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BURKINA FASO Adama Soro

Président de la Chambre des mines

Orpaillage, insécurité, mauvaise conjoncture… Le patron du principal syndicat corporatiste du secteur fait le point.

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Pour le président du principal syndicat corporatiste minier du Burkina Faso, le secteur, qui pèse 2021 milliards de F CFA (3,09 milliards d’euros) de recettes d’exportations et jusqu’à 20 % des recettes fiscales de l’État, fait grise mine. Également vice-président des affaires publiques chargé du Burkina chez Endeavour, Adama Soro anticipe une baisse d’au moins 15 % de la production annuelle d’or en 2022, face aux 66,8 tonnes (t) extraites en 2021 (7,6 % de plus qu’en 2020). Entretien.

JeuneAfrique:Quellessont lesattentesdusecteurdansle contextedetensionsavecles partenairesextérieurs?

Adama Soro : Nous suivons avec attention l’évolution des rapports du gouvernement de transition avec ses partenaires. Le secteur ne peut que partager les priorités définies par le Premier ministre [Kyélem Apollinaire de Tambèla] : sécurité, pouvoir d’achat et gouvernance. Nous sommes évidemment sensibles à la dimension sécuritaire et attendons que des efforts soient consentis pour protéger les investissements. Des voix s’élèvent pour demander la révision du code minier [déjà révisé en 2015]. Nous appelons au contraire ànepasstigmatiserlesinvestisseurs : il est excessif d’affirmer que l’or n’apporte rien au pays, alors que les seize sociétés actives mobilisent 20 % des recettes fiscales. En comparaison, le secteur informel, qui représente près de 80 % du tissu économique national, ne contribue à celles-ci qu’à hauteur de 0,96 %…

Perkoa,l’uniqueminedezincdu pays,détenueparTrevaliMining, aferméennovembre2022.Est-ce unmauvaissignalpourvous?

Dans ma position, assister à la fermeture de quatre sites (Taparko, Karma, Youga et Perkoa) en six mois est très difficile. Nous estimons la baisse de recettes à 30 milliards de FCFAaumoins,àlaquelleilfautajouter le gel des contrats de fournisseurs locaux et plus de 700 emplois perdus rien que pour Perkoa, ainsi que l’arrêt des taxes que percevaient les communautés locales. Si nous n’avons pas encore les chiffres de 2022, nous anticipons une baisse drastique des volumes, de l’ordre de 15 %. Or les mines confèrent une résilience au pays. Malgré la pandémie, la productiond’oryafaitunbonden2020,avec 62 t extraites [contre 50 t en 2019].

Commentl’insécuritéserépercute-t-ellesurleschargesd’exploitationdesminiers?

L’insécurité génère un surcoût, notammentlogistique :pouracheminerlesbiensetlespersonnes,nombre d’acteursoptentpourlavoieaérienne, engendrant des millions de dollars de dépenses Il faut aussi sécuriser les lieux d’opération. Et il y a des frais moinsévidents,telleslesprimesd’assurances,quisesontaccruesàmesure que le risque pays s’élevait. Tout cela, ajouté à l’environnement sociopolitique[deuxcoupsd’Étatenhuitmois], entame la compétitivité du secteur, même si le pays demeure attractif sur le plan géologique. Pour rassurer les investisseurs et pouvoir continuer les opérations, nous plaidons pour la mise en place d’un plan incluant des mesuressécuritaires,économiqueset fiscales.

Commentrelancerl’exploration?

Malgré l’onde de choc causée par l’enlèvement et le meurtre du géologue canadien Kirk Woodman, en 2019, et la chute des dépenses d’exploration (de 10 millions de dollars à moins de 3 millions par an), les sociétés minières continuent d’investir. Elles ont en revanche restreint les recherches aux zones à fort potentiel. Malheureusement, les délais de délivrance des autorisations administratives pénalisent les demandeurs.

QuepréconiselaChambrepour encadrerl’orpaillage?

L’orpaillage est une question cruciale. Nos membres ont respectivement produit 62 et 66,8 t d’or en 2020 et en 2021 L’Initiative pour la transparence de l’industrie extractive [Itie] évalue à 270 kg l’or extrait par les orpailleurs, mais les enquêtes statistiques estimaient à 10 t la production artisanaleen2016[l’Agencenationale d’encadrement des exploitations minières artisanales et semi-mécanisées, liée au ministère des Mines, parle même de 20 t pour 2020]. Avec la crise sécuritaire, qui a provoqué un déplacement des populations des régions d’orpaillage du Sahel ou de l’Est, des conflits éclatent entre les orpailleursetlesmines,etnousappelons l’État à organiser ce secteur. Des réformes sont en cours, telle l’instauration d’une carte de l’artisan minier ou l’organisation des orpailleurs en coopératives, pour une meilleure collaboration avec les industriels.

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