JA 3091 DU 26 JUILLET 2020 GF AFRIQUE DE L'OUEST

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PALMARÈS LES 100 LEADERS DU DROIT DES AFFAIRES NO 3091 – AOÛT 2020

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COMMUNIQUÉ

LA RADIOCOMMUNICATION « MOTOROLA SOLUTIONS », UN OUTIL DE PERFORMANCE ESSENTIEL AU PORT AUTONOME DE DAKAR Motorola Solutions est un leader mondial des communications stratégiques. La société conçoit des plates-formes de radiocommunication, des logiciels de centres de commande, des solutions de sécurité et d’analyse vidéo afin de rendre les villes plus sûres et de contribuer à la prospérité des communautés et des entreprises. Dans le monde entier, sa gamme de communication « push-to-talk » répond particulièrement aux différents besoins de communications critiques dans le domaine du transport et de la logistique.

Monsieur Beye, que représente le Port Autonome de Dakar aujourd’hui ? Aujourd’hui, je dois vous dire que nous sommes à l’ère de la transformation au port de Dakar. Dans ce cadre nous avons lancé, la vision d’un port moteur de l’émergence qui repose sur quatre axes stratégiques : • L’amélioration de la satisfaction de nos clients • Le doublement du chiffre d’affaires • Le quintuplement de la rentabilité • L’amélioration de la fluidité avec une réduction du temps de séjour des navires et des marchandises Cette approche dans la gouvernance nous a permis d’atteindre une bonne santé financière et d’augmenter notre chiffre d’affaires. Elle a rendu possibles plusieurs initiatives, telles que des travaux d’infrastructures sur la voirie du Port et l’amélioration de son éclairage, pour ne citer que celles-ci. Vous avez mis en place un système de radiocommunication professionnelle Motorola Solutions. Dans quel but ? Une solution de communication assurant l’efficacité et la sécurité de nos agents et la protection de nos marchandises et de nos équipements, est un outil essentiel de notre croissance. Choisir un système numérique (remplaçant un système analogique) nous a permis de doubler la capacité de notre réseau et d’augmenter la qualité des communications.

La souplesse du système a permis de structurer nos groupes de communication pour correspondre au schéma d’organisation de notre COP (Centre Opérationnel Polyvalent). En cas d’urgence, la mobilisation des équipes d’intervention et de secours est immédiate. La supervision du réseau se fait via la salle de contrôle. En quoi consiste cette supervision ? Nous localisons en temps réel l’ensemble de nos agents équipés d’une radio portative. Ceci permet de les affecter à des priorités pour augmenter la productivité. Par ailleurs, la salle de contrôle est alertée lorsqu’un agent est en difficulté, les postes portatifs disposant d’un bouton d’alarme. Si l’agent n’est pas en état de manipuler la radio, celle-ci prévient de façon autonome la salle de contrôle qui prend alors les mesures nécessaires. Grâce au « geofencing », la salle de contrôle est immédiatement informée si une radio sort de son périmètre habituel et, en cas de vol, elle est désactivée à distance. La confidentialité des communications, qui sont cryptées, est, en effet, essentielle, le Port étant un avant-poste de la sécurité du pays. La communication avec les navires est-elle prise en compte ? Dès qu’un navire se présente, une communication automatique et systématique en VHF « fréquence marine » est établie. Quels ont été vos partenaires sur ce projet ? « CFAO Technology & Energy Sénégal » nous a parfaitement aidé à concevoir le système et à installer et à programmer les équipements. Motorola Solutions s’est imposé par la qualité du matériel proposé, aspect essentiel dans un environnement marin très exigeant.

MOTOROLA SOLUTIONS SOUTH AFRICA 22 Kildoon Rd, Jindal Africa Building, Bryanston, Johannesburg, 2196 - South Africa / Tél. : +27 (0) 11800 7800

www.motorolasolutions.com

JAMG - © MOTOROLA SOUTH AFRICA

ENTRETIEN AVEC MONSIEUR ABOUBACAR SEDIKH BÈYE, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU PORT AUTONOME DE DAKAR


GRANDFORMAT

KC NWAKALOR POUR JA

Le siège de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, à Abuja.

CEDEAO

Il était une fois dans l’Ouest Quinze États membres, 375 millions d’habitants, des institutions qui embrassent tous les sujets économiques et s’attellent à résoudre les crises, qu’elles soient d’ordre politique, sécuritaire ou sanitaire… Quarante-cinq ans après sa création et malgré les turbulences actuelles, l’organisation régionale maintient le cap. no3091 – AOUT 2020

141


GRAND FORMAT AFRIQUE DE L’OUEST

ENJEUX

Et pourtant elle tourne

Sa cohésion a été mise à rude épreuve ces derniers mois. Beaucoup reste à faire pour développer les échanges entre voisins. Alors qu’elle célèbre ses 45 ans, la Cedeao affiche cependant un bilan plutôt positif. Pour continuer de progresser, encore faut-il qu’elle reste unie.

142

no3091 – AOUT 2020


ISSOUF SANOGO/AFP

E

STÉPHANE BALLONG

st-ce la crise de la cinquantaine avant l’heure ? Ou celle de la quarantaine qui surgit avec quelques années de retard ? Depuis près d’un an, la cohésion de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), qui vient tout juste de fêter ses 45 ans, est mise à rude épreuve, sur le plan diplomatique comme sur le plan économique. Il y a d’abord cette querelle de voisinage entre le Nigeria et le Bénin. Le 20 août 2019, le premier a brutalement décidé de fermer sa frontière terrestre avec le second, reprochant à celui-ci de déverser sur son territoire national, gigantesque marché de près de 200 millions de consommateurs, des biens issus de

la contrebande. Ce qui, d’après Abuja, pénaliserait sérieusement sa propre production locale. « Depuis les indépendances, le Bénin fait partie des pays qui pratiquent ce qu’on appelle en droit douanier “la politique de la porte ouverte”, nous expliquait récemment l’économiste togolais Kako Nubukpo, doyen de la faculté des sciences économiques et de gestion de l’Université de Lomé. Il importe pour réexporter […]. Il n’est guère surprenant que cela provoque des frictions avec le Nigeria, qui cherche à créer une base industrielle. » Les relations entre les deux pays se sont détendues lorsque, à la mi-juin, le Bénin a retiré sa candidature pour le poste de directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), se ralliant à celle du Nigeria. Cependant, cette inédite fermeture de frontière, qui ne devait durer que vingt-huit jours, est toujours en vigueur.

Sommet extraordinaire du 14 septembre 2019, à Ouagadougou, consacré à la lutte contre le terrorisme et à l’avenir du G5 Sahel.

no3091 – AOUT 2020

143


1 215,39

GRAND FORMAT AFRIQUE DE L’OUEST

(2,2 %)

ENJEUX

LA DYNAMIQUE DES QUINZE (Pour l’année 2019)

PIB réel (à prix courants, en milliards de dollars internationaux*) Croissance du PIB (à prix constants, en %) 47,41

Population (en millions d’habitants)

(5,1 %)

34,66

64,10

(5,8 %)

(5,3 %)

18,5

* Dollars des États-Unis convertis en parité de pouvoir d’achat (PPA)

47,30

(5,5 %)

0,5 6,41

(6 %)

2,1

15,9

Guinée-Bissau

3,69 1,9

13,09

158,29 (6,9 %)

(4,6 %)

Il y a ensuite cette 7,6 tension qu’a fait naître Sierra Leone le projet de création d’une monnaie unique pour les quinze membres de la Cedeao. Tout semble pourtant bien engagé lorsque, le 29 juin 2019, l’ensemble des chefs d’État de la Communauté se mettent unanimement d’accord à Abuja sur les modalités de lancement de cette monnaie, qu’ils décident d’appeler « eco ». La situation se dégrade très vite lorsque, six mois plus tard, huit des quinze États de cette même Cedeao – par ailleurs regroupés au sein de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) – décident unilatéralement de réformer le franc CFA en vigueur au sein de l’Uemoa et de lui donner également le nom d’eco, sans remplir toutes les conditions définies collectivement dans la capitale nigériane. Le projet de monnaie unique, vieux de plus de trente ans, qui devait symboliser une intégration régionale renforcée et fluidifier les échanges commerciaux entre les pays d’Afrique de l’Ouest, devient ainsi une source de discorde. La dureté de la réaction du président nigérian, Muhammadu Buhari, illustre bien la gravité de cette tension. « J’ai l’impression que la zone Uemoa veut adopter l’eco en remplacement de son franc CFA avant les autres États membres de la Cedeao. Il est préoccupant de voir ceux avec qui nous souhaitons entrer dans une union prendre des initiatives sans nous faire suffisamment confiance ni nous consulter au préalable », a-t-il écrit sur son compte Twitter. Pour l’homme fort d’Abuja, il est impératif que tous les États membres se conforment au processus retenu par tous pour atteindre leur « objectif collectif ». Le président nigérian

no3091 – AOUT 2020

(5,6 %)

Niger 40,64

33,39

(5,1 %)

144

21,5

(5,7 %)

Sénégal Gambie

Mali

12,7

19,2

(6,4 %)

204,81 (6,1 %)

Burkina Faso

11,2 Bénin

Guinée

14,97

199,2

7,8

Nigeria

(5,3 %)

6,28

(-2,5 %)

4,7 Liberia

Togo 24,3 Côte d’Ivoire

28,8 Ghana

a également insisté sur la nécessité, pour les quinze, de se traiter « mutuellement avec le plus grand respect ». Et de conclure : « Sans cela, nos ambitions pour une union monétaire stratégique en tant que bloc de la Cedeao pourraient être gravement compromises. »

Passeport commun

Évidemment, lorsque l’on s’arrête à ces deux principaux faits qui ont marqué l’actualité récente de l’espace communautaire, on pourrait être tenté d’en déduire que celui-ci est au bord de l’implosion. Pourtant, il n’en est rien. Née en 1975 pour promouvoir la libre circulation des personnes et des biens en Afrique de l’Ouest et pour créer plus de richesses dans la région, la Cedeao fonctionne, malgré les difficultés auxquelles elle est confrontée. C’est une certitude, le socle de l’intégration régionale est solide. Aujourd’hui, plus personne au sein de cet espace n’a besoin de visa pour voyager d’un pays à l’autre, et les citoyens des pays membres peuvent résider et travailler où ils le souhaitent. « Je me déplace d’université en université avec mon passeport de la Cedeao. Je peux répondre très facilement à une invitation que me ferait une université dans le nord du Nigeria, parce que mon passeport me le permet », nous rappelait il y a

SOURCES : ONU, BANQUE MONDIALE, FMI

Cap-Vert

4,34



GRAND FORMAT AFRIQUE DE L’OUEST

quelque mois dans une interview le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne. Sur les plans politique et sécuritaire, la Cedeao, actuellement présidée par le Nigérien Mahamadou Issoufou, affiche un bilan positif et l’image d’une communauté soudée. On l’a bien vu au début de la pandémie de Covid-19 sur le continent, l’ensemble des chefs d’État de la Communauté se sont spontanément réunis par visioconférence pour lancer les bases d’une action collective sur le plan sanitaire mais aussi sur le plan économique, en vue de limiter les conséquences de cette crise. On se Le 21 décembre 2019, au siège de la Communauté, à Abuja. De g. à dr.: le chef de l’État nigérian, souvient du sommet extraordinaire Muhammadu Buhari; son homologue nigérien, Mahamadou Issoufou, président en exercice de qui les a réunis à Ouagadougou, en l’institution; et l’Ivoirien Jean-Claude Kassi Brou, président de la Commission de la Cedeao. septembre 2019, au cours duquel ils ont décidé de mettre en œuvre un plan d’action de près de 1 milliard de produits vers des marchés extérieurs à l’espace dollars (environ 880 millions d’euros) communautaire. Selon Eurotrace, la base de pour contrer l’avancée du terrorisme. données de la Commission de la Cedeao, le total On se souvient également, en remondes échanges intracommunautaires s’est élevé tant un peu le temps, de l’intervention en moyenne à 22 milliards de dollars par an de militaire de la Cedeao pour maintenir 2013 à 2017, soit à peine 11 % du commerce total la paix au Liberia et en Sierra Leone, de la Communauté. alors ravagés par une guerre civile. Dans une zone qui compte les deux premiers Au début de cette année, les diriproducteurs mondiaux de cacao, le premier geants de la Cedeao se sont mobilisés producteur africain de pétrole, ainsi que des avec une certaine efficacité pour aider champions de l’or, du coton et de nombreux la Guinée-Bissau à sortir d’une crise produits agricoles (lire pp. 148-152), l’accépostélectorale mortifère, ainsi qu’ils lération du processus d’industrialisation à l’avaient déjà fait en Gambie fin 2016l’échelle de la région est plus que jamais la début 2017, lorsque Yahya Jammeh priorité, avant même la création d’une monavait tenté de prendre en otage la jeune démonaie unique. « La Cedeao devrait pouvoir créer cratie de son pays. Par ailleurs, bien qu’une des filières de transformation de matières mission de chefs d’État de la Communauté en premières pour son marché de 400 millions Guinée ait été annulée, ils ont pu organiser, au d’habitants et réduire ainsi sa dépendance visdébut de mars, un audit du fichier électoral à à-vis de l’extérieur. Pour cela, elle doit encore Conakry. Enfin, à plusieurs reprises depuis la protéger son marché intérieur, le temps d’augmi-juin, ils ont envoyé des missions de médiamenter la productivité de ses économies pour tion au Mali pour tenter de rapprocher les que celles-ci puissent être un peu plus compoints de vue du président Ibrahim Boubacar pétitives. Aujourd’hui, on réduit les droits de Keïta et de l’opposition. douane à une allure exponentielle. Si l’on se contente de construire une zone qui permet au reste du monde d’alimenter notre marché, on n’aura pas fait beaucoup de progrès », met Désormais, de la même manière qu’elle travaille en garde Kako Nubukpo. à une politique sécuritaire commune, la Cedeao Quant à Souleymane Bachir Diagne, il est doit trouver le moyen de dynamiser les flux convaincu que seule « une Cedeao solide, commerciaux entre ses membres et de créer assise sur des bases économiques réelles, qui davantage de richesses dans la région. Car, et développe un commerce intérieur » pourra c’est là où le bât blesse, le volume des échanges « peser significativement sur le cours des évéintrarégionaux est ridiculement faible, la plunements ». À bon entendeur… part des pays de la Cedeao exportant les mêmes

ENVOI D’EXPERTS À BISSAU, AUDIT DU FICHIER ÉLECTORAL À CONAKRY, MÉDIATION À BAMAKO… LES MISSIONS DIPLOMATIQUES SE MULTIPLIENT.

Priorité à l’industrialisation

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no3091 – AOUT 2020

ISSOUF SANOGO/AFP

ENJEUX


COMMUNIQUÉ

© MERLA / ADOBESTOCK

« Telecel Play est une plateforme de services collaboratifs innovants, parfaitement en phase avec les attentes de nos clients africains » Entretien avec Hugues Mulliez, président du groupe Telecel

HUGUES MULLIEZ

Président du groupe Telecel

Pouvez-vous vous présenter ?

JAMG - PHOTOS : D.R. SAUF MENTION

Telecel est un groupe africain de télécommunications, créé en 1986, et actif dans une trentaine de pays dans le monde. L’Afrique représente le cœur de notre activité et nous sommes installés dans sept pays et territoires : République centrafricaine, RoyaumeUni, Gibraltar, Île Maurice, Afrique du Sud, Libéria et Sénégal.

Le groupe comprend quatre entités principales : • Telecel Mobile qui possède, contrôle et gère des opérateurs de téléphonie mobile. • Telecel Global Services : Voix, SMS, SMS Firewall, VAS, IPTV et services de cybersécurité. • Telecel Play. • L’African Startup Initiative Program qui inclut un incubateur de start-up, un accélérateur, un programme dédié aux communautés et des investissements qui soutiennent les start-up technologiques africaines.

sieurs services : paiements, messagerie électronique RCS (Rich Communication Services) et une plateforme de commerce électronique (« market place ») ouverte aussi bien aux entreprises qu’aux particuliers. C’est un concept radicalement nouveau de « guichet unique », qui est parfaitement en phase avec les attentes de nos clients africains.

Comment fonctionne l’application ? Chaque utilisateur dispose d‘un porte-monnaie électronique (« wallet ») qui lui permet de recevoir de l’argent, mais aussi d’en transférer, de payer des factures, de retirer de l’argent liquide et d’utiliser la « market place ». La messagerie va bien au-delà de l’envoi de SMS et permet d’envoyer des contenus plus riches et attrayants : création de conversation de groupe, photos et vidéos de haute définition, fichiers lourds, etc. Elle offre une nouvelle manière de communiquer.

Qu’en est-il de la « market place » ? Cet outil est ouvert aux entreprises, locales et étrangères, mais aussi aux particuliers. Elle offre la possibilité de réaliser des transactions B2B; B2C et C2C. Les utilisateurs pourront parcourir, rechercher, enregistrer, partager, surveiller, suivre les commandes et passer à la caisse grâce à une expérience centrée sur l'utilisateur et des options de livraison rapide.

Pouvez-vous nous en dire plus à propos de Telecel Play ?

Quelle est la « valeur ajoutée » de votre offre ?

Il s’agit d’une application mobile offrant plu-

Telecel Play n’est pas un système figé mais

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un outil souple qui peut être adapté au contexte local de chaque pays. C’est une plateforme qui inclut à la fois des services collaboratifs innovants et un instrument de redynamisation du commerce local afin d’offrir une expérience client sans équivalent en Afrique. J’ajouterais que nous avons beaucoup travaillé sur les coûts afin de pouvoir offrir des tarifs compétitifs.

Pourquoi avez-vous choisi le Sénégal pour démarrer le projet ? Notre volonté est de faire un test grandeur nature de l’application. Nous avons choisi le Sénégal parce que ce pays offre une conjonction exceptionnelle d’atouts : taux d’équipement élevé de la population en smartphones, dynamisme économique, degré de maturité de la distribution par rapport aux pays voisins, qualité de l’environnement des affaires et stabilité politique. Sur la base de l’expérience au Sénégal, nous déploierons ensuite progressivement Telecel Play dans d’autres pays africains.

Un mot de conclusion ? Telecel Play vise à transcender le commerce tel qu’il existe actuellement. Nous souhaitons développer un « new retail ». Celui-ci transformera en profondeur la façon dont les entreprises répondent aux besoins de leurs clients. En définitive, Telecel Play est un projet qui favorise l’utilisation des outils digitaux par nos clients de téléphonie mobile et leur permet de s’insérer dans un écosystème qui répond à des besoins qui vont bien au-delà des télécommunications.



GRAND FORMAT AFRIQUE DE L’OUEST

STRATÉGIE

Une carrure de champion La Cedeao compte parmi ses membres des producteurs mondiaux de premier plan dans nombre de filières: cacao, coton, élevage, hydrocarbures… Le défi est de fédérer les efforts des États et des professionnels pour influer sur les cours et les marchés.

L JACQUES TORREGANO POUR JA

ALAIN FAUJAS

À Zogbodomey, au Bénin, l’usine de décorticage d’anacarde de Fludor, filiale locale du holding nigérian Tropical General Investment (TGI).

a Cedeao se développe, mais pas assez vite pour réduire la pauvreté de la population ouest-africaine. S’il est vrai que l’or, le coton, le cacao ou l’uranium constituent de belles opportunités pour ces pays en mal de recettes et d’emplois, cela reste toutefois insuffisant en raison du rythme élevé de la croissance démographique, selon le rapport « Dynamiques du développement en Afrique. Réussir la transformation productive », publié en 2019 par l’Union africaine et le Centre de développement de l’OCDE. En dépit des efforts déployés pour tirer le meilleur parti de ces atouts, « la transformation productive de la région reste limitée », peut-on y lire. Le secteur industriel de l’Afrique de l’Ouest ne progresse pas. La part de l’agriculture y a reculé de 3,1 points de pourcentage au cours des dix dernières années, alors qu’elle a progressé dans les autres régions du continent. « La croissance totale de la productivité est en recul depuis 2000, principalement en raison de l’insuffisance du développement

technologique », indique le document. Le commerce intrarégional reste limité (15 % du total des marchandises exportées), et les échanges sont peu diversifiés. En 2016, les matières premières non transformées représentaient 75 % des exportations de la sous-région à destination d’autres continents. « Ces résultats mitigés soulignent le succès limité des stratégies adoptées jusqu’à présent en faveur de la transformation productive », poursuivent les auteurs du rapport.

Treize produits phares

Et si la Cedeao évitait de se disperser et abattait ses cartes maîtresses ? « Son plus grand potentiel réside dans l’agro-industrie », estime Bakary Traoré, économiste au Centre de développement de l’OCDE. En 2017, entre cinq et neuf pays de la sous-région figuraient parmi les vingt premiers producteurs mondiaux de treize produits agricoles, dont voici la liste (avec le pourcentage que représente l’Afrique de l’Ouest dans la production mondiale): le fonio (céréale sans gluten, comme le quinoa, 99,9 %), la noix de cajou (35,5 %), la noix de karité (99,9 %), l’igname (92,2 %), le millet (32,1 %), le gombo (28,2 %), l’arachide (12,8 %),

no3091 – AOUT 2020

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la noix de kola (84 %), le niébé (83,4 %), le cacao (63,5 %), le manioc (33 %), le caoutchouc (6 %) et l’huile de palme (4,7 %). Qu’ils aient une vocation alimentaire ou hygiénique, « on constate que la croissance de la demande de ces produits dans la région est supérieure à celle de la demande globale mondiale », souligne l’économiste. Pour optimiser ces atouts, il faudrait que les pays de la Cedeao suivent l’exemple de la Côte d’Ivoire et du Ghana (lire ci-contre), qui se sont unis pour obtenir des chocolatiers une meilleure rémunération de leurs fèves de cacao et une augmentation de la transformation locale des produits primaires. La création de filières efficaces concernant les produits agricoles pour lesquels l’Afrique est très bien placée suppose une amélioration des compétences, en vue de les valoriser, ainsi que des infrastructures pour les acheminer et de l’énergie pour les transformer.

Interconnexions

L’union fait la force, dans ces domaines comme dans les autres. À cet égard, l’un des principaux défis de la Cedeao sera de favoriser la mise en commun d’infrastructures. Cela passe par le développement des réseaux énergétiques, routiers et ferroviaires. « Les zones économiques spéciales [ZES] sont aussi un outil précieux, ajoute Bakary Traoré. Celle à dominante agro-industrielle créée [en mai 2018] avec l’appui de la Cedeao entre le Mali (région de Sikasso), le Burkina Faso (région de Bobo-Dioulasso) et la Côte d’Ivoire (région de Korhogo) est une première. Mais la Cedeao ne va pas assez vite pour multiplier ces zones de complémentarité transfrontalières, qu’il faut exploiter partout où un potentiel a été identifié. » Pour que ces ZES éclosent en plus grand nombre, encore faudrait-il que la Cedeao s’inspire de la Communauté d’Afrique de l’Est et réalise au plus vite l’interconnexion numérique de ses systèmes douaniers. Celle-ci apporterait une fluidité extraordinaire au commerce intrarégional, dont les premiers bénéficiaires seraient les producteurs de denrées agricoles, que celles-ci soient ou non déjà transformées. Depuis sa création, la Cedeao a montré l’exemple au reste du continent dans de nombreux domaines, notamment avec son passeport communautaire, qui, depuis 1995, permet la libre circulation des personnes sur l’ensemble de son territoire. D’ici à la fin de l’année, elle devrait supprimer le coût du roaming pour les utilisateurs de téléphone portable. Ses atouts naturels devraient l’inciter à faire preuve de la même hardiesse et du même esprit communautaire dans l’élaboration de sa politique de transformation productive.

150

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Lire aussi: « La Cedeao en marche vers un vrai marché régional de l’électricité », sur www.jeuneafrique.com

Cartel cacaoyer, un modèle à suivre

A

vec la Côte d’Ivoire et le Ghana, les deux premiers producteurs mondiaux, mais aussi le Nigeria, qui occupe le cinquième rang derrière l’Équateur et le Cameroun, la Cedeao concentre 68 % de l’offre de cacao de la planète, soit 3,4 millions de tonnes récoltées pour la campagne 2019-2020, sur un total mondial de 5 millions de t. Problème : les pays producteurs africains ne perçoivent, selon les données de l’Organisation internationale du cacao (Icco), que 3 % des revenus de la filière chocolat. Alors que la Côte d’Ivoire a produit 2,1 millions de tonnes de cacao en 2017 (44 % de la production mondiale), elle n’a tiré de son négoce que 3,3 milliards de dollars (2,9 milliards d’euros), contre 22 milliards de recettes pour les majors américaines. Si les trois pays de la sousrégion ont considérablement accru leur production depuis vingt ans (voir infographie),

TROIS PAYS, 68 % DU CACAO DE LA PLANÈTE Production de cacao

Total Côte d’Ivoire

Primes et bonus

Le Conseil du café-cacao (CCC) ivoirien et le Cocoa Board (Cocobod) ghanéen sont déjà parvenus, en juillet 2019, à imposer un mécanisme de compensation pour les producteurs. Leur suspension des ventes de fèves a pesé si lourdement sur les cours mondiaux qu’il n’a pas

MARCHÉ MONDIAL DU CACAO

3,4

(en millions de tonnes)

il a fallu attendre le 26 mars 2018 pour que se mette en place la première coopération entre les exploitants et les organismes interprofessionnels de la Côte d’Ivoire et du Ghana. Le président Alassane Ouattara et son homologue Nana Akufo-Addo ont signé ce jour-là la « déclaration d’Abidjan » instaurant « une Opep du cacao ». Grâce à cette alliance, la Côte d’Ivoire et le Ghana, qui représentent à eux deux 65 % de la production mondiale de cacao, vont harmoniser leurs politiques de commercialisation pour gagner en influence et augmenter leurs recettes.

2,2

15 % 4%à 6%

100

milliards d’euros

75 %

1,7 0,9

1,2

Ghana Nigeria

0,33 0,16

0,3

Fabrication de chocolat et distribution (dont TVA) Négoce, transport et taxes dans les pays producteurs

2002-2003

2019-2020

Planteurs et producteurs

SOURCE : ORGANISATION INTERNATIONALE DU CACAO (ICCO)

GRAND FORMAT AFRIQUE DE L’OUEST



GRAND FORMAT

Transformation locale

Enfin, pour limiter les variations du marché et créer davantage de valeur ajoutée, l’accent sera mis sur la transformation locale. Le CCC projette de construire deux unités de première transformation, d’une capacité de 50 000 t chacune, dans le port de San Pedro (premier port exportateur de fèves de cacao au monde) et dans celui d’Abidjan. L’objectif est d’atteindre une capacité de broyage de 1 million de tonnes d’ici à 2022, contre 500 000 t actuellement. L’an dernier, le Ghana a quant à lui fait passer ses capacités de 250 000 t à 400 000 t. Reste que 80 % des gains de la filière sont réalisés lors de la deuxième transformation (fabrication de la pâte de cacao), encore inexistante localement au niveau industriel. Les marges de progression sont donc énormes. BAUDELAIRE MIEU, À ABIDJAN

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no3091 – AOUT 2020

SIMON DAWSON/BLOOMBERG VIA GETTY IMAGES

fallu plus d’un mois pour que les traders et les industriels du chocolat acceptent le principe d’une prime de 400 dollars par t sur tous les contrats de vente. Surnommé « différentiel de revenu décent » (DRD), ce bonus entrera en vigueur à partir de la campagne 2020-2021, qui débutera en octobre, et permettra de garantir une meilleure rémunération aux producteurs. L’alliance entre le CCC et le Cocobod repose aussi sur une synchronisation des campagnes, avec un accord sur les volumes à placer sur le marché et une harmonisation du prix garanti aux producteurs, afin d’éviter la contrebande aux frontières. Les deux partenaires envisagent par ailleurs de construire des entrepôts pour stocker les récoltes en attendant de les mettre sur le marché au moment opportun. La Côte d’Ivoire prévoit ainsi de « bloquer » sa récolte aux alentours de 2 millions de t.

Lingot tout juste raffiné, au sein du complexe minier de LouloGounkoto, exploité par Barrick, au Mali.

Un potentiel en or

«

L

’Afrique de l’Ouest a plus de potentiel que n’importe quelle autre région de la planète. Sa géologie est semblable à celle du nord de l’Ontario, du Québec ou de l’Australie-Occidentale, des ceintures exceptionnellement prolifiques », nous confiait il y a quelques mois Richard Young, le patron du groupe minier canadien Teranga Gold Corporation (TGC), actif au Sénégal et au Burkina Faso. La région se situe au troisième rang mondial des zones les plus riches en terrains aurifères, après l’Australie et le Canada. Trois pays font désormais partie du top cinq des producteurs africains d’or, à commencer par le Ghana (l’ancienne Gold Coast), qui est devenu le plus grand producteur du continent avec 142 tonnes extraites en 2019, devant l’Afrique du Sud (118 t), le Soudan (76 t), le Mali (61 t, avec quinze mines industrielles exploitées) et le Burkina Faso (51 t, quatorze mines). Si, selon les experts, la région est encore largement « sous-explorée », elle attire cependant un nombre croissant d’acteurs, à l’instar de Barrick Gold. Devenu le numéro un mondial du secteur après sa fusion avec Randgold Resources en janvier 2019, le groupe canadien est installé au Mali depuis une quinzaine d’années et est aujourd’hui présent au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire et au Sénégal. C’est aussi le cas de ses compatriotes Iamgold (Sénégal, Burkina, Mali) et Endeavour Mining. Cette dernière compagnie, qui a racheté en mars

la Société d’exploitation minière en Afrique de l’Ouest (Semafo) pour 640 millions de dollars (567 millions d’euros), est présente au Burkina, au Mali et en Côte d’Ivoire. Parmi les pays où la filière se développe fortement, la Côte d’Ivoire, justement, a vu sa production passer de 7 t en 2009 à près de 30 t en 2019. Le pays compte aujourd’hui cinq mines industrielles, exploitées par Barrick, Endeavour Mining et l’australien Perseus Mining. Au Sénégal, la mine industrielle qu’exploite Sabodala Gold Operations (SGO), filiale locale de Teranga Gold, a produit 18 t d’or en 2019, un record depuis son entrée en production, en 1998.

Cherté de l’électricité

Les nouveaux codes miniers élaborés par les différents pays pour attirer et sécuriser les investissements étrangers ont favorisé le boom de l’or et l’arrivée d’opérateurs venus du monde entier. Par exemple, l’obtention d’un permis minier peut se faire en un an, contre au moins cinq ans en Amérique du Nord. Les principaux défis auxquels se trouvent confrontés les États et les professionnels de la filière sont l’insécurité liée aux attaques jihadistes dans le Sahel, le déficit en énergie et la cherté de l’électricité, ainsi que la nécessité de régulariser l’activité des mines artisanales et d’encadrer l’orpaillage, véritable fléau, tant pour les recettes de l’État que pour les investissements des opérateurs privés. AMADOU OURY DIALLO, À DAKAR



GRAND FORMAT AFRIQUE DE L’OUEST

DÉCRYPTAGE

Comment en finir avec la schizophrénie d’Abuja

Le géant nigérian devrait être la locomotive de la Cedeao. Pourtant, sa décision de fermer ses frontières terrestres, ses divergences de vues sur la monnaie unique et un certain complexe de supériorité constituent un frein à l’intégration régionale.

L

ALAIN FAUJAS

es Nigérians souffrent d’une sorte de schizophrénie par rapport à la Cedeao. Pères fondateurs de la Communauté, ils ralentissent aujourd’hui l’intégration régionale. Alors qu’ils pourraient être les grands bénéficiaires de ce marché commun, ils se barricadent derrière leurs frontières pour un oui ou pour un non. Bien qu’il dispose d’un patronat très dynamique, qui rêve de développer ses activités dans la sous-région, le pays a peur de la concurrence de ses voisins, qu’il considère comme déloyaux. Le géant nigérian se pose en gendarme de l’Afrique de l’Ouest sans assumer les responsabilités que cela implique. Les causes de cette attitude paradoxale sont nombreuses. Avec près de 200 millions d’habitants,

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le Nigeria est le pays le plus peuplé d’Afrique. Ce qui lui confère un poids économique considérable, puisqu’il contribue à hauteur de 67 % au produit intérieur brut (PIB) de la Cedeao. Le boom pétrolier des années 19902000 et son avalanche de milliards de dollars ont conforté les dirigeants nigérians dans leur nationalisme, voire parfois dans une arrogance critiquée en Afrique de l’Ouest. L’histoire explique aussi ce comportement. « Je suis toujours frappé du mépris dont les Nigérians font preuve à l’égard de leurs voisins francophones, qu’ils considèrent comme des valets de l’impérialisme français », explique Marc-Antoine Pérouse de Montclos, directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD). La position de Paris et d’Abidjan en faveur des sécessionnistes sudistes du Biafra et la guerre

qui a ensanglanté le pays (1967-1970) n’y sont sans doute pas pour rien dans cette sourde hostilité.

Vision passéiste

La myopie des responsables politiques joue également un rôle. « Le Nigeria dispose d’une jeunesse nombreuse et de mieux en mieux formée, relève Bakary Traoré, économiste au Centre de développement de l’OCDE. Il est le plus grand hub technologique d’Afrique devant le Kenya. Malheureusement, ses dirigeants ont du mal à saisir que l’avantage comparatif de leur pays n’est plus dans le pétrole ou dans les usines. Ces secteurs sont incapables de créer suffisamment d’emplois pour les classes d’âge qui arrivent sur le marché du travail. » Le plus myope de tous semble être le président Muhammadu Buhari. « Profondément nationaliste, il

NYANCHO NWANRI/REUTERS

Vue du quartier d’affaires et du port de Lagos. Berceau de la Communauté, la ville est la plus grande métropole du continent.


COMMUNIQUÉ

AFRIR

AVIS D’EXPERT

Email : contact@energieregulation.org

www.energieregulation.org www.minesparis.psl.eu

Libéralisation des secteurs de l’électricité en Afrique : le rôle central de la formation des cadres africains

C

haque année en Afrique l’offre d’électricité augmente signifi-

cativement avec l’inauguration de nouvelles centrales notamment dans le renouvelable. La hausse des capacités de production est toutefois peu visible si l’on considère le taux d’accès moyen à l’électricité aujourd’hui estimé à 15 % en Afrique Subsaharienne. En effet, sous l’effet conjugué d’une forte croissance économique et démographique, les systèmes de production d’électricité sont sous pression alors qu’ils doivent par ailleurs gérer de nombreuses autres contraintes (tarification, recouvre-

ment des factures, pertes dans les réseaux de transport, etc.).

Si la libéralisation permet de rendre les systèmes plus efficients et efficaces, elle demeure toutefois complexe avec une myriade d’enjeux. Le secteur privé n’investira que si la rentabilité est suffisamment élevée et le risque suffisamment maîtrisé. La capacité de l’opérateur historique à respecter ses engagements d’achats d’énergie est par exemple un enjeu de taille. Le calcul des tarifs de rachat spécifié dans ces contrats est aussi un exercice délicat. Du fait de la complexité des modalités d’ouverture à la concurrence, les cadres du secteur doivent disposer de tous les outils pour accompagner efficacement les réformes.La capacité à encadrer, planifier et organiser le secteur ne doit pas être négligée.

Diop SIDY, Directeur Afrique, Deloitte Economic Advisory, Deloitte France

Cette initiative inédite, fonctionne grâce aux collaborateurs de trois structures : Mines ParisTech, Deloitte et l’ANARE-CI, le régulateur ivoirien de l’électricité. Cette formation de haut-niveau a pour objectif de familiariser instances de régulation, opérateurs du secteur ou encore ministères de l’énergie aux enjeux

Cette double dynamique économique et démographique soutient des taux de croissance de la demande que l’on retrouve aujourd’hui nulle part dans le monde (près de 10% pour la Côte d’Ivoire ou le Mali par exemple). Dans ce contexte, l’ouverture à la concurrence des marchés d’électricité joue un rôle primordial dans la satisfaction de cette demande crois-

La capacité à encadrer, planifier et organiser le secteur ne doit pas être négligée. C’est précisément pour accompagner ce processus que la formation diplômante BADGE « Régulation de

sante.Les pays avec des mécanismes

l’Énergie - Ouverture à la concurrence

efficaces d’ouverture connaissent des

du secteur de l’électricité » a été créée

taux d’accès à l’électricité plus élevés.

à Mines ParisTech.

et outils les plus pointus sur le plan économique, technique et juridique. Nous lançons la 5e promotion de cette formation et informons les cadres intéressés qu’ils ont jusqu’au 14 septembre pour envoyer leur candidature.


GRAND FORMAT AFRIQUE DE L’OUEST

DÉCRYPTAGE

a une vision passéiste, analyse Pérouse de Montclos. Son programme économique se limite à relancer l’agroalimentaire dans le nord du pays. Il n’a jamais hésité à prendre des mesures protectionnistes dommageables pour ses voisins. Durant sa première présidence, en 1985, il avait expulsé les immigrés nigériens, aggravant la crise alimentaire au Niger, où l’on parle, encore aujourd’hui, de “la famine Buhari”. Au début de cette année, le chef de l’État a relancé l’activité des entreprises publiques qui avaient été démantelées dans les années 1980 dans le cadre d’un programme d’ajustement structurel. Il ne comprend rien aux mécanismes de l’économie et, comme il dispose d’une Assemblée à sa botte, personne n’est en mesure de lui dire qu’il est en train de se tirer une balle dans le pied au moment où tous les signaux annoncent une récession de 7 % et un recul inévitable de la production pétrolière. » Le protectionnisme nigérian tient aussi à la toute-puissance d’une bureaucratie tatillonne et ombrageuse. « Des douanes presque paramilitaires et la Standards Organisation of Nigeria [SON] exercent un contrôle très strict sur les importations et les exportations du pays, constate Poul Hansen, responsable de la section de la facilitation des échanges à la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced). Leur intervention n’est pourtant pas réellement nécessaire, puisque les produits nigérians sont aussi contrôlés dans le pays

NÉE À LAGOS…

L’idée de créer une zone d’intégration économique régionale a émergé en 1972 à l’initiative du président nigérian d’alors, le général Yakubu Gowon, et de son homologue togolais, le général Gnassingbé Eyadéma. Leur proposition a abouti à la signature du traité de Lagos le 28 mai 1975, acte de naissance de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest.

où ils arrivent. » Mais cela complique les échanges et renchérit leur coût. « Normalement, ajoute Poul Hansen, la meilleure route pour exporter les produits des pays enclavés comme le Niger et le Burkina Faso est celle qui mène au port de Lagos. La multiplication des contrôles pour y parvenir, l’insécurité, la petite corruption pratiquée par les forces de l’ordre et la bureaucratie des autorités portuaires dissuadent les exportateurs-importateurs de l’hinterland de faire transiter leurs produits par Lagos. Ceux-ci lui préfèrent les ports béninois, togolais ou ghanéens. C’est dommageable pour le Nigeria, car, en augmentant le volume

de son trafic portuaire, il abaisserait le coût de ses importations et donc des produits vendus aux consommateurs nigérians. »

Naira contre eco?

Le mastodonte nigérian pose aussi un problème en matière monétaire. En 2019, les chefs d’État de la Cedeao ont décidé de doter leur communauté d’une monnaie unique, l’eco. Prenant tout le monde de vitesse, le président ivoirien Alassane Ouattara a fait avaliser à ses pairs de l’Uemoa, en décembre 2019, une transformation du franc CFA en eco, au grand dam du président Buhari, qui y voit une mainmise abusive sur la future monnaie. L’on assiste donc à un affrontement entre Abidjan et Abuja pour imposer l’avatar du CFA pour l’un, le naira pour l’autre. « Étant donné son poids dans la population, le PIB et les échanges commerciaux de la sous-région, le Nigeria devrait faire figure de leader naturel de toute zone monétaire qu’il s’agirait de mettre en place dans la Cedeao, déclare Aly Mbaye, professeur d’économie à l’université CheikhAnta-Diop, de Dakar. En même temps, ce pays fait face à d’importants défis de politique économique et, souvent, à des pénuries de réserves [monétaires] qui le qualifient très peu pour ce rôle de leader. Mettre en place un système de change ou une politique monétaire régionale dans tout arrangement institutionnel incluant ce pays ferait courir un très grand risque à tous les États, et pas seulement à ceux de l’Uemoa. »


À court terme, on voit mal comment l’égocentrisme nigérian pourrait être corrigé ni comment la Cedeao, avec une telle entrave, pourrait accélérer sa marche vers l’intégration. Il existe pourtant des pistes. Abuja devrait d’abord changer de stratégie économique. « Le Nigeria a un énorme potentiel de créativité, souligne Bakary Traoré. Les Gafam lorgnent son marché, IBM et Facebook en ont fait leur tête de pont en Afrique. Le pays a les moyens de développer ses atouts dans le numérique grâce à sa diaspora, qui, en 2018, lui a envoyé des fonds dont le montant équivaut à son PIB annuel. Il faut que ses dirigeants comprennent qu’il est temps de se tourner vers les services et de ne plus faire de l’industrie une priorité. » Cela faciliterait la pénétration de ces activités chez ses voisins… À condition que le Nigeria accepte de respecter la libre circulation des produits de ces derniers, conformément aux règles de la Cedeao.

LE NIGERIA REPRÉSENTE 67 % DU PIB DE LA CEDEAO ET 53 % DE SA POPULATION, AVEC PRÈS DE 200 MILLIONS D’HABITANTS.

Qualités d’écoute

Peut-être faudra-t-il attendre pour ce changement des mentalités que le président Buhari, 77 ans, cède la place à un dirigeant plus moderne. Pourquoi pas à son vice-président, Yemi Osinbajo, 63 ans, chrétien du Sud, diplômé de la London School of Economics et ancien avocat d’affaires? « Quand il assurait l’intérim de Buhari, longuement hospitalisé au Royaume-Uni en 2017, se souvient Marc-Antoine Pérouse de Montclos, les hommes d’affaires étaient ravis de ses qualités d’écoute et de sa politique. » Mais si Yemi Osinbajo semble en mesure de faire évoluer l’attitude de son pays vis-à-vis de ses partenaires de la Cedeao, il faudra d’abord qu’il parvienne à se frayer un chemin vers la magistrature suprême à travers les arcanes politiciens d’un Nigeria compliqué.


GRAND FORMAT AFRIQUE DE L’OUEST

ENTREPRENEURIAT

Ouverture à l’africaine

SYLVAIN CHERKAOUI POUR JA

De l’agroalimentaire à la logistique, depuis Dakar ou Abidjan, des femmes et des hommes d’affaires ont choisi de développer leurs activités dans la sous-région. Un pari gagnant.

Mamadou LAMINE GUEYE

PDG de la Compagnie sénégalaise de transports transatlantiques-Afrique de l’Ouest (CSTT-AO) Fondée en 1949, plus d’une décennie avant l’indépendance du pays, l’entreprise familiale sénégalaise s’impose aujourd’hui comme l’un des principaux acteurs de la logistique industrielle, notamment minière, en Afrique de l’Ouest et même au-delà. CSTT-AO est présent dans l’ensemble des activités de la chaîne d’approvisionnement (achat de marchandises, transport, stockage de matériel, etc.) de grands opérateurs industriels et miniers tels qu’AngloGold Ashanti (son premier client en volume d’affaires), Sabodala Gold Operations (SGO) ou Barrick Gold, qui a racheté Randgold Resources en 2018. C’est d’ailleurs de l’expérience client de ce dernier dont Mamadou Lamine Gueye est le plus fier: « Nous avons été témoins des débuts dans la sous-région de Randgold, qui nous a accordé sa confiance. Le chemin parcouru ensemble est impressionnant! » s’enthousiasme le PDG de CSTT-AO. L’opérateur sénégalais accompagne l’important développement minier en cours depuis une dizaine d’années en Afrique de l’Ouest. Il est aujourd’hui présent dans de nombreux pays de la sous-région, en particulier au Mali, au Burkina Faso, en Guinée, en Côte d’Ivoire et au Ghana. Son efficacité repose notamment sur sa plateforme logistique d’une superficie de 30000 m2 (qui a nécessité un investissement de 3,8 millions d’euros) située à Kédougou, dans le sud-est du Sénégal, la principale région aurifère du pays. Le groupe a même étendu ses activités en Afrique du Sud, en RD Congo, en Zambie et au Mozambique. Fort de son expérience au service des miniers, CSTT-AO compte se positionner en aval du secteur des hydrocarbures au Sénégal, où le projet offshore de Sangomar est en cours de développement. Il est par ailleurs candidat à la gestion de la future plateforme pétrolière et gazière du port de Dakar. AMADOU OURY DIALLO, À DAKAR

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Massogbé TOURÉ DIABATÉ

PDG de la Société ivoirienne de traitement d’anacarde (Sita)

HIMBAZA PACIFIQUE POUR JA

Cette femme d’affaires ivoirienne a fondé le groupe agro-industriel Sita en 2000. D’abord uniquement active dans la production d’anacarde, Massogbé Touré Diabaté a ensuite investi dans la transformation de noix de cajou, qu’elle exporte principalement vers les États-Unis et les pays du Golfe. Le groupe emploie aujourd’hui environ 800 personnes, essentiellement des femmes, et dispose de filiales dans la transformation du riz, dans l’hôtellerie, le transport et le crédit. Massogbé Touré Diabaté, 56 ans, est membre du conseil d’administration du Conseil du coton et de l’anacarde (CCA) ivoirien, qui réunit les pouvoirs publics, les producteurs et les industriels de la filière. Elle est également vice-présidente de la Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI), au sein de laquelle elle est chargée de la commission « Développement de l’entrepreneuriat féminin ». L’épidémie de Covid-19 a durement frappé certains secteurs de l’économie ivoirienne, notamment l’hôtellerie et l’industrie, et la fermeture des frontières qui s’est ensuivie a eu des conséquences sur les exportations de Sita. AÏSSATOU DIALLO

Ibrahima DIAWARA Entrepreneur à succès, Ibrahima Diawara bénéficie de solides réseaux d’influence. Depuis qu’il s’est lancé dans les affaires, il y a vingt-cinq ans, il a toujours obéi au même credo : prendre des risques et travailler sans relâche. À 50 ans, ce patron malien continue de multiplier les projets, et ses entreprises, présentes dans des domaines aussi variés que l’énergie, l’industrie, les transports (terrestre et aérien), le BTP et, depuis peu, l’agriculture. Grâce à la bonne santé de l’ensemble de ses filiales, IBI Group espère maintenir un chiffre d’affaires d’environ 50 millions d’euros pour l’exercice 2020. C’est en Indonésie, en 1995, qu’Ibrahima Diawara fait ses premiers pas dans le monde de l’entrepreneuriat en créant Sabika, une société spécialisée dans l’emballage et l’expédition de colis. Un succès. La même année, le jeune patron lance Diawara Solar Energy, à Bamako, pour distribuer des panneaux solaires achetés en Australie. Deux ans plus tard, de retour dans la capitale malienne,

il y ouvre Diawara Concrete Industry, une unité de fabrication de carreaux, de tuiles et de briques, rebaptisée Stones en 2003. La success-story se poursuit en 2005, avec la création de Malian Aero Company (MAC). Après avoir commencé par la création d’une flotte d’avions spécialisés dans les opérations de « pluies provoquées », l’entreprise a rapidement étendu ses prestations aux évacuations sanitaires, aux vols charters et au transport de VIP. Fort de ses succès au Mali, Ibrahima Diawara développe en parallèle ses activités dans la sous-région. En 2011, il crée le holding IBI Group SA, chargé de piloter les différentes entités. Les sociétés relatives au BTP et aux infrastructures fusionnent au sein de Builders, qui est aujourd’hui un leader régional dans le domaine de l’assainissement et de l’adduction d’eau potable, et qui possède des filiales en Côte d’Ivoire, en Guinée, au Niger, au Congo et en Centrafrique. À partir de 2012, le groupe élargit encore

EMMANUEL DAOU BAKARY POUR JA

PDG d’IBI Group

son périmètre d’activité. À cette fin, Ibrahima Diawara crée plusieurs sociétés, dont Diawei, spécialisée dans le transport routier de marchandises (avec plus d’une centaine de camions), Belale, chargée de l’étude et du développement de projets d’énergie renouvelable, ou Bricoco Gold, active dans la prospection et l’exploitation minières. Enfin, dernier-né du groupe en 2019, le centre de recherche et de développement Diazon œuvre dans le domaine de la production agricole. Son objectif est de doper les rendements afin de participer activement au renforcement de la sécurité alimentaire au Mali et dans la sous-région. MOUSSA COULIBALY, À BAMAKO

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LE GROUPE KIRÈNE LANCE PEPSICO AU SÉNÉGAL ! Dans la continuité de son engagement auprès des consommateurs sénégalais, le Groupe Kirène lance pour la première fois au Sénégal, en partenariat avec le géant américain PepsiCo, une gamme complète de boissons gazeuses : Pepsi, Pepsi Max, Seven Up et Mirinda en format canette de 33 cl. PepsiCo a déjà à son actif 12 accords de franchise en Afrique, notamment en Côte d’Ivoire, et compte renforcer sa présence au Sénégal, considéré comme un marché clé avec plus de 150 millions de litres de boissons gazeuses consommées en moyenne chaque année. Cette innovation majeure, mûrie depuis 2 ans, met en avant la volonté du Groupe Kirène de compléter son portefeuille de marques de boissons et d’offrir davantage de choix aux consommateurs sénégalais. Fort de sa position de leader agroalimentaire dans le domaine de l’eau, du jus et du lait, l’entreprise souhaite maintenir plus que jamais sa dynamique d’innovation performante et gagnante sur le marché.

Un impact positif sur l’emploi Plus de choix de qualité, plus de parfums variés, à travers une offre locale, produite au Sénégal… tel est le crédo du Groupe Kirène qui n’a de cesse de valoriser le « Made in Sénégal » dans un contexte économique qui appelle de plus en plus

à dynamiser les emplois locaux, le pouvoir d’achat et à stimuler la croissance du secteur des boissons.

des Sénégalais mais aussi par la recette et la promesse d’une expérience unique aux consommateurs.

Grâce à l’expertise de ces 2 leaders, une ligne de production de canettes a pu être installée sur le site de production du Groupe Kirène à Diass. Celle-ci permet de fabriquer plus de 24 000 canettes/ heure. Le matériel de production ainsi que les nouveaux espaces de stockage ont été installés grâce à un investissement de plus de 5 milliards de FCFA.

Ce partenariat entre les deux entreprises, leaders dans leurs domaines respectifs, met en lumière des valeurs communes d’entreprises dynamiques, inspirantes et citoyennes, partageant les mêmes idéologies et les mêmes préoccupations de produits de qualité pour plus de moments de bonheurs et de joie auprès des Sénégalais.

Cet investissement a permis de créer plus de 25 nouveaux emplois dans l’usine. Une cinquantaine d’emplois directs supplémentaires et plus de 200 emplois indirects vont être créés pour soutenir la production et la distribution locale de cette innovation.

Des valeurs communes Grâce à ce partenariat stratégique solide avec PepsiCo, le Groupe Kirène est décidé à propulser une nouvelle dynamique sur le marché des boissons au Sénégal, en apportant une innovation par le format, particulièrement adapté aux modes de vie et au pouvoir d’achat

Ces marques, très connues à travers le monde, raviveront certainement des souvenirs à une génération sénégalaise, nostalgique d’une époque ou Seven Up a même donné son nom à un rondpoint stratégique de la capitale dans les années 90.

Ce projet valorise le « Made in Sénégal » dans un contexte économique qui appelle de plus en plus à dynamiser les emplois locaux et le pouvoir d’achat. Avenue Malick Sy Immeuble Sehran 6e étage

Tél. : (+221) 33 849 56 66


COMMUNIQUÉ

Entretien Alexandre Alcantara, directeur général du Groupe Kirène

« Nous voulons construire une belle histoire avec nos clients » Quelle est l’importance de ce projet dans la stratégie du Groupe Kirène ? Le Groupe Kirène a mis en œuvre une stratégie d’innovation permanente. Ceci nous a permis d’apporter des produits de qualité à des prix avantageux, qui sont parfaitement en phase avec les attentes des consommateurs. Je rappelle que dès 2001, le Groupe Kirène a fait figure de pionnier en lançant sur le marché la première eau minérale embouteillée du Sénégal. Dans le contexte difficile du Covid-19 nous avons voulu poursuivre cette stratégie avec un lancement qui est très important pour nous. Nous nous sommes associés avec le groupe PepsiCo pour fabriquer et commercialiser des boissons gazeuses du groupe. Surtout, nous n’oublions pas la marque Seven Up qui est très connue au Sénégal parce qu’elle a été commercialisée jusque pendant les années 90. Nous avons envie de faire une très belle proposition à nos consommateurs et de construire une histoire avec eux.

Avec un bel outil industriel… Face à l’afflux des importations de boissons gazeuses, nous avons fait le pari de développer une production locale. Le groupe a investi 5 milliards de FCFA principalement pour fabriquer plus de 24 000 canettes/heure. C’est l’une des plus grandes usines de production de boissons de grande consommation d’Afrique de l’Ouest et une illustration de l’engagement du secteur privé sénégalais en faveur du développement économique et social du pays.

Quels sont vos projets ? Nous avons l’intention de continuer à lancer de nouveaux produits, notamment des boissons à base de thé. Nous voulons également nous déployer dans d’autres pays de la sous-région en profitant du savoir-faire que nous avons acquis au Sénégal. Nous souhaitons que ce succès ne soit pas uniquement national mais sous-régional.

Entretien Marius Vorster, directeur du marketing de PepsiCo pour l’Afrique sub-saharienne

« Notre ambition est de bâtir un partenariat prospère dans les années à venir » Pourquoi vous intéressez-vous au Sénégal ?

En quoi ce partenariat est-il important pour vous ?

Nous souhaitons accélérer notre croissance dans le monde et devenir le leader du marché des produits alimentaires et des boissons. Nous pensons que l’Afrique a un immense potentiel de croissance. PepsiCo possède des franchises d’embouteillage dans douze pays du continent et a sa propre unité d’embouteillage en Égypte. Nous souhaitons être davantage présents en Afrique de l’Ouest.

Nous avons un grand portefeuille de marques très fortes. Celles-ci sont appréciées dans le monde entier et nous avons hâte qu’elles soient consommées dans tous les foyers sénégalais.

Le partenariat que nous avons conclu avec le Groupe Kirène est très important à nos yeux car nos deux entreprises partagent les mêmes valeurs. Notre ambition est de bâtir un partenariat prospère dans les années à venir.

Email : marketing@kirene.sn / serviceconsommateur@kirene.sn

www.kirene-groupe.com

JAMG - PHOTOS : D.R.

Le Sénégal a une économie dynamique et résiliente. Son marché des boissons gazeuses est encore peu développé et a de belles perspectives de croissance. Notre partenaire, le Groupe Kirène, est leader sur le marché de l’eau minérale, des jus et des produits laitiers. Cette position stratégique va nous aider de manière décisive à commercialiser nos boissons gaz zeuses au Sénégal.

Nous croyons que cet accord offre une opportunité exceptionnelle pour créer des moments de bonheur en offrant des boissons délicieuses et rafraichissantes ainsi que des expériences de marque uniques aux consommateurs du Sénégal.


GRAND FORMAT AFRIQUE DE L’OUEST

SOCIÉTÉ

Angélique Kidjo « Nous, Africains, avons de nombreux préjugés les uns envers les autres » La diva béninoise revient sur les obstacles qui handicapent la coopération régionale. Parmi eux, une certaine méconnaissance de l’Histoire et de l’altérité. PROPOS RECUEILLIS PAR AÏSSATOU DIALLO

D

u haut de ses t ro i s d é c e n nies de carrière couronnées de récompenses, la chanteuse béninoise passe d’un style à l’autre, revendique son « internationalité » et inspire la jeune génération de musiciens du continent. La reprise de son titre Wombo Lombo par la Nigériane Yemi Alade dans son tube Shekere, sorti au début de février, dépasse les 10 millions de vues sur YouTube. Burna Boy, célébrité internationale à qui elle a ravi le Grammy Award du meilleur album de musique du monde en janvier dernier, l’avait aussi invitée sur son album African Giant, sorti l’année dernière. Ambassadrice de bonne volonté de l’Unicef depuis 2002, Angélique Kidjo reste, à tout juste 60 ans, une artiste engagée, notamment en faveur de la scolarisation des jeunes filles et

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du commerce équitable. Le 25 mai, elle figurait parmi les têtes d’affiche des concerts virtuels donnés pour célébrer la journée de l’Afrique et sensibiliser le public à la pandémie de coronavirus. Avec son franc-parler habituel, elle confie à JeuneAfrique son point de vue sur l’intégration régionale ouest-africaine, sur les manifestations pour les droits des Noirs aux États-Unis et en France, ainsi que sur les conséquences du Covid-19 sur la vie artistique. JeuneAfrique:LaCedeaocélèbre son 45 e anniversaire cette année. Est-elle un modèle d’intégration régionale ? Angélique Kidjo : Il

faut que l’espace communautaire soit un vrai marché commun, au sein duquel les populations puissent voyager ou s’installer. Or il existe encore des freins à cela. C’est très bien de faire des textes, mais, s’ils ne sont pas respectés, ils ne servent à rien. Si nous arrivons à


garantir une vraie libre circulation des personnes et des marchandises dans cet espace, ce sera déjà un grand pas en avant. Nous, Africains, avons de nombreux préjugés les uns envers les autres. Par exemple, dans mon pays, les gens du Sud trouvent à redire sur les gens du Nord. Il faut aussi former des douanières et des douaniers, et bien les payer afin d’en finir avec le racket. L’épidémie de Covid-19 doit aussi être l’occasion pour les pays de la Cedeao de repenser leur coopération en matière de recherche. Ils doivent se mettre d’accord pour créer un grand laboratoire, pour que leurs chercheurs puissent établir des protocoles et lancer des tests afin d’apporter des solutions locales à la pandémie. C’est en mutualisant nos moyens que nous pourrons nous en sortir. L a création de l’eco peutelle garantir l’indépendance économique ?

Je ne suis pas spécialiste des questions monétaires et ne peux donc juger de cela. Mais il est clair qu’avant toute chose nous devons créer un environnement économique propice aux affaires. Cela passe entre autres par la création d’infrastructures routières et ferroviaires, par l’harmonisation des taxes, par la sécurité des personnes sur les routes transfrontalières, la libre circulation des informations, etc.

PATRICK FOUQUE

Le débat concernant la restitution du patrimoine africain a été animé, et le Bénin est l’un des pays les plus actifs sur la question. Qu’en pensez-vous ?

Selon moi, le rapatriement des œuvres du continent doit s’inscrire dans un cadre plus

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GRAND FORMAT AFRIQUE DE L’OUEST

SOCIÉTÉ

large. Chaque pays doit travailler à la création d’un musée multimédia, non seulement pour l’art mais également à des fins éducatives et pour conter nos histoires, aussi douloureuses soientelles, comme l’esclavage. Pour cela, nous devons former les guides, rendre les musées ludiques pour les enfants et inscrire leur visite dans le système scolaire. Nous devons aussi parler aux jeunes générations des royaumes qui ont existé avant l’esclavage et de la colonisation, afin qu’elles soient fières de leur histoire. La société civile doit s’impliquer. Elle peut contribuer à la création de musées en tenant compte des matériaux locaux et du réchauffement climatique. On peut ensuite prévoir des abattements fiscaux, par exemple, pour ceux qui contribuent à leur construction. Tout cela peut être fait en parallèle du lobbying pour le retour des œuvres d’art. Les manifestations qui ont éclaté aux États-Unis et en Europe après la mort de George Floyd sont-elles l’occasion de nouer un dialogue sur notre passé?

Nous, Africains, devons dans un premier temps crever l’abcès de cette culpabilité qu’on nous met sur le dos à propos de l’esclavage. Trop souvent lorsqu’on aborde le sujet, on nous répète que ce sont des Africains qui ont vendu les leurs, sans préciser qu’il y avait à cette époque des personnes qui se sont battues contre l’esclavage. L’éducation est la base du dialogue et de la paix. Il faut expliquer le fondement de ce qui se passe aux États-Unis et en France aujourd’hui. La plupart des Français ignorent leur histoire liée à l’Afrique. C’est à la limite si on ne dit pas que, pour connaître l’Afrique, il faut lire Tintin ! Le problème du racisme, c’est l’ignorance. Les gens n’ont pas appris et ils ne comprennent pas. Ma musique est une façon de collaborer avec le monde entier et de faire comprendre qu’il n’y a pas de différences. Quand on aime le blues, le jazz, le funk, la salsa, le gospel ou le rock’n’roll, on aime l’Afrique; c’est l’Afrique! Selon moi ces manifestations doivent être un moyen d’exiger le

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no3091 – AOUT 2020

POUR NOTRE CONCERT, MANU DIBANGO AVAIT FAIT UN ARRANGEMENT SUR INDÉPENDANCE CHA CHA. dialogue et non d’inciter à la violence. Nous devons dialoguer sur tous les sujets de notre passé commun pour permettre à chacun de prendre ses responsabilités. Avez-vous mis à profit votre confinement en France pour concevoir de nouveaux projets ?

J’ai plus travaillé durant cette période de confinement que durant les six derniers mois de 2019. Cela a été un moment de réflexion et de remise en question, notamment sur la nécessité d’agir pour sauver la planète. Sur le plan artistique, j’ai créé beaucoup de musique. Pour le continent africain, j’ai repris Pata Pata, de Miriam Makeba. L’Unicef, dont je suis ambassadrice, en a acquis les droits pour une année. « Pata Pata » signifie « touche-touche » dans plusieurs langues sud-africaines. L’idée était de faire passer des messages de sensibilisation aux gestes barrières, comme se laver les mains et garder une distance physique. J’explique que, s’il ne faut pas se toucher pour l’instant, ce n’est pas la fin de nos contacts avec les autres, mais une pause pendant laquelle il faut penser à soi et aux personnes fragiles. Cette forme de sensibilisation est facilement diffusable sur les radios, un média plus accessible en Afrique que la télévision ou internet. Quel regard portez-vous sur la nouvelle scène musicale ouest-africaine?

Aujourd’hui, l’afrobeat est à la mode. Ce phénomène dépasse les frontières de l’Afrique de l’Ouest. C’est le moment de se fédérer pour créer, à partir de cette base qu’est l’afrobeat, quelque chose qui permette aux

jeunes Africains d’être fiers et qui les incite à rester chez eux. L’Afrique a eu un impact culturel dans le monde et, aujourd’hui, il faut que l’on s’extirpe du cerveau que ce qui vient de l’extérieur est meilleur que ce qui vient de chez nous. Nous, artistes, avons la capacité de rendre notre continent désirable. Pour ce faire, nous devons mieux organiser notre industrie musicale, former des ingénieurs du son, des producteurs, des managers, etc. Le Covid-19 a emporté des baobabs de la musique africaine, dont Manu Dibango, Tony Allen et Mory Kanté. Des décès qui vous ont particulièrement touchée…

En à peine une semaine j’ai perdu mon beau-père, Tony Allen, Mory Kanté… C’est là qu’on se rend compte en tant qu’artiste que, même si nous disparaissons, notre musique restera. Cela a été très difficile, d’autant que je voulais que Manu Dibango soit présent à mon concert, initialement prévu pour le 14 mars, et qui devait célébrer les soixante ans d’indépendance de plusieurs pays africains. Je suis née le 14 juillet 1960 [à Ouidah], quinze jours avant l’indépendance de mon pays. Manu ayant vécu sous la colonisation et assisté aux indépendances, il représentait pour moi la mémoire de ce temps. Nous avons beaucoup travaillé ensemble pour préparer le concert. Sa vision de la colonisation était intéressante. Le cas de son pays, le Cameroun, est particulier – il y a eu les Allemands, les Anglais, les Français… Manu avait fait un arrangement spécial sur Indépendance Cha Cha. Ce concert devait aussi être l’occasion de réunir sur scène Baba Maal, Yemi Alade et Brittany Howard, la chanteuse d’Alabama Shakes. On oublie souvent que les mouvements des indépendances en Afrique coïncident avec le début du mouvement des droits civiques aux États-Unis. Je voulais que ces deux histoires se rencontrent sur scène. La musique me permet de créer des ponts pour faire comprendre que ce que nous vivons aujourd’hui a ses origines dans l’Histoire.


PU UBLI-INFORMATION

ONI BURKINA

UNE INFRASTRUCTURE D’IDENTIFICATION AU SERVICE DU BIEN PUBLIC

Aristide Kayaba BERE, Directeur Général

En 2019, l’office a ainsi délivré plus de 1,5 millions de CNIB. Inédit dans l’histoire de la maison. Et rien que pour le premier semestre 2020, près de un million de cartes ont déjà été produites, malgré la situation sécuritaire du pays et la pandémie du Covid-19 qui avait donné un coup d’arrêt aux activités de la structure.

PERFORMANCES L’œil non averti ne peut pas se douter, au regard de la sérénité qui règne dans les locaux de l’ONI à Ouaga 2000, que cet EPE a été paralysé en 2018 par une grave crise de confiance entre les travailleurs et la direction. Nommé en octobre 2018 à la tête de la direction générale, Aristide BERE s’est employé à juguler cette crise grâce au dialogue et en mettant en place un manuel de procédures, un règlement intérieur, un comité mixte paritaire, un conseil de discipline, etc., outils nécessaires au pilotage stratégique. Aujourd’hui, la sérénité est revenue à l’ONI, lui permettant de délivrer en un temps record les documents relatifs à la sécurité des citoyens.

01 BP 5675 Ouagadougou 01 Tél. : (+226) 25-49-77-95 / 25-49-77-36 - Email : Oni@oni.bf

DÉCONCENTRATION Pour tenir le pari des élections qui se profilent à l’horizon, l’ONI s’est montrée particulièrement active ces derniers mois pour offrir aux Burkinabè en âge de voter, un passeport ou une CNIB, les deux documents de votation consacrés par le code électoral burkinabè. « Nous avons pris part à des missions dans 22 pays où résident des Burkinabè. Sur le plan intérieur, nous avons délivré un certain nombre de document essentiels au processus électoral », explique Aristide Béré. La crise jugulée, la machine relancée, cet administrateur civil qui a occupé de nombreux postes de responsabilité a entrepris, avec ses collaborateurs, de bâtir une infrastructure d’identification au service du bien public, en simplifiant et en fluidifiant l’accès à la CNIB et aux autres documents. Depuis un an, l’ONI a entamé un processus de déconcentration progressif des centres de production. Un centre de production de passeports a ainsi été installé à Bobo Dioulasso, la deuxième ville du pays. « À terme, la carte d’identité sera produite dans les 13 régions du Burkina Faso », annonce M. BERE.

JAMG - Photos : ONI

Secoué par une crise en 2018, l’Office National d’Identification (ONI) se porte bien. Créé en 2004, cet Établissement public de l’État (EPE) en charge de la délivrance de Cartes Nationales d’Identité Burkinabè (CNIB) et du passeport ordinaire fait tourner la machine à plein régime.

En 2019, l’office a délivré plus de 1,5 millions de CNIB L’autre défi majeur pour l’office, est d’offrir des e-services à une clientèle particulière qui pourrait avoir besoin des données de la carte d’identité pour un usage autre que l’identification.

www.oni.bf


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