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Ce que nous réserve2023
Nouveau pacted’actionnaires pour le Simandou, cryptomonnaie dans l’uranium namibien, accélération de l’exploitation des ressourcesalgériennes…L’année s’annonce riche en avancées décisives.
DAVIDWHITEHOUSE,JULIEN CLÉMENÇOT,BAUDELAIREMIEU, AREZKI SAÏD,EMRE SARI,STANIS BUJAKERATSHIAMALA
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Après plusieurs années difficiles entre les autorités zambiennes et les miniers, l’arrivée du président Hakainde Hichilema aété un soulagement pour les industriels. Ici, le puits Henderson de la mine de Mufulira, exploitée par Mopani Copper Mines Plc, en mai 2022.
Cuivre, lithium,graphite, cobalt…Latransitionénergétiquemondialeaentraîné une augmentation des besoins en minerais.Or, si l’Afrique possède,selon lesestimations, 30 % desréserves minéralesmondiales, de nombreuses régions restentsous-explorées. Même le cuivre, pour lequel lesperspectivesàcourt termesont mitigéesenraison du ralentissement de l’économie mondiale,devrait renoueravecdes perspectivessolides àmoyen terme :latransitionénergétique induira 50 %delacroissance de la demande mondiale du minerai au coursdes cinq prochainesannées, notamment pourl’énergie éolienne et l’amélioration desréseaux nationaux africains, selonles analystes de Fitch Ratings.
L’or,quant àlui, conserve sonrang de valeur refuge, et sonexploitation resteparticulièrement attractive.L’exploration, en revanche,est devenue beaucoupplus précaire, les grandessociétés minières ayant de plus en plus tendance àconfier les travauxàdepetitessociétésextérieures,cequi augmenteles risques, déjà considérables,pour lesinvestisseurs. Lesexploitants doivent avoir le couragedeseretirer rapidement d’une licencesi elle ne fonctionne pas, jugeTim Livesey, directeur général de la sociétéd’exploration aurifère Oriole Resources, active notamment au Cameroun. «Tropdepetits projetsd’exploration ne réussiront jamais vraiment, maisils continuent àdépenser parce que c’estplus facile qued’assumersonéchec»,assure-t-il.
•Carburants lourdseténergie solairepour la plus grande mined’ordeGuinée
L’or estaucœur desambitions d’Andrew Pardey,directeur général de Predictive Discovery,qui compte soumettreune étuded’opportunité au gouvernement guinéen d’ici à la fin de 2023,cequi permettraità l’entreprisededemander un permis d’exploitation minièrepour sonprojetd’extractiond’oràBankan,dansle bassinde Siguiri,larégion la moins explorée de la ceinturederoches vertes birmiennes(richesenminerai)d’Afriquedel’Ouest.Lesréserves ysont estimées à4,2 millions d’onces. Des chiffres qui reposent en grande partie sur desminesàciel ouvert doivent êtreréévalués d’ici au début de février, préciseAndrew Pardey,lequel argue queles forages souterrains devraient permettrede revoir àlahausse lesestimations, faisantdeBankanlaplusgrande mined’ordeGuinéeetl’unedesplus importantes en Afrique de l’Ouest.
Pour Predictive Discovery, coté en Bourse en Australieetqui compte BlackRockparmi ses investisseurs, se posera aussilaquestion de l’énergie.Selon Andrew Pardey,la solution la plus probable sera une combinaisondedieseletdecarburantslourds, avec un peud’énergie solaire. Le manque de puissance desbatteriessolairessignifie que le dieseletles carburantslourds continuent de dominer en Afrique de l’Ouest, estime en effet Andrew Pardey,anciennement PDGde Centamin, exploitant de la seule mine d’or d’Égypte.« Un camion sur deux roule au dieselouaucarburant lourd»,constate-t-il, ajoutantque «lesolairenefonctionnequelorsque le soleil brille ».
•Unnouveaupacted’actionnaires pourleferduSimandou
Le 22 décembre2022, toutes lespartiesprenantesaumégaprojet guinéen de Simandou étaient réuniesà Conakrypourfaireun pas, peut-être décisif,versl’exploitation du gisementdeferquelaGuinéeespèrelancer depuis plus d’un quartdesiècle
Àl’issue de plusieursmois de travail,l’anglo-australien Rio Tinto et le chinois WinningInternational Groupontactéaveclesautoritésguinéennesl’arrivéedans le projet d’un nouvelactionnaire,lechinoisBaowu Steel. S’il sembleacquisque ce dernierrachètelamajorité desblocs détenus par Winning Consortium Simandou (qui réunit Winning, China Hongqiao Group et UMS) et entreaucapital de la Compagniedu Transguinéen (CTG, codétenue par WCS, Rio Tintoetl’État guinéen), le détaildesprisesdeparticipationsn’a pasencoreétédonné.Etpourcause: selonune source de Jeune Afrique impliquéedans ce dossier, lesdiscussions se poursuivent pour définirlepacte d’actionnaires,qui
MATIÈRES PREMIÈRES : LES PRIX S’ENVOLENT
ne devrait pas être arrêté avant plusieurs mois.
Selon les termes du contrat signé par le représentant de Baowu Steel, Gongyang Jiang, qui a obtenu l’aval de Pékin, le groupe chinois s’est notamment engagé avec ses nouveaux partenaires à apporter les 15 milliards de dollars de financement nécessaires à la construction d’un chemin de fer de 657 km, ainsi qu’à celle d’un port en eau profonde.
Totalement enlisé, le projet Simandou a redémarré après l’obligation, faite le 25 mars 2022 à Rio Tinto et WCS par le colonel Mamadi Doumbouya, chef de la junte guinéenne, d’unir leurs efforts pour financer les infrastructures indispensables à l’évacuation du minerai. Dans le même temps, Conakry avait imposéauxgroupesminiersdedétenir une part gratuite de 15 % dans CTG, finalement créé le 27 juillet.
L’exploitation du gisement, qui contient 8 milliards de tonnes de fer, pourrait démarrer en 2025, selon le calendrier du gouvernement, et représenterait plus de 8 % de la production mondiale du minerai pendant plusieurs décennies.
•TechnologieCILpourlamined’or deSéguéla,enCôted’Ivoire
Enattendantsaconventionminière, lecanadienFortunaSilverMines,qui a acquis en 2021 son compatriote Roxgold, se prépare à démarrer dès cette année la production de sa mine d’or de Séguéla, dans le nordest de la Côte d’Ivoire. Cette dernière devrait être opérationnelle mi-2023 et atteindre sa pleine puissance au cours du troisième trimestre. Selon les premières études, la société minière produira 133000 onces d’or par an pendant les six premières années, et devrait rester active durant huit ans et demi, le temps d’exploiter un peu plus de 1 million d’onces.
Les travaux de construction de l’usine se poursuivent sur le site, où Fortuna Silver a déclaré investir plus de 173,5 millions de dollars. Pour l’extraction de l’or, l’entreprise a annoncé son intention de déployer le procédé de carbone en lixiviat (CIL, pour carbon in leach), qu’elle assure être plus protecteur pour l’environnementquelaméthodetraditionnelle, car elle évite un contact direct entre le cyanure et le sol.
•Accélération de la mise en valeur dupotentielalgérien
En Algérie, on suivra notamment le mégaprojet de la mine de fer Gara Djebilet (Tindouf), relancé en 2022, qui permettra la production de 2 à 3 millions de tonnes de minerai de fer dans une première phase puis de 40 à 50 millions de tonnes par an à partir de 2026. Le pays attend également beaucoup du Projet de phosphate intégré (PPI) de Tebessa Fruit d’un investissement de près de 7 milliards de dollars, ce projet doit permettreaupaysdedevenirl’undes principaux exportateurs d’engrais et de fertilisants, avec une production
Skikda,etconseilleretdirecteurstratégie au ministère de l’Énergie sur le dossier pétrole et mines, l’Algérie dispose d’un potentiel exceptionnel, estimé entre 10 % et 20 % des ressources minières mondiales. Des ressources confirmées notamment grâce à des technologies modernes comme la télédétection, l’intelligence artificielle (IA), la modélisation et le calcul économique, assure l’expert, régulièrement cité par la presse algérienne
•Négociations fiscales entre Rio Tintoetl’Étatmalgache annuelle prévisionnelle de plus de 6 millions de tonnes de produits phosphatés.
Cette année devrait également voir l’entrée en exploitation du gisement de zinc et de plomb de Oued Amizour (Béjaïa), dont le potentiel minier exploitable est estimé à 34 millions de tonnes, pour une production annuelle de 170000 tonnes de concentré de zinc. Outre les gisements aurifères du Hoggar, de nombreux projets miniers sont en cours delancement :bentoniteàHammam Bougrara (Tlemcen), dolomite à Teioualt (Oum El Bouaghi), carbonate de calcium et diatomite à Sig (Mascara), feldspath à Aïn Barbar (Annaba) et baryte à Koudia Safia (Médéa).
Terres rares, fer, potasse, nickel, cuivre, vanadium, lithium, or, diamants… Selon Ali Kefaifi, directeur du complexe pétrochimique de
QMM, filiale de Rio Tinto qui produit de l’ilménite, et l’État malgache doivent renégocier leur convention fiscale avant la fin de février, sous peine de revenir à la fiscalité du code minier, moins avantageuse – et qui pourrait encore augmenter, selon une version intermédiaire d’un nouveau texte de loi. Ces négociations se déroulent sur fond de conflitsocial.Endécembre2022,des riverains ont bloqué la route vers la mine Ils réclament plus d’indemnisations foncières. QMM a déclaré la « force majeure » le 13 décembre, et a baissé sa production électrique pour la grande ville voisine de FortDauphin (Tôlanaro), avant qu’un accord de sortie de crise temporaire soit trouvé, le 18. L’entreprise, dont le projet approche le milliard de dollars d’investissements, comprend un port et une centrale électrique et génère environ 2 000 emplois, a déjà affronté des manifestations de quelques centaines de personnes en 2022,ainsiqu’ennovembre2021eten 2018. Mais il est impossible de savoir quelle part de la population soutient ces mouvements.
•EnRDCongo,desattentesdansle cuivreetlezinc
Sont notamment attendus par Kinshasa l’accélération de la production de Kamoa-Kakula et le lancement du projet cuivre-cobalt de Kisanfu (KGM), développé par China Molybdenum (CMOC), le grand actionnaire chinois de Tenke Fungurume Mining (TFM). Se prépare aussi la reprise de la production du gisement de zinc de Kipushi, coentreprise du canadien
Ivanhoe Mines et de la Gécamines, après trente ans d’arrêt [lire aussi pp 199-200].
•First Quantum de nouveau à l’offensiveenZambie
Après plusieurs années difficiles entre les autorités zambiennes et les miniers, l’arrivée du président Hakainde Hichilema, élu en août 2021, a été un soulagement pour les industriels du secteur. Au point que Tristan Pascall, directeur général depuis mai 2022 de First Quantum Minerals,leplusgrandproducteurde cuivredupays,seditprêtàdemander de nouvelles licences d’exploration. La société a ainsi annoncé un projet d’expansion de 1,25 milliard de dollars pour sa mine de Kansanshi, qui produit plus de cuivre que tout autre site africain First Quantum exploite également la mine de cuivre à ciel ouvert Sentinel, à 150 km à l’ouest de Solwezi, dans la province du NordOuest,etlegisementdesulfuredenickel Enterprise à 12 km de là, ce qui lui permet de mutualiser les infrastructures. Enterprise, qui doit commencer à produire du nickel en ce début d’année, est voué à devenir la plus grande mine d’Afrique de ce minerai, avec un potentiel de production annuelledeplusde30000tonnes.De
Dossier Mines
quoi inscrire la société canadienne, déjà sixième producteur mondial de cuivre (816000 tonnes en 2021), parmi les dix premiers producteurs mondiaux de nickel.
•Une première en Éthiopie depuis 1994
La production à Segele, dans le sud-ouest de l’Éthiopie, près de la frontière avec le Soudan du Sud, commencera au premier trimestre de cette année, a confié à Jeune Afrique et à TheAfricaReport Jørgen Evjen, directeur général du norvégien Akobo Minerals, qui a mené les travaux d’exploration. Ce sera la première fois depuis 1994 qu’un nouveau gisement est exploité en Éthiopie.
Les ressources minérales sont estimées à 41000 onces d’or Présent dans le pays depuis 2010 et sur un permis d’exploration qui couvre 182 km2 , Akobo compte utiliser les liquidités générées par la future production pour poursuivre l’exploration, dans l’or et éventuellement dans d’autres minéraux. L’Éthiopie souhaite attirer des entreprises étrangères pour lancer des projets d’exploration de ses ressources : l’or, qui domine l’industrie – le minerai a généré 560 millions de dollars en exportations au cours de l’année fiscalequis’estterminéele7 juillet2022 –, mais aussi la potasse et le tantale Le gouvernement offre notamment des incitations fiscales dans l’objectif de faire passer la contribution de l’industrie minière au PIB d’un taux pré-Covid de 3 % à 10 % d’ici à 2030
•De la cryptomonnaie pour l’uraniumdeNamibie
Madison Metals, coté en Bourse au Canada, a conclu en septembre 2022 un accord inédit de fourniture exclusive d’oxyde d’uranium U308 pour cinq ans avec l’opérateur blockchain Lux Partners, par lequel ils’engageàlivrerjusqu’à20 millions delivresdemineraiprovenantdeses gisements en Namibie en échange de jetons non fongibles (NFT), mis à disposition sur toutes les principales blockchains.
Son PDG, Duane Parnham, espère tirer de leur vente « un financement à un prix supérieur aux évaluations de la société par les analystes ». Contrairement aux autres matières premières, l’uranium ne s’échange pas sur un marché ouvert, mais les prix sont négociés directement. Les NFT peuvent donc créer une plus grande transparence du marché, estime Parnham.