Ja 2826 du 8 au 140315 enquete hotellerie

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Cameroun exClusif: Fotso parle

dossier tourisme

Hebdomadaire international indépendant • 55e année • no 2826 • du 8 au 14 mars 2015

mugabe l’homme qui n’aimait pas les blancs

Sonatrach

Spécial 10 pages

jeuneafrique.com

sexe le plaisir selon elles

Jusqu’où ira

le scandale?

procès le 15 mars à alger, audience préliminaire le 13 mai à milan, enquêtes à paris, Genève et montréal… la compagnie pétrolière algérienne, plus puissante entreprise d’afrique, est au cœur d’un véritable tourbillon judiciaire sur fond de corruption. enquête exclusive.

édition internationale et Maghreb & MoYen-orient France 3,50 € • Algérie 200 DA • Allemagne 4,50 € • Autriche 4,50 € • Belgique 3,50 € • Canada 5,95 $ CAN • Danemark 35 DKK • DOM 4 € Espagne 4 € • Éthiopie 65 birrs • Finlande 4,50 € • Grèce 4,50 € • Italie 4 € • Maroc 23 DH • Mauritanie 1 100 MRO • Norvège 45 NK • Pays-Bas 4 € Portugal cont. 4 € • RD Congo 5,50 $ US • Royaume-Uni 3,50 £ • Suisse 6 FS • Tunisie 3,30 DT • USA 6,50 $ US • Zone CFA 1 700 F CFA • ISSN 1950-1285


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Dossier

Tourisme

Portraits

Au Maghreb, le sens de l’accueil

hôtellerie

Course de vitesse pour les deux et trois-étoiles Développement économique et croissance démographique dopent la demande pour un hébergement accessible et de qualité dans les métropoles africaines. Sur ce segment, les groupes locaux rivalisent avec les géants internationaux. Objectif : capter une nouvelle clientèle mêlant affaires et loisirs. Christelle Marot

n o 2826 • du 8 au 14 mars 2015

jeune afrique


Olivier Jacquin

Directeur général de Mangalis

P

StratégIe

Onomo met le cap à l’est

ortés par une classe moyenne émergente et un tourisme d’affaires régional dynamique, les segments de l’hôtellerie intermédiaire et économique en Afrique sont désormais dans le viseur des grands groupes hôteliers, qu’ils soient opérateurs, développeurs ou investisseurs. Il faut dire que, selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), les arrivées de touristes internationaux sur le continent devraient grimper à 134 millions en 2030, contre 65 millions en 2013 (+ 106 %), tirées par les visiteurs issus des pays émergents d’Asie, d’Europe de l’Est et d’Europe centrale. Et ce malgré les menaces sanitaires et terroristes. Ainsi, des pays comme le

jeune afrique

InfraStructureS

La Côte d’Ivoire revient dans la course

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oLiVier Pour j.a.

IntervIew

p Pour son hôtel d’Abidjan, le groupe Onomo a confié la conception à l’architecte ivoirien Guillaume Koffi.

Soudan du Sud, la RD Congo et la Sierra Leone sont désormais sur les écrans radars des investisseurs. Aujourd’hui, dans chaque métropole africaine, le besoin d’infrastructures hôtelières de milieu de gamme est criant. « En raison du boom démographique, la demande est telle qu’il y aura de la place pour tout le monde », assure Olivier Jacquin, directeur général du groupe hôtelier Mangalis (lire interview p. 84). Au contraire de l’hôtellerie de luxe, dominée par les marques internationales, des groupesrégionauxouplusmodestessepositionnent sur le segment de milieu de gamme. C’est le cas de Mangalis (du magnat sénégalais Yérim Sow), du groupe Onomo, détenu par la famille Ruggieri via le holding Batipart, ou encore d’Azalaï, groupe l l l n o 2826 • du 8 au 14 mars 2015


NICOLAS BAILLET

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hôtelier malien dirigé par Mossadeck Bally. Pour ces « challengers », il s’agit d’aller vite pour ne pas laisser trop d’espace aux géants du secteur comme Accor qui, en 2013, annonçait l’ouverture de 24 nouveaux hôtels Ibis en Afrique subsaharienne en plus des huit établissements déjà existants. Pour faire la course en tête, Azalaï cherche à lever près de 100 millions d’euros auprès d’investisseurs privés et institutionnels sous forme d’ouverture du capital (40 millions) et d’emprunt. De son côté, Mangalis innove avec son concept d’hôtels modulaires, préfabriqués en Espagne puis assemblés sur le continent. Le premier hôtel économique du groupe ouvrira en juillet à Dakar sous la marque Yaas. Cinq autres suivront d’ici à fin 2016. Ce plan de développement, plus ambitieux à l’origine, a dû être revu à la baisse en raison de la crise Ebola, expliquent les promoteurs. Onomo, lui, privilégie les signatures d’architectes, avec le Français Arnaud Goujon pour les hôtels de Dakar, de Lomé et de Bamako, et l’Ivoirien Guillaume Koffi à Abidjan et à Libreville. Façades extérieures en blocs de terre crue, décoration réalisée par des artistes et décorateurs africains, oasis de verdure intérieurs, espace central façon « place de village », production d’eau chaude par panneaux solaires, système de traitement des eaux usées : l’accent est mis sur l’écologie et la culture. L’ouverture de l’hôtel Onomo de Lomé, cinquième du réseau, est annoncée pour le mois d’avril. lll

modernité et sécurité. Pour ces nouveaux

venus, il s’agit de se forger une identité singulière, qui saura séduire une nouvelle classe d’hommes et de femmes d’affaires africains, ancrée dans la modernité, rompue aux nouvelles technologies, sensible aux problématiques environnementales et à l’expression de l’héritage culturel africain. En outre, à l’instar des grandes marques, ces groupes investissent beaucoup dans la sécurité. Toutefois, le modèle économique se cherche encore. Pour minimiser les risques, Onomo entend ainsi diversifier sa présence sur le continent. En n o 2826 • du 8 au 14 mars 2015

p L’hôtel Salam, à Bamako, un des établissements du groupe malien Azalaï.

L’afrique subsaharienne en tête En 2014, le développement des capacités d’accueil a marqué le pas en Afrique du Nord, avec un peu moins de 16 500 nouvelles chambres prévues, contre 18 000 en 2013 (– 11 %), selon un recensement de W Hospitality Group. Pour la première fois depuis cinq ans que cette étude est menée, les groupes hôteliers veulent construire plus de chambres au sud du Sahara (près de 23 300) qu’en Afrique du Nord. Toutefois, cette dernière représente encore 41 % des capacités en projet. En Afrique subsaharienne, la croissance est tirée par l’Afrique de l’Ouest (34,1 % des chambres prévues) et particulièrement par le Nigeria, où 6 614 chambres sont programmées.

outre, le foncier reste une question épineuse. « C’est une ressource difficile d’accès en Afrique. Pour adapter le modèle, il nous faut acquérir des terrains et réussir à construire en hauteur, tout en préservant la spécificité de nos hôtels », confie Cédric Guilleminot, directeur général d’Onomo. À la fois opérateur et investisseur, le groupe a acquis des terrains ces derniers mois afin de préparer son développement en Guinée, au Togo et en Sierra Leone, « pour quand la situation sanitaire sera stabilisée ». « Nous prospectons aussi activement à Douala et à Yaoundé ; nous allons lancer des projets à Kigali et à Kampala dans les semaines qui viennent. Nous avons également sécurisé du foncier à Durban. L’objectif est de lancer quatre à cinq hôtels par an. Nous disposons du capital nécessaire pour acquérir les terrains et les murs. C’est un luxe. Peu de groupes hôteliers en Afrique font le choix, aujourd’hui, d’être opérateur-investisseur », indique Julien Ruggieri, président d’Onomo. dynamique. Du côté des grands groupes, c’est

l’américain Carlson Rezidor qui se montre le plus dynamique dans l’hôtellerie intermédiaire avec sa marque Park Inn by Radisson, déjà présente en Afrique du Sud, au Mozambique, en Égypte et en Tunisie. Après Le Cap en octobre 2014, Park Inn a ouvert en décembre un établissement de 140 chambres à Libreville, à proximité de l’aéroport international. D’autres ouvertures sont prévues prochainement: à Abeokuta (Nigeria) et à Kigali au second semestre 2015, à Abuja, Dakar et Nairobi début 2016, et enfin à Polokwane (Afrique du Sud) début 2017. Tous segments confondus, Carlson (dixième groupe hôtelier mondial en nombre de chambres, selon le cabinet de conseil spécialisé MKG Hospitality) aligne actuellement 51 hôtels en activité et en développement sur le continent, soit près de 11 500 chambres. Chez Starwood, autre géant américain, le segment de milieu de gamme est porté par l’enseigne Four Points by Sheraton. Au Nigeria, dans la ville d’Ikot Ekpene (Sud-Est), un établissement jeune afrique


dossier de 146 chambres devrait être réalisé en 2015. « Le Nigeria demeure un marché important pour Starwood. Il y a des opportunités de croissance importantes sur le segment intermédiaire dans ce pays et ailleurs en Afrique », a indiqué Bart Carnahan, senior vice-président pour les acquisitions et le développement de Starwood, lors de la signature du contrat de cet établissement avec l’État nigérian d’Akwa Ibom, qui sera propriétaire de l’établissement. Déjà bien implanté dans le pays, le groupe prévoit d’y ouvrir quatre hôtels supplémentaires sous la marque Four Points by Sheraton d’ici à 2017. contrats de management. Également dans

Ouvrir les frontières pour les touristes africains

P

our promouvoir le tourisme enAfrique,outreledéveloppement des infrastructures, il convient de lever les restrictions sur les voyages et les visas. « Si la majorité des NordAméricains et des Européens peuvent voyager librement sur le continent, deux tiers des pays africains demandent des visas pour les Africains voyageant en dehors de leur terre natale », pointe Charles Leyeka Lufumpa, directeur statistiques pour la Banque africaine de développement (BAD), dans

l’avant-propos du second numéro du rapport « Africa Tourism Monitor », initiative conjointe de la BAD, d’Africa Travel Association et d’Africa House. « Une meilleure coopération transfrontalière entre les États est nécessaire. Le lancement d’un visa touristique unique en 2014 entre le Rwanda, le Kenya et l’Ouganda est un pas dans la bonne direction », souligne le responsable de la BAD. La Tanzanie et le Burundi ont d’ores et déjà indiqué vouloir rejoindre ce système de visa touristique unique. l c.m.

Création :

- Crédit photos : ThinkStock©

la course: le français Louvre Hotels Group, présent avec les marques Golden Tulip et Tulip Inn. Ces hôtels sont développés sous contrats de management avec des investisseurs locaux, notamment au Maroc, en Algérie, en Tunisie, au Sénégal, en Tanzanie, au Ghana, au Nigeria et à Madagascar. Il y a peu, Louvre Hôtels affichait son ambition de doubler sa présence en Afrique au cours des cinq prochaines années. Des ouvertures sont annoncées en Éthiopie et au Rwanda. Dans les prochains mois, le chantier d’un nouvel établissement (pour un investissement de 19 millions d’euros apporté par

le partenaire) devrait être lancé en Côte d’Ivoire, en partenariat avec la société Archibo Design. Reste à voir si le rachat du groupe, en cours de finalisation, par Jin Jiang, le leader du tourisme et du voyage en Chine, pour un montant de 1,2 milliard d’euros, ne viendra pas remettre en question la priorité donnée au continent. l

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Le savoir-faire du constructeur Sustainable Laundry Solutions

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T

Dossier Tourisme maghreb

Le sens de l’accueil

Le secteur attend son printemps

La Tunisie a enregistré une nouvelle baisse du nombre de visiteurs venant de l’étranger. Ils ont été 6 millions en 2014 (contre près de 7 millions en 2010), générant 1,57 milliard d’euros de recettes. Établissements vieillots, image dégradée par les problèmes de sécurité, les raisons du long hiver du tourisme tunisien sont multiples. Si les professionnels gardent la tête hors de l’eau, ils le doivent en partie à la présence de nombreux Algériens dans leurs établissements. Le nouveau gouvernement saura-t-il provoquer l’aggiornamento indispensable au redémarrage d’un secteur incontournable pour l’économie nationale ? l F.D.

Ces professionnels s’emploient, malgré la crise et les aléas politiques, à toujours mieux recevoir les visiteurs. Une activité vitale dans ces pays.

Mouna Ben Halima

Directrice générale de La Badira

Reine des palaces

E

VINCENT FOURNIER/J.A.

lle ne manque pas d’audace: alors que le tourisme tunisien bat de l’aile, cette fille d’hôtelier de 42 ans a investi 16 millions d’euros pour lancer en décembre 2014, à Hammamet, La Badira, un hôtel cinq étoiles. Spécialiste en audit et gestion, elle pilotait auparavant le Sultan, un autre cinq-étoiles du groupe familial. « Toute crise est transitoire, celle-ci m’a encouragée à monter en gamme », assure celle qui s’est aussi distinguée comme militante de la société civile. Mouna Ben Halima cible une clientèle individuelle éprise de luxe et compte sur le réseau The International Leading Hotels of the World (LHW), qui a décerné son label à l’hôtel, pour remplir les 120 suites qu’elle propose. l FriDa Dahmani, à Tunis

René Trabelsi

Directeur général de Royal First Travel

L’avocat d’un secteur à la peine

D

epuis la révolution, René Trabelsi est l’une des figures les plus médiatiques du tourisme tunisien. Début 2013, ce fils de Perez Trabelsi, le président de la communauté juive de Djerba, avait même été pressenti pour être ministre du gouvernement Jomâa. Directeur général du touropérateur français Royal N O 2826 • DU 8 AU 14 mARS 2015

First Travel (RFT), il fustige à la radio et à la télévision le manque de coopération entre l’administration, les agents de voyage et les hôteliers. S’il reste un acteur de poids du secteur, sa situation illustre bien le désarroi des professionnels. En 2014, il n’a amené que 35 000 touristes en Tunisie contre 120 000 en 2008. l F.D.

ONS ABID POUR J.A.

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SIE I N U


Communiqué

FRANCE KITCHEN,

LE SAVOIR-FAIRE FRANÇAIS AU CŒUR DE L’AFRIQUE France Kitchen conçoit et fabrique des équipements pour les professionnels de l’hôtellerie et de la restauration collective ou commerciale. Le groupe français répond aux besoins les plus précis pour

satisfaire les clientèles les plus exigeantes à travers le monde, tout en maintenant une optimisation du budget. p Le dirigeant et fondateur Sam Bahsoun.

Au fil des années, dans un contexte de marché en plein développement, France Kitchen a su s’imposer en Afrique et au Moyen-Orient ; et s’est bâti une solide réputation basée sur la connaissance, la confiance et la satisfaction. A la tête de la société tricolore, au cœur d’un groupe tripartite : Sam Bahsoun, un quadragénaire d’origine libanaise, né en Côte d’Ivoire. Sa passion pour la cuisine l’a orienté vers une école hôtelière en Suisse. LE RETOUR VISCÉRAL AUX SOURCES. Il

a débuté sa carrière professionnelle dans l’hôtellerie et ensuite dans le métier de l’équipement au Moyen-Orient puis en Afrique. Arrivé en 2004 en France suite aux événements en Côte d’Ivoire, il est nommé Responsable Export pour l’Afrique, d’un groupe distribuant du petit équipement

pour la restauration et l’hôtellerie. Mais un jour, son destin bascule. Un entretien d’embauche se transforme finalement en un partenariat regroupant Sam Bahsoun et deux industriels français de renom : Tournus Équipement (environnement de cuisine inox, créé en 1910), et Charvet (matériel de cuisson, depuis 1934). Le groupe France Kitchen est né. La connaissance et la maîtrise du marché, la compréhension des cultures africaines ont permis à France Kitchen de se développer et d’intervenir sur quelques-uns des plus beaux projets d’Afrique (Intercontinental Lagos, Eko Hotel, Radisson Libreville, Park-Inn Libreville, Radisson Kigali, Park-Inn Kigali, Radisson Lagos Airport, Radisson Lomé).

p Le groupe français a noué de nombreux

partenaires avec de grands groupes hôteliers.

L’offre globale -bureau d’étudesfabrication-logistique-installation-service après vente- lui a permis d’être compétitif et de prendre des parts du marché à des concurrents de renommée internationale. Aujourd’hui, le groupe France KitchenCharvet-Tournus a noué de nombreux partenariats avec de grands groupes hôteliers tels qu’Accor, Rezidor, Onomo, Starwood, Azalaï et Intercontinental Hotel Group. Il emploie plus de 350 personnes sur 2 sites de production en France et 1 bureau SAV en Afrique ; et brasse un chiffre d’affaire global de 68 millions d’euros. Confiant dans l’émergence du Continent Africain, Sam Bahsoun a mis en place une stratégie de développement et de croissance qui permettra à France Kitchen d’accroître encore ses parts de marché, notamment au niveau de l’Afrique de l’Est.

p Le groupe France Kitchen-Charvet-Tournus offre une solution clé en main. Il possède 2 sites de production en France et un bureau Installation/SAV en Afrique.

Renseignements Tél. +33 (0)1 60 02 36 65 - www.francekitchen.com


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Dossier Tourisme

le royaume veut pousser son avantage

Yasser Znagui Conseiller royal Le visionnaire

ABDELHAK SENNA/AFP

E

x-directeur de l’activité trading et produits dérivés de la Deutsche Bank à Londres, Yasser Znagui, 44 ans, est devenu en quelques années une personnalité majeure du secteur touristique marocain. Nommé ministre du Tourisme en janvier 2010, il a piloté l’élaboration de « Vision 2020 », une stratégie ambitieuse qui vise à doubler le nombre de visiteurs internationaux au pays pour dépasser le

En 2014, la montée des menaces terroristes dans la région et l’instabilité de certains pays de la zone n’ont pas empêché le Maroc de tirer son épingle du jeu. Les arrivées touristiques ont enregistré une progression de 2,4 %, pour atteindre près de 10,3 millions de visiteurs générant plus de 53 milliards de dirhams (4,9 milliards d’euros) de recettes. Ayant défini une stratégie à l’horizon 2020, le pays ne compte pas s’arrêter en si bon chemin et veut attirer, à terme, plus de 18 millions de touristes. Pour atteindre cet objectif, le royaume mise sur une politique d’investissement tous azimut, avec la construction prévue de 200000 lits supplémentaires dans les cinq prochaines années. l M.M.

chiffre de 18 millions. Devenu conseiller royal en décembre 2011, à l’issue de son passage au ministère, il continue de suivre de près les chantiers structurants du secteur.Parmieux,lesmégaprojetsdéveloppés par le fonds Wessal Capital, un véhicule d’investissement de 2,5 milliards d’euros que l’ancien financier a monté avec quatre fonds souverains du Golfe, en plus du Fonds marocain pour le développement

touristique, dirigé par son ami Tarik Senhaji, lui aussi passé par la City. Yasser Znagui est également l’artisan de l’implantation de la chaîne Ritz Carlton au Maroc, d’abord à Tamuda Bay, dans le Nord, puis à Rabat. Ces projets (les premiers du genre en Afrique) ont été pilotés par Sienna Investment Group, la société marocobritannique qu’il a fondée en 2006. l Mehdi Michbal, à Casablanca

Hamid Bentahar

Vice-président d’Accor Maroc

Étoile montante de Marrakech

A

u Maroc, Hamid Bentahar, 43 ans, a l’aura d’une rock star. Après avoir débuté sa carrière en 1989 en tant que simple moniteur d’équitation dans l’un des hôtels de la chaîne Accor au Maroc, ce diplômé d’économie de l’université de Marrakech a gravi tous les échelons un à un jusqu’au poste de vice-président d’Accor Maroc, chargé de l’hôtellerie de luxe pour l’Afrique et l’océan Indien. Une véritable success-story pour ce Marocain issu de la classe moyenne. Son engagement pour le tourisme l’a propulsé en 2009 à la tête du Centre régional du tourisme (CRT) de la ville de Marrakech, première destination du pays. l DR

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C O R A

M.M. n o 2826 • du 8 au 14 mars 2015

jeune afrique


DR

Karim Cherif PDG de Groupe Eden Un héritier bâtisseur

L

e Groupe Eden, avec six établissements hôteliers répartis dans l’ouest du pays, appartient au cercle très restreint des sociétés privées d’hôtellerie en Algérie. Une position patiemmentconstruitepartroisgénérations de commerçants. Désormais, Karim Cherif, l’héritier de cette dynastie, veut lancer sa propre chaîne. Une dizaine d’hôtels seront regroupés sous l’enseigne Eden Stop. Il s’agit d’établissements « intermédiaires, corporate et urbains », car « on ne peut construire une politique du tourisme fondée uniquement sur des cinq-étoiles », assure ce patron quinquagénaire, qui privilégie un modèle autonome, loin des contrats de management avec des chaînes étrangères. À la tête de la Fédération nationale des hôteliers algériens de 2012 à 2014, le PDG de Groupe Eden a eu le temps d’observer le secteur. « La classe moyenne, qui compose l’immense majorité des touristes algériens, peine à trouver des structures adaptées à ses besoins », affirme celui qui chapeaute à présent la commission tourisme au sein du Forum des chefs d’entreprise (FCE), remanié par son nouveau président, Ali Haddad. l ChLoÉ RondeLeux, à Alger

A

RIE É G L Le tourisme reste une affaire d’État

Les chiffres offrent une vision en trompe l’œil. Si le pays attire de plus en plus de touristes – près de 2,7 millions en 2013, contre 2,1 millions en 2010 –, ces visiteurs sont constitués essentiellement d’Algériens vivant à l’étranger. Fin janvier, le Premier ministre Sellal a rappelé l’importance du secteur pour diversifier l’économie. La chute des cours du pétrole rend ce dossier encore plus brûlant. Comme il en a l’habitude, l’État a pris les choses en main, et a lancé un vaste plan de construction d’hôtels. Reste à voir si les pouvoirs publics laisseront une place aux investisseurs privés. l Ch.R.

jeune afRique


Dossier Tourisme

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interview

Olivier Jacquin

Directeur général de Mangalis

«Grâce à nos hôtels livrés en kit, nous gagnons six mois sur les chantiers » Avec six ouvertures annoncées, la filiale du groupe du Sénégalais Yérim Sow affiche ses ambitions sur le segment des deux et trois-étoiles. Son arme secrète : des hôtels clés en main bien adaptés à la demande.

E

n juillet, Mangalis ouvrira son premier hôtel économique à Dakar sous la marque Yaas. Avec ses enseignes Noom et Seen, déjà positionnées sur les segments des hôtels d’affaires et de milieu de gamme, cette filiale du groupe Teyliom, du magnat sénégalais Yérim Sow, couvrira ainsi l’ensemble du marché. Et, bien que son plan de développement ait dû être révisé à la baisse, notamment en raison de l’épidémie d’Ebola, le groupe compte bien poursuivre son déploiement enAfrique.Surlapériode2015-2016, Mangalis inaugurera des établissementsàConakry,Cotonou,Abidjan, Malabo et Pointe-Noire. Rencontre avec le patron du groupe, installé à Barcelone,quinouslivresonanalyse d’un secteur en plein boom. jeune afrique: quel est le potentiel de l’hôtellerie de milieu de gamme et économique en afrique? Olivier jacquin: Aucoursdeces

trente dernières années, l’Afrique s’est dotée d’un réseau d’établissements cinq étoiles pour satisfaire

le tourisme d’affaires international. Aujourd’hui,ils’agitderépondreaux besoins domestiques, à la clientèle intrarégionale et internationale qui loge dans les deux ou trois-étoiles. En 2050, le continent comptera près de 1,5 milliard d’actifs. La mobilité delapopulationvas’accroîtreconsidérablement. En Afrique subsaharienne, le taux de pénétration des chaînes hôtelières n’est que de 5 %. Le reste du secteur est constitué par l’hôtellerie indépendante. Dans chaque grande ville, on trouve au moins deux hôtels de grand standing. En revanche, l’offre desdeuxoutrois-étoilesn’estpasàla hauteur de la demande. L’hôtellerie économiqueetlesegmentdemilieu degammeconstituentdoncunmarché prometteur. quelles sont les zones qui connaissent les développements les plus importants sur ces segments aujourd’hui?

Pour les identifier, les hôteliers observent les taux de croissance du PIB et de la population, le nombre de chambres existantes et leur taux

d’occupation, ainsi que l’indice Ibrahim concernant la gouvernance. Selon ces critères, les villes les plus dynamiques étaient en 2013 les métropoles pétrolières, Lagos et Luanda. En Afrique de l’Ouest, il y a aussi Accra, Abuja et, dans une moindre mesure, Dakar, Abidjan, Niamey ou Freetown. En Afrique centrale, le Gabon, le Congo et le Tchad connaissent un bon développement. En Afrique de l’Est, la Tanzanie, l’Éthiopie et le Kenya sont dynamiques également. quelles sont les attentes de la clientèle?

q L’hôtel Yaas de Dakar, qui doit ouvrir en juillet, se veut moderne et connecté.

Les profils sont variés : jeune entrepreneur, technicien, directeur de projet, employé d’ONG, sportif… Ils attendent du design, l’internet haut débit, des écrans plats… Autre aspect essentiel: nos clients veulent delasécurité,quecesoitàl’extérieur ou à l’intérieur de l’hôtel. Cela va du gardiennage à l’informatique. Pour répondre à ces attentes et nous différencier des autres marques, nous cherchons à allier esthétique, confort et modernité, en privilégiant une touche locale. L’art contemporain et africain tient une place importante dans nos hôtels. Nousrevisitonsaussilacuisinetraditionnelle. Nous avons une approche globale de l’exploitation hôtelière en Afrique et nous proposons un bon rapport qualité-prix. Pour cette clientèle, le prix de la chambre est de 90 à 100 euros en moyenne pour un hôtel deux étoiles, et autour de 130 à 140 euros pour l’hôtellerie de milieu de gamme. Sur le continent, le foncier coûte cher. Dès lors, comment proposer des tarifs compétitifs ?

MANGALIS

La situation est variable. De nombreux pays africains facilitent l’accès au foncier, car ils manquent n o 2826 • du 8 au 14 mars 2015

jeune afrique


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Bio express

Mars 2014

Nommé directeur général du groupe hôtelier Mangalis

2006-2013

Vice-président chargé du marketing, des ventes et de la distribution de Carlson Rezidor

2001-2003

1994-2001

Directeur des ventes de Concorde Hotels & Resorts à Paris

d’infrastructures hôtelières. Le Sénégal, le Bénin, le Tchad, mais aussi la Côte d’Ivoire et le Congo sont proactifs en matière de politique touristique. Ils font tout pour rendre le foncier plus attrayant, parce qu’il reste de la surface dis-

Nos clients veulent de la sécurité, dans l’hôtel comme à l’extérieur. ponible. En revanche, à Luanda, où il n’y a plus d’espace et où l’hypercentre est très dense, les terrains sont rares et très chers, en effet. Mais le prix des chambres est tellement élevé – 350 euros en moyenne actuellement – qu’à l’arrivée l’exploitant s’y retrouve. Dans ce contexte, travailler avec un propriétaire indépendant qui dispose d’une réserve foncière peut être une solution. L’opérateur hôtelier valorise le terrain, il propose une constructionmaîtriséeetuneexploitation compétitive, ainsi qu’une marque et un contrat de gestion. C’est un bon compromis. Dans cette jeune afrique

configuration, le facteur déterminant, c’est le délai de construction. Comment procédez-vous ?

L’idée est d’aller vite pour rentabiliser l’hôtel au mieux. Dans l’hôtellerie économique, nous proposons des solutions très efficaces grâce à un système modulaire. L’hôtel est préfabriqué en Espagne, et il est livré en Afrique comme un puzzle. Nous gagnons du temps car le processus est très standardisé. Nous disposons d’un centre d’expertise de très haut niveau en Espagne. La logistique estoptimale.Celaéliminepratiquement toute mauvaise surprise en cours de chantier. L’hôtel est livré beaucoup plus vite et il peut ouvrir immédiatement. Par rapport à un chantier classique de construction d’un établissement économique, on gagne six mois environ. Sur un trois-étoiles, on peut gagner jusqu’à neuf mois. C’est énorme. L’hôtel Yaas de Dakar, qui va ouvrir en juillet, est un bâtiment modulaire. Ce sera la même chose avec le Yaas de Malabo. Et nous envisageons d’adopter cette démarchepournotremarqueSeen,

c’est-à-dire notre offre de milieu de gamme. Pour l’Afrique, c’est une solution pertinente, surtout dans les pays côtiers qui disposent d’un port, permettant une livraison rapide. Avec Ebola et la progression de Boko Haram, le continent fait face à des menaces accrues. Quel est l’impact sur le développement des projets hôteliers ?

Les gouvernements africains ont bien géré l’épidémie d’Ebola. Aujourd’hui, à Conakry, l’activité reprend, les hommes d’affaires sont de retour. La crise sanitaire a certes retardé des projets hôteliers [dont ceux de Mangalis, NDLR]et portuaires, et a ralenti l’économie. Mais maintenant, on sent que l’énergie est là, et le business est de retour. On a connu la même chose avec le Sras [Syndrome respiratoire aigu sévère] en Asie, il y a quelques années. Il y a eu un impact à court terme sur le tourisme d’affaires et individuel, puis les choses sont rentrées dans l’ordre. Quant au terrorisme, malheureusement, ce n’est pas un problème africain, mais mondial. l Propos recueillis par CHristEllE MArot n o 2826 • du 8 au 14 mars 2015

SylvaiN Cherkaoui pour J.a.

Responsable des ventes globales d’Europcar


Dossier Tourisme Stratégie

Onomo met le cap à l’est

Le groupe hôtelier veut maintenir un rythme de « quatre à cinq ouvertures par an » et cherche à s’implanter sur de nouveaux territoires.

E

n 2009, Julien Ruggieri entre au capital d’Onomo en prenant 15 % des parts. Depuis, il n’a jamais regretté son choix. La preuve : il est devenu le président du groupe hôtelier en 2012 et, aujourd’hui, sa participation est montée à 92 %. « J’ai vite été séduit par ce concept d’hôtels trois étoiles, bien adaptés au marché africain, comme l’a démontré la réussite de notre établissement à Dakar », explique-t-il. La société dispose aujourd’hui de quatrehôtelsàlasuitedel’ouverture d’un établissement à Bamako en janvier;uncinquièmeserainauguré àLoméenavriletunautreàConakry avant la fin de l’année. Dans ces deux derniers cas, le concept évolue légèrement, puisqu’une trentaine d’appartements viendront s’ajouter

aux 110 à 120 chambres proposées. Les investissements, d’un montant de 5 à 10 millions d’euros par opération, sont entièrement réalisés par le groupe, qui est l’un des derniers opérateurs-investisseurs sur le continent. Rentabilité. Même si la marque

cherche à s’implanter aujourd’hui du côté du Cameroun ou des deux Congos,Onomoafficheuntropisme de plus en plus oriental. « Dès les prochaines semaines », selon Cédric Guilleminot, le directeur général arrivé en 2013, le groupe compte démarrer des projets à Kampala et à Kigali, puis envisage des opérations en Afrique du Sud, au Mozambique, au Kenya, en Tanzanie et en Éthiopie.  Nous devonsdiversifiernosimplantations

géographiques pour sécuriser notre portefeuille », précise Ruggieri, pour qui « Onomo n’a pas vocation à se cantonnerenAfriqueàlongterme». Le modèle a montré sa résilience, avec un taux de remplissage de 70 % et des établissements qui deviennent rentables en cinq à dix ans. « Nous avons développé une véritable stratégie industrielle pour trouver notre place face à la concurrence, poursuit Ruggieri. Et d’ici à dix-huit mois, notre structure sera définitivement stabilisée. »

« notre société n’a pas vocation à se cantonner en afrique à long terme. » Julien RuggieRi, président d’Onomo

Le président compte maintenir le rythmede«quatreàcinqouvertures par an ». Pour cela, Onomo compte surfer sur la vague d’un tourisme d’affaires en plein boom à travers le continent et qui représente déjà 90 % de la clientèle du groupe. l OlivieR Caslin

infraStructureS

La Côte d’Ivoire revient dans la course « Nous visons à moyen terme une quinzaine de réceptifs hôteliers de haut standing dans les zones à fortes potentialités », a annoncé le ministre du Tourisme, Roger Kacou, lors d’une intervention en Conseil des ministres.

Pour attirer les touristes, le pays souhaite améliorer sa desserte aérienne et son offre d’hébergements.

C

e n’est pas encore la ruée des tour-opérateurs. Pour l’heure, la Côte d’Ivoire s’illustre surtout dans le domaine de l’événementiel enorganisantdenombreusesconférences internationales, à l’image du prochain Salon de l’agriculture, qui se tiendra début avril à Abidjan. Mais quelques investissements significatifs, comme la réhabilitation de l’ancien Club Med, dans la zonebalnéaired’Assinie-Assouindé, par l’architecte et homme d’affaires Pierre Fakhoury, pourraient annoncer le retour du pays parmi les destinations touristiques africaines. L’investissementestestiméàplusde 10 milliards de F CFA (15,25 millions n o 2826 • du 8 au 14 mars 2015

vOls ChaRteR. Pour faire venir les Nabil ZORKOT

86

d’euros). Rebaptisé Club Paradise Assinie, l’établissement ouvrira après l’élection présidentielle d’octobre. Au total, le secteur touristique aurait bénéficié de plus de 200 milliards de F CFA d’investissements ces cinq dernières années. Sa part dans le PIB ivoirien est ainsi passée de 0,6 % en 2011 à 4,3 % l’an dernier.

p La zone balnéaire d’Assinie, un des atouts touristiques ivoiriens.

visiteurs étrangers, Abidjan s’active afin d’attirer les compagnies charter et d’assurer les liaisons entre l’aéroportdelacapitaleéconomique et les aérodromes de San Pedro, Yamoussoukro, Korhogo et Man. L’État prévoit également de fusionner Soderlacs et la Compagnie des palaces de Cocody (SDPC), les deux sociétés publiques chargées du développement des infrastructures hôtelières. Après avoir reçu 470 000 visiteurs en 2014, la Côte d’Ivoire vise 500 000 touristes en 2015 et 1 million en 2020. l baudelaiRe Mieu, à Abidjan jeune afrique





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