BOUTEFLIKA LES FEMMES ET LUI
SéNéGAL wADE ET SES FILS
cAMEROUN coMMEnT RELAncER LA LocoMoTIVE ? jeuneafrique.com
Hebdomadaire international indépendant • 55e année • n° 2824 • du 22 au 28 février 2015
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Les
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Le pLus
de Jeune Afrique
Panorama Cassandre s’est trompée
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IntervIew Daniel Ona Ondo, Premier ministre ÉconomIe Le baril de tous les périls SocIÉtÉ Akanda, de Beverly Hills à la jungle
À l’heure des comptes Sur l’échiquier politique, comme sur les plans économique et social, les grandes manœuvres ont commencé. Objectif : la présidentielle 2016.
jEunE AfRiquE
n O 2824 • Du 22 Au 28 févRiER 2015
MARCO DE SWART/Afp
GABON
Le Plus de Jeune Afrique
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Prélude
Marwane Ben Yahmed
Le trône d’okoumé
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écidément, le Gabon ne changera jamais… Sa classe politique, en tout cas. Ici se joue une sorte de Game of Thrones à la sauce nyembwe, où premier et second rôles changent sans cesse de camp, multipliant alliances plus ou moins éphémères et trahisons amères, batailles acharnées et retraites précipitées. La conquête du Palais du bord de mer fait tourner bien des têtes. Tout le monde veut poser son séant sur le fauteuil présidentiel, dans ce gigantesque bureau du premier étage, et peu importent les armes utilisées pour assouvir ce rêve. Ce pourrait être une noble conquête, nourrie de nobles idéaux. Cela ressemble surtout à une guerre des clans, dont le seul but est de s’emparer du pouvoir pour les siens. Comme dans la célèbre série américaine adaptée des romans de George Raymond Richard Martin, difficile de discerner belligérants et factions. Essayons. D’un côté, Ali Bongo Ondimba (ABO), élu à la présidence en août 2009 et investi dans ses fonctions en octobre la même année. Il est l’héritier d’une dynastiefondée parsonpèreOmar,qui régna sur le Gabon plus de quatre décennies durant. Pourtant, ce dernier, contrairement aux fantasmes, n’a rien fait – ou si peu – pour asseoir son fils là où il est. « Ali », profitant des circonstances, des divisions politiques ou ethniques, des inquiétudes de ses compatriotes mais aussi de la France, liées à l’après-ABO, s’est emparé du pouvoir. Face à lui, une opposition hétéroclite, essentiellement formée d’anciens caciques du régime de son père. Des Fangs (Casimir Oyé Mba, André Mba Obame, Jean Eyéghé Ndong), l’ethnie majoritaire (environ 30 % à 35 % de la population), mais pas seulement. Il y a aussi, entre autres, Zacharie Myboto et, désormais, Jean Ping. La plupart se détestaient hier, ils marchent aujourd’hui main dans la main. D’autres étaient très proches d’Ali, du temps d’Omar. Ils le vouent désormais aux gémonies. Que peut comprendre un électeur gabonais, à quelques encablures de la présidentielle? Queles mêmes, toujours les mêmes, se jeune afrique
disputent le pouvoir, empêchant l’émergence de figures qui incarneraient le renouvellement générationnel des élites politiques. Personne ne peut dire pour l’instant comment se déroulera le scrutin présidentiel de 2016 – à un tour, faut-il le rappeler –, ni même qui, en dehors d’ABO, sera sur la ligne de départ. L’opposition, inextricable écheveau de personnalités et d’ego dont les seuls dénominateurs communs sont l’« Omarophilie » et l’« Aliphobie », se présentera-t-elle en rangs serrés ou en ordre dispersé ? C’est l’une des clés de cette guerre sans merci. Il lui faudra cependant également proposer une alternative au pouvoir actuel autre que le dénigrement de ce dernier, c’est-à-dire en proposant aux électeurs, qui n’attendent que cela, du contenu : un programme, une vision, des mesures, des remèdes aux maux qu’ils dénoncent. L’autre clé, peut-être la plus déterminante, c’est la capacité d’ABO à convaincre ses compatriotes de lui faire confiance pour un nouveau septennat. Il a obtenu des résultats importants et tangibles, notamment en matière d’infrastructures, de relance et de diversification économiques. Mais il a aussi formulé en 2009 d’innombrables promesses, surtout sur le plan social, qui ne sont pas toutes tenues. Diriger un pays comme le Gabon, où le culte de l’argent facile et rapidement dépensé confine au sport national et où le mot « travail » ressemble parfois à une insulte, n’est guère une sinécure. Il est cependant responsable, car c’est lui le chef et c’est lui seul qui devra assumer le bilan des objectifs non remplis. La faute à certaines erreurs de casting, à la mauvaise évaluation des nombreux écueils à surmonter, à une communication fantomatique et à moult tâtonnements en matière d’organisation de sa gouvernance. Sa stratégie, il le sait, ne pourra être uniquement politique. Eau, électricité, logements, écoles et universités, hôpitaux, transports, emploi : voilà les seuls champs de bataille qui intéressent les Gabonais. l n o 2824 • Du 22 au 28 février 2015
Panorama Cassandre s’est trompée p. 70 oPPosition La quête de l’oiseau rare p. 74 Confidences de Casimir oyé mba, ancien Premier ministre p. 75 interview Daniel ona ondo, Premier ministre
p. 77
tribune Ce qu’être gabonais veut dire, par Guy RossatangaRignault, professeur de droit p. 83 ÉConomie Le baril de tous les périls p. 88 Logistique Frais de port excessifs à owendo p. 93 Consommation Le pays où la bonne chère est trop chère p. 98 santÉ sylvia bongo ondimba et le gabon rose p. 102 soCiÉtÉ akanda, de beverly Hills à la jungle p. 108
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Le Plus de Jeune afrique
gabon
Cassandre s’est trompée Un climat politique tendu, des cours du pétrole en berne, des grèves à répétition : il n’en fallait pas plus pour que certains prédisent une explosion sociale. Mais les nuages se dissipent, et le gouvernement maintient son cap. georges DoUgUeLI, n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
envoyé spécial jeune afrique
Photos : DCP Gabon
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p Le président Ali Bongo Ondimba a reçu les leaders de la majorité et de l’opposition, le 4 février, au Palais du bord de mer.
jeune afrique
P
plans d’une transition et le profil de ses acteurs ! aradoxe pour un pays réputé pour Adoubé ambassadeur du congrès parisien, Jean sa stabilité. On prédit au Gabon des Ping, 72 ans, ex-chef de la diplomatie d’Omar lendemains incertains. Certaines cassandres avaient même parié Bongo Ondimba (1999-2008) et ancien président qu’avant la fin du septennat en de l’Union africaine (2008-2012), est devenu la cours, les jeunes descendraient dans figure de proue de cette fronde. la rue pour « balayer » le pouvoir, à la mode burhasardeuse. C’était oublier que Libreville n’est kinabè. Ceux qui rêvent de conquérir le pouvoir ne semblent plus croire en la politique – alors pas Ouagadougou et qu’Ali Bongo Ondimba n’est que la prochaine présidentielle est prévue en pas Blaise Compaoré. Mais qui parmi les meneurs 2016 –, et ceux qui l’exercent parient sur leur de la manifestation du 20 décembre dans les rues bilan économique et social pour le conserver. de la capitale n’a pas rêvé du contraire ? Peine Ces derniers mois, il y a bel et bien eu de l’élecperdue, la stratégie hasardeuse de l’opposition tricité dans l’air de Libreville, des manifestations n’a pas produit le résultat escompté. Et le soufflé non autorisées, un mort, plusieurs Péan est retombé. À cause des liens troubles du Français avec le Gabon, blessés… Gouvernement et oppoL’opposition sition ont entretenu des relations des approximations d’une enquête et de l’extrême violence de l’attaque compliquées. Ils se sont ignorés, a longtemps dénigrés, invectivés, parfois devant – qui a eu pour effet de susciter de rêvé d’un les tribunaux et toujours dans un l’empathie pour sa victime. scénario à climat de grande tension. Le débat On avait aussi prédit que les la burkinabè. politique a moins porté sur les revendications sociales déstabiliseraient le pays, une menace récurréformes électorales que sur l’état civil du président. Et pour cause. Le dernier livre rente compte tenu de l’influence des syndicats. Des remous sociaux ont certes été suscités par de Pierre Péan (Nouvelles Affaires africaines, les puissantes fédérations syndicales des perpublié fin octobre 2014 chez Fayard) a fait l’effet d’une bombe. sonnels de l’éducation (lire p. 80), bien résolues Le journaliste français y remet en cause la filiaà faire aboutir leurs revendications salariales. tion d’Ali Bongo Ondimba et conteste son éligibilité Ces grèves de fonctionnaires, auxquelles se sont à la tête de l’État. Même si le brûlot a surtout eu un joints les salariés du pétrole, ont participé à la dramatisation de la situation, mais n’ont pas été retentissement dans les médias, l’opposition, réunie à Paris au début de décembre, a tenté d’en tirer suivies dans les autres secteurs d’activité. un bénéfice politique. Envisageant l’improbable Le Gabon n’a jamais été à l’arrêt, en dépit des hypothèse d’une interruption du septennat avant rumeurs alarmistes de fin d’année. Les plus son terme, les opposants ont même esquissé les persistantes ont annoncé comme « imminent » n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
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Le Plus de J.A. Gabon le défaut de paiement des finances publiques. « Il y a péril en la demeure », a alerté l’ancien Premier ministre Raymond Ndong Sima, qui voit tout en noir depuis son départ de la primature en janvier 2014. « La notion de “caisses vides” n’a aucun sens économique pour un État », a répliqué son successeur, Daniel Ona Ondo (lire pp. 77-78). Et le chef du gouvernement de poursuivre : « Ce qui compte, c’est de disposer de sources de revenus, et le Gabon en possède. D’avoir des indicateurs macroéconomiques solides, ce qui est encore le cas. De définir des politiques publiques qui servent notre vision du pays et qui soient en cohérence avec nos moyens et nos modes de gestion. Et c’est à cela que nous consacrons nos efforts ! » Selon le ministre de l’Économie, Régis Immongault (lire p. 91), ces « fondamentaux rassurants » vont permettre de poursuivre la politique d’investissements publics adoptée pour accélérer le développement économique, industriel et social. Dans les dépenses totales de l’État, la part moyenne du budget consacrée aux investissements publics est passée de 25 %, sur la période 2007-2009, à 40 % sur la période 2010-2014, ce qui a largement contribué à tirer la croissance vers le haut. Évidemment, une telle hausse des dépenses d’investissement a mis à l’épreuve les capacités administratives de l’État en matière de planification, de programmation et d’exécution des projets. La création de l’Agence nationale des grands travaux (ANGT), en 2010, a permis de corriger ces insuffisances, mais pas assez pour éviter des retards dans la livraison de certains ouvrages. Pour rationaliser encore plus ce secteur
en janvier, l’état s’est résolu à supprimer les subventions sur les produits pétroliers.
Réconciliation fiscale avec total
L
es relations entre l’État gabonais et le groupe Total se normalisent. Signal fort de cet apaisement, la nomination, le 7 janvier, d’Henri Max Ndong à la tête de la filiale locale du groupe français. Ce cadre du groupe, polytechnicien, est le premier Gabonais à occuper ce poste. Par ailleurs, le conflit fiscal qui opposait Total Gabon (dont l’État détient 25 % du capital) au Trésor est en passe d’être réglé. Fin décembre, Total Gabon a effectué un premier versement, d’une soixantaine de milliards de F CFA (plus de 90 millions d’euros), dans le cadre de l’accord trouvé avec l’administration fiscale pour le paiement des sommes que cette dernière lui réclamait. D’autres versements sont prévus, selon un échéancier arrêté par les deux parties. C’est un nouveau départ, après la crise qui avait éclaté il y a un an. En février 2014, à la suite du contrôle fiscal portant sur ses exercices de 2008 à 2010,Total Gabon, premier contributeur au budget de l’État, recevait un avis de redressement de 805 millions de dollars (environ 711 millions d’euros au cours actuel), assorti d’un avis de mise en recouvrement partiel. La procédure fut suspendue le mois suivant, l’entreprise ayant engagé un recours auprès de l’administration fiscale. L’affaire était alors remontée au plus G.D. haut niveau de l’État, au Gabon comme en France. l n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
sensible, le gouvernement a pris la décision, le 29 janvier, de fusionner l’ANGT et le Fonds routier pour donner naissance à une seule entité, l’Agence nationale des grands travaux d’infrastructures (ANGTI), toujours rattachée à la présidence de la République et placée sous le contrôle du Bureau de coordination du plan stratégique Gabon émergent (BCPSGE). Pourtant, ceux qui jouent les pythies n’ont pas tort sur toute la ligne. Quelques nuages pourraient en effet venir ralentir la marche du pays vers l’émergence. Le premier est lié aux conséquences de l’effondrement des cours du pétrole. « Dès le départ, la loi de finances 2015 était discutable, tance Raymond Ndong Sima. Elle tablait notamment sur une baisse du prix du pétrole de 20 % et une appréciation du taux de change du dollar américain de 2,1 % par rapport au franc CFA. On sait ce qu’il en est… Et rien n’indique que ce mouvement soit terminé », prévient-il. Même diagnostic au gouvernement, où l’on travaille à l’élaboration d’une loi de finances rectificative qui tienne compte de la réalité des cours du brut. note salée. Autre défi, interne cette fois, la
réduction des dépenses publiques – hors investissements dans les infrastructures et le pacte social, que le gouvernement exclut de raboter, puisqu’ils sont au cœur de sa stratégie de croissance et de développement. Comment atteindre l’émergence sans mettre en œuvre la douloureuse réforme des subventions sur les produits pétroliers ? Ces dernières s’élevaient à près de 200 milliards de F CFA (environ 305 millions d’euros) et permettaient de stabiliser les prix du carburant à la pompe à 470 F CFA/litre pour le gasoil et 595 F CFA/litre pour l’essence. Le 29 janvier, le gouvernement s’est finalement résolu à supprimer ces subventions, hormis pour le butane et le pétrole lampant. L’autre épineux problème à résoudre est de contenir la masse salariale de la fonction publique, qui devrait représenter 750 milliards de F CFA dans le budget 2015. Cela suppose que le gouvernement renonce à « acheter » la paix sociale en résistant face aux syndicats, qui exigent la généralisation de la prime d’incitation à la performance (PIP) instaurée mi-2014 et octroyée pour l’instant à certaines catégories de fonctionnaires. Un objectif difficilement envisageable dans la conjoncture actuelle. Sur les six premiers mois, la note a déjà été salée : 114 milliards de F CFA. Reste aussi à réduire le taux de chômage, qui atteint un niveau très élevé (20 %), en particulier celui des jeunes (30 %). Outre les dispositifs mis en place l’année dernière dans le cadre du pacte social, le gouvernement sait qu’il doit donner davantage d’oxygène au secteur privé pour rendre l’économie plus attractive et créatrice d’emplois. l jeune afrique
Ecobank Gabon
2015
sera résolument une année charnière pour Ecobank Gabon. La Banque mise en effet sur la qualité de service et l’innovation. Il s’agira pour elle d’offrir des espaces adaptés aux particuliers et des produits efficaces aux institutionnels, de la multinationale à la PME. C’est dans ce contexte que le concept de « Banque Unique » prend tout son sens car il transcende les barrières géographiques et linguistiques et standardise les procédures. La clientèle d’Ecobank Gabon bénéficiera donc de l’expérience qu’a accumulée le Groupe au cours des 3 dernières décennies, dans les 40 pays (en Afrique et au-delà) dans lesquels celui-ci est présent. Ainsi, afin de satisfaire aux exigences de ses clients, Ecobank Gabon continue d’investir massivement dans les composantes de son épine dorsale : sa plate-forme technologique et son système de télécommunication. Ceci permet à la Banque d’aller au-delà des produits traditionnels et de proposer
Mme Gaëlle Biteghe Directeur Général d’Ecobank Gabon
l’innovation des services à réelle valeur ajoutée, tel OMNI, sa solution de Banque en ligne, plébiscité par la clientèle Corporate depuis son lancement pour sa facilité d’intégration à différents systèmes de gestion et sa possibilité novatrice d’intégré les données d’autre banques partenaires. La sécurité et la rapidité d’OMNI ne sont bien entendu pas en reste. La Banque d’affaire quand à elle continue de prospérer. Elle oriente ses actions de conseil et de financement vers des industries stratégiquement choisies telles le pétrole, les télécommunications, les mines et l’énergie. Entre autres efforts d’innovation, Ecobank Gabon s’est dotée d’une équipe dédiée au commerce international « vanille » ou structuré. L’idée étant d’offrir encore plus d’adaptabilité à ces mêmes clients institutionnels dont le niveau de sophistication n’a d’égal que celui des pays partenaires du Gabon. En effet, le Plan Stratégique Gabon Emergent commande que les banques se dotent d’outils permettant la fluidité des échanges bilatéraux et multilatéraux. L’appartenance à un groupe de réseau revêt donc une importance capitale dans la capacité d’Ecobank à offrir ce service. C’est ainsi qu’au premier trimestre 2015, Ecobank a déjà financé plusieurs millions de dollars de transactions de commerce international, pour le compte de multinationales mais aussi des entreprises locales. Les particuliers ne sont évidemment pas en reste. Le taux de bancarisation faible, l’émergence d’une classe sociale moyenne grandissante dans le pays représentent autant d’opportunités
Ecobank Gabon
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L’avenir est dans le panafricanisme qu’Ecobank Gabon n’a de cesse de saisir. C’est ainsi qu’une nouvelle segmentation des clients particuliers, en ligne avec la stratégie du groupe est en phase de déploiement, afin que chaque client se retrouve, tant dans l’environnement qui leur sera offert que grâce à la palette de produits et services à valeur ajouté adaptés. La grande nouveauté est le segment Premier qui, comme son nom l’indique, se veut pionnier dans la gestion de patrimoine et les services à très grande valeur ajoutée. Les jeunes et les étudiants font également partie intégrante de cette nouvelle stratégie et grâce à son approche avant-gardiste dans les nouvelles technologies et son intérêt pour les réseaux sociaux, Ecobank offre désormais à ces leaders de demain des options novatrices. À la suite d’un partenariat avec l’Etat du Gabon, Ecobank Gabon a pu bancariser plus de quatre mille étudiants boursiers, et le chiffre ne cesse de croitre. Enfin, le premier trimestre de l’année en cours ne saura s’achever avant d’avoir vu l’ouverture de l’Agence Premier (précédemment Arcade) qui dévoilera le nouveau visage d’Ecobank Gabon. Les particularités de cette agence seront multiples mais l’on notera essentiellement la volonté d’offrir plus d’espace donc plus de confort mais surtout, un Lounge Premier. En définitive, la Banque garde à l’esprit les attentes des clients de ce segment en termes de confort, de discrétion et de célérité. ●
DIFCOM - DF © F. Zina
ou le choix de
Le Plus de J.A. Gabon politique
À la recherche de l’oiseau rare Les principaux ténors de l’opposition font aujourd’hui front commun. S’accorderont-ils demain pour désigner un candidat unique à la présidentielle ?
Et ils n’étaient pas parvenus à s’entendre. Cette multiplicité des candidatures avait été fatale à l’opposition : le candidat du PDG, Ali Bongo Ondimba, l’avait emporté avec 41,73 % des voix, profitant de la dispersion des suffrages entre ses principaux opposants, André Mba Obame (25,88 %) et Pierre Mamboundou (25,22 %). En 2016, en l’absence de Mba Obame, il serait tout aussi étonnant que le représentant de l’Union du peuple gabonais (UPG), affaiblie et divisée depuis le décès de son fondateur, Pierre Mamboundou, vienne titiller le concurrent du parti au pouvoir. Mais rien n’est joué. Animosité. Récemment rallié à l’oppo-
WILS YANICK MANIENGUI/Afp
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p Jean Eyeghe Ndong, l’un des leaders de l’Union nationale, tout juste réhabilitée.
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n tête de cortège dans les manifestations contre la politique gouvernementale, ils marchent main dans la main. Qu’en serat-il lorsqu’il s’agira de désigner le candidat unique de l’opposition, celui qui portera l’étendard de plusieurs dizaines de partis, petits et grands, face au candidat du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir), probablement le président Ali Bongo Ondimba lui-même ? Le risque de voir s’affronter les grands fauves de la politique plane. D’autant que, par le passé, ils n’ont jamais réussi à se mettre d’accord sur le nom d’un leader commun. En attendant le moment fatidique, on élude la question. Jusqu’à quand? La donne a changé le 4 février, lorsque le pouvoir a réhabilité l’Union nationale (UN), coalition d’opposition interdite en janvier 2011 après que l’un de ses fondateurs, André Mba Obame, se fut autoproclamé président de la République. La question de son leadership, donc de son candidat, doit être examinéeenl’absencedeMbaObame,toujours souffrant. Pourtant, à l’approche de n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
l’électionprésidentielle–prévuemi-2016–, il va falloir vite trancher. Même si cette décision aura pour effet de précipiter le lancement de la campagne électorale et de la transformer en marathon. DispErsion. Quoi qu’il en soit, si elle
veut conquérir le pouvoir, l’opposition a intérêt à progresser en rangs serrés. Le PDG, redoutable machine électorale mise en place en 1968 par Omar Bongo Ondimba, continue de bénéficier d’un maillage territorial étendu et repose sur un socle difficile à ébranler, même s’il a subi quelques défections ces derniers mois. L’opposition, elle, se caractérise par l’existence de deux coalitions distinctes et parfois rivales. L’Union des forces pour l’alternance (UFA), conduite par Jules Aristide Bourdes Ogouliguendé et Séraphin Ndaot Rembogo, est en effet rarement au diapason du Front uni de l’opposition pour l’alternance (Fuopa), mené par les barons de l’Union nationale, aux premiers rangs desquels Jean Eyeghe Ndong et Zacharie Myboto. Si leurs noms étaient différents, ces deux blocs existaient déjà en 2009…
sition, Jean Ping, tête d’affiche du Fuopa, va certainement postuler pour être son candidat. Porté par le courant des souverainistes de l’UN, l’ancien président de la Commission de l’Union africaine devrait bénéficier du soutien de ces derniers (qui constituent la première force d’opposition). D’ores et déjà, il travaille à rassemblerun électoratétendu,des appuis de Mba Obame en 2009 à la frondeuse Port-Gentil, alorsacquiseàMamboundou. Mais la capitale économique n’est pas encore gagnée pour Ping. Il n’est pas sûr de compter parmi ses soutiens le président du Parti pour le développement et la solidarité (PDS), Séraphin Ndaot Rembogo, l’autre grosse pointure politique de son Ogooué-Maritime natal. Ancien maire de Port-Gentil, Ndaot voue à Ping une animosité proverbiale et a déjà un pied dans la majorité : il a adhéré au pacte social proposé par Ali Bongo Ondimba. D’autres appuis pourraient lui faire défaut au sein même de l’Union nationale, où il compte paradoxalement le plus d’amis. « Ping n’est pas le candidat naturel de l’opposition », se cabre Mike Jocktane, le principal lieutenant d’André Mba Obame, qui roule désormais pour luimême et n’exclut pas de tenter sa chance en 2016. « Je suis conscient de la difficulté quenouspourrionsrencontrerdansl’organisation d’une élection primaire au sein de l’opposition, reconnaît-il. C’est pourquoi je recommande de désigner notre candidat suivant une procédure et des critères bien précis. » Et il faudra rassurer les barons du mouvement, notamment Jean Eyeghe Ndong ou Zacharie Myboto, jeune afrique
à l’heure des comptes lequel pousse d’ailleurs son gendre, PaulMarie Gondjout, à se porter candidat. « Coming out ». Un projet que pour-
raient peut-être caresser d’autres « indépendants », comme le président du Parti social démocrate (PSD), Pierre-Claver Maganga Moussavou, qui a montré sa propension à se singulariser en se présentant aux législatives alors qu’elles étaient
boycottées par l’opposition, et auquel son fief de Mouila, en pays Punu (centre), a toujours été fidèle ces dernières années. Enfin, quelques personnalités en rupture de ban sont susceptibles de nourrirpareillesambitions,àl’instardel’exPremier ministre Raymond Ndong Sima. Son passage à la primature (entre février 2012 et janvier 2014) a été une longue suite d’affrontements avec le
premier cercle du chef de l’État. Les blessures qu’il en a gardées l’ont poussé vers l’opposition, même s’il n’a pas encore fait son « coming out » et dit consacrer son temps à l’écriture de son livre, Quel renouveau pour le Gabon?, à paraître le 5 mars. Assurément, le candidat unique de l’opposition sera un oiseau rare difficile à trouver. Encore faut-il le chercher… l georges DougueLi
questions à Casimir oYÉ mBa Ancien Premier ministre d’Omar Bongo Ondimba, opposant
« seule solution pour sortir de cette impasse, le dialogue »
C
jeune afrique : Comment jugez-vous la situation politique au gabon ? Casimir oYÉ mBa : Les
personnalités proches du pouvoir soutenaient que tout allait bien, mais aujourd’hui il semble qu’elles se soient enfin rendu compte que ça n’allait pas. elles commencent à parler de dialogue… Les tensions actuelles ont plusieurs causes. La première est que les Gabonais savent que la Cour constitutionnelle, le ministère de l’intérieur et la jeune afrique
année. Je trouve extraordinaire que les membres du gouvernement aient parié sur un prix aussi haut du baril, alors que tous les indicateurs annonçaient sa chute ! que suggérez-vous pour faire baisser les tensions politiques ?
VinCent Fournier/J.A.
adre éminent du Parti démocratique gabonais (PdG, au pouvoir) depuis les années 1970, Casimir Oyé mba en a démissionné pour se présenter à la présidentielle de 2009, avant de retirer sa candidature à la dernière minute. il est passé dans l’opposition l’année suivante en participant à la création de l’Union nationale. très critique sur le septennat d’ali Bongo Ondimba, l’ancien Premier ministre de son père explique « ce qui ne va pas ». et, comme il l’avait fait en 2009, appelle à un dialogue national.
Commission électorale nationale autonome et permanente (Cenap) ont accordé la victoire à ali Bongo Ondimba, qu’il a été installé et qu’il a la légalité pour lui, mais ils ne se reconnaissent pas dans ce pouvoir. Cette élection ne lui a pas apporté assez de légitimité pour gouverner dans de bonnes conditions. que lui reprochez-vous ?
La gouvernance du pays n’est pas satisfaisante. Le chef de l’état considère que c’est une caste qui devrait
diriger le pays. Soit. mais il y a des pratiques douteuses qu’il ne peut pas ignorer. résultat: la redistribution de la richesse nationale est inégalitaire. C’est ce qui explique toutes ces grèves dans les administrations. Prenez la gestion budgétaire. depuis trois ans, elle n’est pas efficace. Le budget est adopté courant décembre et mis en place vers février. mais, avant même d’être engagé, il doit être modifié par une loi rectificative. C’était le cas en 2014 et cela devrait se reproduire cette
Je n’ai pas de solution toute faite. mais, encore une fois, je suggère de dialoguer. au lendemain de l’élection de 2009, j’ai publié une tribune dans Jeune Afrique pour appeler au dialogue. C’est une méthode. quand vous dites dialogue, vous pensez conférence nationale ?
Ce que je pense importe peu. Certains veulent une conférence nationale et souhaitent même qu’elle soit souveraine. appelons ces assises comme vous voulez, ce n’est pas important. Ce qui compte, c’est d’appeler les gens qui ont de l’expérience, la société civile, les jeunes, les religieux, à dialoguer. On les réunit, et on voit de manière consensuelle ce que l’on peut faire pour sortir de cette impasse. l Propos recueillis par g.D. n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
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Gabon à l’heure des comptes
AffolAby JAmes frAnck
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IntervIew
Daniel Ona Ondo « notre économie est assez solide pour résister au choc pétrolier » Nouveau mode de gestion, réduction des dépenses dans certains secteurs, diversification des modalités de financement des chantiers… le Premier ministre explique les choix de l’exécutif. Et sait qu’il doit accélérer la cadence.
D
epuis un an, c’est au Premier ministre Daniel Ona Ondo, 69 ans, que revient la charge de mettre en œuvre le plan straté gique Gabon émergent (PSGE) engagé par Ali Bongo Ondimba. L’agrégé d’économie a été doyen, puis recteur de l’université OmarBongo (UOB). Avant de devenir chef de gouvernement, il a été nommé successivement ministre de la Culture, de l’Éducation nationale, des Postes et Télécommunications (de 1997 à 2007) puis élu viceprésident de l’Assemblée nationale (20072014). À l’approche de la présidentielle de 2016, sa mission est claire. Il doit accélérer les réformes, tant sur le plan économique que sur le plan social, et obtenir rapidement des résultats. jeune afrique
jeune afrique : quelles sont vos priorités économiques pour 2015 ? Daniel Ona OnDO : Nous allons
concentrer nos efforts sur le développe ment des infrastructures de transports et d’énergie afin de renforcer l’attractivité du pays pour les investisseurs étrangers. La mise en œuvre de notre stratégie nationale d’industrialisation va être accélérée et nous allons favoriser le développement desPMEPMI,quisontaucœurdeladiver sification et de la lutte contre le chômage. Mais la grande nouveauté sera budgétaire. Les réformes engagées se traduisent en effet par un basculement, à partir de cette année, vers une budgétisation par objectif de programme. Cela va nous permettre de maîtriser les dépenses de
p Le troisième chef de gouvernement du septennat, dans son bureau, à la primature.
fonctionnement et, donc, de dégager des marges plus significatives en faveur des dépenses d’investissements qui sou tiennent la croissance et la diversification. en quoi votre feuille de route diffèret-elle de celle de vos prédécesseurs ?
À ma nomination, le chef de l’État m’a demandé d’insuffler une nouvelle dynamique dans notre marche vers l’émergence, en accélérant la crois sance inclusive et en assurant la mise en œuvre du Pacte social pour réduire la pauvreté et l’exclusion. Mon équipe doit également poursuivre les réformes entreprises depuis 2010 pour réduire notre dépendance visàvis du secteur pétrolier. À cet égard, il est impératif de continuer à mettre en œuvre du schéma directeur national d’infrastructures. Sans négliger pour autant la lutte contre le chômage des jeunes, qui reste élevé, ni le renforcement des secteurs de l’éducation, de la santé et du logement social. n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
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Le Plus de J.A. Gabon La baisse des recettes pétrolières va-telle vous contraindre à réduire la voilureet à tailler dans les budgets sociaux?
Compte tenu de la contribution encore importantedusecteurpétrolierauxrecettes budgétaires, la chute des cours observée depuis mi-juin 2014 va se traduire par une baisse significative des revenus de l’État, nouscontraignantàélaborerunpland’ajustement de nos dépenses publiques. C’est ce que le gouvernement vient de décider, tout en veillant, comme l’a prescrit le chef de l’État, à ce que les efforts d’ajustement ne se fassent pas au détriment des plus démunis. La solidité des indicateurs macroéconomiques et les fruits des réformes engagées depuis2010vontnouspermettredelimiter les conséquences négatives de la baisse des prix du pétrole sur notre économie. Celle-ci est de toute façon assez forte pour tenir le choc: nous disposons de réserves consistantes, nos avoirs extérieurs représentent environ onze mois d’importations et notre taux d’endettement est d’envi-
Pourquoi certains grands chantiers ontils pris du retard ?
Quelques projets sont confrontés à des difficultés liées notamment à la qualité des études, mal ficelées, qu’il a fallu compléter ou actualiser. Parfois, la programmation des travaux n’était pas compatible avec les décaissements. Nous avons aussi constaté deslenteursdanslamobilisationdesfinancements complémentaires que nécessitaient les travaux additionnels sur certains chantiers. D’autres problèmes ont eu un impact sur les délais de livraison, comme le non-respect par quelques entreprises des clauses contractuelles ou encore les tensions de trésorerie liées aux grèves à répétition des régies financières… Comment comptez-vous y remédier ?
Dès cette année, nous allons veiller à diversifier les modalités de financement denosinvestissementslourds,notamment en adoptant une stratégie d’endettement plus hardie. Nous avons aussi engagé un processus pour rationaliser nos investis-
Je suis triste de voir Pierre Péan, soi-disant notre ami, salir le pays. » ron 30 % du PIB. Malgré la conjoncture actuelle du marché pétrolier, le taux de croissance prévu pour 2015 sera de 5 %, avec une dynamique davantage tirée par les activités hors pétrole, dont les services et, en particulier, les TIC [technologies de l’information et de la communication]. Et cetteconjoncturenefaitquerenforcernotre volonté de nous diversifier et d’accélérer les réformes structurelles. Certes, de légères tensions sont annoncées pour 2015, mais les mesures budgétaires courageuses que nous avons prises, conjuguées à la mise en œuvre du Pacte social et du Schéma d’investissement humain, permettront de les contenir à un niveau soutenable pour le pouvoir d’achat des ménages. Legouvernement vadonc à lafois maintenir ses efforts d’investissement dans le domaine des infrastructures, et poursuivre la mise en œuvre de la Stratégie d’investissement humain et du Pacte social qui assurent, d’une part, une meilleure prise enchargeparl’Étatdespopulationséconomiquement faibles et, d’autre part, la promotion de l’autonomisation des Gabonais, pour qu’ils contribuent à l’amélioration de leur cadre de vie. n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
sements, afin qu’ils soient compatibles avec nos capacités administratives et nos disponibilités de trésorerie. Certaines dispositionsdu codedesmarchésontétérévisées, de manière à garantir la qualité des travaux et leur exécution normale. Enfin, la réorganisation en cours de certaines administrations en charge du Budget devrait nous permettre de corriger les dysfonctionnements évoqués, afin de renforcer l’efficacité de la dépense publique et la bonne exécution des chantiers. Nous avons aussi entrepris d’apurer les arriérés de paiement dus aux entreprises. Près de 550 milliards de F CFA [838,47 millions d’euros] ont été décaissés à ce titre en 2014. Le cadre budgétaire révisé que nous comptons mettre en œuvre très prochainement prévoit que nous poursuivions ces régularisations au profit des entreprises, dont le développement, faut-il le rappeler, détermine la création des richesses et, donc, la réduction de la pauvreté. Le secteur forestier a souffert de l’interdiction d’exporter les grumes depuis 2010. Comment se porte-t-il aujourd’hui?
Le Gabon n’a plus vocation à être un exportateur de bois, mais à devenir un
producteur et un exportateur de produits manufacturés. Il s’agit de produire de la valeur ajoutée, de créer un savoir-faire, des emplois et, donc, des revenus. Grâce à cette mesure, des usines sont nées, qui ne se limitent plus au sciage et au déroulage. Lazoneéconomique spécialede Nkokleur est consacrée. Une politique de gestion durable de nos forêts est engagée, un dispositif de formation aux métiers du bois et une agence chargée du développement de lafilièreontétémisenplace…Aucontraire, le secteur est en plein renouveau! Plusieurs personnalités sont soupçonnées de détournement de fonds dans le cadre du financement des chantiers liés aux fêtes tournantes du 17 août [célébrations du jour de l’indépendance]. Les procédures visent cependant essentiellement d’anciens dignitaires passés dans l’opposition…
Il est logique que les personnes mises en cause soient d’anciens dignitaires, puisque ce sont eux qui étaient en charge de ces dossiers. Des structures avaient été mises en place et des responsables désignés pour que ces crédits soient utilisés de manière judicieuse et correcte. Or, on a constaté que les fonds ont été détournés. Il est donc normal que la justice fasse son travail et, si ces personnes sont reconnues responsables, elles devront en assumer les conséquences légales. Une chose est sûre: d’importantes sommes d’argent ont disparu. Que fallait-il faire ? Rien ?
Le chef de l’État a été durement attaqué dans un livre publié fin octobre 2014 par le journaliste français Pierre Péan. L’avez-vous senti déstabilisé ?
Ali Bongo Ondimba est un dirigeant qui impressionne par son sang-froid, son courage et sa ténacité face à l’adversité. Nous, ses collaborateurs, le constatons tous les jours. Et il n’est même pas envisageable que la conduite des affaires de l’État puisse avoir été affectée, car le Gabon est une République démocratique, dotée d’institutions fortes. En revanche, je suis triste de voir qu’un journaliste, soi-disant ami du Gabon et des Gabonais, peut, au mépris des règles de déontologie de sa profession, pour des raisons qui n’ont rien à voir avec la recherche de la vérité, créer la rumeur, nourrir la calomnie, salir un pays et le mettre en danger en cherchant à déstabiliser ses institutions. l Propos recueillis par GeorGes DoUGUeLI jeune afrique
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Le Plus de J.A. Gabon Société civile
Secoueur de cocotier Il a lancé des grèves dans le Haut-Ogooué, fief électoral de la famille Bongo Ondimba, et fait tomber deux ministres. À la tête des syndicats de l’éducation, marcel Libama est un infatigable rhéteur.
D
ans sa langue maternelle, le ndoumou, parlée à Franceville (Haut-Ogooué), son nom est celui d’un insecte particulièrement redouté des amateurs de pêche fluviale. Silhouette longiligne, voix fluette, débit saccadé, le leader syndical est prolixe et, en matière de nuisance, ne pâlit pas de la comparaison avec le coléoptère aquatique. Marcel Libama et ses camarades de la Convention nationale des syndicats du secteur éducation (Conasysed), dont il est le délégué administratif, ont fait tomber les deux prédécesseurs de l’actuelle ministre de l’Éducation nationale, Ida Reteno Assonouet. Léon Nzouba, pourtant promis à un bel avenir au sein du gouvernement, en gardera un souvenir cuisant. Empêtré dans l’affaire des recalés du baccalauréat 2014 (qu’il voulait octroyer au rabais, au-dessous de la moyenne de 10/20), il s’est heurté à la résistance d’élèves cornaqués par la puissante fédération des syndicats du secteur. Mis en minorité en Conseil des ministres, il a rendu son tablier le 31 août. Avant lui, Séraphin Moundounga avait connu le même sort, écarté du volcanique ministère après avoir perdu un arbitrage relatif au baccalauréat 2013. Ces dernières années, la Conasysed a également pu obtenir la création d’une prime d’incitation à la fonction enseignante, l’augmentation de l’allocation de rentrée scolaire de 25 000 à 62 000 F CFA (de 38 à 95 euros), ainsi que celle de la prime de transport, passée de 17 000 à 35 000 F CFA. Surenchère. Poil à gratter de la République,MarcelLibamadétonneparmi les enfants du Haut-Ogooué, la province d’origineduprésidentAliBongoOndimba. Dans le reste du pays, on s’étonne en effet qu’un Altogovéen puisse empêcher le pouvoir de dormir sur ses deux oreilles… Pourtant, il a été l’un des premiers syndicalistes à organiser des grèves dans le fief électoral des Bongo Ondimba. « Montrer que la situation des enseignants dans le Haut-Ogooué était la même qu’ailleurs faisait aussi partie de mon engagement, explique-t-il.Nousavionspassédesannées n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
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p Le syndicaliste se défend de vouloir entrer en politique.
sans avoir de salaires, les écoles se retrouvaient sans tableaux, sans craies, sans toiture. À l’époque, c’est un leader syndical, Samuel Ngoua Ngou [emblématique secrétaire général du syndicat des enseignants de l’Éducation nationale dans les années 1990], en visite à Franceville, qui m’a poussé à m’engager. »
instaurer un Conseil national de dialogue social. » Ses détracteurs soupçonnent le bouillonnant syndicaliste de nourrir des ambitions politiques, à l’instar de celle à qui il a succédé, Christiane Bitougat, qui accepta un poste de ministre du Travail dans le gouvernement de Jean Eyeghe Ndong (de 2006 à 2009), perpétuant ainsi une tradition de relations troubles entre pouvoir et dirigeants syndicaux. AmbitionS. Aujourd’hui, à 47 ans, Marcel Libama est à la tête d’une orgaLibama s’en défend. Lui veut s’inspirer du parcours de son ami défenseur nisation intersyndicale qui compte près de l’environnement, Marc Ona (président de l’ONG « chez nous, le dialogue est Brainforest), et de l’intranun vain mot. il n’y a même pas sigeance d’une autre grande de cadre de discussion possible. » icône de la société civile, Gregory Ngbwa Mintsa de 15 000 sympathisants au sein des (décédé l’an dernier, figure de proue de la lutte contre les « biens mal acquis »). personnels du secteur de l’éducation. Mais pourquoi toutes ces grèves intermiD’ailleurs, au sein du syndicat, des mécanables, qui donnent de lui l’image d’un nismes ont été mis en place pour éviter syndicaliste prompt à la surenchère ? toute instrumentalisation. Libama est « Chez nous, le dialogue est un vain catégorique : « Plus question qu’après mot, répond-il. Vous n’êtes écoutés que une rencontre avec le Premier ministre si vous faites grève. Il n’y a même pas on vienne à la télévision pour dire que de cadre de discussion possible… Nous nous mettons fin à la grève sans passer nous battons depuis des années pour par le vote. » l GeorGeS DouGueLi jeune afrique
CommuniquĂŠ
Gabon à l’heure des comptes
TRIbuNe
DaviD iGNasZEWEsKi pour J.a.
Opinions & éditoriaux
Guy ROSSATANGARIGNAuLT Professeur à la faculté de droit et sciences économiques de l’université Omar-Bongo de Libreville (UOB)
Ce qu’être gabonais veut dire
s
elon les chiffres du dernier recensement (2014), le Gabon compte 1802728 habitants. Dans cette masse, qui est gabonais et, surtout, qu’est-ce qu’être gabonais ? Le code de la nationalité répond à la première question. Selon son article 11, possède la nationalité gabonaise, à titre de nationalité d’origine, celui qui « a un parent au moins de nationalité gabonaise; celui qui est né au Gabon de parents inconnus ou apatrides ; celui qui est né au Gabon de parents étrangers si l’un d’eux y est lui-même né ». Il prévoit aussi que peuvent prétendre à la nationalité gabonaise le conjoint d’un Gabonais après trois ans de mariage (art. 22), le mineur bénéficiaire d’une adoption plénière (art. 25) et, enfin, tout étranger résidant depuis cinq ans et ayant investi dans le pays (art. 31).
Une identité ne saurait pourtant se réduire aux papiers du même nom. Être gabonais, c’est partager avec d’autres un ensemble de « signes », d’associations et de modes de comportement et de communication (la culture), qui font qu’un groupe est ce qu’il est et non autre chose, ainsi que je l’ai développé par ailleurs [voir ouvrages ci-contre]. Cet « être gabonais » est le fruit d’éléments divers (démographie, géographie, histoire, économie, politique, anthropologie, etc.). La faiblesse du peuplement a constitué un puissant facteur d’intégration des différents groupes humains présents sur ce territoire depuis le moment colonial. Ainsi, c’est à juste titre que l’universitaire américain BrianWeinstein a affirmé que le « Gabon était une nation bâtie sur l’Ogooué » (M.I.T., 1966) pour signifier l’importance de ce fleuve dans la construction nationale. Son histoire, c’est celle d’une expérience coloniale vécue comme une Cendrillon de l’Afrique française. La « cohésion sociale » née d’une certaine prospérité a cimenté l’identité en lubrifiant le récit national. De fait, il n’y a eu « crises » que lorsque l’économie se grippait et que s’aggravait la perception d’un partage inégal de la richesse commune.
facilité par l’appartenance commune au fonds culturel bantou. Être gabonais, c’est pouvoir penser gabonais avant de penser ethnie, couleur, parti, religion, province, etc. C’est admettre que le Gabon n’appartient à personne en particulier ; ni à une ethnie, ni à une province, ni à un parti, mais à tous les Gabonais. L’oublier ou l’ignorer est cause de malheur. Être gabonais, c’est assumer et assurer que les intérêts du pays priment sur toute autre considération, au-delà des amitiés et fraternités éventuelles, quand bien même la réalité conduit à s’insérer dans un dispositif de cercles concentriques manifestant des solidarités diverses : muntu parmi les Bantous, africain du centre en Afrique centrale, africain en Afrique, francophone en Francophonie, citoyen du monde dans le monde, mais d’abord et toujours gabonais. Ne résistons pas à l’envie de citer Léon Mba : « Il faut penser gabonais le matin, penser gabonais en mangeant, penser gabonais même en embrassant une belle femme. J’ai fait faire une affiche
Le pays n’appartient ni à un parti, ni à une province, ni à une ethnie.
L’État au Gabon. Histoire et institutions Par Guy RossatangaRignault (Éditions RapondaWalker, Libreville, 2000) L’Afrique existe-t-elle ? À propos d’un malentendu persistant sur l’identité Par Guy RossatangaRignault et Flavien Énongoué (Éditions Dianoïa, Paris, 2006) jeune afrique
Quant à l’identité politique, elle s’est façonnée, dès les premiers matins de la République, sur l’obsession de l’unité, de la paix et la hantise subséquente de la disparition. D’où une pratique fondée sur l’exclusion symbolique de la violence. Toute sortie de ce paradigme s’est soldée par l’échec, faute de réelle adhésion populaire. Enfin, le « vouloir vivre ensemble » des Gabonais a été
“Gabon d’abord”. On m’a accusé de racisme. Eh bien non ! C’est un devoir. Nous devons nous souvenir que nous sommes gabonais avant tout, car on semble souvent l’oublier. » Oui, est gabonais qui aime sincèrement ce pays et qui est aussi à l’aise en écoutant Pierre-Claver Akendengué que Pierre-Claver Zeng sans craindre d’écouter Brassens ou Bob Marley. Est vraiment gabonais qui peut passer de l’ikoku de Mackjoss à l’empire d’Amandine [surnommée la Reine d’empire] tout en prenant la ligne « Libreville-Oyem sans escale » du groupe Binvouroux.Tout le reste n’est que vanité et poursuite du vent. En définitive, pour chacun de ceux qui y sont nés ou qui ont choisi cette terre où la nature montre à l’homme sa petitesse, être gabonais, c’est se vivre comme tel, sans calcul ni exclusive. Sans intérêts ni prétentions. Sans cosmopolitisme béat ni quête de vaine pureté. Cette terre qui accueillit Albert Schweitzer, Cheikh Amadou Bamba et SamoryTouré restera fidèle à sa tradition, en s’ouvrant à tous ceux qui témoignent d’une réelle passion pour elle et d’une sincère fraternité pour ses enfants. l n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
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Le Plus de J.A. Gabon portraits
Elles commandent, ils exécutent Ces quatre femmes se sont imposées dans le marigot politique, économique ou judiciaire. Leur secret pour venir à bout des préjugés sexistes ? Compétence et opiniâtreté. gEORgEs DOuguEli
A
u Gabon comme ailleurs, la plupart des femmes doivent braver des préjugés sexistes et des pesanteurs culturelles afin de bâtir leurs carrières. Et particulièrement celles qui ont osé entrer – comme par effraction – dans les allées du pouvoir.
Elles sont jugées plus durement que les hommes, non seulement dans le monde professionnel mais aussi dans leur vie personnelle si, par malheur, l’éducation de leurs enfants tourne mal. Femmes d’affaires, élues locales, magistrates ou conseillères politiques, elles ont dû se
battre pour changer les mentalités et faire reconnaître leur mérite pour accéder à des postes à responsabilité. Aujourd’hui, elles sont enfin unanimement considérées comme faisant partie du cercle restreint des personnalités les plus influentes du pays. l gEORgEs DOuguEli
Madeleine BERRE 48 ans, présidente de la Confédération patronale gabonaise (CPG)
à
la tête du syndicat patronal depuis décembre 2013, l’associée et directrice générale du cabinet juridique et fiscal Deloitte Gabon a succédé à un patron emblématique dans le pays, Henri-Claude Oyima (PDG du groupe bancaire BGFI). Une charge importante puisqu’elle est ainsi devenue la porte-parole et représentante de 300 entreprises qui génèrent 80 % du PIB du pays et concentrent 90 % des emplois dans le secteur privé. Mais Madeleine Berre ne devrait pas rencontrer de problèmes de communication avec le pouvoir, qui lui est familier. Son père, Jacques Rogombé, fut conseiller spécial d’Omar Bongo Ondimba. Quant à sa mère, Rose Francine Rogombé, elle est présidente du Sénat et a assuré l’intérim de la présidence du pays en 2009. Madeleine Berre aurait pu elle aussi opter pour une carrière politique. Mais, formée en droit des affaires et en fiscalité à l’université PanthéonAssas (Paris-II), elle a préféré intégrer le cabinet Fidafrica (PwC), avant de rejoindre Deloitte dix ans plus tard. l
desirey minkoh
Rose Christiane RAPONDA 51 ans, maire de Libreville
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ersonne n’avait vu venir la discrète mais influente ministre du Budget. Après avoir été élue conseillère municipale du 3e arrondissement de Libreville à l’issue du scrutin local de décembre 2013, Rose Christiane Ossouka Raponda, l’ancienne directrice générale adjointe de la Banque de l’habitat du Gabon, est devenue la première femme maire de la capitale. Et sa mission n’est pas une sinécure. Comment s’attaquer au problème des ordures ménagères qui s’entassent dans les rues quand la quasitotalité du budget de la mairie (18 milliards de F CFA, soit 27,4 millions d’euros) est affectée aux dépenses de fonctionnement ? En attendant les réformes nécessaires, les effectifs demeurent pléthoriques, les trafics, nombreux… À la hauteur des défis de l’édile. l n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
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jeune afrique
à l’heure des comptes
Sidonie Flore OUWÉ 44 ans, procureure de la République près le tribunal de première instance de Libreville
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lle ne cherche guère à être aimée. Et sa main ne tremble pas lorsqu’il s’agit de convoquer un poids lourd de la politique, de recevoir le meneur d’une grève estudiantine qui tourne à l’émeute, d’ordonner une descente musclée dans les quartiers populaires de la capitale pour arrêter des sans-papiers ou rappeler quelques commerçants à l’ordre. Ces dernières semaines, la magistrate, nommée procureure de la République de Libreville en 2011, a auditionné dans son bureau des opposants soupçonnés de troubles à l’ordre public à la suite d’une manifestation non autorisée, mais aussi d’anciens dignitaires soupçonnés de détournements de fonds publics dans le cadre des cérémonies tournantes de la fête de l’indépendance. « C’est une charge très délicate, reconnaît-elle. Pour me protéger, je m’entoure donc de toutes les précautions que m’offre la loi et m’astreins à un respect scrupuleux des grands principes de droit. » Et même si l’un de ses prédécesseurs à ce poste, Rose Francine Rogombé, est devenu président du Sénat, cette magistrate originaire de Ndendé (Ngounié) et diplôméedel’universitéOmar-BongodeLibreville ne se laisse pas griser par son pouvoir. l
I
l y a encore quelques mois, Rose Allogo Mengara était maire d’Oyem (60 000 habitants), la frondeuse capitale de la province du Woleu-Ntem (Nord). Elle avait pourtant refusé de briguer un nouveau mandat lors des municipales de décembre 2013, en raison de désaccords profonds avec Paul Mba Abessole, le patron du Rassemblement pour le Gabon (RPG, associé au parti présidentiel). Déjà en 2008, elle avait dû batailler contre les préjugés sexistes pour s’imposer en tant que candidate du RPG à Oyem. Plutôt que d’accepter de voir une femme aux commandes, son concurrent avait préféré quitter le parti. Rose Allogo Mengara avait alors remporté le scrutin… avant qu’il ne soit annulé par la Cour constitutionnelle. Mais elle avait ensuite gagné haut la main les municipales partielles (arrivant en tête dans 27 bureaux sur 28). En septembre 2014, c’est elle qui a quitté le RPG – suivie par 300 membres de la section Oyem de la formation – pour Jeune AFrique
rejoindre le Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir). Une belle prise pour le président Ali Bongo Ondimba, qui l’a tout de suite appelée à ses côtés, en tant que conseillère spéciale. L’ancienne professeure de lycée, ex-syndicaliste, patronne de l’ONG Agir pour le développement (qui incite notamment les populations à s’organiser pour investir dans l’agriculture), et dont l’action en matière d’aménagement et de gestion à Oyem a été efficace, a une bonne connaissance des dossiers sociaux, auxquels le président accorde une importance cruciale. Elle connaît aussi sur le bout des doigts la géopolitique électorale complexe du Woleu-Ntem – qui a massivement voté pour André Mba Obame à la présidentielle de 2009. Rose Allogo Mengara pourrait donc s’avérer être un atout majeur pour la campagne du PDG en 2016. l
Vincent Fournier/J.A.
Rose ALLOGO MENGARA 60 ans, conseillère spéciale du président
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Le Plus de J.A. Gabon Économie
Ce baril de tous les périls Malgré la chute des cours du brut, l’état continue d’investir, quitte à s’endetter. Ses bons indicateurs le lui permettent. Il ne faudrait toutefois pas que la situation s’éternise.
D
epuis l’élection d’Ali Bongo Ondimba à la présidence en 2009, le Gabon s’est lancé dans une véritable course contre la montre. Atteignant près de 6 % en moyenne depuis cinq ans, la croissance ne profite certes pas à tous mais elle est plus forte et plus constante que du temps de son père, Omar. L’objectif ? Faire « émerger » le pays d’ici à 2025 grâce au plan stratégique Gabon émergent (PSGE). Les moyens ? Des investissements publics massifs, en particulier dans les infrastructures. Le voici pris à contre-pied par la chute vertigineuse du prix du baril, qui, passé sous la barre des 50 dollars en janvier, a perdu près de 50 % de sa valeur par rapport à la mi-2014. Moment où le chef de l’État tentait de corriger les insuffisances sociales de sa politique volontariste en lançant un pacte social de 250 milliards de F CFA (381 millions d’euros) sur trois ans, privilégiant santé, famille, emploi et pouvoir d’achat… dans la perspective de l’élection présidentielle de 2016. DépenDant. Le gouvernement peut
d’autant plus se faire du souci que l’effondrement du prix du brut s’accompagne d’un recul inexorable de la production d’hydrocarbures, tombée
à 237 000 barils/jour contre 350 000 à la fin des années 1990. Or, le Gabon est extrêmement dépendant du pétrole : la filière représente 43 % du PIB du pays, 50 % de ses recettes budgétaires et 85 % de ses recettes d’exportation. Les mauvaises nouvelles n’ont pas tardé à tomber. Le Fonds monétaire international (FMI) a revu ses prévisions de croissance 2015. Elle ne serait plus que de 4,5 % et, à moyen terme, devrait rester inférieure d’un point aux vœux du gouvernement. Les excédents budgétaire et commercial fondent comme neige au soleil et tendent vers zéro. « C’est un moment assez critique pour le gouvernement, confirme Bakary Dosso, conseiller économique au Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), car il y a beaucoup d’attentes dans le pays en raison des promesses faites. L’agitation chez les fonctionnaires en témoigne. En effet, la redistribution se fait à travers l’État, dont le budget dépend du pétrole. Or ce dernier a été bâti sur un baril à 80 dollars, et le gouvernement doit désormais élaborer une loi rectificative pour l’adapter à la nouvelle donne. Le budget d’investissement était déjà tombé de 900 milliards de F CFA en 2013 à 600 milliards en 2014 et il devrait
UNE CROISSANCE STABLE PIB (en milliards de $, en prix courants) 25
6,3
18,8
20 15
12
14,6
UN MEILLEUR ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES
(variation du PIB réel, en %, en prix constants)
17,9
19,3 20,7
5,5
5,6
5,1
10 5 0
* estimations
-2,3 2009
2010
2011
n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
Rang sur 189 pays dans le rapport « Doing Business » 2015, évolution par rapport au classement 2014
CROISSANCE
6,9
2012
2013
revenir à quelque 500 milliards en 2015. Il sera nécessaire de couper encore dans la dépense publique… » Cela semble une gageure. En effet, toutes les solutions présentent de
2014*
8 7 6 5 4 3 2 1 0 -1 -2 -3
144 (+ 19) 158 (+ 10) 178 (+ 7) 181 (– 2) 184 (– 1) 185 (+ 4)
Gabon Cameroun Congo Angola RD Congo Tchad
DES IDE EN HAUSSE Investissements directs étrangers, en millions de $ Flux entrants
2 871
2010
Stocks entrants
499
3 567
2011
696
4 263
2012
696
5 119
856
2013 jeune afrique
david ignaszewski
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graves inconvénients économiques et politiques. Réduire les investissements publics, qui avaient triplé de 2010 à 2013 ? Ce serait reculer la date de l’émergence et étouffer la demande au point de réduire encore la croissance. Tailler dans la masse salariale de la fonction publique ? On peut en attendre des manifestations violentes, dont personne ne sait ce sur quoi elles pourraient déboucher. ÉCHAPPATOIRE. À quelque chose mal-
heur étant bon, le FMI a conseillé au gouvernement de profiter de la baisse
du prix des carburants pour réduire les subventions à la pompe, qui profitent surtout aux classes moyennes, et de réserver ses aides aux plus démunis. Il le pousse aussi à agir sur les recettes, en limitant les exonérations fiscales – « généreuses », selon lui – qui profitent aux activités non pétrolières. Et le président Ali Bongo Ondimba dispose d’une échappatoire : s’endetter. Le crédit du Gabon est bon, comme l’a prouvé l’emprunt en eurobonds de 1,5 milliard de dollars (1 milliard d’euros) qu’il n’a eu aucun mal à placer en 2013.
p Priorité aux infrastructures. Ici, le pont de Mayumba, dans le sud du pays, mis en service en juin.
Même s’il augmente rapidement, le taux d’endettement du pays par rapport au PIB demeure raisonnable, puisqu’il s’élève à 28 % contre 20 % en 2011. Le gouvernement, qui entend ne pas dépasser les 35 %, disposerait ainsi d’une marge de manœuvre pour mener de front la poursuite de ses grands chantiers et la mise en œuvre d’une politique plus sociale, sans dégrader excessivement lll les comptes publics.
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Le Plus de J.A. Gabon Reste que ce recours à l’emprunt présente deux risques. D’une part, les taux d’intérêt demandés pourraient augmenter dangereusement si la confiance des investisseurs à l’égard du Gabon venait à se dégrader. D’autre part, la monnaie dans laquelle serait libellé l’emprunt
devra être soigneusement choisie, car le dollar présente l’inconvénient de pouvoir s’apprécier à court et moyen terme, ce qui alourdirait le fardeau des remboursements. Les agences de notation Fitch et Standard & Poor’s ne s’inquiètent pas
65 000 t/an) et une ligne de production de manganèse métal (20000 t/an). Une première pour le Gabon comme pour la Comilog, qui a investi 152 milliards de F CFA (231,7 millions d’euros) dans ce complexe et devrait y créer 400 emplois directs, en plus des quelque 1 600 salariés qu’elle compte déjà dans le pays. l
outre mesure de la capacité du pays à rembourser ses dettes. En décembre 2014, la première a exprimé une perspective négative, et la seconde vient d’abaisser la note du pays. Mais pas de panique : la croissance devrait demeurer robuste, et l’absence d’une opposition crédible ne laisse pas augurer de bouleversements politiques à Libreville. En fait, tout dépend du baril. « Le Gabon a de la marge, conclut Sophie Chauvin, économiste à l’Agence française de développement (AFD). Il peut gérer le recul du prix du pétrole pendant une année. En revanche, si le phénomène se prolongeait, son économie serait inévitablement affectée. » Car ni le bois ni le manganèse (encore insuffisamment transformés localement), et encore moins le fer ou l’uranium (toujours en phase d’exploration) ne représentent des alternatives à cet « or noir » qui a fait hier la fortune du Gabon et menace aujourd’hui de compliquer sa croissance. l
CéCile MAnCiAuX
AlAin FAujAs
le MAngAnèse prend de lA vAleur
L
e gouvernement gabonais veut accélérer l’industrialisation, qui, malgré les mesures prises depuis 2010 pour interdire l’exportation de matières premières brutes au profit d’une transformation locale à haute valeur ajoutée, ne s’est pas concrétisée aussi vite qu’escompté. Surtout, peu d’unités de deuxième et troisième transformations ont été
créées en aval de la filière bois et du secteur minier. C’est enfin le cas pour le manganèse, dont le Gabon est le deuxième producteur mondial. En août 2014, la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog, filiale locale du français Eramet) a en effet mis en service le complexe métallurgique de Moanda (C2M), dans le Sud-Est, comprenant une usine de silicomanganèse (d’une capacité de
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Créé par Décret n° 727/PR/MCPEN du 21 juin 2011 Radio Gabon est un établissement public à caractère administratif doté de la personnalité juridique et de l’autonomie de gestion financière. Placé sous la tutelle du Ministère de la Communication, des relations avec les Institutions Constitutionnelles, Porte-Parole du Gouvernement, le groupe Radio Gabon a pour mission fondamentale de contribuer à la mise en œuvre des politiques en matière de radiodiffusion. Il dispose des chaines à caractère généraliste et thématique.
Tél. +241 01 76 32 91 - B.P. 10150 / 2229 Libreville (GABON)
à l’heure des comptes confiDences De régis immongault Ministre de l’Économie, de la Promotion des investissements et de la Prospective
« le manque d’infrastructures nous fait perdre des points »
david ignaszEwski
E
ntré au gouvernement en octobr e 20 09, régis Immongaulttatagani, 55 ans, a survécu à toutes les tempêtes du septennat. Passé du portefeuille de l’énergie (2009-2012) à celui de l’Industrie et des mines (élargi en janvier 2014 à celui dutourisme), il a été promu à la tête d’un grand ministère de l’économie, de la Promotion des inve stiss emen ts et de la Prospective lors du remaniement d’octobre 2014. Plus technocrate que politique – bien qu’il ait été élu député lors de partielles en 2010 et réélu aux législatives l’année suivante –, l’affable et pragmatique économiste a fait ses classes autrésor public, avant d’intégrer le minefi en tant que conseiller financier (2002-2009). Compte tenu de l’étendue de son portefeuille, régis Immongault est sur presque tous les fronts. en première ligne : le contrôle et l’évaluation, sur le terrain et dans les administrations, de l’efficacité des mesures prises pour contenir l’infla-
mécanisme de sauvegarde, au cas où la situation se dégraderait davantage. Dans ce cadre, certains postes de dépense pourraient être revus sans pour autant que soient remises en cause les dépenses d’investissement, qui sont cruciales pour notre
Pour que le secteur privé fonctionne, il faut des routes, un chemin de fer, de l’électricité. tion et lutter contre la vie chère, ainsi que l’accélération de la mise à niveau des infrastructures et des réformes, structurelles comme fiscales, à même d’améliorer la compétitivité du pays et de permettre au secteur privé de se développer dans une saine émulation. jeune afrique : faut-il craindre un ralentissement de la croissance en 2015 ? régis immongault : non, il n’y a
pas de crainte à avoir. en dépit de la baisse des cours du pétrole, qui est de nature à nous fragiliser, notre économie se porte bien, et nos prévisions budgétaires sont réalistes. nous avons cependant conçu un jeune afrique
économie. en bref, la stabilité macroéconomique se renforce. et les perspectives qu’ouvrent les mesures prises par le chef de l’état sont rassurantes. la dépendance aux hydrocarbures ne constitue-t-elle pas un problème ?
Certainement, mais nous y travaillons. La production pétrolière a décliné pour se stabiliser à environ 10 millions de tonnes depuis quelques années, ce qui aurait pu nous fragiliser. mais le choc a été atténué. La croissance sur la période 2010-2014 a été en moyenne de 6 %, grâce à une augmentation du PIB hors hydrocarbures, ce qui est un bon résultat. nous devons cependant le consolider.
faut-il revoir à la baisse certains programmes d’investissements publics?
Le chef de l’état ne le souhaite pas, car ces programmes sont un levier de croissance. Depuis 2010, nous avons injecté beaucoup d’argent dans l’économie pour financer la construction d’infrastructures. mais il va falloir en faire davantage si nous voulons atteindre une croissance à deux chiffres. les obstacles sont-ils encore nombreux ?
oui, à commencer par le manque d’infrastructures. Il est clair que, pour avoir un secteur privé qui fonctionne, il faut des routes, un chemin de fer, une énergie électrique disponible… Ces carences nous font perdre des points de croissance. Quand le port ne fonctionne pas [lire pp. 93-95], les coûts de passage explosent et menacent notre compétitivité. et puis, notre modèle de croissance étant bâti sur le secteur privé, et les investissements directs étrangers étant au cœur de notre stratégie, nous devons améliorer le climat des affaires. l Propos recueillis à Libreville par georges Dougueli n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
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Gabon à l’heure des comptes
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TransporTs eT logisTique
Frais de port excessifs Grâce à de nouveaux équipements et à des procédures simplifiées, Owendo peut enfin booster ses activités. Problème : les coûts de la manutention et du transit restent trop élevés.
S
urplombant le port d’Owendo, à 15 km au sud de Libreville, trois grues mobiles font claquer leurs mâchoires d’acier. Hautes de 50 m, elles peuvent soulever chacune 100 tonnes de marchandises d’un seul coup. L’acquisition a coûté près de 8 milliards de F CFA (près de 12,2 millions d’euros) mais le gain est précieux. En effet, depuis un an, la productivité des opérations de chargement et de déchargement a bondi de 75 %. Dans l’estuaire du Komo, le temps d’attente des navires a été divisé par deux, passant de 8 à 4 jours en moyenne. Un soulagement pour les opérateurs économiques. Car, jusqu’à présent, le plus grand port commercial du pays était régulièrement engorgé, au bord de
l’asphyxie. En 2013, le trafic de conteneurs y avait dépassé les 130 000 équivalents vingt pieds (EVP, unité de mesure de volume de conteneurs représentant environ 38 m 3) alors que la capacité de traitement du port n’était que de
Un quai supplémentaire, des hangars, des magasins d’entreposage… 120 000 EVP. Une croissance des volumes de marchandises traitées liée notamment à la politique de grands travaux engagée en 2009 (routes, bâtiments publics, stades…) et aux besoins en matériaux de construction qu’elle a suscités. Quelque 600 000 tonnes de ciment ont
été importées l’an dernier au Gabon contre 150 000 tonnes en 2009. De nouveaux hangars et magasins d’entreposage ont également été bâtis sur les terre-pleins du port pour accueillir les marchandises devant être acheminées vers l’intérieur du pays. Le terminal minier a été agrandi. Enfin, un guichet unique sera ouvert dans le courant de cette année pour simplifier les procédures auprès des douanes et des autorités portuaires. « Pour sortir nos marchandises du port, c’est le parcours du combattant, ça coûte du temps et de l’argent ! » explique un grossiste de Libreville, impatient de voir cette mesure se concrétiser. ObSOlèteS. Bien que Libreville rêve
d’un port commercial à vocation internationale, Owendo n’est pas vraiment compétitif comparé à ses voisins camerounais (Douala et Kribi) et congolais (Pointe-Noire), portes d’entrée l l l
dr
q Dans l’estuaire du Komo, le temps d’attente des navires a été divisé par deux.
jeune afrique
n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
Le Plus de J.A. Gabon quEstions à
rigobErt ikambouayat ndEka
Directeur général de l’Office des ports et rades du Gabon (Oprag)
« En quatre ans, le trafic de conteneurs a doublé »
L
’
Office des ports et rades du Gabon (Oprag) est l’établissement public chargé d’assurer le développement et la modernisation des infrastructures portuaires du pays (situées à Owendo, Port-Gentil et Libreville), ainsi que l’optimisation de leurs équipements comme de leur organisation. Il doit aussi veiller au respect du libre jeu de la concurrence dans les différentes activités. Et sur tous ces chantiers, il reste fort à faire.
jEunE afriquE : En 2014, l’oprag a fêté ses 40 ans. selon vous, quels changements marquants a-t-il opérés, notamment ces dernières années ? rigobErt ikambouayat ndEka :
Depuis 2009, les différentes mesures prises par le chef de l’État pour diversifier l’économie ont entraîné
dr
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avec les infrastructures existantes. En 2009, on pouvait parler de problèmes de congestion, qui tenaient aux facteurs suivants : l’insuffisance du linéaire de quai, l’absence de moyens de manutention, la faiblesse du tirant d’eau (qui causait des problèmes d’alluvions et nécessitait un dragage régulier), le manque de hangars et d’espaces de stockage des marchandises et l’inadéquation du cadre juridique. Face à ce constat, un certain nombre d’orientations ont été données pour améliorer l’efficacité des services fournis et, surtout, diminuer les coûts de passage portuaire.
Nous devons absolument nous adapter aux normes internationales. » un boom des activités dans le pays et, par conséquent, dans ses ports, où transitent 90 % des marchandises importées au Gabon. À titre d’exemple, le trafic de conteneurs a doublé, passant de 59 000 conteneurs (et 3,5 millions de tonnes de marchandises) en 2009, à 132 000 (et 6,2 millions de tonnes) en 2013. De façon plus générale, en quarante ans, l’Oprag a amélioré de façon significative les conditions de vie de ses travailleurs, ses outils de travail et la qualité des services aux usagers. Pourtant, les opérateurs se plaignent régulièrement de la congestion du port…
Il est vrai qu’il devenait difficile de soutenir la croissance actuelle n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
quelles mesures ont été prises ?
Nous avons lancé des chantiers importants, comme le développement et la modernisation des infrastructures et des équipements, ainsi que la facilitation des procédures administratives, qui allongent le temps de stationnement des marchandises et entraînent des coûts supplémentaires pour les opérateur s. Nous avons également engagé une réforme instituant de nouvelles réglementations pour l’activité portuaire et lui permettant de s’adapter aux normes internationales. l Propos recueillis par E.E.
l l l sous-régionales pour les pays enclavés. Ainsi, le trafic du port de Douala, qui voit transiter près de 90 % des importations et exportations du Tchad et de la Centrafrique, est aujourd’hui deux fois plus important que celui du port commercial d’Owendo. Après des années sans grands investissements, les infrastructures et les équipements de ce dernier étaient devenus obsolètes. Dans les années 1970, son linéaire de quai (455 m) avait été conçu pour pouvoir accueillir simultanément trois bâtiments de 150 m. Or, aujourd’hui, avec la massification du transport maritime et l’allongement de la taille des bateaux, seuls deux bâtiments peuvent y accoster en même temps. La construction d’un quai de deux fois 400 m et d’un tirant d’eau de 13 m (contre 7 m actuellement) est en cours. Ils devraient permettre de fluidifier les activités de manutention et de désengorger le trafic, avec une partie destinée à l’accueil des porte-conteneurs et l’autre aux vraquiers (transportant des marchandises en vrac). Mais les travaux, qui devaient s’achever mi-2015, ont pris du retard. Estimé à 62 millions de dollars (environ 50 millions d’euros) en 2012, le coût initial du projet, réalisé par Marine Divers Marine Contracting (MDMC, basé à Abou Dhabi) pour le compte de la Société de développement des ports (SDP, filiale d’Olam Gabon), doit être réévalué. Le nouveau quai ne sera donc pas opérationnel avant au moins un an, voire deux, précise-t-on à l’Office des ports et rades du Gabon (Oprag).
« Exorbitants ». En attendant, les
opérateurs continuent de dénoncer les « coûts exorbitants » des prestations de manutention et de transport terrestre. « Le problème, c’est surtout l’écart entre le prix que l’on paye et un service qui n’est pas performant. Exporter un conteneur à Owendo revient deux à trois fois plus cher qu’à Douala », explique un industriel du bois. Depuis 2007, c’est la Société des terminaux de conteneurs du Gabon (STCG), un consortium constitué de deux groupes français, Necotrans (49 %) et Bolloré Africa Logistics (BAL, 51 %), qui a obtenu l’exploitation du terminal à conteneurs et est notamment chargée du traitement jeune afrique
à l’heure des comptes et de l’entreposage des marchandises, ainsi que de la distribution au niveau national. En 2012, le Gabon a ratifié une nouvelle loi qui met fin à l’exclusivité des concessions portuaires attribuées aux sociétés de logistiques et devrait permettre à la concurrence de jouer. MONOPOLE. Mais, affirme un cadre du
port, Necotrans et Bolloré « s’entendent sur les prix et dictent leur loi. Leurs tarifs sont tellement flous que tout le monde s’y perd ». Le problème vient notamment de ce que la tarification est facturée au contenu alors qu’elle devrait l’être à la boîte (c’est-à-dire au mouvement de conteneur). « Vous ne payez pas la même chose si vous transportez des écrans plasma ou du ciment, poursuit-il, et ce système n’a pas été modifié depuis les années 1970… Aujourd’hui, on ne voit ça nulle part ailleurs dans le monde ! » Une commission est en train de travailler à l’établissement d’une nouvelle base de tarification plus transparente, qui
devrait être mise en application au cours « Les Gabonais en sont les premières du deuxième trimestre. victimes. Les tarifs prohibitifs de la manuPar ailleurs, trois ONG gabonaises (SOS tention et du transit font que le prix du kilo Consommateurs, l’association Jeunesse de riz, aliment de base, est trois à cinq fois sans frontières et Time) s’alarment des plus élevé que dans le reste de la région », « pratiques anticoncurrentielles » de déplore Christian Abiaghe Ngomo, le président de SOS Consommateurs, qui Bolloré Africa Logistics. Après s’être plaint en ce sens en avril 2014 auprès de estime que le groupe français est en l’Organisation de coopération et de développement éconoComparé à ses voisins Douala, miques (OCDE), qui s’est déclaKribi ou Pointe-Noire, Owendo rée incompétente, leur avocat a saisi la justice gabonaise fin n’est pas compétitif. novembre et s’apprête à déposer un nouveau recours devant le Conseil grande partie responsable de la cherté d’État pour réclamer l’annulation de de la vie (lire pp. 98-99). Le directeur général de l’Oprag, la concession sur le terminal à conteRigobert Ikambouayat Ndeka, reconnaît neurs et, donc, du contrat passé entre que « les marges pratiquées par les presles pouvoirs publics gabonais et BAL. « SDV, Saga, STCG… À chaque étape tataires sont exagérées. À l’avenir, nous de la chaîne logistique, vous trouvez n’hésiterons pas à retirer une autorisation une filiale de Bolloré. Le groupe a mis d’exercer en cas de nouveaux abus », en place un réseau d’entreprises qui lui prévient-il, assurant que les choses sont permet de bénéficier d’un monopole », en passe de changer. l dénonce le collectif. ELisE EstEbaN, à Libreville
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Le Plus de J.A. Gabon EntrEprisE
La banque, c’est simple comme un coup de fil Après s’être fait connaître en proposant des services financiers classiques, la start-up e-Doley s’apprête à lancer des solutions de paiement innovantes.
D
français, Wonderbank, spécialisé dans la conception de solutions de paiement par téléphone sans contact. La réussite d’e-Doley Finance, c’est aussi le retour gagnant d’Ernest Tewelyo, devenu entrepreneur un peu par hasard. Formé à l’École des gemmes, en banlieue parisienne, le Librevillois a effectué plusieurs stages au sein d’entreprises
epuis sa création en 2011, pour des populations encore faiblee-Doley Finance a marqué ment bancarisées et peu familiarisées des points. La start-up gaboavec le monde virtuel de la technologie NFC (Near Field Communication : naise a pris un bon départ « Communication en champ proche », en se concentrant sur les activités de à moins de 10 cm). change et de transfert d’argent manuels. Trois ans plus tard, elle affiche un « Nous irons au contact des son portefeuille électronique chiffre d’affaires de 2 milliards de F CFA gens, pour leur permettre de pourrait faire la différence (3 millions d’euros) pour un volume régler par paiement élecen touchant des populations d’affaires de 12 milliards de F CFA, et tronique des services coudispose de deux agences à Libreville rants, comme des courses pas encore bancarisées. (l’une au marché Mont-Bouët, en en taxi », explique le jeune centre-ville, l’autre à la Sablière, près patron, dont l’objectif est de s’imposer spécialisées dans les services financiers, de l’aéroport), où elle emploie une rapidement comme l’acteur de réféqui l’ont davantage attiré que le milieu douzaine de salariés. rence dans le domaine du paiement très fermé de la joaillerie. Déjà, il sonForte de ces résultats, la PME s’apde proximité au Gabon. Pour mener geait à la façon de les adapter et de les prête à lancer fin mars une plateforme à bien son nouveau projet, il est soudévelopper au Gabon. de services financiers, e-Doley Cash. tenu par son partenaire technique En 2011, de retour à Libreville mais Une filiale qui va lui persans argent pour faire q Ernest Tewelyo Akendengué a quitté Paris et le monde mettre de se diversifier avancer son projet, Ernest de la joaillerie pour créer son entreprise à Libreville. dans les activités de banque Tewelyo Akendengué envimobile (retrait et transfert sage de repartir en Europe d’argent par téléphone, parfaire sa formation avec paiement de factures par l’aide financière de sa mère, smartphone…). Le créqui contracte un emprunt de neau que visait justement 5 millions de F CFA. « J’étais Ernest Tewelyo Akendengué, gêné et voulais absolument 35 ans, directeur général lui rembourser ce prêt. Cela et fondateur d’e-Doley, m’a tenaillé à tel point que lorsqu’il a décidé de créer j’ai finalement renoncé à son entreprise. prendre l’avion et décidé, avec cet argent, de lancer « Au contAct ». Le marl’entreprise dont j’avais déjà ché du paiement sécuréalisé l’étude de marché, risé par téléphone est très se souvient-il. L’idée était concurrentiel au Gabon, de proposer aux Gabonais où plusieurs grands opéraun porte-monnaie électroteurs (Airtel, Moov, Gabon nique et des services ciblés. Télécom) et groupes banC’est-à-dire toutes les fonccaires (Bicig) offrent déjà tionnalités d’une banque, de la possibilité de payer des jour comme de nuit, et en factures par ce biais. Ernest toute autonomie, dans un Tewelyo Akendengué, lui, téléphone portable. » Mais veut aller plus loin, en déveavant cela, la start-up a fait loppant des services finanses preuves dans le change ciers à la fois très pointus et et le transfert d’argent « classécurisés sur le plan technosiques » et peaufiné son plan logique, mais aussi souples d’affaires. l et simples d’utilisation GeorGes DouGueLI david ignaszewski
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n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
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DIFCOM/DF - PHOTOS : © VIRGINIE DE REYNAL
Une expérience depuis plus de 10 ans dans le pays
Le Plus de J.A. Gabon
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p Dans un supermarché, à Libreville. Consommation
Le pays où la bonne chère est trop chère Les gouvernements successifs ont eu beau multiplier les mesures pour ménager le pouvoir d’achat, les prix restent parmi les plus élevés du continent. Et si l’on faisait plus pour importer moins ?
«
L
utter contre la vie chère. » Ce refrain, les Gabonais le connaissent bien. Cela fait des années que les gouvernements successifs multiplient les mesures destinées à « alléger le panier de la ménagère », sans parvenir à maîtriser une inflation galopante dans un pays qui importe plus de 80 % de ses denrées. Dans ce petit État pétrolier, où les produits alimentaires sont parmi les plus chers d’Afrique, de nombreux habitants se disent découragés face à la hausse des prix dans presque tous les domaines, alors que le revenu moyen mensuel oscille entre 90 000 et 300 000 F CFA (entre 137 et 457 euros). « Le loyer, la nourriture, les fournitures scolaires… Les prix ne font qu’augmenter et nos salaires n’évoluent pas à n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
la même vitesse ! » se désole Mireille Mba, secrétaire de direction. « Le kilo de poisson, c’est 3 500 francs. Avant, pour cette somme, on pouvait acheter au moins quatre poissons, maintenant c’est seulement un ou deux… Pour nous qui avons des enfants, c’est difficile », explique Yolande, une femme de ménage qui gagne 100 000 F CFA par mois. USURE. Dès 2011, le président Ali Bongo
Ondimba a reconnu une « hausse abusive des prix des denrées de première nécessité et la surenchère sur de nombreux produits ». « Les marges entre le producteur, le transitaire, le transporteur et le distributeur sont tout simplement exagérées et participent de pratiques spéculatives que je dénonce », a-t-il poursuivi. L’année suivante, l’État décidait de
suspendre pendant quatre mois la TVA et les droits de douane sur des dizaines de produits alimentaires et autres biens de consommation courante afin de plafonner les marges bénéficiaires. La mesure, qui a coûté 11 milliards de F CFA, a été prolongée en 2013. Lait, riz, poisson, viande… les nouveaux tarifs doivent être désormais clairement affichés par les commerçants, qui s’exposent à des sanctions de la Direction générale de la concurrence et de la consommation (DGCC) en cas de non-respect des règles. Au lendemain de l’adoption du dispositif, le chef de l’État s’est rendu sur les marchés pour vérifier si les mesures étaient bien appliquées. « Quand le président venait sur le terrain, les commerçants faisaient semblant de baisser les prix, mais, dès qu’il tournait le dos, ils les remontaient », dénonce Muriel, une mère au foyer en pleine négociation avec un boucher du marché Mont-Bouët, au milieu des mouches et des abats de viande. « Les premiers mois, on a pu jeune afrique
à l’heure des comptes observer des baisses de 5 à 10 % sur les étiquettes de certains produits, mais il y a un relâchement, confirme Christian Abiaghe Ngomo, président de l’association SOS Consommateurs. Les inspecteurs [de la DGCC] ne font plus de contrôle et les pratiques frauduleuses se multiplient à nouveau. » Palliatif. Parallèlement, pendant plu-
sieurs années, le gouvernement a subventionné les dépenses énergétiques des Gabonais, déboursant 180 milliards de F CFA par an pour maintenir le prix de l’essence à la pompe. Ces subventions ont été supprimées fin janvier. En revanche, l’Étatcontinuedemobiliseruneenveloppe annuelle de 7 milliards de F CFA pour permettre aux « foyers économiquement faibles » (FEF) d’accéder gratuitement à l’eau et à l’électricité. Mais, pour Christian Abiaghe Ngomo, « la subvention est un palliatif, pas une vraie solution. Les choses n’iront pas mieux tant que le Gabon ne réduira pas sa dépendance vis-à-vis des produits de première nécessité et que la
lancée avec le projet baptisé Gabonaise des réalisations agricoles et des initiatives des nationaux engagés (Graine). L’idée est de mettre en exploitation, pendant cinq ans, 200 000 ha de terres morcelées en petites coopératives, grâce à une batterie de mesures d’encouragement, destinées aux jeunes désireux de se lancer dans l’aventure, comme, notamment, le préfinancement de coopératives ou l’octroi de crédits à taux préférentiels. Mais, pour le moment, Peut-on envisager un « retour à la cette promotion du « retour terre » alors que la majorité des à la terre » laisse sceptique, alors que l’immense majoGabonais vit aujourd’hui en ville ? rité de la population vit dans les deux principales villes du pays, 3,8 % du PIB, bien loin de l’objectif de 20 % Libreville et Port-Gentil, où la fonction d’ici à 2015 annoncé par le chef de l’État publique reste le premier employeur. peu après son accession au pouvoir en 2009, dans le cadre du programme Gabon Quant aux métiers manuels et aux petits vert. La diversification de l’économie, commerces, délaissés malgré un taux de encore très dépendante de la manne chômage qui atteint 30 % chez les jeunes, pétrolière, reste à concrétiser. ils restent essentiellement assurés par Une nouvelle (et ambitieuse) poliles immigrés venus des pays voisins. l tique agricole vient toutefois d’être ElisE EstEban spéculation immobilière continuera de faire flamber les prix du logement », l’un des premiers postes de dépense. « Nous dépensons des centaines de milliards de francs [300 milliards, selon l’État] pour importer des produits alimentaires de base, mais nous sommes incapables de stimuler notre production agricole. C’est ça, le problème », ajoute le président de SOS Consommateurs. Ce dernier secteur représente aujourd’hui
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UNE INFRASTRUCTURE LARGE BANDE EN FIBRE OPTIQUE L’ANINF, opérateur de l’Etat dote le Gabon des infrastructures numériques de rang mondial
LE VECTEUR DU DEVELOPPEMENT NUMERIQUE Conformément à l’axe 3, « construire et opérer l’infrastructure numérique dans une optique de mutualisation », du plan Gabon numérique, l’Agence Nationale des Infrastructures Numériques et des Fréquences (ANINF) s’est lancée depuis 2011 dans la construction d’un ensemble d’infrastructures numériques de rang mondial. M. Alex BONGO ONDIMBA (DG ANINF) et M. Axel KISSANGOU-MOUELE (DG SPIN) au cours de la cérémonie de transfert d’actifs et de prêts ANINF-SPIN.
C’est dans ce cadre que l’ANINF a démarré en 2012 la mise en place d’une importante infrastructure de télécommunication large bande en fibre optique. Cette infrastructure est un support aux secteurs porteurs de croissance. Il est construit pour relier
les grands pôles économiques de notre pays décrit dans le schéma directeur national des infrastructures. A terme, ce sera près de 5000km de fibreoptique qui seront déployés dans l’ensemble du pays pour constituer le backbone national fibre optique. Ce backbone fibre optique est un élément fondamental de l’infrastructure national haut débit. Il interconnectera les grandes villes du Gabon et les pôles économiques aux câbles sous-marins internationaux mais également aux pays de la sousrégion.
EXTENSION DE LA FIBRE OPTIQUE
VECTEUR DU DÉVELOPPEMENT NUMÉRIQUE
Projet CAB4 De portée internationale, le projet Central Africa Backbone (CAB4) réunit le Cameroun, le Congo, la Guinée Equatororiale et le Gabon. Il consiste à déployer une infrastructure de connectivité hautdébit fibre optique dans la sous-région.
Projet Backbone National Gabonais Le DG de l’ANINF lors de la signature de contrat avec CCSI.
La première phase du projet Backbone National Gabonais (BNG) a un linéaire de 1100 km. Ce LE GABON NUMERIQUE SE MATÉRIALISE linéaire va de Libreville à Léconi en passant par Koula-Moutou et Franceville avec une ouverture 2012 : sur la République du Congo au niveau de la frontière Arrivée du câble sous-marin à fibre optique Africa Cost Lékoko. Il traversera aussi les provinces de l’Estuaire, to Europe (ACE) qui permet au Gabon de se doter d’une le Moyen-Ogooué, l’Ogooué-Lolo, l’Ogooué-Ivindo deuxième voie de connectivité haut débit à l’international. et le Haut-Ogooué. Pour le lancement des travaux de démarrage de la construction de la dorsale fibre optique, une signature de contrat entre l’ANINF et CCSI, une société chinoise adjudicataire du marché de la banque mondiale a eu lieu le 15 octobre 2014. La construction de cette infrastructure large bande montre l’intérêt pour le Gouvernement de permettre une baisse significative des coûts de télécommunication à l’internationale et l’accès à internet afin que le Gabon soit un véritable hub dans la sous-région.
Construction de deux (2) stations d’atterrissement pour la gestion du câble ACE à Libreville et à Port-Gentil. Raccordement de la ville de Port-Gentil à la fibre optique par voie sous-marine.
2013: Déploiement du Réseau de l’Administration
Gabonaise (RAG). A Libreville, un linéaire de 43 km de fibre a déjà été réalisé et 50 km reste à déployer. Dans les huit (8) autres capitales provinciales, un linéaire de 25 km du RAG a été construit.
2014: Signature de la convention de prêt et d’actifs
de l’Etat gabonais entre l’ANINF et la Société des Patrimoines Numériques (SPIN). La valorisation par la SPIN du câble sous-marin ACE) et des infrastructures du Backbone national déployées à Libreville et Port-Gentil a été l’objectif de cette signature du 31 octobre.
AGENCE NATIONALE DES INFRASTRUCTURES NUMERIQUES ET DES FREQUENCES B.P.: 798 Libreville (Gabon) - Tél.: +241 01 79 52 77
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Conception: SREC ANINF 2014
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Le Plus de J.A. Gabon Santé
Sylvia Bongo Ondimba « en parler, c’est déjà sauver des vies » Ces derniers mois, la première dame a multiplié les actions de sensibilisation pour favoriser la détection précoce des cancers féminins. Elle en dresse le bilan.
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iscrète sur la scène politique, Sylvia Bongo Ondimba est omniprésente sur le terrain social, via Facebook et Twitter – où elle « poste » quotidiennement – et au sein de sa fondation pour la famille (FSBO, lire p. 104). Depuis un an, cette dernière a intensifié ses actions en faveur du dépistage précoce des cancers féminins et a lancé en octobre dernier une campagne de sensibilisation sur le sujet. La première dame en dresse le bilan. Elle revient aussi sur les moyens déployés pour lutter contre ce fléau, et sur les raisons d’espérer. jeune afrique : Pourquoi avez-vous choisi de mener la campagne Octobre rose pour le dépistage précoce des cancers féminins ? Sylvia BOngO OnDimBa : Les dégâts
liés au cancer au Gabon, et plus généralement en Afrique, sont malheureusement sous-estimés. Les cancers féminins, en particulier, tuent des centaines de Gabonaises chaque année, alors qu’aujourd’hui il est possible de les prévenir avant qu’ils ne soient fatals. En 2013, près de 400 décès ont été identifiés comme
étant consécutifs à un cancer du col de l’utérus ou du sein, et les données disponibles indiquent que le nombre de nouvelles malades est en croissance continue. La lutte contre ces maladies est donc un enjeu à la fois scientifique, sociétal et de santé publique. Comment votre action s’est-elle mise en place ?
La campagne de dépistage et de sensibilisation Octobre rose s’inscrit dans une action globale contre le cancer lancée il y a un peu plus d’un an. Sa vocation est de soutenir les pouvoirs publics dans leurs initiatives et vise à agir plus particulièrement contre les cancers du sein et du col de l’utérus, ces deux grands oubliés… Pourtant, chaque personne connaît quelqu’un, dans sa famille, dans son entourage, qui a dû faire face à ce mal silencieux. Octobre rose est non seulement une action de terrain, mais aussi un message de solidarité et de sensibilisation à transmettre. Il faut vraiment que l’on prenne conscience de ce que sont les cancers féminins et que nous nous armions en conséquence pour les juguler, pour amoindrir leur portée. J’exhorte toutes
leS femmeS, PluS exPOSéeS Selon leS dernièreS statistiques établies par l’Agence internationale de recherche contre le cancer de l’oMS en 2012 (base de données mondiale Globocan 2012), au Gabon, toutes populations confondues, les cancers les plus fréquents sont ceux du col de l’utérus (11,3 %, soit 118 nouveaux cas, n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
contre 19,4 % en 2008) et du sein (9,4 %, soit 98 nouveaux cas, contre 11 % en 2008), devant ceux de la prostate (7 %) et du poumon (6,3 %). Toujours en matière d’incidence, les cancers les plus diagnostiqués chez les femmes sont ceux du col de l’utérus (19,6 %, contre 25 % en 2008) et du sein
(16,3 %). enfin, sur le nombre de décès consécutifs à un cancer, ceux qui ont eu le plus fort taux de mortalité sont les cancers du poumon (9,9%), du col de l’utérus (7,8 %), de la prostate (7,3 %), de l’appareil colorectal (6 %), du sein (5,7 %) et ceux liés à un lymphome C.m. (5,9 %). l
les femmes qui le peuvent à se rendre dans les centres médicaux et hôpitaux désormais fonctionnels à Libreville et dans la province de l’Estuaire pour se faire dépister gratuitement. Et je les invite, ainsi que les hommes, à faire passer ce message auprès de leurs proches, de leurs connaissances. Êtes-vous satisfaite des résultats obtenus depuis le lancement de cette campagne ?
Très satisfaite. La campagne connaît un succès remarquable. Elle a un réel impact sur nos populations, autant sur les femmes que sur les hommes, qui ont très rapidement saisi la gravité du sujet. Une formidable vague de solidarité est née, une prise de conscience collective. Les centres qui proposent chaque jour des dépistages gratuits ont vu leur jeune afrique
à l’heure des comptes t En visite dans un centre de santé, dans l’intérieur du pays.
d’un plateau technique ultramoderne, performant, qui en fait une structure de traitement de référence en Afrique centrale. De la chimiothérapie à la médecine nucléaire, nous n’avons pas à rougir, au Gabon, de nos moyens d’action. Je me suis personnellement investie pour que cette structure soit opérationnelle, avec notamment le concours de la princesse Lalla Salma [épouse du souverain marocain, Mohammed VI], à travers sa fondation pour la prévention et le traitement des cancers. Aujourd’hui, les Gabonaises et les Gabonais peuvent bénéficier chez eux d’un traitement d’une qualité digne des meilleures normes internationales. C’est une avancée médicale et sociétale majeure pour notre pays.
david ignaszewski
Et qu’en est-il de la prise en charge psychologique et sociale des patients ?
fréquentation augmenter de manière exponentielle [depuis octobre 2014, environ 1300 femmes sont examinées chaque mois dans les 18 centres de santé de la province de l’Estuaire]. Une ligne gratuite et anonyme, le 1455, reçoit des centaines d’appels par jour [et 40 000 reçus en dixneuf jours, pendant Octobre rose]. C’est autant de vies potentiellement sauvées. Je tiens d’ailleurs à féliciter le personnel de santé des centres de dépistage, ainsi que les équipes de la fondation et nos
volontaires sur le terrain, pour l’excellent travail qu’ils sont en train d’accomplir ensemble. Et ce n’est pas fini ! Le Gabon est-il suffisamment armé pour lutter contre cette pathologie majeure ?
Le cancer est une maladie très longue, très lourde à traiter. Sa prise en charge nécessite de très importantes ressources, humaines et financières… Toutefois, l’Institut de cancérologie de Libreville [ICL], inauguré le 4 février 2014, est doté
L’accompagnementdesmaladesdurant leur traitement est une problématique majeure, à prendre sérieusement en compte. Se faire soigner lorsque l’on est victime d’un cancer est un processus long et éprouvant. Et plus encore lorsque l’on est loin de chez soi et de ses proches. C’est pourquoi ma fondation a engagé la construction d’une « maison de vie », adjacente à l’ICL : la Maison d’Alice. À travers ce projet, nous accompagnerons les malades dans leur traitement en leur offrant un espace serein et un soutien moral permanent. Cette Maison d’Alice est conçue de façon à pouvoir accueillir le patient avec l’un de ses proches. La vocation de ce lieu est de restaurer l’être tout entier dans la dignité. Contre le cancer, nous ne devons négliger aucun aspect. L’espoir du patient, son envie de vivre, de nourrir des projets malgré la maladie sont tout aussi importants que le traitement en lui-même… Ensemble, pour agir contre le cancer, nous devons ériger un mur d’espérance. l Propos recueillis par GEorGEs DoUGUELI
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q Un grand nombre d’actions concernent la mère et l’enfant (ici, au CHU d’Angondjé).
Une potiche, elle? Jamais! À travers sa fondation pour la famille, Sylvia Bongo Ondimba occupe le terrain de la lutte contre la pauvreté.
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a Constitution ne lui reconnaît aucun statut. Son rôle de première dame du Gabon – du reste ingrat à maints égards – n’est abordé par aucun texte législatif. Il ne faut pas pour autant compter sur Sylvia Bongo Ondimba pour jouer les potiches en tailleur, un éternel sourire aux lèvres, marchant dans l’ombre de son président de mari. Dès 2010, elle est parvenue à faire adopter par l’ONU une Journée internationale des veuves (célébrée tous les 23 juin depuis 2011), dont elle défend la cause depuis longtemps. Et, à l’instar de la plupart de ses homologues étrangères, elle a créé sa fondation, la Fondation Sylvia Bongo Ondimba pour la famille (FSBO), en choisissant trois domaines d’action prioritaires : l’éducation, les droits et la promotion de la femme, l’insertion des populations fragilisées. C’est surtout à travers des actions sur le terrain que la première dame et sa fondation se sont rapprochées des Gabonais. Comme les tournées de la Caravane Gabon profond ou comme
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la Gabonaise, une course réservée aux 45 ans, diplômé en management de profemmes (dans le cadre du marathon du jet de l’École centrale de Paris. Avec un Gabon, dont la dernière édition s’est solide bagage dans l’humanitaire (après déroulée fin novembre 2014) pour la lutte des missions en Iran, en Roumanie, en contre les cancers féminins, désormais Mauritanie, au Yémen, en Afghanistan, au prolongée par la campagne Octobre rose Burundi, au Tchad), ce dernier a rejoint la (lire pp. 102-103). La marque FSBO s’est fondation mi-2010 en tant que directeur rapidement imposée. général, avant d’en devenir président en Et la voilà désormais au cœur de la avril 2014. Début 2013, il entre également au cabinet de la première dame et devient stratégie d’investissement humain du Gabon, lancée par le chef de l’État début conseiller spécial du président. 2014 pour tenter de venir à bout de la Sylvia Bongo Ondimba peut aussi précarité et des inégalités sociales. La compter sur Erwan Le Grand, qui a palette des actions de la FSBO va de travaillé entre autres pour l’ONG Aide l’introduction des technologies de l’information et de la ses chantiers prioritaires : communication (TIC) dans l’éducation, les droits les écoles primaires au soude la femme et l’insertion. tien à l’entrepreneuriat chez les femmes économiquement médicale internationale avant d’intégrer faibles, en passant par la remise de bourses aux élèves méritants et par des la FSBO, en 2013, en tant que directeur campagnes de lutte contre le sida ou les des programmes. À leurs côtés œuvrent violences faites aux femmes. notamment Simone Mensah, vice-présidente, Catherine Engohan, directrice de Dispositif. Pour pouvoir ratisser aussi la communication, et plusieurs médecins. large, la First Lady s’est entourée d’une Ils font tourner une machine qui, à elle équipe de professionnels qui travaillent seule, peut prétendre à un bon bilan en à l’élaboration des programmes et à leur matière de développement humain. Qui mise en œuvre. Au centre du dispositif, ne manquera pas d’être porté au crédit… la première dame est secondée par son d’Ali Bongo Ondimba. l directeur de cabinet, Guillaume Adam, GeorGes DoUGUeLi jeune afrique
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chouchoutés, les gabonais D’abord réservé aux plus démunis, le régime d’assurance maladie a été généralisé. Avec des consultations et des actes pris en charge de 80 à 100 %, plus d’excuses pour ne pas se faire soigner. liquidation). Outre le fonds de garantie sociale des GEF, la caisse d’assurance maladie dispose donc de deux autres fonds : celui des agents publics et celui des salariés du secteur privé, alimentés par les cotisations sociales des employeurs (y compris l’État) et celles des salariés. Le 29 janvier, le gouvernement a revu à la baisse le taux de cotisation pour les personnels assujettis au régime : 4,10 % à la charge de l’employeur (inchangé), 1 % à celle du travailleur (contre 2,5 % auparavant) et 0,5 % à celle du retraité (au lieu de 1,5 %). Par ailleurs, la part du salaire mensuel soumise à cotisation est désormais plafonnée à 2,5 millions de F CFA. david ignaszewski
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grève. Reste que l’élargissement du
régime à tous les secteurs déplaît aux syndicats. Ainsi, en décembre 2014, les travailleurs du secteur des hydrocarbures ont fait grève afin d’exiger l’arrêt p Accueil de la CNAMGS, à l’hôpital général de Libreville. des prélèvements obligatoires pour les salariés du pétrole, qui bénéficient remière expérience du genre en garantie sociale pour les « Gabonais écod’assurances directement souscrites par Afrique centrale, l’instauration nomiquement faibles » (GEF), qui n’ont leurs employeurs. d’un régime obligatoire d’assuaucune cotisation à payer pour s’affilier. Certains regrettent aussi que la prise rance maladie est une réussite. Celui-ci permet d’assurer les prestations en charge ne soit pas totale. La CNAMGS Et si la Caisse nationale d’assurance de santé et le paiement des allocations rembourse en effet à 100 % les soins de maladie et de garantie sociale (CNAMGS) familiales pour les personnes santé des femmes enceintes, ne couvre pas encore l’ensemble des dont le revenu est inférieur des jeunes mères, des nour1,6 million de Gabonais, elle s’est déjà rissons, des familles en grande au Smig, soit 80 000 F CFA imposée comme la pierre angulaire de (environ 122 euros) par mois. précarité (qui n’étaient prises la politique sociale du pays. Il est lui-même financé par en charge qu’à 80 % jusqu’en Dans un premier temps, la population une redevance obligatoire à 2013) et des malades atteints a hésité à s’immatriculer, malgré les l’assurance maladie (ROAM), d’un cancer, ainsi que les campagnes menées par les agents de un prélèvement de 10 % sur frais médicaux au sein des la CNAMGS. « Ceux qui n’y croyaient le chiffre d’affaires hors taxes services d’urgences de tous pas au début ont été convaincus par le des entreprises de téléphonie les patients, assurés ou non, bouche-à-oreille, ils sont venus s’insmobile et un autre de 1,5 % sur lorsque leur pronostic vital est crire… Et c’est un véritable tournant les transferts d’argent à l’étranengagé. Pour les autres assurés, du budget de l’État ger. Depuis janvier et jusqu’à le coût des consultations et social ! » se félicite un médecin hospiest consacré aux talier en voyant revenir des patients qui, la mi-avril 2015, la CNAMGS actes médicaux est remboursé dépenses de santé, depuis longtemps, avaient renoncé à de met en œuvre une deuxième à 80 % (voire 90 % s’il s’agit soit simples consultations, trop onéreuses phase d’immatriculation des d’une affection chronique), le pour eux. Aujourd’hui, ils n’hésitent plus populations fragilisées qui ne patient devant s’acquitter des à franchir la porte de l’hôpital. bénéficient pas encore de ses 20 % restants. Soit 600 F CFA prestations. pour une consultation… au lieu du PIB redevance. Le régime obligatoire d’asEn 2011, le régime a été de 3 000 F CFA sans prise en surance maladie a été appliqué graduelétendu aux travailleurs du charge. Une révolution qui perlement. À sa création en 2008, il se limitait secteur public et, en 2013, à ceux du met à la plupart des Gabonais de réduire à la prise en charge des plus démunis, secteur privé, autrefois affiliés à la Caisse leurs dépenses de santé. Et tout simpleavec la mise en place d’un fonds de nationale de sécurité sociale (CNSS, en ment de se soigner. l georges doUgUeLI
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t Où le bitume fait le bonheur des rollers. Société
Beverly Hills aux portes de la jungle Créée il y a deux ans au nord d’une Libreville surpeuplée, la commune d’akanda grandit à vue d’œil. Cité idéale qui promeut la mixité sociale, ou gâchis écologique ?
l
e long d’une ruelle en terre trône unebâtisseflambantneuve,peinte en jaune vif. Bienvenue à l’hôtel de ville d’Akanda. Créée il y a tout juste deux ans, la commune, qui s’étend désormais du très chic quartier de La Sablière (qui faisait auparavant partie de la capitale) jusqu’aux plages du Cap Estérias, au nord de Libreville, ne cesse de faire parler d’elle. Lors du scrutin local de décembre 2013, l’élection d’un maire gabonais d’origine corse n’a pas laissé indifférent. « Le premier maire blanc du pays ! » titraient les journaux nationaux. Dès son entrée en fonction, l’édile, Claude Michel Sezalory, a donc tenu à rassurer : « Il n’y a que la peau qui est blanche, le reste, mon cœur, est africain et surtout gabonais. » À 68 ans (dont près de soixante passés au Gabon), ce promoteur immobilier n’est pas vraiment un inconnu dans le paysage n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
librevillois. Sa proximité de longue date avec le président, Ali Bongo Ondimba, est un secret de Polichinelle. Dans les années 1980, ce militant du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir) a fondé Alliance, l’une des premières agences immobilières de la capitale (également active dans la gestion de patrimoine), reprise quelques années plus tard par l’actuelle première dame, Sylvia Bongo Ondimba. Les priorités affichées par Claude Michel Sezalory pour sa jeune et vaste commune sont l’aménagement de la voirie et la construction du « plus grand et plus beau » marché d’Afrique centrale, mais aussi d’écoles, de dispensaires et de parcs pour enfants. spéculation. Outre Sezalory, la fine
fleur du PDG siège à Akanda. Au sein du conseil municipal, on retrouve en effet
le patron du Fonds gabonais d’investissements stratégiques (FGIS), Serge Mickoto, ainsi que le directeur général de Pétro Gabon et président de la chambre de commerce, Jean-Baptiste Bikalou. Également élue conseillère municipale fin 2013, la fille aînée du président, Malika Bongo Ondimba, fait quant à elle ses premiers pas en politique dans la commune. Elle est aujourd’hui maire adjointe du 2e arrondissement. Un casting qui ne doit rien au hasard, selon plusieurs ONG et partis d’opposition, pour lesquels Akanda est une « création artificielle » destinée à servir des intérêts privés et à accaparer des centaines d’hectares encore vierges aux portes de la capitale. « Ce que vise le pouvoir, ce sont les terres pour faire de la spéculation immobilière et rien d’autre », s’indignait, lors de la campagne électorale, en décembre 2013, l’ex-leader de l’opposition, André Mba Obame, dont les interventions sont devenues rares en raison de graves problèmes de santé (lire J.A. n° 2818 du 11 au 17 janvier 2015, pp. 32-35). Ce sera le « plus grand scandale jeune afrique
écologique et foncier de notre pays », avait-il alors prédit. Parmi les ouvrages suscitant la polémique figure la construction d’un port de plaisance à La Sablière. Un projet porté par… Alliance. Sur son site internet, le promoteur mentionne juste le projet Marina sans donner de détails avec, en toile de fond, une photo représentant de luxueux yachts amarrés à un ponton, devant une allée de palmiers. D’après un notable d’Akanda, le programme prévoit aussi la construction d’une zone résidentielle, avec des immeubles, autour du futur port. On trouve aussi la trace du projet sur le site du groupe Acri-In, basé dans le sud de la France. Le spécialiste de l’ingénierie maritime indique être chargé par son client, Alliance, de la maîtrise d’œuvre de la « Marina des Sablières à Libreville » pour un montant de 188600 euros et que le projet, débuté en 2013, est en cours. à tour de bras. « Ils veulent faire
d’Akanda une sorte de Beverly Hills à la gabonaise, dénonce de son côté Marc Ona Essangui, contempteur invétéré des Bongo Ondimba et secrétaire exécutif de l’association Brainforest. Des promoteurs font déjà pression sur certains villages… Les habitants vont être dépossédés. On leurprometdescompensationsfinancières pour les faire déguerpir. » Les appétits immobiliers pour la zone nord de Libreville ne sont cependant pas nouveaux. En quinze ans, et donc bien avant la création d’Akanda, les prix ont flambé dans les quartiers d’Angondjé et Claude Michel Okala, qui font désormais sezalory, maire partie de cette commune. blanc, cœur noir Alorsqu’audébutdesannées 2000 le prix du mètre carré et promoteur surunterrainviabiliséyavoiimmobilier. sinait les 12000 F CFA (environ 18,30 euros), il oscille désormais entre 40 000 et 70 000 F CFA. Ce qui reste abordable, comparé aux prix atteints dans certains quartiers de Libreville. Le développement d’Angondjé, surtout, s’est fortement accéléré depuis l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2012 et la construction du stade de l’Amitié sino-gabonaise. Tout autour du complexe sportif, on a défriché et bâti à tour de bras de coquettes habitations, avant même que les routes soient tracées et que les lotissements soient desservis par le réseau d’eau et d’assainissement… l l l n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
Le Plus de J.A. Gabon
p Mairie de la commune nouvelle d’Akanda.
l l l Aujourd’hui, on ne compte plus les grandes familles du Gabon qui y possèdent déjà des terrains et/ou des villas. On y retrouve, entre autres, l’ex-ministre des Sports, René Ndémezo’o Obiang, les enfants de la présidente du Sénat, Rose Francine Rogombé, la famille de l’ancien Premier ministre Léon Mebiame, etc. Les lots sont partis comme des petits pains… « Beaucoup de terrains ne sont pas encore construits, mais il ne faut pas se leurrer, vous n’en trouverez quasiment pas qui soient libres ou à vendre », prévient un agent immobilier.
Squat. Par ailleurs, en l’absence d’un cadastre fiable (le Gabon ne comptait que 18000 titres fonciers en 2014), les propriétaires légitimes peinent souvent à faire valoir leurs droits. « Beaucoup squattent des terrains qui ne leur appartiennent pas. Ils se construisent une belle maison et, comme ce sont de “grands monsieurs”, il est impossible de les déloger », poursuit notre professionnel de l’immobilier. Ce que confirme Roger Mba, un habitant du quartier, en désignant une imposante résidence, entourée de hauts murs : « Là, c’est un ministre qui a construit à l’endroit où la route devait être goudronnée. Du coup, explique-t-il, la piste a été tracée de manière à contourner la maison, et c’est pour ça qu’elle fait un virage. » À grands renforts de communication, l’État affirme pourtant vouloir faire d’Angondjé un nouveau pôle urbain censé incarner la cité idéale, avec une politique de la ville axée sur une mixité sociale et fonctionnelle, qui doit ensuite n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
s’étendre au reste du pays. Le quartier doit donc intégrer progressivement des programmes de logements économiques (pour les classes moyennes) et sociaux, mais aussi des commerces, des centres médicaux, des écoles maternelles, des espaces verts, et être desservi par un bon réseau routier. Les chantiers sont en cours un peu partout. Près d’un millier de logements sociaux sont d’ailleurs déjà prêts, qui doivent être mis en locationvente dans les semaines à venir.
sa population d’oiseaux migrateurs) et la forêt classée de la Mondah, véritables poumons verts pour la capitale.
écotouriSme. Selon l’ONG locale H2O Gabon, ces dernières années, des tonnes de sable destinées à la construction ont été prélevées illégalement le long du littoral, entraînant peu à peu la dégradation des mangroves de la zone d’Akanda, déjà fragilisées par la pollution de la capitale. Consciente des enjeux environnementaux, l’Agence aSphyxie. À terme, ces lotissements nationale des parcs nationaux (ANPN) devraient accueillir près de 120 000 habia lancé un ambitieux programme, baptisé tants et contribuer à résoudre la crise du « Arc d’émeraude », articulé autour des logement à Libreville. Et il y a urgence : aires protégées situées en périphérie de la capitale, où vit plus de la moitié de la Libreville, dont le parc national d’Akanda et la forêt de la Mondah. Dans cette dernière, l’accent sera Le parc national voisin et la forêt mis sur la valorisation de de la mondah, poumons verts de l’écotourisme. L’ANPN préla région, doivent être préservés. voit notamment de créer un jardin botanique et un centre population gabonaise, est aujourd’hui de découverte pédagogique et d’écoloiau bord de l’asphyxie, envahie par les sirs, « Le Bois des Géants », où l’on pourra constructions précaires et anarchiques. pratiquer l’Accrobranche, se hisser dans la L’aménagement d’Angondjé devra aussi canopée et s’adonner à diverses activités respecter les principes édictés par le culturelles ou sportives. « SmartCode », un modèle internatio« La croissance urbaine, si elle est mal nal de développement urbain qui fait gérée, représente une menace imporla part belle à l’aménagement durable, tante pour le parc d’Akanda en termes de en délimitant notamment des espaces pollution et de consommation d’espace, naturels protégés. Car, au-delà des enjeux explique Mathieu Ducrocq, responsable socio-économiques, la maîtrise de l’urbadu projet Arc d’émeraude. C’est pournisation préoccupe les défenseurs de quoi nous devons essayer d’orienter l’environnement, la ville étant bordée son développement vers des principes par le parc d’Akanda (l’un des sites les verts. » En espérant que les Akandais eLiSe eSteban plus importants d’Afrique centrale pour joueront le jeu. l jeune afrique
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Le Plus de J.A. Gabon télévision
Menteurs en série Le jazzman Frédéric Gassita se lance dans la production audiovisuelle avec Le Mytho. une création 100 % librevilloise qui va décaper.
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est l’histoire de Monica, une jolie fille d’Elbève (Libreville). Désespérée parce qu’elle « n’a pas l’argent », la pauvre gosse se lamente : « Je vais devenir quoi ? » Si elle ne trouve pas un homme, elle sera vouée à l’errance et à la misère. Pour voir ses vœux exaucés, une seule solution : consulter un nganga (« marabout »). Commence alors une descente aux enfers ubuesque. Tournée en bourrique, manipulée, la jeune femme confectionne des amulettes qu’elle cache sous un paillasson et s’adonne aux caprices les plus ridicules du charlatan. Drôle et grinçante, la fable contée par cet épisode pilote de la série Le Mytho n’est pas si éloignée de la réalité. Elle aborde, à travers la question de la mythomanie, la complexité des rapports humains. « Nous avons voulu raconter des anecdotes que nous rencontrons dans notre quotidien, des plus petits aux plus gros mensonges, et s’en moquer », raconte Fleur Mboumba, une comédienne de 27 ans, qui fait ses premiers pas en tant que scénariste. Chaque volet de vingt et une minutes s’articulera autour d’un personnage central menteur et cachottier, du don Juan séducteur et volage aux escrocs de tout bord. Touche-à-TouT. Produite, réalisée
et entièrement financée par Afro Jazz Productions (AFJ Productions), maison créée et dirigée par le compositeur et pianiste Frédéric Gassita, cette série d’une vingtaine d’épisodes – dont chacun a coûté entre 5 et 6 millions de F CFA (entre 7 600 et 9 200 euros) – devrait être programmée à partir du mois de juillet à la télévision. Des discussions sont en cours avec différents partenaires susceptibles de la diffuser. Avec la production audiovisuelle, Gassita ajoute une nouvelle corde à son arc. Artiste touche-à-tout formé au prestigieux Berklee College of Music de n o 2824 • du 22 au 28 février 2015
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p Le pianiste et producteur en tournage.
Boston, il est également président d’un club de football gabonais de première division, le FC Sapins de Libreville, et chargé de mission auprès du président de la République, Ali Bongo Ondimba, féru lui aussi de musique. Amis de longue date, le chef d’État et le musicien ont d’ailleurs composé ensemble les deux premiers albums de ce dernier, Forever Yours et Following My Star (sortis
tourner des clips musicaux, ils font eux aussi leurs premiers pas dans la fiction audiovisuelle. Grâce au matériel de pointe du studio d’AFJ Productions, installé à Libreville, « nous allons pouvoir tout retravailler au montage pour obtenir une qualité optimale. Parce que le cinéma, c’est d’abord le son, et c’est ce qui fait souvent défaut dans les productions africaines », souligne Fabrice, surnommé Fabass par ses compères. au centre de chaque épisode, Derrière la table de mixage, un personnage cachottier, les réalisateurs travaillent en ce moment au doublage des un escroc ou un don Juan. voix et refont les bruitages en 2004 et 2008 chez Atlantide Music). afin d’éviter toute fausse note. Quant AFJ Productions a d’ailleurs démenti aux musiques de la bande originale, la certaines rumeurs selon lesquelles la plupart ont été composées spécialement pour l’occasion par Frédéric Gassita. série Le Mytho comporterait des clins d’œil à la vie politique du président et Les scènes des épisodes déjà touraffirme qu’Ali Bongo Ondimba ne s’en nés ont pour décors des lieux biens est « jamais mêlé ». connus de la capitale, comme le resFrédéric Gassita a réalisé lui-même taurant Mandarine, dans le quartier l’épisode pilote du marabout, avant de Ancienne Sobraga, ou la boîte de nuit passer le relais à la jeune équipe qui Le Boomerang, à Louis, le territoire des l’accompagne. « Ce projet est une sorte noctambules librevillois. Cerise sur le d’école pour tout le monde », expliquent gâteau, plusieurs guests de la scène les deux réalisateurs de la série, Fabrice musicale gabonaise devraient faire leur Oye Bekale, 32 ans, et Aurélien Safou, apparition au fil des épisodes, comme 31 ans. D’ordinaire plus habitués à le rappeur Ba’Ponga. l elise esTeban jeune afrique