Al lemag ne 9€ • Be lg iqu e9€ • Ca nad a1 2,9 9$ CA N Es pa gn e9€ • Fr an ce 7, 90 € • DO M9€ • It alie 9€ Mar oc 50 MAD • Mau ri ta nie 20 0M RU • Pay sBa s9 ,2 0€ Po rt uga l9 € • RD Co ngo 10 USD • Suis se 15 CH F Tu nisie 8T DN • TO M1 000 XP F • Zo ne CF A4 800 FC FA IS SN 19 50 -1 28 5 Nwww.jeuneafrique.com O 3116 –SEPTEMBRE 2022 GUINÉE ALPHA CONDÉ Derniers secrets d’un exilé MAROC AKHANNOUCH An I Le vrai bilan : H I K L T D = [ U \ ^ U ^ : ? d @ b @ l q @ a M0 1936 -3 11 6F: 7,90 E -R D TCHAD CONTINUITÉ OU NOUVELLE ÈRE? SPÉCIAL 22 PAGES FRANCE-RUSSIE LA GUERRE INVISIBLE Comment Paris tente de contrer l’emprise grandissante de Moscou et de ses agents d’influence en Afrique francophone. Enquête exclusive. OCÉAN INDIEN Un pour tous, tous pour un 10 pages
valeur localement. JEUNE AFRIQUE N°3116 SEPTEMBRE 2022100
Bénin, filiale du holding nigérian Tropical General Investment, à Zogbodomey, en 2017.
Tout faire chez soi, mode d’emploi
JA CQUES TO RREGANO POUR JA
Dossier Agrobusiness
THÉO DU COUËDIC la
Parcs agro-industriels, agropoles, zones économiques spéciales… Côte d’Ivoire, Sénégal, Bénin, Togo misent sur ces espaces pour transformer leurs ressources naturelles en produits finis. Objectif : créer de
Usine de décorticage d’anacarde de Fludor
P
« Le développement de la transformation agricole passe par la renais sance des industries existantes, comme la Sonacos, et par la création de nouvelles usines », juge Modou Diagne Fada, le directeur général de la société, qui voit dans le marché local de l’huile un créneau porteur.
JEUNE AFRIQUE N°3116 SEPTEMBRE 2022 101
diversifierl’économieenaugmentant la production agricole et en l’orientant vers le marché local pour créer un cercle vertueux », souligne-t-il.
La question du débouché est un autre point de débat. Faut-il privilé gier les cultures pour l’export ou, au contraire, les productions vivrières destinées au marché local, voire régional? Pour Matthieu Brun, direc teur scientifique de la Fondation pourl’agricultureetlaruralitédansle monde (Farm), spécialisée de longue date sur les questions agricoles en Afrique, le modèle des agropoles tournées à 100 % vers l’exportation a montré ses limites. « Le mot clé, c’est la souveraineté alimentaire. Pour les nouvelles zones de transformation agricole, l’enjeu est d’accompagner les petites exploitations familiales par le biais de la création de filières, d’accès aux intrants, de sécurisation du domaine foncier… En somme, de
« Pour que cela fonctionne, il faut une firme leader, un grand donneur d’ordre autour duquel se créera un écosystème, un peu comme Airbus à Toulouse dans le domaine aéronautique », insiste Sidy Diop, analyste économique spécialiste de l’Afrique chez Deloitte France. En Afrique de l’Ouest, il cite l’exemple des Grands Moulins de Dakar (GMD, cédés en 2018 par le groupe Mimran au géant américain Seaboard), moteur d’un marché de la farine, qui s’est for tement développé, et, en Afrique centrale, celui d’Olam, au Gabon, qui investit depuis vingt ans dans l’agriculture, les forêts, le transport, la logistique et la santé, entraînant sous-traitants et autres PME dans son sillage.
Au Togo et au Bénin, où se développent respectivement les zones d’Adétikopé et de Glo-Djigbé, les gouvernementsontnouéunpartenariat avec Arise Integrated Industrial Platforms (Arise IIP). Spécialisé dans les plateformes logistiques et indus trielles, ce groupe a été fondé et reste dirigé par Gagan Gupta, l’ancien patron d’Olam au Gabon. L’idée ?
Export ou marché intérieur?
arcs agro-industriels, agropoles, zones économiques spéciales… Les infrastructures visant à transformer localement les produits agricoles pour générer davantage de valeur ajoutée connaissent un regain de vitalitésurlecontinent,enparticulier en Afrique de l’Ouest. Togo, Bénin, Nigeria, Côte d’Ivoire, Sénégal, et même le Gabon, en Afrique centrale, se sont engagés dans cette voie.
Maximiser la valeur des ressources naturelles (coton, noix de cajou, soja, céréales, fruits tels que la mangue ou l’ananas) en les transformant locale ment, dans l’objectif de les exporter dans le monde entier. À cette fin, Arise propose un forfait clé en main à des investisseurs, notamment étran gers, afin de les inciter à lancer des activités sur place.
« AuTogoetauBénin,celacréeraplusieurs milliers, voire des dizaines de milliers d’emplois directs, auxquels s’ajouteront des emplois indirects dans un certain nombre de pôles de services : entreprises d’intérim, usines de fourniture de pièces détachées, d’emballage, de maintenance technique,detraitementdesdéchets, de transport du personnel », explique Pierre Ricau, analyste de marchés
une erreur », estime le fondateur de Label d’or.
chez Nitidæ. Le gouvernement togo lais, qui fonde également des agropoles, espère que 40 % des produits agricoles du pays seront transformés sur place d’ici à 2030
Si son point de vue est assez largement partagé, d’autres voix défendent une approche plus nuancée, pariant sur un juste équilibre entre la production destinée à l’export et celle destinée à la consom mation locale. C’est le chemin que semble emprunter la Côte d’Ivoire. Premier transformateur mondial de cacao, avec six usines en activité (et deux autres en cours de création) situées à proximité des ports d’Abi djan et de San Pedro, le pays est en
Les pays de la région affichent de grandes ambitions, d’autant que leurs systèmes alimentaires ont été éprouvés par les conséquences de la pandémie de Covid-19 puis par celles de la guerre en Ukraine Ils sont notamment soutenus par la Banque africaine de développe ment (BAD) à travers le programme « Nourrir l’Afrique 2016-2025 ». Alors que les annonces de nouveaux investissements se multiplient, dif férents modèles sont expérimentés. À l’évidence, États et acteurs privés cherchent encore la bonne formule.
« Confier notre destin agricole à des entreprises étrangères est
Ce modèle, en plein essor depuis l’annonce de la création, d’ici à la fin de l’année, de zones dans les deux Congos, au Sénégal et au Rwanda, ne fait toutefois pas l’unanimité. « Confier notre destin agricole à des entreprises étrangères est une erreur », affirme ainsi Gustav Bakoundah, fondateur de l’entreprise agroalimentaire biologique Label d’or. « Au Togo, la plateforme d’Adétikopé s’approprie des filières de transformation, comme le soja ou le coton, qui ont déjà été dévelop pées par des [entrepreneurs] locaux, ce qui engendre de la concurrence », estime-t-il. L’entrepreneur togolais recommande plutôt d’aider, sur des filières spécifiques, une poignée de leaders nationaux autour desquels pourraient se développer des chaînes de valeur agricoles. « C’est ce qu’a fait Olusegun Obasanjo, l’ancien président du Nigeria, en soutenant des champions émergeant dans les secteurs de la banque, de l’assurance, de la cimenterie, du pétrole et de l’agriculture, reprend-il. Aujourd’hui, ce sont les Nigérians eux-mêmes qui développent leur économie. »
Au Sénégal, l’huilier Sonacos compte bien tenir ce rôle dans le secteur de l’arachide, à condition que le gouvernement s’engage dans une vaste réhabilitation de son outil de
production, aujourd’hui obsolète.
Leaders nationaux
GO/REUTERS
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Plateforme industrielle d’Adétikopé, au Togo
Chargement de sacs de cacao à destination de Soubré, en Côte d’Ivoire (ici, en janvier 2021).
Enfin, les difficultés se situent également à l’échelle locale. Accès aux engrais, problèmes de stockage, défaillance des infrastructures routières, aléas climatiques… Les obstacles sont nombreux avant même que débute le processus de transformation, lequel implique à son tour un accès au foncier, des financements, un savoir-faire industriel… « L’enjeu de la transformation agricole, ce sont les infrastructures. Pour transformer un produit, il faut un tissu industriel et de la logistique », conclut Ollo Sib, analyste au Programme alimentaire mondial (PAM), qui appelle à investir sur l’ensemble de la chaîne de valeur agricole.
Transports et formation Parallèlement, l’exécutif a lancé un programme de neuf agropoles misant sur l’essor des cultures vivrières destinées à la consomma tion locale. Objectif : augmenter le taux de transformation industrielle des produits, améliorer les revenus des producteurs et créer des emplois. Pour faciliter leur déploiement, le gouvernement envisage d’investir dans les infrastructures de trans port et dans la formation Ces efforts reposent sur une politique écono mique volontariste « Le gouverne ment ivoirien applique des taxes à l’exportation pour des matières premières telles que le cacao ou la noix de cajou. En même temps, il soutient les investissements destinés à la transformation de ces produits sur des durées allant de dix à quinze ans », explique Pierre Ricau, pour qui les investisseurs doivent pouvoir compter sur « une vision à long terme »
La transformation de la noix de cajou attire, entre autres, des investisseurs ivoiriens, israéliens, chinois, libanais, vietnamiens; une vingtaine d’usines sont en construction, avec pour chacune environ 500 emplois directs à la clé. Sans oublier l’alliance que la Côte d’Ivoire a conclue avec le Ghana sur le cacao (60 % de la production mondiale à eux deux) pour peser davantage face aux ache teurs internationaux et instaurer un prix plancher pour les producteurs locaux.
toutes les récoltes à l’avance », rap pelle Sidy Diop, du cabinet Deloitte. Selon lui, il faudrait réfléchir à la transformation locale dans un contexte de concurrence mondiale. Car, s’agissant du volet industriel, force est de constater que le Sénégal a un train de retard sur les nations asiatiques. Ces dernières transforment les mêmes produits que lui, mais avec des coûts de production bien plus bas et avec du personnel mieux qualifié. « Il faudrait faire une étude par produit afin de mesurer l’avantage comparatif de chaque pays, puis créer une politique incitative pour attirer des investisseurs privés », suggère Pierre Ricau.
Quels que soient la culture et le modèle choisis, la mise en œuvre demeure délicate. Au Sénégal, où dans chaque zone du pays se déve loppent des agropoles destinées à dynamiser les ventes sur le marché local, le secteur de l’arachide, par exemple, se heurte aux contraintes du marché international. « À la fin de 2020, la filière n’avait pas assez de graines à transformer car les étrangers, Chinois en tête, avaient acheté
outredevenu,enl’espacedecinqans, le troisième transformateur mondial de noix de cajou. Dix-huit usines, réparties entre les pôles industriels d’Abidjan, de Yamoussoukro et de Bouaké, tournent à plein régime. Elles n’étaient que deux en 2017
LU C GNA
Le Broyeur à Cylindres Similago II, produit à plus de 1500 unités, et mis en marche partout dans le Monde. winner 2017 Assemblage intelligent et rapide sur site Transport et livraison vite et optimal Plus de 1.000 bâtiments installés en Afrique Bâtiments 100% galvanisés, fabriqués en Belgique selon la norme Européenne FrisomatAfrique |+32 3353 33 99 |info@frisomat.africa | www.frisomat.africa NATEMA Madagascar (Givaudan) –Huile de giroflier CaoutchoucsduPakidie5000m2 -DabouCôted’Ivoire BÂTIMENTSPRÉFABRIQUÉS
Mais les chiffres sont là : des 70 000 tonnes de fèves broyées annuellement sur le site sortent 10 000 tonnes de chocolat. L’usine, qui emploie 1 000 salariés et mobilise un réseau de 60000 planteurs, réalise environ 230 millions d’euros de chiffre d’affaires par an. « Nous sommes un petit acteur, le volume de nos achats de fèves ne représente que 3 % du marché national, mais nous maîtrisons toute la chaîne de valeur », souligne Lona Ouali, direc teur général de Cémoi Côte d’Ivoire depuis bientôt trois ans.
Avec son chocolat made in Côte d’Ivoire, la marque française relève le défi de la transformation locale. Mais pas encore celui de la rentabilité.
Cémoi, un goût mi-sucré mi-amer
Implanté dans le pays depuis 1996, le groupe y a développé un modèle
ESTELLE MAUSSION
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CEMOI
CACAO
Cacao en poudre, carrés pour le café, bâtons boulangers, pâte à tartiner, et peut-être bientôt noix de cajou et mangues confites enrobées : la principale réussite de Cémoi est de démontrer qu’il est possible de
réaliser sur place toute une gamme de produits chocolatés. Il y a sept ans, au moment de l’ouverture de l’usine (qui représentait un investissement de 8 millions d’euros), beaucoup en doutaient.
de proximité éprouvé en Amérique du Sud par sa filiale Kaoka. Il est ainsi présent sur le terrain aux côtés de coopératives affiliées et partenaires, assurant soutien technique, formation et paiement d’une prime de qualité de 120 F CFA le kilo (0,18 euro). Cela lui permet de garantir la traçabilité des fèves qui arrivent à son usine, où elles sont contrôlées avant d’être traitées et transformées en pâte, beurre et poudre de cacao.
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Si la majeure partie de cette production est exportée en Europe pour alimenter les autres sites du groupe, le reliquat continue son chemin dans la chocolaterie (aux normes internationales) qui jouxte l’usine et ressort sous forme de produits finis, vendus en Côte d’Ivoire ainsi qu’au Sénégal, au Burkina Faso, au Mali, au Bénin, au Gabon et en République centrafricaine.
Unité de production de chocolat, à Abidjan.
Gamme de produits
epuis 2015, l’usine du chocolatier français Cémoi, installée dans la zone industrielle de Yopougon, à Abidjan, produit des tablettes de chocolat à partir de cacao récolté dans le pays. Alors que tous les mastodontes du secteur (Cargill, Barry Callebaut, Olam…) sont présents en Côte d’Ivoire, premier producteur mondial de fèves, seuls deux acteurs ont franchi le cap de la confection locale de produits finis : Cémoi, racheté en juillet 2021 par le groupe belge Sweet Products, et Professional Food Industry (PFI), la filiale du groupe ivoirien Satoci. Certes, les volumes sont modestes puisque le pays ne transforme (au premier stade du broyage, majoritairement) qu’un tiers de sa production annuelle, laquelle s’élève à 2 millions de tonnes. Pourtant, le gouverne ment a rappelé en juin son ambition de voir, d’ici à 2025, au moins 50 % de la production locale trans formée sur place. Dans ce contexte, l’expérience Cémoi peut-elle servir de référence? Aussi encourageante soit-elle, elle témoigne des défis que doit relever un secteur obligé de se réformer s’il veut être plus durable, mieux résister aux variations des cours mondiaux des matières premières et être davantage rémunérateur pour les producteurs.
La croissanceetles investissements d’Olam Agri dans les chaînesdevaleuragricoles africaines nous ont permis de voir, de comprendre et de répondreaux défis et aux oppor tunités. Notreprésencesur le terrain tout au long de l’année au contact des communautés explique notreapproche concrèteetpratique du soutienà des centaines de milliers d’agriculteursdans leursopérations de plantation, d’entretien et de récoltedeleurscultures.
Les défis que connaissent lessecteursdel’alimentation et de l’agricultureenlien avec l’adaptation au changement climatique,l’augmentation de la production pour satisfaire des populations mondiales en croissanceetl’amélioration des moyens de subsistancedes communautés agricoles restent pressants et ont été rendus encoreplus évidents par lesimpacts sur leschaînes d’approvisionnementmondiales du récent conflit russo-ukrainien, àunmoment où l’Afrique, et le restedumonde, ne se sont pas complètementremis des conséquences économiques et sociales du COVID-19
www.olamagri.com COMMUNIQUÉ JAMG -©D .R.
Olam Agri aune longuehistoireetdes racines profondes en Afrique. Depuisque nous avons commencénos opérations sur le continent il yaplus de trois décennies,nousavons été lestémoins du développement et de la transformation des économiesagricoles dans toutel’Afrique.Cependant, nous sommes convaincusque lessystèmes agricoles du continent n’ont pas encoreatteint leur potentielmaximal.
Nous nous concentronssur l’autonomisation desagricul teursà fairemieux poureux-mêmesenleur donnant accèsaux connaissances, aux intrants,àlaformationetaux marchés pourleur permettred’augmenter lesrendements, d’améliorer la qualitédes cultures, d’adopter despratiques agricoles plusdurables et d’améliorerleursrevenus.Nos activités se focalisent sur des actions qui génèrent un impact réel et durablepour lesagriculteurs, lescommunautés et leschaînes de valeur.
Lesprix des cultures vivrières, en particulier le blé et le riz, des aliments de base largementconsommés, ont augmenté de 60 %aucoursdel’année écoulée. Pour répondre aux besoins des communautés agricoles àtravers l’Afrique, Olam Agri contribueàsoutenir la sécuritéalimentaireen soutenantces deuxdenrées tout particulièrement. Au Ghana, nous sommes associés àl’Agencedeprotection de l’environnementdupaysetàlacommunautédes boulangerspourplanter de jeunes plants dans le nordduGhana afin d’augmenterlerendementdes cultures et étendre la zone cultivée. Pendantleur séjour au Nigeria, nous tirons parti de l’expertise scientifique du Centreinternational de recherche agricoledans leszones arides(ICARDA), pour élaborerune feuillederoutede10ans pour la production de semences résistantes àla sécheresseafin de créer des entreprises semencièrescommunautaires pour que les agriculteurs nigérians augmentent leur productiondeblé
Les individus sont au cœur de notreréussiteetentant que multinationaletravaillant dans la région,nous nous concen tronsfortement sur le développement des talents locaux et le renforcement des capacitéssur l’ensembledenos opérations, quecesoit par le biais de recrutements rigoureux et de programmes de stagiaires diplômés. Cela aété reconnu par de multiples distinctions et certifications du TopEmployerInstitute pour l’excellencedes pratiquesRHpourla région Afrique et en particulier pour lesopérations d’Olam Agri en Côted’Ivoire, au Ghana, au Nigeria et en Afrique du Sudsur les2dernièresannées
En 30 ans, nous avonsétabli une relation extraordinaireà traverslecontinent entreOlam Agri, lesgouvernements, lesagriculteursetles communautés. Nous croyons que le besoin de partenariat et pas seulement de collaboration, est maintenant plus clair que jamais. Ce n’estqu’en continuant àtransformer en profondeurlesecteur agricoleque nous pourrons construireensembledes systèmes alimentaires résilients qui profitent aux personnes, aux communautés, aux économiesetaux paysages africains.
En Afrique,lacroissancedes revenus associéeàune croissancedémographique rapide alimentent la demandealimentairealors que la production, elle, n’a pas suivi le même rythme.Mais lespolitiques gouvernementales, lesinvestissements, l’innovation technologique et lespartenariats public-privérendent lessystèmes agricoles africains plus efficaces, inclusifs, résilientsetdurables.
En outre, le statut particulier du groupe un chocolatier de taille modeste sur un marché dominé par des géants du négoce demeure un handicap. Il est par exemple soumis, comme tous les acteurs, au système de couverture des contrats à long terme alors que, pour conquérir de nouveaux marchés, il aurait besoin de flexibilité et de pouvoir honorer des contrats à court terme
Le dernier obstacle à surmonter, et non des moindres, tient à la dif ficulté de construire une expansion sous-régionale.Barrièresdouanières, contraintes logistiques, coût de l’ap provisionnement en sucre (composant indispensable des recettes) rendent l’ouverture de nouveaux marchés lente et complexe. « Force est de constater que les règles douanières en vigueur encourageant le commerce ouest-africain ne sont pas appliquées. Sinon, il n’y aurait pas autant d’obstacles qui nous empêchent, dans les faits, de vendre au Nigeria par exemple », conclut Lona Ouali.
Pour convaincre les consommateurs africains, il faut créer des recettes adaptées à leurs habitudes alimentaires.
DOSSIER AGROBUSINESS
« Notre modèle combine transparence de l’approvisionnement, qualité du produit et juste rémunéra tiondesproducteurs,lemaillonfaible de la chaîne aujourd’hui. Il répond ainsi aux exigences des autorités locales, qui souhaitent redonner du pouvoir aux planteurs, et à celles de l’Europe,quiappelleàlaconstruction d’une filière plus durable », reprend LonaOuali,anciendeBarryCallebaut qui a rejoint Cémoi en 2008.
demeure faible, et variable d’un pays à l’autre. Si elle atteint en moyenne 1 kilo par an et par habi tant au Sénégal et au Cameroun, le chiffre tombe à 150 grammes en Côte d’Ivoire.
Production bio
L’usine qu’il dirige a aussi été la première dans le pays à se lancer dans la production de cacao bio, sur une surface toutefois modeste (10 ha). Elle a également testé avec succès le paiement par voie électronique des coopératives, une innovation que les grands acteurs du secteur se sont engagés à adopter afin de limiter les pratiques opaques. Actions de reboisement et promotion de l’agrofores terie font aussi partie de l’ADN du groupe.
Malgré ces points positifs, l’expérience Cémoi a ses limites. La plus importante : les volumes de ventes, encore trop modestes pour atteindre la rentabilité. « Il nous faut augmenter considérablement nos ventes, en particulier locales, en développant des produits de qualité qui restent malgré tout accessibles », résume Lona Ouali, qui table sur un quintu plement de la consommation dans les dix prochaines années.
Cémoi doit aussi inventer de nouvelles recettes adaptées au climat et aux habitudes alimentaires locales. Cela signifie, par exemple, favoriser les produits à base de poudre de cacao, plus digestes lorsqu’il fait chaud, au détriment de ceux contenant du beurre. Ou encore remplacer les noisettes par des noix de cajou dans la pâte à tartiner.
Or, malgré l’essor de la classe moyenne et l’émergence d’une appétence pour le chocolat dans la sous-région, la consommation
Un important travail doit aussi être réalisé s’agissant des formats, des contenants etdes canauxdedistribution, un point sur lequel le groupe a investi en poussant ses produits dans les supermarchés, supérettes et boutiques de quartiers. « C’est coûteux et difficile en raison de la forte concurrence des produits importés, qui sont de moindre qualité mais aussi moins chers », concède le directeur général de Cémoi.
Autre écueil, l’essor du modèle Cémoi reste tributaire de la stratégie cacao déployée par les pouvoirs
publics. Pour le chocolatier, les incitations (notamment fiscales) et les mesures prises vont dans le bon sens, encourageant les implanta tions d’usine et les investissements visant à augmenter les capacités de broyage.Mêmeconstatpourletravail effectué par le régulateur du secteur, le Conseil café-cacao. Néanmoins, la modernisation doit se poursuivre, en particulier dans deux domaines délicats mais cruciaux pour Cémoi : la consolidation des coopératives et la suppression des intermédiaires. Une bataille loin d’être gagnée.
Protéines durables, produits premium, nouvelles technologies… Pour valoriser les richesses agricoles du continent, ces trois patrons misent sur l’innovation.
S DR 1 2 3 JEUNE AFRIQUE N°3116 SEPTEMBRE 2022 107 DOSSIER AGROBUSINESS
Durant ses études à Harvard, en 2017, Nzewi a en effet constaté que la filière de l’huile végétale nigériane était peu efficace, les fabricants se heurtant à deux problèmes : la mauvaisequalitédelamatièrepremièreet despertesaucoursdelacollecte Pour évitercesécueils,lastart-upacréé:un outil de géolocalisation permettant d’identifierlesusineslesplusproches des producteurs (ou de déterminer le meilleur endroit où implanter une usine en fonction de la production); une technologie facilitant le cassage de la noix, utilisée dans une usine d’Uyo; un logiciel aidant les producteurs partenaires à gérer leurs stocks.
1 GUSTAV BAKOUNDAH Jus Délice (Togo)
À la tête, depuis 2012, de Label d’or, le principal producteur et exportateur de produits bio au Togo, Gustav Bakoundah crée, en 2017, Jus Délice, spécialisé dans la transformation d’ananas bio. « Il fallait se positionner sur un produit premium pour se distinguer de la concurrence et trouver une solution au gaspillage des récoltes », explique le PDG, qui s’appuie sur un réseau de 7500 agriculteurs organisés en coopératives et répartis dans les filières ananas, papaye, mangue et oléagineux.
MAUREEN SONGNE
Diplômé de HEC Montréal en 2021, passé par le groupe pharmaceutique MediPro Pharma et par le géant GSK, Mohamed Derdour décide, dès 2020, de se lancer dans le business de l’éle vage d’insectes, l’entomoculture, en créant sa start-up EntomoNutris.
Riches en protéines, en acides gras essentiels et en minéraux, les insectes présentent un fort apport nutritif. « Leur élevage requiert cent fois moins d’espace et 2 200 litres d’eau de moins que celui du bétail », souligne Derdour, ce qui en fait une solutiondurablepourassurerlasécurité alimentaire.
La start-up, qui vend en Europe, compte s’attaquer au marché amé ricain, élaborer d’autres produits (confitures, fruits séchés), et se lancer dans la transformation des noix de karité et des graines de soja, également produites par les exploitants du réseau Label d’or.
START-UP
Les jeunes pousses veillent au grain TO
Moringa, un fonds d’investisse ment actif en Afrique subsaharienne et en Amérique du Sud, se rapproche de la société en 2018 et entre à son capital en y injectant 2,6 millions d’euros. L’investissement a servi à la construction d’une usine moderne de transformation. Résultat, Jus Délice produit 4 millions de litres de jus d’ananas par an, envoyés par voie maritime en fûts de 220 litres aux industriels embouteilleurs, traders et autres clients. Depuis 2020, l’entreprise double chaque année son chiffre d’affaires, qui devrait atteindre 4,2 millions d’euros cette année.
Élue meilleure start-up de l’année dans trois concours d’entrepreneuriat marocain en 2022, EntomoNutris produit, dans un centre pilote à Marrakech, de la farine d’insectes pour l’alimentation animale. Elle élabore aussi des biofertilisants destinés à l’agriculture, à l’aquaculture et au jardinage. La start-up espère commercialiser 60 % de ses produits au Maroc et 40 % sur le marché nord-américain.
3 IKENNA NZEWI Releaf (Nigeria)
2 MOHAMED DERDOUR EntomoNutris (Maroc)
Industrialiser la transformation alimentaire grâce à la technologie, c’est le rêve d’Ikenna Nzewi, PDG de Releaf, une start-up nigériane qui développe des solutions mettant en relation agriculteurs et usines agroalimentaires.
PHO
Enl’espacededix-huitmois,Releaf atisséunréseaude1000petitsexploitants, qui fournissent aux usines plus de 10000 t de noix. Après avoir collecté plus de 4 millions de dollars auprès de différents investisseurs, la start-up mise sur l’amélioration des équipements des usines et projette d’étendre son modèle à d’autres produits agricoles.