, Thomas Boni Yayi, pour le symbole et parce qu’à mon sens aucun pays ne devait être reçu en premier. Ensuite, j’ai accueilli ceux qui venaient d’être élus par un processus parfois difficile, mais démocratique: Macky Sall, Alassane Ouattara, Alpha Condé, Mahamadou Issoufou. Enfin, sont venus d’autres N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


La semaine de J.A. L’événement dont les élections ont pu paraître discutables, mais ont fini par être acceptées. » À chaque fois, avouet-il, il a été agréablement surpris par « la bonne volonté et la grande conscience des enjeux » de ses interlocuteurs. À chaque fois, il a développé devant eux les grands axes de « sa » politique, détaillée le 12 octobre devant l’Assemblée nationale sénégalaise : démocratie, libertés publiques, soutien aux ONG, bonne gouvernance, porte close aux réseaux. Conscient qu’il ne suffit pas de répéter que « le temps de la Françafrique est révolu » (d’autres l’ont dit avant lui) pour que l’hydre ne renaisse pas, le président entend passer de la parole aux actes. « Ma vision de l’Afrique, c’est ni repentance, ni afropessimisme, ni leçons à donner, dit-il. Je considère que l’Afrique, ce continent jeune, est tourné vers l’avenir. Je veux donc me tourner vers ce qu’il peut apporter de mieux ou de plus : croissance, bonne gouvernance, démocratie, lutte contre la corruption. » Au « ni ingérence ni indifférence » d’un Lionel Jospin pour qui le continent était un océan de perdition moralement peu fréquentable, François Hollande préfère un slogan nettement plus volontariste et dans le fond plus progressiste: « pas d’ingérence mais des exigences. »

ANTONIN BORGEAUD POUR J.A.

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! LORS DE L’ENTRETIEN, À L’ÉLYSÉE, le 11 octobre, avec François Soudan et Marwane Ben Yahmed.

PAS DE TROUPES AU MALI. Reste la crise malienne, présente dans les deux discours de Dakar et de Kinshasa. François Hollande, très engagé personnellement dans le soutien au déploiement d’une force africaine afin de reconquérir le nord du pays, confie qu’il s’agit pour lui d’une préoccupation quotidienne. Assurément, parce que cette crise risque de le transformer en chef de guerre et que sa résolution va prendre du temps. Ce sera

l’une des grandes affaires de son quinquennat. Interrogé sur les réticences algériennes, il nous dit les « entendre » et « en tenir compte ». « Ce que disent les Algériens, ce qui les préoccupe, c’est la suite, le jour d’après. Effectivement, il ne suffit pas de chasser les terroristes d’Aqmi [Al-Qaïda au Maghreb islamique, NDLR] et du Mujao [Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest], ils iront ailleurs. Mais l’Algérie, qui a payé un lourd tribut au terrorisme, est concernée et elle le sait. Elle n’interviendra pas militairement. La France non plus d’ailleurs, si ce n’est par une aide logistique et financière. Je suis formel : nous n’aurons pas de troupes au sol. » Pas même des forces spéciales. Loin du pèlerinage à Gorée et de l’ambiance chaloupée de Kinshasa, c’est dans les sables caillouteux de l’Azawad que se joue une part de l’avenir franco-africain. ●

ALGÉRIE, SAHARA, SALAFISTES: CE QU’IL EN DIT

C’

est connu, François Hollande est plus à l’aise au Maghreb qu’en Afrique subsaharienne et attache une grande importance aux bonnes relations de la France avec cette partie du continent. Deux pays retiennent particulièrement son attention. L’Algérie, d’abord, compte tenu de son passé commun et douloureux avec la France. C’est en outre un pays qu’il connaît bien pour y avoir effectué son stage de l’École nationale d’administration (ENA) à la fin des années 1970 et pour s’y être rendu à de nombreuses reprises. Il a longuement conversé, le 5 octobre, à Malte, avec le nouveau Premier ministre Abdelmalek Sellal, en marge du sommet 5+5. Il a noté une volonté plus clairement affichée par Alger d’accélérer le développement économique. Hollande s’y rendra en visite officielle début décembre. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

Quelle tonalité compte-t-il donner à ce déplacement? « Il y aura des gestes, oui, mais pas de repentance, nous a-t-il expliqué. Le président Bouteflika trouve lui-même que, sur ce sujet, cela suffit. Ce ne sera donc pas un voyage mémoriel. » Sur le dossier du Sahara, « la position de la France ne change pas: une résolution de l’ONU et le projet d’autonomie, intéressant, mais qui n’avance pas », constate-t-il. VIGILANT. La Tunisie, ensuite. Son

diagnostic? Des difficultés évidentes, « les soubresauts d’une démocratie naissante », précise-t-il, qui nécessitent de demeurer vigilant sans pour autant se permettre de donner des leçons. « Il serait injuste de faire le procès de la Tunisie, compte tenu des nombreux silences lors de la période précédente », explique-t-il. Le président

tunisien Moncef Marzouki semble être un interlocuteur privilégié. « Il me dit que ce qui compte le plus, c’est l’économie et le développement. Il confirme qu’ils [la troïka au pouvoir, NDLR] parviennent à travailler ensemble et que la Constitution sera prête dans les délais prévus. Je vois donc des progrès incontestables, mais aussi des risques, comme dans toute révolution. » Parmi ceux-ci, l’émergence de mouvements salafistes, vis-à-vis desquels les dirigeants actuels « font preuve de clarté », estime François Hollande. Quant aux propos du chef d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, entendus dans deux vidéos mises en ligne récemment dans lesquelles il encourage notamment les salafistes au détriment des laïcs pour une Tunisie islamisée, « il y aura évidemment des explications à demander », conclut-il. ● MARWANE BEN YAHMED JEUNE AFRIQUE



La semaine de J.A. Les gens

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K.M. CHAUDARY/AP/SIPA

! MANIFESTATION DE SOUTIEN, le 10 octobre, à Lahore, dans le nord-est du pays.

Malala Yousafzai Plus forte que les talibans Au Pakistan, des extrémistes s’en sont pris à cette toute jeune militante féministe, la laissant pour morte dans un bus scolaire.

C

est l’histoire d’une jeune fille de 14 ans qui a fait peur à de grands gaillards, plus forts, plus « vertueux »… et bien sûr plus nombreux. Si bien qu’ils ont décidé de l’éliminer, purement et simplement. Et comme leur courage n’a d’égal que leur finesse, ils ont choisi en plus d’y mettre la manière. À Mingora, la plus grande ville de la vallée de Swat, dans le nord du Pakistan, Malala Yousafzai se trouvait, ce 9 octobre, dans le bus scolaire qui la ramenait chez elle. Deux hommes armés sont montés à bord. L’un deux a demandé : « Qui est Malala Yousafzai ? » Après avoir identifié leur cible, ils lui ont tiré une balle en pleine tête et une autre dans l’épaule. L’adolescenteestlaisséepourmorte,tandis

que deux de ses camarades sont blessées. Quelques heures après, le Mouvement des talibans du Pakistan revendique l’attaque, affirmant dans un communiqué qu’il « ne croit pas aux attaques envers les femmes, mais [que] quiconque dirige une campagne contre l’islam et la charia doit être tué ». « L’attaque de Malala Yousafzai a choqué un Pakistan “inchoquable” » étant donné « la fréquence des attentats à la bombe et des meurtres ciblés », écrit Samira Shackle, journaliste basée à Karachi. À son annonce, l’attaque a en effet suscité une vague d’émotion dans le pays. Les condamnations ont afflué – de l’étranger aussi, bien sûr – et des rassemblements de soutien ont été organisés. Comme si le nom de cette jeune fille, Yousafzai, qui

signifie « éprouvée par le chagrin » en ourdou, avait soudainement pris sens auprès d’une majorité de Pakistanais. Un symbole, voilà ce qu’est devenue Malala. Le mot est fort, mais pesé. Il est surtout incontournable à l’évocation de sonparcours.En2009,âgéealorsde11ans, Malala Yousafzai vit déjà à Mingora, région aux mains des talibans depuis deux ans. À son niveau, celui d’une petite fille qui va simplement à l’école, et à sa façon, celle d’une enfant née avec internet, elle décide de dénoncer l’obsession des talibans à interdire l’instruction aux femmes – ils ont détruit plus de 200 écoles pour filles. Sur son blog, « Journal d’une écolière pakistanaise », publié sur la version en ourdou du site de la BBC, elle s’engage dans un combat idéologique contre des ennemis qui ne tardent pas à la menacer. MIRACLE. Poussée à l’exil avec sa famille,

elle ne rentre chez elle qu’après la défaite des talibans face à l’armée pakistanaise, au milieu de l’année 2009. Dès lors, elle milite pourlacausefémininedanssonensemble. Plateaux télé, rencontres, interventions publiques…Lajeunefilleselancedansune véritable campagne. Sa notoriété grandit, traverse les frontières. En 2011, elle reçoit le Prix national pour la paix, décerné par le gouvernement pakistanais. « Je pense que mon peuple a besoin de moi et que je dois élever ma voix. J’ai des droits. J’ai le droit à une éducation, j’ai le droit de m’amuser, de chanter, d’aller au marché. J’ai le droit de m’exprimer », déclare-t-elle dans une interview à la chaîne américaine CNN, fin 2011. C’est ce qu’elle a fait, avec bravoure, avantd’êtresauvagementréduiteausilence le9octobre.Impossiblepourlemomentde savoir jusqu’à quand, car l’état de la jeune fille, qui a miraculeusement survécu, est toujours critique. Les talibans, eux, ont promis de recommencer « si jamais elle survivait ». ● HABY NIAKATE

NOMINATIONS

NAÏMA CHARAÏ FRANCE La conseillère régionale socialiste d’Aquitaine, d’origine marocaine, a été nommée le 3 octobre à la présidence de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé), après la démission de Salima Saa (UMP). N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

LAURENCE POPE ÉTATS-UNIS Le 11 octobre, cet ancien diplomate a été nommé par la Maison Blanche chargé d’affaires en Libye, après la mort de l’ambassadeur Christopher Stevens, tué lors de l’attaque contre le consulat de Benghazi le 11 septembre. JEUNE AFRIQUE


EN HAUSSE

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MARIE-MADELEINE KALALA

François Lonsény Fall Il dit non à Conté mais oui à Condé

L’ex-ministre des Droits humains de RD Congo a été nommée par le pape Benoît XVI membre du Conseil pontifical Justice et Paix, l’un des plus importants dicastères de la Curie romaine, qui compte aussi peu d’Africains que de femmes.

L’ex-Premier ministre de Lansana Conté, qui avait démissionné avec éclat en 2004, a été nommé ministre des Affaires étrangères par Alpha Condé.

JOAQUIM BARBOSA Rapporteur du procès sur le vaste système d’achat de votes au Parlement sous l’ère Lula, ce magistrat est devenu, le 10 octobre, le premier président noir de la Cour suprême du Brésil. Le pays compte 52 % d’Afro-descendants.

J

«

CHRISTOPHE LE BEC

! ENTRE 2000 ET 2004, il a contribué à sortir le pays de son isolement.

MO YAN

DR

Le prix Nobel de Littérature a été décerné à l’écrivain chinois, le 11 octobre. Selon l’Académie suédoise, son œuvre unit, avec un « réalisme hallucinatoire », « imagination et réalité, perspective historique et sociale ». EN BAISSE

DIEUDONNÉ M’BALA M’BALA L’humoriste français est poursuivi par le Trésor public qui lui réclame 887 135 euros pour ne pas avoir payé tous ses impôts depuis 1997. Il va devoir se séparer d’une partie de son patrimoine immobilier. AIRES ALI Le Premier ministre mozambicain a été limogé par le président Armando Guebuza. Alors qu’il était l’un des favoris pour lui succéder, il a échoué à se faire élire au bureau politique du Frelimo, passage obligé pour accéder à la tête du pays. ROGER KEMADJOU Jugé coresponsable du détournement de plus de 30 millions d’euros entre 2004 et 2008, l’ex-responsable du bureau extérieur de la Banque des États de l’Afrique centrale à Paris a été condamné au Cameroun à la prison à vie. DR

YOURI LENQUETTE POUR J.A.

e retourne à mes premières amours », se réjouissait François Lonsény Fall le 8 octobre à Paris, en route pour le sommet de la Francophonie à Kinshasa. Depuis plusieurs mois, ce familier des institutions internationales se préparait à prendre la responsabilité des Affaires étrangères, qu’il avait déjà assumée entre 2002 et 2004. « Secrétaire général de la présidence [depuis décembre 2010, NDLR], j’ai été de toutes les missions à l’étranger, je suis au fait des dossiers », confiait-il. Sa nomination, officialisée le 5 octobre, était attendue à Conakry. Haut fonctionnaire des Affaires étrangères guinéennes – notamment en France, au Nigeria et en Égypte –, François Fall était connu pour deux faits d’armes. Ambassadeur à l’ONU de 2000 à 2002, il avait fait élire la Guinée parmi les trois États représentant l’Afrique au Conseil de sécurité. Un succès qui lui avait valu son premier mandat de ministre des Affaires étrangères. À ce poste, il avait réussi à sortir le pays de son isolement international. Autre action marquante, sa démission fracassante, en avril 2004, du poste de Premier ministre, à la suite de désaccords avec le président Lansana Conté. « Le gros problème de notre pays, c’est que partout où l’on met la tête pour assainir, on trouve Conté au bout », confiait alors le juriste. Représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en Somalie de 2005 à 2007, il avait eu plus de mal à faire entendre ses analyses au Conseil de sécurité. Depuis la fin du régime Conté, le diplomate originaire de Kankan s’est investi en politique. Candidat malheureux à la présidentielle de 2010, il s’est rallié à Alpha Condé au second tour. Aux Affaires étrangères, il « compte multiplier les partenariats économiques dans trois secteurs essentiels: l’énergie, l’agriculture et les mines, en particulier avec les pays émergents, notamment le Brésil, la Corée du Sud et la Chine ». Mais aussi restructurer son ministère: « Les effectifs en ambassade sont pléthoriques, il faudra les réduire. Il y aura une exigence de professionnalisme. » ●

JEUNE AFRIQUE

N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


La semaine de J.A. Décryptage

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Croissance mondiale L’Afrique au-dessus des nuages Alors que l’Europe est en plein marasme, l’activité économique sera soutenue sur le continent en 2012 et 2013, estime le FMI.

d’intensité. Comme on l’a encore constaté en 2012, les pays en récession sont le plus souvent en proie à des troubles : Gambie, Guinée-Bissau, Mali, Soudan du Sud et Malawi. La RD Congo, sujette à une instabilité persistante, fait exception à la règle et affichera un taux de croissance à la chinoise (7,1 % en 2012 et 8,2 % en 2013). Quant au pétrole, il n’est plus la panacée, comme le prouve l’exemple du Ghana, du Burkina ou du Rwanda, pays peu ou pas producteurs, qui dament le pion à l’Angola.

VINCENT FOURNIER/J.A.

SÉQUELLES. La seule ombre au tableau

L’USINE Inyange à Remera (Rwanda), spécialisée dans l’agroalimentaire.

L

es afro-pessimistes n’en croiront pas leurs yeux : le Fonds monétaire international (FMI) a confirmé le 9 octobre à Tokyo, à l’occasion de son assemblée annuelle, que la croissance de l’Afrique subsaharienne atteindrait 5 % cette année et 5,7 % en 2013. Seule l’Asie émergente fera mieux avec 6,7 % en 2012 et 7,2 % l’an prochain. L’Amérique latine devrait tabler sur 3,2 % et 3,9 %, l’Europe centrale et l’Europe orientale sur 2 % et 2,6 %. Globalement, les pays riches se traîneront à 1,3 % et 1,5 % en raison des piètres performances de l’Union européenne, seule région du

monde en récession à – 0,2 % en 2012 et en faible reprise à + 0,5 % en 2013. Pourquoi l’Afrique fait-elle mieux que la moyenne mondiale (3,3 % et 3,6 %) ? Les experts du Fonds avancent trois raisons. D’abord, elle a amélioré ses pratiques de gouvernance grâce aux douloureux ajustements structurels des années 1990-2000. Ensuite, elle a profité de l’appétence des pays industrialisés et émergents pour ses matières premières. Enfin, l’annulation de plusieurs dettes nationales continue de distiller ses effets bénéfiques. Autre facteur non négligeable, les conflits du continent africain ont diminué

est l’Afrique du Sud, dont la croissance annoncée (2,6 %, puis 3 %) n’est pas digne du géant industriel du continent. Le FMI estime que celui-ci pâtit de son économie ouverte, et donc du ralentissement de la croissance mondiale et de l’atonie européenne. L’Afrique du Nord, elle aussi, a été affectée par l’affaiblissement du Vieux Continent, ainsi que par les séquelles du Printemps arabe. La progression spectaculaire du Maghreb (19 % en 2012 et 6 % en 2013) est trompeuse, car elle est due à la résurrection de la Libye (122 % et 16,7 %) après sa descente aux enfers de 2011. Seule la Mauritanie tire vraiment son épingle du jeu (5,3 % et 6,9 %). La croissance des autres pays de la région (Algérie, Égypte, Tunisie) demeure insuffisante, entre 2 % et 3,4 %, le Maroc semblant promis à une accélération l’an prochain (5,5 %). Ne crions pas trop tôt victoire : le FMI prévient qu’une aggravation de l’état de l’économie mondiale pourrait coûter un point de croissance à l’Afrique. Les pays dont les exportations sont peu diversifiées et les réserves en devises peu abondantes ne sont donc pas à l’abri d’une chute brutale. ● ALAIN FAUJAS, à Tokyo

À SUIVRE LA SEMAINE PROCHAINE

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OCTOBRE Il y a un an, enTunisie, se tenait le premier scrutin libre depuis l’indépendance : l’Assemblée constituante qui en est issue a notamment élu le président et rédige aujourd’hui une Constitution. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

26

OCTOBRE Le Parlement européen désignera le lauréat du prix Sakharov pour la liberté de l’esprit. En 2011, cinq activistes du Printemps arabe avaient été distingués, dont Mohamed Bouazizi.

26 OCTOBRE4 NOVEMBRE

Au Burkina, 13e édition du Salon international de l’artisanat de Ouagadougou (SIAO), sur le thème « Artisanat africain et émergence économique ». JEUNE AFRIQUE


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Congo Charles Zacharie Bowao rattrapé par le souffle du 4 mars L’ancien ministre de la Défense a été inculpé dans le cadre de l’enquête sur l’explosion de la caserne de Mpila, à Brazzaville. Il dénonce une « machination politicienne ». « illégale », estimant que si faute il y a «pendantl’exerciced’unefonctiongouvernementale, la responsabilité [est] morale et collective », et affirme être la victime d’une « machination politicienne », « organisée par certaines personnalités autour du ministre de la Justice » pour l’éloigner du président. Pour lui, « une telle inculpation devrait concerner toute la chaîne de commandement militaire, voire ceux qui avaient la responsabilité de financement et de construction des dépôts de munitions, des magasins d’armes et des nouvelles casernes ». Des militaires ont d’ailleurs été arrêtés depuis les événements du 4 mars. RUPTURE. Professeur de philosophie

à l’université de Brazzaville, Charles Zacharie Bowao est un membre éminent du PCT, qui des années durant s’est battu pour la rupture avec le marxisme-léninisme. Ce courant bénéficiait de l’oreille attentive de Denis Sassou Nguesso. Le président l’a-t-il lâché ? « Sassou veut comprendre ce qui s’est réellement passé le 4 mars », répond un analyste. À l’époque, le ministre de la Défense avait

PETER BUSOMOKE/AFP

S

a non-reconduction dans ses fonctions de ministre de la Défense lors du dernier remaniement gouvernemental, le 25 septembre, était-elle un mauvais présage ? En tout cas, il ne s’est pas passé beaucoup de temps avant que Charles Zacharie Bowao se retrouve devant le doyen des juges d’instruction du tribunal de grande instance de Brazzaville, dans le cadre de l’enquête sur l’explosion, le 4 mars, d’un dépôt de munitions dans une caserne du quartier de Mpila. Le 4 octobre, le magistrat lui a signifié son inculpation pour « maladresse, imprudence, inattention et négligence ayant causé les événements du 4 mars et occasionné des morts, des blessures et des dégâts matériels importants ». L’ancien ministre s’est ensuite entendu notifier sa mise en liberté provisoire, relate-t-il dans une lettre datée du 7 octobre et adressée au secrétaire général et au bureau politique (dont il est membre) du Parti congolais du travail (PCT, au pouvoir). Dans ce courrier, Bowao dit n’avoir « pas reconnu les faits ». Il juge l’inculpation

Il a perdu son poste LORS DU REMANIEMENT DU 25 SEPTEMBRE.

été très critiqué pour sa gestion de la catastrophe. Sans s’être rendu sur le lieu du drame, il avait assuré à la télévision qu’il ne s’agissait que d’un « incident », minimisant l’ampleur des dégâts. Le bilan des explosions de Mpila fut lourd: environ 300 morts, plus de 2000 blessés et quelque 17 000 sans-abris. ● TSHITENGE LUBABU M.K.

Unesco Otage du Proche-Orient

Privée des subsides américains depuis qu’elle a accepté la Palestine comme État membre, l’organisation est dans une situation financière dramatique.

G

el des embauches, recherche désespérée de financements et arrêt de certains projets pour sauvegarder les programmes prioritaires : ces mesures d’austérité ne concernent pas quelque État touché par la crise économique mais l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), victime de la géopolitique proche-orientale. En admettant, il y a près de un an, la Palestine comme État membre, l’agence s’est privée de la cotisation des États-Unis, soit 22 % de son budget. Votées en 1990 et 1994, deux lois américaines bloquent en effet le

JEUNE AFRIQUE

financementdesagencesdesNationsunies ayant accepté la Palestine comme État membre à part entière en l’absence d’un accord de paix. L’administration Obama a bien tenté de les amender. En vain. Un fonds d’urgence pour l’Unesco a été créé, qui a déjà reçu 51 millions d’euros sur les 53 promis. Solidaires de la Palestine, les pays musulmans sont les premiers donateurs : le Qatar et l’Arabie saoudite ont versé 15,5 millions d’euros chacun, l’Indonésie 4,5 millions, l’Algérie a signé pour 5 millions, la Turquie pour 3,9 millions et Oman pour 1,5 million. L’Afrique s’est aussi montrée généreuse : le Gabon,

le Congo, le Cameroun, le Tchad, le Bénin et la Namibie apportent leur contribution. Mais ces engagements n’atteignent pas la moitié de la perte enregistrée et seront difficilement renouvelables si aucune solution n’est trouvée. La possible arrivée de Mitt Romney à la Maison Blanche ne devrait pas arranger les choses,celui-ciayantmanifestésadéfiance à l’égard des Palestiniens. Mais qui sait ? Peut-être le républicain se montrerait-il plus favorable à leur cause en actes qu’en paroles, à l’inverse du démocrate Obama, qui a beaucoup déçu après de beaux discours. ● LAURENT DE SAINT PÉRIER N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


La semaine de J.A. Décryptage

Tunisie

Maroc

Algérie

Santé Continent enfumé

Mauritanie

Pour la première fois, la fondation mondiale du poumon publie son Atlas du tabac en français. Car les industriels du secteur ont trouvé une nouvelle proie : l’Afrique.

L

Africain fume plus aujourd’hui qu’il y a dix ans. Selon la World Lung Foundation (WLF), « la consommation de cigarettes a augmenté de 57 % » sur le continent en une décennie. Une avancée du tabagisme qui a poussé l’ONG internationale basée à New York à publier pour la première fois une édition française de son Atlas du tabac, le 1er octobre. Objectif : plaider en faveur de la lutte antitabac face aux interférences croissantes des fabricants, qui profitent de l’absence ou de l’inefficacité des législations en la matière dans nombre de pays africains. IllustrationéloquenteàDakarmême,où un projet de loi antitabac on ne peut plus stricte traîne dans les tiroirs du ministère de la Santé depuis 2008. L’implantation sur le territoire sénégalais de trois grands fabricants de cigarettes – le géant américain Philip Morris, British American Tobacco et la MTOA, filiale sénégalaise d’Imperial Tobacco – ne serait pas étrangère à ce blocage. Il s’agirait « de préserver un environnement propice à leurs affaires », selon les associations locales antitabac.

SOURCE : ATLAS DU TABAC 2012

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Sénégal Gambie GuinéeBissau

Guinée

Sierra Leone Liberia

Libye

Niger

Mali

Moins de 10 Entre 10 et 49

Érythrée

Soudan

Tchad

Burkina Faso Côte d’Ivoire

Égypte

Soudan Éthiopie Centrafrique du Sud Cameroun Ouganda Somalie Ghana Bénin Togo Kenya Gabon Rwanda République démocratique Burundi Guinée du Congo Tanzanie équatoriale Nigeria

Comores

Entre 50 et 99

Angola

Entre 100 et 199 Entre 200 et 499 Entre 500 et 999 Plus de 1000

Namibie

Zambie

Malawi

Zimbabwe Botswana

Maurice Madagascar

Mozambique Swaziland

Consommation annuelle de cigarettes par habitant L’Atlas a quant à lui été présenté début octobre dans le pays. Massamba Diouf, de la Ligue sénégalaise contre le tabac (Listab), espère qu’une législation conforme à la convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la lutte antitabac sera votée « d’ici la fin de l’année », ainsi que l’a annoncé le gouvernement. « Cela permettrait au pays d’augmenter les taxes sur le tabac, d’interdire les publicités incitant les jeunes à fumer, et de créer des espaces pour fumeurs », explique le militant. En Côte d’Ivoire, le gouvernement a franchi le pas le 10 octobre en interdisant la cigarette dans les lieux publics.

Afrique du Sud

Lesotho

Une stratégie qui a fait ses preuves dans la plupart des pays occidentaux où, en dix ans, la consommation a baissé de 26 %. Pour compenser ce manque à gagner, l’industrie du tabac s’est tournée vers des pays moins bien armés pour se défendre, expédiant des cigarettes à des prix dérisoires tout en renflouant ses caisses. Mais l’Afrique n’en sort pas encore tout à fait noircie avec ses quelque 3 % de fumeurs à l’échelle mondiale, loin derrière les 24 % de l’Europe et les 38 % d’une Chine bien enfumée. Pour autant, les militants africains antitabac ne baissent pas leur garde. ● TRÉSOR KIBANGULA

Art Les Africains en queue de peloton Nigérians, Sud-Africains, Marocains… Ils ne sont qu’une dizaine dans le classement des 500 plasticiens les plus prisés des salles des ventes.

B

ien sûr, classer les plasticiens comme des chevaux de course a quelque chose d’artificiel et ne dit rien, ou presque, du futur de leur œuvre. Il n’empêche : dans ce domaine, le rapport annuel d’Artprice sur le marché de l’art contemporain fait autorité. Et du côté des Africains, les nouvelles ne sont pas très bonnes. Ils ne sont en effet qu’une petite dizaine, au milieu d’une foultitude de Chinois et d’AngloSaxons, parmi les 500 créateurs les plus cotés entre juillet 2011 et juin 2012. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

En tête, deux Sud-Africains, Marlene Dumas(47e)etWilliamKentridge(84e),avec un chiffre d’affaires en ventes publiques de près de 3 millions d’euros et 1,6 million d’euros respectivement. À la 170e place, l’Anglo-Nigérian Chris Ofili, connu pour utiliser de la bouse d’éléphant dans ses toiles (684700 euros). Au 326e rang, l’Algérien Adel Abdessemed (258500 euros), qui a récemment suscité une polémique en exposant des figures du Christ composées de barbelés à côté du retable d’Issenheim. À la 408e place, un autre Nigérian, Yinka

Shonibare (208200 euros), qui s’interroge sur le colonialisme et le postcolonialisme à travers des œuvres liées à l’histoire de l’art occidental mais revues et corrigées avec force tissus africains. Juste derrière, la Kényane Wangechi Mutu (431e, 193700 euros) et ses toiles-collages psychédéliques. Enfin, en queue de peloton, deux Marocains – Lalla Essaydi, 438e, et Mohamed Drissi (1946-2003), 489e – et deux Égyptiens – le photographe Youssef Nabil(468e)etlepeintreAdelel-Siwi(490e). Une consolation, le numéro un reste l’Américain d’origine haïtienne et portoricaine Jean-Michel Basquiat, décédé en 1988, avec un chiffre d’affaires approchant les 80 millions d’euros. ●NICOLAS MICHEL JEUNE AFRIQUE


TCHAD

FREDERIC NOY

PUBLI-INFORMATION

Mettre en valeur toutes les richesses du sous-sol Si le pétrole est, à ce jour, la première des richesses du sous-sol tchadien, d’autres sont susceptibles d ’ ê t r e é g a l e m e n t m i s e s e n v a l e u r. L e g o u v e r n e m e n t de N’Djamena s’est attelé à la tâche, depuis quelques années seulement, afin de mieux parachever le processus, déjà bien engagé, de son décollage économique.


DR

LA RAFFINERIE DE N’DJAMENA A ÉTÉ INAUGURÉE LE 29 JUIN 2011.

PUBLI-INFORMATION

Le pétrole : un exceptionnel levier de croissance Selon le président Idriss Déby Itno, le renforcement du secteur des hydrocarbures doit être considéré par les Tchadiens comme un simple moyen et non comme une fin, car l’avenir du pays, sur la longue durée, c’est essentiellement l’augmentation de la productivité de ses ressources agricoles qui le garantira. Il reste que le formidable levier que constituent depuis quelques années les recettes pétrolières « booste » la croissance, tant sur le plan économique que dans le domaine social. Entre 2006 et 2009, selon les autorités tchadiennes, le pétrole a représenté jusqu’à 70 % des recettes totales de l’État, conduisant à un net accroissement du PIB par habitant, passé de 220 dollars en 2006 à 600 dollars en 2009. Pour autant, l’économie du pays devait, à cette époque, repartir de zéro ou presque du fait des décennies de crise que celui-ci avait connues jusqu’au tournant des années 2000. L’indispensable assainissement macroéconomique imposé par la mondialisation ainsi que la nécessité de relever et développer des infrastructures de base notoirement déficientes ont donc conduit à donner la priorité à une politique de sortie de crise, sans pour autant négliger la satisfaction des besoins de la population. Une équation délicate, illustrée par le fait que l’installation d’infrastructures pétrolières, exigeante en termes de surface au sol, peut se présenter comme une menace pour les systèmes de production traditionnels

des éleveurs et des paysans. Qui plus est, comme ce fut le cas dans certains pays ayant vécu une expérience similaire, la perception du pétrole comme une sorte de bienfait tombé du ciel et capable de résoudre, comme par un coup de baguette magique, tous les problèmes, risque paradoxalement, de faire de celui-ci une calamité pour des

populations forcément déçues dans leurs attentes. D’où les incessantes mises en garde des autorités : non, les réserves d’hydrocarbures ne sont pas inépuisables. Non, ce n’est pas le pétrole, mais l’agriculture, qui servira de base au développement durable et vaudra au Tchad le statut de pays émergent.

De nouvelles perspectives encourageantes La découverte et l’exploitation du pétrole n’ont pas seulement, dès leurs débuts, éveillé les espoirs de la population tchadienne : elles ont également amené investisseurs, bailleurs de fonds et partenaires issus du monde entier à témoigner au pays un intérêt dont il n’avait jamais encore été l’objet. C’est ainsi qu’ à l’entrée du Tchad dans le club privilégié des pays producteurs de pétrole ont correspondu, en quelques années, le redressement financier, la création d’infrastructures étatiques modernes, la construction de routes et de ponts, la relance de l’agriculture et l’engagement de la lutte contre la pauvreté. Réparties entre les bassins de Doba, de Bongor et de Séguidi, les réserves prouvées s’élèveraient à 1 milliard cinq cent millions de barils, ce qui explique que des opérateurs de plus en plus nombreux prennent la route de N’Djamena

pour offrir leurs services. Le dernier en date, Glencore International, le géant suisse des matières premières, vient de prendre des participations, à hauteur de 300 millions de dollars, dans deux champs pétrolifères - ceux de Mangala et de Badira - dans le sud du pays, dans le cadre d’un accord conclu avec le Canadien Griffiths Energy International : la clé de répartition sera de 25 % pour Glencore, 25 % pour la Société des Hydrocarbures du Tchad et 50 % pour Griffiths. De ce fait, le développement de Mangala et de Badira s’en trouvera accéléré, mettant les deux champs en situation de produire, à eux seuls, plus de 50 000 barils/jour. D’autre part, Griffiths détenant une autorisation d’exploration exclusive sur une zone de 26 000 km2, au sud du pays, Glencore manifeste l’intention d’en acquérir 33,3 %, que le Canadien lui céderait pour un montant de 31 millions de dollars.


TCHAD Cette revendication récurrente de la population tchadienne est en passe d’être satisfaite : jusqu’au printemps 2012, les besoins en ciment n’avaient toujours été qu’imparfaitement couverts par de coûteuses importations en provenance du Nigeria, du Cameroun ou d’Égypte, à hauteur de 600 000 à 700 000 tonnes par an. L’inauguration, le 12 février 2012, de la cimenterie de Baoré, construite par les Chinois de la société CAMCE dans la région de Mayo Kebbi Ouest, à proximité d’un site recelant 7 millions de tonnes de calcaire exploitables pendant plus de 20 ans, a donc constitué un événement majeur pour l’économie nationale. Abritant une centrale électrique de 19 mégawatts, l’unité a une capacité de production de 200 000 tonnes de ciment par an. Elle a été réalisée grâce à un prêt de 46 milliards de F CFA de la banque chinoise Exim Bank. Le ciment qu’elle produit n’est pas destiné à l’exportation mais à la satisfaction d’une partie des besoins

AFP IMAGE FORUM

Du ciment pour tout le monde nationaux du Tchad, notamment dans le domaine de la construction de logements sociaux. Dans une seconde phase ont été lancées, le 26 avril 2012, sur le site dit Modo II, à quelques kilomètres au nord de Goz-Beida, dans la région de Sila, les études de faisabilité d’une seconde cimenterie, d’une capacité de 600 000 tonnes de ciment par an, qui s’ajouteront aux 200 000 tonnes produites chaque année par l’unité de Baoré. La société chinoise CAMCE déposera, au plus tard en mars 2013, un rapport de faisabilité. Grâce à ce nouveau projet, tous les Tchadiens, sur toute l’étendue du territoire, pourront enfin se procurer aisément un produit jusque-là trop rare. D’autant qu’un nouveau système de distribution est à l’étude, qui mettra fin aux pratiques spéculatives de certains, créatrices de pénuries artificielles. Ainsi les particuliers pourront-ils s’approvisionner à meilleur coût et aussi facilement que le font les entreprises.

LE PRÉSIDENT DÉBY INAUGURANT LE PIPE-LINE TCHAD-CAMEROUN.

Un pays de transit pour le brut nigérien Le 29 juin 2012, le Niger a signé avec le Tchad un protocole d’accord concernant la construction d’un pipe-line de près de 600 km de longueur ainsi que son raccordement à celui qui relie le Tchad au Cameroun et permet déjà l’exportation du brut tchadien par le terminal camerounais de Kribi. Car le Niger, qui vient d’intégrer le « club » des pays producteurs

LA CIMENTERIE DE BAORÉ PRODUIT 200 000 TONNES DE CIMENT PAR AN.

de pétrole avec l’inauguration, en novembre 2011, de sa raffinerie de Soraz (près de Zinder), devra bientôt expor ter le brut issu des quatre champs de son bloc d’Agadem : 80000 tonnes annuelles escomptées dès le début 2014, dont 60 000 seront exportées jusqu’à Kribi par l’intermédiaire du pipeline. Le premier tronçon de celui-ci, long de 193 km, reliera le site d’Agadem à la frontière tchadienne. Le second, d’une longueur de 400 km, rejoindra le pipe-line Tchad-Cameroun existant. Ainsi le DROIT RÉSERVÉ

Tchad renoue-t-il, d’une certaine façon, via le transport du pétrole, avec sa très ancienne tradition de pays de carrefour et de transit.


UNE UNITÉ DE PRODUCTION DE PIERRE ET DE GRAVIER.

Un secteur minier en pleine expansion Afin de susciter l’intérêt d’un plus grand nombre d’investisseurs privés et institutionnels, le Tchad vient de conclure avec la société espagnole SP Mining une convention de recherches minières visant à la production de trois types de cartes : géologiques, géophysiques et minières. Des outils qui manquaient jusque-là au

ministère des Mines et de la Géologie de N’Djamena. Outre le financement de l’opération sur ses fonds propres à hauteur de plus de 7 milliards de F CFA, SP Mining fournira au ministère un appui institutionnel de 55 millions et assurera la formation d’un certain nombre de cadres. Ses travaux seront menés dans

PUBLI-INFORMATION

Vers un nouveau programme avec le FMI Alors que le pays s’efforce d’atteindre le point d’achèvement de l’initiative Pays Pauvres Très Endettés (PPTE), le dynamisme et les perspectives des secteur pétrolier et minier jouent un rôle décisif dans les négociations entre les autorités tchadiennes et les grands argentiers du monde. Une délégation du Fonds monétaire international (FMI), qui a séjourné à N’Djamena du 11 au 27 septembre 2012, a noté dans son rapport : « À moyen terme, la mise en marche de nouveaux gisements pétroliers augmentera sensiblement la production avec un effet positif significatif sur les recettes budgétaires et le compte courant extérieur. Ces perspectives favorables pourront se traduire par une augmentation de la production pétrolière de 120 000 barils/jour en 2012 jusqu’à 160 000 barils/jour en moyenne au

cours de la période 2013 / 2017 ». C’est un point positif dans la mesure où la mission a également noté que « l’exécution du budget 2012 à fin août a été caractérisée par un recouvrement moins important que prévu de recettes fiscales hors pétrole ». C’est aussi un avertissement : « Bien que son niveau d’endettement soit relativement faible, le Tchad demeure vulnérable à la volatilité des prix des produits pétroliers. » Il reste que N’Djamena, après une période difficile caractérisée par le non-aboutissement du Staff Monitored Program (SMP) de 2009, s’efforce de redevenir un interlocuteur crédible pour les bailleurs de fonds. Dès 2010, il a renoué avec le FMI, qui l’encourage et l’assiste dans sa stratégie de diversification économique. Un nouveau programme formel devrait être bientôt conclu avec cette institution.

le Dar-Sila, les Monts de Lam ainsi que dans la région du Guéra. D’ores et déjà, même si l’on sait que certaines ressources minières ne se trouvent qu’en quantités trop faibles pour être exploitées industriellement, d’autres font l’objet d’études intensives menées par l’État tchadien avec l’appui de groupes internationaux spécialisés. C’est le cas de l’or, notamment, déjà exploité dans la région de Léré, et dont un gisement de l’ordre de 50 tonnes a été identifié à Ngamboké, dans la région de Mayo Dala. C’est aussi celui de l’uranium, dont des indices, signalés notamment dans le Mayo-Kebbi Ouest et le Massif central, font, depuis quelques années, l’objet d’exploration et d’évaluation. Il est vrai que l’exploitation minière entraîne, le plus souvent, de fortes contraintes sur le plan de l’environnement comme sur celui de la sécurité des populations vivant à proximité des sites, mais le Tchad se prépare à y faire face en se dotant des cadres législatifs et réglementaires nécessaires.

REPÈRES SUPERFICIE : 1 284 000 km2 CAPITALE : N’Djamena DATE DE L’INDÉPENDANCE : 11 août 1960 POPULATION : 11, 7 millions d’habitants ESPÉRANCE DE VIE : 44 ans TAUX DE CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE : 2,41 % RNB/HAB. : 1 280 dollars US LANGUES OFFICIELLES : français, arabe MONNAIE : franc CFA

DIFCOM/DF

RENAUD VAN DER MEEREN

TCHAD


Face à la pression de la communauté internationale, qui retire son aide au pays – accusé de soutenir le M23 –, le président rwandais ne cède pas d’un pouce.

O

VINCENT FOURNIER/J.A.

n n ’a v a i t p l u s entendu ce genre de discours sur le continent depuis le Sékou Touré du « non » à de Gaulle et le Kaddafi des années 1970. Confronté à la suspension d’une partie de l’aide internationale – dont dépendent 50 % du budget du Rwanda – pour cause de soutien présumé aux rebelles congolais du M23, Paul Kagamé a réagi à sa manière: tranchante

! AU SIÈGE DE LA PRÉSIDENCE, le 21 avril 2012, lors d’un entretien accordé à J.A.

et défiante. Kigali a lancé le fonds Agaciro (« dignité »), un fonds purement endogène ouvert à tous les citoyens et amis du Rwanda, lequel a récolté en un mois l’équivalent de 30 millions de dollars (23,3 millions d’euros), et le président rwandais a prononcé le 4 octobre, à l’occasion de l’ouverture de l’année judiciaire, un discours pour le moins pugnace sur ce thème. Extraits. « De la justice internationale, nous Africains ne connaissons que le bâton. Jamais la carotte. Un bâton politique utilisé pour JEUNE AFRIQUE

nous contraindre à suivre une voie choisie par d’autres. Autre moyen du même type : le chantage à l’aide. Il n’y a pas de pays au monde plus fiable et transparent que le Rwanda quant à l’utilisation de l’aide. Mais ceux qui nous aident veulentils notre bien ? Ils nous aident en échange de notre dépendance et de notre gratitude, dans le but de nous contrôler et de nous maintenir dans une posture d’éternels mendiants. À ceux qui répètent : “Gelez, suspendez toute aide au Rwanda”, je réponds ceci : l’injustice ne nous rendra pas plus dociles, elle nous rendra plus rebelles. Être rebelle, je sais ce que c’est, comptez sur moi. Je parle pour nous Rwandais, mais aussi pour tous les Africains qui n’osent pas s’exprimer. Si je me trompe, si vous n’êtes pas d’accord, ditesmoi de démissionner et, croyezmoi, je partirai aussitôt. Mais sachez que même après moi, ce pays aura besoin de quelqu’un qui me ressemble. Cela devra même être la condition pour me succéder : continuer le combat pour défendre notre bien le plus précieux, la dignité. » Sur la situation dans le NordKivu, Paul Kagamé s’est voulu tout aussi direct : « Ce n’est pas nous qui sommes à l’origine des problèmes de la RD Congo. Ce n’est pas nous qui sommes responsables de l’existence d’une communauté de rwandophones dans l’est de ce pays. Ce sont ceux qui, à l’époque coloniale, les ont transplantés là. Or ces rwandophones sont persécutés chaque jour. Que les donneurs de leçons se taisent. » CQFD. ● FRANÇOIS SOUDAN

N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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«

Nous espérions que Bachar al-Assad serait un Gorbatchev, il a été un Milosevic. »

ALEXANDRE MENEGHINI/AP/SIPA

Rwanda Kagamé: éloge de la rébellion

ILS ONT DIT

AHMET DAVUTOGLU Ministre turc des Affaires étrangères

« Je vis toujours dans un appartement que je loue à mes frais. Je n’ai pas de droits, je n’ai que des devoirs. » MOHAMED MORSI Président de l’Égypte

«

Il y a des enfants tunisiens, libyens, parfois des gamins très jeunes, qui meurent dans des naufrages. Aucun développement économique ne peut se payer à ce prix. »

MONCEF MARZOUKI Président de la Tunisie (au sommet euroméditerranéen 5+5)

« Hollande veut le mariage pour tous, sauf pour lui ! » GÉRARD LONGUET Ancien ministre français de la Défense (à propos du projet de loi sur le mariage des homosexuels)

«

Les gens sont très déçus. Il nous manque une voix morale dans ce pays. » LEYMAH GBOWEE Nobel de la paix 2011 avec la présidente libérienne Ellen Johnson-Sirleaf (dont elle critique l’action et a quitté le gouvernement)

CHESTER HIGGINS JR/THE NEW YORK TIMES/REDUX/REA

La semaine de J.A. Décryptage


La semaine de J.A. Décryptage

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MOHAMMAD HANNON/AP

JEUNEAFRIQUE.COM

DIAPORAMA Kaddafi, un an après : l’histoire du « Guide » à travers les unes de J.A. FOCUS Terres agricoles : la grande braderie africaine continue ?

! À AMMAN, manifestation du mouvement islamiste, le 31 août 2012.

Jordanie Démonstration de force Malgré la dissolution du Parlement et l’annonce de prochaines élections, les Frères musulmans poursuivent la contestation.

J

SIPA

«

SONDAGE Évaluez vousmême la politique étrangère des États-Unis : quel bilan pour Obama, quel projet pour Romney ? À LIRE AUSSI : Identité berbère : des prénoms amazighs pas assez « marocains » ?

N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

e dis donc aux Frères musulmans : vous avez le choix, soit rester dans la rue, soit aider à construire la nouvelle Jordanie démocratique », déclarait le roi Abdallah II mi-septembre. Le 5 octobre, les Frères, principale formation d’opposition, lui ont répondu en défilant par milliers dans les rues de la capitale, Amman. « Nous réclamons une véritable réforme constitutionnelle qui donnerait du pouvoir au peuple », a tempêté Hammam Saïd, le leader des Frères jordaniens. L’annonce par le roi, la veille de la manifestation, de la dissolution du Parlement et de la tenue d’élections d’ici à début 2013 n’a pas brisé l’élan des contestataires : les Frères ont déclaré qu’ils boycotteraient le scrutin. Une dissolution pourtant exigée à grands cris par l’opposition début 2011. Mais la nouvelle loi électorale est maintenant jugée trop favorable aux partisans du Palais. La création d’un Conseil constitutionnel et la nomination d’un nouveau Premier ministre, Abdoullah Ensour, parlementaire expérimenté favorable à la réforme, au lendemain de leur démonstration de force n’ont en rien entamé l’intransigeance des islamistes.

Si le bras de fer avec le pouvoir royal ne date pas d’hier, les manifestations de l’opposition – notamment islamiste – se sontmultipliéesdepuisledébutdescontestations arabes il y a plus d’un an et demi. Lesvictoiresélectoralesdesformationsreligieuses,d’ÉgypteauMaroc,ontenhardiles Frères jordaniens, dont les charges contre la monarchie sont accentuées par l’ébranlement social et économique dû au conflit syrien voisin. Le roi lâchera-t-il du lest? MÉFIANCE À RIYAD. Soumis à la pres-

sion de son opposition, il est également surveillé par son puissant voisin, le roi d’Arabie saoudite, très méfiant vis-à-vis de la confrérie islamiste, surtout depuis qu’elle a pris le train des révolutions et s’est intégrée au jeu démocratique. La déclaration du ministre des Affaires étrangères des Émirats arabes unis, le 8 octobre, est ainsi entendue comme un avertissement contre les ambitions régionales de la confrérie : « L’idéologie des Frères musulmans ne reconnaît pas l’État national ni la souveraineté des États, c’est pourquoi il n’est pas étrange que l’organisation mondiale des Frères œuvre à saper la souveraineté des États et leurs lois. » ● LAURENT DE SAINT PÉRIER JEUNE AFRIQUE


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La semaine de J.A. Tour du monde

ARIANA CUBILLOS/AP

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VENEZUELA

Chávez IV

I

L A PROMIS QU’IL SERAIT « un meilleur président ». Le 7 octobre, Hugo Chávez a été réélu pour six ans à la tête du Venezuela avec 54,42 % des suffrages. Mais ce quatrième mandat s’annonce plus difficile que les précédents. D’abord en raison des graves problèmes économiques et sécuritaires auxquels son pays est confronté. Ensuite parce que le bon score (44,97 %) obtenu par son unique rival, Henrique Capriles Radonski, va l’obliger à composer avec une forte opposition – elle a recueilli deux millions de suffrages de plus que lors du précédent scrutin, avec un taux de participation historique de 80,94 %. Enfin parce que l’état de santé réel du président reste un mystère. Atteint en 2011 d’un cancer dans la région pelvienne dont il affirme être guéri, Chávez a été peu présent sur le terrain pendant la campagne électorale, privilégiant les apparitions télévisées. Le 11 octobre, il a nommé à la vice-présidence Nicolas Maduro, son très populaire ministre des Affaires étrangères. Une façon de préparer sa succession. ●

JUSTICE

Vatileaks, suite et fin ATON VOULU étouffer le Vatileaks ? Le procureur du Saint-Siège avait requis trois ans de prison contre Paolo Gabriele, l’ancien majordome du pape, poursuivi pour le « vol aggravé » de centaines de documents confidentiels, certains paraphés de la main même de Benoît XVI (il en avait transmis une partie à la presse). Au terme d’un procès éclair, l’ex-employé modèle, qui jure avoir agi « par amour de l’Église » et ne pas être « un voleur », n’a été N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

condamné qu’à un an et demi de réclusion. Il pourrait bénéficier d’une grâce pontificale. GRÈCE

Merkel chahutée ELLE S’ÉTAIT RENDUE à Athènes en « bonne amie ». Mais Angela Merkel a été accueillie, le 9 octobre devant le Parlement grec, par des dizaines de milliers de manifestants hostiles – certains ayant revêtu pour l’occasion des uniformes du IIIe Reich. Les forces de police avaient été

déployées en nombre et sont intervenues sans ménagement. Les contestataires accusent la chancelière allemande d’être personnellement responsable des mesures d’austérité qui étranglent leur pays depuis trois ans. Elle leur a promis qu’ils seraient payés de leurs efforts, mais sans leur garantir le déblocage d’une nouvelle tranche d’aide. PHILIPPINES

La paix, enfin? APRÈS QUARANTE ANS de conflit et entre 120 000 et 150 000 victimes dans le sud du pays, le gouvernement philippin et les rebelles du Front moro islamique de libération (Milf ) sont parvenus, grâce à la médiation de la Malaisie, à un accord-cadre en vue de l’établissement d’une paix durable. Avant la fin du mandat de l’actuel chef de l’État, une région autonome baptisée Bangsamoro va être créée dans l’île méridionale de Mindanao. Le Milf se déclare quant à lui disposé à se transformer en parti politique et à participer aux prochaines élections. LE CHIFFRE

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C’EST LE NOMBRE DE TIBÉTAINS qui, depuis mars 2011, se sont immolés par le feu pour protester contre la répression chinoise. Quarante-trois d’entre eux n’ont, semble-t-il, pas survécu à leurs brûlures. Pour la Chine, ces immolations ne sont que des « actes de terrorisme ». CHINE

L’empoisonneuse empoisonnée C’EST UNE TRAGÉDIE shakespearienne qui se joue à Pékin à la veille du 18e congrès du Parti communiste. Après la chute JEUNE AFRIQUE


ARRÊT SUR IMAGE

Camille Millerand

FRANCE

Ceci est un défilé de mode CECI N’EST PAS UNE PIPE, avertissait en 1927 le peintre belge René Magritte. Ceci n’est pas un voile, lui répond, quatre-vingt-cinq ans plus tard, l’artiste franco-marocaine Majida Khattari, dont un audacieux défilé de mode a été présenté le 6 octobre à Paris. Derrière de vaporeuses pièces de soie sur lesquelles sont projetées des scènes mythiques du cinéma, des mannequins défilent, dévoilant leurs visages coiffés de foulards noués à la Audrey Hepburn. Le voile islamique accessoire de mode ou élément pour dépassionner le débat ?

de Bo Xilai, qui, le mois prochain, aurait dû intégrer la plus haute instance du parti, puis la lourde condamnation infligée à Gu Kailai, sa femme, les autorités croyaient en avoir fini avec cet embarrassant scandale. Erreur. Il apparaît en effet que le fils d’un premier mariage de Bo aurait tenté d’empoisonner sa belle-mère à l’aide de métaux lourds. Or celle-ci a précisément été condamnée à mort (avec sursis) pour l’empoisonnement d’un homme d’affaires britannique… BRÉSIL

Paes dans un fauteuil LES CARIOCAS, les habitants de Rio de Janeiro, ont, dès le premier tour des élections municipales, le 7 octobre, triomphalement reconduit dans ses fonctions leur maire, Eduardo Paes (42 ans). Membre du Parti du mouvement démocratique brésilien (centre), ce dernier, qui bénéficiait du JEUNE AFRIQUE

soutien du Parti des travailleurs (gauche, au pouvoir), a surclassé Marcelo Freixo, son adversaire d’extrême gauche (64,3 %, contre 28,5 % des voix). Son mandat étant de quatre ans, il aura la lourde charge d’organiser les Jeux olympiques de 2016. Rio accueillera également la finale de la Coupe du monde de football en juillet 2014. PAKISTAN

Imran Khan contre les drones À L’APPEL d’Imran Khan, ex-star du cricket pakistanais qui dirige aujourd’hui le Mouvement pour la justice, plusieurs milliers de personnes ont quitté Islamabad le 6 octobre et ont, sans succès en raison de la situation sécuritaire, tenté de gagner le Sud-Waziristan, fief des talibans. L’objectif de cette « marche pour la

paix » était de protester contre les tirs de drones américains, qui, depuis 2004, ont déjà fait autour de 3 000 victimes, parmi lesquelles une infime proportion de chefs jihadistes. MEXIQUE

Où est passé le corps d’El Lazca? C’EST UNE GRANDE VICTOIRE pour le gouvernement mexicain, mais de courte durée. Le 7 octobre, quelques heures après l’annonce de la mort de Heriberto Lazcano Lazcano, alias El Lazca, chef du cartel des Zetas, l’un des plus puissants du pays, tué par les forces de l’ordre lors d’une fusillade, un mystérieux commando armé jusqu’aux dents a réussi à s’emparer de sa dépouille. Heureusement, les autorités avaient eu le temps de l’identifier formellement grâce à ses empreintes digitales et des prélèvements d’ADN. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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Grand angle

ENQUÊTE SUR DES MAROCAINS À PART

LES SAHRAOUIS Entre mirage d’indépendance et rêves d’autonomie, les habitants des « provinces du Sud » peinent encore à trouver leur place. L’État, qui a massivement investi dans le développement, attend d’eux désormais qu’ils prennent leur avenir en main. Un défi particulièrement complexe à relever.

FRANÇOIS SOUDAN, envoyé spécial VINCENT FOURNIER pour J.A.

Photos :

S

ur un mur du centre de Laayoune, à quelques dizaines de mètres du siège de la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (Minurso), une main anonyme a écrit : « Maroc, ma vie… » Le graffiti n’a pas été effacé, contrairement à ceux que taguent parfois de jeunes militants séparatistes. Est-il, pour autant, significatif de ce que pensent les Sahraouis des « provinces du Sud » ? Dans ce territoire au statut international encore en suspens, mais que les

Marocains considèrent comme leur Alsace-Lorraine, sonder les reins et les cœurs ressemble souvent à un jeu de piste dans le désert. Autant s’en tenir, pour commencer, à quelques évidences : trente-sept ans après la « récupération » de la colonie espagnole par le Maroc, l’État a ici tout construit. Villes, infrastructures, développement social, la Sakia el-Hamra et l’Oued Eddahab sont des chantiers permanents, fruits d’un effort aussi coûteux qu’impressionnant. Trente-sept ans après, l’équilibre démographique s’est radicalement inversé ; les Marocains venus du Nord sont


Un conflit de près de 40 ans 1973 Création du Front populaire pour la libération de la Seguiet el-Hamra et du Rio de Oro (Polisario)

1975 En octobre, la Cour internationale de justice reconnaît des « liens juridiques d’allégeance de certaines tribus avec le sultan du Maroc ». Un mois plus tard sont signés les accords de Madrid sur le retrait espagnol et le partage du territoire entre Rabat et Nouakchott

1976

! À LA NUIT TOMBÉE, les habitants de Laayoune aiment se retrouver sur la place du Méchouar, lieu de promenade et d’échanges.

1979

CHRONO

Le Maroc occupe la zone laissée vacante par la Mauritanie, qui « renonce à toutes ses revendications territoriales »

1984 Le Maroc quitte l’OUA après l’admission de la RASD lors du sommet d’Addis-Abeba

●●●

1991 Cessez-le-feu et déploiement de la Minurso (Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental)

2001 Le Front Polisario et l’Algérie rejettent le plan Baker I pour une autonomie sous souveraineté marocaine

2003

SOURCE : FRANCE DIPLOMATIE

Le Maroc rejette le plan Baker II, qui prévoit un régime d’autonomie pour une durée de cinq ans, suivi d’un référendum comportant l’option de l’indépendance

2007 Le Maroc présente aux Nations unies son projet d’autonomie du Sahara occidental

2010 Incidents à Gdeim Izik, près de Laayoune, après le démantèlement d’un camp

CRÉDIT PHOTO

aujourd’hui largement majoritaires et les autochtones ne représentent plus guère que 30 % de la population, y compris les exilés des camps de Tindouf, en Algérie. Trente-sept ans après, la situation diplomatique est totalement figée, et le territoire, sécurisé sur 80 % de sa superficie par un mur de défense, est toujours de facto en état de guerre, les indépendantistes du Front Polisario menaçant régulièrement de reprendre la lutte armée – même si personne n’y croit. Trentesept ans après, entre malaise identitaire, divisions tribales et difficultés à s’adapter aux exigences

En janvier, tensions frontalières entre l’Algérie et le Maroc En février, le Front Polisario proclame la République arabe sahraouie démocratique (RASD)


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Grand angle

Maroc

un drapeau du Polisario en pleine rue comme ● ● ● de la compétition économique, la communauté Un territoire le fait parfois la petite minorité des jeunes sépasahraouie peine encore à sortir de sa léthargie. Son au centre de élite sait, au fond d’elle-même, que si le Maroc a ratistes peut valoir interpellation, mais nul n’est tensions paradoxalement bâti les conditions matérielles inquiété pour avoir regardé la télévision d’« en face » diplomatiques d’une indépendance, celle-ci est non (RASD TV) et il existe même à Rabat seulement irréaliste, mais aussi inviun parti légalisé d’extrême gauche, Tan Tan Tindouf Tarfaya vable sans perfusionextérieure et sans Annahj Addimocrati, ouvertement Iles fédérateur neutre. « La séparation favorable aux thèses sécessionnistes. Canaries Laayoune reviendrait à échanger un protecteur Plus que sur la présence intimidante contre un autre, confie un intellecdu Makhzen, les autorités maroBoujdour tuel sahraoui, alors mieux vaut un caines semblent désormais miser, roi arbitre et l’imparfaite démocratie pour pérenniser l’enracinement du Océan Bir Mogreïn Gueltamarocaine que les généraux algériens royaume en ses marches méridioAtlantique Zemmour et leurs affidés du Polisario. » nales, sur l’émergence d’une nouvelle MAURITANIE élite sahraouie moderne à la fois écoBir Anzarane Dakhla nomiqueetadministrative.LegouverPERSUASION. Ce ralliement de résignation, assez significatif de la menneur Reguibat de Smara Mohamed talité sahraouie, prend évidemment Salem Essabti, juriste formé à Rabat Aguanit en compte les multiples avantages et qui fut lors de sa nomination le issus d’une politique délibérée de plus jeune du Maroc, en est un bon discrimination positive. Carburant, exemple. Si cette communauté veut eau, électricité, terrains, logements, réussir le pari de l’autonomie interne Nouadhibou 200 km bourses, soins, cartes dites de promopromise par Mohammed VI, elle n’a Atar tion nationale pour les plus démunis, de toute façon pas le choix, sauf à toutesticitrèslargementsubventionné vider cette notion de son sens. Elle doit se prendre en main. à l’intention exclusive des originaires du territoire. À Retour à Laayoune. Dans son bureau de la cela s’ajoutent les indemnités et couvertures médiMinurso, le représentant spécial du secrétaire cales (plus de 1 700) distribuées aux anciennes général de l’ONU, l’Allemand Wolfgang Weisbrodvictimes des « années de plomb » par l’Instance Équité et Réconciliation. Reste que cet assistanat Weber, se veut optimiste. Plutôt que de s’agacer de a deux revers. Il fait souvent grincer les dents des la vingtaine de drapeaux marocains que le maire de autres Marocains, suscite des jalousies et exacerbe la ville a fait planter autour de son quartier général Population du les tensions, lesquelles dégénèrent parfois en affronen signe de défi (« je n’y peux rien, ils sont plantés Sahara occidental tements entre Sahraouis et « Nordistes », comme à hors de ma juridiction »), cet ancien du Timor et Dakhla en septembre 2011 à l’issue d’un match de de Kaboul préfère s’attarder sur les échanges de visites entre familles sahraouies séparées par le football. Et si elle permet à chacun de survivre, cette mur, que la Minurso organise avec succès. Et s’il politique n’évite pas le chômage des jeunes, cette habitants* plaie maghrébine: l’affaire du camp protestataire de y a une chose qui préoccupe le général bangladais Gdeim Izik, en octobre et novembre 2010, avec ses Abdul Hafiz, lequel commande depuis quatorze 5000tentesetses15000manifestantsrassemblésinimois les quelque 200 militaires de la mission après tialementautourderevendicationspurementsociales avoir dirigé les Casques bleus en Côte d’Ivoire, ce (puis politiquement exploitées par le Polisario) est n’est pas une très hypothétique reprise des hostilités encore dans toutes les mémoires. entre frères ennemis, mais bien la menace que Signe que les temps ont changé et même si le les terroristes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique maillage policier du territoire demeure étroit, l’État (Aqmi) et du Mouvement pour l’unicité et le jihad marocain ne soigne plus ces prurits de dissidence en Afrique de l’Ouest (Mujao) font peser sur toute par la répression. La négociation et la persuasion ont la région. À sa demande, le ministre de la Défense désormais leur place, et lorsque la manière forte est du Polisario, Mohamed Lamine Bouhali, a accru les Dans les camps employée – comme à Gdeim Izik et à Dakhla –, le mesures de sécurité autour des détachements de la bilanparledelui-même:surlesvingtetunevictimes Minurso – lesquels évoluent sans armes – à l’est du de ces deux événements, quatorze appartenaient mur. Le front séparatiste étant lui-même devenu réfugiés aux forces de l’ordre, lesquelles avaient reçu la très poreux aux infiltrations des katibas islamistes, sahraouis** consigne de ne pas faire usage de leurs armes*. il ne lui reste plus qu’à croiser les doigts… ● Autre évolution symptomatique : il est désormais possible, à Laayoune, d’afficher des convictions * Estimation en juillet 2012, * Le 24 octobre doit s’ouvrir devant le tribunal militaire de indépendantistes – donc pro-Polisario – et de vivre, source : CIA World Factbook Rabat (une juridiction civile aurait sans doute été préférable) de voyager, de fonder une association voire de ren** En janvier 2012, source : le procès de 22 émeutiers sahraouis arrêtés lors des Haut-Commissariat des Nations contrer des journalistes et des enquêteurs d’ONG événements de Gdeim Izik. Ils sont accusés d’« utilisation de la unies pour les réfugiés. à peu près normalement, ce qui est inimaginable violence ayant entraîné la mort » de 12 policiers, lesquels ont Chiffre contesté par le Maroc, qui le juge surestimé été lynchés ou égorgés et leurs dépouilles parfois profanées. dans les camps du Front à Tindouf. Certes, exhiber

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Les Sahraouis

Aïcha Rahal, 40 ans

Lieu de naissance :

Amsterdam Tribu :

Aït Lahcen

Militante

C’

est à Las Palmas, aux Canaries, où Sahraouis du Maroc et du Polisario se retrouvent fréquemment en famille, que cette informaticienne quadrilingue née aux Pays-Bas a fondé en 2007 son ONG. « Femmes sahraouies pour la démocratie et les droits de l’homme»,quicompteaujourd’hui une centaine de membres, dont une dizaine d’Espagnoles et de Suisses, doit son envol à la personnalité médiatique, limite survoltée, de sa fondatrice. Genève, New York, Bruxelles, Madrid: cette mère de quatre enfants est de tous les colloques, forums et réunions où la « cause » est en jeu. On l’a même vue en mai dernier débouler en pleine nuit sur le port espagnol de Barbate pour apporter son soutien aux pêcheurs sinistrés par la décision européenne de suspension des accords de pêche au large des côtes sud du Maroc. Même si elle affirme se battre pour les droits de « toutes » les femmes, Aïcha Rahal ne cache pas son agenda : c’est à celles qui survivent dans les camps du Polisario à Tindouf qu’elle s’adresse en premier lieu. « Lorsque je les rencontre, que je vois leur peau sèche et calcinée et qu’elles me parlent de leurs enfants envoyés à Cuba à l’âge de 8 ans, ça me révolte. » Celle qui se dit « marocaine et sahraouie, exactement au même niveau » juge sa société à ce point divisée et acéphale qu’il lui faut un arbitre et un fédérateur, lequel ne peut être que le roi. « L’indépendance ? Nous aurions alors le choix entre la guerre civile et la dictature : je ne veux ni de l’une ni de l’autre. » ● F.S. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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Grand angle

Maroc

Indépendantiste

U

ne vie au service d’une conviction:laRépublique sahraouie. Ainsi peut-on résumer l’itinéraire de ce fils de commerçant érudit passé par les geôles des « années de plomb ». Étudiant à Casablanca au début des années 1970, il fréquente les frères El Ouali et Bachir Mustapha Sayed, fondateurs du Polisario, avant de s’installer comme greffier au tribunal d’Agadir et d’animer une organisation clandestine de recrutement pour le compte du Front. Arrêté en mai 1977, il est torturé pendant trois mois, transféré dans les prisons de Derb Moulay Cherif, Meknès et Kenitra et enfin condamné à cinq ans de détention. Libéré en 1982, Dimaoui regagne Guelmim puis Laayoune, où il vit de petits boulots, sans cesse harcelé par la police. L’accession au trône de Mohammed VI marque une nouvelle ère. Comme d’autres (et notamment l’égérie indépendantiste Aminatou Haidar, qui a connu les affres du bagne de Kalaat

M’Gouna), Lahbib Dimaoui perçoituneindemnitédel’Instance Équité et Réconciliation, se voit remettre un passeport marocain, réintègre la fonction publique avec une belle promotion (il est classé hors échelle) et devient membre

de la commission régionale des droits de l’homme. Pour autant, il ne renonce à rien. « Je me suis rendu il y a quelques mois dans les camps de Tindouf : le président MohamedAbdelazizestleseul àmêmed’empêcherlesjeunes

de reprendre la guerre. C’est un démocrate qui ne voulait pas conserver le pouvoir. On l’y a obligé », affirme-t-il sans sourciller. Avant de conclure: « Je verrai le référendum, donc l’indépendance, de mon vivant. » ● F.S.

Wali

F

ils de notable, formé en économie à l’université de Grenade à l’époque coloniale, il est, depuis 2010, le premier wali (préfet de région) sahraoui de la Sakia el-Hamra. Rallié au Maroc dès mai 1975 après un court passage par le Puns, un parti autonomiste proche de Rabat, Khalil Dkhil est un pur produit du Makhzen – version service de l’État et loyauté absolue au trône. Ce gentleman réservé a commencé sa carrière comme ambassadeur à Cuba à l’âge de 30 ans, puis en ex-Yougoslavie, avant d’entrer au ministère de l’Intérieur. Successivement gouverneur de Smara, Chefchaouen et Missour, il devient en 2000 le « Monsieur Sahara » du ministère. Ultrasensible, le poste qui est aujourd’hui le sien ne laisse guère de place aux états d’âme, tout en l’obligeant à une recherche constante d’équilibre. Il a ainsi géré dans la fermeté les événements de Gdeim Izik, tout en s’efforçant de répondre au malaise social qui en était à l’origine. Tout récemment, informé de la présence à Laayoune d’une délégation d’indépendantistes basques et catalans venus soutenir les partisans du Polisario, il les a laissés opérer. Puis les a convoqués avant leur départ. Pour leur faire la leçon. ● F.S. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

Khalil Dkhil, 67 ans Lieu de naissance :

Laayoune Tribu :

Reguibat

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Les Sahraouis

Au nom du frère

C

Lahbib Dimaoui,

et artiste peintre, qui a quitté les camps du Polisario en 2010 pour rejoindre Laayoune, a une obsession : retrouver son frère jumeau. Ce dernier, le poète et chanteur Najem Allal, est sans doute le plus connu des auteurs compositeurs sahraouis. Directeur des arts au sein du ministère de la Culture du Polisario, il a accompagné de ses chansons tous les combats du Front jusqu’à la grève de la faim menée par la séparatiste « de l’intérieur » Aminatou Haidar. Mais Najem Allal est aussi un artiste indépendant sensible au vent du Printemps arabe, lequel, comme on le sait, n’a pas soufflé sur les camps de Tindouf. En juillet 2011, il enregistre à Nouakchott

deux albums aux titres explicites, Sans identité et Destin inconnu, qui disent le malaise d’une jeunesse sahraouie en perpétuel exil : « Cela fait trente-sept ans que nous sommes dans ce calvaire et nous n’avons rien obtenu. Étrangers sur une terre étrangère. » De retour au camp de Rabbouni, il est limogé de son poste et qualifié de « traître » par la direction du Polisario. Pourtant, aucune de ses chansons n’évoque le moindre ralliement aux thèses marocaines. Mais ce dissident pose un problème que Mohamed Abdelaziz et ses proches ne veulent surtout pas entendre : celui de la démocratie à l’intérieur du Front. Depuis, Najem Allal a été molesté, sa khaïma(tente)

incendiée, mais il refuse de quitter Rabbouni, se disant en état de sit-in permanent, alors que les chefs du Polisario veulent le voir partir – n’importe où, mais le plus loin possible. « Najem ne bougera pas, dit son frère, il n’abandonnera pas ceux qui croient en lui. » Sur la hamada de Tindouf, ses albums circulent désormais sous le manteau. ● F.S.

Béchir Reguibi, 44 ans Lieu de naissance :

Smara Tribu :

Reguibat

64 ans Lieu de naissance :

Guelmim Tribu :

Reguibat

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Maroc

Maoulaïnine Maoulaïnine, 54 ans Lieu de naissance :

Tan Tan Tribu :

Cheïkh Maoulaïnine

Développeur

L

Mohamed Abdou Essallami,

e directeur (depuis deux ans) de l’Agence du Sud pour la Sakia el-Hamra est intarissable sur les projets de développement dont il a la charge. Parmi les derniers en date : 43 ans un hippocamélodrome pour les courses de chevaux et de Lieu de naissance : dromadaires, une piscine olympique, un théâtre, une biblioLaayoune thèque avec auditorium de 700 places et une rénovation Tribu : complète du vieux Laayoune, décrétée en 2007 première ville sans bidonville du Maroc. Mais celui qui fut, en 1994, le Reguibat premier ingénieur en télécoms d’origine sahraouie et dont une partie de la famille vit « en face », dans les camps du Polisario (deux de ses cousins sont députés au Parlement de la République arabe sahraouie démocratique [RASD]), est tout aussi bavard quand il s’agit de secouer sa propre communauté. « Je répète aux Sahraouis : cessons d’avoir une mentalité d’assistés, arrêtons de croire qu’il existe un plafond de verre, ne comptons plus sur la discrimination positive pour nous en sortir. L’autonomie interne, cela se mérite. » ● F.S. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


Les Sahraouis

« Monsieur Phosphates »

I

ngénieur diplômé de l’École Mohammed-V de Rabat, le directeur de Phosboucraa règne depuis quatre ans sur la principale richesse – mais aussi le principal fantasme – du territoire : les phosphates de la gigantesque mine de Bou Craa, à 120 km au

sud de Laayoune, avec ses quelque 2 200 travailleurs et cadres (sahraouis à 56 %) et ses 450 emplois indirects. Contrairement à une idée reçue, laquelle voudrait que le Maroc s’accroche à « son » Sahara pour sa fortune phosphatière, Bou Craa a très

longtemps été déficitaire. De 1976, date de sa « récupération » sur les Espagnols, à 2008, la mine a survécu grâce aux subventions de son propriétaire, l’OCP (Office chérifien des phosphates), qui y a injecté plus de 2 milliards de dollars. Aujourd’hui encore,

malgré la bonne tenue des cours et une production honorable de 2,5 millions de tonnes en 2011, Phosboucraa atteint tout juste l’équilibre. Entre le dessalement de l’eau de mer, le tapis convoyeur de 100 km, la modernisation du terminal et les investissements sociaux d’une société très paternaliste, les charges sont ici beaucoup plus lourdes qu’à Khouribga et Benguerir, où se concentre l’essentiel de la production de phosphates du royaume. « Bou Craa, c’est 7 % à 8 % de la production globale du Maroc et, selon les chiffres de l’International Fertilizer Development Center, 1,6 % de ses réserves », explique Maoulaïnine. Et si, indépendance oblige, l’OCP se retirait ? « Alors il faudrait fermer la mine, faute de repreneur. » La fonction du premier employeur de la région est donc avant tout sociale – et politique. « En 1976, les Espagnols ne nous ont pas laissé un seul ingénieur sahraoui, aujourd’hui, nous sommes 19 », conclut Maoulaïnine. ● F.S.

Protecteur

E

xpert en droit des affaires puis fonctionnaire au ministère marocain de la Justice, ce Sahraoui très policé est le directeur exécutif de la commission régionale des droits de l’homme (CRDH), démembrement local de l’organisme piloté depuis Rabat par Larbi Benzekri. Forte de 32 membres, la CRDH reçoit et instruit les plaintes des citoyens contre les forces de l’ordre : 950 ont ainsi été

Salem Saadoun, 32 ans Lieu de naissance : Laayoune Tribu : Reguibat

déposées auprès d’elle après l’évacuation forcée du camp protestataire de Gdeim Izik, non loin de Laayoune, en novembre 2010. Il visite les prisons et ses avocats assistent aux procès. « Nous protégeons tout le monde, y compris ceux qui se réclament du Polisario, assure Saadoun. Les gens nous font de plus en plus confiance. » Un regret, certes : que les autorités n’aient pas encore réagi aux dossiers que la CRDH leur a fait parvenir. « C’est une question de temps, on avance peu à peu. La preuve: la police, la gendarmerie et les forces auxiliaires assistent à nos séminaires de sensibilisation sur les droits de l’homme. » ● F.S. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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Maire de choc

S

ur sa carte de visite, le frère cadet de Khalihenna Ould Errachid, président du Conseil royal consultatif des affaires sahariennes (Corcas), a fait inscrire, outre ses qualités de député-maire de Laayoune, celle… d’homme d’affaires. C’est à la fois sa force et sa faiblesse, ses adversaires lui reprochant de se servir de

sa fortune pour mener une politique clientéliste, ce dont visiblement il n’a cure. Car cet autodidacte fort en gueule, controversé et éruptif, assume tout. Son passé de fonctionnaire au sein de l’administration coloniale espagnole, bureau de l’identification. Son allégeance au roi Hassan II dès 1975, à Rabat. Sa participation

Hamdi Ould Errachid, 64 ans

Lieu de naissance :

Laayoune Tribu :

Reguibat

pendant dix ans au processus de recensement des votants en vue du référendum d’autodétermination, puis sa démission en 2000 quand il est apparu que le nouveau souverain optait pour une autre voie – celle de l’autonomie interne. Son adhésion au parti très maroco-nationaliste de l’Istiqlal – il est membre du bureau politique. Son image d’archétype du « collaborateur » de l’occupant, que lui a décerné le Polisario et qu’il porte comme une médaille, avec allégresse. Député depuis douze ans et président du conseil municipal depuis sept ans, il n’est pas le moins du monde affecté par les accusations de népotisme dynastique (il a succédé à son frère). Ce chef de tribu Reguibat Sahel (Reguibat de l’Ouest), fraction Talat, balaie les remarques importunes d’une phrase : « Regardez ce qu’était Laayoune il y a trente ans et regardez ce que la ville est devenue. Tout le reste n’a aucune importance. » ● F.S.

Survivant

L

ui et son compagnon d’infortune Dahi Aguai en font encore des cauchemars. De ces trous dans le désert où on les jetait à ciel ouvert, au bord desquels leurs gardiens venaient uriner à tour de rôle sur les détenus. Ahmed Kher était un jeune étudiant sahraoui idéaliste, indépendantiste et ami du fondateur du Polisario, El Ouali Mustapha Sayed. Commissaire politique aux premières heures du Front, proche de la tendance « libyenne » à une époque où Kaddafi et Boumédiène rivalisaient pour prendre le contrôle de l’organisation, ce fils de militaire est brusquement arrêté le 28 février 1975 à Tindouf par Brahim Ghali, le bras droit de Mohamed Abdelaziz, alors chef de file de l’aile « algérienne » du Polisario. Avec Dahi Aguai, interpellé en même temps que lui, il est transféré au camp de Rabbouni, puis enterré pendant quatre moisdansunecellulecreuséeàmêmelesol.Suiventdesannéesde travaux forcés pendant lesquels Kher et Aguai sont régulièrement battus, dénudés, exhibés comme traîtres devant les enfants des écoles. Aguai est libéré en 1981; Kher, lui, devra attendre encore sept ans avant de se voir assigné à résidence. Adopté par Amnesty International, il finit par s’évader en août 1994 avec la complicité d’un contrebandier. Direction Zouerate, puis Dakhla. Depuis, comme Dahi Aguai, il a fondé sa propre association de soutien aux « disparus » du Polisario. Un moyen de subsister grâce aux subventions du Maroc. Mais aussi de ne pas oublier ces temps de douleur où, pour survivre, ils recevaient chaque jour un quignon de pain, un verre d’eau et un gobelet d’huile. ● F.S.

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Les Sahraouis

Moulay Ismaïl Salma Sidi Mouloud, 85 ans Lieu de naissance :

Smara Tribu :

Reguibat

Vétéran

À

la fin des années cinquante, il a quitté son troupeau de dromadaires pour aller combattre les Espagnols et les Français au sein de l’armée de libération du Sud. Son camarade d’alors n’était autre que le père de Mohamed Abdelaziz, l’actuel chef du Polisario. Blessé, il se réfugie en Mauritanie, fréquente Moktar Ould Daddah, puis revient s’installer dans la badia, la brousse désertique qui entoure Smara. Un matin d’octobre 1979, une colonne du Polisario tire à l’aveugle sur son campement, tuant deux de ses filles et trois de ses neveux. Salma Sidi Mouloud est laissé pour mort. Une heure plus tard, les guérilleros se retirent, emmenant avec eux plusieurs centaines de civils dont sa femme enceinte et ses trois fils. L’un d’eux, Mustapha Salma, deviendra chef de la police du Polisario avant d’être emprisonné pendant trois mois dans les geôles du Front puis expulsé en décembre 2010 vers la Mauritanie. Né dans un camp un mois à peine après l’enlèvement de sa mère, le cadet, Mohamed Lemine (à g. sur la photo), est parvenu au bout de trente-deux ans à rejoindre enfin ce père qu’il n’avait jamais vu. C’était en 2011. Depuis, il ne le quitte plus. ● F.S.

Ahmed Kher, 52 ans Lieu de naissance :

Dakhla Tribu : Izarguien JEUNE AFRIQUE

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Afrique subsaharienne

MALI

À quoi joue

Sanogo? Il est désormais chargé de la réforme de l’armée is pas question pour lui l’armée, mais d’occuper les seconds rôles… D’ailleurs, le chef des putschistes du 21 mars est convaincu que ses hommes et lui peuvent reprendre le contrôle du Nord. Et tant pis s’ils sont les seuls à y croire.

MALIKA GROGA-BADA, avec BABA AHMED à Bamako

I

l y a comme un air de changement au camp Soundiata Keïta, à Kati. Dans cette ville-garnison située à une quinzaine de kilomètres au nord de Bamako, le poste de commandement de la IIIe région militaire du Mali n’est plus le bâtiment décati qu’il était il y a encore quelques mois. Torses nus sous un soleil de plomb, une dizaine d’ouvriers tentent de lui redonner vie. Nouvelles peintures, nouvelles fenêtres, nouveaux tapis et même des climatiseurs… C’est là que le Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDRE) avait installé son quartier général au lendemain du coup d’État du 21 mars. Aujourd’hui, c’est là que siège le Comité militaire de suivi de la réforme des forces de défense et de sécurité. Le nom a changé, mais le chef, c’est toujours lui : Amadou Haya Sanogo. En sept mois, il n’a pas jugé bon de prendre du galon. Il est toujours simple capitaine. En revanche, il ne quitte presque plus Kati. « Il se consacre à sa nouvelle mission », affirme un proche. À son entourage, le militaire putschiste a assuré qu’il

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voulait se faire discret et se concentrer sur un seul objectif : la restructuration de l’armée malienne. Mais le 7 octobre, Radio France Internationale, en divulguant le décret qui le nommait président du Comité militaire de suivi, relançait le débat sur sa mainmise (réelle ou supposée) sur la sphère politique. « Il en est dépité, raconte un familier du camp de Kati. Quand il se tait, on le soupçonne de tirer les ficelles, mais quand il parle, on lui reproche de vouloir garder le pouvoir. » Le décret, dont Jeune Afrique a obtenu copie, est signé de la main même du président de la République par intérim, Dioncounda Traoré, mais il n’a jamais été publié au Journal officiel. A-t-il une valeur légale ? À Bamako, personne n’en est sûr, mais personne n’oserait le contester. « Le Mali vit dans l’exception depuis le mois de mars, ironise un observateur de la vie politique locale. Alors, promulgué ou non, cela change quoi ? » La nomination de Sanogo n’était pourtant pas une surprise. Le 27 juillet, alors que Dioncounda Traoré rentrait au Mali après deux mois de convalescence en France, il s’était présenté sous ce titre aux journalistes présents. Deux jours plus tard, le chef de l’État annonçait, lors de sa première JEUNE AFRIQUE


ISSOUF SANOGO/AFP

! LA JUNTE QUI A

adresse à la nation, la création d’un Haut Conseil d’État (HCE), dont le premier vice-président serait chargé de la réforme de l’armée et des questions du Nord. À l’époque, beaucoup y avaient vu un poste taillé sur mesure pour Sanogo, et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) avait peu apprécié de voir revenir sur le devant de la scène cet homme qu’elle tentait de mettre sur la touche. Car Sanogo refuse de se laisser oublier. Certes, ses relations avec le Premier ministre ne sont plus au beau fixe. Cheick Modibo Diarra s’est affranchi de la tutelle du jeune militaire et, à Kati, on n’apprécie pas. On l’accuse d’avoir nommé trop de proches de l’ancien président Moussa Traoré (son beau-père) au gouvernement. De ne pas opposer suffisamment de résistance au projet d’intervention militaire de la Cedeao. De se comporter en véritable chef d’État en usant et en abusant de l’avion présidentiel… Le 26 juillet, interrogé par la radio-télévision malienne sur l’éventualité de sa démission, Diarra a achevé de contrarier Sanogo : « Si je dois démissionner, a répondu le chef du gouvernement, à qui je dois remettre ma démission? » Le chef des putschistes en a été ulcéré. JEUNE AFRIQUE

Il ne pardonne pas au Premier ministre d’oublier que c’est à lui qu’il doit sa nomination. Du coup, il a amorcé un rapprochement avec le président par intérim. L’attaque dont Traoré a été victime, en plein palais présidentiel, a entaché sa réputation, et Sanogo veut y remédier, lui qui accorde tant d’importance à son image, se comparant à de Gaulle et se rêvant en sauveur du pays. Traoré et lui ont donc fini par trouver un terrain d’entente. À Kati, Sanogo se fait encore

RENVERSÉ LE PRÉSIDENT

AMADOU TOUMANI TOURÉ il y a plus de six mois n’a pas été formellement dissoute.

L’ancien régime a été ce que Pétain a été à la France, et moi je n’ai été que ce que de Gaulle a été pour la France ! AMADOU HAYA SANOGO, le 16 septembre

appeler « président » mais reconnaît l’autorité du chef de l’État. Il aurait aimé obtenir la tête de Modibo Diarra, mais il n’a pas été entendu. En privé, d’ailleurs, le militaire manifeste volontiers son mécontentement. « Il est très déçu par les politiciens maliens, relate un proche. Mais au moins, il est parvenu à obtenir quelque chose N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


Afrique subsaharienne pour les soldats. » À son actif, l’augmentation Youssouf Traoré font toujours partie du cercle des primes de mission des militaires, passées rapproché. Ensemble, ils suivent avec intérêt le de 10 000 à 50 000 F CFA (de 15 à 76 euros). Une parcours – semé d’embûches – de la demande mesure qui l’a rendu très populaire auprès de la d’aide malienne à l’ONU. « Les hésitations de troupe. « Cela lui permet de tenir l’armée, comBan Ki-moon et les atermoiements algériens mente un diplomate ouest-africain en poste à ne sont pas très bien vus ici », ironise un jeune Bamako. Même le chef de l’état-major général gradé. Sanogo, lui, est toujours convaincu que nous l’a confié : à Kati, il ne contrôle rien. C’est l’armée peut reprendre le contrôle du Nord Sanogo, le chef. » sans déploiement de troupes étrangères au sol. Une mainmise qui ne suffit pas à le rassurer. Il est Et les négociations ? « Les politiciens peuvent en contact téléphonique régulier avec Dioncounda décider de discuter avec la rébellion touarègue Traoré, mais ses visites nocturnes au président se [du Mouvement national pour la libération de font plus rares. C’est trop risqué. Sanogo n’a pas l’Azawad, NDLR], pourquoi pas avec les islamistes oublié qu’en avril il s’en est fallu de peu quand les d’Ansar Eddine ? Mais que fait-on d’Al-Qaïda au Bérets rouges, emmenés par le colonel Abdine Maghreb islamique ? » s’interroge un militaire. Guindo, ont tenté un contre-coup d’État. Il sait aussi Amadou Haya Sanogo aime répéter à son entouque les forces de sécurité sont moins unies que ce rage que « qui veut la paix prépare la guerre ». qu’il veut bien dire: le 26 septembre, Mais serait-il prêt à prendre la tête des des policiers du Groupement mobile opérations militaires, lui qui, avant le L’ancien chef de sécurité (GMS) n’ont-ils pas coup d’État, avait été instructeur puis de la junte ne manifesté leur colère contre leurs professeur d’anglais au camp de Kati? collègues – favorables à Sanogo – qui Bien sûr, affirment ses proches, écarquitte plus le avaient obtenu de l’avancement ? tant les objections quant aux capacités camp de Kati, Son Land Cruiser noir et son réelles de l’armée malienne. « Nous, on mais se dit armada de gardes sont désormais veut laver notre honneur et on est prêts remisés à Kati, dans ce qu’à Bamako à donner notre vie », poursuivent-ils. prêt à partir à on s’amuse à appeler la « maison la À Sévaré (près de Mopti), où sont la reconquête mieux gardée du pays ». Construite stationnés près de 2 000 éléments, les du Nord. spécialement pour lui, non loin de gradés affichent le même optimisme. l’entrée du camp, elle offre une vue Ils promettent que leurs hommes sont panoramique sur toute la zone. Elle est protégée « en alerte rouge » et qu’ils peuvent « intervenir par un check point et deux dizaines d’hommes en immédiatement ». Mais, sous le couvert de l’anonymat, un colonel explique que « le plus difficile, ce armes, et dans la cour stationnent des véhicules sera de garder et de sécuriser les villes qu’on aura de transport de troupes de type BRDM et BDM, mais aussi le nez frondeur d’un ZU-23, un canon réussi à reprendre. En matière de génie militaire, antiaérien de fabrication soviétique. nos lacunes sont évidentes ». Encore faudrait-il que les militaires puissent BUNKER. En attendant la fin des travaux de son reconquérir les positions perdues. Car en plus d’être mal formée, l’armée est mal équipée, peu bureau, situé à moins de cinq minutes à pied, Sanogo reçoit dans son bunker. Hommes d’afdisciplinée et en proie à des conflits d’intérêt. Elle pourra difficilement compter sur le soutien des faires, politiciens, associations, courtisans… Le flux des visiteurs n’a pas tari. Les journées sont milices, dont certaines (c’est le cas de Ganda Izo, à une succession d’audiences et de réunions avec Sévaré) sont déjà infiltrées par le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao). ses amis et frères d’armes du CNRDRE. Le capitaine Amadou Konaré (ancien porte-parole de la La guerre, pourrait-on rétorquer à Sanogo, cela ne junte), l’adjudant-chef Seyba Diarra, le colonel s’improvise pas. ●

EMMANUEL DAOU BAKARY

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! AMADOU HAYA SANOGO (en beige), le 27 juillet, à Bamako. Le même jour, le président par intérim, Dioncounda Traoré, rentrait au pays après une longue convalescence en France.

SI SEULEMENT ON LUI DONNAIT DES ARMES… BLINDÉS, VÉHICULES de transport de troupes, fusils-mitrailleurs, munitions… Depuis fin juillet, l’armée malienne attend sa cargaison d’armes bloquée en terre guinéenne. La demande officielle d’aide militaire à la Communauté économique des États de N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), le 1er septembre, avait pourtant détendu les relations entre l’organisation sousrégionale et le Mali. L’embargo était censé prendre fin, la Cedeao ayant même réglé les 241000 dollars de pénalités

réclamés par l’armateur turc en dédommagement de l’immobilisation prolongée de son navire. Mais depuis, rien. Le matériel a été déchargé et transféré dans une caserne de Conakry. Dépités, les militaires maliens chargés de faire l’inventaire ont fini

par rentrer à Bamako le 11 octobre, après trentecinq jours passés en Guinée. À Kati, le capitaine Sanogo répète à qui veut l’entendre qu’il suffirait que ces armes lui soient livrées pour que l’armée se lance à la reconquête du Nord. ● M.G.-B. JEUNE AFRIQUE


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POUR LA CRISE AU SAHEL, BAN KI-MOON CHOISIT ROMANO PRODI

L

es Ouest-Africains avaient une préférence pour le Ghanéen Mohamed Ibn Chambas. Les Algériens lui préféraient leur compatriote Saïd Djinnit. Le nom du Gabonais Jean Ping, l’ex-président de la Commission de l’Union africaine (UA), avait même été évoqué… Mais Ban Ki-moon a finalement tranché, le 9 octobre, et fait de Romano Prodi, l’exprésident du Conseil italien, son envoyé spécial pour le Sahel. Ce choix ne doit rien au hasard. Dans le passé, Ban Ki-moon a déjà confié à Prodi une mission de réflexion sur la prévention des conflits en Afrique. Prodi a dirigé un groupe d’experts de l’UA et de l’ONU qui a rendu un rapport sur le sujet en 2009. JEUNE AFRIQUE

Mais sur quels soutiens Prodi a-t-il pu compter ? Le 25 septembre, en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, Ban Ki-moon a eu un tête-à-tête avec Mario

! L’ANCIEN PRÉSIDENT DU CONSEIL ITALIEN a été préféré au Ghanéen Ibn Chambas et à l’Algérien Saïd Djinnit.

Monti, l’actuel président du Conseil italien. Il a également bénéficié du travail discret de son ami Andrea Riccardi, ministre italien de la Coopération internationale et fondateur de la communauté de Sant’Egidio, très puissante en Afrique. Riccardi s’est entretenu avec Blaise Compaoré, le 1er octobre à Milan, en marge d’un séminaire sur la coopération italienne auquel le président burkinabè était invité. L’affaire était donc en bonne voie. Il ne restait plus qu’à convaincre les autres voisins du Mali – tâche à laquelle Ban Ki-moon s’est attelé en appelant un à un tous les chefs d’État de la région, le 5 octobre. L’Algérie a bien accueilli la proposition. Prodi est une

vieille connaissance du président Bouteflika. Dans les années 1990, l’Italien a soutenu les pourparlers de paix initiés par Sant’Egidio en Algérie. Il est aussi à l’origine des accords pétroliers et gaziers qui assurent encore aujourd’hui une bonne partie des approvisionnements italiens. À 73 ans, ce démocrate de gauche aura fort à faire au Sahel. Traditionnellement hostile à la guerre, il devra composer entre les partisans d’une intervention militaire au Mali et ceux du dialogue. « Il est difficilement influençable, commente un de ses proches. Il va reprendre tout le processus de zéro et essayer de bâtir un consensus. » ● PASCAL AIRAULT N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


Afrique subsaharienne

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GABON

Casimir Oyé Mba « Il faut absolument que nous nous parlions » Ancien Premier ministre passé à l’opposition sous la bannière de l’Union nationale, aujourd’hui dissoute, il réclame la tenue d’une conférence nationale.

I

l a 70 ans et, toujours, la passion de la politique. Ancien Premier ministre, vice-présidentdel’Unionnationale,la coalition de l’opposition dissoute en janvier 2011, Casimir Oyé Mba s’est retiré de la course à la présidentielle à la veille du scrutin de 2009, mais peine toujours à reconnaître la légitimité du président Bongo. Son nouveau cheval de bataille ? La tenue d’une conférence nationale pour, dit-il, réconcilier les Gabonais. De passage à Paris à l’occasion du quarantième anniversaire de la zone franc, il s’est entretenu avec Jeune Afrique. JEUNE AFRIQUE: L’opposition réclame la tenue d’une conférence nationale. Est-ce vraiment nécessaire ? CASIMIR OYÉ MBA : Oui, parce que la

présidentielle de 2009 n’a pas été transparente. Ali Bongo Ondimba a été déclaré vainqueur, c’est vrai. Il a la légalité pour lui. Mais il a un problème de légitimité et n’a pas le soutien de tous les Gabonais. Donc appelez cela comme vous voulez : dialogue, conférence… L’important, c’est que l’on se parle, les yeux dans les yeux. Pourquoi l’opposition ne reconnaît-elle pas la légitimité du chef de l’État ?

Parce qu’il a été mal élu. Et pourquoi Ali Bongo

VINCENT FOURNIER/J.A.

! AU SIÈGE DE JEUNE AFRIQUE, le 9 octobre.

Ondimba attend-il de nous une reconnaissance formelle ? S’il souhaite une allégeance, il ne l’obtiendra pas. Le 12 septembre dernier, il a dit qu’il ne dialoguerait pas avec les opposants qui prônent la violence…

Aucun leader de l’Union nationale [UN, NDLR] n’a jamais appelé à la violence ni au repli identitaire. Le président et ses partisans essaient de nous

des affamés qui veulent s’inviter au banquet. Je ne considère pas le Gabon comme un gâteau. Je le considère comme une exigence, une ambition. Laisser penser que l’exercice des responsabilités est un partage de prébendes n’est pas valorisant pour la politique. Vous affirmez que le pays est mal gouverné. Sur quoi vous fondez-vous ?

La Cour des comptes, qui est pourtant présidée par un pilier du régime, a refusé de signer la déclaration de conformité qui permet d’établir la loi de règlement. C’est grave, car cela veut dire que l’exécution budgétaire n’a pas été conforme à ce que prévoyait la loi de finances.

Vous avez longtemps été membre du gouvernement. Vous n’incarnez pas vraiment ce renouvellement de la classe politique auquel aspire une large partie de l’opinion…

Ali Bongo Ondimba a été ministre au gouvernement pendant plus de quinze

Si le président Ali Bongo Ondimba souhaite une allégeance, il ne l’obtiendra pas. faire passer pour des tribalistes fangs. D’ailleurs, toute une partie de la classe politique essaie d’opposer les Gabonais en instrumentalisant les différences ethniques.

ans. Pourquoi serait-il un homme neuf et pas moi ?

Au sommet de l’État, on estime que le vrai but d’une conférence nationale serait d’évincer le président. Ces craintes sont-elles fondées ?

Cette pratique n’était pas si mauvaise. À l’origine, elle visait à éviter qu’une personne accède au pouvoir et le gère pour le bénéfice exclusif de son ethnie. Cela a marché, mais il y a eu des excès : un Fang n’a jamais été ministre des Finances ni ambassadeur à Paris ou à Washington !

Pas du tout. Ce que nous voulons, c’est la limitation du nombre des mandats, des élections à deux tours, et que d’autres avancées démocratiques supprimées par Omar Bongo Ondimba soient réinstaurées.

Ce que vous espérez, au fond, n’est-ce pas revenir aux affaires ?

On nous présente comme des aigris,

Certains espèrent aussi la fin de la répartition des postes en fonction de la région d’origine…

Que pensez-vous de la décision d’accorder plus de place à la langue anglaise ?

Je n’ai aucun problème avec l’anglais. J’ai toujours encouragé mes propres enfants à maîtriser cette langue, car je suis conscient de sa domination dans le monde. Seulement, il ne faut pas oublier que la Constitution fait du français la seule langue officielle du Gabon. De plus, les instituteurs sont-ils préparés à répondre à la nouvelle ambition du président ? Et était-il utile de faire cette déclaration à la veille du sommet de la Francophonie ? ● Propos recueillis par GEORGES DOUGUELI JEUNE AFRIQUE


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RD CONGO

Pauvres députés! Déjà payés plus de 7 000 dollars par mois, les élus réclament un doublement de leur salaire. Le gouvernement fait la sourde oreille.

L

es députés congolais n’ont pas eu plus de chance que leurs collègues kényans. Le 10 octobre, à Nairobi, le président Mwai Kibaki a refusé tout net d’octroyer aux parlementaires un bonus exceptionnel de 105000 dollars (81 000 euros) chacun. Les élus (parmi les mieux payés en Afrique) ont eu beau protester, ils devront « se contenter » de leurs 10000 dollars mensuels. Pas d’augmentationnonpluspourles«honorables» congolais,quiespéraientaumoinsundoublement de leur salaire. Début octobre, ils ontmêmeenvisagéd’interpellerlePremier ministre,AugustinMatataPonyo,enpleine séance à l’Assemblée, avant que des tractations en haut lieu ne fassent taire les récriminations.

FIN DE NON-RECEVOIR. Que voulaient les députés congolais ? Le précédent gouvernement avait, pour des raisons budgétaires, décidé de réduire le train de vie jugé élevé des institutions du pays. Les élus, dont les émoluments s’élevaient à près de 6 000 dollars mensuels, se sont retrouvés avec 4 250 dollars. Après le changement de gouvernement d’avril, ils ont sollicité auprès du nouveau Premier ministre une revalorisation qui les placerait au même niveau que les sénateurs, dont les revenus mensuels atteignent, selon eux, les 13000 dollars. Matata Ponyo leur a opposé une fin de non-recevoir. Mais sont-ils vraiment mal payés ? Aux 4 250 dollars mensuels s’ajoutent 3 000 dollars destinés à couvrir leurs frais de transport, de communications, et la rémunération du secrétaire parlementaire. Les présidents et vice-présidents des

commissions parlementaires perçoivent en plus 2 000 dollars. Les membres de la commission économique et financière bénéficient également de frais d’hébergement pour la période durant laquelle ils examinent le budget de l’État. CLASSE ÉCO. Les élus estiment pourtant qu’ils sont mal payés parce que, lorsqu’ils regagnent leur fief, ils sont obligés de redistribuer à leurs électeurs ce qu’ils ont gagné. « La crise est profonde dans l’arrière-pays, se lamente un député de lamajorité. Il n’y a pas d’emplois et les gens pensent que nous sommes les représentants du gouvernement et nous demandent de satisfaire tous leurs besoins. Nous ne pouvons pas nous dérober. » Les députés sont convaincus que les sénateurs sont les mieux lotis et rappellent qu’en mission ils voyagent en classe économique, alorsque les sénateurs sont en classe affaires. « Léon Kengo wa Dondo [le président du Sénat, NDLR],

grâce à son budget de fonctionnement, a mis en place une organisation qui permet aux sénateurs de bénéficier de bonus et d’augmenter leurs revenus. Ce n’est pas le cas à l’Assemblée nationale », relève un député de l’opposition. Il est vrai qu’il n’y a qu’une centaine de sénateurs, contre cinq cents députés. Toutefois, le gouvernement reste ferme. « Si les émoluments des députés étaient revus à la hausse, le budget de fonctionnement de l’Assemblée serait supérieur à celui du ministère de la Défense », indique un observateur. À titre de comparaison, un membre du Congrès américain est payé 14500 dollars; un député du Congo-Brazzaville touche 3950 dollars, contre 2000 dollars pour son confrère de Bujumbura. Ce qui n’empêche pas un élu du Bas-Congo (Ouest) d’affirmer que « 70 % des députés ne sont pas rentrés dans leurs fiefs lors des vacances parlementaires par peur de n’avoir rien à distribuer ». ● TSHITENGE LUBABU M.K.


Coulisses

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Afrique subsaharienne

RD CONGO

Revoilà Ndongala L’opposant, qui avait disparu, a refait surface près de Kinshasa. ais où était-il passé ? Le député Eugène Diomi Ndongala a fini par refaire surface, une centaine de jours après avoir disparu. L’air débraillé, la barbe bien fournie, il a été retrouvé dans la nuit du 10 au 11 octobre près du Centre supérieur militaire de Binza Ozone, à l’ouest de Kinshasa, selon un communiqué publié par son parti, Démocratie chrétienne. Une réapparition fort opportune, à la veille de l’ouverture du sommet de la Francophonie. Les autorités ont toujours dit ne pas savoir où était Eugène Diomi Ndongala, officiellement accusé de viol sur mineur. Elles avaient laissé entendre qu’il était passé dans la clandestinité pour échapper à la justice. Sa femme, en revanche, affirmait qu’il était aux mains des services de renseignements et que les accusations de viol visaient à punir le soutien sans faille qu’il apportait à Étienne Tshisekedi, le patron de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). ●

GUINÉE ÉQUATORIALE

Très cher Julio Iglesias Les places de son concert étaient vendues 760 euros.

L

e chanteur Julio Iglesias se produisait à Malabo (Guinée équatoriale) le 8 octobre, mais, pour le voir, il fallait y mettre le prix : pas moins de 760 euros (500 000 F CFA) pour une place dans le Palais des congrès de Sipopo, construit pour accueillir un sommet de l’Union africaine en 2011. Une somme exorbitante pour un concert qui, si l’on en croit les affiches placardées dans la ville, était organisé par TNO Production, la maison de disques de Teodoro Nguema Obiang Mangue, dit Teodorín, le fils du chef de l’État. ● N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

BEN CURTIS/AP

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! De g. à dr. : JANE MUTHONI MARA, WAMBUGA WA NYINGI ET PAULO MUOKA NZILI, autorisés à poursuivre Londres pour des sévices subis dans les années 1950.

KENYA BIENTÔT LA JUSTICE ? Leur pire ennemi, aujourd’hui, c’est le temps. Jane Muthoni Mara (73 ans), Paulo Muoka Nzili (85 ans) et Wambuga Wa Nyingi (84 ans) se battent depuis des années pour que ne restent pas impunies les tortures subies dans les années 1950, quand le pouvoir colonial en place au Kenya mettait tout en œuvre pour mater la rébellion Mau Mau (entre 11 000 et 50 000 morts). Ce jour viendra peut-être : le 5 octobre, la Haute Cour de justice britannique leur a accordé le droit de poursuivre la GrandeBretagne. « J’estime que la base de documents disponibles est tout à fait substantielle et de nature à dégager un tableau très complet de ce qui se passait dans les cercles gouvernementaux et politiques à Londres et au Kenya durant la loi d’urgence », a dit le juge. Le Foreign Office a fait appel. Sans doute craint-il une multiplication des demandes de réparation. Comme le signale un avocat des victimes, Martyn Day, « des victimes de la torture coloniale, de la Malaisie au Yémen, de Chypre à la Palestine, liront sans doute le jugement avec une grande attention ». ●

AFRIQUE DU SUD TOUS LES CHEMINS MÈNENT À ZUMA Tout cela n’a rien à voir avec Jacob Zuma, ont assuré les autorités, le 10 octobre. C’est donc un hasard si deux routes, qui mènent par ailleurs à la propriété du président dans le Kwazulu-Natal, s’apprêtent à être rénovées pour 67 millions de dollars. L’opposition sud-africaine a tout de même tiqué, d’autant que, quelques jours plus tôt, la justice avait annoncé l’ouverture d’une enquête sur la construction de la résidence privée de Jacob Zuma, qui aurait été financée par des fonds publics. SÉNÉGAL PROFANÉES Il n’y a pas de petits profits. Début octobre à Dakar, plus de 160 tombes ont été profanées

dans deux cimetières chrétiens de la ville : des crucifix, des statuettes et des morceaux de stèle en bronze ont été dérobés. Selon l’archidiocèse de Dakar, les objets en fer ou en aluminium ont en revanche été délaissés. GHANA BRAS DE FER Non, c’est non. Le 11 octobre, la justice ghanéenne a refusé, en appel, de libérer une frégate argentine retenue au port deTema, à l’est de la capitale. Le Libertad, un navire-école qui transportait 200 membres d’équipage, a été immobilisé le 2 octobre sur ordre d’un tribunal local à la suite du recours du fonds NML, un fonds spéculatif qui détient des titres de la dette de l’Argentine. Buenos Aires affirme que son navire jouissait d’une immunité diplomatique. JEUNE AFRIQUE


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BURKINA FASO

Les fantômes de

DOMINIQUE FAGET - ALEXANDER JOE/AFP

Sankara

Le 15 octobre 1987, « Tom Sank » tombait sous les balles du commando officiellement venu l’arrêter. Vingt-cinq ans plus tard, Jeune Afrique est allé à la rencontre des acteurs de cette journée qui a sonné le glas de la révolution. Des hommes dont l’histoire est indissociable de celle de leur pays. RÉMI CARAYOL

«

C

e matin du jeudi 15 octobre 1987, je m’étais réveillé d’une humeur égale sans me douter que ce jour marquerait un tournant dans l’histoire de notre peuple », écrivait Valère Somé dans Thomas Sankara. L’espoir assassiné (L’Harmattan, 1990). Quelques heures plus tard, le « PF » (pour président du Faso) sera criblé de balles au Conseil de l’entente, là où toutes les décisions se prenaient sous « Tom Sank ». Une tuerie qui sonnait le glas de la révolution burkinabè et l’avènement de « la rectification », et sur laquelle planent encore de nombreuses zones d’ombre. Que sont devenus les acteurs du 15 octobre 1987 ? Beaucoup sont morts, et c’est certainement ce qui explique le silence de ceux qui sont encore en vie. À travers leur parcours, c’est l’histoire récente du Burkina que l’on raconte. Une histoire faite de sang et de pardons, de silences et d’inconnues. JEUNE AFRIQUE

ALOUNA TRAORÉ

Le miraculé Alouna Traoré, la cinquantaine passée, est le seul survivant de la tuerie du 15 octobre. Ce jour-là, dans la salle de réunions où venait d’entrer Sankara, ils étaient six : tous membres du secrétariat de la présidence. Cinq seront tués ; lui sera blessé mais aura la vie sauve. À l’époque, il travaille depuis peu à la présidence, où il est chargé de l’information et de la propagande. Quelques mois plus tard, il N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


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Afrique subsaharienne Burkina Faso racontera les détails de la fusillade au journaliste de Jeune Afrique Sennen Andriamirado. Depuis, il se tait, refuse de revenir sur cette journée. « Toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire », philosophe-til. Il n’a pas bien vécu son exil (trois ans à Abidjan puis à Brazzaville, où de nombreux sankaristes se sont retrouvés). Encore moins son retour au pays, en 1991. Il a fait plusieurs dépressions nerveuses qu’il lie au 15 octobre. À Ouaga, on le dit fou. « Il débloque complètement », pense un ancien ami de Sankara. Un autre suppute qu’il s’agit d’un moyen d’éviter les représailles… Ces « problèmes de santé » lui ont fermé bien des portes dans la fonction publique, où il a été réintégré en 1994. « Aujourd’hui, je suis serein, je me porte bien, je prie, j’ai une famille, mais c’est difficile de trouver un poste. » Il n’exclut pas de s’engager en politique, de devenir maire un jour. Sous quelle étiquette ? Celle du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), répond-il. Le parti de Blaise Compaoré, celui qui arriva au pouvoir à la mort de Sankara, et de Hyacinthe Kafando, un de ses bourreaux du 15 octobre? « Il faut être opportuniste, aller là où on gagne. »

HYACINTHE KAFANDO

Revenu de chez les morts Lui aussi a échappé de peu à la mort. Pas en 1987, mais neuf ans plus tard. Le 15 octobre, il était dans le camp des vainqueurs. Il fut l’un des sept membres du commando chargé d’arrêter (ou de tuer, les versions varient) Sankara. Dans son livre, Somé l’avait accusé d’avoir tiré sur le capitaine. Il s’est depuis rétracté. « Je lui ai posé la question, il m’a dit que ce n’était pas lui », affirme-t-il aujourd’hui. À l’époque, Kafando est une N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

terreur. Officiellement, il est le bras droit de Gilbert Diendéré, qui dirige le Centre national d’entraînement commando (Cnec) de Pô et dont les hommes sont chargés d’assurer la sécurité du PF. En fait, Kafando est déjà l’homme de main de Compaoré. Durant la « rectification », il sera le chef de sa garde rapprochée. En 1996, il est accusé d’avoir fomenté un complot contre Compaoré, mais il pourrait tout aussi bien avoir fait les frais de sa rivalité grandissante avec Diendéré. Obligé de fuir, il s’exile aux Philippines. Son adjoint, Arzouma Ouédraogo, dit « Otis », accusé d’avoir trempé dans le coup (et qui faisait lui aussi partie des sept le 15 octobre), sera exécuté en décembre. Kafando, qui n’aurait jamais perdu la confiance de Compaoré, réapparaît subitement en 2001, deux semaines après l’organisation d’une journée du pardon… Six ans plus tard, il troque le treillis pour le costume trois pièces et se fait élire

! ÉTIENNE ZONGO, L’ANCIEN AIDE DE CAMP DE

SANKARA, s’est reconverti dans le business.

à l’Assemblée nationale. Membre du CDP, il briguera à 57 ans un deuxième mandat en décembre prochain. Des sept membres du commando du 15 octobre, il est le seul encore visible. Deux sont morts et les quatre autres ont disparu de la circulation.

GILBERT DIENDÉRÉ " ALOUNA TRAORÉ est l’unique survivant de la tuerie.

L’intouchable Kafando n’aura pas eu la peau de Gilbert Diendéré. « Lui, c’est un intouchable », juge un ministre du gouvernement actuel. Le vrai bras droit de Compaoré, une pièce maîtresse du régime. Le 15 octobre 1987, il est déjà proche de « Blaise ». Ce sont ses hommes du Cnec, qu’il dirigeait depuis 1983, qui ont abattu Sankara. Il est arrivé sur les lieux juste après la tuerie. « On ne voulait pas le tuer, juste l’arrêter », s’est-il longtemps justifié. Depuis, il a pris du galon. En 1989, après avoir déjoué un complot présumé du numéro deux et du numéro trois du régime, Henri Zongo et Jean-Baptiste Lingani, il en devient lui-même le numéro deux. Aujourd’hui chef d’étatmajor particulier du président, il dirige l’élite de l’armée burkinabè, le régiment de la sécurité présidentielle (RSP). C’est lui aussi qui chapeaute l’ensemble des services de renseignements du pays. Le président peut-il un jour décider JEUNE AFRIQUE


Les fantômes de Sankara

ÉTIENNE ZONGO

Loin du cœur Le 15 octobre 1987, cela faisait quatre ans qu’il était l’aide de camp de Sankara, mais il se trouvait à des centaines de kilomètres de Ouagadougou, dans l’est du pays. « Je suis rentré trente minutes après le coup de feu. » La deuxième fois qu’il a échappé à la mort, c’était durant les premières années de son exil au Ghana. Après deux années de détention et de résidence surveillée (il fut l’un des derniers à avoir été libérés), il avait rejoint plusieurs de ses camarades dans le pays de Jerry Rawlings. « Je fréquentais le Lion [Boukary Kaboré, dont il sera question plus loin, NDLR], raconte-t-il. Lui voulait rentrer et se battre. Mais j’avais l’impression qu’il était infiltré. Un jour, des gars venus du Burkina nous ont tiré dessus. » Depuis, plus de politique: il a disparu des écrans radars. Ses anciens amis disent n’avoir que très rarement de ses nouvelles. Il est le seul à ne jamais être rentré au pays. Ce n’est pas qu’il a voulu oublier. Mais, dit-il, « je ne voulais pas être accusé de quelque complot que ce soit ». Contrairement aux autres, et même s’il reconnaît que l’exil n’est pas toujours confortable, il a su passer à autre chose. Il a d’abord occupé un poste dans une société pétrolière du Ghana, puis a rejoint Ghana Airways en tant que pilote en 1993. Depuis sept ans, il s’est reconverti en homme d’affaires prospère. Au Ghana dans le secteur pétrolier, et au Congo dans le bois. Peut-être rentrera-t-il au pays lorsque l’heure de la retraite aura sonné. Mais il ne revendiquera rien. Ni sa réintégration dans l’armée, ni un quelconque rôle politique : « J’ai assez donné », dit-il. Quant aux événements du 15 octobre, il n’y reviendra pas : « On connaît la vérité, mais on se protège. » JEUNE AFRIQUE

BOUKARY KABORÉ

avec l’assurance de ne pas être poursuivi, il cultive la terre dans l’Ouest, essuie les critiques de certains sankaristes, qui le qualifient d’« escroc », et tente d’exister à travers son parti qui s’inscrit dans la mouvance sankariste, le Parti pour l’unité nationale et le développement (PUND). Mais il a perdu de son éclat : en 2010, il n’a recueilli que 2,31 % des suffrages à la présidentielle. En 2011, il a été réhabilité au sein de l’armée et promu au grade de colonel.

Un lion sans éclat En 1987, « Le Lion du Boulkiemdé » était un fidèle parmi les fidèles de Sankara. C’était aussi un chef militaire rustre et sans pitié, craint par la population. Le président l’avait placé à la tête de la brigade d’intervention aéroportée (BIA) de Koudougou, un poste stratégique dans l’armée. Avec Vincent Sigué, un chien fou qui terrorisait tout le monde mais d’une fidélité sans faille, et Michel Koama, le commandant de l’escadron de transport et d’intervention rapide (Etir), Kaboré faisait partie des anges gardiens de Sankara. Quand il a appris la mort de son ami, il est entré en résistance avec ses hommes, à Koudougou. C’est certainement ce qui l’a sauvé. Au même moment, Koama était exécuté à son domicile, et Sigué abattu alors qu’il tentait de fuir vers le Ghana. Deux semaines plus tard, Kaboré filait à son tour chez le voisin ghanéen. L’exil fut long et oisif. Depuis son retour, en 1991,

VALÈRE SOMÉ

Du vague à l’âme

! Le jour du drame, VALÈRE SOMÉ fut l’un des derniers à parler au chef de la révolution burkinabè.

PHOTOS : BAUDOUIN MOUANDA POUR J.A. ; NYABA OUEDRAOGO POUR J.A.

de s’en séparer ? C’est difficile à imaginer, confie un proche de Compaoré : « Diendéré connaît tous ses secrets. »

Somé, « c’est un incompris », juge un ancien ami de Sankara. Un intellectuel hors norme « à l’ego surdimensionné ». Un militant au caractère impossible, qui a le don de se mettre à dos tout le monde. Mais c’est surtout un homme détruit par la mort de son ami. Le 15 octobre, il fut l’un des derniers à parler à Sankara. Le matin, le PF l’avait fait venir à la présidence. Auparavant ministre, il était chargé d’élaborer un programme pour le Conseil national de la révolution. Les deux hommes s’étaient quittés cinq heures à peine avant la fusillade. Arrêté quelques jours plus tard, emprisonné et torturé, il quitte le pays en 1988. Suivent six années d’un exil douloureux (au Bénin, au Congo, puis en France). En 1994, il rentre au Burkina aux frais du pouvoir – ce qui fait dire à certains qu’il s’est vendu. Réhabilité dans la fonction publique, nommé dans un institut de recherche, où il étudie l’anthropologie, il tente de faire vivre la pensée sankariste sur la scène politique, mais il se fâche avec tout le monde. Il crée un parti, un deuxième, puis un troisième, avant de se résoudre à prendre du recul, en 2002. Il tombe, un temps, dans l’alcoolisme et dans l’oubli. Aujourd’hui, « il semble aller mieux, dit un ami. Il ne boit plus ». Il envisage même un retour en politique. Mais pas question d’aller « composer avec les loups ». Ceux qui ont tué Sankara ? « Pourquoi les citer ? » Le passé est le passé. ● N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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Le Ca r refo u r d e s PME PUBLI-INFORMATION

SPÉCIAL FORUM D’AFFAIRES FRANCO-IVOIRIEN

Les PME africaines au cœur de la croissance En présentant leurs activités, elles démontrent leur savoir-faire pour trouver de nouveaux partenaires.

D

onner une plus grande visibilité aux Petites et moyennes entreprises ou industries africaines, tel est le pari engagé en créant le Carrefour des PME, dont voici la première édition. Les PME et PMI sont en effet une composante fondamentale du tissu économique de la plupart des pays du continent. Elles prennent une part importante à la création de richesse et jouent un rôle moteur au regard de l’emploi. Et lorsqu’elles évoluent dans un environnement qui favorise leur développement, leur dynamisme et leur croissance participent à la vitalité économique de l’ensemble de la Nation.

Il est donc normal, voire obligatoire, que les PME bénéficient de l’attention des pouvoirs publics et, depuis quelques années, d’un regain d’intérêt de la part des institutions financières internationales. Des mesures d’accompagnement à la modernisation et à l’exportation sont mises en place dans la plupart des pays. Avec, en ligne de mire, de nouveaux objectifs pour leur développement : l’emploi qualifié et la conquête de marchés. De nombreux chefs d’entreprise africains l’ont compris et sont déjà à la recherche de partenaires et de nouveaux débouchés commerciaux. Le Carrefour des PME est leur outil de promotion et de communication dans cette stratégie. Le premier Carrefour des PME est publié à l’occasion du Forum d’affaires francoivoirien, du 14 au 17 octobre à Abidjan (lire I

l’encadré), organisé par l’Agence française pour le développement international des entreprises, Ubifrance, et le Centre de promotion des investissements en Côte d’Ivoire (Cepici). Les petites et moyennes entreprises ivoiriennes emploient 23 % des travailleurs du secteur formel et représentent 98 % des sociétés recensées dans le secteur privé, qui produit 85 % de la richesse nationale. Dans leur grande majorité, elles ont maintenu leurs activités, résistant aux crises politicomilitaires que le pays a traversées. C’est très largement grâce à elles que la Côte d’Ivoire a pu maintenir son rang de quatrième puissance économique d’Afrique de l’Ouest, au grand étonnement des observateurs étrangers. Si leur compétitivité a été rudement mise à l’épreuve par le passé, elles sont aujourd’hui au cœur des préoccupations des pouvoirs publics qui, dès le calme revenu, ont lancé un vaste plan de relance du secteur privé. L’accent est mis cette année sur la diversification et la modernisation du tissu économique. Cap sur les investissements, l’emploi et le développement du commerce extérieur. Les entrepreneurs ivoiriens vont en particulier bénéficier de l’appui de conseillers économiques et commerciaux qui faciliteront leurs recherches d’investisseurs ou de débouchés à l’exportation. Un département est spécialement dédié à l’appui aux PME/ PMI au sein du Cepici. Au fil des pages de ce premier Carrefour des PME, les entreprises françaises et ivoiriennes présentent leurs activités et démontrent leur savoir-faire. Comme elles, dans de prochaines éditions, d’autres Petites et moyennes entreprises africaines ambitieuses prendront rendez-vous avec de nouveaux partenaires et clients.

En partenariat avec UBIFRANCE LE FORUM D’AFFAIRES FRANCO-IVOIRIEN

Organisé par Ubifrance et le Centre de promotion des investissements en Côte d’Ivoire (Cepici), le Forum d’affaires francoivoirien se tient du 14 au 17 octobre à l’hôtel Ivoire, à Abidjan. Plus de 120 sociétés françaises et près de 350 PME ivoiriennes y participent. Des ateliers thématiques sur l’investissement, les financements, l’environnement des affaires et les conditions d’importations sont organisés à leur intention, ainsi que des présentations des secteurs les plus porteurs en Côte d’Ivoire, comme les infrastructures, les TIC et la santé. Pas moins de 2 500 rendez-vous individuels sont organisés sur deux jours pour favoriser les rapprochements et créer ou renforcer des partenariats commerciaux, industriels, et technologiques.

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Le Ca rrefour des PME

SPÉCIAL FORUM D’AFFAIRES FRANCO-IVOIRIEN

CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE DES ENTREPRISES DE CÔTE D’IVOIRE

Ì Organisation patronale

Bâtissons des entreprises fortes et prospères pour le développement harmonieux de la nation ivoirienne, relevons « le défi du meilleur »

Ì Représentation des entreprises auprès des pouvoirs publics et des organisations syndicales Ì Promotion et défense des intérêts des entreprises ivoiriennes

L

a Confédération Générale des Entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI) fédère plus de 800 entreprises à travers 17 groupements professionnels et trois associations. L’activité de ses membres couvre tous les secteurs d’activité : agriculture, industrie, commerce et services.

Acteur majeur pour la représentation des entreprises auprès des pouvoirs publics et des organisations syndicales de Côte d’Ivoire, la CGECI est également en liaison permanente avec de nombreuses organisations internationales, comme les partenaires au développement, les patronats de nombreux pays (France, Chine, Canada, Japon…) et des institutions telles que l’OIE, le BIT ou encore la FOPAO. Dans le cadre de ses missions de promotion et de défense des intérêts des entreprises ivoiriennes, la CGECI leur apporte tout concours et services nécessaires au renforcement de leurs compétences par l’organisation de rencontres professionnelles et thématiques et la mise à disposition de services d’information et de conseil. Ses actions visent trois objectifs majeurs : • Faire du dialogue social le moteur du développement économique et social, • Améliorer l’environnement des

affaires et la compétitivité des entreprises, • Promouvoir les initiatives privées et l’entreprenariat. UN ENGAGEMENT FORT EN FAVEUR DES PME/PMI La CGECI mène de nombreuses initiatives pour soutenir les PME et PMI, qui représentent 70 % de ses membres. Elles s’inscrivent dans le cadre d’études prospectives dont le plan « Côte d’Ivoire 2040 », qui entend promouvoir résolument la création de richesse par les entreprises pour augmenter leur apport au développement économique du pays. Le « Forum économique du patronat sur le financement », organisé en mai 2012, a consacré cet engagement de participer significativement à l’essor des PME. Des résultats concrets ont déjà été obtenus dans plusieurs domaines, du financier au juridique et fiscal. La CGECI a ainsi contribué au remboursement des arriérés commerciaux et de crédit de TVA par l’État ou encore à l’exécution du Programme national d’Appui à la Revitalisation des Entreprises (PARE/PME). Elle a par ailleurs initié la création de la maison de l’entreprise, d’un fonds de garantie et d’un bureau de crédit. Sur le plan de la fiscalité, les propositions de la CGECI se sont traduites par des mesures avantageuses pour les PME, comme la réduction de l’impôt sur les bénéfices (de 35 % à 20 %), l’exonération du paiement de la patente lors de la création d’entreprise, la création de zones d’investissements défiscalisées ainsi que la loi d’orientation des PME.

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Futur siège de la CGECI à l’horizon 2013

Dans le cadre de la lutte contre la corruption et pour la transparence, la CGECI s’est impliquée dans la mise en place du Tribunal de Commerce, du Centre de Facilités des Entreprises (CFE) et de l’Autorité Nationale de Régulation des Marchés Publics (ANRMP). Tout en soutenant ainsi l’amélioration de l’environnement des affaires, la CGECI a initié plusieurs programmes de formation : • management stratégique (avec HEC Paris), • management en situation de relance économique (avec la coopération israélienne), • management et leadership des femmes entrepreneurs, • référentiels internationaux de type ISO 22000, IFS, BRC, GLOBALGAP, audit environnemental, efficacité énergétique… Par ses initiatives pour renforcer l’intégration régionale, la qualité de l’environnement des affaires et la compétitivité des entreprises, reconnue comme interlocuteur fiable et représentatif par les pouvoirs publics et la communauté

internationale, la Confédération Générale des Entreprises de Côte d’Ivoire appuie quotidiennement les entrepreneurs ivoiriens dans leur stratégie de conquête de marchés et de création d’emplois. ●

CGECI EN CHIFFRES ●

Plus de 800 entreprises

Plus de 8 000 milliards de F CFA de chiffre d’affaires

Environ 1 000 milliards de F CFA de contribution aux recettes de l’État

Plus de 100 000 emplois

CONTACT 01 B.P. 8666 Abidjan 01 - Côte d’Ivoire Tél. : +225 20 30 08 20/ 20 30 08 21 Fax : +225 20 22 28 25 cgeci@cgeci.org www.cgeci.org

II


Le Ca rrefour des PME ECOOKIM

Ì Production, Exportation Café-Cacao

Produire de la qualité en quantité

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AERO CORPORATE

Ì Aviation d’affaires

Décollez maintenant à destination de votre choix

Ì Une union coopérative ivoirienne à dimension inter-régionale

Ì Une solution adaptée à vos besoins

Ì Une expertise plurielle

Ì Une équipe de professionnels qualifiés

C

réée en 2004, ECOOKIM est issue de l’union de huit coopératives leaders de la filière café-cacao. Elle est présente dans les principales régions productrices avec pour mission le respect de la qualité pour la conquête du marché international. Agréée à l’exportation depuis la campagne 2005/2006 et certifiée FAIRTRADE depuis 2010, ECOOKIM a participé au projet ICCO (gestions des risques prix) et se positionne selon le classement de l’Agence Nationale de Développement Rural (ANADER) en 2008, parmi les trois meilleures coopératives de Côte d’Ivoire, et dispose encore d’une grande marge de progression. « Nos principaux atouts : CONTACT notre union, notre expertise, notre 01 B.P. 12497 positionnement au cœur du déve- Abidjan 01 - Côte d’Ivoire loppement durable, contribuent à Tél. : +225 20 21 18 01 garantir notre succès » explique Fax : +225 20 21 18 02 Mamadou Bamba, Directeur ecookim@aviso.ci info@ecookim.com Général. ●

AGEMA

L

’Afrique attire de plus en plus d’investisseurs et d’hommes d’affaires. Le « Business Jet » apparaît comme une solution adaptée à leurs besoins. AERO CORPORATE est spécialisée dans le domaine de l’aviation d’affaires en Afrique de l’Ouest. « Pour vos voyages, nos avions parcourent la Côte d’Ivoire et l’Afrique » précise Serge Moukarzel, Directeur Général chez AERO CORPORATE. Observant les règles internationales de l’OACI et des normes de sécurité rigoureuses, AERO CORPORATE donne accès aux meilleurs services pour le confort et la sécurité des passagers. « Avec notre équipe de professionnels, appuyée par un réseau de partenaires internatio- CONTACT naux, nous mettons tout en œuvre 07 B.P. 302 - Abidjan 07 - Côte d’Ivoire pour répondre à toutes les attentes. Cel. : +225 08 71 52 50 Notre expérience et notre savoir- Tél. : +225 21 58 74 58 faire nous permettent de satisfaire Fax : +225 21 58 76 58 aerocorporate.commercial@gmail.com chaque demande. » ●

Ì Promotion immobilière

Un nouveau complexe hôtelier et commercial à Abidjan Ì Transactions immobilières, vente, location, syndic de copropriété Ì Gestion et marketing immobilier

A

GEMA est une agence immobilière agréée, spécialisée dans la commercialisation et la gestion de programmes immobiliers de grand standing. Elle accompagne les entreprises dans les réservations d’espaces commerciaux. AGEMA s’associe au Cabinet Cauris d’Abidjan pour promouvoir un nouveau complexe hôtelier et III

commercial innovant qui ouvrira ses portes à Abidjan début 2013. À l’origine de ce projet, une synergie entre des acteurs clés pour la conception et le financement s’est effectuée. Conçu par l’architecte Roger M’Bengue du Cabinet Cauris d’Abidjan pour le Fonds de prévoyance Militaire (FPM) en partenariat avec la BIAO-CI, « Le complexe hôtelier Ivoire Palm Club » se veut être « The place to be » à l’horizon 2013. Situé dans le quartier de Cocody Lycée technique, à cinq minutes du Palais des Congrès de l’Hôtel Ivoire et à quinze minutes du quartier des affaires du Plateau d’Abidjan. Le complexe hôtelier Ivoire Palm Club offrira les services combinés

Complexe hôtelier Ivoire Palm Club

d’un centre d’affaires et d’un Hôtel trois étoiles confort. « Le centre d’affaires abrite un hall d’exposition, une galerie marchande moderne, un espace commercial ainsi que deux étages de bureaux. L’hôtel Palm Club dispose de 88 chambres et suites modernes. Il dispose de plusieurs salles de conférences, ainsi que d’espaces spécialement conçus pour accueillir des réceptions autour d’un patio intérieur avec jardins. Tous les services de proximité nécessaires au confort de la clientèle sont présents, business

center, banque, librairie, salon de coiffure, etc. La clientèle pourra également apprécier l’ambiance du Lobby Bar et du restaurant « grill » en bordure de terrasse, avec piscine et jets d’eau » précise l’architecte Roger M’Bengue. ● CONTACT 01 B.P. 6490 Abidjan 01 - Côte d’Ivoire Tél. : +225 22 44 50 44 Fax : +225 22 48 51 79 agema@afnet.net www.agema-immobilier.com www. hotelpalmclub.com

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Le Ca rrefour des PME TRAINIS S.A

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Ì Formation professionnelle continue

Créateur de performance, accélérateur de carrière Ì Formation en Gestion de Projets et Programmes, Passation de Marchés, Bonne Gouvernance et Management dans les Organisations. Ì Formations sur mesure ou à la carte

I

mplanté en France et en Afrique, TRAINIS est un centre international de formation continue des cadres des directions et services de l’État, d’entreprises privées, responsables de collectivités locales, de programmes ou de projets, membres d’ONG, consultants. Créée il y a cinq ans, elle s’est imposée comme une référence en matière de formation professionnelle continue

TC AFRIQUE

en Afrique. « Notre but est de répondre aux immenses défis en matière de formation continue dans nos pays. Pour aborder avec sérénité l’ère d’un continent émergent, l’Afrique doit compter sur des ressources humaines de qualité, compétentes et prêtes à intégrer entièrement ce changement » indique Daouda Coulibaly, PDG de TRAINIS. « Outre la théorie, les formations sont avant tout pratiques et dispensées par une équipe de formateurs et intervenants internationaux reconnus dans leurs domaines et en mesure de faire partager leurs expériences professionnelles. Nous insistons beaucoup sur le partage d’expérience, les cas pratiques, les simulations et les jeux de rôles.

Salle de conférence TRAINIS

Notre objectif est que les participants ressortent transformés et soient immédiatement opérationnels dès la sortie de la formation » explique Daouda Coulibaly. Les formations sont organisées à Paris, Bamako, Dakar, Brazzaville et Casablanca ou sur demande dans le pays des bénéficiaires. Un programme annuel autour de quatre pôles de compétences est proposé (la Gestion de Projets et Programmes, la Passation de Marchés, la Bonne Gouvernance et le Management dans les Organisations). La qualité

et le sérieux des intervenants ont permis à TRAINIS de gagner la confiance de prestigieux clients (ministères, organisations internationales, entreprises publiques et privées). En 2011, TRAINIS a réalisé 84 actions de formation et formé plus de 600 cadres africains. ● CONTACT B.P. E 5446, ACI 2000 Bamako - Mali Tél. : +223 20 22 07 07 Fax : +223 76 34 67 86 clients@trainis.com www. trainis.com

Ì Transport des fluides

La maîtrise des fluides Ì Canalisation, robinetterie, étanchéité et techniques industrielles Ì Spécialiste ensemblier

T

ROUVAY&CAUVINAFRIQUE a pour vocation le stockage et la distribution de tuyauterie, raccorderie, robinetterie et spécialités industrielles, liées au transport des fluides (pétrole, eau, gaz, vapeur…). Que ce soit pour les projets, les travaux neufs ou la maintenance en passant par les arrêts programmés d’unités, TC AFRIQUE est présent tout au long de la vie des réseaux de transport de fluides. Elle s’attache à développer un savoir-faire d’ensemblier proposant des solutions globales

dans l’approvisionnement de grands projets « clés en main ». De par ses implantations et ses équipes professionnelles et techniques, l’entreprise intervient dans les secteurs de l’énergie, de l’industrie, de l’eau et du bâtiment. En 30 ans, depuis Abidjan en Côte d’Ivoire, la société TC AFRIQUE

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a su développer un partenariat étroit avec ses clients ivoiriens et ceux des sous-régions ouest africaine et d’Afrique centrale, ainsi qu’avec ses fournisseurs européens, afin d’améliorer sans cesse la qualité de ses services. TC AFRIQUE a toujours mis la satisfaction de ses clients au cœur de ses préoccupations. C’est pourquoi depuis sa création en 1982, l’équipe n’a cessé de se mobiliser afin de garantir la meilleure qualité d’écoute et de service. « Notre volonté constante d’amélioration de la qualité nous a naturellement conduit à nous engager dans une démarche en vue de l’obtention de la certification ISO 9001 (version 2008) ». indique Ethel Beaurain, Directrice Générale TC AFRIQUE Abidjan. « Cette année TC AFRIQUE fête

Ethel Beaurain, Directrice Générale TC AFRIQUE Abidjan

ses 30 ans. L’aventure continue et nous serons toujours à votre écoute pour vous offrir un ensemble de prestations adaptées à vos attentes : Conseils, audits, dépannages, formations… » précise Ethel Beaurain. ● CONTACT 16 B.P. 607 Abidjan 16 Côte d’Ivoire Tél. : +225 21 23 01 20 Fax : +225 21 23 01 21 commercial.abidjan@tcafrique.com www.tcafrique.com

IV


Le Ca rrefour des PME TCHEGBAO SA

SPÉCIAL FORUM D’AFFAIRES FRANCO-IVOIRIEN

Ì Bâtiments et Travaux Publics

Plus qu’un univers de confort et de sécurité, un art de vivre Ì Construction Ì Promotion et Gestion immobilière

P

renant conscience du potentiel que pourrait re p ré s e nte r l e s e g ment du haut de gamme, un créneau porteur mais insuffisamment exploité par les promoteurs immobiliers classiques, TCHEGBAO SA a prioritairement orienté son choix de développement vers l’immobilier de qualité.

Créée en 2007 et située à Abidjan, elle s’est engagée dans la voie de l’immobilier de luxe avec pour mission d’offrir à sa clientèle une qualité de vie et de confort à travers la réalisation d’ouvrages insérés dans un site naturel dans le respect de l’environnement avec le choix de lignes architecturales modernes et innovantes, la qualité des matériaux et un service performant et efficace. Elle a pris l’option d’une politique de développement autour de trois principaux arguments de différenciation pour assurer sa compétitivité et sa croissance. La satisfaction de sa clientèle passe avant tout par son effort d’anticipation et sa capacité à déceler l’évolution de leurs besoins

pour s’y adapter. La nécessité de conjuguer compétitivité, qualité et responsabilité dans la créativité demeure au cœur des préoccupations de TCHEGBAO SA pour garantir un service efficient et personnalisé. Chaque chantier est spécifique et doit être considéré comme tel. Maquette du projet «Villa NEPHTALI »

Maquette du projet «Villa GAD »

Pour atteindre son ambition d’être une entreprise capable de satisfaire les besoins et exigences de sa clientèle en matière de produits compétitifs et innovants et en service de qualité, TCHEGBAO SA a choisi de s’appuyer sur l’expertise de partenaires, cabinets d’architectes, bureaux de contrôle technique de référence (Bureau Véritas, Labogem), ingénieurs et techniciens BTP expérimentés. De cet esprit d’anticipation, d’innovation et de qualité, est né le projet résidentiel, « Les Résidences Camellia », résidences de prestige à Abidjan Cocody-Abatta.

Maquette d’une vue aérienne d’une des résidence

V

« Inspirées des «GATED COMMUNITIES » aux USA, « Les Résidences Camellia », est un véritable joyau architectural. Le programme comprend 63 villas duplex de très haut standing prêtes à vivre, déclinées en trois modules. Bâti dans un cadre de vie paisible et confortable, « Les Résidences Camellia » s’étendent sur une superficie de 5,5 hectares avec une belle vue sur la lagune » précise M. M’Besso Nazaire, Directeur Général Adjoint. « Spacieuse, intime et confortable, chaque villa possède 4 chambres à coucher dotées de salle de bain avec équipements de prestige, 2 séjours et une salle à manger revêtus de marbre de premier choix et reliés à l’étage par un escalier magistral en finition de luxe, ainsi qu’une grande cuisine aménagée et équipée par un cuisiniste européen de référence internationale. À cela s’ajoute un garage avec fermeture télécommandée et bien d’autres commodités qui mettent en évidence le caractère particulièrement raffiné des résidences. Né d’une logique sécuritaire, le programme est doté d’équipements par ticulièrement fonctionnels - Portail électrique télécommandé, Guérite centrale gardée, Vidéophone à l’entrée, Interphone sur rue pour chaque

villa, Parking visiteurs autour d’un espace vert soigneusement aménagé - qui reflètent le soin apporté à nos constructions où tout est étudié pour le bien-être et la sécurité des résidents. Nous avons imaginé un développement résidentiel enclos, gardé et protégé par un système de sécurité et de contrôle d’accès électronique avec des caméras de surveillance de haute performance afin d’assurer la sécurité des résidents. Dans la même perspective, le programme est équipé d’un système complet de câblage téléphonique moderne, fiable et performant permettant l’accès à de multiples services (Téléphone, Internet, Vidéo sur ADSL, Wifi…) Pour la qualité des ouvrages et la sécurité des investissements, le programme est soumis, de la conception à la livraison, au contrôle technique de Bureau Véritas. De plus, NSIA Côte d’Ivoire, maître d’ouvrage des Résidences Camellia, garantit et finance l’investissement des futurs propriétaires ». ● CONTACT LES RÉSIDENCES CAMELLIA Tél. : +225 20 22 67 60 Cel. : +225 06 99 05 05 / 65 16 06 14 Fax : +225 20 22 64 60 contact@lesresidencescamellia.com www.lesresidencescamellia.com

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Le Ca rrefour des PME

SPÉCIAL FORUM D’AFFAIRES FRANCO-IVOIRIEN

FONDS AFRICAIN DE GARANTIE POUR LES PME ET PMI Ì Institution financière

Notre objectif : augmenter de manière significative l’accès au financement des PME africaines Ì Appuyer le financement des PME africaines en participant à la garantie financière de leurs opérations Ì Favoriser les interventions des institutions financières dans leur effort pour améliorer leurs capacités de financement des PME

«N

ous voulons être le boulevard qui conduit les PME et PMI africaines vers des institutions financières de plus en plus nombreuses, capables d’appuyer leur stratégie de développement et de conquête de marchés. Pour atteindre cet objectif, nous participons aux garanties présentées par les entreprises, nous soutenons les efforts des institutions financières en faveur des PME et nous nous impliquons dans la création de fonds spécifiques de soutien aux PME » explique Félix A. Bikpo, PDG du Fonds africain de garantie.

Félix A. Bikpo, PDG du Fonds africain de garantie

Créé en 2010 en partenariat avec plusieurs institutions financières, dont la Banque africaine de développement, le Fonds africain de

garantie gère deux lignes d’activité : • Garanties partielles de crédit ; Fourniture de garanties partielles pour les institutions financières dans les pays africains afin de les inciter à augmenter la dette et des investissements en fonds propres dans les PME. Le fonds participe aux garanties dans le cadre de deux types d’opérations : au service des PME dans le cadre de leurs emprunts (que ce soit au titre du chef d’entreprise ou de l’entreprise elle-même) et au service des institutions financières pour leurs opérations de mobilisation de fonds permettant de développer leurs capacités au service des PME. Fondée sur une évaluation des besoins des institutions financières et des PME de la région, il offre trois types de garanties avec différentes structures de frais: un portefeuille et des garanties de prêts individuels, des mobilisations de fonds de garanties de la Banque, et des garanties sur titres • Développement des capacités ; Le fonds aide les institutions financières à développer leurs moyens de financer les PME et à améliorer leur capacité à évaluer et à gérer des portefeuilles de PME. Il affecte une - partie de son budget au renforcement des capacités, avec les institutions financières partenaires couvrant la majeure partie des coûts. Des subventions supplémentaires sont recherchées pour compléter le soutien au développement des capacités du Fonds. Le renforcement des capacités des PME sera géré et mis en œuvre par les prestataires de services locaux existants. Le Fonds africain de garantie exerce ses efforts en priorité dans les secteurs qui sont

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aujourd’hui particulièrement moteurs pour la croissance africaine. Il s’agit en particulier des activités suivantes : Agro-industrie - Exploitation minière -Négoce de pétrole et activités connexes - Industrie BTP - Énergies renouvelables Télécommunications - Transports - Tourisme - Commerce. Comme la définition des PME varie selon les pays et les institutions financières, le Fonds ne prescrit pas de qualification d’autres caractéristiques pour les PME que celles définies par le secteur bancaire des pays où il opère. Le Fonds est actuellement présent dans les pays suivants : Cameroun, Ghana, Kenya, Mali, Mozambique, Sénégal, Tanzanie, Ouganda et Zambie. À terme, il est prévu de couvrir l’ensemble de l’Afrique grâce à la mise en place d’un plan de déploiement régional impliquant l’ensemble des six Communautés économiques régionales africaines. Si le siège du Fonds africain de garantie se trouve à Maurice, ses opérations sont gérées depuis la filiale de Nairobi, au Kenya. Le fonds déploie progressivement des filiales dans les principaux hubs régionaux. Pour accomplir sa mission, il s’associe aux institutions financières qui ont décidé d’augmenter leur portefeuille bancaire de PME. L’organisation s’associe également avec des consultants ayant des compétences spécifiques en matière d’appui aux institutions financières prêtes à financer davantage les PME. Les interventions du Fonds africain de garantie se font sur la base d’un partage des risques avec les institutions financières

concernées. Elles entrent dans le cadre de normes internationales telles que l’UN Global Compact (droits de l’homme, du travail, de l’environnement et de lutte contre la corruption pour les sociétés y compris les banques) ou la recommandation des Nations unies pour l’investissement responsable et observent les règles de la Banque mondiale sur l’environnement des affaires (Doing Business). Le Fonds africain de garantie est géré par un conseil d’administration, un comité exécutif et des sous-comités. Le Conseil a la responsabilité globale de la politique générale et des objectifs, tout en veillant à ce que les ressources suffisantes soient disponibles pour les opérations et que ces ressources soient gérées efficacement. Alors que la Commission est responsable face aux actionnaires de la performance, les opérations quotidiennes sont déléguées au Comité exécutif. Le Conseil exerce un contrôle sur la gestion à travers plusieurs comités : Gestion de la trésorerie (CGT), Investissement (de garantie), Développement des capacités (CDC) et Audit. « Le Fonds africain de garantie est la première institution financière non bancaire qui va au-delà des attentes du secteur financier africain dans son soutien aux PME tout en maintenant, au fur et à mesure de sa croissance, les principes et valeurs qui ont présidé à sa fondation. » ● CONTACT Mayfair Center, 7th Floor, Ralph Bunche Road, Upper Hill, Nairobi, Kenya. Tél.: +254 733 997 747 Fax: +254 272 1517 f.bikpo@africanguaranteefund.com www.africanguaranteefund.com

VI


Le Ca rrefour des PME AFMEPCI

Ì Construction métallique et bâtiments

Un savoir faire au service d’une société en mouvement

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DIFFUSELEC

Ì Énergies renouvelables

Solutions autonomes énergétiques pour sites isolés

Ì Construction métallique, Poinçonnerie

Ì Électrification rurale et urbaine à LED de puissance

Ì Confection de matériels d’électrification

D

Ì Solutions énergétiques autonomes

D

epuis sa création en 2004, AFMEP-CI (Atelier de Ferronnerie de Matériels Électriques et de Poinçonnerie de Côte d’Ivoire) est une entreprise ivoirienne spécialisée dans la serrurerie, la ferronnerie, la construction et le montage de stations services. Grâce aux logiciels de CAO et DAO (Conception Assistée par Ordinateur, Dessin Assisté par ordinateur), son bureau d’étude réalise ses travaux et conçoit des installations complètes, planifiées, réalisées et livrées. Forte d’une équipe jeune, compétente et dynamique, l’atelier n’a cessé de diversifier ses activités et d’élargir son domaine d’activité tout en accompagnant sa clientèle dans leurs différents projets. « Nous combinons efficacité et rapidité pour la satisfaction de CONTACT nos clients qui ne cessent de nous 10 B.P. 538 , Abidjan 10 renouveler leur confiance. Notre Côte d’Ivoire force : des matériels adaptés à Tél./Fax : +225 21 56 12 39 leurs attentes.» affirme Sangaré afmepci@yahoo.fr www.afmepci.com Daouda, Directeur Général. ●

iffuselec, entreprise Éco-Responsable, est un acteur majeur dans les énergies renouvelables en Afrique grâce à : • L’accompagnement financier de chaque projet (prêt étalé sur 5 ans avec un taux d’intérêt de 4 % par an, sous conditions d’acceptation du dossier). • La qualité et la fiabilité de ses produits conçus en tenant compte des contraintes du marché africain. • La compétence et la réactivité de ses services. « Nos réalisations : 2 centrales photovoltaïques (Mali), une usine autonome et 7000 têtes d’éclairage publique à LED (Gabon), l’électrification de 17 villages (Sénégal), des maisons solaires autonomes (Côte d’Ivoire), une usine derecharCONTACT gement de bouteilles de gaz auto475 Rue Mario Piani nomes(Tchad).Tout ceci représente 69480 Ambérieux d’Azergues - France environ 20 millions d’euros de CA Tél. : +33 (0)4 37 55 17 03 déjà réalisés et financés en moins Fax : +33 (0)4 37 55 00 12 de 2 ans » indique Serge Miltcheff, contact@diffuselec.com www.diffuselec.com Président Directeur Général. ●

SITHO Ì Tourisme - Hôtellerie

NSA Hôtel, le plaisir de vous accueillir Ì Complexe hôtelier Ì Organisation d’évènements d’affaires

L

a Société Ivoirienne du Tourisme et de L’Hôtellerie (SITHO) est une structure hôtelière composée de quatre complexes hôteliers dont le NSA Hôtel. Installé à quelques minutes du centre d’Abidjan au calme et

Vue du complexe hôtelier NSA Hôtel et de sa piscine Romaine

VII

Des espaces détente dédiés et un personnel qualifié à votre écoute

construit sur un parc de 5 hectares, NSA Hôtel est spécialisé dans l’organisation d’évènements d’affaires (séminaires, congrès, conférences, déjeuners d’affaires, cérémonies, etc). Son objectif premier est de fournir des prestations hôtelières de qualité répondant aux normes nationales et internationales. Créé en 1983, le complexe possède 104 chambres, 6 salles de 50 à 150 places dont une salle de conférence de 300 places

équipées de matériels modernes, un restaurant bar avec terrasse, un piano bar (le Viva Room), une piscine romaine, un cyber café, un espace café panoramique, un parking de 75 places sécurisées, une plage privée (Le NSA Beach), deux grands halls d’accueil. Situé sur la route de Bonoua, son emplacement en dehors de la ville lui confère un atout qui permet à sa clientèle d’affaires (entreprises, ministères, ONG, associations, collectivités, etc) d’effectuer leurs séminaires dans un cadre propice à la réflexion. De plus, pour garantir la protection de sa clientèle prestigieuse, le complexe s’est doté des services

Une salle de conférences est à votre disposition

de sécurité d’une société privée spécialisée en la matière. « Ses forces : un emplacement de rigueur, un personnel qualifié et expérimenté, des tarifs attractifs, des services qualitatifs, des équipements modernes, un lieu sécurisé, font de NSA Hôtel le lieu idéal pour l’organisation de tous types d’évènements d’affaires. » ● CONTACT B.P. 756 Grand - Bassam Abidjan - Côte d’Ivoire Tél. : +225 21 31 28 00 Fax : +225 21 31 23 88 sitho.nh@aviso.ci www.nsahotel.ci

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Le Ca rrefour des PME

SPÉCIAL FORUM D’AFFAIRES FRANCO-IVOIRIEN

SEEE Ì Second-œuvre du bâtiment, Industrie, Maintenance, Hydraulique villageoise

Une PME Ouest Africaine au savoir-faire reconnu Ì Près de 50 ans de travaux en Afrique Ì Implantée dans 10 pays de l’Afrique de l’Ouest

D

epuis sa création en 1963, la société SEEE (Société d’Études et Entreprise d’Équipements) a réalisé d’importants travaux en Afrique, dans les métiers d’installations et de la maintenance de bâtiments : climatisation, électricité, plomberie, ascenseurs… et depuis 30 ans dans l’hydraulique villageoise. Basée à Abidjan et implantée dans 10 pays d’Afrique de l’Ouest, SEEE y dispose de 6 filiales et de représentants dans la majorité des pays de la sous-région.

KALIMBA

500 personnes possédant un savoir-faire reconnu travaillent pour SEEE, dont 30 ingénieurs formés dans les meilleures écoles. Parmi les nombreuses références de SEEE, on peut citer dans le bâtiment : la réhabilitation et l’extension de l’aérogare d’Abidjan (AERIA), la basilique NotreDame de la Paix à Yamoussoukro, des Lycées (AEFE) ou encore la construction et la réhabilitation

Des employés SEEE devant des climatiseurs centralisés

Ì Agence immobilière

Votre référence en immobilier Ì Transactions immobilières Ì Gestion, Syndic

C

réée en 1995, l’agence immobilière KALIMBA est une entreprise ivoirienne à taille humaine proche de ses clients. KALIMBA prend soin de répondre au mieux aux attentes de sa clientèle en proposant une gestion transparente et une assistance constante tant pour les dossiers de location que d’achat ou vente de biens immobiliers. « Notre but : être la référence en immobilier, souligne Sandra Mahama, Directrice Générale. Ainsi en 2007, une filiale de construction et de décoration, Kalimba Construction et Décoration est créée pour aider les particuliers à optimiser leur espace. Puis, la filiale Keeping and Gardening a suivi, pour se consacrer à l’aménagement des espaces verts et à l’entretien de nos immeubles » poursuit CONTACT Sandra Mahama. Boulevard VGE ZONE 4 « Bienvenue chez Kalimba, 08 B.P. 222 Abidjan 08 - Côte d’Ivoire résume bien l’esprit de l’agence. Tél. : +225 21 35 25 47 Une équipe chaleureuse qui se Fax : +225 21 25 08 38 soucie d’apporter les meilleurs morgane.kalimba@gmail.com www.kalimba-immo.com conseils à sa clientèle ». ● PUBLI-INFORMATION LE CARREFOUR DES PME

des nombreux bâtiments pour des clients institutionnels prestigieux tels que BCEAO, BOAD, UEMOA, BIDC, CB UMOA, dans la sous-région. En maintenance, SEEE développe des prestations multitechniques, optimisées grâce à la GMAO pour des clients exigeants tels que : ORANGE, AERIA, BAD, BCEAO, Ministères, Ambassades, Banques et Assurances. Au niveau de l’hydraulique villageoise, SEEE a réalisé plus de 400 systèmes d’AEP en hydraulique villageoise sur des financements de bailleurs de fonds internationaux ou d’ONG tels que la BAD, BID, AFD, KFW, UE… pour les principaux Ministères et Organismes Nationaux Hydrauliques de la sous-région. SEEE est une

BCEAO siège Dakar

société à la pointe de l’innovation notamment en énergies renouvelables, avec compétence et savoir-faire reconnus. SEEE est très attachée à la formation professionnelle de ses collaborateurs qui régulièrement suivent des stages. SEEE est capable d’offrir les meilleurs services, adaptés aux besoins de chaque client. ● CONTACT 04 B.P. 342 - ZI de Vridi Abidjan - Côte d’Ivoire Tél. : +225 21 27 51 57 Fax : +225 21 27 22 65 secretariat.seee@groupe-seee.com grunspan@b-e-s.fr www.seee.info

Soyez présents dans nos prochaines rubriques « Le Carrefour des PME » Ì

Ì Spécial Eurafric en partenariat avec ADEA le 18 novembre Ì Spécial Salon des PME du Burkina Faso le 23 décembre CONTACT Nsona KAMALANDUA Email : n.kamalandua@jeuneafrique.com Tél. : + 33 1 44 30 19 87

VIII


Le Ca rrefour des PME

SPÉCIAL FORUM D’AFFAIRES FRANCO-IVOIRIEN

CENTRE DE PROMOTION DES INVESTISSEMENTS EN CÔTE D’IVOIRE Ì Promotion des investissements

CEPICI, le Guichet unique de l’investissement en Côte d’Ivoire Ì Création d’entreprises, Relation et environnement d’affaires Ì Organisation de Missions économiques et de forums, Plateforme de concertation secteur public & privé

«L

a Côte d’Ivoire, dès son accession à l’indépendance en 1960, a fait du libéralisme économique et de l’ouverture sur l’extérieur, les choix fondamentaux de sa politique économique. Cette stratégie lui a permis d’enregistrer, pendant de nombreuses années, un développement économique appréciable » rappelle M. Esmel Emmanuel Essis, Directeur Général du CEPICI.

Placé sous l’autorité et la tutelle du Président de la République, le Centre de Promotion des Investissements en Côte d’Ivoire (CEPICI) est un Établissement public à caractère administratif. L’article 4 du Décret N° 2012-867 du 06 septembre 2012 portant création du CEPICI, stipule, qu’il est le Guichet Unique de l’investissement direct en Côte d’Ivoire, et à cet effet, il fédère, coordonne et rationalise l’ensemble des initiatives et actions gouvernementales en matière de promotion des investissements et de développement du secteur privé. Le CEPICI fait office de plateforme de rencontre d’échanges et de concertation entre le secteur public et le secteur privé, afin d’initier et de formuler des propositions au Gouvernement pour répondre aux préoccupations du secteur privé. Les missions du CEPICI revêtent IX

un caractère transversal qui lui confère un rôle dédié à l’accompagnement du secteur privé et d’interface entre celui-ci et l’État, afin d’accroitre les investissements privés en Côte d’Ivoire. À cette fin, il assure à travers le Guichet Unique de l’Investisseur la facilitation des formalités administratives relatives à la création, à l’exploitation, à la transmission ou à l’extension des entreprises. Les administrations et organismes concernés par ces formalités sont, à cet effet, regroupés au sein du Centre. • Il contribue à la réduction des coûts et délais relatifs à ces formalités. • Il assure la réception et l’instruction des demandes des investisseurs pour le bénéfice des avantages du Code des Investissements et pour l’obtention de terrains à usage industriel. De plus, le CEPICI instruit, délivre et retire les agréments à l’investissement. Il assure la promotion et l’attraction des investissements directs nationaux et étrangers en Côte d’Ivoire en organisant, tant en Côte d’Ivoire qu’à l’étranger, des forums et manifestations de promotion économique et en recherchant et identifiant les investisseurs afin de développer des partenariats. Il contribue ainsi à la promotion du Partenariat Public-Privé auprès des investisseurs nationaux et étrangers. En relation avec les ambassades et consulats de la Côte d’Ivoire à l’étranger, il participe à la promotion des investissements en Côte d’Ivoire et entreprend des actions de communication et de marketing de la Côte d’Ivoire comme destination pour l’investissement. Pour favoriser le développement des PME/PMI, le CEPICI

la Côte d’Ivoire, +8,5% projeté en 2012 par la Banque mondiale.

MM. Esmel Emmanuel Essis, Directeur Général du CEPICI

« Le défi de faire de la Côte d’Ivoire un pays émergent à l’horizon 2020 exige du CEPICI une contribution plus accrue de son rôle d’acteur de l’accroissement de l’intervention du secteur privé dans l’économie ivoirienne », indique M. Esmel Emmanuel Essis. ●

initie les rapprochements des investisseurs étrangers avec celles-ci. Il met en place un dispositif d’attraction des investissements de la Diaspora puis crée et met en œuvre un dispositif de suivi-évaluation de tous les investissements ayant bénéficié des avantages du Code des Investissements. D’une manière générale il assure, en relation avec les administrations et les organismes publics et privés concernés, la mise en œuvre des dispositions du Code des Investissements. Le Centre contribue à toutes les actions qui concourent à l’amélioration de l’environnement des affaires et formule des propositions au Gouvernement. En tant qu’Agent d’exécution, il contribue aussi à la mise en œuvre des programmes du Gouvernement et des Partenaires au développement en faveur du secteur privé en Côte d’Ivoire. Dans le contexte de la relance des activités économiques en Côte d’Ivoire, le CEPICI s’est associé à UBIFRANCE dans le cadre du Forum d’affaires franco-ivoirien du 14 au 17 octobre 2012 à Abidjan, afin de permettre aux entreprises françaises de profiter de la dynamique de croissance de

CONTACT Immeuble Bellerive, 16e étage B.P. V152, Abidjan 01 - Côte d’Ivoire Tél. : +225 20 31 14 00 Fax : +225 20 31 14 09 www.cepici.gouv.ci

PUBLI-INFORMATION LE CARREFOUR DES PME


Maghreb & Moyen-Orient

LIBYE

Micmac à Tripoli

Incapable de former un gouvernement de consensus, Mustapha Abou Chagour a rendu son tablier. Un échec personnel révélateur d’une situation politique particulièrement confuse. YOUSSEF AÏT AKDIM

S

a joie aura été de courte durée. Mustapha Abou Chagour a été poussé vers la sortie trois semaines seulement après son élection au poste de Premier ministre par le nouveau Parlement libyen. Quittant les uns après les autres la grande salle de conférences de l’hôtel Rixos, où le Congrès général national (CGN) a pris ses quartiers, les députés lui ont même fait l’affront de voter avec les pieds au moment même où il dévoilait la liste de son gouvernement, le 4 octobre. Un cabinet formé à grand-peine après de nombreux reports et d’interminables tractations en coulisses. À l’extérieur de l’hôtel Rixos, les forces de sécurité avaient les plus grandes difficultés à contenir la manifestation virulente de représentants de Zawiya et de Zwara. Une délégation des deux villes de l’Ouest était « montée à Tripoli » afin de dénoncer leur prétendue marginalisation politique. Mohamed el-Megaryef, président du CGN – et plus haute autorité de l’État par défaut –, tentait de calmer la colère des manifestants. Car la situation aurait pu dégénérer tant la porosité du dispositif autour du bâtiment du CGN est inquiétante. Dans la capitale, on note qu’au moins cinq corps de sécurité différents sont affectés à la surveillance du Parlement. Ingérable ! Les uns rendent bien compte au gouvernement, ou obéissent du moins à l’une ou l’autre des brigades révolutionnaires agréées par lui (lire J.A. no 2700), mais la sécurité des premiers élus de la N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

révolution n’en reste pas moins précaire, comme en témoignent les menaces à l’encontre de Salih Jaouda, député indépendant de Benghazi, récemment pris à partie par une douzaine d’hommes armés de Zintan pour avoir critiqué l’éventuelle nomination d’Othman Aswad, un Zintani, au poste de ministre de l’Intérieur. Le 6 octobre, tard dans la soirée, Guma el-Gamaty, leader du parti Al-Taghyir, a été brièvement enlevé, puis abandonné sur la route de l’aéroport international de Tripoli. « TSA ». C’est dans ce climat pesant que Mustapha

Abou Chagour a finalement été démis de ses fonctions par un vote de défiance du CGN, le 7 octobre. Une délivrance, à en croire ce ouf de soulagement posté sur son compte Twitter le soir même : « Louange à Dieu qui m’a déchargé de cette responsabilité que je n’ai jamais désirée. » Le chaos sécuritaire n’a certes pas facilité la tâche d’Abou Chagour, mais pas seulement. Présentant ce jour-là une deuxième copie sous forme de gouvernement de crise réduit à dix ministres, Abou Chagour n’espérait plus réussir l’examen. Tout juste saisissait-il la dernière occasion qui lui était donnée de régler ses comptes avec ses trop nombreux ennemis. Le ton est offensif, la déception palpable. Les négociations pour s’assurer une majorité lui ont visiblement laissé un goût amer : « J’ai contacté tous les partis, tous les blocs. Certains m’ont répondu, d’autres m’ont fait attendre jusqu’à la dernière minute. » Et d’embrayer sur l’ambition dévorante des uns et des autres : « Un parti a réclamé 11 portefeuilles, un autre 9. Ceux qui demandent ma démission étaient, hier encore, à deux doigts d’entrer au gouvernement. » Une pique adressée aux deux forces principales de l’hémicycle : respectivement le Parti de la justice et de la construction (PJC, 17 sièges), issu de la confrérie des Frères musulmans, et l’Alliance des forces nationales (AFN, 39 sièges), la coalition menée par Mahmoud Jibril. Élu ● ● ●

HAMZA TURKIA/XINHUA PRESS/CORBIS

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! SUR LES 200 DÉPUTÉS DU CONGRÈS GÉNÉRAL NATIONAL (CGN), 120 SONT INDÉPENDANTS.



Maghreb Moyen-Orient ● ● ● le 12 septembre grâce à un front anti-Jibril, l’éphémère Premier ministre a fini par être victime d’un front « tout sauf Abou Chagour », mené notamment par l’AFN et le PJC. Au regard des résultats du vote de confiance – 125 contre, 44 pour –, on peut deviner que les voix des indépendants ont fait basculer la majorité. Car la répartition des sièges du CGN est pour le moins obscure. Sur les 200 représentants, 80 seulement appartiennent formellement à des partis, les 120 restants s’étant présentés comme indépendants. Dans la pratique, leur autonomie est sujette à caution, et l’on peut noter que les Frères musulmans, via le PJC, exercent une influence considérable sur une partie d’entre eux, lesquels ont fait preuve d’une remarquable discipline de vote pour élire Abou Chagour contre Jibril, puis pour le démettre. De là à penser que les Frères sont les faiseurs de roi…

LE MYSTÈRE JIBRIL. Le PJC fait aujourd’hui preuve

d’une grande habileté dans le jeu politique, après avoir essuyé un demi-revers en juillet dernier. Ce à quoi le Premier ministre élu, un ingénieur de 61 ans formé aux États-Unis et ayant passé toute sa vie d’adulte entre l’Amérique et le Golfe, n’a certainement pas été sensible. « Est-ce que tout le monde est convaincu maintenant que je ne suis pas issu des Frères? » a d’ailleurs commenté l’éphémère Premier ministre sur son compte Twitter au lendemain de sa débâcle. Candidat technocrate mais adoubé par une petite formation, le Parti du front national (PFN, 3 sièges), Abou Chagour a noué des réseaux en tant que vice-Premier ministre du gouvernement d’Abderrahim el-Keib, mais il n’est visiblement pas rompu aux complexités de la politique libyenne. On lui a reproché notamment de n’avoir pas respecté une juste représentation des équilibres régionaux et d’avoir favorisé dans sa première proposition de gouvernement les grandes villes de la révolution (Benghazi, Misrata et Zintan).

Constitution : un air de déjà-vu Le 7 octobre, plusieurs personnalités ont appelé à prendre comme base de la nouvelle Constitution celle de 1951, dont voici quelques extraits commentés. Art. 2 : « La Libye est une monarchie héréditaire. » En 2012, plus que la nature du régime, le leadership est un enjeu majeur après le kaddafisme Art. 3 : « Le Royaume-Uni de Libye se compose des provinces de Cyrénaïque, Tripolitaine et Fezzan. » En 2012, la revendication fédérale reste forte dans l’est du pays Art. 10 : « Nul ne peut avoir la nationalité libyenne et une autre nationalité en même temps. » En 2012, les anciens exilés doivent renoncer à leur éventuelle double nationalité

FRONT(S). S’il n’y a pas à proprement parler

Art. 21 : « La liberté de conscience est absolue. » En 2012, un courant moderniste minoritaire mais vigoureux résiste à la tentation islamiste Art. 188 : « Le RoyaumeUni de Libye a deux capitales : Tripoli et Benghazi. » En 2012, le sentiment régional s’est renforcé après la révolution

! MUSTAPHA ABOU CHAGOUR, PREMIER MINISTRE SORTANT. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

Les Frères estiment qu’ils n’ont pas été payés de leur soutien décisif pour battre Jibril en septembre. Ce dernier, visiblement rancunier, a fait mine de négocier, annulant un rendez-vous, prétextant des voyages à l’étranger, proposant l’idée d’un gouvernement national, soumettant la participation de l’AFN à l’acceptation pleine et entière par Abou Chagour du programme du parti. Bref, Jibril a lanterné, laissé espérer, puis éteint son téléphone. L’homme fort de la révolution, 60 ans, est le véritable artisan de la reconnaissance diplomatique de la rébellion par la France, le Royaume-Uni, les États-Unis et le Qatar. Celui qui a endossé les habits de Premier ministre et de chef de la diplomatie pendant toute l’année 2011, et qui connaît bien l’appareil gouvernemental légué par Kaddafi pour avoir travaillé aux côtés de Seif el-Islam, continue de se considérer plus légitime, car plus compétent et plus représentatif. Son ascendant sur le reste du personnel politique suscite une méfiance certaine, que le PJC et le FNSL exploitent opportunément.

SABRI ELMHEDWI/EPA/MAXPPP

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de « parti des fusillés », le PFN est le groupe qui s’en rapproche le plus. Rassemblement d’opposants en exil au régime de Mouammar Kaddafi, il compte autant de technocrates que de personnalités proches de l’idéologie des Frères musulmans. Extrêmement minoritaire dans la nouvelle Assemblée, le PFN a réussi à porter à la tête du CGN Mohamed el-Megaryef, un ancien diplomate sous Kaddafi, qui a fait défection au début des années 1980. À 72 ans, Megaryef est l’emblème du retour en force des exilés, pour le meilleur et pour le pire. La légitimité de ces opposants à l’ancienne est aujourd’hui contestée dans un pays où la majorité de la population est extrêmement jeune (l’âge médian est de 24 ans et demi, d’après le « CIA World Factbook ») et n’a pas connu d’autre figure que Kaddafi, resté au pouvoir près de quarante-deux ans. Outre ces problèmes de personnes, le PFN illustre un problème politique qui risque de hanter encore la transition libyenne : comment créer une majorité stable dans un système électoral où la moitié du vote populaire se traduit en une minorité au Parlement ? L’AFN, coalition d’une soixantaine de partis emmenée par Jibril, a en effet recueilli 900 000 voix, soit la moitié des suffrages exprimés le 7 juillet. Ses listes sont arrivées en tête dans toutes les circonscriptions, sauf à Misrata, où un parti local l’a emporté largement. Avec 39 sièges, l’AFN ne dispose pas de majorité et doit passer des accords. Aujourd’hui, l’Alliance a montré sa capacité de nuisance en aidant à faire chuter Abou Chagour. Son leader est favorable à un pouvoir exécutif fort. Mais il devra dompter les 120 indépendants aux allégeances versatiles et à l’ambition hypertrophiée. Bienvenue en démocratie ! ● JEUNE AFRIQUE


Maghreb Moyen-Orient

TRIBUNE

Op pinions & éditoriau ux

Cinq Algériens et un changement

DR

L’ PAR TARIK GHEZALI Auteur de Un rêve algérien, chronique d’un changement attendu, éditions de l’Aube, 2012

ALGÉRIE NE CESSE D’INTRIGUER les observateurs étrangers : « Pourquoi ce pays a-t-il échappé au Printemps arabe ? Au déchaînement contre le film antiislam ? » Les réponses apportées divergent souvent : les uns invoquent l’apathie d’un pays aussi fatigué que ses élites septuagénaires ; les autres vantent la maturité politique d’un peuple qui s’est rebellé dès 1988 et a digéré depuis, en le payant très cher, le fantasme de l’islamisme politique… Mais comment les Algériens, eux, se positionnentils par rapport au « changement » ? Petit tour d’horizon de quelques cas d’école. Il y a d’abord l’Algérien radical. Pour lui, aucun changement réel ne pourra commencer avant d’avoir fait table rase du pouvoir actuel (« tous pourris »). Il est dans un combat frontal, parfois pertinent, parfois réducteur, toujours courageux. Son carburant est la colère, née de l’injustice et du manque de libertés. Cette colère, légitime, lui fait parfois oublier qu’on ne peut pas supprimer ce qu’on ne peut pas remplacer, et qu’il faudrait mettre autant (voire plus) d’énergie à construire une alternative positive et majoritaire qu’à combattre les dérives du pouvoir. Il y a aussi l’Algérien réformiste. Adepte de la stratégie des petits pas, des avancées progressives, il joue un jeu délicat où l’effort du compromis frôle constamment le confort de la compromission.

Différents profils types qui ont en commun d’avoir à la fois tort et raison. Se méfiant des grandes envolées révolutionnaires, marqué dans sa chair et dans son âme par la décennie noire des années 1990 et ses 200 000 morts, il craint plus que tout l’irruption d’un nouveau chaos, la réouverture de la boîte de Pandore des démons intérieurs algériens. Il y a encore l’Algérien éditorialiste, qui élabore des commentaires plus sophistiqués les uns que les autres pour expliquer les agissements du pouvoir – il est vrai souvent déroutants. Il traite volontiers de naïfs ceux qui ne le suivent pas dans les méandres complexes de ses analyses. Le pouvoir algérien s’apparentant en réalité à un mouvement brownien de cercles concurrents JEUNE AFRIQUE

d’intérêts particuliers, aucun Algérien éditorialiste n’arrive à produire la même explication, tout en étant chacun convaincu de détenir la Vérité. Il y a enfin l’Algérien désabusé, qui a renoncé à tout et ne croit plus en rien. Amer et aigri par le grand gâchis algérien, il n’arrive plus à se projeter, dans son avenir propre comme dans celui de son pays. Son imaginaire se rétrécit à vue d’œil, à l’aune de la dégradation du pays qu’il constate au quotidien. Selon lui, toute velléité de changement est vouée à l’échec: c’est « l’exception algérienne ». Stoïcien dépressif, il avance résigné, tel un héros tragique grec, vers son destin maudit d’Algérien. Nous, Algériens, avons tous en nous quelque chose de ces différents profils types, qui ont aussi en commun d’avoir à la fois tort et raison : chaque jour charrie en Algérie ses mille et une raisons d’être dégoûtés; le changement attendu, pour qu’il advienne réellement, devra s’appuyer sur la partie « réformiste » des « décideurs », ceux qui veulent sincèrement bouger ou ont simplement compris le vrai risque à ne pas le faire; mais ce changement ne pourra être que la conséquence d’un rapport de force, d’une pression extérieure au système – une pression populaire, médiatique et radicale. On aimerait que ces différents types d’Algériens s’allient et même fusionnent, en prenant le meilleur de chacun : l’engagement du radical, le pragmatisme du réformiste, l’intelligence de l’éditorialiste et la lucidité du désabusé… Il faudrait aussi compléter cet alliage par l’apport d’un autre Algérien, que l’on entend encore peu : l’optimiste, celui convaincu que son pays a un grand avenir. Qu’il peut être le premier du monde arabe à faire vivre une « troisième voie » progressiste, ni nationaliste ni islamiste mais patriote et musulmane. Qu’à l’instar d’autres nations comme le Brésil ou la Turquie, l’Algérie peut, en dix ou quinze ans, modifier profondément sa trajectoire et exploiter pleinement ses atouts exceptionnels. Que, sous réserve d’une forte mobilisation citoyenne, ce virage peut être amorcé en 2014, à l’occasion de la prochaine élection présidentielle. Au fond, nous avons tellement renoncé que nous ne savons plus ce dont nous sommes capables. Et si le vrai changement commençait par là : reprendre confiance en nos capacités et libérer à nouveau notre audace ? ● N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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Maghreb Moyen-Orient ! Lors de la photo de famille du DIALOGUE 5+5, le 5 octobre, à La Valette.

CHESNOT/SIPA

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MAGHREB-EUROPE

Vers un « new deal » Se voulant plus pragmatique, la France souhaite donner la priorité à un partenariat resserré avec les pays de la Méditerranée occidentale.

Q

uatre ans après le lancement de l’Union pour la Méditerranée (UPM), les réunions de cette instance ont « souvent débouché sur rien ». Tel est le constat de François Hollande, qui a tenté, le 5 octobre, à La Valette (Malte), de relancer le processus euro-méditerranéen. Loin des ambitions – irréalistes ? – d’un Nicolas Sarkozy, qui rêvait de faire de l’UPM une grande organisation politico-économique de quarante-trois pays, le nouveau président français souhaite donner la priorité à un partenariat beaucoup plus resserré avec les pays de la Méditerranée occidentale. D’où l’idée, quatre mois après son élection, de réactiver le Dialogue 5+5, une structure plus informelle de discussion qui rassemble dix pays des deux rives (France, Italie, Espagne, Portugal et Malte pour l’Europe du Sud; Algérie, Maroc, Tunisie, Libye et Mauritanie pour le Maghreb). Cela faisait neuf ans que cette instance ne s’était pas réunie au niveau des chefs d’État et de gouvernement. Pragmatique, Hollande a convaincu ses partenaires européens, notamment Mario Monti (Italie) et Mariano Rajoy (Espagne), d’y participer. Si le président algérien N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

France a toute confiance en Fathallah Sijilmassi, le secrétaire général marocain, pour développer les projets d’intégration, comme l’autoroute du Maghreb ou l’Erasmus euro-méditerranéen, un programme qui permettrait une meilleure mobilité des étudiants entre les universités des deux rives. De nouveaux projets sont en discussion, comme la mise en place d’un système d’alerte sur les prix des produits agricoles. Paris souhaite enfin promouvoir les projets d’investissement euro-méditerranéens – les stratégies industrielles communes permettant la « colocalisation » des emplois sur les deux rives –, améliorer la circulation des hommes d’affaires, intensifier la coopération énergétique et en matière de transports. Mais on reconnaît que ce ne sera pas facile en période de forte restriction budgétaire européenne. Dans les prochains mois, le président français se rendra au Maghreb pour sensibiliser ses partenaires de la rive sud et conforter les relations bilatérales. Une grande visite de deux jours est prévue au mois de décembre en Algérie (voir J.A. no 2700). Elle sera suivie d’un déplacement au Maroc au premier semestre de 2013, puis d’un autre en Tunisie un peu plus tard. Très préoccupé par le danger salafiste, Hollande souhaite accompagner la transition démocratique dans les pays du Sud. « Un combat de long terme » pour la présidence française et

Abdelaziz Bouteflika et le roi du Maroc Mohammed VI ne souhaitent pas encore se retrouver autour de la même table, ils ont toutefois dépêché leur Premier ministre, respectivement Abdelmalek Sellal et Abdelilah Benkirane. Les chefs de l’État mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz et tunisien Moncef Marzouki étaient également présents, ainsi que le président du François Hollande se rendra Congrès général national à Alger, Rabat et Tunis (CGN) libyen, Mohamed dans les prochains mois. el-Megaryef. « Le Printemps arabe a accouché de nouveaux dirigeants au Sud, explique un qui requiert de la diplomatie pour ne proche de Hollande. On avait besoin de pas heurter la sensibilité de ses partese retrouver et de voir ce qu’on pouvait naires tout en se montrant vigilant sur faire ensemble. » le respect des « droits fondamentaux ». Cela pourrait passer par le débat. Najat « TASK FORCE ». Les participants se sont Vallaud-Belkacem, ministre des Droits entendus pour continuer à collaborer sur des femmes, travaille ainsi à l’organisation les questions de sécurité, notamment la d’une grande conférence sur le rôle des lutte contre le trafic de drogue et le crime femmes dans l’espace méditerranéen, qui organisé. Une task force devrait voir le jour devrait voir le jour en 2013. « Aidons ces pour traiter des problèmes de l’immigrapays à ne pas revenir vers les dictateurs tion clandestine. Quant à l’UPM, qui ne et à ne pas basculer dans l’extrémisme sera pas démantelée, elle devrait servir religieux », expliquait Laurent Fabius de boîte à idées et d’agence de mise en durant la campagne électorale. ● œuvre de la politique de voisinage. La PASCAL AIRAULT JEUNE AFRIQUE



Maghreb Moyen-Orient TUNISIE

Injustes noces

Interdit par la loi, le mariage coutumier n’était pratiqué, discrètement, que dans les campagnes reculées. Mais depuis la révolution, il est devenu un véritable phénomène de société.

! En six mois, PLUS DE 520 ÉTUDIANTS DU GRAND TUNIS auraient contracté une union clandestine.

D

ans la salle d’attente du service des interruptions de grossesse de l’hôpital de la Rabta, à Tunis, Nawel, 22 ans, se fait petite sous son niqab. « Mon père refusait que j’épouse Yasser ; ce n’était pas un assez bon parti. On s’aimait, nous voulions être ensemble, mais nous n’avions pas les moyens financiers de nous marier. Sur les conseils d’amis et frères salafistes, nous avons contracté un mariage coutumier (orfi). Notre relation était ainsi approuvée par Allah. Mais Yasser m’a quittée. Je suis enceinte de six semaines

et je ne peux exiger qu’il reconnaisse cet enfant, que je ne peux de toute façon pas élever. Je me croyais mariée. Mais au final, je serai une fille-mère, avec ce que cela entraîne comme exclusion, si je n’avorte pas ! » L’histoire de Nawel est devenue banale. « Il ne se passe pas un jour sans que l’on voit des filles enceintes persuadées que le mariage coutumier était une union reconnue par la loi et religieusement licite. Elles font preuve d’une naïveté dramatique », déplore une assistante sociale, qui défend toutefois le droit à la vie.

AUDE OSNOWYCZ/ SIPA PRESS

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Pratiqués depuis toujours, mais discrètement, dans les campagnes reculées, les mariages coutumiers sont à la mode chez les jeunes salafistes, particulièrement dans les quartiers pauvres et dans les universités. S’ils revendiquent le droit de pratiquer une coutume en vigueur au temps du Prophète, ils sont surtout séduits par une formule, tout à fait formelle, qui contourne les diktats d’une société aussi conservatrice que pudibonde. « Il n’est pas évident d’être chaste à près de 30 ans ! » assène Seifeddine. Tiraillés entre leur foi et leur désir, les jeunes font, à leur manière, une révolution sexuelle halal. « Ce qui compte, c’est d’être en conformité avec la volonté de Dieu et de ne plus être partagé entre le charnel et le spirituel », affirme Manel, étudiante en sociologie à la faculté du 9-Avril. Une prière, deux témoins et un bout de contrat griffonné à la hâte ou, le plus souvent, un simple engagement oral consacrent une union souvent temporaire et qui, dans tous les cas, n’est pas reconnue par la loi, laquelle exige d’un mariage qu’il soit rendu public en présence d’un tuteur légal, assorti d’une dot et enregistré à l’état civil. SECRET. Difficile à recenser car tenu géné-

ralement secret, le mariage coutumier, selon l’association Wifak, a uni, en sixmois, plus de 520 étudiants sur les facultés du Grand Tunis. En Égypte, où le phénomène est moins récent, 5 200 unions de ce type ont été reconnues en 2010. Au Maroc, bien qu’interdit par la Moudawana (code de la famille), le mariage coutumier reste la tradition dans des régions enclavées comme Azilal ou Imilchil, ainsi que l’atteste une enquête de la Fondation Ytto. L’Algérie, elle, est confrontée aux conséquences de la vague de mariages coutumiers contractés lors de la montée de l’islamisme dans les années 1990.

AUTRES TEMPS, AUTRES MŒURS INSTITUTION PRÉISLAMIQUE, le mariage coutumier a été maintenu par la tradition musulmane car il répondait à des situations particulières à un moment précis de l’Histoire, tels que la séparation entre les hommes et leur famille lors de conflits ou de longs N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

voyages. Il sera par la suite réprouvé par la plupart des oulémas sunnites au motif que le Prophète l’a interdit. Aujourd’hui, le mariage coutumier, ou orfi, est toléré mais finalement assez peu pratiqué chez les sunnites, d’autant que 43 % des pays arabes pratiquent la

polygamie. En revanche, les chiites autorisent l’union de plaisir (zawaj mutaa). Ce dernier est un acte temporaire consensuel conclu moyennant une dot versée à la femme, qui renonce, par là même, à tous ses droits, ainsi qu’à ceux des enfants pouvant

naître de cette union. L’époux, déchargé de tout engagement moral et financier, peut contracter et alterner autant de mariages de plaisir qu’il veut; il lui suffit de répudier d’un mot sa partenaire d’un jour, d’une semaine ou d’un mois. ● F.D. JEUNE AFRIQUE


Coulisses

ARRIÈRE-PENSÉE. Derrière le mariage coutumier, c’est le statut de la femme qui est remis en question, d’autant que les islamistes dénoncent la multiplication des divorces (un mariage sur quatre), défendent farouchement la famille traditionnelle et le droit au mariage pour tous. Jouant sur la vertu et la moralité, les associations caritatives islamistes organisent de spectaculaires mariages collectifs, permettant à quelques-uns de faire leur éducation sentimentale en évitant les dépenses faramineuses des mariages conventionnels. Mais les islamistes se sont bien gardés de se prononcer clairement sur le mariage coutumier. Les dérives qu’il engendre seraient un argument de poids pour relancer le débat sur la polygamie, à défaut d’avoir pu inscrire dans la future Constitution la charia, qui l’aurait légalisée de fait. ● FRIDA DAHMANI, à Tunis JEUNE AFRIQUE

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SYRIE-IRAN PÈLERINS, CONSEILLERS OU COMBATTANTS ? Le 4 août, quarante-huit Iraniens étaient capturés sur la route de l’aéroport de Damas par un groupe de rebelles qui les présente alors comme des Gardiens de la révolution, l’armée idéologique de la République islamique. Reconnaissant la présence parmi eux de militaires retraités, Téhéran maintient qu’ils n’étaient que de simples pèlerins. Le 5 octobre, un commandant rebelle annonce leur exécution si l’armée n’évacue pas sous quarante-huit heures une zone proche de la capitale. Sollicités par l’Iran, la Turquie et le Qatar, alliés de la rébellion, semblent être parvenus à écarter la menace. L’affaire pose à nouveau la question de troupes iraniennes combattant pour le régime en Syrie. À la mi-septembre, un général des Gardiens de la révolution avait fini par reconnaître la présence de « conseillers » sur le sol syrien. Mais le 7 octobre, le SundayTimes, citant des sources de services de renseignements occidentaux, affirmait que 275 « combattants » des Gardiens de la révolution avaient été rapatriés en Iran. ●

AY-COLLECTION/SIPA

« Les conséquences sont terribles pour les femmes et encore plus pour les enfants ; ils n’ont aucun droit. Pour le législateur, le mariage orfi est un délit passible de trois mois d’emprisonnement, selon les dispositions du code civil et du code du statut personnel. Ce n’est pas un pacs version musulmane. Il ne s’agit pas d’organiser une vie commune, mais de consommer sans pécher. Or ce type de mariage met en commun les personnes mais pas leurs biens », explique l’avocat Samir Ben Othman. Le mariage coutumier est un leurre. « Bien souvent, les filles sont sensibles au côté romantique de cette union clandestine et n’en mesurent pas les conséquences. Elles n’ont aucun droit, aucun recours en cas de séparation et encore moins de pension alimentaire. Il leur faudra une décision du tribunal pour que leur enfant soit reconnu par le père. Alors que les garçons peuvent enchaîner les mariages orfi sans trop de scrupules », ajoute Fawzia Abd el-Aal, avocate au Centre égyptien pour les droits des femmes. « Pour les garçons, il n’y a aucun engagement, aucune responsabilité, même minimale ; c’est juste un viatique qui rend licite la liberté sexuelle », rappelle l’universitaire tunisienne Samira Ben Chaabane, tandis que l’historienne Dalenda Larguèche se demande « comment des femmes tunisiennes, cinquante ans après la promulgation du code du statut personnel, peuvent accepter d’être entraînées dans un tel rapport de soumission sans la moindre garantie ».

Maghreb & Moyen-Orient

! LES QUARANTE-HUIT IRANIENS capturés le 4 août sur la route de l’aéroport de Damas par un groupe de rebelles syriens.

LIBAN CLAP DES CIVILISATIONS Prévue le 27 octobre, la sortie de Fetih 1453, une superproduction turque racontant la prise de la Constantinople chrétienne par les Ottomans, a dû être suspendue après la mobilisation du parti chrétien orthodoxe Al-Machreq et la demande de censure formulée par un comité de religieux. Selon le père Abou Kassem, « avec ses vérités historiques falsifiées qui portent atteinte à l’image du christianisme, présenté comme une religion corrompue, ce film incite au conflit islamo-chrétien ». QATAR RETOUR À GAZA Illustrant le soutien accru du richissime émirat aux Palestiniens

du Hamas, le Qatar a rouvert, fin septembre, sa représentation diplomatique dans la bande de Gaza, fermée au début des années 2000. Sa fonction essentielle sera de gérer les centaines de millions de dollars d’aide à la reconstruction et au développement qui vont être investis par Doha dans ce territoire ravagé par les attaques israéliennes et asphyxié par un interminable embargo. RECTIFICATIF Le premier président de la République égyptienne était Mohamed Naguib et non Gamal Abdel Nasser comme nous l’avons écrit par erreur dans la note « Nasser, le retour » (J.A. no 2700). Toutes nos excuses pour cette regrettable confusion. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


Maghreb Moyen-Orient

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ALGÉRIE

Les années

Chadli

VINCENT FOURNIER/J.A.

Décédé le 6 octobre, le troisième président de la République algérienne restera dans l’Histoire comme celui qui introduisit le multipartisme, enterra le socialisme scientifique cher à Boumédiène et permit l’émergence d’une société civile.

! CHADLI BENDJEDID lors du sommet de l’OUA de 1988, à Addis-Abeba.


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CHERIF OUAZANI, envoyé spécial à Alger

L

traversant la principale artère de la capitale, la rue Didouche-Mourad. Publics ou privés, tous les médias ont encensé le défunt. Sans préjuger du contenu de ses Mémoires, dont la publication est prévue le 1er novembre, l’homme est parti comme il est entré en politique : en toute discrétion.

année du cinquantenaire de l’indépendance aura été fatale à deux anciens présidents de la République. Six mois après la disparition d’Ahmed Ben Bella, en avril, Chadli Bendjedid est emporté par un cancer, le 6 octobre, à l’hôpital ASCENSION RAPIDE. C’est le militaire d’Aïn-Naadja, à Alger. Si 1er juillet 1929, à Sebaa, un hameau de la commune de Bouteldja, dans elle n’a provoqué nulle scène d’affliction hystérique, la nouvelle n’en la région d’El-Tarf (Nord-Est), près a pas moins ému. Dans les mess de la frontière tunisienne, que d’officiers ou sous les colonnes de Chadli Bendjedid voit le jour dans une famille modeste. En 1955, il marbre du Palais du gouvernement, à l’usine, dans les lycées et dans les rejoint les rangs de l’Armée de libéchaumières, le nom du troisième ration nationale (ALN), branche président de la République algémilitaire du Front de libération rienne démocratique et populaire nationale (FLN). Ses aptitudes au (1979-1992) est sur toutes les lèvres. maquis lui valent une ascension Raillé par certains tout au long de rapide dans la hiérarchie de l’ALN. ses treize ans de règne À la veille de l’indépenpour la modestie de dance, il est à la tête L’homme est de la base de l’Est et son cursus scolaire, parti comme de ses 6 000 combataccusé par d’autres de laxisme face au phénotants. Une force non il est entré mène de l’islamisme négligeable au cours en politique, armé, apparu au tout de l’été 1962, quand la en toute début de son premier course au leadership mandat, Chadli a reçu prend des allures de discrétion. unhommageunanime. guerre civile. Chadli Conservateurs ou modernistes, se range aux côtés de Houari nationalistes ou fondamentalistes, Boumédiène, une alliance déterofficiels ou citoyens lambda, tous minante qui contribuera à faire pencher la balance du côté de ce auraient choisi la même épitaphe sur la tombe du défunt : « Ci-gît le dernier, lequel saura montrer sa père de la démocratie (abou edgratitude : le commandant Chadli dimoqratiya) ». Le taiseux colonel Bendjedid est promu lieutenantde l’Armée nationale populaire colonel, puis nommé, signe de la (ANP), devenu chef de l’État sans totale confiance de Boumédiène, jamais y avoir songé en se rasant alors tout-puissant ministre de la le matin, entre dans l’histoire du Défense, à la tête de la IIe région pays comme celui qui introduimilitaire (dans l’Oranie), la seule sit le multipartisme, enterra l’opqui peut se prévaloir de disposer tion du socialisme scientifique des trois corps d’armée : aviation, cher à son prédécesseur, Houari marine et infanterie. C’est ainsi Boumédiène, et, surtout, permit que Chadli Bendjedid supervise l’émergence d’une société civile, la récupération, en 1967, de la base tenue jusque-là à l’écart par un militaire de Mers el-Kébir, dernière pouvoir soupçonneux. survivance de l’armée coloniale Le 8 octobre, au cours d’obsèques en Algérie. Non seulement il est grandioses et solennelles, des milefficace, mais, contrairement à liers d’Algérois ont applaudi le pasd’autres chefs militaires, il ne fait sage de sa dépouille, tandis que pas de vagues. des balcons fusaient les youyous, Pas de frasques, ni de tentasur le parcours qui sépare le Palais tions prédatrices, ni d’ambitions du peuple du cimetière d’El-Alia, démesurées. Mais l’homme ne JEUNE AFRIQUE

1929 Naissance à Sebaa, à la frontière tunisienne 1955 Il rejoint les rangs de l’ALN 1957 Promu chef de bataillon au maquis 1960 Patron de la base de l’Est 1964 Chef de la IIe région militaire 1979 Succède à Houari Boumédiène 1989 Introduit le multipartisme et les élections pluralistes 1992 Démissionne et remet son mandat au président du Conseil constitutionnel

se laisse pas marcher sur les pieds. À l’occasion d’une visite officielle à Oran, Boumédiène, taquin, apostrophe Chadli : « Tu ne trouves pas que ton séjour à Oran a trop duré ? » La réponse est cinglante. « Il n’est pas plus long que ton séjour à Alger. » Les témoins qui ont assisté à l’échange sont incapables de dire si le fou rire de Boumédiène était feint ou non. Une chose est cependant sûre : sa confiance dans Chadli n’a pas été entamée. Au crépuscule de sa vie, sentant que le mal qui le rongeait lui serait fatal, Boumédiène rappelle Chadli à Alger pour lui confier la coordination de tous les services de sécurité. En l’absence d’un chef d’état-major, cette décision en fait le numéro deux de l’armée. Et c’est un conclave de cette même armée qui tranchera en sa faveur dans la course à la succession de Houari Boumédiène, décédé en décembre 1978, au détriment d’Abdelaziz Bouteflika, compagnon de route du disparu. FIDÈLE. Peu préparé à ses nouvelles

hautes fonctions, réputé fidèle en amitié, Chadli Bendjedid s’appuie sur quatre officiers parmi ses plus proches collaborateurs: Mustapha Belloucif, Larbi Belkheir, Khaled Nezzar et Mohamed Mediène, alias Toufik. Le premier deviendra, en 1984, le premier général de l’histoire de l’Armée nationale populaire (ANP), puis chef d’état-major, avant de connaître la disgrâce. Le deuxième, ancien chef d’état-major de Chadli dans la IIe région militaire, devient son tout-puissant directeur de cabinet. Khaled Nezzar, qui fut son second à la base de l’Est à la fin de la guerre de libération, est nommé ministre de la Défense. Quant à Mohamed Mediène, chef de la Sécurité militaire (SM) de la IIe région sous le commandement de Chadli, il est propulsé, en 1989, à la tête du Département recherche et sécurité (DRS, héritier de la SM). Élu en février 1979, Chadli sera reconduit deux fois, le 13 janvier 1983 et le 22 décembre 1988. Au cours de son séjour à El-Mouradia, il tente de réformer le système. « Il N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


Maghreb Moyen-Orient

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centaines de morts par balle et des milliers de personnes interpellées et torturées. Chadli est tout de même réélu deux mois plus tard et en profite pour promulguer une nouvelle Constitution introduisant le multipartisme et consacrant l’ouverture économique. Mais son troisième mandat restera inachevé. Le 11 janvier 1992, au lendemain du raz-de-marée islamiste lors des premières législatives pluralistes de l’Algérie indépendante, il présente au président du Conseil constitutionnel sa démission. Sa décision a-t-elle été motivée par la déroute électorale du FLN, dont il était le président ? Ou a-t-elle été provoquée par une pression du commandement de l’ANP ? Son éditeur, Casbah éditions, assure que Chadli n’a pas emporté avec lui ce secret et que la lecture de ses Mémoires en édifiera plus d’un.

contraint, au début des années 1980, à l’exil. Selon le témoignage de Khelifa Bendjedid, frère du défunt, brillant wali (préfet) aujourd’hui à la retraite, le chef de l’État a fait preuve de sollicitude à l’égard de Chadli, lui rendant visite autant que lui permettait son agenda et veillant à ce que sa

Il fut le premier à dénoncer les forces d’inertie qui bloquent les réformes.

LE PARDON DE BOUTEFLIKA. Les

années Chadli avaient commencé par une opération de « déboumédiénisation » dont la principale victime fut le flamboyant chef de la diplomatie, Abdelaziz Bouteflika. Revenu aux affaires, ce dernier se réconcilie avec celui qui l’avait

ÜLe 8 octobre, des milliers d’Algérois ont applaudi le passage du CONVOI FUNÈBRE DE L’ANCIEN PRÉSIDENT.

famille et son entourage soient assistés après l’aggravation de son état de santé. Le président algérien aime à s’enorgueillir auprès de ses visiteurs de ce que son « pays est le seul de l’hémisphère sud à commémorer ses fêtes nationales en présence du chef de l’État en exercice entouré de trois de ses prédécesseurs coulant une retraite paisible en Algérie et non pas en exil ». Le 8 octobre 2012, à El-Alia, ils n’étaient plus que deux : Abdelaziz Bouteflika et Ali Kafi, éphémère président du Haut Conseil d’État, structure collégiale qui avait succédé à Chadli Bendjedid. ●

XINHUA/GAMMA

a introduit la thématique des droits de l’homme dans la logique du pouvoir, témoigne Me Miloud Brahimi, ancien président de la Ligue des droits de l’homme, en créant les conditions pour la création d’un mouvement associatif émancipé du parti unique. » Les Algériens les plus âgés n’ont pas oublié que Chadli a restauré leur liberté de circulation en supprimant l’autorisation de sortie, sésame pour quitter le territoire, qu’il s’agisse de simple villégiature ou pour étudier à l’étranger. « C’est toutdemêmeceluiquiapromulgué le code de la famille, très vite rebaptisécodedel’infamie»,tempèreune militante féministe sous le sceau de l’anonymat. Toujours est-il que Chadli est le premier à dénoncer les forces d’inertie qui bloquent les réformes politiques et économiques. Le 19 septembre 1988, dans un discours mémorable, il demande à la population de ne pas hésiter à manifester pour exprimer ses doléances. Deux semaines plus tard, le 5 octobre 1988, la rue s’embrase. Chadli mobilise l’armée pour les opérations de maintien de l’ordreetconfiel’opérationàKhaled Nezzar. Le bilan est tragique : des

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Europe, Amériques, Asie

FRANCE

L’amère

pilule du lendemain

Cinq mois après son élection, l’euphorie est retombée. Marquée par trop d’incohérences et de cafouillages, la politique de François Hollande passe mal dans l’opinion. Son image de « président normal », en revanche, reste bonne. HENRI MARQUE

I

l aura suffi d’un emblème astucieux – « les pigeons » –, d’une menace de « jacquerie » historique et des moyens sans limites d’internet pour que des milliers de dirigeants de start-up obligent le gouvernement à revenir sur une des mesures « symboliques » du budget: la majoration de la taxe sur les plus-values en cas de revente de leurs sociétés. « Nous ne voulions que taxer la rente, et non le risque », se défend Pierre Moscovici, le ministre des Finances. Mais qui voudra prendre des risques à l’avenir si une fiscalité confiscatoire sanctionne la réussite en s’appropriant jusqu’aux deux tiers de la rente ? Le gouvernement était d’autant moins incité à la résistance que d’inquiétants sondages arrivaient en rafales. Après deux mois de chute que ni les plaidoyers télévisés ni les tardives consignes d’accélération des réformes n’avaient pu enrayer, le président et le Premier ministre sont passés pour la première fois sous la barre des 50 % d’opinions favorables, avec 52 % de mécontents. Comparaison est parfois raison : il était à craindre qu’après cinq années de gouvernance sarkozienne pied au plancher le nouveau pouvoir donne l’impression de piloter au ralenti. Tout se passe comme si François Hollande était la victime inattendue du slogan qui l’a fait élire : « Le changement, c’est maintenant. » Dans l’impatience de leurs attentes, exacerbées chaque jour par de nouvelles épreuves, les Français ont N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

! LE NOUVEAU PRÉSIDENT JEAN-MARC AYRAULT, SON PREMIER MINISTRE, lors du défilé du 14 Juillet sur les Champs-Élysées.

AVEC


Europe, Amériques, Asie entendu, ou voulu entendre, que « maintenant » c’était tout de suite, alors qu’il fallait comprendre : c’est à partir de maintenant. Il aurait fallu expliquer à l’opinion que la concertation généralisée dont Jean-Marc Ayrault fait la « marque de fabrique » de son équipe aurait un effet inévitablement ralentisseur. Il aurait fallu surtout renoncer aux fausses précautions verbales qui répudiaient l’austérité et la rigueur pour leur préférer un mol éloge de l’effort, sans que l’opinion soit dupe. Après avoir nommé Raymond Barre à Matignon, Valéry Giscard d’Estaing confiait qu’en voyant l’immensité de la tâche à accomplir il s’étonnait avec un peu d’angoisse « qu’on puisse trouver des hommes et des femmes pour tenter de redresser la situation ». C’est encore pire, sans doute, avec la nouvelle équipe représentante d’une nouvelle gauche déterminée à appliquer ce nouveau « socialisme de la réalité » dont Hollande revendique la doctrine et qu’Ayrault est chargé de légitimer par la pratique – d’où les cafouillages, incohérences et manifestations d’amateurisme qui ont marqué les débuts de son pouvoir.

WITT/SIPA

SUJETS QUI FÂCHENT. Les Français ont néanmoins

approuvé à plus de 60 % les premières mesures « emblématiques » du gouvernement, et semblent même avoir accepté qu’il n’ajoute pas aux tensions delacriselesaffrontementssurlessujetsquifâchent, par exemple le non-cumul des mandats, dont les électeurs approuvent le principe dans les sondages maisrejettentl’applicationdansleurcirconscription. Face au conflit autrement grave du traité budgétaire européen, le Premier ministre a évité une crise majeure au prix d’un compromis discrètement approuvé par l’Élysée : « Pas de pressions mais beaucoup de discussions. » Le traité est maintenu en l’état, malgré l’engagement répété par François Hollande tout au long de sa campagne de ne pas le signer s’il n’était renégocié sur la base de deux exigences qui, elles, n’étaient pas négociables : la création d’euro-obligations pour mutualiser les dettes européennes et d’un fonds de secours « à même de neutraliser les marchés ». Ces tout-puissants marchés « ne feront pas la loi en France », affirmait avec des accents gaulliens le candidat socialiste, dénonçant un capitalisme « qui a pris le contrôle sur l’économie, la société et jusque sur nos vies ». De Gaulle assurait déjà : « La politique de la France ne se fait pas à la corbeille. » Mais la France a appris depuis qu’elle peut s’y défaire quand un pays vit à crédit depuis près de quarante ans et doit, à chaque heure qui passe, « souveraineté nationale » ou pas, emprunter 22 millions d’euros et payer 6 millions d’intérêts. Angela Merkel a refusé les euro-obligations. Quant au fonds de secours baptisé « pacte de croissance » pour ménager la revendication française et tous les espoirs qu’elle avait suscités en Europe et dans le monde, il ne fera que regrouper des N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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Europe, Amériques, Asie aides déjà programmées. Et ne suffira pas dans une économie en berne à concilier la réduction des déficits avec le soutien de la croissance. La France se voit ainsi contrainte d’entrer à son tour dans l’enchaînement des cercles vicieux dont son président avait eu l’ambition de faire sortir l’Europe. Hollande aura du moins sauvé la face et sa majorité. Les jusqu’au-boutistes de la dissidence socialiste, y compris les deux ministres représentants des Verts, se sont vu autoriser à s’abstenir sur le traité à condition de voter dans la foulée la loi de finances qui l’entérine et qui devra l’appliquer, avec la « règle d’or » et ses dévolutions de souveraineté. Pour le « socialisme de la réalité », il n’y avait cette fois pas d’autre choix que de coller à l’intransigeante Allemagne. La merveilleuse souplesse de la langue française aidant, la ministre porte-parole a pu conclure : « L’unité n’est pas l’unanimité. »

et les dépenses exponentielles des collectivités locales. Un budget enfin qui, en contradiction avec lesobjectifsdecompétitivité,alourditleschargesdes entreprises et le coût du travail au risque d’aggraver la désindustrialisation et le chômage. À bien observer les sondages, on n’y trouve cependant pas que désaveu et désenchantement. Les bonnes opinions sur la personne de François Hollande équilibrent encore les mauvaises sur son action – il est vrai que cette désaffection s’étend à l’ensemble de la classe politique. La Sarkonostalgie est mise à la mode par la compétition Copé-Fillon pour la présidence de l’UMP, mais quand les sondeurs demandent si l’opposition ferait mieux que la gauche, la réponse est à 60 % négative. Le chef de l’État garde une « image positive », constatent plusieurs politologues. Son capital de sympathie n’est pas gravement entamé, même si beaucoup de ses partisans lui voudraient plus d’allant et d’allure. Il a su imposer son personnage de président normal, dans ses manières comme dans ses fonctions. Insensible, sinon indifférent, aux fluctuations des cotes de confiance, il accepte d’assumer une impopularité à laquelle il s’attendait et a eu le temps de se préparer. Bien avant qu’il ne soit candidat à la primaire, il mettait en garde le PS contre « l’idée dangereuse et même pernicieuse que la gauche pouvait tout changer en deux ou trois ans », car cette illusion, expliquait-il, « appelle forcément un dénouement brutal ». Il se donne aujourd’hui deux ans pour conjurer ce dénouement et être jugé aux seuls résultats de son « agenda du redressement ». Une vision que l’opposition n’est pas seule à juger optimiste. Devancée jusqu’en 2000 par la France, l’Allemagne en a mis dix pour faire de son modèle la référence de toute l’Europe. ●

Quand les sondeurs demandent si l’opposition ferait mieux que la gauche, la réponse est à 60 % négative.

MATRAQUAGE. Le gouvernement aura bien besoin

de cet avantageux concept pour faire passer son budget à l’Assemblée. Un budget qui, derrière une façade d’égalitarisme dans la répartition des sacrifices, additionne là encore les contradictions : si le matraquage fiscal vise principalement les plus riches et les foyers aisés, il frappera bel et bien, de l’avis de tous les experts, l’ensemble des classes moyennes malgré l’imprudente obstination de Moscovici à soutenir que neuf contribuables sur dix «serontépargnés»,voire«gagnants».Unbudgetqui limite à 10 milliards d’euros les économies, jugées plus dangereuses que les hausses d’impôts pour la consommation et donc la relance, alors que la Cour des comptes réclamait 33 milliards de réduction des dépensespubliques,etqueledéputésocialisteRené Dosière, spécialiste de la chasse au gaspillage, en a déjà trouvé 15 à regagner sur les crédits de l’État

73 55

Satisfaits

Mécontents

49

50

37

35

Seul Chirac a fait pire « Êtes-vous satisfait ou mécontent de l’action du président de la République ? » Cette question, l’institut Ifop la pose depuis l’instauration de la Ve République, en 1958. Voici, en pourcentage, les réponses obtenues un peu plus de quatre mois après chaque scrutin présidentiel.

59 50

47 32

36 25

59

57 37

28

52 39

41

4 1958

1969

1974

POMPIDOU

GISCARD

1965

DE GAULLE

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1981

1988

MITTERRAND

1995

2002

CHIRAC

2007

SARKOZY

2012

HOLLANDE JEUNE AFRIQUE

DALMAS ; SIPAHIOGLU ; FRILET ; TORREGANO ; MEIGNEUX ; LUDOVIC-POOL ; CHAMUSSY/CHESNOT/NOSSANT/SIPA

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RIO DOPE SA CROISSANCE AVEC LES JO 2016

FONT EXPLOSER LES LOYERS À RIO ORDEM E PRO GRE SSO

NER E M O R P Z E Y O ENV ONDE M U D N IO IS V E R T VO


Europe, Amériques, Asie

ÉTATS-UNIS

Caméléon diplomatique

EVAN VUCCI/AP/SIPA

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Mitt Romney a exposé le 7 octobre les grandes lignes de la politique étrangère qu’il entend proposer aux Américains. L’ennui est qu’il en change tous les trois mois !

L

a politique étrangère de Mitt Romney, c’est un peu comme le sexe des anges : difficile à définir. Est-il un néoconservateur à la Paul Wolfowitz, un réaliste ou un conservateur traditionnel ? Le grand discours qu’il a prononcé à l’Institut militaire de Virginie, le 7 octobre, un peu plus d’une semaine avant le deuxième débat qui l’opposera à Barack Obama, n’a pas permis de trancher. Certes, sa rhétorique s’apparente clairement à celle de George W. Bush : « Il est de la responsabilité du président des États-Unis d’utiliser la superpuissance de l’Amérique afin de façonner l’Histoire… » Sur le fond, c’est une autre histoire. Certes, ilneménagepaslapolitiquemoyen-orientale d’Obama, qui, quelques semaines après l’attaque du consulat américain à Benghazi, laisserait « l’Amérique à la merci des événements ». De même, il voit dans le retrait des forces américaines d’Afghanistan, en 2014, « un abandon du peuple de ce pays aux mêmes extrémistes qui commanditèrent les attaques du 11 septembre 2001 ». L’ennui est que, il y a peu, il qualifiait le conflit afghan de « guerre d’indépendance » dans laquelle il minimisait le rôle des États-Unis ! Comme Bush, Romney n’est pas avare de simplifications outrancières, comme lorsqu’il parle de lutter contre ceux qui N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

! PENDANT SON DISCOURS À L’INSTITUT MILITAIRE DE VIRGINIE, à Lexington, le 7 octobre.

« sont en guerre perpétuelle contre l’Occijouerait pas les va-t-en-guerre en Syrie ou dent ». Interventionniste voire belliqueux, en Iran ». Mais a-t-il les idées très claires il promet de s’attaquer « dès le lendemain sur la politique qu’il entend mener ? La de [son] élection » à la Chine, coupable vérité est qu’il change d’opinion comme de chemise. En Virginie, il a déclaré son de sous-évaluer sa monnaie. Quant à la intention d’établir un État palestinien Russie, elle reste pour lui l’ennemi géopolitique principal. viable. Or quelques semaines auparavant, Pourtant, derrière ces rodomontades dans la fameuse vidéo enregistrée à son dontl’objectifessentielestdesedémarquer insu, il jugeait la chose impossible… d’Obama dans un domaine, la politique À sa décharge, il n’est guère aidé par étrangère, qui ne lui est, tous les sondages son équipe de conseillers, improbable le prouvent, pas favorable, il n’y a rien, attelage composé de réalistes, tel Robert ou pas grand-chose. Sur la Syrie, il appelle à armer les Il ne veut pas être une copie de rebelles, mais omet de préciBush. Pas question de jouer les ser si les États-Unis doivent se charger de la tâche. Sur le va-t-en-guerre en Syrie ou en Iran. dossier du nucléaire iranien, il affirme que rien ne devrait séparer la Zoellick, l’ancien président de la Banque position de son pays de celle d’Israël, mondiale, et de néoconservateurs purs et mais il ne promet nullement de frapper durs, comme John Bolton, l’ancien ambasla République islamique de concert avec sadeur aux Nations unies. Entre les deux, ce dernier. Tout juste s’engage-t-il à faire il n’a pas encore tranché. Comme le dit « comprendre à l’Iran que les États-Unis et l’un de ses proches conseillers, « nous ses alliés ne toléreront pas son programme n’avons aucun intérêt à relancer les guerres nucléaire ». Il brandit même la menace de intestines qui avaient cours dans l’adminouvelles sanctions économiques. Quelle nistration Bush. En tout cas, pas dans le différence avec la politique d’Obama ? mois précédant l’élection ». C’est donc À en croire la directrice d’un think-tank après le 6 novembre que les Américains conservateur (dans le New York Times), – et le monde avec eux – découvriront quel « le but de Romney était de montrer qu’il Mitt Romney ils auront élu. ● ne serait pas une copie de Bush, qu’il ne JEAN-ÉRIC BOULIN, à New York JEUNE AFRIQUE


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PARCOURS | D’ici et d’ailleurs

Dudu MacPherlin Rebondir toujours Après être passé par l’Inde, ce footballeur d’origine nigériane joue désormais pour un club finlandais. Sans regrets ni illusions démesurées.

B

ien sûr, de nombreuses photos de lui sont disponibles sur internet. Mais en l’attendant devant le Kiasma, le musée d’art contemporain de Helsinki, le doute s’installe: comment reconnaître Dudu Omagbemi MacPherlin alors qu’il ne portera ni ses chaussures à crampons ni le maillot aux couleurs du Football Club Honka? Craintes inutiles: le voilà qui arrive, visage angélique, silhouette gracile portée par des baskets argentées. Ce qui le trahit? La masse musculaire de ses cuisses serrées dans un jean moulant. Sinon, il aurait plutôt l’air d’un acteur ou d’un mannequin. En 2011, cet attaquant a marqué neuf buts, et son équipe a remporté la Finnish League Cup, même s’il confie: « Ce n’était pas une très bonne année. J’ai eu des problèmes avec mes jambes. » Au cœur de la capitale finlandaise, un footballeur même connu se déplace sans attirer une nuée de chasseurs d’autographes. Le sport national, c’est le hockey sur glace. Dans la cafétéria bondée du musée, MacPherlin commande donc son café incognito. « Ce n’est pas une nation de football, confie le jeune homme, qui a vu le jour il y a vingt-sept ans à Lagos. Mais la vie ici est agréable, il n’y a pas de racisme et l’atmosphère du club est bonne. » L’histoire qu’il va nous raconter n’a rien à voir avec le conte de fées modelé sur le thème : il n’avait rien, il jouait pieds nus dans la rue, un agent l’a remarqué et il est devenu riche et célèbre, acclamé dans tous les stades d’Europe. Mais il y a un peu de ça, tout de même.

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! « MON PÈRE N’AIMAIT PAS QUE JE JOUE DANS LA RUE, alors que moi j’aimais ça », raconte l’attaquant nigérian du FC Honka.

Enfant, il joue sans chaussures dans les rues de Lagos quand un certain Oke Oloto lui dit : « Hé! Toi! Tu joues très bien, tu devrais rejoindre un club. » À l’âge de 10 ans, il intègre l’Okobaba Football Club et s’y entraîne après l’école, sous le regard dudit Oloto. « Mon père n’aimait pas que je joue dans la rue, alors que moi j’aimais ça! » Six ans plus tard, parce qu’il connaît des Nigérians installés en Inde, il quitte Lagos pour un pays qui n’est pas précisément réputé pour la qualité de son foot. « Oke Oloto m’a dit qu’il fallait que j’utilise mon talent. J’ai obtenu un visa la veille de mon départ, le 17 mars 2001. Cela a été un choc pour ma famille. » Il paraissait timide, il devient soudain bavard, comme s’il revivait heure par heure ses premiers pas de footballeur en Inde. Comment retrouver un groupe de joueurs nigérians quand on a à peine

16 ans et qu’on ne possède même pas une adresse précise? « J’étais perdu, il n’y avait pas un Africain dans la rue. J’ai tout de même eu la chance de rencontrer des gens sympathiques. » Bus, trains, galères, débrouille et volonté, MacPherlin échoue à Calicut (Kerala) et, malgré son âge, parvient à convaincre des compatriotes de participer à des compétitions stakhanovistes de football, à raison de plusieurs matchs par jour devant quelque 5000 personnes pour « gagner de l’argent ». « Tu es trop jeune, me disaient-ils. Mais le terrain était comme la rue, dur, avec des cailloux, dangereux. Je ne le conseillerai à personne, mais dès la première fois j’ai marqué quelques buts, nous avons gagné et tout le monde est venu me demander: “Mais d’où sortez-vous?”. » Le bruit court qu’un jeune prodige du ballon vient de débarquer, et MacPherlin JEUNE AFRIQUE


Europe, Amériques, Asie

L’appel de l’Europe se manifeste en 2006 par la voix de celui qui va devenir son agent, le Grec Makis Zapatinas, et se concrétise au cours de la saison 2007-2008 par un contrat avec le Wisla Cracovie (Pologne). Malgré des débuts prometteurs, le rêve se fane sur un banc de touche avant de refleurir un temps en Hongrie, au sein du Debrecen VSC et du Kecskemeti TE. Et puis, en 2010… « J’ai été blessé, ils ont voulu me faire jouer dans une petite équipe, j’en ai eu marre… » Un appel de son ange gardien Godspower l’oriente vers une destination glaciale : la Finlande. Pour l’équipe de Kuopio, KuPS, il marque huit buts en dix matchs. Désormais au FC Honka, MacPherlin ne rêve plus de Manchester United ou du Real Madrid. Célibataire, le jeune homme qui se sent à l’aise où qu’il soit envoie de l’argent à sa mère et à sa sœur, au pays. « Même si je n’y vais pas souvent, l’Afrique est ma maison », soutient-il. Et demain? « Je ne sais pas. Je vis au jour le jour. J’aime écouter de la musique religieuse et cuisiner, je suis un gars heureux. J’aimerais chanter, ou jouer dans des films… » En attendant, il faut reprendre l’entraînement. ●

JAPON

Sayonara, Tokyo

Ils partent travailler à l’étranger, épousent une autochtone et… n’osent plus rentrer chez eux par crainte de réactions hostiles.

J

« ’

années 1970, des centaines de sociétés ai renoncé à retourner dans monpays:jamaismafemme japonaises se sont installées. À Jakarta, et mes enfants n’y seraient Manille ou Bangkok, les « petits Tokyos » acceptés. » Pour Toshiyuki, fleurissent. Ils (re)naissent souvent sur enseignant depuis cinq ans à l’école japoles lieux mêmes où, pendant la Seconde naise de Jakarta, la décision a été difficile Guerre mondiale, les troupes d’occupaà prendre. « Il n’y avait pas d’autre choix, tion avaient pris leurs quartiers. Parfois, raconte-t-il. Je savais que si j’épousais une ils prospèrent sur le site d’anciens villages nippons, comme à Ayutthaya, en Indonésienne,mêmediplômée,mafamille neseraitpaslabienvenueàTokyo.»Comme Thaïlande, où vient de sortir de terre un illeditlui-même:«Onnaîtjaponais,onneledevientpas.»Cette « On naît japonais, on ne le cruelle décision, des milliers devient pas. » Comment un couple d’expatriés l’ont déjà prise. À contrecœur,ilssontvenusgrosmixte pourrait-il s’intégrer? sir les rangs des nikkeijin, les membres de la diaspora nippone installés gigantesque complexe immobilier de sept depuis des siècles hors de l’archipel. cents appartements exclusivement destiÀ l’origine des premières grandes nés aux « nouveaux nikkeijin ». vagues d’émigration, au XIXe siècle : la À l’origine, seuls les retraités fortunés volonté de faire fortune. Depuis, les motifaisaient le choix de s’installer à l’étranger. vations ont évolué. Certes, les expatriés, Notamment en Malaisie, où les autorités quiviventpourlaplupartconfortablement proposent aux Japonais un visa de longue à l’étranger, redoutent une dégradation durée pour tout investissement dans de leur niveau de vie en cas de retour au l’immobilier de luxe. Mais le phénomène pays. Mais l’impossibilité pour les couples s’est considérablement élargi. Le tsunami mixtes de s’intégrer dans la société japode 2011, la catastrophe de Fukushima et naise reste le principal obstacle. Et puis, la peur d’un nouvel accident nucléaire ils trouvent souvent loin de chez eux une incitent désormais les actifs célibataires, qualité de vie que leur pays n’offre plus. les jeunes couples et les familles à sauter Première destination de ces nouveaux le pas. ● émigrants : l’Asie du Sud-Est, où, dès les JULIETTE MORILLOT ! UN DRAPEAU JAPONAIS SUR UNE JOUE, un drapeau thaïlandais sur l’autre.

CHAIWAT SUBPRASOM/REUTERS

multiplie les matchs, sans contrat, payé en espèces à la fin de chaque journée. L’arrivée de son compatriote Godspower Chebes Fidelis – un frère – va lui permettre de mieux négocier. « J’ai marqué, j’ai séduit les fans, j’étais bien payé, je suis resté. La seule chose à laquelle je pensais, c’était jouer. » En 2001, MacPherlin impressionne le directeur du Sporting Clube de Goa, Peter Vaz. « Je suis devenu capitaine de l’équipe. Je n’avais que 17 ans. » « Prêté » ponctuellement au Dempo Sports Club (Inde), au Salgaocar Sports Club (Inde) et au Penang FA (Malaisie), celui que l’on surnomme alors Oma permet au Sporting d’accéder à la première division. Et malgré un grave accident de bus, l’équipe, affaiblie, termine deuxième du championnat l’année suivante…

NICOLAS MICHEL, envoyé spécial à Helsinki Photo : RONI REKOMA A /LEHTIKUVA pour J.A. JEUNE AFRIQUE

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Europe, Amériques, Asie

ENQUÊTE

Itinéraire d’un enfant perdu Il a failli devenir footballeur professionnel: une blessure l’en a empêché. Converti à l’islam, il s’est apparemment radicalisé en quelques mois. Français originaire de RD Congo, Yann Nsaku se retrouve mêlé à une grave affaire de terrorisme. HABY NIAKATE

L

e 30 décembre 2011, un jeune converti à l’islam nommé Yann Nsaku apparaît dans une vidéo postée sur internet. Il s’adresse à ses « frères et sœurs » musulmans: « Faisons en sorte d’avoir un bon comportement, d’appliquer le Coran et la Sunna (tradition du Prophète) comme il faut. Faisons en sorte d’avoir une bonne image et de refléter au maximum de nos capacités la véritable image de l’islam. » Neuf mois plus tard, le 6 octobre 2012, il est arrêté dans le cadre d’une enquête antiterroriste de grande ampleur. Neuf mois, c’est court. En l’occurrence, c’est une éternité. Que s’est-il donc passé dans la vie de Yann Nsaku entre ces deux événements ? Tous les scénarios sont envisageables. GRENADE. Tout a commencé le

19 septembre par l’attaque d’une supérette casher à Sarcelles, dans la banlieue nord de Paris. Deux individus (selon les premiers éléments de l’enquête) lancent une grenade contre l’établissement. Sur les débris, les policiers dépêchés sur place retrouvent des traces d’ADN et identifient rapidement un premier suspect. Son nom : Jérémie LouisSidney, 33 ans. L’homme est connu N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

GILLES TRAVERSO/MAXPPP

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des services de police et a déjà été condamné à deux ans de prison ferme pour trafic de cocaïne. Louis-Sidney se rend souvent à Cannes, sur la Côte d’Azur, où vit une de ses deux « épouses ». Depuis sa conversion, il fréquente beaucoup la mosquée El-Médina, en plein centre-ville. En remontant le fil de sa vie, en se lançant à la recherche de ses fréquentations, les enquêteurs mettent en évidence l’existence

! ARRESTATION DU JEUNE JIHADISTE

au domicile de ses parents, le 6 octobre, à Cannes.

d’un « groupe » basé à Cannes dont il serait le leader. Ils soupçonnent ses membres, aussitôt placés sous surveillance, d’être responsables de l’attentat antisémite de Sarcelles. Et de nourrir des projets terroristes de plus grande ampleur. Le 6 octobre, douze d’entre eux sont arrêtés dans quatre villes : Paris, Cannes, Torcy (en Seine-et-Marne) et Strasbourg. Louis-Sidney, qui se trouve dans cette dernière ville, choisit de ne pas se rendre. Armé JEUNE AFRIQUE


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NICE MATIN.FR

par un club étranger. Il raconte: « Je m’entraînais dur jusqu’à l’âge de 16 ans, où j’ai atteint mon apogée. Je suis parti en Angleterre dans le club professionnel de Portsmouth, mais, pour diverses raisons, dont une blessure grave, ça n’a pas marché. » L’aventure anglaise ne dure que quelques mois. Bientôt, c’est le retour à la case départ. Yann Nsaku retourne vivre chez ses parents, avenue des Anglais, à Cannes. Une adresse qui, désormais, se teinte d’un léger goût d’amertume.

d’un Magnum 357, il ouvre le feu à plusieurs reprises sur les policiers avant d’être abattu. Parmi les membres de cette présumée cellule terroriste figure un certain Yann Nsaku. SANS RÉSISTANCE. Plus que les autres, il focalise l’attention. Sa trajectoire intrigue. Âgé de 19 ans, il est le plus jeune des suspects et n’a pas de casier judiciaire. Cueilli au domicile cannois de ses parents, il n’oppose pas de résistance. Dans la foulée, Philippe, son père, originaire de la province du Bas-Congo, en RDC – il est gérant d’un restaurant –, et son frère Junior ne cachent pas leur incompréhension dans les médias. « Comme nos deux autres enfants, on l’a toujours élevé dans le droit chemin, il n’a jamais fait de mal à personne », déclare Philippe Nsaku, abasourdi. Mais il ajoute, amer : « Il passait de plus en plus de temps sur son ordinateur. On ne se faisait même plus la bise. » Très vite, sur internet, des éléments relatifs à sa vie émergent : photos, pages Facebook, sites web… JEUNE AFRIQUE

Et surtout, cette vidéo capitale postée neuf mois auparavant sur YouTube. Ce petit film de quinze minutes est en réalité le premier épisode d’une série consacrée à des convertis. Son titre? « Welcome to my Umma » – « Bienvenue dans ma Oumma » (communauté des croyants). Premier « invité », Yann s’emploie à décrire les différentes phases d’une vie coupée en deux : il y a, explique-t-il, un avant et un après sa conversion. Son enfance est à peine évoquée. On apprend quand même qu’il a suivi des cours de catéchisme. « Au début, j’y allais assez assidûment. Au fur et à mesure, j’ai délaissé ça, parce que je me posais plein de questions quant à la doctrine chrétienne. Par exemple, sur la question de la Trinité », racontet-il. Il y a aussi cette passion dont il aurait aimé faire un métier : le football. Enfant, il débute dans une équipe de jeunes de l’AS Cannes, club réputé qui forma naguère les stars Zinédine Zidane et Patrick Vieira. Entre autres. Doué, il se fait remarquer et, en 2009, est recruté

!YANN NSAKU TEL QU’IL APPARAÎT SUR UNE VIDÉO

postée sur internet en décembre 2011.

MIRACLES. C’est à cette époque qu’il croise le chemin d’un « frère » qui lui montre des vidéos concernant les « miracles scientifiques » du Coran. « Ces vidéos sont très prisées et contribuent, parmi d’autres facteurs, à la conversion de personnes motivées par la dimension rationnelle, scientifique de l’islam », explique Samir Amghar, auteur du Salafisme d’aujourd’hui. Le jeune Cannois se laisse convaincre et, très vite, se convertit: Yann devient Idriss. Une conversion éclair qui ne surprend pas Samir Amghar : « Le mode de radicalisation a changé, dit-il. Auparavant, cela prenait des années ; aujourd’hui, il suffit de quelques mois. » « Ces versets m’ont mis des claques, ça a été le début d’une profonde recherche », commentepoursapartYannNsaku. Bientôt, il se consacre exclusivement à cette quête et, lui aussi, prie assidûment à la mosquée El-Médina. Quand a-t-il réellement commencé à fréquenter Jérémie LouisSidney ? Quelle a été l’influence de ce dernier sur lui ? En a-t-il

Au catéchisme, il se posait « beaucoup de questions sur la doctrine chrétienne ». seulement eu une ? Nsaku était-il présent à ses côtés lors de l’attentat de Sarcelles ? Cette « profonde recherche » l’aurait-elle finalement transformé en un jihadiste prêt à tout pour imposer ses convictions? C’est à toutes ces questions, et à beaucoup d’autres, que la suite de l’enquête va tenter de répondre. ● N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


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Économie

ÉCOTOURISME

Du potentiel en réserve

AL SPÉCI ES D DROIT ES R AFFAI

Ces avocats

qui conseillent l’Afrique Projets miniers et pétroliers, financements d’infrastructures, fusions-acquisitions et contentieux… De Paris à Toronto, les cabinets internationaux scrutent le continent à la recherche des bonnes affaires. Enquête sur un milieu de plus en plus coté.

Alain Malek

Associé chez Norton Rose JULIEN CLÉMENÇOT

L

GROSSES ÉCURIES. Si le continent attire les grosses écuries, c’est encore souvent pour des projets qui touchent à l’exceptionnelle richesse de son sous-sol. « La demande la plus importante vient des projets miniers intégrés, puis du pétrole », reconnaît Stéphane Brabant, ● ● ● N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

A

vec sa décennie d’expérience sur la zone, Alain Malek ferait presque figure de dinosaure à l’échelle des avocats d’affaires actifs en Afrique francophone. Responsable de cette région au sein du cabinet Norton Rose, il revient sur l’évolution du métier d’avocat d’affaires en Afrique… et sur son avenir.

VINCENT FOURNIER/J.A.

es cabinets Herbert Smith Freehills et Norton Rose refusent de commenter l’information, mais ils vont annoncer dans les prochaines semaines l’ouverture de nouveaux bureaux en Afrique francophone, les premiers au sud du Sahara. Après l’inauguration, en 2011, des implantations de Clifford Chance, Allen & Overy et Norton Rose à Casablanca, c’est une nouvelle preuve de l’attractivité du continent aux yeux des grands avocats d’affaires internationaux. Plus un seul d’entre eux n’omet désormais de mettre en avant sa stratégie Afrique. « Notre objectif est de concentrer des efforts qui auparavant étaient plus diffus, comme nous l’avons fait sur d’autres marchés émergents en Asie ou en Amérique latine », souligne Patrick Tardivy, associé chez Freshfields, à Paris. Une compétition dans laquelle les cabinets français comme CMS Bureau Francis Lefebvre, Jeantet ou Gide Loyrette Nouel, souvent pionniers en Afrique francophone, peinent désormais à rivaliser, faute de moyens. Et où les avocats locaux servent généralement de relais, plus ou moins valorisés (lire p. 85).

JEUNE AFRIQUE : Paris reste-t-elle la place la plus adaptée pour exercer sur l’Afrique francophone ? ALAIN MALEK : Effectivement, le réflexe d’un investisseur asiatique, moyen-oriental ou occidental quand il veut investir en Afrique francophone, c’est plutôt d’aller vers Paris. C’est moins vrai pour le Maghreb et pas du tout dans le cas des dossiers Sud-Sud. Notre équipe à Casablanca a consacré environ 20 % de son temps, ces douze


BANQUE

Grand bond en avant pour Orabank

DÉCIDEURS

Claude Périou DG de Proparco

MARCHÉS FINANCIERS

Casa a le blues

« Les voyants passent au vert » derniers mois, à l’accompagnement d’entreprises marocaines en Afrique subsaharienne. Pour les dossiers miniers, où l’anglais est la norme, beaucoup d’investisseurs internationaux sollicitent leur cabinet anglo-saxon. Plusieurs cabinets internationaux se sont installés à Casablanca. Pourquoi ? Il y a deux explications. Premièrement, l’existence d’un véritable marché domestique demandeur d’une expertise internationale et prêt à en payer le prix. Deuxièmement, la présence d’un environnement réglementaire sophistiqué, stable et lisible. Dans les ministères, on trouve désormais des hauts fonctionnaires qui comprennent le besoin d’un environnement propice à l’investissement.

La croissance du continent va-t-elle pousser les cabinets à s’implanter en Afrique subsaharienne ? La réflexion est enclenchée. Certains pays ont un marché domestique attractif et, en plus, il est facilement envisageable de rayonner sur les États voisins, contrairement au Maghreb, où les économies sont plus cloisonnées. Les plus réactifs vont sauter le pas. Au Sénégal, en Côte d’Ivoire ou en RD Congo, les voyants sont en train de passer au vert. Les entreprises africaines vous sollicitent-elles ? Effectivement. Quand une entreprise décide de se projeter hors de ses frontières, elle a en général compris qu’elle devait être accompagnée par un cabinet répondant à des critères internationaux. Ceux qui n’en sont pas convaincus sont souvent encore

tournés vers leur marché national, où ils ont le sentiment d’être protégés car ils maîtrisent l’environnement. Les cabinets locaux très structurés sont encore peu nombreux. Les internationaux ont-ils un rôle à jouer pour les aider à monter en gamme ? En Afrique francophone, la différence majeure n’est pas sur la rigueur et la qualité individuelle, elle est plutôt sur la flexibilité linguistique anglais-français, le fonds documentaire, l’organisation et la capacité à établir une norme pour un service donné, ce que les cabinets locaux, à quelques exceptions, ne font pas encore. Comme ce fut le cas en Europe continentale il y a un peu plus de vingt ans, à l’arrivée des cabinets anglo-saxons, la montée en gamme se fera surtout par l’intégration à des réseaux mondiaux. ● Propos recueillis par J.C.

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Entreprises marchés SPÉCIAL DROIT DES AFFAIRES

par White & Case à ● ● ● associé chez Herbert Smith. Au-delà Hong Kong. du contrat d’exploitation du gisement, ces dossiers, extrêmement complexes, Pour l’heure, les cabinets installés à incluent très souvent la construction de Par is concentrent routes, de chemins de fer, de centrales encore la majorité des électriques, ainsi que les relations dossiers destinés à avec les communautés villageoises… Depuis le milieu des années 2000, les l’Afrique francophone. avocats d’affaires interviennent aussi Un leadership hérité de « Les de plus en plus sur le financement de l’Histoire et renforcé spécialistes projets, notamment d’infrastructures. par l’adoption par dixde l’Afrique « Les financements de projets vont sept États d’un droit être encore plus nombreux quand les unifié inspiré des textes francophone États africains auront adopté, comme français. « Il y a bien sont surtout au Sénégal et bientôt au Maroc, un à Londres quelques en France » cadre réglementaire régissant les parconnaisseurs de CHRISTOPHE ASSELINEAU, l’Ohada [Organisation tenariats public-privé », estime Paule Shearman & Sterling pour l’harmonisation Biensan, associée chez White & Case. Mais dans les prochaines années, en Afrique du droit des ce sont surtout les opérations dites affaires, NDLR], mais « corporate » (fusions-acquisitions, prises de la plupart des spécialistes sont en France », participation…) qui devraient se multiplier, constate Christophe Asselineau, de Shearman « notamment en raison de l’arrivée de fonds & Sterling. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard d’investissement du monde entier », note Pierre si des cabinets cherchant à travailler sur le Marly, de CMS Bureau Francis Lefebvre. « Ils continent, comme le canadien Heenan Blaikie, ne s’intéressent plus seulement aux projets se sont récemment installés à Paris. miniers ou aux infrastructures, mais aussi au Pourtant, certains, comme Alain Malek, marché des biens de consommation », ajoute patron Afrique francophone de Norton Rose Boris Martor, chez Eversheds. (lire interview p. 81), jugent que Casablanca pourrait bientôt mettre à mal cette domination, NOUVELLE DONNE. Des dossiers qui, à l’image notamment en raison des liens développés des créations de fonds d’investissement ou par le Maroc avec les pays subsahariens et des financements d’opérations sur le marché de l’évolution favorable de l’environnement des capitaux, gagnent en complexité, au point réglementaire. « Je me pose régulièrement la que certains cabinets préfèrent composer des question d’une ouverture au Maroc », avoue équipes projet par projet plutôt que de créer d’ailleurs Paule Biensan. un réel département Afrique. « L’intervention de l’ensemble de nos associés démontre d’une UN MERCATO PERMANENT. Reste que, part l’ampleur de ce marché, et d’autre part sa plus que des firmes, le portefeuille de clients maturation, puisque la spécialité technique reste souvent la propriété des associés euxprime sur la spécialité géomêmes. Alors, depuis quelques graphique », confirme Paul années, on assiste à un mercato Lignières, associé paripermanent où les « Africains » de « La plus la profession passent d’un cabinet sien de Linklaters. Dans à l’autre en fonction des opportuleur stratégie, les firmes grosse nités. « Pendant longtemps, nous doivent aussi prendre en demande étions considérés comme des nuls. considération la diversivient des fication des investisseurs. Maintenant, il ne se passe pas projets Conscients de cette nouun jour sans qu’on tente de nous miniers et velle donne, les grands débaucher », souligne Stéphane réseaux renforcent leurs Brabant, de Herbert Smith, qui du pétrole » équipes aux quatre coins travaille sur l’Afrique depuis STÉPHANE BRABANT, Herbert Smith Freehills du monde. Conseiller plusieurs décennies. En 2010, du chinois Minmetals l’américain Latham & Watkins Resources lors de l’acquia ainsi renforcé son équipe en sition, pour 1 milliard d’eurecrutant Clément Fondufe chez ros, du minier Anvil Mining White & Case. (présent en RD Congo) en Mais les deux plus beaux transfévrier, John Tivey vient par ferts de ces dernières années sont à exemple d’être débauché mettre à l’actif d’Allen & Overy et ● ● ● N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

Les quinze STRUCTURATION DE PROJETS

STÉPHANE BRABANT

VINCENT FOURNIER/J.A.

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Cabinet : Herbert Smith Freehills Mission : Structuration du projet minier intégré de Simandou, en Guinée (mines, chemin de fer, ports), négociation des contrats, des permis… Montant : Plusieurs milliards d’euros

CHRISTOPHE ASSELINEAU

Cabinet : Shearman & Sterling Mission : Structuration du projet minier intégré de Mbalam-Nabeba, comprenant une mine de fer entre le Congo et le Cameroun, une ligne de chemin de fer et un port minéralier Montant : 3,1 milliards d’euros

THIERRY LAURIOL Cabinet : Jeantet Mission : Structuration des projets miniers de la société Xstrata en JEUNE AFRIQUE


Entreprises marchés

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SPÉCIAL DROIT DES AFFAIRES

qui ont marqué 2012 BERTRAND ANDRIANI

de la SNI et de sa filiale Optorg, au Maroc, dans la création d’une coentreprise entre Optorg et Demimpex spécialisée dans la distribution automobile dans quatorze pays, dont onze africains

Montant : NC

DR

Cabinet : Linklaters

DR

Mission : Conseil du financement de la plantation de palmiers à huile d’Olam, au Gabon

Cabinet : White & Case Mission : Conseil du groupe de prêteurs mené par la Banque africaine de développement pour le financement de la construction du troisième pont d’Abidjan, en Côte d’Ivoire Montant : 272 millions d’euros

TIM SCALES Cabinet : Allen & Overy Mission : Conseil de l’émirati Taqa pour le financement de l’extension de la centrale de Jorf Lasfar, au Maroc Montant : 1,1 milliard d’euros

CHRISTOPHE ECK

Montant : 410 millions d’euros JEUNE AFRIQUE

Cabinet : Cleary Gottlieb Steen & Hamilton Mission : Conseil de la Côte d’Ivoire sur la renégociation de sa dette

CONTENTIEUX

Montant : NC

EMMANUEL GAILLARD

PASCAL AGBOYIBOR

Montant : 176 millions d’euros

ANTHONY GIUSTINI Cabinet : Clifford Chance Mission : Conseil des financiers sur le financement des centrales de Kribi et Dibamba, au Cameroun Montant : 350 millions d’euros FUSIONSACQUISITIONS

PIERRE MARLY Cabinet : CMS Bureau Francis Lefebvre Mission : Conseil de Toyota Tsusho Corporation, acquéreur du groupe panafricain de distribution spécialisée CFAO, pour la partie Afrique Montant : 2,3 milliards d’euros

ALAIN MALEK Cabinet : Norton Rose Mission : Conseil

DR

PAULE BIENSAN

Mission : Conseil du Sénégal pour la construction du nouvel aéroport de Dakar

BARTHÉLEMY FAYE

Montant : NC

w FINANCEMENT DE PROJETS

Cabinet : Gide Loyrette Nouel

CONSEIL AUX ÉTATS

VINCENT FOURNIER/J.A.

Mauritanie : convention, développement des infrastructures (chemin de fer, eau, port, centrale électrique…)

Cabinet : Shearman & Sterling Mission : Conseil de la Sonatrach et de l’Algérie dans deux arbitrages avec la société Anadarko relatifs à des contrats de partage de production pétrolière Montant en jeu : 11 milliards d’euros

JUSTIN HARVEY-HILLS Cabinet : Mourant Ozannes Mission : Conseil de la Gécamines dans sa procédure contre le fonds vautour FG Hemisphere, en RD Congo Montant en jeu : 192 millions d’euros

Cabinet : Orrick Mission : Conseil de la RD Congo sur le projet hydroélectrique Inga, dont l’objectif est de développer une capacité de 4 000 MW d’ici à 2020 Montant : 11,6 milliards d’euros

BORIS MARTOR Cabinet : Eversheds Mission : Conseil de la Mauritanie dans le cadre de la conclusion d’un accord avec la Snim et Kinross, pour la création d’une société visant à construire une centrale thermique à gaz de 350 MW Montant : 540 millions d’euros N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


SPÉCIAL DROIT DES AFFAIRES ● ● ● Shearman & Sterling, qui ont ressouvent, les cabinets s’engagent à pectivement intégré Hicham Naciri respecter une enveloppe, rééva(ex-Gide Loyrette) à Casablanca et luée en fonction des évolutions Christophe Asselineau (ex-Simons du dossier. Les rémunérations & Simons) à Paris. L’arrivée de ces atteignent en bout de course associés expérimentés au sein plusieurs centaines de milliers de ces cabinets relativement peu d’euros, voire, sur les plus gros actifs sur le continent (en dehors dossiers, plusieurs millions. Et « Depuis de l’arbitrage pour Shearman) ces sommes n’effraient plus les cinq ans, leur permet dorénavant de nourentreprises africaines. « Depuis on constate rir de réelles ambitions. Dans cinq ans, on constate l’émergence l’émergence les « petits » cabinets, certains, de clients locaux comme les nigécomme Thierry Lauriol (Jeantet) rians Dangote ou United Bank de clients ou Pierre Marly (CMS Bureau of Africa », indique Barthélemy locaux » Francis Lefebvre), tirent encore Faye, chez Cleary Gottlieb Steen BARTHÉLEMY FAYE, leur épingle du jeu. Ce dernier a & Hamilton. Cleary Gottlieb Steen & Hamilton part exemple travaillé plusieurs Une évolution déjà rencontrée mois sur l’acquisition du spéciadepuis plusieurs années du côté des États, désireux de profiter, à liste de la distribution CFAO par le l’instar de la Guinée ou de la Côte d’Ivoire, de japonais Toyota Tsusho Corporation, à la demande conseils avisés quand il s’agit par exemple de du géant américain Baker & McKenzie. renégocier des contrats miniers ou des dettes publiques. La présence des avocats les aide à ENVELOPPES. À Paris, les honoraires de ces avocats dépassent les 600 euros de l’heure, selon mieux défendre leurs intérêts, tout en améliorant la lettre spécialisée Juristes associés. Mais le plus la gouvernance et la transparence. ●

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Ailesd'Afrique

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Revue panafricaine du transport aérien, publiée par l’AFRAA La voix de l’Association des compagnies aériennes africaines Ailes d’Afrique est une revue professionnelle en couleur, proposant des articles sur le personnel, la direction et les moyens techniques des compagnies aériennes africaines et de leurs partenaires, faisant part des succès de l’aviation commerciale africaine, abordant ses défis et sensibilisant la communauté aéronautique aussi bien en Afrique qu’en dehors du continent pour contribuer au développement des compagnies aériennes africaines et de l’aviation africaine en général. Publié trimestriellement en anglais et en français, Ailes d’Afrique est un outil intégral de communication du transport aérien ciblant toutes les compagnies aériennes africaines et d’autres acteurs de l’industrie. Sur sa liste de distribution figure la fine fleur du personnel de l’aviation africaine, faisant du magazine la plate-forme idéale pour les annonceurs souhaitant promouvoir leurs produits ou services.

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Entreprises marchés

ISSOUF SANOGO/AFP

SPÉCIAL DROIT DES AFFAIRES

! Le dossier de l’extension de LA CENTRALE D’AZITO (Abidjan) fait notamment intervenir l’Ivoirien Karim Fadika.

AFRIQUE SUBSAHARIENNE

« Ce sont eux qui ont besoin de nous »

En zone francophone, une dizaine de cabinets locaux sont désormais considérés comme très compétents. Au point d’être devenus indispensables à leurs grands frères internationaux.

J

oli coup pour Karim Fadika. L’avocat d’affaires ivoirien a conseillé de bout en bout le groupe Banque Atlantique dans ce qui restera l’une des plus belles opérations panafricaines de fusion-acquisition de l’année 2012: l’entrée du marocain Banque populaire dans le capital d’un nouveau holding contrôlant sept banques du réseau Banque Atlantique en Afrique francophone subsaharienne, pour une valeur de transaction de près de 200 millions d’euros. Une réussite qui s’ajoute à de nombreuses autres : l’avocat et plusieurs de ses confrères francophones – une dizaine au sud du Sahara – ont multiplié tout au long de l’année les dossiers de fusionacquisition, de financement de projet, d’opération transfrontalière, de levée de fonds et de règlement de litige. Tous sont considérés comme les égaux – ou presque – des meilleurs avocats internationaux opérant en Afrique. « Aujourd’hui, ce n’est pas moi qui ai besoin d’eux, mais eux qui ont besoin de mes compétences », souligne, d’un air de défi, Salim Kanjo, actif depuis plus de trente ans et dont le cabinet, Kanjo, Koïta et Houda, est considéré par le guide Chambers, la bible des avocats d’affaires, comme l’un des meilleurs au Sénégal. JEUNE AFRIQUE

« Comme les projets sont sponsorisés par des multinationales ou des grandes banques, ces dernières passent par des cabinets internationaux », commente Michel Kizito Brizoua-Bi,uneréférenceàAbidjan. « Mais dans un pays donné, ceux-ci ne peuvent pas faire sans les cabinets locaux », poursuit-il. Entre les deux, la relation a bien évolué. « Quand j’ai commencé [au milieu des années 1980, NDLR], le cabinet international faisait tout et nous envoyait un formulaire d’opinion

juridique », se rappelle MarieAndrée Ngwe, qui dirige onze avocats et juristes au Cameroun. Elle ajoute : « Aujourd’hui, nous sommes associés dès le début des projets. » La plupart des grandes opérations de l’année 2012 (lire pp. 82-83) ont d’ailleurs été en partie pilotées par des cabinets locaux. ZÉRO COMPLEXE. Ces derniers

profitent également d’un nombre croissant d’opérations initiées par des groupes africains. « Pendant longtemps, il y a eu un complexe et on pensait que les avocats locaux n’avaient pas de compétences. Depuis quelque temps, les autorités locales et les entreprises africaines reviennent là-dessus », explique Salim Kanjo. Du conseil juridique au contentieux, il y a désormais peu de domaines qui échappent aux Subsahariens francophones. Plusieurs avocats locaux songent à se rapprocher de grands confrères internationaux : « D’ici quelques années, rejoindre un grand cabinet mondial paraîtra légitime », juge Paul Jing, qui a fondé en 2004 Jing & Partners, au Cameroun. Stéphane Brabant, associé du cabinet international Herbert Smith Freehills et fin connaisseur de l’Afrique francophone, en témoigne : « Les avocats africains ont devant eux un boulevard en termes de droit des affaires ! » ● FRÉDÉRIC MAURY

LES AFRICAINS DE L’ANNÉE Avocat

Cabinet

Opération

HICHAM NACIRI

Naciri & Associés / Allen & Overy

Conseil de Saham – Levée de fonds et acquisition d’assureurs libanais et angolais (plus de 300 M€)

MOHIEDDINE EL AMARI

El Amari & Associés / Bird & Bird

Conseil de SNI – Cession de Centrale laitière à Danone (530 M€)

AZZEDINE ET NADIA KETTANI

Kettani Law Firm

Conseil des prêteurs dans le cadre de l’extension de la centrale thermique de Jorf Lasfar

KARIM FADIKA

FDKA

Conseil d’AFG – Entrée de Banque populaire dans le capital de Banque Atlantique (200 M€)

MARIE-ANDRÉE NGWE

Cabinet MarieAndrée Ngwe

Conseil d’AES – Financement de la centrale à gaz de Kribi (264 M€)

MICHEL KIZITO BRIZOUA-BI

Bilé-Aka, Brizoua-Bi & Associés

Conseil d’Ecobank – Augmentation de capital réservée au sud-africain PIC

PAUL JING

Jing & Partners

Conseil des prêteurs pour le financement de la centrale à gaz de Kribi (264 M€)

Les avocats d’affaires marocains gardent une longueur d’avance sur leurs homologues au sud du Sahara. Plusieurs d’entre eux, comme Hicham Naciri, ont d’ailleurs déjà rejoint de grands cabinets internationaux. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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86

Entreprises marchés touristique en panne (Côte d’Ivoire) ou pour assurer le développement durable de zones reculées et de leurs populations (Cameroun), tout en tirant parti d’une biodiversité unique et mondialement reconnue (Gabon et RD Congo), le « tourisme de parcs » a aujourd’hui le vent en poupe auprès de nombreux gouvernements d’Afrique centrale et d’Afrique de l’Ouest.

ÉCOTOURISME

Du potentiel en réserve Alors que s’ouvre la première conférence panafricaine sur la gestion des parcs nationaux, les pays subsahariens francophones veulent enfin tirer profit de leur patrimoine naturel. Avec comme modèles l’est et le sud du continent.

T

out un symbole. Nous sommes au salon international du tourisme et du voyage d’affaires Top Resa, en septembre, à Paris. Et lorsque les ministresafricainsprésentsinsistent surleurvolontédedoperlafréquentation touristique de leur pays en développant les parcs nationaux, c’est dans l’ombre de l’imposant stand de l’Afrique du Sud qu’ils font leurs discours. Devant les affiches vantant la faune « exceptionnelle » du parc Kruger, le Sénégal dévoile un vaste programme de repeuplement de ses réserves, à commencer par le Niokolo-Koba. Le Cameroun, de son côté, promet une

SÉNÉGAL

enveloppe de 150 millions d’euros pour lutter contre le braconnage, avec l’ambition affichée de « faire de l’écotourismeunproduittouristique majeur»,selonBelloBoubaMaigari, ministre du Tourisme. Des déclarations qui font sourire les professionnels français, habitués à ces annonces « rarement suivies d’effet », souligne l’un d’eux. Sauf que cette fois « les gouvernements semblent vraiment avoir la volonté de valoriser leurs zones protégées, notamment en Afrique francophone », constate un autre. Que ce soit pour diversifier une offre balnéaire qui s’essouffle (comme au Sénégal), pour relancer un secteur

EXPERTISE. Une bonne nouvelle

RWANDA

Parc national du Niokolo-Koba

Parc national des Volcans

4 600

27 000

KENYA Réserve nationale du Masaï Mara

Les anglophones plus attractifs

240 000

(nombre de visiteurs en 2011)

CAMEROUN Parc national de Boubandjida

60 000 GABON Parcs nationaux

2 000 BOTSWANA

RD CONGO Parc national des Virunga

3 300

Réserve du delta de l’Okavango

120 000 AFRIQUE DU SUD Parc national Kruger

157 000 N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

TANZANIE Parc national du Serengeti

155 000

pourLazareEloundouAssomo,chef de l’unité Afrique à l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) : « Aucun développement touristique n’est possible sans volonté politique », assure-t-il. La zone francophone part de loin en la matière, comparée aux pays d’Afrique australe et d’Afrique de l’Est qui, au fil des dernières décennies, « ont développé une véritable expertise sur ce segment touristique », confirme Olivier Théry, fondateur de Chemins du Globe (aujourd’hui UshuaïaVoyages),l’undespremiers tour-opérateurs français à avoir promu l’Afrique du Sud dans les années 1980. En Afrique australe, selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), le secteur touristique pèse entre 4 % et 8 % du PIB, contre moins de 3 % en Afrique centrale. Il représente à peine 1 % des emplois le long du golfe de Guinée, soit cinq à dix fois moins que sur la côte orientale. Alors que les parcs sud-africains et kényans alignent chaque année des volumes de fréquentation à six chiffres (voir carte) et que les touristes vont en nombre découvrir le patrimoine naturel habilement exploité de la Tanzanie (lire encadré), du Botswana et de la Namibie, ils ne sont que quelques milliers à s’aventurer dans les forêts humides d’Afrique centrale ou dans la savane ouest-africaine. « Le Niokolo-Koba a attiré jusqu’à 20 000 visiteurs par an, contre moins de 5 000 l’an dernier », constate Souleye Ndiaye, le directeur des parcs sénégalais. Pis, alors que la presse internationale met en avant JEUNE AFRIQUE


GUENAY ULUTUNCOK/LAIF-REA

Entreprises marchés

les bons résultats économiques et le renouvellement permanent des offres touristiques du Kruger, de l’Okavango (Botswana) ou du Serengeti (Tanzanie), elle ne parle que des pressions exercées par les compagnies pétrolières dans le parc des Virunga (RD Congo) ou des massacres d’éléphants dans le nord du Cameroun. « Grâce au tourisme, auKenya,lepoidséconomiqued’un animal est plus important quand celui-ci est vivant que quand il est mort, alors que c’est encore le contraire au Congo ou au Tchad », résume Lazare Eloundou Assomo, de l’Unesco. HAUT DE GAMME. C’est juste-

ment pour inverser cette tendance que l’OMT organise à Arusha (Tanzanie), du 15 au 18 octobre, lapremièreconférencepanafricaine sur la gestion des parcs nationaux. Parmi les principaux instigateurs de l’événement, « le Cameroun, le Gabon,leBurkinaFasoetleSénégal, conscients des retombées économiques que peuvent générer leurs

zones protégées », souligne Helder Tomas, directeur adjoint pour l’Afrique à l’OMT. Certaines destinations sont plus dures à valoriser que d’autres, « à commencer par les zones forestières, difficiles d’accès et aux capacités d’accueil forcément limitées », précise Bas Huijbregts, directeur des programmes Afrique au World Wide Fund for Nature (WWF).

! Visite en canoë du PARC DE LOANGO, au Gabon.

Libreville a passé des accords avec Aman Resorts et SFM Africa pour la construction d’écolodges. Plus que le tourisme de masse, l’Afrique centrale vise le haut de gamme. Très avancé sur le dossier de l’écotourisme depuis la création de ses treize parcs nationaux en 2002, le Gabon a multiplié par dix son budget de conservation, tout en essayant d’attirer des professionnels qui l’aideront à tirer son offre vers le haut. Après plusieurs essais infructueux, Libreville est peut-être tombé sur la bonne pioche avec le

TANZANIE, L’EXEMPLE À SUIVRE « C’EST AUJOURD’HUI la destination star », assure Fabrice Dabouineau, directeur Afrique de Voyageurs du monde, l’un des principaux touropérateurs français présents sur le continent. Pendant que le Kenya voit pâlir son étoile touristique, celle du voisin tanzanien n’a jamais tant brillé. JEUNE AFRIQUE

« C’est un pays où le tourisme a été identifié très tôt comme vecteur de développement », explique HelderTomas, de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT). En termes de fréquentation, laTanzanie est encore loin de l’Afrique du Sud, du Botswana et du Kenya, mais se classe au troisième rang

subsaharien en matière de recettes touristiques. Avec 1,1 milliard d’euros en 2011, le tourisme est, derrière l’agriculture, la deuxième source de revenus du pays, qui annonce avoir sanctuarisé 40 % de sa superficie. Le secteur contribue à hauteur de 17 % au PIB et procure un emploi à près de 7 % de la population. ● O.C.

singapourien Aman Resorts, qui a prévu d’investir 160 millions d’euros en deux phases pour la construction d’écolodges dans le parc de Loango d’ici à 2014. Le sud-africain SFM Africa annonce également la construction de lodges pour 25 millions d’euros avant la fin de l’année. « Ces deux projets vont avoir un impact énorme sur la destination et, plus largement, sur l’économie du pays », espère Lee White. Le secrétaire exécutif de l’Agence nationale des parcs nationaux s’attend à voir passer la fréquentation des zones protégées de 2000 visiteurs par an à « plus de 20000, avec d’importantes retombées en termes de devises et d’emplois ». Selon les grilles de l’OMT, chaque touriste dépenserait près de 3 000 euros durant son séjour, tout en créant cinq emplois permanents pour assurer des prestations de très grande qualité. PARTENAIRE. Le Sénégal aussi cherche le partenaire privé qui lui permettra de relancer son offre sur le Niokolo-Koba, alors que le Cameroun fait état de discussions avancées avec des opérateurs chinois. Reste encore, pour ce dernier, à régler les conflits de compétences entre le ministère du Tourisme et celui des Forêts, « qui brouillent les cartes », regrette un opérateur. Les administrations posent d’ailleurs « de nombreux problèmes qu’il est urgent de résoudre », estime Cosma Wilungula, directeur de l’Institut congolais pour la conservation de la nature (RD Congo). Au premier rang, la question des visas, « très longs à obtenir et très chers », pointe-t-il. L’OMT, qui a conduit de nombreuses missions en Afrique centrale ces derniers mois, planche justement sur le sujet dans le cadre des parcs transfrontaliers entre la Guinée et le Sénégal ou entre le Congo, le Cameroun et la Centrafrique. « Les visas limitent les échanges touristiques », confirme Helder Tomas, qui voudrait voir les pays concernés « travailler ensemble pour la mise en place d’un document commun ». ● OLIVIER CASLIN N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

87


Entreprises marchés

EXCLUSIF

BANQUE

Grand bond en avant pour Orabank de mettre 10 millions d’euros sur la table), les États membres de l’UEMOA et des investisseurs privés, à travers une introduction sur le marché financier.

Le groupe basé à Lomé a été retenu pour la reprise de la Banque régionale de solidarité. À la clé, un doublement du nombre de ses implantations et une entrée en Côte d’Ivoire et au Sénégal.

! Le réseau de BRS couvre les huit pays de l’UEMOA (ici à Abidjan).

M

odeste groupe bancaire basé au Togo, Oragroup (holding du réseau bancaire Orabank) va faire un pas de géant sur le marché ouest-africain. Après l’acquisition, en août, de la Banque togolaise de développement pour 30 millions d’euros, il est sur le point de racheter la Banque régionale de solidarité (BRS), implantée dans les huit pays membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Créé en 2004 par les autorités de la zone pour lutter contre la pauvreté, BRS s’est spécialisé dans les très petites entreprises, les particuliers et la microfinance. D’après nos informations, une étape décisive vient d’être franchie dans le processus de cession mené depuis près d’un an par la Banque ouest-africaine de développement (BOAD). Le 27 septembre, à Cotonou, le conseil des ministres de l’UEMOA a en effet approuvé l’offre présentée par Oragroup. Selon le schéma N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

validé, l’ancien Financial Bank, rebaptisé en mai 2011, reprendra 51 % du capital du holding de BRS. « Il reste encore deux étapes fondamentales: l’approbation du conseil d’administration d’Oragroup, qui doit se réunir le 22 octobre, et bien entendu celle de la Commission bancaire [de l’UEMOA, NDLR], qui reste souveraine », souligne un proche du dossier. Si le montant de l’opération est pour l’instant gardé secret, on sait que les 49 % restants devraient être répartis entre la BOAD (l’institution vient

Avant/après TOTAL DE BILAN

654 /

1

plus de millions milliard

d’euros

PRÉSENCE DANS

6/12 pays

EFFECTIF

500/1000 employés

ISSOUF SANOGO/AFP

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CIBLES. L’opération doit propulser Oragroup au rang de principal établissement d’Afrique de l’Ouest francophone en termes d’implantations, aux côtés d’Ecobank (actif dans 32 pays africains). Le groupe sera en effet présent dans douze pays (Mauritanie, Guinée, Tchad, Gabon, Bénin, Togo, Niger, Côte d’Ivoire, Sénégal, Mali, GuinéeBissau, Burkina Faso), contre six auparavant. Surtout, l’acquisition de BRS va permettre à Oragroup de prendre pied dans les deux principaux marchés de la sousrégion que sont la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Ces pays, avec le Ghana et le Cameroun, où le groupe a acquis une institution de microfinance, sont ses principales cibles. Pour se donner les moyens de son ambition, Oragroup, détenu à près de 70 % par le capital-investisseur panafricain Emerging Capital Partners (lire encadré), vient de lancer une nouvelle augmentation de capital, un an après avoir levé une vingtaine de millions d’euros auprès de la BOAD et des agences financières de développement française Proparco et belge BIO. Le groupe entend décrocher environ 75 millions d’euros. Les actionnaires actuels sont sollicités, mais aussi de nouveaux investisseurs

ECP, REDRESSEUR EN SÉRIE ? POUR EMERGING CAPITAL PARTNERS (ECP), actionnaire majoritaire d’Oragroup, le redressement est une seconde nature. En 2009, lorsqu’il prend le contrôle de Financial Bank (devenu Oragroup), l’expansion géographique prévue

est bloquée par la découverte d’irrégularités de gestion. Un dirigeant de poids, Patrick Mestrallet, est nommé à la tête du groupe. Et une série de levées de fonds est réalisée pour redresser la banque et financer

son expansion. « Financial Bank n’était pas un cadeau, et nous avons montré notre capacité à redresser un réseau de banques de taille moyenne, assez proche de ce qu’est BRS aujourd’hui », commente-t-on du côté d’ECP. ● S.B. JEUNE AFRIQUE


Coulisses

Entreprises & marchés

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MICROFINANCE. Pour y parvenir,

le groupe (654 millions d’euros de total de bilan en 2011) devrait développer les activités de BRS tout en conservant son objet social : soutenir les petites entreprises et les populations qui n’ont pas accès aux services financiers. « Nous allons poursuivre le financement de la microfinance. Nous avons une expertise dans ce domaine à travers Finadev [une filiale historique du groupe, désormais juridiquement séparée] », ajoute Patrick Mestrallet. Traditionnellement tourné vers les PME, Oragroup a déjà entamé, depuis près de deux ans, un nouveau virage stratégique et entend désormais couvrir une base de clientèle le plus large possible, allant des grands comptes aux particuliers. D’ailleurs, précise une source bien au fait du dossier, la banque, qui était en concurrence avec d’autres groupes d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale, a été retenue pour son expérience dans le microcrédit. ● STÉPHANE BALLONG et NICOLAS TEISSERENC JEUNE AFRIQUE

CAPITAL-INVESTISSEMENT L’AFRIQUE TROUVE DES FONDS

AKDN

comme la Société financière internationale (SFI, filiale de la Banque mondiale). Les fonds serviront à financer l’acquisition et, surtout, à recapitaliser et mettre à niveau le groupe BRS. Mal géré, ce dernier a accumulé les difficultés au fil des ans. Mis initialement en vente en 2010, BRS a vu plusieurs candidats se succéder. Parmi eux, l’assureur ivoirien NSIA, qui entend développer son pôle banque. Avant de se retirer définitivement, le groupe de Jean Kacou Diagou avait estimé à quelque 107 millions d’euros le montant minimum nécessaire pour redresser BRS. Sur ses huit filiales, seules quatre sont bénéficiaires. Toutes restent de taille très modeste, ne représentant que de 2 % à 3 % de leurs marchés respectifs. « Notre objectif, si l’opération se réalise, est d’atteindre assez rapidement des parts de marché à deux chiffres, comme nous avons réussi à le faire pour nos filiales actuelles », assure Patrick Mestrallet, administrateur directeur général d’Oragroup.

Le marché du private equity africain continue à croître à un rythme soutenu. C’est le constat de Bogusia Glowacz, analyste chez Preqin, un cabinet d’études britannique sur le capital-investissement. Selon cet expert, près de 70 véhicules financiers destinés à l’Afrique cherchent actuellement à lever 15 milliards d’euros. Preuve de cet engouement, le gestionnaire de fonds américain Blackstone prévoit d’investir 2,3 milliards d’euros dans des projets d’énergie en Afrique. À travers Sithe Global, sa filiale spécialisée dans les infrastructures électriques, il envisage notamment de participer au financement de centrales hydroélectriques en Tanzanie et au Rwanda. Autre exemple du boom du capital-investissement : Ü Le fonds Blackstone finance la clôture par Actis d’un second une partie du BARRAGE DE fonds immobilier panafricain, BUJAGALI, en Ouganda. Africa Real Estate 2, de 216 millions d’euros. Pratiquement deux fois plus important que le premier, il sera destiné au développement de commerces et de bureaux dans l’est, l’ouest et le sud du continent, à l’exception de l’Afrique du Sud. ●

S

M

S

• TOGO Afriland First Bank, Ecobank et Attijariwafa Bank ont manifesté leur intérêt pour le rachat de BIA, en cours de privatisation • SÃO TOMÉ E PRÍNCIPE France Télécom a annoncé vouloir développer des activités dans l’archipel • MAROC Standard & Poor’s a revu à la baisse la perspective du pays, de stable à négative • MAROC (2) La BEI a accordé un prêt de 130 M€ à l’OCP pour la modernisation de ses infrastructures • CAMEROUN Addax Petroleum, filiale du chinois Sinopec, a identifié des réserves équivalentes à 20 millions de barils de pétrole et 200 milliards de pieds cubes de gaz

PÉTROLE BP MISE SUR L’ANGOLA Le groupe pétrolier compte investir 8 milliards d’euros en Angola dans les dix ans. Selon son vice-président, Paulo Pizarro, BP entend « accompagner le développement économique du pays pour les cinquante prochaines années ». Le groupe a déjà investi 12 milliards d’euros dans ses gisements angolais et doit démarrer la mise en production des blocs 18 et 31 dans les prochains jours. Premier opérateur pétrolier du pays, il partage aussi plusieurs permis d’exploration avec Sonangol, Esso etTotal. ● TÉLÉCOMS QTEL MONTE DANS WATANIYA Le groupe qatari a augmenté de 52,5 % à 92,1 % sa part dans Wataniya, maison mère des opérateurs Nedjma

(Algérie) etTunisiana (Tunisie). Une stratégie défensive qui révèle les difficultés de Qtel à identifier de nouvelles cibles pour poursuivre son développement, préférant plutôt renforcer ses positions dans ses filiales les plus performantes. ● HYDROÉLECTRICITÉ LA CHINE PRÊTE À ABIDJAN Les autorités ivoiriennes ont reçu de China Exim Bank un prêt de 572 millions d’euros devant permettre de lancer la construction du barrage hydroélectrique de Soubré en novembre. Avec une capacité de 270 mégawatts, cette centrale, située dans le sud-ouest du pays à environ 200 km de San Pedro, aidera à régler les difficultés énergétiques auxquelles sont confrontées les industries basées sur la deuxième plateforme portuaire de la Côte d’Ivoire. ● N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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Décideurs DÉVELOPPEMENT

Claude Périou revient à la maison Retour à la case Proparco pour ce banquier qui avait déjà dirigé la filiale de l’AFD de 2002 à 2006. En misant plus sur le continent, il suit les pas de son prédécesseur.

«

Profil • 57 ans • Diplômé du Centre d’études supérieures de banque (Paris) • DG adjoint de Socredo (Polynésie) en 1987

C

est un poste important qui ne se refuse pas, un challenge. » Après avoir occupé de 2002 à 2006 le poste de directeur général de Proparco, Claude Périou a retrouvé le 2 juillet cette même fonction au sein de la filiale de l’Agence française de développement (AFD). Dans le froid parisien, loin de cette Polynésie-Française qui lui tient tant à cœur. Économiste de formation et diplômé du Centre d’études supérieures de banque, l’ancien président du conseil d’administration de la banque Socredo, premier établissement de Papeete (détenu à 35 % par l’AFD), reprend les manettes d’une institution qui a profondément changé depuis quelques années, se hissant – presque – au niveau de ses homologues allemand (DEG) et néerlandais (FMO). En plus de l’Afrique, du MoyenOrientetdel’Asie,Proparcoaétendu ses activités à de nouvelles régions comme le Caucase ou l’Amérique latine. Les effectifs, quant à eux, sont passés d’environ 80 collaborateurs en 2006 à quelque 150 aujourd’hui. Les métiers ont également changé: « Ils sont beaucoup plus techniques, constate Claude Périou. Nos collaborateurs sont à la fois des financiers et des gens qui sont engagés dans la résolution des problèmes de pauvreté. L’époque où chacun s’occupait un peu de tout est derrière nous. Les équipes se sont professionnalisées et sont beaucoup plus spécialisées. » Revenu à l’AFD en 2010 après quatre ans en Polynésie, Claude Périou y occupait jusqu’à ces derniers mois le poste de directeur N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

• DG de Sofider océan Indien (Réunion) en 1997 • DG de Proparco en 2002 • PCA de Socredo en 2006

BRUNO LEVY POUR J.A.

90

• Directeur des risques à l’AFD en 2010

exécutif des risques. Son prédécesseur à la tête de Proparco, Étienne Viard, qui a fait valoir ses droits à une retraite anticipée, serait parti pour des divergences de vues avec Dov Zerah, directeur général de l’AFD et président du conseil d’administration de Proparco. Claude Périou, lui, affirme avoir de bonnes relations avec son patron : « J’ai eu l’opportunité de travailler avec lui deux années durant à mon précédent poste. Nous partageons la même vision stratégique et nous travaillons en bonne harmonie », assure-t-il, tout en précisant vouloir maintenir la politique de Proparco et poursuivre les principaux défis fixés par son prédécesseur. FINANCER LES PME. Parmi ceux-

ci, faire passer les interventions de l’institution en Afrique subsaharienne de 29 % à 55 % du total de ses engagements. « Depuis le début de l’année, l’Afrique subsaharienne représente déjà près de 50 % des 470 millions d’euros de nos engagements », affirme-t-il, tablant sur un total de 900 millions à 1 milliard d’euros à la fin de 2012. Le nouveau patron de Proparco devrait également renforcer le financement des PME africaines.

! Il a effectué une grande partie de sa carrière en POLYNÉSIEFRANÇAISE.

« La tendance cette année a notamment été de réduire un tant soit peu l’intermédiation pour être plus directement en contact avec les entreprises », explique-t-il. La filiale de l’AFD entend augmenter ses prêts directs aux entreprises, mais aussi entrer directement dans leur capital. Pour l’heure, son principal véhicule de financement des PME reste le système bancaire, dont les établissements engloutissent à eux seuls la moitié des investissements de l’institution. Alors que certains

« Depuis le début de 2012, le sud du Sahara représente déjà près de 50 % de nos engagements. » doutent de l’efficacité de cette méthode, Claude Périou se défend: « En contribuant à la naissance de nouveaux réseaux bancaires, nous favorisons la concurrence et accompagnons les banques pour qu’elles pénètrent encore plus dans le tissu économique. » D’après lui, dans un souci de long terme, il est important de créer en Afrique des outils qui financent les économies et les PME. ● STÉPHANE BALLONG JEUNE AFRIQUE


Décideurs ! LE MÉDECIN ALGÉRO-TUNISIEN mise sur le développement des génériques.

MERCK

à 15 millions d’euros au moment de son rachat par l’allemand Merck, fin 2006. Aujourd’hui, Merck NWA affiche à lui seul des revenus de 65 millions d’euros dans les 38 pays qu’il couvre. BIOSIMILAIRES. Alors que les « bio-

techs » se développent de façon exponentielledanslemonde,Karim Bendhaou se dit préoccupé par l’accessibilité en Afrique des médicaments issus du vivant, leur coût de développement avoisinant le milliard d’euros. « Difficile de baisser nos prix en deçà d’un certain Le président de Merck North West Africa ambitionne seuil sans tomber dans la charité », de démocratiser l’accès aux médicaments issus du vivant. estime-t-il. Merck Serono a néanmoins fait un pas en concluant de l’insuline. Un créneau porteur : un accord, en juin, avec l’indien a plateforme régionale « En 2014, la moitié des 100 produits Dr Reddy’s pour la production du groupe est basée à leaders sur le marché seront issus de biosimilaires (génériques des Tunis, mais il « vit » à Nice des “biotechs” », prévoit-il. médicaments issus des biotechno(France). Façon de parler logies). Prometteur, ce marché en C’est tout naturellement que pour Karim Bendhaou, qui passe estencoreàsesbalbutiements,faute ce médecin algéro-tunisien a chaque année 260 nuits à l’hôtel. « Dans ces conditions, il est difficile, trouvé sa place, en 2007, à la de réglementation et de structure voire irresponsable, d’avoir une vie tête de la filiale africaine de depharmacovigilanceadéquate. milliards d’euros de famille », sourit ce quinquagéMerck, leader mondial dans Mais Karim Bendhaou en est le traitement de l’infertilité, naire divorcé et sans enfants. Le convaincu : « L’Afrique sera le C’est le chiffre d’affaires des pathologies thyroïdiennes prochaincontinentoùlesecteur président de Merck North West de Merck Serono en 2011, Africa (Merck NWA, groupe Merck) et des maladies neurodégénépharmaceutique connaîtra une dont 100 millions est un passionné, exalté par l’amratives. Il avait auparavant été croissance, avec un pic entre 2015 en Afrique pleur du chantier qui l’attend. Sa embauché par le suisse Serono en et 2017. » À tel point que le groupe 2000 en tant que directeur général tablesurunbonddelapartafricaine spécialité : les médicaments issus pour l’Afrique. De 90 000 euros en de son chiffre d’affaires, de 1,7 % des biotechnologies, c’est-à-dire produits à partir d’une substance 2001, le chiffre d’affaires africain de actuellement à 5 % en 2020. ● FANNY REY, envoyée spéciale à Alger vivante, à l’image des vaccins ou la société de biotechnologie a bondi SANTÉ

Karim Bendhaou, docteur « biotech »

L

5,9

DR

ON EN PARLE

SIZA MZIMELA SOUTH AFRICAN AIRWAYS La directrice générale de South African Airways a présenté sa démission le 8 octobre, une dizaine de jours après Cheryl Carolus, ex-présidente du conseil d’administration. JEUNE AFRIQUE

MARC HIRSCHFELD CFAO Ancien responsable de la zone Afrique chez Citroën et directeur général de CFAO à La Réunion, ce Français succède à Pierre Labbé à la tête de CFAO Automotive en Algérie.

AMINE BENOUARET AFRICA GLOBAL SERVICES Cet Algérien a été chargé du développement commercial pour le Maghreb et l’Afrique francophone au sein d’Africa Global Services, distributeur de solutions de sécurité informatique sur le continent. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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ALEXANDRE DUPEYRON POUR J.A.

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BOURSE

Casa a le blues

! En août, la LIQUIDITÉ QUOTIDIENNE MOYENNE du marché a atteint 6 millions d’euros. Un montant dérisoire par rapport aux 26,5 millions de 2008…

Les résultats des sociétés cotées sont en berne, et le volume des valeurs échangées diminue… Si bien que le marché marocain pourrait perdre son statut de Place émergente.

B

onne nouvelle pour les Places émergentes. L’indice MSCI Emerging Markets, qui mesure leur performance, a progressé de près de 7 % depuis le début de septembre. Les Bourses indienne, thaïlandaise et russe profitent notamment du regain d’intérêt des investisseurs internationaux pour les marchés les plus risqués. Celle de Casablanca, elle, fait du surplace. Pis, le marché marocain a déjà cédé environ 14 % depuis le début de l’année. Au premier semestre 2012, les résultats financiersontétéplutôtmauvais.Au total,huitsociétésontrevuleursprévisionssemestrielleset/ouannuelles nettement à la baisse. LegroupediversifiéDeltaHolding a ainsi annoncé une chute de son chiffre d’affaires semestriel de 20 %. Risma, branche du groupe hôtelier Accor, a enregistré une perte nette sur les six premiers mois de l’année et annonce un exercice 2012 déficitaire, alors que ses prévisions permettaientdetablersurdesbénéfices. « Le contexte économique actuel est défavorable pour bon nombre de sociétés marocaines », souligne Fayçal Allouch, analyste financier chez CFG Group. « Certaines ont N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

beaucoup de mal à améliorer, voire à maintenir leurs performances opérationnelles, poursuit-il. Cela incombe parfois à des facteurs exogènes tels que la flambée du cours des matières premières, ou à l’évolution défavorable des taux de change. La récession économique de certains pays voisins est sans nul doute un facteur aggravant. »

catégorie des pays dits « frontières », alorsqueleroyaumeestaujourd’hui l’un des rares en Afrique à figurer dans celle des pays émergents, est tombée comme un couperet. La décision, si elle est confirmée, n’entrera en vigueur qu’en 2013, mais déjà la profession s’inquiète. « La perspective d’un déclassement du Maroc est un signal négatif », déplore Attijari Intermédiation. À COUPERET. Les investisseurs, de court terme, les nombreux gérants leur côté, délaissent de plus en plus de fonds émergents, qui calent une Bourse qui figurait pourtant, leursinvestissementssurlacoml’an dernier encore, parmi les position de l’indice, se désenplus dynamiques d’Afrique. gageront en effet du Maroc. C’est la baisse générale « Le volume quotidien a été Toutefois, d’autres invesaccusée par le cours des divisé par trois sur la période tisseurs jugent que ce déclas77 valeurs cotées 2008-2012, passant de 300 milsement pourrait au final se à Casablanca depuis lions à moins de 100 millions révéler positif. C’est le cas de le début de l’année de dirhams [de 26,5 millions à Sébastien Hénin, gérant de por8,9 millions d’euros, NDLR]. Ce tefeuilles sur la région Afrique du niveau d’activitédemeuretrès faible Nord et Moyen-Orient chez The National Investor, une banque comparéàceluideplusieurspaysde la région », souligne le département d’affaires basée à Abou Dhabi : de recherche du courtier Attijari « Selon mes projections, si le Maroc Intermédiation. En août, le volume est déclassé, il pourrait représenter quotidien moyen des échanges a entre 6 % et 8 % de l’indice MSCI atteint 6 millions d’euros, contre Frontier Markets [contre 0,1 % de 5 millions à Tunis, qui n’a jamais l’indice Emerging Markets], prévoit-il. Un gérant qui suit ces pays brillé par la liquidité de son marché. L’annonce par MSCI du possible pourra donc difficilement ignorer le déclassement du Maroc dans la Maroc dans son allocation d’actifs.

-14 %

JEUNE AFRIQUE


Baromètre En outre, cette catégorie a le vent en poupe depuis 2010 et attire de plus en plus d’actifs sous gestion. Cela pourrait être relativement positif pour le pays. » RAISONNABLE. Du côté de la valo-

risation du marché, les perspectives semblent également meilleures. Longtempsconsidérécommebeaucoup trop cher, le marché marocain esteneffetrevenuàdesniveauxplus raisonnables… et donc plus attractifs. « Les niveaux élevés de valorisation des trois dernières années n’étaientpasjustifiés»,constateKais Kriaa, directeur de la recherche du bureaud’étudetunisienAlphaMena. « En revanche, aux cours actuels, le marché marocain commence à redevenir attractif, en particulier pour les grosses capitalisations comme Maroc Télécom, ajoutet-il. En effet, le marché s’échange à treize fois les bénéfices attendus en 2012, contre seize fois en 2009, ce qui peut constituer un bon point d’entrée pour les investisseurs. »

À long terme, le projet de Casablanca Finance City saura-t-il relancer la Place ? Cela suffira-t-il pour sortir le marché marocain du rouge ? « Si nous entrons dans une période de régression des bénéfices, il n’est pas impossible que le marché décroche et se traite à des niveaux encore plus bas », note Sébastien Hénin. « Nous sommesclairementdansunmarché baissier, confirme Fayçal Allouch. Nous n’attendons pas de reprise cette année, car aucun catalyseur n’est à l’œuvre. Il serait optimiste de prédire un rebond au premier semestre 2013. » Du coup, la finance marocaine veut regarder à plus long terme et mise désormais de plus en plus sur le projet de Casablanca Finance City (CFC), dont le but est de faire de la Place un hub régional dans les métiers de la finance et de la Bourse. Dans cette perspective, l’accord de coopération signé le 5 octobre entre CFC et la City de Londres est encourageant. ●

Marchés financiers

Télécoms : regain d’espoir VALEUR

BOURSE

COURS au 10 octobre (en euros)

ÉVOLUTION depuis le début de l'année (en %)

Orascom Telecom Holding

L E C AIRE

0,5

+ 105,2

Mobinil Safaricom Vodacom MTN Telecom Egypt Onatel Sonatel Maroc Télécom Telkom

L E C AIRE N AIROBI

19,6 0,04 879,1 1 361,4 1,8 68,6 176,7 9 157,4

+ 96,4 + 37,3 + 12,6 +8 + 6,9 + 2,3 – 3,4 – 26,3 – 38,2

JOHANNESBURG JOHANNESBURG L E C AIRE BRVM BRVM C ASABLANCA JOHANNESBURG

MALMENÉES DANS LES MÉDIAS et par les analystes, les valeurs télécoms africaines semblent de nouveau inspirer confiance aux investisseurs boursiers. Depuis notre précédent baromètre sur le sujet, elles ont presque toutes vu leur cours progresser. Parmi les rares exceptions, deux opérateurs francophones pourtant très rentables : le Sénégalais Sonatel

et MarocTélécom. Le premier souffre notamment de son prix élevé en valeur absolue, même s’il reste sous-évalué par rapport à sa rentabilité. Le second est victime de ses difficultés sur son marché domestique et, surtout, de l’incertitude quant à son avenir alors que Vivendi, son actionnaire majoritaire, étudie la possibilité de s’en défaire. ●

Valeur en vue ECONET La promesse EcoCash POUR LE ZIMBABWÉEN Econet, le lancement de son produit de paiement mobile, EcoCash, est prometteur. Nous le considérons comme un soutien majeur à la croissance des revenus et bénéfices de l’opérateur. Econet tire en effet parti de sa position dominante sur le marché de la téléphonie mobile pour renforcer son leadership sur le segment des paiements mobiles. Un an seulement après son lancement, EcoCash compte près de deux millions d’abonnés. Nous pensons que l’acquisition récente par Econet de 45 % du capital Binta Cisse Drave deTN Bank va faciliter l’accès des utilisateurs d’EcoCash Analyste chez Exotix aux services bancaires via le téléphone mobile. Sur le segment voix, Econet fait état d’une augmentation de 32 % du nombre de clients (7,1 millions) de février à août 2012. Le segment internet profite du fort taux d’alphabétisation au Zimbabwe et représente désormais 13 % du revenu total. Econet a enfin un autre avantage par rapport à ses rivaux Telecel et Tel-One: l’accès à des sources de financement bon marché. En mai 2012, il a levé 307 millions de dollars (247 millions d’euros) auprès d’un consortium de dix institutions financières locales et internationales. » ● BOURSE

CA 2011-2012

COURS (10.10.2012)

OBJECTIF

Zimbabwe

455 millions d’euros

4,75 dollars

6,56 dollars

RYADH BENLAHRECH JEUNE AFRIQUE

N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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Dossier Ciel africain Économie

INTERVIEW

Pierre Descazeaux, DG Afrique et Moyen-Orient d’Air France-KLM

AÉRONAUTIQUE

Les flottes afric

Selon les analystes, le nombre d’avions de ligne bondira de 600 à plus de 1 400 dans les vingt années à venir sur le continent. Un nouvel eldorado pour les géants Boeing et Airbus et leurs concurrents ATR, Embraer et Bombardier. CHRISTOPHE LE BEC

L

e 10 septembre, le premier Boeing 787 Dreamliner d’Ethiopian Airlines atterrissait sur le tarmac de l’aéroport de Bruxelles, à l’occasion d’une tournée internationale de présentation. Pour Tewolde Gebremariam, directeur général de la compagnie, l’acquisition du dernier-né de Boeing – le premier opéré par un groupe africain – marque le passage à une nouvelle ère. « Nous disposons aujourd’hui d’une flotte de 52 avions. En 2027, notre plan stratégique prévoit d’en compter 120 », affirme-t-il. Ethiopian Airlines, qui a depuis réceptionné un autre Dreamliner et en attend huit autres (de 220 passagers), a aussi signé pour douze Airbus A350XW (330 passagers) – ces deux modèles sont les long-courriers conçus pour consommer moins de carburant. Ainsi, les Dreamliner coûteront à eux seuls « plus de N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

1 milliard de dollars [770 millions d’euros, NDLR] » à la compagnie, mais « leurs coûts d’exploitation seront inférieurs de 20 % à ceux des appareils précédents », annonce Gebremariam. Sur le continent, Ethiopian Airlines n’est pas le seul transporteur à faire des emplettes. « Les grandes compagnies africaines renouvellent et agrandissent leur flotte, note Cheick Tidiane Camara, du cabinet Ectar, spécialisé dans l’aéronautique en Afrique. Actuellement, Kenya Airways, Royal Air Maroc et même Air Algérie consultent activement les avionneurs. » Les plus petites compagnies ne sont pas en reste : le 4 octobre, l’État camerounais annonçait son intention d’acheter, pour 332 millions d’euros, deux Boeing 787 Dreamliner destinés à Camair-Co (livraison prévue en 2015). STRATÉGIQUE. Pour tous les avionneurs, le conti-

nent est désormais une cible stratégique. « L’Afrique est le deuxième marché le plus attractif, juste derrière l’Asie, avec une croissance de plus de 7,3 % du trafic passager au sud du Sahara prévue en 2012, explique Cheick Tidiane Camara. Signe qui ne trompe pas, les constructeurs multiplient les études, de plus en plus précises – donc coûteuses –, pour mieux cerner le marché continental. » Le JEUNE AFRIQUE


La RAM reprend de l’altitude

OPEN SKY

Tunisair ou le tourisme, il faut choisir

RD CONGO

Timide éclaircie sur Kinshasa

AFRIQUE DU SUD

Johannesburg, pied-à-terre d’Embraer

! Les pompiers de l’aéroport accueillent BOEING 787 DREAMLINER D’ETHIOPIAN AIRLINES à Bruxelles, le 10 septembre.

LE PREMIER

aines décollent 13 septembre, Airbus estimait à 957 le nombre d’appareils de plus de 100 places qui seront achetés en vingt ans en Afrique (pour renouveler ou grossir la flotte), soit plus que les quelque 600 avions de ligne actuellement en service. D’après l’entreprise, le taux de croissance annuel du trafic passager y sera en moyenne de 5,7 % jusqu’en 2031, soit un point de plus qu’au niveau mondial. Boeing annonce les mêmes perspectives : le 24 juillet, à Johannesburg, le directeur de l’analyse, Mike Warner, a relevé de 12 % ses prévisions de 2011. Les deux géants évaluent désormais le « gâteau » africain à plus de 90 milliards d’euros sur vingt ans. Chez Airbus, Hadi Akoum, vice-président chargé des ventes pour l’Afrique subsaharienne et l’océan Indien, est à la manœuvre. En 2012, il compte écouler 25 appareils neufs. Le parc volant africain d’Airbus est de 185 appareils (dont une partie en leasing), soit 53 % des gros-porteurs du continent. « Boeing a bénéficié du rachat de McDonnell Douglas [en 1997], dont les modèles, souvent âgés, volent encore sur le continent. Mais nous mettons tout en œuvre pour rester en tête, précise Akoum. Nous travaillons sur une commande d’A330 pour South African Airways, notre premier client du continent [avec 38 Airbus]. Et JEUNE AFRIQUE

Projections continentales sur vingt ans Valeur du marché aérien : plus de 90 milliards d’euros Les compagnies auront besoin de : 14 500 pilotes 16 200 techniciens de maintenance Le low-cost représentera 30 % du trafic, contre 6 % aujourd’hui

SOURCES : BOEING, AIRBUS

douze nouvelles compagnies aériennes africaines sont devenues nos clientes en un an », se félicite ce Français d’origine libanaise qui ne cesse de sillonner le continent. « Parmi elles, des compagnies déjà établies comme Air Madagascar [qui opère deux A340], Air Namibia [deux A319] ou le nigérian FirstNation [trois A320], mais aussi des transporteurs plus jeunes comme Senegal Airlines [trois A320] ou le tunisien Syphax Airlines [deux A319] », détaille-t-il. En Afrique du Nord, en revanche, Boeing vole en tête, à la faveur du plan de restructuration de Royal Air Maroc (lire pp. 100-101). Le PDG de la compagnie, Driss Benhima, a décidé, pour réduire ses coûts d’exploitation, de se séparer de ses Airbus et de commander cinq Boeing 787 Dreamliner (dont un en option). Airbus espère se rattraper avec ses deux principaux clients dans la région, Egyptair et Tunisair (tous deux ébranlés par le Printemps arabe), mais aussi avec des transporteurs low cost comme Air Arabia (lire p. 103), qui opère des Airbus A320 vers quatorze destinations à partir du Maroc. AuNordcommeauSud,lesavionneurscomptent en effet sur le décollage de compagnies à bas prix. Le lancement de FastJet, présentée comme la N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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ERIC LALMAND/BENELUXPIX/MAXPPP

MAROC


Dossier Ciel africain Le trafic devrait exploser première vraie low-cost subsaharienne par son promoteur Stelios Haji-Ioannou, le fondateur d’easyJet, est perçu comme un signe. « J’attends beaucoup de cette compagnie, fondée par de vrais professionnels avec l’appui de gouvernements africains qui en ont compris l’intérêt », indique Hadi Akoum, satisfait que FastJet commence ses opérations (en novembre) avec un Airbus A319. La compagnie installera sa première base à Dar es-Salaam (Tanzanie), avant de s’implanter à Nairobi (Kenya) puis à Accra (Ghana) et à Luanda (Angola). Elle doit se doter d’une flotte de quinze appareils dans un délai de un an. À terme, Airbus estime que les compagnies low cost représenteront 30 % du trafic aérien du continent (contre 6 % actuellement), et pas seulement en Afrique du Nord et en Afrique du Sud, où Air Arabia, Kulula et Mango tentent de mettre en œuvre ce modèle. AUTONOMES ET FIABLES. Airbus et Boeing ne

sont pas les seuls à courtiser les compagnies du continent, classiques ou low cost. « Le franco-italien ATR, le canadien Bombardier et le brésilien Embraer ont bien compris qu’ils pouvaient faire des affaires en Afrique. Leurs produits correspondent souvent mieux aux besoins des compagnies locales », indique Cheick Tidiane Camara. « Les Africains ont besoin d’avions simples, autonomes, fiables et de taille moyenne pour assurer les liaisons régionales de 500 km à moindre coût », affirme ainsi Filippo Bagnato, président exécutif d’ATR, dont les avions de ligne à turbopropulsion (à hélices) se vendent comme des petits pains sur le continent : sur 889 appareils en opération, une centaine y vole. « Du fait de sa technologie, notre dernier-né, l’ATR 72, consomme 40 % de carburant de moins qu’un avion à réaction. Avec la cherté du pétrole, c’est un argument qui fait mouche, même par rapport à Bombardier, dont

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N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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1991 2001 2011 2021* 2031* Nombre moyen de sièges-kilomètres (Nombre de sièges multiplié par le nombre de kilomètres parcourus) – en milliards

Signe qui ne trompe pas, les constructeurs multiplient les études, de plus en plus précises, pour mieux cerner le marché.

LES LOUEURS EN EMBUSCADE CONSCIENTES DES BELLES PERSPECTIVES du ciel africain, les sociétés de leasing, propriétaires de 30 % des appareils du globe, sont elles aussi aux aguets. Et travaillent en partenariat avec les constructeurs: « Nous préférons qu’une compagnie s’habitue à nos avions en les louant, indique Hadi Akoum, viceprésident d’Airbus pour l’Afrique subsaharienne et l’océan Indien. Ainsi, le jour où sa structure financière est suffisamment solide, elle passe commande. » Le leader mondial, l’américain General Electric Capital Aviation

5

Services (Gecas, qui compte plus de 1800 avions), a ouvert un premier bureau en Afrique du Sud en 2010, puis un au Ghana en 2011. Ses avions volent notamment pour Senegal Airlines et South African Airways. Autres sociétés qui cherchent à percer sur le continent: Air Lease Corporation (ALC, qui possédait 137 avions au 30 juin, et en a près de 300 en commande), fondé par le milliardaire américain Steven Udvar-Hazy, et l’affréteur français Avico, qui a ouvert une agence à Dakar. ● C.L.B.

SOURCE : BOEING – * PRÉVISIONS

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Entre l’Afrique et l’Europe Intra-africain Autres flux avec l’Afrique

les avions à turbopropulsion sont plus rapides mais plus gourmands », explique cet Italien, qui compte parmi ses clients Royal Air Maroc, Air Madagascar et Air Algérie. ATR espère aussi séduire les futures low-cost régionales, ainsi qu’il l’a fait avec succès en Indonésie et en Malaisie. Tout comme Embraer, qui vient d’ouvrir un centre de service après-vente en Afrique du Sud (lire p. 114), et Bombardier, qui construit une usine au Maroc, ATR prépare l’implantation de bases de maintenance sur le continent pour séduire de nouveaux clients. FOLIE DES GRANDEURS ? Reste que cette vague d’achats, encouragée par les opérations commerciales des avionneurs, fait aussi des inquiets. « Attention à la folie des grandeurs ! Le problème numéro un des compagnies africaines, c’est leur fragilité financière, juge Cheick Tidiane Camara. Pour les petites compagnies, il est plus avantageux de prendre un avion en leasing [lire l’encadré] pour pouvoir, en cas de coup dur, réduire la voilure. Une fois qu’un avion est acheté, les charges incompressibles deviennent un lourd fardeau », avertit le consultant, pour qui les acquisitions annoncées par Camair-Co, en difficulté financière, semblent peu raisonnables. « Une compagnie comme Ethiopian a les moyens d’acheter, mais elle devrait se contenter de cinq ou six avions, pas des vingt-deux qu’elle annonce », estime-t-il. Chez les avionneurs, on se défend de pousser à la consommation. « Nous préférons travailler avec les groupes de leasing, pour inciter les compagnies à opérer des Airbus, plutôt que de vendre un appareil en risquant des impayés », rétorque Hadi Akoum, pour qui le manque de personnel compétent en matière financière et la petite taille restent les principaux talons d’Achille des compagnies du continent. ● JEUNE AFRIQUE


L’Afrique by Air France. Avec KLM et nos partenaires, nous vous proposons l’un des plus grands réseaux vers l’Afrique, vous permettant de profiter de plus de 52 villes africaines.

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Dossier Ciel africain INTERVIEW

Pierre Descazeaux

DIRECTEUR GÉNÉRAL AFRIQUE ET MOYEN-ORIENT D’AIR FRANCE-KLM

« Je ne crois pas au low-cost sur le continent » Alors qu’Air France-KLM lance un plan d’économies sans précédent, l’Afrique reste au cœur de la stratégie du groupe européen, impliqué dans les projets d’Air Côte d’Ivoire et d’Air Cemac.

D

ici à 2015, Air France, dont les comptes sont dans le rouge, espère réaliser 2 milliards d’euros d’économies pour retrouver un bon niveau de rentabilité. Une cure d’amaigrissement dont les effectifs français seront les premières victimes. En revanche, la compagnie n’entend pas revoir ses ambitions à la baisse au sud du Sahara. Lancement d’Air Côte d’Ivoire, projet d’Air Cemac, ouverture de lignes… Pierre Descazeaux, directeur général Afrique et MoyenOrient d’Air France-KLM, réaffirme l’engagement de son groupe sur le continent. JEUNE AFRIQUE : Quand est prévu le démarrage d’Air Côte d’Ivoire ? PIERRE DESCAZEAUX: La compa-

gnie est créée, mais il faut recruter une partie du personnel et mettre en place le système d’information. Le premier vol est prévu le 28 octobre. Air Côte d’Ivoire desservira notamment le Mali, le Sénégal, la Guinée, le Burkina Faso, le Bénin, le Togo, le Gabon et le Congo, à partir de la Côte d’Ivoire. Les vols intérieurs ivoiriens arriveront dans un deuxième temps, probablement au début de 2013. Les coûts d’exploitation sont toujours très élevés en Afrique ; avez-vous abordé cette question avec l’État ivoirien à l’occasion de la création de cette compagnie ?

Ce type de projets est toujours l’occasion de mettre en évidence les freins et les contraintes qui pèsent sur le secteur. L’aéroport d’Abidjan vient de lancer un appel d’offres pour trouver un nouveau prestataire pour les services N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

d’assistance au sol, avec l’objectif de baisser les prix et d’améliorer l’efficacité. Toutes les compagnies en profiteront.

sans doute être efficace en Afrique dans quelques années.

Vous participez également au projet de compagnie régionale Air Cemac. Où en est-on ?

Pas forcément. Pour qu’une compagnie régionale réussisse, elle doit se mettre plutôt en situation de coopération que de concurrence. Au lancement d’une compagnie, il y a au moins deux années de déficit car les investissements sont lourds. Je pense qu’une des conditions de survie c’est la coopération ; c’est pour cela qu’Air Côte d’Ivoire va

N’y a-t-il pas trop de compagnies régionales en Afrique de l’Ouest?

Air France a rejoint l’aventure l’an dernier. Nous avons travaillé sur un projet de réseau permettant de relier les pays de la Cemac [Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale, NDLR] entre eux et la Cemac au reste de l’Afrique. Les études montrent qu’il est possible de lancer une compagnie fiable et profitable. Le modèle économique a été validé par les chefs d’État en juillet. Maintenant, il faut continuer à travailler sur les questions de capital et sur la gouvernance.

Avec une croissance du trafic stable et continue, la zone est plus facilement rentable sur la durée.

Que pensez-vous du projet de compagnie low cost africaine FastJet, mené par Stelios HajiIoannou, créateur d’easyJet en Europe ?

Je ne crois pas à court terme à la possibilité de créer une compagnie low cost en Afrique. Ce qui fait le succès des low-cost, c’est le faible niveau de leurs coûts, dû à la forte densification des sièges dans des avions qui volent quatorze à seize heures par jour. Cela repose également sur des circuits de commercialisation peu chers. Aujourd’hui, les conditions ne sont pas réunies sur le continent: il y a peu de lignes entre deux villes africaines ayant un niveau de trafic suffisant, et internet n’est pas assez développé pour vendre en ligne une grande partie des billets. Par contre, il faut s’intéresser à ce modèle, qui pourra

VINCENT FOURNIER/J.A.

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JEUNE AFRIQUE


Dossier démarrer par un partenariat commercial fort avec Air Burkina et Air Mali. Elles partageront par exemple les mêmes agences à Abidjan, à Bamako et à Ouagadougou, et des codes de vol sur un certain nombre de routes.

Le plan prévoit des départs volontaires. Combien de personnes sont concernées ?

Il est trop tôt pour en parler. Les premières candidatures sont attendues pour la fin de l’année.

Avec la diminution du personnel de bord, certains vols vers l’Afrique ne risquent-ils pas d’être supprimés ou leur nombre réduit ?

Dans l’Hexagone, les personnels d’Air France semblent accepter le plan Transform, qui vise 2 milliards d’euros d’économies d’ici à 2015…

Les signatures, cet été, des syndicats majoritaires des pilotes et des personnels au sol sont des étapes importantes. Tout cela s’est fait avec beaucoup de discussions, sans mouvement de contestation significatif. Un certain nombre de modalités pratiques d’application sont discutées en ce moment avec les différentes entités du groupe.

Au contraire, nous prévoyons de les augmenter. Par exemple au Sénégal, en utilisant des avions plus grands. En Côte d’Ivoire, notre

Nous souhaitons offrir plus de places vers la Guinée, la Mauritanie, le Liberia, la Sierra Leone. Bio express • 58 ans, diplômé de HEC (Paris) • 1992 Directeur régional d’Air France pour Singapour, la Malaisie et l’Indonésie • 1997 Directeur distribution et grands comptes d’Air France

activité est revenue à la normale et nous réfléchissons au meilleur moyen de reprendre notre croissance. Guinée, Mauritanie, Liberia, Sierra Leone : sur ces destinations aussi, nous souhaitons offrir plus de places car nos taux de remplissage sont élevés. Quant au Niger, la programmation d’un vol supplémentaire est également acquise. L’Afrique centrale est aussi une zone où nous allons continuer de nous développer. La concurrence sur le continent s’intensifie. Comment Air France et KLM répartissent-ils leurs efforts?

L’Afrique attire effectivement de plus en plus de compagnies aériennes. Lufthansa, via Brussels Airlines, a beaucoup investi ; • 2007 Royal Air Maroc est toujours très Directeur général Europe présente ; Turkish Airlines et les et Afrique du compagnies du Golfe s’intéressent Nord d’Air beaucoup au continent. Mais Air France France-KLM demeure l’opérapuis d’Air teur numéro un. Depuis deux ou France-KLM trois ans, nous avons de plus en • 2010 plus de routes communes aux Directeur deux compagnies partout où le général volume de clientèle est suffisant, Afrique et par exemple au Nigeria, en Égypte Moyen-Orient et en Afrique du Sud. Même si, d’Air traditionnellement, Air France France-KLM reste mieux implanté sur l’Afrique francophone et qu’à l’inverse KLM

dessert en priorité l’Afrique de l’Est, notamment grâce à son partenariat avec Kenya Airways. Quel est le taux de remplissage de vos avions en Afrique ?

Il est en moyenne de 80 % à 85 %. C’est un peu moins que sur les autres zones. Ce qui manque, c’est la clientèle touristique que l’on trouve par exemple sur les Caraïbes ou l’Asie et qui, dans une certaine mesure, est remplacée par une clientèle communautaire. Vos marges sur le continent tendent à baisser.

Effectivement, les marges se réduisent, dans un contexte où les coûts d’exploitation restent élevés. La difficulté est de trouver le bon équilibre entre les investissements nécessaires pour continuer à répondre aux besoins de développement et la préservation de la rentabilité immédiate. De toute façon, dans le secteur aérien, les marges sont toujours limitées à quelques pour-cent du chiffre d’affaires. La particularité de l’Afrique est que la croissance du trafic est stable et continue. Donc le continent est plus facilement rentable sur la durée. Depuisdixans,l’économieafricaine connaît une croissance [annuelle moyenne] de 5 % et celle-ci sera de 5 % ou 6 % dans les cinq années à venir. Cette régularité et cette constance de la croissance sont très importantes. La compagnie offre-t-elle de belles carrières à ses salariés africains ?

Concernant la formation et la promotion de nos salariés africains – qui sont environ un millier – dans nos implantations, je crois que nous y arrivons bien. Mais ensuite, il y a un goulet d’étranglement dans les carrières qui est inévitable. Ce qui est très difficile, c’est de favoriser la mobilité d’un pays à l’autre, à la fois parce qu’il y a peu de candidats et parce que les cadres administratifs sont très hétéroclites (comme pour les cotisations retraite). C’est dommage, parce que, pour favoriser la promotion, il faut de la mobilité. Mais nous y travaillons. ● Propos recueillis par JULIEN CLÉMENÇOT N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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Dossier Ciel africain MAROC

La RAM reprend de l’altitude

Plan social, cession de filiales, optimisation de la flotte… La restructuration de Royal Air Maroc porte déjà ses fruits. La compagnie aérienne envisage même d’ouvrir de nouvelles dessertes.

P

our Royal Air Maroc (RAM), 2010 et 2011, deux années noires, ne sont plus qu’un mauvais souvenir. Ses résultats sont en effet supérieurs aux prévisions du contrat-programme signé avec le gouvernement en septembre 2011. L’exercice 2012, qui court jusqu’au 31 octobre, devrait même s’achever sur un résultat d’exploitation positif d’environ 75 millions d’euros (836 millions de dirhams). Quant au chiffre d’affaires, il devrait progresser de 5 % par rapport à 2011 et dépasser 1,13 milliard d’euros, malgré une baisse du nombre d’heures de vol de 7 %. « C’est notre meilleure performance depuis dix ans, se réjouit Abderrafih Zouiten, directeur général exécutif de la RAM. Pourtant, la conjoncture 2012 n’était pas favorable. La destination touristique qu’est le Maroc souffre toujours, et les prix du pétrole restent élevés. »

MISSION ACCOMPLIE. La compagnie revient de loin. Royal Air Maroc n’avait pas présenté de résultat positif depuis 2009. Pendant l’été 2011, elle perdait même près de 2 millions d’euros par semaine. Lancé il y a un an, le plan de restructuration devait

entraîner des économies de 90 millions d’euros par an. Mission accomplie en huit mois, mais au prix d’une cure d’amaigrissement radicale. Sur 5 900 employés, 1 730 ont quitté l’entreprise dans le cadre d’un programme de départs volontaires. La compagnie a aussi optimisé sa flotte. « Nous avions six types d’appareil, explique Abderrafih Zouiten. Désormais, en moyen-courrier, nous ne comptons plus que des B737-800 et des B737-700, pour réduire nos coûts d’exploitation et de maintenance, et aussi simplifier les process opérationnels. » En parallèle, la RAM a fermé ses routes structurellement déficitaires, une vingtaine au total, en recentrant son activité sur la plateforme de Casablanca. De C’est la progression la même manière, la pluprévue du chiffre part des agences commerd’affaires pour ciales d’Europe de l’Ouest l’exercice 2012 ont baissé le rideau. « Nos charges ont diminué de 7 % (clos au 31 octobre) par rapport à 2011 et même de 17 % en ce qui concerne le personnel », confie le directeur général exécutif. De quoi augmenter la recette moyenne par passager. « La prestation offerte n’en a pas souffert, assure-t-il. Nous avons maintenu la gratuité des repas et

5%

ENCORE UNE ANNÉE BLANCHE POUR L’ENPL POUR LA DEUXIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE, il n’y a pas de rentrée des classes à l’École nationale des pilotes de ligne (ENPL). « Les futurs besoins seront couverts par les 113 élèves qui seront diplômés dans les deux ans à venir », indique Mohamed Kellal, le directeur. La formation dure trois ans et demi, dont une année de théorie, deux de pratique et six mois d’adaptation « en ligne », c’est-à-dire en conditions réelles. Depuis sa création, en 1970, l’établissement a accueilli 400 pilotes environ, la plupart marocains et tous destinés à travailler pour Royal Air Maroc (RAM). L’ENPL dépend de la compagnie, mais le contrat-programme signé avec le gouvernement prévoit le désengagement financier de cette dernière, qui manque de moyens. « Une étude à ce sujet est en cours », indique un responsable. Sous le contrôle du ministère de l’Équipement et desTransports, une entité publique devrait reprendre les commandes de l’école. ● B.T. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

SYLVAIN LEFEVRE/RESERVOIRPHOTO

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la franchise bagages. Nous avons aussi amélioré notre ponctualité de 13 points pour atteindre une moyenne annuelle de 83 %. » PARTENARIAT. Enfin, la RAM

s’est recentrée sur son cœur de métier, le transport aérien. La vente de sa filiale hôtelière Atlas Hospitality Morocco en est le meilleur exemple. « C’était une activité non stratégique qui mobilisait beaucoup de capitaux, confie Abdou Diop, fin connaisseur du secteur au Maroc. Les actions menées vont dans le bon sens. » L’avenir de la formation et des filiales maintenance, handling (approvisionnement) et catering (restauration), est compromis. La RAM a choisi Air France Industries pour la maintenance et la recherche de partenaires « de renommée internationale » pour les autres activités. Ce plan redonne des ailes à la compagnie. Initialement prévue entre 2013 et 2014, une nouvelle recapitalisation ne serait plus d’actualité. Et si ouverture minoritaire du capital il devait y avoir, ce serait exclusivement « pour des raisons stratégiques, industrielles ou de synergie ». « Emirates ou Qatar Airways pourraient se montrer intéressées », estime Abdou Diop. En attendant, le groupe repart à l’attaque depuis le hub de JEUNE AFRIQUE


Dossier ! SUR LE TARMAC DE

L’AÉROPORT DE MARRAKECH, un Boeing 737 de la RAM.

Casablanca. « Alors qu’il y a cinq ans seulement 5 % de nos clients transitaient par la ville, ils sont aujourd’hui 40 % », indique le directeur général exécutif de la

RAM, précisant que la création d’un terminal réservé à la compagnie est à l’étude. Après avoir ouvert dix destinations ces deux dernières années, dont Moscou

et Berlin, la RAM veut se déployer vers la Scandinavie (Copenhague, Stockholm…), l’Afrique centrale (N’Djamena), l’Afrique de l’Est (Nairobi…) ou encore l’Afrique de l’Ouest (Cap-Vert) à court terme. L’Europe (Vienne, Budapest…) devrait suivre, ainsi que l’Amérique du Sud (Brésil) fin 2013 ou début 2014. « Cela dépendra de la conjoncture », indique Abderrafih Zouiten. Au-delà, la compagnie pourrait rejoindre la Chine et les États-Unis via Washington. La mise en place de ces vols longcourriers coïncidera avec la livraison de deux Boeing Dreamliner fin 2014. La compagnie envisage en effet d’investir près de 750 millions d’euros dans l’achat d’avions. Une étude est d’ailleurs en cours pour ajuster la flotte aux perspectives de développement à l’horizon 2025. Horizon qui s’est dégagé bien plus vite qu’espéré. ● BRICE TAHOUK

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Dossier Ciel africain OPEN SKY

Tunisair ou le tourisme, il faut choisir

Les négociations reprennent pour la libéralisation du ciel tunisien. Attendu par les hôteliers et autres opérateurs mais sans cesse reporté, l’accord risque de frapper douloureusement la compagnie nationale.

À

l’étude depuis 2008 et prévue pour 2010, l’ouverture du ciel avait été reportée puis suspendue pour cause de révolution. Mais la Tunisie reprend en octobre les négociations avec l’Union européenne. Cette fois, le ministre du Transport s’est engagé à les faire aboutir – malgré les risques que l’accord Open Sky, qui permettra aux compagnies low cost européennes de desservir la Tunisie, représentent pour Tunisair. « L’ouverture du ciel national à la concurrence va obliger le transporteur public à réduire son effectif », affirme ainsi Ali Tounsi, secrétaire général Afrique du Conseil international des aéroports. La compagnie, qui emploie 3000 personnes, annonce 82,1 millions d’euros (160 millions de dinars) de pertes pour 2011 (lire encadré). Mauvaise situation financière, comportement corporatiste et politique tarifaire excessive diminuent sa marge de manœuvre pour revoir sa position et son offre. Face à de futurs adversaires comme EasyJet ou Ryanair et à l’intensification de la concurrence de Transavia – qui dessert déjà Tunis, Tozeur, Djerba et Monastir –, la bataille du ciel s’annonce donc difficile pour elle. BOUFFÉE D’OXYGÈNE. Mais avec

un tourisme fortement affecté par les turbulences que traverse la Tunisie, l’État ne peut plus protéger Tunisair ; cela reviendrait à sacrifier un secteur pourvoyeur de 7 % du PIB national. Pour les hôteliers, ces accords, très attendus, seraient une bouffée d’oxygène. Ils escomptent avec l’Open Sky environ 20 % de touristes individuels de N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

plus, une catégorie qui procure des recettes par nuitée 30 % supérieures à celles réalisées avec les groupes. Cette manne permettrait de consolider les 400000 emplois directs et indirects d’un secteur qui cherche à se diversifier et à générer de la plus-value en tablant sur plus de qualité, mais qui reste dépendant de la quantité drainée par les tour-opérateurs.

Des tour-opérateurs dont les acteurs touristiques espèrent s’émanciper. Cependant, Jalel Bouricha, patron du groupe hôtelier Yadis et du réseau d’agences Traveltodo, alerte: « Leur hégémonie va certainement diminuer, mais d’autres acteurs vont imposer leurs diktats, en l’occurrence les agences de voyages en ligne. Les professionnels de l’hôtellerie devraient offrir à la fois l’hébergement et le billet d’avion grâce à des accords avec les compagnies low cost. » Les professionnels tunisiens sont également partagés sur le bilan de l’ouverture du ciel marocain (en 2004). Bien qu’elle ait contribué à porter de 5,2 à 9,3 millionslenombredevisiteurs dansleroyaumeentre2003 et 2011, certains estiment l’expérience peu concluante au vu du repli récent de quelques compagnies low cost. « Le Maroc doit aussi son succès aux moyens importants qu’il consacre à sa promotion », relativise un agent de voyages. D’autres soulignent que l’augmentation du nombre de visiteurs s’est accompagnée d’une réduction de la durée des séjours de 7 à 3 nuitées, sans augmentation significative de revenus. Si l’Open Sky va bénéficier aux passagers et obligerTunisairàfairesarévolution, restedoncàprouverqu’ilestvecteur de relance pour un tourisme qui se cherche. ● FRIDA DAHMANI, à Tunis

DÉFICIT STRUCTUREL AVEC 2,6 MILLIONS DE PASSAGERS sur les huit premiers mois de l’année,Tunisair progresse de 26 % par rapport à la même période en 2011 et prévoit de terminer l’année avec 3,8 millions de clients. Mais ses comptes restent dans le rouge. Les 61,7 millions d’euros de recettes enregistrés sur les sept

premiers mois de 2012 sont en grande partie absorbés par 54,7 millions d’euros de charges d’exploitation (dont 24,6 millions pour le carburant). Pas de quoi combler le déficit de 82,1 millions d’euros annoncé pour 2011 par Rabah Jrad, le PDG. Ce déséquilibre est dû à l’intégration, depuis la révolution, des filiales de

Tunisair (sans elle, le déficit ne serait que de 69,3 millions d’euros), d’où une augmentation des charges et de la masse salariale (133 millions d’euros). L’entreprise devra faire appel à l’État pour renflouer ses caisses, d’autant qu’elle subit un redressement fiscal évalué à 5,5 millions d’euros. ● F.D. JEUNE AFRIQUE


Dossier LOW-COST

Air Arabia sur le terrain des européennes Lancée en 2003, la première compagnie moyen-orientale à bas prix a aligné les records l’an dernier.

«

N

otre stratégie est simple : offrir le meilleur siège au meilleur prix disponible », explique Housam Raydan, le directeur de la communication et des relations clients d’Air Arabia. Après avoir fait ses preuves en Europe et en Amérique du Nord, «laformulen’avaitaucuneraisonde ne pas marcher au Moyen-Orient, où les billets d’avion étaient généralement très chers ». Air Arabia a donc transposé ce concept en ouvrant des filiales au Maroc en 2009 et en Égypte l’année suivante, pour étendre ses services entre l’Afrique du Nord et l’Europe. « Le

modèle économique d’une lowcost n’autorise pas un temps de vol supérieur à cinq heures d’un point à l’autre », précise Raydan. Lancée en 2003 aux Émirats arabes unis (EAU), la première compagnie low cost du MoyenOrient a accueilli son millionièmepassagermoinsdedeux ans plus tard. Elle a depuis poursuivisursalancée,dépassant la barre des 20 millions de passagers en juin 2011. Elle a même aligné les records l’an dernier, avec 4,7 millions de billets vendus (+ 5,6 %) pour un chiffre d’affaires de près de 512 millions d’euros, en hausse de plus de 16 %.

Sa flotte compte

31 Airbus A320 (une cinquantaine à l’horizon 2016)

Fo r t d e s e s t ro i s h u b s – Casablanca, Alexandrie et Sharjah (EAU) –, le transporteur a considérablement étendu sa zone d’activité et dessert 78 destinations situées dans une trentaine de pays, du Maroc au Bangladesh, en passant par la Russie et le Kenya. Des lignes vers Londres au départ de Casablanca et Tanger doivent ouvrir à lafin du mois, en même temps que des liaisons depuis Marrakech vers Montpellier et Milan. Air Arabia prévoit aussi de multiplier ses services vers la Russie et l’Ukraine, des marchés « très prometteurs ». L’Afrique, également dans le radar, devrait connaître d’importants développements « quand le moment sera venu », note Housam Raydan. ● OLIVIER CASLIN

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Dossier Ciel africain ð À L’AÉROPORT NICE CÔTE D’AZUR. La France représente près de 64 % de l’activité de la compagnie hors de ses frontières.

J-M EMPORTES/ONLYFRANCE.FR

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RESTRUCTURATION

L’Algérie a (encore) un plan

Moderniser le transporteur public pour regagner les parts de marché perdues à l’international : c’est l’ambition du programme quinquennal de près de 580 millions d’euros dévoilé en juin.

A

ir Algérie n’en finit pas de mettre en œuvre des plans de développement. Le dernier en date, quinquennal (2012-2016), d’un montant de près de 580 millionsd’euros(60milliardsdedinars), a été annoncé en juin. Il prévoit de consacrer 433 millions d’euros à l’acquisition de huit appareils: trois pour remplacer des avions en activité et cinq pour renforcer une flotte de 43 appareils, dont une partie a été renouvelée depuis 2009. Avec un chiffre d’affaires en quasi-stagnation l’an dernier, à 567 millions d’euros, « Air Algérie est tout juste à l’équilibre financièrement grâce au soutien de l’État », concédait en septembre son PDG, Mohamed Salah Boultif. Parmi les dix priorités du plan figure l’amélioration de la qualité de service et de la ponctualité, deux tares qu’aucun patron de la compagnie n’a réussi à corriger. Également en ligne de mire : le sureffectif. « En 2002, le bureau d’audit américain Booz Allen Hamilton avait recommandé à Air Algérie de fonctionner avec 5 500 employés », souligne l’économiste algérien Abderrahmane Mebtoul. Or ils sont toujours plus de 9 000, malgré les plans sociaux N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

mis en œuvre ces sept dernières années. Mohamed Salah Boultif affirme qu’aucun nouveau plan n’est en projet, mais précise qu’« il y aura une réduction des effectifs assez importante » à l’horizon 2016, doublée d’un gel des recrutements. Air Algérie, qui veut maîtriser des coûts d’exploitation en hausse (+ 31 % de charges et – 71 % de résultat d’exploitation en cinq ans), a également lancé en 2011 un plan de recouvrement qui lui a permis de récupérer 78 % de ses créances. À l’image d’une autre entreprise publique, Algérie Télécom, le transporteur voudrait évoluer. Filialiser certaines de ses activités

567

millions d’euros

de chiffre d’affaires en 2011

3,6

millions de passagers

transportés en 2011, dont près des 2/3 à l’international

– maintenance, catering… – ne sera pas le moindre des défis pour sa direction. Pour ce faire, Mohamed Salah Boultif a précisé que les investisseurs étrangers étaient les bienvenus. TRANSIT. Concentrée sur son métier, la compagnie pourrait alors s’attacher à regagner ses parts de marchéperdues,notammentversla France, qui représente près de 64 % de son activité internationale. Son PDG vise une croissance du trafic de 8 % sur l’international et de 6 % sur le réseau domestique, où un nouveau venu, Tassili Airlines, filiale du groupe pétrolier Sonatrach, pourrait lui faire du tort sur la niche des employés étrangers du secteur des hydrocarbures. Pour atteindre ces objectifs, Air Algérie veut se lancer dans le trafic de transit en adhérant à l’une des trois alliances aériennes de référence (SkyTeam, OneWorld et Star Alliance) – il faudrait pour cela faire de l’aéroport d’Alger un véritable hub. La compagnie souhaite également lancer de nouvelles dessertes à destination du continent, notamment vers le Nigeria ou l’Afrique du Sud. L’an prochain, Air Algérie va en outre accroître la fréquence de ses vols vers Montréal et revoir sa copie vers Pékin, une ligne qui « donne de moins bons résultats ». ● SAÏD AÏT-HATRIT

L’OPEN SKY ATTENDRA LA LIBÉRALISATION du ciel algérien « n’est pas à l’ordre du jour. Nous défendons le pavillon national », déclarait début septembre – à la veille de sa nomination comme Premier ministre – Abdelmalek Sellal, alors ministre des Transports par intérim. « Nous ne sommes pas prêts pour l’Open Sky, affirmait déjà un an plus

tôt le PDG d’Air Algérie, Mohamed Salah Boultif. Cela implique une concurrence très rude que nous ne pouvons pas assumer. » Déjà en perte de vitesse sur sa principale destination, la France (notamment au profit d’Aigle Azur), le transporteur public, dont la qualité de service et la ponctualité restent critiquées, ne peut pas

encore supporter l’ouverture de son ciel. De plus, l’Open Sky est un outil d’accroissement des flux touristiques. Or l’Algérie n’a pas dans ce secteur les ambitions du Maroc, qui a libéralisé son ciel en 2004 avant de signer un tel accord en 2006, ou de laTunisie, qui s’apprête à faire un pas en ce sens (lire p. 102). ● S.A.-H. JEUNE AFRIQUE



Dossier Ciel africain ! Trois Airbus A330 doivent venir renforcer LA FLOTTE, FORTE DE ONZE APPAREILS, à partir de mi-2013.

LIBYE

Trou d’air pour Afriqiyah Airways

LAURENT CERINO/REA

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novembre. « C’est une situation très handicapante pour les compagnies car, s’il est vital pour elles de se mettre aux normes, les autorités civiles sont souvent plus lentes », souligne un consultant de Quali-Audit. Pour desservir Londres et Rome, Afriqiyah doit affréter des avions appartenant à d’autres transporteurs, comme le tunisien Nouvelair. INDÉCISION. Autre chantier, le

projet de fusion avec son homologue Libyan Airlines, propriété du même holding, Libyan African Si elle a repris ses vols, la compagnie nationale n’est pas encore remise Aviation Holding Company. Plusieurs fois annoncé, le rapdu conflit. Interdite en Union européenne, elle doit se restructurer pour prochement « est en cours », à affronter la concurrence. en croire Mohamed Elmeshkhy. Comme l’explique Fathi Tommy, Londres depuis juillet, mais ne relie patron de l’entreprise de services vant la révolution plus que la moitié de ses destinaaériens Ajwa Aviation Services, « le libyenne, Afriqiyah Airways pratiquait des tions d’avant la révolution. Ainsi, projet est urgent, mais ralenti par tarifs inférieurs de un aucune des lignes subsahariennes, l’indécision politique. Les deux tiers à ceux de ses concurrents qui n’étaient pas rentables avant la sociétés naviguent sur les sur une trentaine de destinations crise libyenne, n’a pour l’instant été mêmes parcours et se livrent Le – dont près d’une vingtaine en une concurrence contre-proréactivée. Mohamed Elmeshkhy, transporteur dessert Afrique –, permettant à des mildirecteur des relations internaductive, en plus d’être toutes lions de voyageurs de se déplacer tionales d’Afriqiyah, affirme deux étouffées par leurs coûts destinations internationales, à bon compte. Répondant plus à que la compagnie veut restaude fonctionnement, notamdont une logique de prestige que de rer l’intégralité de son réseau, ment salariaux ». sur le continent rentabilité, la compagnie fondée sansexpliquercomment.Pour Pour compliquer les persen 2001 par Mouammar Kaddafi l’instant, elle reconstitue sa pectives, l’aéroport interne réalisait aucun bénéfice. Depuis, flotte: alors qu’elle possède onze national de Tripoli ne peut accueillir plus de 3 millions le conflit lui a porté un coup dont appareils, elle a signé un contrat elle ne s’est pas encore remise. avec Airbus en avril pour trois A330, de passagers par an. Envisagée Entre février et octobre 2011, elle dont elle doit prendre livraison à depuis longtemps, son extension ne semble pas être à l’ordre du a notamment perdu un Airbus partir de mi-2013. A320 vieux d’à peine un an et plujour. Enfin, il faudra compter avec la concurrence des comsieurs autres de ses appareils ont Plusieurs fois annoncé, été endommagés. À la suite d’un pagnies étrangères : Emirates le rapprochement avec Libyan desservira Tripoli dès la fin de audit mené par Quali-Audit (filiale à 100 % d’Air France Consulting), ce mois d’octobre, rejoignant ainsi Airlines serait en cours. Afriqiyah s’est désormais remis British Airways et Alitalia. Mais aux normes de la profession, fixées la plus avancée en la matière est Reste un obstacle de taille à par l’Association internationale du lever. La Commission européenne Turkish Airlines, qui dessert déjà transport aérien (Iata). a relevé « de graves problèmes en quatre aéroports libyens. Alors Après une période d’inactivité de ce qui concerne la surveillance qu’un nouveau gouvernement, plusieurs mois causée par le gel de en matière de sécurité des transrésultant des élections de juilses actifs et la suspension des vols porteurs aériens titulaires d’une let dernier, devrait être formé, imposée par l’Otan en mars 2011, licence en Libye ». Ceux-ci font reste à espérer que la prochaine le transporteur a repris ses liaisons donc l’objet d’une interdiction de administration saura engager les internationales en décembre dervol à destination de l’Union euroréformes nécessaires. ● nier. Il dessert Rome depuis avril et péenne (UE) au moins jusqu’en NICOLAS TEISSERENC

A

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JEUNE AFRIQUE


Dossier HYDROCARBURES

Transporteurs, unissez-vous!

Face à la flambée des prix, plusieurs compagnies ont décidé de grouper leurs achats de carburant. Un deuxième appel d’offres est en cours.

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es difficultés d’Air Mauritius auraient-elles convaincu les transporteurs africains de franchir le pas ? Pénalisée par une hausse exorbitante des coûts du carburant, la compagnie asubidespertesde29millionsd’euros sur son exercice 2011, malgré un record de 1,3 million de voyageurs. Dès 2011, sous l’égide de l’Association des compagnies aériennes africaines (Afraa), huit transporteurs ont décidé de mutualiser leurs achats de carburant. Parmi eux, des poids lourds tels qu’Ethiopian Airlines et Kenya Airways, mais aussi des acteurs plus modestes (Air Malawi, Air Namibia, le

mozambicain LAM, le tanzanien Precision Air, Rwandair et Taag Angola Airlines). Objectif : maîtriser les coûts du carburant, qui représentent entre 25 % et 50 % des charges d’exploitation. NÉGOCIER. Après une commande

réussie de 670 millions de litres en 2012, un nouvel appel d’offres est en cours pour l’achat de 1,1 milliard de litres en 2013. Le nombre de compagnies adhérentes étant passé à quatorze avec l’arrivée d’Air Madagascar, Air Burundi, Asky Airlines, Astral Aviation, Starbow et Jetlink. « Il s’agit de jouer sur des quantités importantes pour

négocier des prix bas auprès des pétroliers [Total, Shell, Libya Oil, etc., NDLR] », explique Cheick Tidiane Camara, le président du cabinet Ectar. Une synergie applicable selon lui aux achats d’équipements ou de pièces de rechange.

« Il faut libéraliser le marché pour favoriser la concurrence. » ELIJAH CHINGOSHO, secrétaire général de l’Afraa

L’Afraa se bat par ailleurs pour la fin du monopole de certains fournisseurs. « Nous exhortons les gouvernements à libéraliser ce marché pour favoriser la concurrence et améliorer le service », a martelé son secrétaire général, Elijah Chingosho. ● STÉPHANE BALLONG

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Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar

Un renouveau pour relever les défis du futur 233, 624 milliards FCFA, ce PSE sera financé à hauteur de 163, 624 milliards FCFA (soit 70 %) sur les ressources propres de l’Agence. Il vise un seul objectif : moderniser l’outil de production, afin de donner à l’Agence les meilleurs atouts pour assurer sa mission principale, à savoir la fourniture correcte des services de navigation aérienne dans les espaces aériens et sur les aéroports à sa charge.

La visualisation du trafic sur tous les espaces à court terme

L’ASECNA est un établissement public à caractère multinational, qui a pour mission essentielle de fournir des services de navigation aérienne sur un espace de 16,5 millions de km2 comprenant 5 régions d’Information de Vol (F.I.R) définies par l’OACI (Organisation de l’Aviation Civile Internationale).

Un des projets majeurs de ce PSE est relatif à l’acquisition de radars et de systèmes de gestion du trafic aérien de dernière génération au profit de centres opérationnels localisés dans 11 États membres de l’ASECNA, les autres centres non concernés ayant été précédemment équipés des mêmes systèmes. D’un coût de 25 milliards FCFA, ce projet permettra de réaliser à court terme l’ambition de l’Agence d’utiliser les moyens de surveillance nécessaires à la visualisation du trafic aérien dans tous les espaces à sa charge.

En outre, elle développe des capacités liées au management des aéroports, aux études et réalisation d’infrastructures aéronautiques, à la maintenance des équipements aéronautiques, à la calibration des instruments d’aide à la navigation aérienne et à la formation aux métiers de l’aviation civile nécessaires à l’exécution de sa mission.

Mise à contribution du capital humain Une vision stratégique pour préparer le futur Cette vision est matérialisée par l’approbation et la mise en œuvre d’un Plan d’Orientations Stratégiques (POS) 2012 – 2014 tenant compte de l’avis des compagnies aériennes regroupées au sein de l’Association Internationale des Transporteurs Aériens (IATA), et des pertinentes normes et recommandations de l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI).

La mise en œuvre d’un plan pluriannuel, une longue tradition à l’ASECNA L’élaboration et la mise en œuvre d’un plan pluriannuel basée sur une vision prospective a toujours été une réalité à l’ASECNA. Le Plan de Services et d’Équipements (PSE) 2009 2013, actuellement en cours d’exécution, ne déroge pas à cette règle. D’un montant de

Plaçant les hommes au cœur de ce renouveau, l’ASECNA s’engage à favoriser l’émergence au sein de son personnel d’un nouvel état d’esprit, devant aboutir à l’instauration d’une culture d’entreprise très forte, l’esprit d’équipe et le partage de valeurs morales, fondées sur l’éthique et la solidarité. Forte d’une tradition éprouvée de dialogue social, l’ASECNA est en train de mettre en œuvre un Contrat d’entreprise signé avec son personnel pour la période 2012-2017.

Ses États membres, au nombre de 18, sont : le Bénin, le Burkina, le Cameroun, la Centrafrique, les Comores, le Congo, la Côte d’Ivoire, la France, le Gabon, la Guinée Bissau, la Guinée Équatoriale, Madagascar, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal, le Tchad et le Togo.

Cap sur le ciel unique africain À travers ses performances, l’objectif final de l’ASECNA (dont l’espace est un ciel unique) est de fédérer davantage les États aux fins de coopérer avec tous dans le cadre d’une « gestion coopérative des espaces aériens ». Cette gestion coopérative permet d’envisager la mise en œuvre du concept de ciel unique africain par l’uniformisation des réglementations, procédures de formation et d’exploitation des services.

SIÈGE SOCIAL 32-38, avenue Jean Jaurès Dakar BP 3144 Dakar, Sénégal Tél.: (221) 33 849 66 00 Télex : 51 680 SG Fax: (221) 33 23 46 54

www.asecna.aero

Les routes du ciel, notre métier

DIFCOM/DF - PHOTOS : DR

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ace aux mutations que connaît le secteur aéronautique ces dernières années, liées au développement du trafic aérien, à la montée des exigences de plus en plus accrues des usagers des services de navigation aérienne et combinées aux contraintes à la fois de rentabilité et de sécurité, l’ASECNA se donne les moyens pour relever tous les nombreux défis auxquels fait face l’aviation civile africaine et qui concernent son domaine spécifique. Pour ce faire, l’ASECNA s’est lancée depuis le 1er janvier 2011 dans un vaste chantier de modernisation à travers un projet dénommé « Programme pour le renouveau de l’ASECNA » visant à renforcer son positionnement et ses performances.


Dossier

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DÉCIDEURS

Aux commandes sur le continent

ERIC PIERMONT/AFP

Ils définissent et pilotent la stratégie africaine de leurs compagnies. Galerie de portraits.

Jean-Luc Grillet Autodidacte de l’aérien Vice-président senior Afrique d’Emirates Airlines

«

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antqueleséchangesafricainsse faisaient principalement avec l’Europe, Dubaï constituait un hub excentré. Maintenant que l’Asie, et notamment la Chine, a pris le relais, Emirates est idéalement positionné », se réjouissait l’an dernier Jean-Luc Grillet. Bénéficiant de cette évolution, la compagnie ne cesse d’ouvrir de nouvelles lignes. En 2012, Harare et Lusaka sont venus s’ajouter à son catalogue de destinations et, en 2013, Alger deviendra la 22e ville africaine desservie par les avions dubaïotes. Sur le dernier exercice de la compagnie (clos au 31 mars), le continent représentait un chiffre d’affaires de 1,3 milliard d’euros, en hausse de près de 10 %. L’homme qui planifie méthodiquement l’expansion du réseau africain d’Emirates depuis un an et demi, évaluant la taille des marchés, jaugeant la maturité des lignes et négociant avec les autorités et les compagnies intérieures est un fringant sexagénaire français, autodidacte, que JEUNE AFRIQUE

rien ne prédestinait à jeter son dévolu sur les long-courriers intercontinentaux. Grenoblois d’origine, Jean-Luc Grillet a commencé sa carrière comme ouvrier chimiste dans le nord de la France. Jusqu’à ce jour de 1974 où, après avoir répondu à une annonce parue dans la presse, il boucle sa valise et part travailler pour la compagnie UTA en Afrique du Sud – avec quelques passages par la RD Congo, le Nigeria et le Tchad – comme agent d’opération responsable des plans de vol et de chargement des avions. Il ne quittera plus l’industrie aéronautique et restera marqué par le continent, aujourd’hui redevenu son terrain de jeu. Après deux ans chez UTA, il revient en France pour Swissair, où il occupe différents postes pendant quatorze ans avantderejoindreTowerAircommedirecteur commercial et marketing de 1990 à 1992. Cette année-là, un deuxième grand tournant professionnel l’attend. Jean-Luc Grillet envoie sa candidature à Dubaï, au

siège d’Emirates, qui s’est lancé sept ans plus tôt. Deux jours plus tard, son contrat est signé et il devient le premier directeur Cargo pour la France et la péninsule ibérique de la compagnie émiratie. Pendant trois ans, Jean-Luc Grillet recrute pour monter le bureau français. Puis il passe deux années à Dubaï pour une filiale du groupe, Dubai National Air Travel Agency (DNATA), avant de prendre en 1997 la direction générale France et Benelux. Ce grand amateur de sport, ravi de sponsoriser équipes de football ou de rugby siglées « Fly Emirates », se forge une réputation d’homme ferme lorsqu’il doit récuser les accusations de dumping portées par Air France à l’encontre de sa compagnie. Parmi les temps forts de son mandat dans l’Hexagone, la première liaison directe Dubaï-Paris d’un Airbus A380 d’Emirates, qu’il a supervisée, avant d’accéder au poste (basé à Londres) de vice-président senior chargé des affaires commerciales pour l’Afrique en avril 2011… et d’encadrer quelques mois plus tard la première liaison DubaïJohannesburg du même A380. ● SÉBASTIEN DUMOULIN N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012


Dossier Ciel africain

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Herman Carpentier Un diplomate à la manœuvre Vice-président de Brussels Airlines chargé de l’Afrique

Jimmy Eichelgruen Retour aux sources Directeur des ventes de Delta Airlines pour l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Inde

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elta Airlines a beau avoir fermé en août sa liaison Atlanta-AccraMonrovia, elle propose toujours ces deux dernières destinations via une ligne New York-Accra-Monrovia, ainsi que des vols vers trois autres villes africaines (Dakar, Lagos, Johannesburg). De fait, le continent est devenu un marché porteur pour Delta Airlines, depuis six ans qu’elle a rétabli la connexion directe entre l’Afrique et l’Amérique – qui n’existait plus depuis la fermeture des lignes africaines de Pan Am en 1986. Pour cela,

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elle a pu profiter de l’expérience de Jimmy Eichelgruen, Sud-Africain d’origine entré chez Pan Am en 1973 et qui a travaillé six ans comme directeur du marketing et des ventes Afrique de la seule compagnie américaine alors présente sur le continent. Lorsque Pan Am se replie, Eichelgruen prend la direction de l’Europe, où il occupe différents postes à responsabilités en Suisse puis au Royaume-Uni.Pouraccompagner le retour, le 4 décembre 2006, d’une compagnie américaine sur le continent, il était tout désigné. ● S.D.

ERIC PIERMONT/AFP

GILLES ROLLE/REA

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hez Brussels Airlines, être le responsable Afrique n’est pas rien – l’entreprise affiche 62 vols hebdomadaires en direction de ses 21 destinations sur le continent et, surtout, elle est l’héritière de la mythique Sabena, première compagnie occidentale à avoir posé un appareil sur le sol africain. Malgré les difficultés actuelles et les rumeurs de licenciements en Belgique, Herman Carpentier, qui occupe cette fonction depuis 2008, pouvait encore déclarer il y a quelques mois : « L’Afrique est au cœur de notre stratégie. » De fait, il a non seulement supervisé l’ouverture des lignes d’Accra, Cotonou, Lomé et Ouagadougou en 2010, d’Agadir et de Marrakech en 2011, mais encore, tout récemment, c’est lui qui a impulsé le partenariat avec la nouvelle compagnie congolaise Korongo Airlines pour la desserte de Lubumbashi. Un œil sur l’Afrique, un autre sur le monde, il a également calculé tout l’intérêt pour les voyageurs africains de la dernière ligne ouverte en juin par Brussels Airlines : Bruxelles-New York – selon lui, 20 % du trafic passagers sur le réseau africain arriverait d’Amérique du Nord. Il faut dire que Herman Carpentier connaît l’international. Cet homme de 55 ans, originaire d’Anvers, n’a en réalité que peu travaillé en Belgique. Après un début de carrière au sein des missions économiques belges de Chicago puis de Manchester, il rejoint Sabena en 1990. Sa zone de couverture comprend la Tunisie, le Rwanda, le Nigeria, le Zimbabwe et le Niger. Suivront des postes en Suisse et en France, jusqu’à la faillite de Sabena, en 2001. Sur les cendres de la compagnie historique belge naît alors un nouvel acteur, Brussels Airlines. Et pour repartir de zéro, la nouvelle structure peut choisir dans les anciens effectifs ceux qu’elle souhaite voir faire partie de l’aventure. Herman Carpentier en sera. Propulsé directeur général France, puis Europe du SudOuest, il est depuis quatre ans revenu aux affaires africaines. ● S.D.

Claus Becker Pur produit de Lufthansa Directeur général de Lufthansa pour l’Afrique occidentale et l’Afrique centrale

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oilàprèsdeunanqueClaus Becker a pris ses quartiers à Lagos et supervise l’extension de Lufthansa en Afrique. À 50 ans, ce diplômé en sciences économiques de la LudwigMaximilians-UniversitätdeMunich connaît très bien la maison. Il y est entré comme stagiaire en 1982 et y a effectué toute sa carrière. Spécialiste du marketing, il a notamment été chargé de programmes de fidélisation de la clientèle, de la gestion de la plate-forme informatique de distribution ou de la création de l’agence de voyages, en ligne Opodo. De 1993 à 1997, il prend en charge, depuis Madrid, la politique tarifaire et le contrôle de gestion d’Amadeus, société de distribution et de vente de voyages fondée par Lufthansa et trois autres compagnies aériennes, avant de revenir dans le giron du transporteur allemand comme directeur de la stratégie du groupe. De 2008 à 2011, il occupe la fonction de directeur général France et Benelux, avant d’être promu sur l’Afrique occidentale et l’Afrique centrale, où il juge « important d’avoir un réseau extensif ». Le grand concurrent français est prévenu. ● S.D. JEUNE AFRIQUE


apprendre des erreurs du passé, c’est aller de l’avant.

Nos avions vieillissent donc nous les remplaçons, tout est-il aussi simple? Pas toujours. Pourquoi remplacer un ancien gros jet par un nouveau gros jet alors que nos E-Jets, plus petits et plus performants, peuvent voler sur les mêmes routes en offrant aux passagers une expérience comparable voire meilleure. Les E-Jets vous offrent de nouvelles opportunités: celle d’augmenter les fréquences sans surcapacité, de voler vers de nouveaux marchés où d’autres compagnies ne peuvent aller. La seule question est comment être toujours plus efficace? Ne faites pas d’erreur. La bonne réponse est l’E-Jet.

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Dossier Ciel africain RD CONGO

Timide éclaircie sur Kinshasa Depuis mars, deux nouvelles compagnies ont débuté leurs opérations. Si le secteur ne décolle pas encore, il évolue vers davantage de concurrence et de sécurité.

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a liste des compagnies aériennes internationales desservant Kinshasa, la capitale congolaise, ne cesse de s’étoffer. Dernière en date: Turkish Airlines, depuis fin août. Un signe de la volonté d’Istanbul d’intensifier ses échanges commerciauxaveclaRDCongo.Letransporteur turc souhaite aussi capter des partsdemarchésurdesdestinations européennes et, surtout, asiatiques, très fréquentées par les Congolais, les Chinois et les Indiens, de plus en plus nombreux à développer des affairesàKinshasa.Lacapitalepourrait par ailleurs accueillir Emirates Airlines et servir de hub à Ethiopian Airlines et à Brussels Airlines. Mais Kinshasa n’est pas le seul pôle aérien du pays. L’essor minier de la province du Katanga dope de son côté le trafic à partir de Lubumbashi vers Johannesburg. La région écoule en effet une grande partie de sa production via des ports sud-africains. Sur le créneau des voyages d’affaires, la concurrence oppose South African Airways aux trois transporteurs nationaux congolais : la Compagnie africaine d’aviation (CAA), FlyCongo N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

– nouvelle appellation de Hewa Bora depuis mars dernier (avec une nouvelle flotte et de nouveaux actionnaires) – et Korongo Airlines, lancé en avril, basé à Lubumbashi et détenu à 70 % par Brussels Airlines et le Groupe Forrest International et à 30 % par des privés congolais. L’EST EN MARGE. Sur le segment

des vols intérieurs, les compagnies congolaises développent les dessertes kasaïennes : les liaisons au départ de Mbuji-Mayi (KasaïOriental), Kananga et Tshikapa (Kasaï-Occidental)sonttrèsdemandées par les commerçants locaux, qui voyagent beaucoup. Entre Lubumbashi et les villes cuprifères, notamment Kolwezi (vers laquelle Korongo prévoit d’ouvrir une ligne), lestransporteursnationauxfontface à de petits acteurs locaux. En revanche, le trafic entre Kinshasa et l’Est – Kisangani (Provinceorientale)etGoma(NordKivu) – ne décolle pas vraiment. L’insécurité dans le Nord-Kivu et le district de l’Ituri, où pourtant l’exploration minière et pétrolière se développe, y est pour quelque chose. Le trafic aérien dans ces

! KORONGO AIRLINES, DERNIER-NÉ DES TRANSPORTEURS

DU PAYS, est détenu à 30 % par des privés congolais et à 70 % par Brussels Airlines et le Groupe Forrest International.

zones profite surtout à l’Ouganda, les entreprises qui y développent des projets aurifères préférant passer par Entebbe et Kampala, plus proches que Kinshasa. GUERRE COMMERCIALE. Entre CAA, FlyCongo et Korongo Airlines, la bataille fait rage – un coup dur pour le premier, qui régnait auparavant en maître, mais demeure néanmoins leader avec 34 destinations desservies. Sans surprise, ils s’affrontent sur la liaison très prisée Kinshasa-Lubumbashi. Une concurrence qui a fait baisser les tarifs : le prix d’un aller-retour est ainsi passé d’environ 500 euros à moins de 400 euros. Autre conséquence de cette guerre commerciale, les compagnies rivalisent d’idées pour attirer et retenir la clientèle: promotions, magazine de bord, voire carte de fidélité… Parmi les priorités affichées: le respect des horaires, l’accueil, la qualité du service à bord. Et lasécurité.FlyCongofaitmaintenant réaliserlamaintenancelourdedeses avionsàJohannesburgparlasociété Jetworx, et finalise les démarches pour obtenir la certification Iata Operational Safety Audit (Iosa). Malgré ces signes de vitalité, les compagnies restent plombées par les surtaxes, la récente hausse du prix du carburant et la pression fiscale. Et ce « sans contrepartie du gouvernement, qui nous demande pourtant de favoriser le désenclavement du pays », déplore un opérateur. L’envol du secteur aérien congolais reste donc conditionné à l’amélioration du climat des affaires et de la situation sécuritaire dans l’est du pays ainsi qu’à l’achèvement des travaux engagés dans les grands aéroports pour assurer la sécurité. ● MURIEL DEVEY

3 acteurs nationaux Compagnie africaine d’aviation (CAA) : 34 destinations FlyCongo (ex-Hewa Bora), lancé en mars : 6 destinations Korongo Airlines, lancé en avril : 3 destinations

JEUNE AFRIQUE


Réseau World Class connectant le Nigeria et l’Afrique de l’Ouest London

N e w Yo r k

Dakar Banjul

Abuja

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Monrovia Accra Douala

Première compagnie aérienne du Nigeria et de l’Afrique de l’Ouest, Arik Air est dotée d’une flotte moderne de 23 appareils (avec une moyenne d’âge de cinq ans seulement) dont la maintenance est assurée par Lufthansa Technik et Iberia. Arik Air offre à ses passagers un haut niveau de confort, style et service et met à leur disposition un vaste réseau desservant 20 destinations au Nigeria et 10 en Afrique de l’Ouest, Centrale et Australe, au Royaume-Uni et aux États-Unis.

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Dossier Ciel africain AFRIQUE DU SUD

Johannesburg, pied-à-terre d’Embraer

l’aéroport de Johannesburg sa première réunion d’opérateurs africains – 200 représentants de clients de la gamme ERJ (37 à 50 places) venus écouter le détail d’une stratégie visant à doubler dans les deux ans le nombre d’appareils Embraer sillonnant le ciel du continent. À ce jour, ils sont 54, répartis entre 16 opérateurs de 13 pays.

! L’avionneur a livré le 10 octobre son 900e E-Jet. Le client ? Kenya Airways.

Le constructeur brésilien, qui compte doubler le nombre de ses appareils en activité sur le continent, s’est associé au transporteur Airlink pour mettre en place un centre de maintenance.

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e au s y mb o l e p o u r l’avionneur brésilien de sa volonté affirmée de cibler le marché africain. Le 10 octobre, Empresa Brasileira de Aeronáutica (Embraer) a livré le 900e appareil issu de sa gamme phare E-Jet. Orné de la livrée verte, noire et rouge de Kenya Airways, le E190 de 96 sièges est le 12e biréacteur Embraer de la compagnie – qui en comptera 20 au terme de lacommandeactuellementencours de livraison à raison de 1 appareil par mois. Cette livraison symbolique a eu lieu deux mois après l’ouverture du premier service après-vente consacré à l’Afrique, chapeauté par le transporteur sud-africain Airlink. « Nous sommes clients d’Embraer depuis 2001 et nous

entretenons une excellente relation, s’enthousiasme Rodger Foster, PDG d’Airlink. La valeur de notre centre de maintenance agréé, de pièces détachées et d’équipements Embraer est de 2 millions de dollars [1,5 million d’euros, NDLR] et atteindra 7 millions de dollars fin 2013. » Le partenariat avec cette compagnie régionale – déjà propriétaire de 11 Embraer ERJ 135 (37 places) – s’inscrit dans une démarche destinée à assurer au troisième avionneur civil du monde unevraieprésenceenAfrique.Outre la maintenance et les pièces détachées, celui-ci propose désormais à Johannesburg des formations, avec la société FlightSafety. L’annonce du partenariat avec Airlink a eu lieu le 1er août, alors qu’Embraer tenait à deux pas de

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MARCHÉ FÉCOND. Flotte vieillissante, essor des liaisons régionales et engouement pour les produits provenant de pays émergents… Embraer se lance dans un marché fécond, souligne Mathieu Duquesnoy, vice-président chargé de l’aviation commerciale pour le Moyen-Orient et l’Afrique. « Nos jets sont aussi rapides que les Boeing ou les Airbus. Les taux de remplissage étant faibles en Afrique, il y a un grandpotentielpourlesavionsde70 à 120 sièges. C’est pour cette raison que l’Embraer ERJ 145 (50 places) et la famille des E-Jets ont été bien accueillis dans cette région. » Mais les ambitions du spécialiste de l’aviation régionale, qui fait face au canadien Bombardier, à l’européen ATR et au russe Sukhoï, doivent être relativisées : l’an dernier, l’Afrique n’a contribué qu’à hauteur de 7 % à son chiffre d’affaires (4,5 milliards d’euros au total). Dans des pays où le brésilien ne peut pas compter sur les banques pour accorder des taux d’intérêts intéressants à ses clients, il mise sur ECC Leasing Company, un loueur et marchand d’appareils de seconde main qu’il détient à 100 %. ● ALEX DUVAL SMITH, à Johannesburg

ATR S’IMPLANTE AUSSI DÉJÀ CONSIDÉRÉ comme un hub aérien dans l’hémisphère Sud, Johannesburg est en passe de devenir un pôle du secteur. D’où l’installation en février par ATR, le constructeur européen d’avions turbopropulseurs, N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

d’un simulateur d’une valeur de près de 8 millions d’euros. Intégré à un centre de formation géré par Comair – holding opérant pour British Airways en Afrique du Sud – ce Full Flight Simulator (FFS) a accueilli en quelques mois

1000 pilotes venus de trois continents, selon David Vargas, porte-parole d’ATR. « L’ouverture du centre de formation à Johannesburg correspond à une volonté de renforcer notre support client en Afrique. Mais le simulateur est aussi une

source de revenus car les opérateurs ont la possibilité de le louer pour former eux-mêmes leurs pilotes et leurs équipes de maintenance », précise-t-il. Le prix d’une formation ATR sur le FFS avoisine les 40 000 euros. ● A.D.S. JEUNE AFRIQUE



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Culture & médias

LITTÉRATURE

Tierno Monénembo

« La France n’a jamais reconnu ses héros noirs » En racontant l’histoire d’un résistant africain méconnu, l’écrivain engagé rend hommage à un homme et fustige une nation oublieuse. Sévère envers les puissances occidentales, il n’en reste pas moins lucide sur son propre pays.

Propos recueillis par

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SÉVERINE KODJO-GRANDVAUX

ierno Monénembo aime les personnages atypiques. Après avoir conté l’épopée africaine d’Olivier de Sanderval, un Français qui devint « roi de Kahel » (prix Renaudot 2008), dans le Fouta-Djalon, au XIXe siècle, il revient avec l’histoire extraordinaire du « terroriste noir » Addi Bâ, un tirailleur sénégalais chef d’un maquis de la Résistance dans les Vosges lors de la Seconde Guerre mondiale. Un héros méconnu par une France peu reconnaissante et à qui il rend un puissant hommage (voir J.A. no 2689). Homme de convictions qui a fui la Guinée de Sékou Touré, Tierno Monénembo n’a pas sa plume dans sa poche et n’hésite pas à s’engager, que ce soit pour condamner l’ingérence des puissances occidentales en Afrique ou pour défendre l’honneur de Nafissatou Diallo, cette « paria condamnée à raser les murs et à subir la vindicte des puissants, les regards des vicelards et les chuchotements des bigots » (Le Point du 2 juin 2011). Alors qu’il termine l’écriture de son prochain roman, sur Cuba, l’auteur de Peuls a décidé de rentrer au pays natal. Une terre qui lui a terriblement manqué pendant ses quarante-deux années d’exil et qui nourrira le livre suivant, « une fiction sur la douleur guinéenne depuis 1958 à travers la vie d’une jeune fille d’aujourd’hui ». Interview. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

JEUNE AFRIQUE : Comment avez-vous découvert Addi Bâ ? TIERNO MONÉNEMBO : Dans la presse au début

des années 2000, lors de la remise à titre posthume de sa médaille de la Résistance à sa famille. Lorsque j’ai terminé l’écriture du Roi de Kahel, je me suis dit que son histoire était complémentaire à celle de Sanderval. L’un quitte la France pour se mêler à l’histoire des Noirs en Guinée, l’autre quitte la Guinée pour se mêler à l’histoire des Blancs en France. Comment avez-vous procédé pour en apprendre davantage sur son histoire ?

J’ai eu beaucoup de chance. Un journaliste vosgien, Étienne Guillermond, avait entendu dire que je m’intéressais à l’histoire d’Addi Bâ. Sa famille l’avait hébergé à Tollaincourt, le vrai nom de Romaincourt. C’est même lui qui avait gardé son Coran et ses archives. Et il a créé un site qui lui est dédié [addiba.free.fr, NDLR]. Je me suis JEUNE AFRIQUE


rendu ensuite dans ce village, où j’ai rencontré des protagonistes de l’histoire. Les éclairages sont divers selon l’âge qu’ils avaient à l’époque et selon leur proximité. Tout cela m’a aidé à créer du flou, car je ne voulais pas faire quelque chose d’historique. Quels souvenirs a-t-il laissés auprès de cette population ?

Celui d’un véritable héros, d’un fils du village, d’une personne charismatique, mystérieuse, respectable, qui avait une vie un peu cachée mais qui s’est très bien comporté dans la vie quotidienne, comme dans l’Histoire. Il est très respecté. Avez-vous rencontré des membres de la famille d’Addi Bâ ?

Oui, j’ai rencontré l’un de ses parents. Il connaissait très peu de choses sur son aïeul, il m’a néanmoins fourni le nom du village dont Addi Bâ était originaire. JEUNE AFRIQUE

Addi Bâ est donc plus connu dans les Vosges qu’en Guinée ?

Oui. En Guinée, on sait juste qu’il est venu en France et qu’il s’est fait tuer par les Allemands.

Addi Bâ est un Noir devenu résistant. Je crois que c’est le seul cas de ce genre. Il a été chef de la Résistance, tout de même! Pourquoi vous appuyer sur des personnages historiques pour fonder votre fiction ?

Olivier de Sanderval et Addi Bâ m’ont intéressé parce que ce ne sont pas des personnalités historiques classiques mais de véritables personnages de roman. Sanderval est romanesque à l’excès. Il a trop de fantasmes, de bouillonnement intérieur, d’idées contradictoires qui le traversent. Addi Bâ N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

STR/AFP

! L’écrivain, qui avait quitté la Guinée de Sékou Touré, est retourné s’installer au pays en janvier.


Culture médias par la justice guinéenne ni par la CPI ? Comment voulez-vous que l’islamisme ne progresse pas? Ce qui arrive au Mali peut se produire dans tous les pays sahéliens, sans aucun problème. L’islamisme, c’est le résultat de la fumisterie de nos États. Qu’est-ce qui a fait la nullité de nos États ? La Françafrique.

est pareil. Ce n’est pas le tirailleur sénégalais classique ni le résistant français classique. C’est un Noir devenu résistant. Je crois que c’est le seul cas de ce genre. Il a été chef de la Résistance, tout de même ! C’est exceptionnel. Il lui a fallu beaucoup de courage, d’abnégation… La réalité est plus forte que la fiction alors ?

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! ADDI BÂ LE RÉSISTANT n’a été reconnu comme tel que fort tard par la République française.

Pourquoi avoir choisi un point de vue français, celui d’une vieille Vosgienne qui s’exprime en patois, pour raconter l’histoire de ce soldat guinéen ?

Je ne sais pas trop. Cela est venu accidentellement. On a tellement écrit sur la Seconde Guerre mondiale que je cherchais un point de vue original. Je crois à l’esprit des lieux: j’ai donc donné la parole à une vieille Vosgienne.

Depuis janvier, vous vivez en Guinée. Trois ans après le massacre du 28 septembre, l’enquête piétine toujours. Qu’est-ce que cela vous inspire?

Il n’y a pas la moindre volonté de rendre la justice en Guinée. Deux des personnes impliquées dans le massacre du 28 septembre sont des ministres d’Alpha Condé, Claude Pivi et Tiégboro Camara. Comment est-ce possible ? Alors que Gbagbo et d’autres ont été envoyés à La Haye, Dadis Camara dort tranquillement à Ouagadougou. Pourquoi n’est-il convoqué ni N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

L’avenir est bien sombre si l’on vous écoute !

On tombe de Charybde en Scylla. On a à choisir entre Ben Laden et les héritiers de Foccart. Pour moi, c’est la même chose. On n’a pas à choisir. Sans compter que Pablo Escobar avance également ses pions. Le trafic d’armes et de drogue prospère au Mali, en Guinée et en Guinée-Bissau. Tout cela nourrit la rébellion. Comment la Guinée peut-elle se relever, alors ?

Je ne sais pas. Je ne suis pas magicien. Le jour où nous aurons un État et des dirigeants clairvoyants, nous nous relèverons très vite, car, contrairement à ce que l’on dit, la Guinée est sans aucun doute l’une des nations les moins tribales. On est tellement mélangés dans nos familles qu’aucune guerre civile n’a pu éclater.

Un passage de votre roman évoque l’implication de la Grande Mosquée de Paris dans la Résistance. Vous semblait-il important de rappeler que des musulmans ont sauvé des Juifs ?

Oui, mais pas seulement des Juifs. La Grande Mosquée de Paris a été un haut lieu de la Résistance. Le recteur a joué le jeu. Il a fait semblant d’être avec les Allemands alors qu’il protégeait de nombreux résistants et beaucoup de Juifs.

Oui, bien sûr, il y a d’autres facteurs d’explication. Le Nigeria du Nord, c’était l’empire d’Ousman dan Fodio, un conquérant musulman qui avait imposé un royaume théocratique comme dans de nombreuses régions en Afrique de l’Ouest, à l’instar du Fouta-Djalon par exemple. Il y a une clientèle potentielle dans ces régions. Et les frustrations politiques d’aujourd’hui nourrissent beaucoup les chances de l’islamisme.

IL GU E NN IE

Non, je dirais l’inverse. Car ces deux personnages ont une dimension fictive naturelle. Il est assez exceptionnel qu’un Noir dans la France des années 1940 arrive dans un village et soit accepté. Malgré sa différence, il est devenu un héros du canton – mais pas de la France, ce qui est extrêmement regrettable. L’État français n’a jamais reconnu ses héros noirs. Les camarades d’Addi Bâ qui ont été abattus avec lui ont été automatiquement reconnus comme résistants. Pas lui. Cela pose un grand problème à la morale de la République française. Depuis, grâce au travail et à l’engagement des démocrates, des citoyens, cette erreur a été réparée. La République française doit reconnaître la valeur de chacun de ses enfants. Et Hollande qui arrive au pouvoir en France sous l’aune de Jules Ferry, le père du colonialisme…

Au Nigeria, l’islamisme est également présent, notamment avec la secte Boko Haram. On ne peut pas en rejeter la responsabilité sur la Françafrique.

ÉT

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Qu’allez-vous faire en Guinée ?

Le Terroriste noir, de Tierno Monénembo, Seuil, 228 pages, 17 euros

D’abord écrire. Je suis un écrivain. Et puis parler. Je ne peux pas me taire. Je regrette d’avoir quitté la Guinée de Sékou Touré. Je n’aurais pas dû fuir. Si la jeunesse était restée, cela aurait été fort différent. Je souhaite que tous les Guinéens rentrent. Je tente un retour, pas définitivement, car la France est aussi mon pays, mais j’aimerais y vivre régulièrement et y installer ma bibliothèque. Je ferai des allers-retours. C’est un grand soulagement d’être de nouveau là, car j’y retrouve mon peuple. Mon départ m’avait asséché. Seriez-vous tenté par une carrière politique ?

Non, je ne suis membre d’aucun parti mais je fais de la politique à ma manière : j’écris des tribunes, je parle à la radio, donne des interviews. Je dis ce que j’ai à dire. ● JEUNE AFRIQUE


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Culture médias MÉDIAS

Marie-Christine Saragosse, la pacificatrice Nommée le 7 octobre à la tête de l’Audiovisuel extérieur de la France, l’ex-patronne de TV5 Monde devra rassurer des équipes traumatisées par le projet de fusion de son prédécesseur.

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endredi 5 octobre. Pas encore pouvais faciliter les collaborations entre à la tête de l’Audiovisuel extéles chaînes et restaurer la confiance », rieur de la France (AEF), explique-t-elle. société publique regroupant Radio France Internationale (RFI), la DEMANDES COMMUNES. Faut-ilyvoirun station arabophone Monte Carlo Doualiya signe? Pour la première fois, TV5 Monde, et la chaîne France 24, Marie-Christine RFI et France 24 ont fait des demandes Saragosse reçoit au huitième étage communespourinterviewerlesprésidents du siège parisien de TV5 Monde. Elle François Hollande et Joseph Kabila lors du vient d’achever un marathon de quatre sommet de la Francophonie à Kinshasa. semaines où elle a été successivement Pourtant, à l’heure où nous échangeons, auditionnée par le Conseil supérieur Marie-Christine Saragosse n’a pas encore de l’audiovisuel (CSA), le Sénat et l’Asmis un pied dans son nouveau bureau. et France 24, NDLR] venus assister à mes semblée nationale, tout en continuant à C’est finalement le dimanche 7 octobre auditions », sourit-elle. Des rendez-vous gérer les affaires courantes de sa chaîne. que le décret présidentiel annonçant sa préparés comme un grand oral, parce que En cette fin de semaine, les batteries nomination sera publié au Journal officiel. l’énarque promotion Fernand-Braudel de la « Wonder Woman », (1987) sait que rien ne remplace une prepar ailleurs mère de trois mière impression. Alors elle soigne ses Une culture du dialogue puisée enfants, commencent à réponses : « On a fusionné en divisant, il dans les racines algériennes flancher. Mais même sur est temps de rassembler en identifiant. » la réserve, la dynamique À l’opposé du projet de son prédécesde celle qui est née à Skikda. quinquagénaire est fidèle seur, promoteur d’une rédaction unique à sa réputation, et c’est pied au plancher Un mois s’est écoulé entre le choix du entre RFI et France 24 où les journalistes qu’elle entame la discussion. Elle avait CSA en faveur de sa candidature et sa devaient travailler indifféremment pour prévu de révéler sa part africaine, on prise de fonctions. « Une période étrange » la télévision ou la radio, elle veut « réafl’interroge sur son projet pour l’AEF. Peu pendant laquelle cette fille unique qui firmer les ADN » (généraliste pour RFI, importe, elle n’est pas du genre à refuser craint tant la solitude n’a pas pu renconchaîne d’info pour France 24) et valoriser l’obstacle. trer ses équipes. « Heureusement, j’ai pu les marques, en insistant sur le potentiel Mi-juillet, Marie-Christine Saragosse échanger avec certains journalistes [de RFI humain et l’expertise. Quand on l’accuse avait pourtant poliment décliné l’invitation de Michel Boyon, président du CSA, COUP DE BALAI SUR LE PASSÉ qui voyait en elle la candidate naturelle pour succéder à Alain de Pouzilhac, dont DÉBUT OCTOBRE, d’Anne-Marie privilégié pour RFI le départ constitue à cette heure l’une la méthode Pouzilhac Capomaccio (envoyée un recrutement des rares promesses tenues par le pouaura fait ses à Washington), interne en confiant dernières victimes. respectivement la maison à Cécile voir socialiste. Pas question pour elle de Cette fois-ci chez directrices de la Mégie, jusqu’alors couper le cordon avec TV5 Monde alors qu’au même moment le gouvernement les collaborateurs rédaction de rédactrice en chef. annonçait la sortie de l’AEF du capital directs de l’ancien France 24 et de RFI. Par ailleurs, l’AEF de la chaîne pour la rattacher à France patron de l’AEF. Avant Si, pour prendre les a aussi confirmé même l’officialisation rênes de la chaîne le départ de Frank Télévisions. « Au cours de l’été, je me suis de la nomination d’information, la Melloul, directeur tellement fait engueuler, notamment par des femmes, que cela m’a ébranlée », de Marie-Christine nouvelle patronne a de la stratégie et explique-t-elle. Alors quand, à la renSaragosse, on choisi d’appeler Marc candidat malheureux trée, ses directeurs lui tiennent le même apprenait sans Saikali, ex-directeur à la présidence surprise le départ de l’information de la société face discours, la patronne tourne casaque de Nahida Nakad régionale de à Marie-Christine et endosse les habits de candidat. « Ils et la mise à l’écart J.C. France 3, elle a Saragosse. ● m’ont convaincue en me disant que je N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

JEUNE AFRIQUE


! LOrs de l’audition par le CSA, le 17 septembre.

de faire de l’anti-Pouzilhac pour calmer les esprits, l’intéressée s’agace. « Mais quel était son projet, au juste ? » Pour autant, les salariés de France 24, pressés comme des citrons, et de RFI, rincés par deux plans de départs volontaires, ne doivent pas non plus s’attendre à une câlinothérapie. Le but est « de se projeter et de se caler sur nos ambitions », assure celle qui a promis l’écoute et la concertation aux représentants du personnel. Concernant la méthode, Marie-Christine Saragosse devrait satisfaire une grande partie du personnel en créant des directions distinctes pour chaque média et en nommant aux postes clés des gens qui incarnent le changement (lire encadré). TENACE. Une approche basée sur la

cohésion qu’elle a rodée au sein de TV5 Monde. D’abord directrice générale adjointe (1997) puis directrice générale déléguée entre 1998 et 2006, elle a notamment travaillé aux côtés de Serge Adda, fils de George Adda (militant communiste et anticolonialiste, compagnon de lutte de Bourguiba), avant de démissionner à la suite d’un profond désaccord avec Jean-Jacques Aillagon, alors à la tête de la chaîne. Lorsqu’elle revient en 2008 pour prendre le poste de numéro un, à la demande d’Alain de Pouzilhac, les équipes de la chaîne ont le moral en berne. TV5 Monde se voit déjà sacrifiée au profit du décollage de la chaîne d’information continue France 24, née JEUNE AFRIQUE

en 2006. Tenace, elle s’appuie sur les actionnaires francophones (les télévisions suisse, belge et canadienne) pour préserver son indépendance, développe sa présence sur internet et n’oublie pas de défendre des causes qui lui tiennent à cœur, comme la parité à l’antenne ou la lutte contre l’excision. Au moment du départ, la patronne n’a pas beaucoup de détracteurs. Sa culture du dialogue, Marie-Christine Saragosse la puise dans ses racines algériennes : elle est née à Skikda, qui s’appelait alors Philippeville… Une saga familiale qu’elle raconte dans son premier roman, Temps ensoleillé avec fortes rafales de vent (édition Erick Bonnier), paru au

rencontrera son mari, haut fonctionnaire au ministère des Finances. « Les épaules les plus larges de la promotion 1987. Il reste mon premier supporteur », s’amuse-t-elle. Avant même la fin de son cursus, l’audiovisuel monopolise son attention. « La lucarne magique m’a toujours fascinée… À l’ENA, j’avais choisi une option sur le futur de la francophonie et je défendais déjà l’idée qu’il passait par de grands médias internationaux », se souvient-elle. Un point de vue qu’elle partage avec son ami le président de l’Organisation internationale de la francophonie, l’ancien chef d’État sénégalais Abdou Diouf, surnommé affectueusement Papa. Même si elle n’ignore rien des contraintes budgétaires « Le futur de la francophonie du moment, la nouvelle patronne passe par de grands médias veut croire que l’État continuera internationaux. » à préserver, comme il l’a fait en 2013, les ressources financières mois d’août. « Chez moi, l’indépendance de l’AEF. Parce qu’il faut avoir les moyens n’a pas été une blessure dont mes parents de ses ambitions. « Je vois dans le monde parlaient constamment », explique cette des médias des choses aux antipodes de lectrice de Yasmina Khadra qui se définit nos valeurs. Il me semble que, dans ce comme une déracinée et a les larmes magma, la France, sans être arrogante, aux yeux quand les Algériens lui disent apporte des points de repère stables, qu’elle est une fille du pays. rigoureux et crédibles », explique-t-elle. Installée avec ses parents à Nice puis Inutile de tenter de lui saper le moral en à Cannes, elle poursuit ses études à lui rappelant la domination des chaînes Sciences-Po Paris afin de devenir jouranglo-saxonnes. « Culturellement, on ne naliste. Attachée au service public, elle raconte pas les mêmes choses », rebonditoptera finalement pour l’École natioelle. Autrement dit : nous n’avons pas les nale d’administration (ENA), où elle mêmes valeurs. ● JULIEN CLÉMENÇOT N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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Culture médias Le Sénégalais Sembène Ousmane (décédé en 2007), le Burkinabè Gaston Kaboré, le Bissau-Guinéen Flora Gomes. Plus tard, il en sera de même avec les réalisateurs français François Truffaut et Bertrand Tavernier.

CINÉMA

L’humanité de Moussa Touré Alors que La Pirogue, saluée à Cannes, sort sur les écrans français, le cinéaste sénégalais sait qu’il n’a pas le droit de décevoir.

J.TORREGANO POUR J.A.

RISQUES. Refusant, à l’inverse de tant d’autres de ses collègues, d’aller se perfectionner à Moscou – l’URSS, le « pays de l’espionnage », ne l’attire pas –, il a profité d’une bourse gouvernementale pour passer un an dans les laboratoires Éclair, à Paris. C’est là, d’ailleurs, qu’il va entamer une carrière de réalisateur. Pendant son séjour, il a en effet écrit un scénario quelque peu autobiographique – le regard sur l’Hexagone d’un Sénégalais – pour lequel il a obtenu une avance sur recettes. Ce qui lui a permis de tourner Toubab Bi et de récolter au passagequelques commentairesélogieux: un critique le compare même à Jacques Tati ! Il tournera ensuite, avec l’aide de l’acteur français Bernard Giraudeau, TGV, un long-métrage évoquant avec humour un voyage épique entre Dakar et Conakry dans un taxi-brousse. Arrive bientôt l’ère du numérique, qui lui permet de tourner avec de tout petits budgets une série de documentaires très remarqués : les femmes violées lors de la guerre civile au Congo-Brazzaville (Nous sommes nombreuses), la polyga! UN CONTEUR ATYPIQUE aux films politiquement incorrects. mie au Sénégal (5x5), la vie des immigrés cinéastesénégalaisJohnsonTraoré(décédé en Catalogne (Nosaltres, « nous autres » eul Africain du sud du Sahara en 2010), auteur de films engagés. Lequel en catalan). Point commun de tous ces sélectionné pour présenter films très politiquement incorrects: l’attenlaissa le très curieux Moussa passer du un film au dernier festival de tionportéeparleréalisateurauxpersonnes temps à observer comment se passait Cannes, on pouvait imaginer un tournage, avant de qu’il filme, le respect Moussa Touré comblé par cet honneur. l’autoriser à s’occuper du absolu qu’il leur maniLorsqu’on l’avait rencontré à la veille de matériel. Sa famille subitefeste. Pour son retour à la projection de La Pirogue, majestueux ment ruinée, Touré quitte la fiction avec La Pirogue, dans son boubou blanc, avec sur la tête son éternelle coiffe colorée, il nous avait définitivementlesétudesà sur les écrans français le surtout paru angoissé par le jugement l’âgede14anspourgagner 17 octobre, il fait preuve de cette même empades professionnels du septième art. Le sa vie sur les plateaux de « verdict » fut très favorable. Pourtant, ce cinéma. Il choisit de devethie envers « ses » perfaux décontracté raconte aujourd’hui de sonnages – des hommes nir « machino-électro », sa voix douce que ce n’est pas pendant qui veulent à tout prix car il peut ainsi participer mais après son séjour sur la Croisette que rejoindre l’Europe par au plus près à la fabricala mer en prenant des « la pression » a atteint son maximum. tion des films et, surtout, Même s’il a déjà une longue carrière derrisques insensés –, qui, du accompagner le jeu des rière lui, il lui faut désormais « être plus acteurs « entre ombre et coup, crèvent l’écran. Ses lumière».Lui,l’éclairagiste La Pir exigeant encore » pour ne pas décevoir. projets déjà bien avancés Pirogue, de Moussa Mou Touré C’est tout jeune, alors qu’il vivait dans la atypique qui lit les scéna- (sortie à Paris le 17 octobre) – deux documentaires et médina de Dakar, que Moussa Touré est rios, se fait vite remarquer unfilmdefiction–verront tombé dans le cinéma. Ses parents étaient pour ses interventions tous azimuts dersans doute ce conteur peu banal privilérière la caméra. D’où, rapidement, une gier encore une approche humaniste et d’incorrigiblescinéphiles.Etc’esttoutnaturéputation d’assistant hors pair qui lui caustique de la réalité. ● rellement que sa mère le présenta, encore adolescent,àl’une desesconnaissances,le permet de travailler avec les plus grands. RENAUD DE ROCHEBRUNE

S

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Culture médias En vue

■ ■ ■ Décevant

■ ■ ■ Pourquoi pas

■ ■ ■ Réussi

■ ■ ■ Excellent

ESSAI

Indignez-vous! PROFESSEUR DE LITTÉRATURE au College of The Holy Cross à Worcester, dans l’État du Massachusetts, le Camerounais Ambroise Kom est anticonformiste, un peu à la manière de l’iconoclaste Mongo Beti. Tenant de la sociocritique, il privilégie l’approche endogène, empathique, pour éclairer la création littéraire du continent. S’il reconnaît que la littérature africaine de langue française est issue de la littérature française, il refuse de la juger « à l’aune d’un canon défini sous d’autres cieux », au risque de « lui méconnaître une partie de son originalité et la construction d’une identité propre ». Kom entre en résistance et refuse de penser par procuration. Il le démontre dans ce livre. ● TSHITENGE LUBABU M.K.

Le Devoir d’indignation, éthique et esthétique de la dissidence, Présence africaine, 370 pages, 18,30 euros ■■■

EXPOSITION

Salles désertées Des cinémas désaffectés en Côte d’Ivoire et au Sénégal, construits peu après les indépendances en Afrique, font l’objet de l’exposition « Cinémas Africa » de l’artiste sénégalais Cheikh Ndiaye. Diplômé de l’École nationale des arts de Dakar et de l’école supérieure des beaux-arts de Lyon, il a voulu montrer avec ses toiles – dont la forme rappelle celle d’un écran de cinéma – comment ces bâtiments ont été abandonnés, faute d’aides, puis utilisés comme des garages, des habitations précaires ou encore des églises évangéliques. Le 18 octobre, à 19 heures, une conférence de l’artiste évoquera l’architecture et son détournement en Afrique de l’Ouest. ● MARIE VILLACÈQUE

« Cinémas Africa », de Cheikh Ndiaye, jusqu’au 30 décembre, au Musée africain de Lyon ■■■ N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

ANDRES LEJONA

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ARTS PLASTIQUES

Éruption créative Le plasticien camerounais Pascale Marthine Tayou présente un échantillon de ses œuvres colorées au parc de la Villette, à Paris. Polymorphe et festif.

I

l y a, chez le plasticien camerounais Pascale Marthine Tayou (voir J.A. no 2690), un plaisir évident de créer. Quoique cérébrale, son œuvre se déploie en installations foisonnantes, accumulations d’objets hétéroclites, explosions de couleurs. L’exposition « Collection privée », présentée jusqu’au 30 décembre au Pavillon Paul-Delouvrier du parc de la Villette, à Paris, rend parfaitement hommage à cette énergie bouillonnante. Volontiers poète, l’artiste écrit : « Cette exposition sera une transgression de formes, mon intention sera de faire de cette fausse rétrospective la célébration de l’inconnu, montrer l’influence des objets rituels qui façonnent nos mœurs de tous les jours, une problématique visuelle sur les choses qui nous entourent, sur ces choses qui nous observent et la manière

dont nous observons les choses qui nous façonnent. » « Collection privée » donne donc l’occasion de voir de près les fameuses Poupées Pascale, statuettes vaudous modelées dans du cristal, la Danse des ventilateurs, les photographies intitulées L’École des clowns, mais aussi des œuvres plusmonumentalescommeHomeSweet Home – des cages à oiseau, des nichoirs et des spaghettis de papier amassés sur des troncs de bois brut – ou Diamonds Landscape – sombres potences où sont pendusdesdiamants.C’estjoyeux,enlevé et coloré, comme cet arbre composé de crayonsdecouleursgéants(Intramoulins, le chemin lumineux), œuvre urbaine pérenne inaugurée par Martine Aubry, l’ex-premier secrétaire du Parti socialiste français, à Moulins, près de Lille, fin septembre. ● NICOLAS MICHEL

« Collection privée », de Pascale MarthineTayou, jusqu’au 30 décembre au Pavillon Paul-Delouvrier, à la Villette (Paris). Catalogue de l’exposition publié par Actes Sud et le parc de la Villette, 80 pages, 23,50 euros ■■■ JEUNE AFRIQUE


Culture médias LITTÉRATURE

ROMAN

Conçu pour tuer?

LE ROMANCIER TURC Nedim Gursel a choisi pour héros Nazim Hikmet (19011963, photo ci-contre), le plus grand poète delaTurquiemoderne,petit-filsd’unpacha ottoman, condamné pour marxisme, réfugié et mort en URSS. Son biographe turc (fictif, lui) se rend en Allemagne de l’Est, où un ex-agent de la Stasi lui confie des documents sur ses années d’exil. Secrets d’État et d’alcôve, trahison et amours déçues dominent cette belle évocation de Berlin. ● CATHERINE XATARD

Afin de décrocher un job très convoité, un architecte à la dérive doit proposer une nouvelle méthode de travail dite des coïncidences. Celle-ci suppose qu’une maison dessinée en fonction du passé de ses futurs habitants pourra décider de leur bonheur ou de leur perte à venir. Parallèlement, sa femme meurt à leur domicile. Alors, s’il veut remporter l’appel d’offres, il doit démontrer que l’architecture de sa propre maison a été conçue pour tuer son épouse… Passée une entrée en matière un peu difficile, on se laisse finalement agréablement transporter par le récit, en forme de visite guidée de la maison, mais aussi des souvenirs de l’architecte. Un roman retenu dans la deuxième sélection du prix Renaudot. ●

OZKOK/SIPA

Berlin, la Turque

L’Ange rouge, de Nedim Gursel, Le Seuil, 374 pages, 21,50 euros

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RÉCIT

Quand Mazarine se raconte Nostalgique des années Mitterrand, vous brûlez de savoir ce que devient sa fille Mazarine (romancière, compagne d’un réalisateur marocain, mère de trois enfants) ? Son livre est pour vous. Récit-journal de la campagne présidentielle de François Hollande, il exorcise la souffrance d’une enfant cachée, qui ne put fêter le 10 mai 1981 en pleine lumière. Malgré ses platitudes (« le problème des jours, c’est qu’ils reviennent sans cesse », « il faut continuer à vivre car la vie continue ») et l’horripilant vouvoiement dont elle use pour s’adresser à elle-même, il y a quelque chose d’émouvant au pays de Pingeot. ● C.X.

Bon Petit Soldat, de Mazarine Pingeot, Julliard, 212 pages, 19 euros

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JUSTINE SPIEGEL

Le Parti des coïncidences, de Mohamed Boudjedra, Alma Éditeur, 236 pages, 15 euros ■■■

CUISINE

Souper sans boire le bouillon

AURÉLIA FRONTY

EXISTETIL UN PAYS qui n’ait son potage national ? « La terre est ronde comme une marmite de soupe », affirme Alain Serres en introduction de son livre Une cuisine qui sent bon les soupes du monde, très joliment illustré par Aurélia Fronty. Pour les amateurs de bouillons parfumés, ce grand album est un délice. Quant aux autres, ils seront convaincus d’y tremper leurs lèvres après lecture. Les recettes sont comme autant de poèmes – Velouté glacé de mangue à la citronnelle, crème d’hibiscus à la pistache, inchicapi de gallina aux cacahuètes, minestrone glacé aux fruits exotiques… – accompagnés d’histoires cueillies ici et là. Un tour du monde gustatif en 75 recettes. ●

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N.M.

Une cuisine qui sent bon les soupes du monde, d’Alain Serres et Aurélia Fronty, Rue du monde, 64 pages, 23,90 euros ■■■ N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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ANNONCES CLASSÉES

Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre -Tél. : 01 44 30 18 76 - Fax : 01 44 30 18 77 - Email. : f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris - France

African Development Bank Group Temporary Relocation Agency

Corporate Procurement Division Fax Number: + (216) 71 83 52 49

INVITATION FOR BIDS

GLOBAL SHIPPING SERVICES FOR THE AFRICAN DEVELOPMENT BANK ADB/CGSP/ICB/2012/0214 1) The African Development Bank (hereafter referred to as “The Bank”), is a regional multilateral development finance institution, established in 1963, with a mandate to further the economic development and social progress of African countries, individually and collectively. 77 member countries including all the 53 African countries and 24 non-African countries in the Americas, Europe and Asia own the Bank.

3) The Bank is seeking to negotiate a two-year framework contract with the selected firm(s), renewable on annual basis upon satisfactory performance for a maximum of duration of five (05) years. 4) Interested bidders must originate from one of the Bank’s member countries, list of which is provided at www.afdb.org. The scope of the project and the forms to be completed are described in the Request for Proposals (RFP) document that is available for downloading from http://www.afdb.org/en/aboutus/corporate-procurement/business-opportunities. Alternatively, the document may be obtained by sending a request to tender@afdb.org.

a) Must originate from one of the Bank’s member countries ; b) Must be in business in the role of contractor, subcontractor, or management contractor for at least the last three (03) years prior to the applications submission deadline, and must have a permanent distribution center; c) Must have a minimum average turnover of at least USD 150,000.00 equivalent per annum for the last three years. This amount is calculated as total certified payments received for contracts in progress or completed, in any one of the last three years; d) Soundness of the applicant financial position and its prospective long term profitability; and e) Ability to ship and deliver to all Bank’s offices. The proposals should be submitted in sealed envelopes delivered at the address below by Thursday 29 November 2012 at 1500hrs Tunis, Tunisia, local time. The envelopes should be clearly marked as follows: “GLOBAL SHIPPING SERVICES FOR THE AFRICAN DEVELOPMENT BANK - ADB/ICB/CGSP/2012/00214”. Corporate Procurement Division, CGSP.2 EPI Block B - Office 2A2 African Development Bank ADB Temporary Relocation Agency (Tunis) Angle des trois rues : Avenue du Ghana, Rue Pierre de Coubertin, Rue Hedi Nouira BP. 323 1002 - Tunis Belvedère, Tunisia Fax : +216 71 83 52 49 Email : tender@afdb.org

5) Candidates interested in this procurement opportunity shall register by sending an e-mail to tender@afdb.org.

9) The Bank will reject late bids.

6) The selection will be conducted through the procedures prescribed by the Bank’s rules for internal acquisition of

10) Bidders will be advised, in due course, of the results of their submissions.

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Appel d’offres

2) The Bank intends to select eligible firms or joint-ventures to implement a comprehensive single or multi-framework contract for global shipping operations at its Temporary Relocation Agency (TRA) in Tunis, Tunisia, in its Headquarters in Abidjan, Côte d’Ivoire, and its Field Offices. The services will comprise: Incoming freight operations, Outgoing packing, storage and freight operations, Customs clearance services, Vendor management services, and Related technology services.

goods and services. The minimum requirements for prequalification are as follows:


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Annonces classées AVIS D’APPEL D’OFFRES OUVERT INTERNATIONAL. RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO MINISTÈRE DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE, URBANISME, HABITAT, INFRASTRUCTURES, TRAVAUX PUBLICS ET RECONSTRUCTION CELLULE INFRASTRUCTURES

PROJET DE RÉOUVERTURE ET D’ENTRETIEN DES ROUTES HAUTEMENT PRIORITAIRES. « PRO-ROUTES » PROJECT ID P101745 / P120709 AVIS D’APPEL D’OFFRES OUVERT INTERNATIONAL N°007/MATUHITPR/CI/PRO-ROUTES/2012 - DATE : LE 12 OCTOBRE 2012

Appel d’offres

« TRAVAUX DE RECONSTRUCTION DES TABLIERS METALLIQUES DE ONZE (11) PONTS SUR LA ROUTE NATIONALE N° 4, TRONÇONS KISANGANI-BANALIA ET KISANGANI-NIANIA-BENI ».

1. Le présent Avis d’Appel d’Offres suit l’Avis général de passation de marchés du projet publié le 12 Février 2008, le 21 mai 2009 et le 27 novembre 2011. 2. Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo a obtenu un don de l’Association Internationale de Développement et un don de DFID, globalement de 123 millions de USD qui viennent d’être augmentés par une enveloppe supplémentaire des deux bailleurs et du Fonds National d’Entretien Routier (FONER) équivalent à 125.2 millions USD, pour financer le Projet ProRoutes dont l’objectif global est de contribuer à la réduction de la pauvreté grâce au rétablissement et à la préservation durable des infrastructures routières permettant l’accès des populations aux marchés et aux services sociaux et administratifs nécessaires à la relance socio-économique et à la réintégration du pays. Il entend affecter une partie du produit de ce don aux paiements relatifs au marché des « TRAVAUX DE RECONSTRUCTION DES TABLIERS METALLIQUES DE ONZE (11) PONTS SUR LA ROUTE NATIONALE N°4, TRONÇONS KISANGANI-BANALIA ET KISANGANI-NIANIA-BENI ». 3. La Cellule Infrastructures invite les soumissionnaires éligibles et qualifiés à présenter leur soumission cachetée en vue de l’exécution des travaux constitués en un seul lot indivisible consistant essentiellement aux travaux de démontage des tabliers existants, fourniture et mise en ouvre des tabliers métalliques y compris les appuis, pour un délai d’exécution de 24 mois. 4. L’Appel d’Offres se déroulera conformément aux procédures d’Appel d’Offres Ouvert International spécifiées dans la publication de la Banque « Directives: passation des marchés financés par les prêts de la BIRD et les crédits de l’IDA », et est ouvert à tous les soumissionnaires des pays qui répondent aux critères d’éligibilité tels que définis dans le Dossier d’Appel d’Offres. 5. Les soumissionnaires intéressés éligibles peuvent obtenir de plus amples renseignements auprès de la Cellule Infrastructures, à l’adresse électronique info@celluleinfra.org, site web www.celluleinfra.org, et prendre connaissance des documents d’Appel d’Offres à l’adresse mentionnée ci-dessous de 9h00’ à 16h00’. 6. Les spécifications de qualification comprennent : la capacité financière, l’expérience des travaux similaires, le matériel disponible et le montant de l’Offre (priorité au moins disant techniquement valable). Voir le document d’Appel d’Offres pour les informations détaillées. 7. Le Dossier d’Appel d’Offres complet en français peut être acheté par les soumissionnaires intéressés par demande écrite à l’adresse ci-dessous contre paiement d’un montant non remboursable de 150 $US (Cent cinquante dollars américains). Le paiement sera effectué en espèces à la caisse, chèque de caisse, dépôt direct sur le RAWBANK en faveur de la Cellule Infrastructures en précisant le numéro du Dossier d’Appel d’Offres pour lequel le versement est effectué (NUMERO DU COMPTE : 0501-0100132602-20 EURO, SWIFT : RAWBCDKIXXX, IBAN : FR76 0510005101010013260220). Le Dossier d’Appel d’Offres acquis sera expédié par voie électronique ou retrait à la Cellule Infrastructures. Sur demande du soumissionnaire et moyennant un paiement complémentaire forfaitaire de 200 USD (deux cents Dollars Américains), la Cellule Infrastructures peut se charger d’expédier ledit dossier par courrier rapide. Elle ne sera en aucun cas tenue responsable des retards ou pertes subis durant cet acheminement. Il est à noter que l’Offre de tout soumissionnaire qui n’aura pas fourni la preuve d’achat du Dossier d’Appel d’Offres (DAO) en bonne et due forme sera rejetée. 8. Les Soumissions devront être déposées à l’adresse ci-dessous avant ou le 29 novembre 2012 à 14 heures 30’ (heure de Kinshasa). Les dépôts électroniques ne seront pas admis. Les soumissions présentées hors délais seront rejetées. Les Soumissions seront ouvertes physiquement en présence des représentants des soumissionnaires qui souhaitent y assister à l’adresse ci-dessous au jour mentionné ci-dessus à 14 heures 30’ (heure de Kinshasa). 9 Toutes les Soumissions doivent être accompagnées d’une garantie de soumission dont le montant est fixé à 150 000 USD. 10. L’adresse mentionnée ci-dessus est : Cellule Infrastructures 70A, Avenue Roi Baudouin - Kinshasa/Gombe République Démocratique du Congo Kinshasa, le 12 octobre 2012 . Théophile NTELA LUNGUMBA Coordonnateur a.i. N° 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

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INVITATION FOR BIDS Procurement Number: 46/PTSD/12

SUPPLY AND DELIVERY OF IT, VIDEO COMMUNICATION AND PRINTING EQUIPMENT The African Union Commission has reserved some funds towards the procurement of the above mentioned services. The African Union Commission now invites bids from interested bidders for the Supply and Delivery of IT, Video Communication and Printing Equipment. The items are categorized in different Lots LOT 1. IT equipment LOT 2. Video Communication Equipment LOT 3. Printing Plant Equipment Bidders can bid for LOT/LOTS of their preference More details on the above requirements are provided in the bid document. Interested firms can collect the bid documents from the African Union website: http://www.au.int/en/bids The closing date for the submission of bids shall be 12th November 2012. For further inquiries please use Tel: +251-11-5517700, Ext 4305. E-mail Tender@africa-union.org

Banque des États de l’Afrique Centrale - Services Centraux Commission ad hoc du marché - Décision n°46/GR/2012 La Banque des Etats de l’Afrique Centrale envisage d’acquérir, sur ressources propres, divers mobiliers. A cet effet, elle invite, par le présent avis d’appel d’offres international ouvert, les entreprises remplissant les conditions requises, à présenter une offre pour la fourniture et l’installation, en lots indépendants, de divers mobiliers. Les lots sont répartis ainsi qu’il suit : - Lot 1 : Divers mobiliers de bureau destiné aux services Centraux à Yaoundé ; - Lot 2 : Divers mobiliers et équipements destinés au logement du Chef de Centre de Berberati en République Centrafricaine. Le processus se déroulera conformément à la procédure d’appel d’offres international ouvert définie par le Code des marchés et le Manuel de procédures de gestion des marchés de la BEAC. Les entreprises intéressées peuvent obtenir un complément d’information et examiner le dossier d’appel d’offres à l’adresse ci-dessous, entre 9 heures et 12 heures les jours ouvrés : BANQUE DES ÉTATS DE L’AFRIQUE CENTRALE Services Centraux, 736 Avenue Monseigneur Vogt Secrétariat Général, DOAAR-CGAM, 14ème étage, Porte 1412 " : BP 1917 Yaoundé - CAMEROUN # : (237) 22 23 40 30 ; (237) 22 23 40 60 poste 5402 ou 5431 ! : (237) 22 23 33 29 @ : cgam.scx@beac.int Le dossier d’appel d’offres rédigé en français peut être acheté et retiré à JEUNE AFRIQUE

l’adresse indiquée ci-dessus, moyennant le paiement d’une somme non remboursable de XAF 200 000 (deux cent mille) ou EURO 305 (trois cent cinq). Le paiement devra être effectué en espèces aux guichets de la BEAC ou par virement bancaire. Les soumissions, conformes au règlement de l’appel d’offres, devront obligatoirement être accompagnées d’une garantie de soumission équivalente à 5% du montant de l’offre suivant le modèle indiqué, et déposées à l’adresse indiquée ci-après, au plus tard le vendredi 30 novembre 2012 à 12 heures : BANQUE DES ÉTATS DE L’AFRIQUE CENTRALE Services Centraux, 736 Avenue Monseigneur Vogt Bureau d’Ordre, 15ème étage, Porte 15.01 Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Les dossiers administratifs et les offres techniques seront ouverts le vendredi 30 novembre 2012 à 13 heures et les offres financières le lundi 10 décembre 2012 à 10 heures, aux Services Centraux de la BEAC à Yaoundé, en présence des représentants des soumissionnaires, dûment mandatés, qui souhaitent assister aux séances d’ouverture. Yaoundé, lundi 08 octobre 2012 Le Président de la Commission ad hoc, Bienvenu Marius Roosevelt FEIMONAZOUI N° 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

Appel d’offres

Avis d’appel d’offres international ouvert no 21/BEAC/DGE-DIPG/AOIO/Bien/2012


Manifestation d’intérêt - Recrutement

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PROJET RÉGIONAL DES PÊCHES EN AFRIQUE DE L’OUEST República da Guiné-Bissau SECRETARIA DE ESTADO DAS PESCAS E DOS RECURSOS HALIÊUTICOS Direcção Geral das Pescas

P119380 et P122182 IDA Grant Number H6530 – GW GEF Grant Number 99597

SOLLICITATION DE MANIFESTATION D’INTÉRÊT

POUR LA SÉLECTION D’UN CONSULTANT(FIRME) POUR LE RENFORCEMENT DU CADRE LÉGAL ET RÉGLEMENTAIRE SUR L’UTILISATION DES RESSOURCES HALIEUTIQUES EN GUINÉE BISSAU

Le Gouvernement de la République de la Guinée Bissau a reçu un financement auprès de l’Association Internationale de Développement (IDA) et le Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM) et a l’intention d’utiliser une partie du montant de ce don pour effectuer les paiements au titre du contrat suivant : “ Renforcement du cadre légal et réglementaire sur l’utilisation des ressources halieutiques en Guinée Bissau “, dans le cadre du Projet Régional des Pêches en Afrique de l’Ouest (PRAO) Les services comprennent : i. la réalisation d’un diagnostic du cadre politique, légal et réglementaire existant sur l’utilisation des ressources halieutiques. ii. Le développement d’un plan d’action de politique quinquennale (5 ans). iii. la révision des cadres institutionnels nécessaires à la mise en œuvre du Plan d’Action de Politique Quinquennale (PAPQ) et de la Stratégie Nationale pour le Développement de la Pêche (SNP) et ses objectifs à moyen terme. iv. la réalisation d’une étude sur les cadres politiques/réglementaires nécessaires pour encourager les entrepreneurs de pêche à investir en terre en échange d’une garantie de droits de pêche plus extensifs pour la mise en œuvre de la SNP et le Plan d’Action de Politique Quinquennale (PAPQ). v. L’assistance à la SEP pour des révisions et/ou actualisation des aspects de la Loi Général des Pêches et ses réglementations respectives pour la mise en œuvre de la Stratégie Nationale pour la Pêche (SNP) et aussi le PAPQ. vi. la revue des aspects de réglementation concernant la pêche industrielle et artisanale, système de Suivie, Contrôle et Surveillance (SCS) et inspection des produits de la pêche pour la mise en œuvre de la Stratégie Nationale pour la Pêche (SNP) et aussi le PAPQ. vii. l’appui à la SEP dans la préparation des Plans Annuels de Gestion des Pêcheries côtières ciblées (crevette, céphalopode et poissons démersaux). N° 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

viii. L’assistance au Gouvernement (Secrétariat d’État de la Pêche) pour la coordination de l’appui au développement et l’établissement d’accords de pêche. Le PRAO-Guinée Bissau invite les consultants admissibles à manifester leur intérêt, en français, à fournir les services décrits ci-dessus. Les candidats intéressés doivent fournir les informations indiquant qu’ils sont qualifiés pour exécuter les services (documentations, références concernant l’exécution de contrats analogues, expériences dans des conditions semblables, disponibilité de connaissances nécessaires parmi le personnel, etc.) Les consultants peuvent s’associer pour renforcer leurs compétences respectives. Un consultant (firme) sera sélectionné en accord avec les procédures de la Sélection basée sur la qualité et le coût défini dans les Directives : Sélection et Emploi de Consultants par les Emprunteurs de la Banque mondiale du janvier 2011. Les consultants intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires au sujet des documents de référence à l’adresse ci-dessous aux heures d’ouverture de bureaux suivants : de 09 heures à 14 heures, heures locales. Les manifestations d’intérêt doivent être déposées en trois exemplaires sous pli fermé portant la mention « Manifestation d’intérêt pour la sélection d’une firme pour le renforcement du cadre légal et réglementaire sur l’utilisation des ressources halieutiques en Guinée Bissau » à l’adresse ci-dessous au plus tard le 08/11/2012, à 12H00. Projet Régional des Pêches en Afrique de l’Ouest - PRAO Guinée Bissau (PRAO-GB), DIRECTION GÉNÉRALE DES PÊCHES – SECRÉTARIAT D’ÉTAT DE LA PÊCHE Av. Amilcar Cabral CP 102 Bissau / République de la Guinée Bissau Tél : 245 3206950 / 245 6718961 / 245 6532366 E-mail: projecto.prao@yahoo.com - Cc : cruzpires01@yahoo.com.br inangolo@yahoo.com La Coordinatrice du PRAO-GB VIRGINIA CRUZ PIRES JEUNE AFRIQUE


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Union Monétaire Ouest Africaine CREPMF Conseil Régional de |'Epargne Publique et des Marchés Financiers

AVIS DE RECRUTEMENT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL RÉGIONAL DE L’ÉPARGNE PUBLIQUE ET DES MARCHÉS FINANCIERS DE L’UMOA Le Conseil Régional de l’Epargne Publique et des Marchés Financiers (CREPMF), Organe de régulation du marché financier régional de l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA), lance un appel à candidatures pour le recrutement de son Secrétaire Général. I - PRINCIPALES FONCTIONS ET RESPONSABILITÉS Le Secrétaire Général du Conseil Régional dirige le Secrétariat Général. Il a pour principales responsabilités : • La gestion administrative et financière du Secrétariat Général : Contrôle Financier, Audit Interne et de la Conformité, Administration et Comptabilité, Gestion des Ressources Humaines, Budget, Affaires Juridiques, Systèmes d’Information et de la Communication ; • La supervision des opérations du marché : autorisation des émissions d’actions et d’obligations par appel public à l’épargne ou par placement privé ; • L’habilitation et le contrôle de la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières (BRVM) et du Dépositaire Central/Banque de Réglement (DC/BR) ainsi que de tous les intervenants commerciaux agréés du marché ; • La mise à jour de la réglementation du marché financier ; • L’élaboration et la mise en œuvre du Plan Stratégique ; • La conduite des études et autres travaux visant à approfondir et à développer le marché financier régional de l’UMOA.

EXPÉRIENCE PROFESSIONNELLE Une expérience professionnelle pertinente d’au moins douze (12) ans dont cinq (5) en qualité de Dirigeant (Directeur Général,

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III - RENSEIGNEMENTS ADMINISTRATIFS DOSSIER DE CANDIDATURE Les candidats sont invités à faire parvenir au Conseil Régional un dossier comprenant : - Une lettre de motivation datée et signée ; - Une copie certifiée conforme des deux derniers diplômes ; - Un curriculum vitae détaillé ; - Les copies certifiées conformes des attestations et/ou certificats de travail justifiant de l’expérience professionnelle alléguée ; - Un extrait d’acte de naissance ou tout document en tenant lieu ; - Un certificat de nationalité ; - Un casier judiciaire datant de moins de trois (3) mois. ÂGE ET NATIONALITÉ - Etre âgé de 49 ans au plus au 31 décembre 2012 ; - Etre ressortissant de l’un des Etats membres de l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA) à savoir : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo. DATE LIMITE DE DÉPÔT DES CANDIDATURES Le dossier de candidature doit être transmis sous pli fermé à l’adresse suivante : Conseil Régional de l’Epargne Publique et des Marchés Financiers Monsieur le Président Avenue Joseph ANOMA - 01 BP 1878 Abidjan 01 CÔTE D’IVOIRE Le pli portera, au verso, impérativement, les nom et prénoms du candidat ainsi que la mention “ Recrutement du Secrétaire Général “. La date limite de dépôt des candidatures est fixée au lundi 22 octobre 2012 à 17 heures GMT. NB : - Les dossiers incomplets, non conformes ou parvenus hors délai, ne seront pas examinés. - Seuls les candidats retenus pour les entretiens seront contactés. - Aucun dossier de candidature ne sera retourné. Le Conseil Régional propose une rémunération attractive et des conditions de service comparables à celles des autres Organes et Institutions de l’UEMOA. Cet avis de recrutement est disponible sur le site web du Conseil de l’Epargne Publique et des Marchés Financiers à l’adresse suivante : www.crepmf.org

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Recrutement

II - PROFIL DU CANDIDAT QUALIFICATIONS Le Secrétaire Général doit avoir les qualifications ci-après : - Etre titulaire d’un diplôme d’études supérieures de niveau BAC + 5 au mininium en Finance ou en Droit des Affaires (Doctorat, MBA, DEA, DESS ou équivalent) ; - Avoir une très bonne maîtrise des questions économiques ou financières et/ou du Droit des Affaires ; - Avoir une très bonne connaissance de l’environnement économique et financier de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) ; - Avoir une bonne connaissance de la réglementation et du fonctionnement du marché financier régional ; Il doit en outre avoir les atouts et/ou qualités ci-après : - Avoir un sens élevé de l’organisation et faire preuve d’une grande disponibilité ; - Avoir une excellente aptitude à diriger une équipe ; - Avoir d’excellentes capacités rédactionnelles ; - Etre familier avec les Technologies de l’information et de la Communication (TIC) ; - Avoir une bonne connaissance de l’anglais.

Directeur Général Adjoint, Secrétaire Général, Directeur de Département ou Directeur Central, etc.) acquise auprès d’un organe de régulation de marché, d’une bourse, d’une institution financière régionale ou internationale, d’une banque ou de tout autre organisme financier public ou privé est requise


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Date limite de réception des dossiers de candidature : 19 novembre 2012.

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Ces postes sont tous basés à Paris. Les personnes intéressées peuvent consulter leur descriptif détaillé à l’adresse : http://www.francophonie.org/-Recrutements-.html

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Vous & nous

Le courrier des lecteurs Envoyez-nous vos réactions, vos réflexions, vos coups de gueule ou de cœur à redaction@jeuneafrique.com ou au 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris.

Guerre Le Tchad a donné C’EST AVEC BEAUCOUP D’INTÉ RÊT que j’ai lu l’article « Opération Tombouctou », paru dans J.A. no 2699, daté du 30 septembre au 6 octobre, qui évoque l’éventuelle évo participation du Tchad par l’envoi d’une force à l’ militaire au Nordmi Mali. J’ignore pour Ma quelles raisons le qu conseiller militaire co français abondamfr ment cité affirme me que « l’armée tchadienne est solide ». Ce dont je suis sûr ! J.A. N 2699, en revanche, c’est du 30 septembre q u e l e Tc h a d au 6 octobre. demeure encore un pays fragile, avec une armée très peu structurée. Les autorités tchadiennes devraient donc se consacrer en priorité à la résolution de leurs problèmes internes (inondation, famine, grogne sociale, etc.) plutôt que de s’associer à l’envoi d’une force militaire au Nord-Mali. Les représailles islamistes pourraient se révéler fâcheuses pour notre pays, qui a assez donné dans les guerres fratricides. ●

ressort de l’UA, la Cedeao étant chargée de prendre les sanctions économiques en amont ou durant les hostilités. Sauf que l’UA, pourtant dotée d’un Conseil de sécurité, est absente de l’actualité malienne. À quoi sert-elle donc, elle qui n’a jamais su activer « l’exceptionnelle urgence diplomatique » ? Aller en guerre contre les occupants du Nord-Mali, d’accord. Mais avec quelles armes ? Le concours (un temps envisagé) de l’ONU semble un peu trop circonscrit, lorsqu’il n’est pas carrément hésitant. Une plus grande implication de l’UA est donc souhaitable : la Cedeao n’a pas vocation à mener une guerre ! ● IBRAHIM BA, Paris, France

O

MINA NGANDOHO, N’Djamena, Tchad

RD Congo Pertinente analyse COMPTANT PARMI vos plus fidèles lecteurs, j’ai été impressionné par la pertinence de votre analyse dans l’article consacré à l’opposition congolaise (« Le Plus de Jeune Afrique », J.A. no 2700, du 7 au 13 octobre). Pour mieux s’en convaincre, il suffit de regarder cette opposition évoluer : chacun des leaders cherche d’abord à se positionner, l’intérêt de la nation n’étant pas la première de leurs préoccupations. Je m’en étais déjà ému sur ma page Ateliers des médias de Radio France Internationale (RFI), m’interrogeant sur l’aveuglement de ladite opposition… ●

! DEUX CENTS EXEMPLAIRES de la collection Mamadou Seck, à Brazzaville.

Collection Le compte est bon TOUT JUSTE POUR APPLAUDIR et encourager votre hebdomadaire, qui nous aide tant en nous communiquant différents types d’information. J’en fais collection depuis le numéro 2500, daté du 7 au 13 décembre 2008, et totalise à ce jour, le nombre impressionnant de 200 exemplaires de Jeune Afrique, dont le n° 2700, du 7 au 13 octobre 2012. ● MAMADOU SECK, Brazzaville, Congo-Brazza

Mali Info contre intox UN GRAND MERCI pour votre magazine, que je ne trouve facilement qu’à Alger. À Tamanrasset et dans la région de Montbéliard, il n’est pas aisé de se le procurer. Un grand merci également pour votre dossier « Les nouveaux maîtres du Mali » (J.A. no 2698, du 23 au 29 septembre), qui m’a permis de séparer les vraies informations des rumeurs propagées en Algérie ou en France. S’agissant des « Plus de J.A. », ils permettent de suivre l’évolution des États sur le continent. Que de choses à dire encore! Mais je m’arrêterai là, en saluant une fois de plus le travail de toute l’équipe de J.A. ●

Cedeao-UA Imbroglio UNION AFRICAINE ! J.A. N 2700, (UA) et Communauté VERVEIN MTORO, du 7 au 13 octobre. économique des États de Kisangani, RD Congo MARIE JOURNIAC, Saulnot, France l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) sont-elles complémentaires ou interchangeables ? Dans l’absolu, la Cedeao Eto’o Précision. Après publication de notre confidentiel intitulé « Eto’o n’a de politique que l’intégration éconopatauge dans les télécoms » (J.A. no 2699, du 30 septembre au 6 octobre), mique. En revanche, la transformation Patrick-Alexandre Épée, ex-responsable marketing et communication chez de l’OUA (Organisation de l’unité afriEto’o Telecom SA, précise qu’il n’a jamais été licencié de l’entreprise, comme caine) en UA n’a en rien modifié son objet l’écrit J.A., mais qu’il a démissionné de ses fonctions. Il tenait à apporter cette éminemment politique. La levée de correction, qui, ajoute-t-il, ne modifie pas fondamentalement la problématique abordée dans l’article. Dont acte. LA RÉDACTION troupes pour mener une guerre décrétée devrait être, en toute logique, du seul O

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Vous nous

Tunisie Mieux vaut se taire CEUX QUI ONT SERVI l’ancien régime et ont choisi de se retirer de la vie politique – ou même simplement de se taire – méritent notre respect : ils ont assimilé les règles du jeu et agi en responsables. Mais opérer un revirement à 180 degrés simplement pour

apparaître comme le plus grand des démocrates constitue une offense non seulement aux martyrs de la révolution, mais à tous les Tunisiens, qui ont, d’une manière ou d’une autre, chèrement payé le printemps de la liberté. À bon entendeur, salut. ● FATHI TOUNAKTI, KiHammam-Lif, Tunisie

Israël Un article à charge J’AI LU AVEC ATTENTION l’article de Patrick Seale consacré à Uzi Arad, conseiller à la sécurité du Premier ministre israélien (« Docteur Folamour », J.A. no 2698, du 23 au 29 septembre), que je juge anti-israélien. Votre correspondant écrit notamment : « Si l’Iran ou un État arabe disposaient de la puissance nucléaire, Israël n’aurait pas attaqué J.A. NO 2698, le Liban en 2006, ni la Syrie en 2007, ni Gaza en 2008. » du 23 au Ah bon ? C’est bien dommage : la Syrie aurait peut-être sa 29 septembre. bombe atomique et les Israéliens continueraient de recevoir des dizaines de roquettes tous les jours. Patrick Seale a oublié la destruction de la centrale atomique Osirak ; Saddam Hussein aurait su quoi en faire lors de la guerre contre l’Iran. Selon Patrick Seale, la différence entre les pays arabes et Israël, c’est que, s’ils étaient attaqués, les premiers utiliseraient la dissuasion nucléaire, contrairement au second, qui aurait pu le faire depuis longtemps. C’est peut-être pour cela qu’ils ne doivent pas avoir la bombe ! Le chef des Gardiens de la révolution, le général Mohammad Ali Jafari, a récemment indiqué que si Israël attaquait les installations nucléaires iraniennes (ce qui est une attaque ciblée qu’on le veuille ou non), l’Iran rayerait Israël de la carte ! Et les Israéliens sont paranoïaques, d’après Patrick Seale… La dernière phrase de l’article enfonce le clou : « Mais [l’État hébreu] ne pourra pas survivre par le meurtre, la subversion, la domination et la guerre. » De qui parle votre journaliste ? De Pol Pot ? De Hitler ? À part Israël, je ne vois pas quel autre pays pourrait avoir « l’honneur » d’une telle fin d’article. ● JOËL CASTEL, Paris, France

Réponse

Notre collaborateur Patrick Seale a pris ici le parti d’explorer la vision d’un « super-faucon » du système sécuritaire israélien. Il souligne que la vocation démocratique d’Israël et son propre intérêt devraient le conduire à encourager la paix régionale plutôt que de recourir à l’action clandestine et militaire pour faire valoir une raison d’État édictée par les plus durs de cet État. Et ce n’est pas se montrer anti-israélien que de suggérer ce qu’Israël devrait faire « s’il veut survivre à long terme ». LA RÉDACTION JEUNE AFRIQUE

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HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL POLITIQUE, ÉCONOMIE, CULTURE

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Post-scriptum Fouad Laroui

Fondé à Tunis le 17 oct. 1960 par Béchir Ben Yahmed (53e année) Édité par SIFIJA Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS Tél. : 01 44 30 19 60 ; Télécopieurs : rédaction : 01 45 20 09 69 ; ventes : 01 45 20 09 67 ; Courriel : redaction@jeuneafrique.com DIRECTION Directeur de la publication : BÉCHIR BEN YAHMED (bby@jeuneafrique.com) Directeur général : Danielle Ben Yahmed Vice-présidents: Aldo de Silva, Danielle Ben Yahmed, François Soudan, Amir Ben Yahmed Actionnaire principal : Béchir Ben Yahmed

Au fou, au fou, lâchez les chiens!

RÉDACTION Directeur de la rédaction : François Soudan (f.soudan@jeuneafrique.com) Directeurs exécutifs : Marwane Ben Yahmed (mby@jeuneafrique.com), Amir Ben Yahmed (aby@jeuneafrique.com)

L

E CHEF DE L’EXTRÊME DROITE BATAVE, Wilders, vient de se signaler par une proposition inédite : pour chasser les Marocains (i.e. les musulmans) des quartiers où ils sèment, selon lui, l’insécurité, il suffit d’y lâcher… des chiens! Et l’expert ès islam de nous expliquer doctement que ces gens-là ont peur des chiens : c’est, paraît-il, dans « leur culture ». Ce piteux cynophile confond deux choses : le fait que certains musulmans considèrent les clebs comme des animaux impurs – ce qui est un peu bébête – et le fait d’avoir peur de certains chiens, ce qui est raisonnable : il vaut mieux craindre les pitbulls que crâner en leur présence et y laisser une main ou un bras, ou même la vie. Cette proposition qui se voulait innovante a été gâchée par une bévue de proportions bibliques du même chasseur d’Arabes. Wilders, qui se présente volontiers comme « le meilleur ami d’Israël » et pour qui la solution de la question palestinienne est simple (il suffit d’expulser tous les Palestiniens d’Israël et de Cisjordanie), vient de se faire méchamment moucher par… ses meilleurs amis. Yona Metzger, grand rabbin d’Israël, lui a adressé une lettre sévère le sommant de cesser de prôner l’interdiction de l’abattage rituel. De quoi s’agit-il ? Tout à sa haine de l’islam, Wilders s’est emparé de la question de l’abattage halal pour en faire un exemple de la sauvagerie des musulmans et de leur inadaptation aux valeurs européennes. Et de réclamer l’interdiction immédiate dudit abattage. Son ignorance crasse de tout ce qui n’est pas la bagnole (son seul hobby) l’a empêché de voir que les musulmans et les juifs sont sur ce point plus que des cousins: des alter ego. Ma mère me disait, quand j’étais petit : « Si tu es invité chez des juifs, tu peux manger tout ce qu’ils t’offrent. Tout est halal. » (J’aurais bien raconté cette anecdote à Wilders mais la seule fois où on lui a proposé un débat avec moi, il a répondu : « Je ne parle qu’aux gens de ma race. » J’étais pourtant prêt, moi, à parler avec un représentant de la race des crétins…) Sur un autre point, la circoncision, Wilders est tout aussi embarrassé. Il a proposé d’interdire la circoncision, coutume barbare selon lui. L’idiot a oublié de regarder dans le slip de ses meilleurs amis… On ne peut pas demander à un populiste, c’est-à-dire à quelqu’un dont le mensonge et l’ignorance sont les deux mamelles, de connaître l’histoire des Hébreux. Ne sont-ce point eux qui ont inventé, ou du moins ritualisé, la circoncision ? Peut-on interdire aux parents de Rachid de lui couper un bout de prépuce tout en autorisant ceux de Moshé à faire de même ? Allez faire avaler cela, si l’on ose dire, à un juge néerlandais, probablement catholique ou calviniste, et pour qui tous les zizis se valent. Bref, Wilders est dans l’embarras. Par pure charité laïque, nous lui donnons ce conseil : va jusqu’au bout, Geert : fais-toi antisémite, carrément! Antimusulmans, anti-Arabes, anti-Noirs, anti-Juifs, antiGitans, anti-tout, antithèse, antipathique… tu seras tout ! Gageons que tu auras alors les voix de tous les aigris, les ratatinés du bulbe, les méchants, les débiles et les ignorants du pays : cela fait quand même beaucoup de monde… ●

Rédaction en chef : Claude Leblanc (c.leblanc@jeuneafrique.com), Élise Colette (éditions électroniques, e.colette@jeuneafrique.com), Laurent Giraud-Coudière (technique, lgc@jeuneafrique.com) Conseillers de la direction de la rédaction : Hamid Barrada, Abdelaziz Barrouhi (à Tunis), Aldo de Silva, Dominique Mataillet, Renaud de Rochebrune Secrétariat : Chantal Lossou, Joëlle Bouzignac Chefs de section : Joséphine Dedet (La semaine de J.A.), Philippe Perdrix (Grand angle), Anne Kappès-Grangé (Afrique subsaharienne), Tarek Moussa (Maghreb & Moyen-Orient), Jean-Michel Aubriet (Europe, Amériques, Asie), Cécile Manciaux (Le Plus de J.A.), Séverine Kodjo-Grandvaux (Culture & médias), Clarisse Juompan-Yakam (Vous & nous) Secrétaires de rédaction : Sabine Clerc, Fabien Mollon, Ophélie Négros Rédaction : Pascal Airault, Youssef Aït Akdim, Stéphane Ballong, Pierre Boisselet, Julien Clémençot, Georges Dougueli, Malika Groga-Bada, Trésor Kibangula, Christophe Le Bec, Frédéric Maury, Nicolas Michel, Haby Niakate, Cherif Ouazani, Michael Pauron, Fanny Rey, Laurent de Saint Périer, Justine Spiegel, Tshitenge Lubabu M.K., Marie Villacèque ; collaborateurs : Edmond Bertrand, Christophe Boisbouvier, Frida Dahmani, Muriel Devey, André Lewin, Patrick Seale ; accords spéciaux : Financial Times Responsable de la communication : Vanessa Ralli (v.ralli@jeuneafrique.com) RÉALISATION Maquette: Marc Trenson (directeur artistique), Christophe Chauvin, Stéphanie Creuzé, Valérie Olivier; révision: Nathalie Bedjoudjou (chef de service), Vladimir Pol; fabrication: Philippe Martin (chef de service), Christian Kasongo; service photo: Dan Torres (directrice photo), Nathalie Clavé, Vincent Fournier, Claire Vattebled; documentation: Anita Corthier (chef de service), Sylvie Fournier, Florence Turenne, Angéline Veyret JEUNEAFRIQUE.COM Direction éditoriale : Élise Colette ; chefs d’édition : Pierre-François Naudé, Frédéric Maury (économie) ; rédaction : Vincent Duhem, Jean-Sébastien Josset, Mathieu Olivier, Benjamin Roger et Nicolas Teisserenc Responsable web : Jean-Marie Miny ; studio : Cristina Bautista et Maxime Pierdet VENTES ET ABONNEMENTS Directeur marketing et diffusion : Philippe Saül ; responsable des ventes adjointe : Sandra Drouet ; chefs de produit : Dhouha Boistuaud, Nawal Laadad ; abonnements : Vanessa Sumyuen avec: COM&COM, Groupe Jeune Afrique 18-20, avenue ÉdouardHerriot, 92350 Le Plessis-Robinson. Tél. : 33 1 40 94 22 22 ; Fax : 33 1 40 94 22 32. E-mail : jeuneafrique@cometcom.fr ●

COMMUNICATION ET PUBLICITÉ AGENCE INTERNATIONALE POUR LA DIFFUSION DE LA COMMUNICATION

S.A. au capital de 3 millions d’euros – Régie publicitaire centrale de SIFIJA 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 Paris Tél. : 01 44 30 19 60 Fax : 01 45 20 08 23/01 44 30 19 86. Courriel : difcom@jeuneafrique.com

Président : Danielle Ben Yahmed ; directeur général : Amir Ben Yahmed ; direction centrale : Christine Duclos ; direction du développement : Florian Serfaty ; secrétariat : Chantal Bouillet ; gestion et recouvrement : Pascaline Brémond ; service technique et administratif : Chrystel Carrière, Mohamed Diaf RÉGIES : Direction de la publicité : Laure Nitkowski, avec Catherine Weliachew, Virginie Vatin, Zehia Yahiaoui (directrice de clientèle), assistées de Patricia Malhaire ; annonces classées : Fabienne Lefebvre, assistée de Sylvie Largillière COMMUNICATION ET RELATIONS EXTÉRIEURES : Direction : Danielle Ben Yahmed ; directrice adjointe : Myriam Karbal ; chargées de mission : Nisrine Batata, Zine Ben Yahmed, Fatoumata Tandjan REPRÉSENTATIONS EXTÉRIEURES MAROC SIFIJA, NABILA BERRADA. Centre commercial Paranfa, Aïn Diab, Casablanca. Tél. : (212) (5) 22 39 04 54 Fax : (212) (5) 22 39 07 16. TUNISIE SAPCOM, Mourad LARBI. 15-17, rue du 18-Janvier-1952, 1001 Tunis. Tél. : (216) 71 331 244 ; Fax : (216) 71 353 522. SOCIÉTÉ INTERNATIONALE DE FINANCEMENT ET D’INVESTISSEMENT S.C.A. au capital de 15 millions d’euros Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS | RCS PARIS B 784 683 484 TVA : FR47 784 683 484 000 25

Gérant commandité: Béchir Ben Yahmed; vice-présidents: Aldo de Silva, Danielle Ben Yahmed, François Soudan, Amir Ben Yahmed Directeur général adjoint: Jean-Baptiste Aubriot; secrétariat: Dominique Rouillon; contrôle de gestion: Sandrine Razafindrazaka; finances, comptabilité: Monique Éverard et Fatiha Maloum-Abtouche; juridique, administration et ressources humaines: Sylvie Vogel, avec Karine Deniau (services généraux) et Delphine Eyraud (ressources humaines); Club des actionnaires: Dominique Rouillon IMPRIMEUR SIEP - FRANCE. COMMISSION PARITAIRE: 1016C80822. DÉPÔT LÉGAL: À PARUTION. ISSN 1950-1285.

Ce numéro s’accompagne d’un encart abonnement sur une partie de la diffusion. N o 2701 • DU 14 AU 20 OCTOBRE 2012

JEUNE AFRIQUE



Leader du secteur bancaire panafricain 2012 Africa Investor Meilleure équipe de recherche en Afrique – Ecobank Capital Euromoney Meilleure banque en Afrique – Groupe Ecobank Meilleure banque du Ghana – Ecobank Ghana

2010 Trophée Africa Investor-UNIDO Banque de l’année Trophée African Banker Banque la plus innovante de l’année : Alliance Ecobank / Nedbank

Trophées African Banker Meilleure banque en Afrique – Groupe Ecobank

Trophée Reporting Financier d’Africa Investor Meilleur reporting financier

Global Finance Meilleure banque régionale d’Afrique – Groupe Ecobank Meilleure banque des marchés émergents : Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Guinée, Sénégal, Togo

Trophée The Banker (Financial Times) Banque de l’année dans 11 pays Burkina Faso • Cameroun • Congo (Brazzaville) • Ghana • Guinée • Libéria Mali • Niger • République Centrafricaine • Tchad • Togo

2011 Trophée Emea Finance des Meilleures Réalisations Meilleure émission d’obligation en monnaie locale – République du Tchad Meilleure transaction portant sur une institution financière – Oceanic Bank (Nigeria) Trade Finance Opération de l’année 2011 – Financement structuré accordé à Suneor S.A. (Sénégal) Euromoney Meilleure banque en Afrique – Groupe Ecobank Meilleure banque du Ghana – Ecobank Ghana

2009 Trophée African Banker Banque africaine de l’année IFC, Membre du Groupe de la Banque mondiale Prix du leadership des clients de l’IFC Trophée The Banker (Financial Times) Bénin • Burkina Faso • Cameroun • Côte d’Ivoire • Libéria • Mali • Niger République Centrafricaine • Sénégal • Tchad • Togo

EMEA Finance Meilleure banque d’investissement dans 4 pays Côte d’Ivoire • Cameroun • Gabon • Tchad Meilleure banque de Côte d’Ivoire Africa Investor Meilleure équipe de recherche en Afrique – Ecobank Capital Trophée The Banker (Financial Times) Banque de l’année dans 9 pays Burkina Faso • Burundi • Congo (Brazzaville) • Guinée Bissau • Mali Niger • République Centrafricaine • Sénégal • Togo

Ecobank a été élue meilleure banque africaine de l’année 2012 par :

Trophée African Banker Institution/projet de microfinance de l’année EB-Accion Saving and Loans Company Ghana

Ecobank est présent dans plus de pays africains qu’aucune autre banque au monde Bénin • Burkina Faso • Burundi • Cameroun • Cap-Vert • Congo (Brazzaville) • Congo (République Démocratique) • Côte d’Ivoire • Gabon • Gambie Ghana • Guinée • Guinée-Bissau • Kenya • Libéria • Malawi • Mali • Niger • Nigeria • Ouganda • République Centrafricaine • Rwanda • São Tomé e Príncipe Sénégal • Sierra Leone • Tanzanie • Tchad • Togo • Zambie • Zimbabwé Présence internationale : Dubaï • Johannesburg • Londres • Luanda • Paris

www.ecobank.com


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