FRANCE MUSULMANS AU BORD DE LA CRISE DE NERFS
Hebdomadaire international indépendant • 54e année • no 2804 • du 5 au 11 octobre 2014
tERRoRismE DE qUOI DAESh ESt-IL LE NOM ? Par Béchir Ben Yahmed
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L’Afrique
de papa revient ! Jamais, depuis les indépendances, les militaires occidentaux n’ont été aussi présents. Enquête sur une recolonisation soft.
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Dossier
Automobile
INTERVIEW
Johan Van Zyl
Directeur général deToyota Afrique
AFrique subsAhArienne
La Chine,
un leader qui
Depuis dix ans, les ventes de camions chinois explosent. Pour répondre à la demande, les constructeurs commencent à implanter des usines d’assemblage. Les marques européennes contre-attaquent en misant sur la qualité. sAïd Aït-hAtrit
F
AW, Dongfeng, Sinotruk, Shacman, Beiben, Foton, Hino, Youngman… Les camions chinois ont commencé à inonder le marché africain au début des années 2000 et le dominent aujourd’hui en quantité. « Quelle que soit sa qualité, quand le prix d’un 420 chevaux chinois est de 28 millions de F CFA [42 685 euros], contre 55 millions pour un n o 2804 • du 5 au 11 octobre 2014
européen, le choix est vite fait, et plus encore quand on n’a pas accès aux crédits bancaires », résume Youssouf Traoré, président du Conseil malien des transporteurs routiers (CMTR), qui précise toutefois préférer les produits européens, y compris d’occasion. Les statistiques étant rares, les observateurs se contentent d’estimations. Selon François-Xavier Thinet, vice-président du groupe Volvo pour l’Afrique subsaharienne, les constructeurs européens n’écoulent que 3 000 camions sur les 14 000 véhicules de plus de 6 tonnes (medium duty) vendus chaque année en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Emmanuel Bia, qui distribue la marque Foton, estime que les camions chinois représenteraient 47 % du marché ivoirien des plus de 16 t (heavy duty). Le leader chinois, quant à lui, revendique la vente de 17 000 camions (medium duty et heavy duty confondus) en 2013 en Afrique, ce jeune afrique
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Les centres Midas gagnent du terrain
dIsTRIbuTIoN
L’Angola, le créneau de Renault
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Les modèles européens : du luxe ? Résultat,lesleaderseuropéensRenault,Mercedes et Man se concentrent sur leur gamme « premium », qui représente environ 1 300 camions de plus de 16 t en Afrique francophone, selon François-Xavier Thinet. En 2013, le groupe Volvo, sa filiale Renault Trucks en tête, y a livré 700 camions de plus de 6 t, dont 500 de plus de 16 t. Ses clients sont des filiales de groupes européens (Total, Sogea-Satom) ou des transporteurs locaux qui ont accès au crédit bancaire, voire au leasing. La logistique tire le marché au Cameroun, au Mali, au Ghana ou au jeune afrique
Hougaard Malan/getty
pèse lourd qui correspond à un quart de ses exportations et 20 % des exportations chinoises sur le continent. De son côté, Sinotruk aurait vendu, depuis 2011, 32000 camions dans quarante pays africains, dont 10 000 au Nigeria, selon China Daily.
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Des nouveautés à suivre
Nigeria, alors que l’agriculture ivoirienne est plus friande de petits engins. Les clients de premium sont attachés à la productivité de leur outil de travail et bénéficient du service après-vente (SAV) mis en place par les partenaires des constructeurs. « Si l’on met bout à bout la performance économique, le SAV et la valeur de revente du véhicule, on peut estimer que le camion chinois devient 2 à 2,5 fois plus cher qu’un européen au bout de trois ans », argumente François-Xavier Thinet.
Des alliances pour rivaliser Mais les constructeurs européens ne peuvent se contenter de ces gammes premium. Ils se sont donc alliés, depuis plusieurs années, à des partenaires chinois ou indiens pour fournir des camions d’un meilleur rapport qualité-prix à des marchés en plein boom, grâce au transfert l l l n o 2804 • du 5 au 11 octobre 2014
Dossier Automobile 3 questions à
PAtrick PetitjeAn
Vice-président du groupe Volvo pour l’Afrique du Nord
« nos clients sont focalisés sur la qualité des véhicules » Le géant suédois mise sur la productivité de ses engins et développe son réseau dans la région. jeune Afrique : quelle est la taille du marché maghrébin des poids lourds et comment le groupe Volvo s’y positionne-t-il? PAtrick PetitjeAn: Le princi-
pal marché dans notre région est l’Algérie, stable depuis 2012. Sur le heavy duty [plus de 16 tonnes], sa taille est d’environ 4700 unités, sans le marché chinois, qui représente quant à lui environ 4000 unités. Le groupe y a vendu 2400 poids lourds pour une part de marché de 51 %, dont 43 % pour RenaultTrucks. Au Maroc, le marché heavy duty est plutôt européen, moins ouvert aux véhicules asiatiques. Avec 1900 unités, il a baissé de 30 % à 35 % en 2013, à cause du ralentissement de l’économie européenne. Beaucoup de financements sont réalisés en leasing au Maroc, et la situation actuelle ne les facilite pas. Le groupe a écoulé environ 850 véhicules, pour une part de marché de 45 % [24 % Volvo et 21,5 % Renault]. Le marché tunisien est quant à lui encore plus européen, avec environ 900 véhicules vendus en 2013, mais est en baisse de 30 %, surtout sur les tracteurs [– 40 %]. Nous y avons fourni 420 véhicules pour une part de marché de 46 % [27 % pour Renault Trucks et 19 % pour VolvoTrucks]. Les meilleures ventes au Maghreb sont les tracteurs Renault Lander et Volvo FH. quels secteurs tirent ces marchés ?
En Algérie, la construction, tirée par l’investissement public, se démarque. La logistique se développe aussi, avec la mise en place de plateformes modernes comme Numilog [groupe Cevital] ou Flèche bleue. D’importantes n o 2804 • du 5 au 11 octobre 2014
dr
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sociétés publiques dans la construction ou le transport d’hydrocarbures comme Naftal, dont nous équipons environ 80 % d’une flotte de 500 camions, nous font confiance. La logistique internationale est importante au Maroc, de même que l’industrie des phosphates et la distribution. Le marché tunisien est, encore plus que celui de ses voisins, un marché de transport pour compte propre, car 50 % des entreprises sont des PME-PMI. quel est le profil de vos clients par rapport au marché chinois ?
Les clients qui choisissent d’acheter des camions chinois le font pour le prix, pas pour le service, la durabilité ou la sécurité, et sans vision de productivité. Nos clients sont au contraire focalisés sur la « productivité » de leurs camions. Ils doivent être de qualité, avec une durée de vie supérieure et une bonne cote à la revente. Notre offre de service est supportée par un réseau de professionnels nombreux, et nous ambitionnons de passer de seize à vingt points de représentation en Algérie pour Renault et de sept à dix pour Volvo. La corrélation entre parts de marché et couverture du réseau existe. l s.A.-H.
l l l de technologie. D’abord écoulés en Asie, ces véhicules se retrouvent de plus en plus en Afrique. Ainsi, depuis 2006, le constructeur italien Iveco s’est associé avec SAIC, en Chine, pour construire des poids lourds de marque Hongyan. Ceux-ci sont exportés vers le continent depuis 2012. Le groupe Volvo, en discussion en vue d’une alliance avec le chinois Dongfeng, fournit déjà à ses distributeurs (CFAO, SMT…) des camions légers de sa marque indienne, Eicher, afin de leur permettre de faire du volume. L’allemand Man est, depuis 2009, actionnaire à 25 % de la société publique Sinotruk. Le constructeur Foton a, quant à lui, créé en 2012 une coentreprise avec Daimler (Mercedes) en Chine. Le groupe allemand disposait déjà de coentreprises indienne, Bharat-Benz, et japonaise, Fuso (Mitsubishi), dont Tractafric distribue les camions en Afrique. « Foton nous paraissait être la marque la plus sérieuse », explique Emmanuel Bia, qui distribue depuis 2012, avec son partenaire Alcopa, des camions de cette marque. « Certains concurrents chinois sont plus agressifs sur les prix, mais nous sommes sceptiques sur cette façon de travailler », souligne le patron belge, qui développe avec Africatrucks un réseau de SAV pour la marque, dont il a vendu environ 200 unités depuis le début de l’année.
Place aux usines d’assemblage Cette concurrence, qui tire les prix et la qualité vers le bas, inquiète les plus grands constructeurs chinois, qui préféreraient développer une gamme intermédiaire entre le premium et le low-cost. C’est pourquoi, en plus des alliances sino-européennes, ceux-ci se lancent dans le développement de leurs réseaux et montent des usines d’assemblage. Foton a ouvert une unité industrielle à Nairobi en juillet, le même mois que Faw à Port Elizabeth, en Afrique du Sud. En mai, Sinotruk s’est engagé avec Dangote Group dans la construction d’une usine de 5000 véhicules par an au Nigeria. Déjà présent au Maroc en partenariat avec Somagec, Sinotruk pourrait ouvrir une autre unité d’assemblage à Dakar. « Beaucoup de transporteurs utilisent ces camions et les apprécient, les boîtes de vitesses et les systèmes hydrauliques sont allemands, explique l’homme d’affaires et député Demba Diop Sy, qui porte le projet. Mais nous avons besoin d’une garantie de l’État pour réaliser le montage. » L’usine serait une source supplémentaire pour le Sénégal, le Mali ou la Côte d’Ivoire, qui réfléchissent à des programmes de renouvellement de leurs flottes de camions, archaïques. Leurs choix semblent se porter sur les véhicules chinois, dont l’achat peut être soutenu par Pékin. Même son de cloche chez Gaoussou Touré, le ministre ivoirien des Transports, qui avait visité, en 2012, une usine Mercedes, à Stuttgart, avant de faire machine arrière. l jeune afrique
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Dossier Automobile interview
Johan Van Zyl
Directeur général de Toyota pour l’Afrique
« Il est impératif d’élargir notre présence sur toute la gamme » Vendre des citadines en plus des 4×4 ? Afin que la marque japonaise reste la plus vendue du continent, son patron sud-africain sait qu’il doit s’adapter aux nouveaux modes de consommation.
A
conséquent, nous avons conservé notre place de première marque vendue en Afrique, avec une part de marché continental stable de 14 %, soit environ 248000 véhicules vendus en 2013. Mais selon les pays, notre présence varie fortement. Nous restons plus forts au sud du Sahara, avec près de 30 % des ventes dans un pays comme le Nigeria et 18,7 % en Afrique du Sud. Cela est principalement dû à notre domination sur le segment des pick-up et des 4x4, très demandés dans cette région. Mais nous faisons face à une concurrence de plus en plus forte dans le nord et l’extrême sud du continent.
vec 14 % de part de marché, Toyota est la marque automobile la plus vendue en Afrique. Sur le continent, elle est pilotée par le Sud-Africain Johan Van Zyl, un des cinq seuls étrangers à ce niveau de responsabilité dans le groupe japonais. Pour résister à la concurrence qui s’intensifie, notammentauMaghreb,ilsouhaite élargir la présence du constructeur sur le segment des petites voitures citadines. jeune Afrique : quelle est la conjoncture du marché automobile africain ? johAn vAn Zyl : Il est en faible
croissance, d’environ 4 % sur le continent tout entier en 2013. Selon nos estimations, 1,775 million de véhicules neufs y ont été vendus. Les deux grands marchés régionaux restent, comme d’habitude, l’Afrique du Nord et l’Afrique du Sud. La première a plutôt bien résisté malgré les récents soubresauts politiques, avec 828000 véhicules écoulés, soit 3 % de plus qu’en 2012. Et cela même si le marché algérien a ralenti sa progression à cause d’une réorientation des dépenses des ménages vers le logement. Quant au secteur automobile de la nation Arc-en-Ciel, il a également enregistré une hausse, avec 615 000 voitures vendues, un chiffre en augmentation de 6 % par rapport à l’année précédente. Dans ce contexte, toyota garde-t-il sa position de leader du marché ?
Nous avons fait progresser nos ventes de 4 %, ce qui est en ligne avec la croissance du marché. Par n o 2804 • du 5 au 11 octobre 2014
qui sont vos plus sérieux concurrents ?
14 %
C’est la part de marché de Toyota en Afrique, avec 248 000 véhicules vendus en 2013.
La compétition entre les différentes marques s’est beaucoup accrue, notamment en Algérie, au Maroc et en Égypte, mais aussi en Afrique du Sud, avec de nouvelles marques entrantes, notamment chinoises. Mais nos concurrents les plus sérieux n’ont pas changé. Dans le nord du continent, ce sont toujours les coréens Hyundai et Kia, ainsi que Renault et Peugeot. Et en Afrique du Sud, Volkswagen et Ford nous talonnent. la demande de vos clients africains a-t-elle évolué ?
Les marchés automobiles du continent sont tous dans une phase de transition, plus ou moins avancée selon les pays : progressivement, les achats de véhicule par des particuliers prennent de plus en plus d’importance par rapport à ceux des grandes entreprises, jadis cruciaux. Leur taille moyenne se
réduit également, avec davantage de motorisations 4x2, et non plus principalement des 4x4. Le marché algérien, par exemple, s’est réorienté ces dernières années vers les petits véhicules citadins, un segment où nous n’étions pas assez présents jusqu’à aujourd’hui. justement, cette évolution metelle en péril toyota, traditionnellement fort sur le segment des 4x4 et des pick-up mais moins sur celui des petites voitures d’entrée de gamme ?
Pour garder notre position de leader, il nous faut impérativement élargir notre présence sur toute la gamme automobile, ce que nous sommes en train de faire. Depuis 2012 et la mise en place d’une direction continentale de Toyota sous ma responsabilité, nous nous efforçons d’obtenir des véhicules plus adaptés pour proposer le meilleur mix de produits pour chaque pays, et en particulier pour les segments des petits véhicules. Nous lançons actuellement jeune afrique
Jeremy Glyn/Financial mail/Gallo imaGes/Getty imaGes
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en Afrique du Sud notre modèle Etios, à un prix très abordable [à partir de 127800 rands, soit près de 9000 euros]. Il vient d’être introduit en Inde et me paraît idéal pour l’Afrique. Nous comptons également sur des voitures de taille moyenne comme la Corolla Quest et la Yaris, qui se vendent déjà bien en Afrique du Sud. Et nous n’abandonnerons pas pour autant les segments où nous sommes dominants. Il nous faut ainsi rester innovant sur le 4x4. Notre pick-up Hilux reste notre produit phare en dehors de l’Afrique du Sud et de l’Afrique du Nord… Dans quels pays jugez-vous qu’il est crucial de renforcer votre présence ?
Chaque marché est important, mais nous voulons nous renforcer en particulier au Kenya, en Angola et en Côte d’Ivoire, des pays qui ont, selon nous, beaucoup de potentiel. Sur le long terme, nous estimons que le marché continental pourrait atteindre 3 millions de véhicules jeune afrique
p Jusqu’en 2013, l’homme d’affaires représentait le constructeur nippon en Afrique du Sud.
neufs vendus à l’horizon 2025. Et notre objectif est de conserver nos 14 % de part de marché à l’échelle du continent. Allez-vous implanter des usines d’assemblage de véhicules, en plus de vos installations industrielles en Afrique du Sud et en Égypte ?
Nous comprenons que les pays africains souhaitent s’industrialiser, mais nous ne pouvons pas installer des usines d’assemblage par-
nous pourrions installer des usines en algérie et au maroc. tout. Il faut que ces projets soient économiquement viables, ce qui n’était pas forcément le cas de nos anciennes installations en Zambie et au Zimbabwe, qui ont fermé dans les années 1990. Notre décision de nous implanter dépendra de l’évolution du marché, des coûts
de production, de la logistique, des incitations fiscales mais aussi de l’efficacité des autorités locales à lutter contre les importations de véhicules d’occasion vétustes. Nous étudions plusieurs options dans trois principaux pays clés. D’abord au Nigeria, où, compte tenu de nos ventes, qui ont dépassé les 20 000 véhicules en 2013, nous allons annoncer prochainement l’implantation d’une usine d’assemblage. À plus long terme, nous étudions les possibilités industrielles et commerciales offertes par l’Algérie – le deuxième marché automobile du continent – puis par le Maroc. Nous nous intéressons notamment à l’expérience industrielle de Renault dans ces deux pays maghrébins. en attendant le lancement d’autres usines africaines, êtesvous parvenu à réduire les délais et les coûts de transport entre celle de Durban et le reste du continent ?
Sur le plan logistique, nous avons fait des progrès remarquables en Afrique du Sud, notamment en améliorant nos relations avec la compagnie ferroviaire Transnet, qui transporte nos véhicules de l’usine jusqu’au port. Le dialogue avec les ports sud-africains s’est également amélioré pour réduire les délais à l’embarquement. Toyota est la première marque automobile africaine, ce qui nous permet de réaliser des économies d’échelle et d’obtenir des tarifs plus attractifs auprès des compagnies maritimes qui transportent nos véhicules vers les différents marchés. Depuis Durban, où notre usine est installée [fabrication des modèles Hilux, Corolla et Yaris, notamment], les rotations maritimes se sont multipliées, que ce soit le long de la côte ouest ou de la côte est du continent. C’est un avantage crucial pour répondre plus rapidement aux demandes de nos distributeurs. l Propos recueillis par ChriStophe Le BeC n o 2804 • du 5 au 11 octobre 2014
Dossier Automobile Maroc
Les centres Midas gagnent du terrain Porté par le marché du neuf, le spécialiste de l’entretien a fait ses preuves à Casablanca. Et compte développer son réseau dans le royaume.
S
amedi 30 août, 11 h 30. Dans ce centre Midas, route de Rabat, les véhicules se suivent et ne se ressemblent pas. Mercedes, Range Rover, Honda Accor, Kangoo, Peugeot 206, Dacia Duster… Tous ont fait le déplacement pour consulter le spécialiste de l’entretien automobile. Othmane, 35 ans, chef d’entreprise, est un habitué de la maison : « Je viens en moyenne tous les trois mois pour effectuer un check-up de mon véhicule. Les prix sont un peu plus élevés que chez les garagistes de quartier, mais au moins, on est sûr de la qualité. » Par exemple, une vidange chez Midas coûte environ 500 dirhams (45 euros), contre 350 chez un garagiste. Mais ici, pas besoin de recommandations ni d’être un « ami » de longue date pour que le résultat soit certain. Chez Midas, les process sont verrouillés, la qualité garantie et le client roi. « Nous appliquons les process définis à l’international et offrons des pièces d’origine et de l’huile de grande qualité, à des prix certes plus chers que chez les garagistes, mais bien inférieurs à ce que propose le constructeur, explique Faouzi Nejjari, directeur d’exploitation de Midas Maroc. La clientèle marocaine a évolué. Les gens sont désormais prêts à mettre le prix pour avoir la qualité de prestation et la disponibilité. » La disponibilité, c’est justement l’un des points forts de Midas. Ouverts sept jours sur sept de 8 heures à 20 heures, les centres s’engagent également sur une durée d’attente qui ne dépasse pas les trente minutes. « Le client n’a pas besoin de prendre un rendezvous.Ilpeutveniràn’importequelle n o 2804 • du 5 au 11 octobre 2014
Hassan Ouazzani pOur J.a.
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heure, et il est certain d’être bien et vite servi », assure Faouzi Nejjari. concept. Dans le centre d’Aïn
Sebaa, tout comme dans les deux autrescentresMidasdeCasablanca, les prestations de base (vidange, pneumatique, échappement, freins, batteries…) constituent le cœur du business. Avec un chiffre d’affaires de 14,8 millions de dirhams en 2012 et de 15,2 millions en 2013 (en progression de 3 %), ces trois centres affichent une solide santé. « Nous ne faisons pas de réparations; notre
p Vidange, pneumatiques, freins… Des prestations de base qui constituent le cœur de métier de la marque.
Ses concurrents ? l’allemand bosch et le groupe akwa, qui a importé l’enseigne Speedy. métier, c’est l’entretien. On fait du préventif, pas du curatif », souligne le directeur d’exploitation de l’enseigne. Introduit au Maroc en 1998 par la société Fast Pro, structure qui appartient à Formag, grand importateur marocain de pièces et d’huiles, le concept Midas a réussi à séduire beaucoup d’automobilistes casablancais. Après quinze ans de présence, l’enseigne s’apprête à ouvrir des centres dans d’autres villes du royaume. « Au début, nous avons voulu nous développer sur
le modèle des franchises. Mais ça n’a pas vraiment marché. Nous avons donc décidé de changer de stratégie en développant le réseau par nos propres moyens », confie Faouzi Nejjari. « Nous nous apprêtons à ouvrir de nouveaux centres à Casablanca, Mohammedia et Rabat. Et nous cherchons des emplacements dans d’autres villes », poursuit notre homme, en restant cependant évasif sur les lieux ciblés et le montant des investissements. Car dans ce nouveau segment du marché de l’entretien, la concurrence fait rage. À l’image de Fast Pro, d’autres sociétés ont importé le concept, comme Speedy, installé en 1999 par le groupe Akwa d’Aziz Akhannouch, l’actuel ministre de l’Agriculture. Ou Bosch, le spécialiste allemand de l’entretien automobile, qui vient de faire son entrée, ciblant, lui, une clientèle premium. « La demande est là, elle va aller en grandissant avec l’essor du marché du neuf », estime Hicham Smyej, directeur de la rédaction de La Revue Auto, mensuel marocain spécialisé. Et de conclure: « On ne peut pas acheter une voiture 1 million de dirhams et la confier au premier venu… » l Mehdi Michbal, à Casablanca jeune afrique
Dossier Automobile distribution
L’Angola, le créneau de Renault Sur ce marché aussi florissant que concurrentiel, le constructeur français est déterminé à s’imposer. Reportage dans une concession de Luanda, où la marque au losange connaît un succès grandissant.
L
a concession automobile de Teixeira Duarte (TDA) à Talatona, ville nouvelle et banlieue aisée de Luanda, n’a rien à envier aux plus rutilantes de ses consœurs d’Europe ou des États-Unis. « Par la taille, nous sommes la plus grande d’Afrique subsaharienne », affirme même José Almeida, le directeur chargé de Renault et Nissan, les deux marques phares du distributeur angolais, filiale du groupe portugais du même nom. TDA dispose en effet de 100 000 m2 à Talatona, dont 22 000 sont couverts, avec un showroom séparé pour chacune des huit marques exposées sur l’une des avenues les plus passantes de Talatona : Renault, mais aussi le japonais Nissan, le français Peugeot, le coréen SsangYong, le chinois JMC, les motos nippones Honda, les camionnettes de l’indien Mahindra et les camions de Renault Trucks.
Prisées. Chaque showroom dispose de ses propres vendeurs, au fait des derniers modèles et options et reliés aux systèmes d’informations du constructeur. Dans l’espace Renault, les clients, plutôt jeunes et au style soigné, les explorent, passent d’un véhicule à l’autre avant de faire leur choix.
Juste derrière les espaces de vente, une cinquantaine de mécaniciens s’activent au sein d’un immense centre d’entretien et de réparation. Certains sont passés par le centre de formation maison de TDA, situé à seulement quelques encablures. Ponts, fosses, appareils pour vérifier la carrosserie… Le matériel d’entretien est identique à celui des grandes marques, ce qui a nécessité un investissement de
Les petites citadines séduisent la classe moyenne, qui pourrait tripler d’ici à 2040. plus de 10 millions d’euros. « Nous serons bientôt certifiés par Renault pour notre service après-vente », indique José Almeida, lui-même ancien salarié du groupe français au Portugal. Selon lui, la marque est particulièrement adaptée au marché angolais. Car depuis trois ans, c’est Renault qui porte les ventes de TDA. Ses 4x4 Duster et ses petites berlines compactes Logan et Sandero se vendent comme des petits pains à Luanda… De 168 véhicules au losange écoulés dans le pays en 2005, quand TDA a commencé à les distribuer, la concession est passée à 700 voitures vendues en
Renault
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2011, puis à 1 800 en 2012 et enfin à quelque 2 500 en 2013. « Nous bénéficions de l’explosion du segment des petites voitures citadines, prisées par une classe moyenne angolaise qui pourrait tripler d’ici à 2040 », se réjouit le directeur de la marque, pas peu fier d’avoir imposé Renault dans un territoire « jadis dominé par Toyota à près de 80 % ». « Les véhicules du programme Entry [gamme Dacia au Maghreb et en Europe], pensés
Les oCCasions Presque hors La Loi
l
es ventes angolaises, en hausse de 34 % par rapport à 2012, sont dopées par les pétrodollars qui ont afflué dans le pays après la guerre, avec d’importants achats de véhicules de la part des groupes pétroliers, de leurs salariés et du secteur public. Mais pas seulement. « Le marché a été favorisé par l’interdiction d’importations de véhicules de plus de trois ans pour les voitures et de cinq ans pour les camions. Une mesure n o 2804 • du 5 au 11 octobre 2014
mise en place par l’État en 2010 et strictement appliquée, avec des contrôles par la douane aux points d’entrée du pays », explique Luis Moita Santos, conseiller au ministère des Transports. Force est de constater que le spectacle des avenues embouteillées de Luanda n’a pas grand-chose à voir avec celles de Kinshasa, Lagos ou Dakar, où les épaves roulantes sont légion. La RD Congo, le Nigeria ou le Sénégal ont bien mis en place le même
type de réglementation, mais elles sont dans les faits très peu respectées. « Comme la réglementation est récente, il y a encore peu de véhicules d’occasion disponibles à la vente, mais ce marché est en train de naître, et nous comptons bien l’investir », précise José Almeida, le directeur des marques Renault et Nissan chez le concessionnaire TDA. l C.L.B. jeune afrique
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un chiffre en hausse de 34 % par rapport à 2012, selon le ministère des Transports. À titre de comparaison, cela représente les deux tiers des quelque 45 000 véhicules neufs écoulés dans toute l’Afrique subsaharienne francophone, qui n’a pas connu un tel boom. pièCes détaChées. Dans ce
pour les pays émergents, ont vite été adoptés par la classe moyenne urbaine, se réjouit José Almeida. Ils se sont révélés plus compétitifs sur le marché que des modèles plus classiques comme Clio ou Mégane, que nous vendions à notre démarrage. » Cas unique. Du fait de sa pro-
gression, Renault détient 7,5 % du marché. Une belle performance pour la marque au sud du Sahara, où elle est plutôt faible – à la rare exception de la Côte d’Ivoire, dont elle détient 12 % du marché avec seulement 855 voitures vendues. Son taux de pénétration est de 5,4 % au Sénégal et de 2,3 % en Afrique du Sud. En
Angola, Renault est même passé devant son partenaire Nissan, qui détenait 6,1 % du marché en 2013. Jean-Christophe Kugler, directeur de la région Euromed-Afrique de Renault, a inclus le pays parmi les « cibles prioritaires » de son groupe sur le continent avec le Nigeria, le Kenya et le Ghana, où il se fixe pour objectif « d’atteindre 10 % de parts de marché », confiait-il à J.A. en juin. Cet engouement de l’état-major du constructeur français s’explique aussi par la taille du marché angolais, autrement plus alléchante qu’ailleurs au sud du Sahara (lire encadré). En volume, il pèse à lui seul 35 740 véhicules vendus en 2013 par les distributeurs agréés,
p Le groupe TDA abrite huit marques sur 22 000 m2.
contexte, José Almeida espère atteindre en 2014 la barre des 3 500 véhicules badgés Renault en Angola. Mais il aura fort à faire pour résister aux autres entreprises automobiles qui lorgnent ce marché attractif. Le coréen Hyundai, leader du marché (17,2 % des ventes), a le vent en poupe avec sa petite citadine i10. Son challenger, Toyota, qui détient 13,8 % du marché, a perdu du terrain ces cinq dernières années mais domine toujours le segment des 4x4 avec son pick-up Hilux. Et compte sur ses nouveaux petits modèles citadins pour damer le pion à Renault. La marque au losange compte notamment sur ses performances logistiques et son service aprèsvente pour résister et continuer sur sa lancée. TDA mise aussi sur sa boutique de pièces détachées, qui est dotée d’un magasin immense en soussol, pour attirer la clientèle des importateurs non officiels. « Ces consommateurs ne disposent pas de la garantie du constructeur, mais ils apprennent à nous connaître au premier souci technique. Généralement, avec des voitures non “tropicalisées” [techniquement adaptées au marché local], le problème technique survient rapidement, ce qui nous sert d’argument de vente pour leur prochain véhicule », s’amuse José Almeida. l Christophe le beC, envoyé spécial
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Dossier Automobile panorama
Le Salon de Paris a ouvert ses portes le 4 octobre. Jeune Afrique y a repéré trois modèles taillés pour le continent.
Twingo Retour aux sources
renault
Après une deuxième générAtion insipide, latwingo renoue en 2014 avec la fraîcheur de ses débuts (1993-2007). son regard légèrement carré, ses hanches marquées lui insufflent le caractère qui faisait tant défaut à sa devancière. Les passagers arrière apprécieront la nouvelle carrosserie cinq portes, mais les habitués regretteront les sièges coulissants qui permettaient de moduler la taille du coffre. Construite sur la plateforme des nouvelles smart grâce à un accord avec daimler-Benz, elle est à présent dotée d’une propulsion arrière. L’excellente répartition des masses et un correcteur électronique de trajectoire au garde-à-vous lui permettent cependant de rivaliser avec les meilleures tractions de sa catégorie. si le conducteur perd un peu en confort avec la direction à démultiplication variable, il gagne en revanche en maniabilité. Latwingo iii est proposée avec deux moteurs essence au choix, l’un de 70 chevaux à 10 800 euros, l’autre de 90 chevaux à partir de 13 300 euros, incluant la banquette arrière rabattable 50/50, la climatisation manuelle, le volant réglable en hauteur et l’autoradio avec commandes au volant. l JuliEn ClémEnçot
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Des nouveautés à suivre Range Rover Sport SVR
Hautes performances
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n2014,laligned’uneautomobilecacheparfois bien des aspects de sa nature profonde. Même avec ses jantes larges, ses quatre sorties d’échappement et ses boucliers revisités, la Range Rover Sport SVR n’a pas totalement la silhouette d’une reine des circuits. Ses performancesdisentpourtantlecontraire.Sonmoteur V8 turbocompressé de 550 chevaux, soit 40 de mieux que la génération précédente, lui permet d’avaler le 0 à 100 km/h en 4,7 secondes et d’afficher une vitesse maximale de 260 km/h. Il faut dire que le modèle a subi une cure d’amaigrissement drastique. Les passagers arrière n’ont pour autant pas de crainte à avoir dans les courbes rapides car ils disposent, comme le pilote et le copilote, de sièges-baquets. Un confort également appréciable en mode toutterrain. Car Range Rover n’a pas trahi son ADN. Dotée d’une suspension pneumatique et d’un système de gestion électronique baptisé Terrain Response 2, la Range Rover Sport SVR voit ses qualités de franchissement décuplées. Autant d’atouts qui se paient au prix fort : environ 105 000 euros. l J.C.
Porsche Cayenne Luxe et sobriété ancé en 2010, le SUV (Sport Utility Vehicle)PorscheCayennededeuxième génération s’est imposé comme le modèle phare du constructeur allemand. Plutôt que de laisser son best-seller s’essouffler, Stuttgart vient de lui offrir un lifting tout en subtilité. Question silhouette, les changements sont mineurs. Outre des phares plus compacts, la principale nouveauté se situe au niveau de la calandre, qui a la possibilité d’améliorer son aérodynamisme grâce à des lamelles mobiles lorsque la température du moteur n’a pas encore atteint la zonerouge.Souslecapot,leschangements sont en revanche plus francs, avec pour objectifessentieldelimiterl’appétitduSUV à la pompe. Le remplacement du moteur V8 essence par un V6 3,6 litres biturbo développant 420 chevaux (82 568 euros) – soit un gain de 20 chevaux – permet par exemple d’économiser environ un
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litre aux 100 km (9,5 à 9,8 litres). Quant à la version diesel, le moteur V6 3 litres de 245 chevaux (68528 euros) consomme 6,6 à 6,8 l/100 km. Mais la véritable révolution vient de l’arrivée d’une toute nouvelle version Hybrid (84 038 euros), dont la motorisation est empruntée à la Panamera
SE-Hybrid. Le SUV allemand colle ainsi à l’air du temps en offrant une autonomie de 36 km en mode électrique. Pas question pour autant d’entamer le plaisir des futurs propriétaires : le moteur V6 développe 416 chevaux pour une vitesse maximale sur circuit de 243 km/h. l J.C. jeune afrique