Burkina 30 ans après, qui a tué Sankara ?
Côte d’Ivoire Sur la piste des caches d’armes
N° 2961 • du 8 au 14 octobre 2017
jeuneafrique.com
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPEN NDANT • 57e année
Cameroun Anglophones: comment éviter la fracture
IBK
Dix mois pour convaincre
Alors que la présidentielle d’août 2018 se profile, le très probable candidat à sa propre succession affûte son bilan. Et ses adversaires, leur stratégie pour le battre. Spécial 20 pages
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LE PLUS
de Jeune Afrique
ENJEUX La tentation du second mandat
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REPORTAGE Premiers pas d’une patrouille mixte INTERVIEW Mamadou Sinsy Coulibaly, président du patronat SOCIÉTÉ Au nouveau BlonBa, que le spectacle recommence!
Dernière ligne droite Sécurité, réformes, développement, dynamique économique et culturelle… À moins d’un an de la présidentielle, le temps est venu de dresser le bilan du quinquennat et de prendre le pouls du pays, du sud au nord.
JEUNE AFRIQUE
N 0 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
OLIVIER AUBERT/PICTURETANK
MALI
Le Plus de Jeune Afrique
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Prélude François Soudan
Mamadou et Bineta
E
t si la somme des reproches 300 dollars en quatre ans. En matière que l’opposition malienne et d’accès au logement, d’amélioration une partie de la communauté du niveau de vie (le smig a doublé), internationale – la France en clé d’éducation, de santé, de renforcement de voûte – formulent à l’égard d’Ibrades capacités de distribution d’eau et him Boubacar Keïta se résumait en d’électricité, des efforts réels ont été un simple délit de… personnalité ? accomplis. Le fait que la population les considère comme allant de soi est Avec sa langue d’académicien, sa diction en rafale, sa culture classique compréhensible. Les nier, à l’instar de de sorbonnard, son patriotisme à l’opposition, l’est moins. fleur de peau et l’impression qu’il donne parfois de gouverner comme Car c’est sur ce front-là que se jouera M. Jourdain faisait de la prose, Ibrahim l’élection de 2018, sans doute plus que Boubacar Keïta agace ses adversaires sur celui de la situation sécuritaire. S’il n’y a plus aujourd’hui de guerre ni de politiques et perturbe les nostalgiques du Soudan français. confrontations directes entre les forces Président bien élu en 2013, l’hôte maliennes et les groupes armés, et si, du palais de Koulouba, qui s’apprête peu à peu, l’État recouvre sa souveà remettre en jeu son mandat en août 2018, Si les politiques avaient leur demande que l’on s’y bestiaire, IBK serait une tortue fasse : ce n’est pas à 72 ans que l’on troque à la carapace en Teflon. les habits d’un homme d’État jupitérien pour ceux d’un poliraineté sur une partie du Nord avec la ticien geek constamment entre deux mise en place d’autorités ou de collèges tweets. Si les politiques avaient leur intérimaires à Kidal, Gao, Tombouctou, Ménaka et Taoudeni, la paix restera bestiaire, IBK serait une tortue à la fragile et réversible tant que séviront carapace en Teflon. les katibas jihadistes et, surtout, tant que la politique de développement Et il en faut, de la résilience, pour relancée depuis deux ans n’aura pas diriger ce Mali qu’il dit avoir « chevillé produit d’effets palpables. Pour les au corps ». Dans un fascicule en forme de bilan diffusé début septembre et 18 millions de Maliens, dont l’espérance intitulé « IBK – An IV », les services du de vie moyenne ne dépasse pas 60 ans, palais centenaire font leurs comptes. ce qui compte en effet relève encore En quatre ans, 250 milliards de F CFA de la satisfaction des besoins vitaux. (381 millions d’euros) ont été mobiSi Ibrahim Boubacar Keïta sait qu’il lisés (ou sont en train de l’être) pour lui sera très difficile de rééditer son le Nord oublié, 320 milliards pour score « miraculeux » de 2013 (77,6 % l’armée sinistrée, 136 milliards pour des voix au second tour), il sait aussi l’urgence sociale. que sa réélection est de l’ordre du Troisième économie de la zone probable, pour peu que le panier de Bineta et le portefeuille de Mamadou Uemoa, porté par un taux de croissance sonnent de moins en moins creux. Au honorable de 5 % (surtout si on le comMali comme ailleurs, le temps où les pare à celui, négatif, de 2012), le Mali a vu ses recettes budgétaires croître de chefs pouvaient se contenter d’être des marchands d’espérance est révolu, et 51 % et son PIB par habitant (parité pouvoir d’achat) augmenter de près de IBK est le premier à en être conscient. JEUNE AFRIQUE
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ENJEUX La tentation du second mandat
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POLITIQUE & SÉCURITÉ Tiébilé, Oumar, Soumaïla et les autres p. 66 « Dans notre vaste pays, la centralisation frise l’irrationnel », le point de vue de Moussa Mara, p. 69 président de Yéléma Premiers pas d’une patrouille mixte : reportage à In Delimane p. 72 ÉCONOMIE Excès de prudence
p. 76
Interview de Mamadou Sinsy Coulibaly, président p. 78 du patronat Des ressources avant tout humaines, c’est la stratégie de SAER p. 80 Une histoire qui ne manque pas de sel
p. 81
« Oui, on peut faire des affaires au Mali ! », un entretien avec Konimba Sidibé, ministre de la Promotion des investissements p. 83 SOCIÉTÉ & TENDANCE Cheick Diallo : ces objets qui ont une âme p. 86 Au nouveau BlonBa, le spectacle recommence ! p. 88 « Des lumières contre l’obscurantisme », par Adama Traoré, dramaturge p. 92
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Le Plus de Jeune Afrique
ENJEUX
La tentation du second
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FRANÇOIS-XAVIER FRELAND, et CÉCILE MANCIAUX
«
envoyé spécial,
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n tant que croyant, je m’en remettrai à Allah. Je ne suis que l’humble instrument de sa volonté », déclarait enmaileprésidentIbrahim Boubacar Keïta (IBK) en parlant de son éventuelle candidature à la présidentielle de 2018. Quelques semaines auparavant, le 8 avril, conscient de l’érosion de sa popularité alors que, dans le centre de Bamako, se succédaient les manifestations – contre son « immobilisme », contre l’insécurité, contre la « mal-gouvernance » et la « corruption », contre la révision constitutionnelle –, IBK avait nommé un nouveau Premier ministre à la tête d’un « gouvernement de combat ». Fidèle d’entre les fidèles, membre fondateur du Rassemblement pour le Mali (RPM) et ancien « dircom » de campagne du candidat IBK en 2013, le discret Abdoulaye Idrissa Maïga a donc été chargé de prendre le taureau par les cornes, avec pour principal objectif de faire en sorte que l’accord d’Alger, indispensable préalable à une paix durable et au retour des investisseurs, soit enfin respecté sur tout le territoire, deux ans après sa signature.
Le chef de l’État malien et son Premier ministre, Abdoulaye Idrissa Maïga, le 1er septembre, à Bamako.
Sécurité, autorité de l’État, réformes, développement… Ces derniers mois, il a pu mesurer les espoirs, les impatiences, mais aussi les motifs de contrariété de ses concitoyens. À moins d’un an de la présidentielle, c’est l’heure du bilan pour Ibrahim Boubacar Keïta.
mandat
EMMANUEL BAKARY DAOU
DÉSENCLAVEMENT. Pour couper l’herbe sous le
pied des terroristes, l’exécutif intensifie sa « politique de désenclavement », qui semble être la terminologie à la mode du côté du palais présidentiel. En juillet, par la voix de son ministre des Finances, Boubou Cissé, le gouvernement a lancé un vaste plan de développement des régions du Nord, d’un montant global de 2 000 milliards de F CFA (3 milliards d’euros), reposant sur trois axes stratégiques: l’amélioration de la gouvernance, l’accès aux services sociaux de base et le développement de l’économie et des infrastructures. Faute de garanties en matière de sécurité, ce programme peine cependant à trouver des financements. Parallèlement, l’État a signé avec la Banque mondiale un accord d’un montant de 40,6 milliards de F CFA pour financer le Projet d’amélioration de l’accessibilité en milieu rural (Paar). Ce dernier, dont l’objectif est de relancer l’activité économique, doit bénéficier à 650 000 personnes vivant aux abords d’axes routiers à réhabiliter, en commençant par les régions de Koulikouro (autour de Bamako) et de Sikasso (Sud). Le Paar prévoit la remise en état de 1700 km de pistes rurales, l’aménagement de périmètres maraîchers contribuant à l’autonomisation des femmes, ainsi que la construction d’écoles, de centres de santé et de hangars pour les marchés agricoles. Un engagement pour le développement social et économique qui prouve qu’IBK entend l’exaspération de la rue. Mais n’est-ce pas un peu tard, quatre ans après l’arrivée à Koulouba de celui qui promettait un « Mali uni » ? N O 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
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Le Plus de JA Mali
Mauvais temps pour les locales Après quatre reports depuis 2013, les élections municipales ont été organisées le 20 novembre 2016, mais elles n’ont pu se tenir dans 59 localités en raison de l’insécurité dans le nord et le centre du pays. Prévues en juillet 2017, les communales partielles (couplées avec les élections des conseillers de cercles) et les élections régionales ont elles aussi été reportées.
Dans le Nord, les autorités intérimaires commencent à peine à prendre leurs fonctions, et les patrouilles mixtes n’ont pas dépassé le stade expérimental (lire pp. 72-73). Et le discours religieux radical trouve de nouveau un écho favorable, principalement dans les zones rurales, qui s’estiment abandonnées par l’État. Pis, pour recréer le lien avec le Nord, Bamako a fait un pari risqué en s’appuyant sur une médiation religieuse. Fin juillet, Mahmoud Dicko, le très populaire et très controversé président du Haut Conseil islamique du Mali, était en visite à Kidal dans le but de négocier « discrètement » le retour de l’administration malienne sur place. Piloté par la présidence, il a rencontré les chefs de tribu, des notables, des leaders religieux, des cadres et des responsables militaires de la région. La démarche a été considérée par certains comme une preuve de pragmatisme de la part de l’exécutif, dans un pays à 90 % musulman, mais d’autres y ont vu « une dangereuse dérive religieuse » du pouvoir. « Nous déplorons le complot entre le politique et le religieux », dénonçait ainsi Mohamed Youssouf Bathily, alias Ras Bath (lire p. 66), chroniqueur de la radio Maliba FM, qui fut le porte-étendard d’An tè a banna ! Touche pas à ma Constitution !, plateforme constituée de partis d’opposition et de mouvements de la société civile ayant multiplié les actions contre le projet de révision. Même si, le 21 juin, le gouvernement a décidé de reporter le référendum constitutionnel initialement prévu le 9 juillet, il a été sous le feu des critiques durant deux mois. Jusqu’à ce que, le 18 août, à l’issued’unemédiationconduitenotammentparles chefs religieux et traditionnels, IBK annonce dans
POINTS DE SUSPENSION D’UNE RÉVISION
L
e projet de révision constitutionnelle, tel qu’il avait été adopté par l’Assemblée nationale le 3 juin, proclamait dans son préambule « le principe intangible de l’intégrité du territoire national et la souveraineté nationale », précision qui ne figure pas dans la Constitution de février 1992.Tout en consacrant ainsi la cohésion du pays face aux tentations séparatistes, le texte accordait cependant des prérogatives aux collectivités territoriales (communes, cercles, régions, districts) pour qu’elles soient librement administrées par des conseils d’élus (article 136). Il prévoyait par ailleurs la création d’un Sénat (art. 59) et, pour mettre fin au nomadisme des élus, que « tout député qui démissionne de N O 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
son parti en cours de législature [soit] automatiquement déchu de son mandat » (art. 56) – un dispositif qui s’appliquerait aux futurs sénateurs et aux élus locaux. Mais c’est surtout le renforcement des pouvoirs du chef de l’État qui a exacerbé les griefs. Le projet lui permettait entre autres de nommer un tiers des sénateurs (deux tiers étant élus au suffrage universel indirect – art. 61) et le président de la Cour constitutionnelle (jusqu’à présent élu parmi ses membres), ou encore de faire procéder à une révision de la Constitution directement par voie parlementaire, sauf dans le cas d’une modification de la durée ou du nombre des mandats du président de la République ou des parlementaires. F.-X.F.
un message diffusé par la radio-télévision nationale qu’il décidait, « en considération de l’intérêt supérieur de la nation et de la préservation d’un climat social apaisé […], en toute responsabilité, de surseoir à l’organisation d’un référendum sur la révision constitutionnelle ». ACHARNEMENT. Le chef de l’État en avait pourtant
fait l’un des points forts du programme sur lequel les Maliens l’ont élu à plus de 77 % des suffrages exprimés, en août 2013. Il s’engageait alors à changer radicalement la vie politique du pays, à donner un meilleur ancrage à la démocratie, à renforcer les institutions et à garantir l’application de l’accord de paix dans le Nord, grâce notamment au rôle des collectivités territoriales (lire l’encadré). Mais l’opposition et le mouvement An tè a banna ! estimaient que le texte proposé favorisait au contraire « le début de l’autonomie au Nord », renforçait dangereusement les pouvoirs du président de la République et violait l’article 118 de l’actuelle Constitution, qui n’autorise pas de révision si le pays ne jouit pas de son entière intégrité territoriale. « Ibrahim Boubacar Keïta : président mal aimé ou mal compris? » interrogeait fin juillet Le Journal du Mali, relatant le malaise de nombreux Maliens et partenaires étrangers, désabusés autant par l’obstination du chef de l’État à présenter son projet que par l’acharnement des meneurs d’An tè a banna! à rejeter tout en bloc, qui voient les tensions s’exacerber. Pour beaucoup, cet épisode a par ailleurs souligné le manque de visibilité de l’action de l’exécutif, la maladresse de sa communication, voiresondéphasageparrapportauxpréoccupations de la population. Des reproches auxquels IBK n’a pas manqué de répondre dans son adresse à la nation du 18 août, où il a multiplié les formules montrant un président à l’écoute : « J’ai enregistré avec inquiétude la montée des radicalités. Ces alarmes, nous les avons partagées, vous et moi. Je vous ai entendus exprimer vos craintes de voir notre cher pays dériver vers des affrontements tragiques. » Plus question de référendum, donc. Un nouveau projet de révision sera préparé, mais à l’issue de consultations nationales inclusives, ce qui suppose qu’il ne sera ni soumis à l’examen des députés ni au vote des Maliens avant longtemps et probablement pas avant la présidentielle. En première ligne dans cette bataille, IBK y a perdu beaucoup de plumes, d’énergie et de crédibilité. Si, comme beaucoup le supposent, il envisage de renouveler son bail à Koulouba dans moins d’un an, pourrat‑il rebondir et regagner la confiance des Maliens ? Alors que les programmes engagés pour rétablir la sécurité et assurer le développement tardent à donner des résultats, sa capacité à mobiliser assez de moyens humains et financiers pour les accélérer sera déterminante. JEUNE AFRIQUE
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Le Plus de JA Mali POLITIQUE
Tiébilé, Oumar, Soumaïla et les autres
EMMANUEL BAKARY DAOU
La plupart des leaders de l’opposition s’étaient rassemblés autour de la plateforme Touche pas à ma Constitution ! Désormais tous concentrés sur 2018, ils préparent leurs partis respectifs, et leurs candidatures, à la présidentielle.
Soumaïla Cissé (à g.) et Tiébilé Dramé (à dr.), le 25 juillet, lors d’un meeting de la plateforme An tè a banna !
A
u Mali comme partout en Afrique de l’Ouest, ces derniers mois, l’opposition a donné l’impression de courir après la société civile et de tenter de la récupérer. Ainsi, en s’affichant en tête des cortèges contre la révision constitutionnelle (lire pp. 62-64), le président du Parti pour la renaissance nationale (Parena), Tiébilé Dramé, 62 ans, a voulu s’imposer comme l’homme qui dit non au président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) et à sa « dérive monarchique ». En accusant le chef de l’État de vouloir s’arroger tous les pouvoirs via une révision de la Constitution, l’ex-leader estudiantin, qui s’opposait farouchement au régime de Moussa Traoré à la fin des années 1970, a capitalisé sur son image de militant courageux et de démocrate irréprochable. Dans l’opinion, l’ancien chef de la diplomatie de la transition (1991-1992) conserve aussi un prestige d’homme d’État. Il a été par ailleurs l’un des premiers leaders politiques à s’opposer au putsch du 22 mars 2012. Un atout, dès que l’édifice républicain se met à trembler. Mais, demain, on pourrait N 0 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
Soumaïla Cissé, 67 ans, président de l’Union pour la République et la démocratie (URD) et principal adversaire d’IBK en 2013, donne quant à lui l’impression d’être « à la traîne de la caravane », selon Alexis Kalambry, directeur du quotidien malien Les Échos. « Il reste le vrai challenger d’IBK carilaunpartiorganiséetquesondiscours est rodé, mais les jeunes lui reprochent son manque de punch. Soumaïla donne l’impression d’être un peu débordé par la contestation », explique l’analyste. Quant à Moussa Mara (lire p. 69), l’exPremier ministre d’IBK, il garde sa réputation de « héros de Kidal », qui a su tenir tête aux combattants du MNLA en se rendant avec perte et fracas dans le fief de l’Azawad, en mai 2014. À 42 ans, l’expert-comptable a pris du recul, il écrit beaucoup, il consulte, sans participer à l’« IBK bashing ». Il donne l’image d’un penseur libre et critique, qui attend son heure.
PROVIDENCE. Et si le futur président aussi lui reprocher d’être l’héritier d’une malien sortait de la nouvelle génération classe politique qui a mené le pays au de tribuns incarnée par le chroniqueur bord du gouffre. Mohamed Youssouf Bathily, alias Ras Bath, 43 ans, qui fut l’une des icônes de Oumar Mariko, 58 ans, secrétaire général du parti Solidarité africaine pour la la plateforme anti-révision? Certains analystes, voyant en lui une sorte d’homme démocratie et l’indépendance (Sadi) et providentiel, l’ont même comparé à IBK. autre soutien de la plateforme Touche Avec le Collectif pour la défense de la pas à ma Constitution !, n’a jamais vu République (CDR), dont il est président, dans cette dernière qu’une alliance de circonstance. « Après, chacun choisira l’activisteseconsacredésormaisaucombat le candidat qu’il veut pour la présidentielle », confiait-il déjà fin Et si le futur président sortait juin. « Le problème de l’opposides rangs de la nouvelle tion est de savoir qui sera le chef en 2018, explique-t‑il. Au Sadi, génération de tribuns ? nous nous préparons à la présidentielle, et la force de ma candidature, pour l’alternance en 2018. Son objectif est c’est la transparence : je ne suis mouillé d’assurer une veille citoyenne et de donner dans aucun scandale de corruption, ce aux électeurs les moyens de « détecter les qui n’est pas le cas de tout le monde. » bons candidats, qui pourront changer le système », dit-il, pas de se présenter. Réputé pour son franc-parler et ses prises de position iconoclastes, le tonitruant « Sa candidature en 2018 est improbable, docteur de l’extrême gauche malienne tranche Alexis Kalambry. Il n’a pas d’appareil politique derrière lui. Et il sait que s’il se voit bien créer la surprise en 2018. sort de son rôle de leader de la société Son problème est de traîner comme un civile, il tombe. » boulet son soutien au putsch du capitaine Sanogo, en 2012. FRANÇOIS-XAVIER FRELAND JEUNE AFRIQUE
RÉPUBLIQUE
DU MALI BANQUE MALIENNE DE SOLIDARITÉ
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M. Babaly BA, Directeur général
D
ans le cadre de sa mission de lutte contre la pauvreté, la Banque Malienne de Solidarité (BMS S.A.), accorde une place privilégiée aux Micro, Petites et Moyennes Entreprises (MPME), considérées comme pourvoyeuses d’emplois et génératrices de revenus. Pour mieux mettre en œuvre sa politique d’accompagnement des MPME, la BMS a mis en place un service et une agence dédiés à ce segment de clientèle pour l’accueillir, l’orienter, le conseiller et étudier ses demandes de financement. Ces MPME évoluent dans divers domaines d’activité, notamment le commerce général, les BTP, les services, l’agriculture, l’élevage, la transformation, l’industrie, les transports, l’éducation et la santé.
COMMUNIQUÉ
Quelques partenaires techniques et financiers de la BMS dans le cadre du financement des MPME ● L’Agence Nationale Pour l’Emploi (ANPE) accompagne les porteurs de projets et assure leur mise en relation avec les banques partenaires. ● Le Fonds Auto Renouvelable pour l’Emploi (FARE) garantit les financements accordés aux promoteurs des MPME. ● L’Agence pour la Promotion de l’Emploi Jeune (APEJ) identifie les projets des jeunes promoteurs qui seront soumis à la BMS pour étude et financement, contre sa garantie et peut aussi cofinancer avec elle les projets des promoteurs. ● Le Projet de Développement des Compétences et Emploi des Jeunes (PROCEJ) ● Le Programme d’Appui à la Jeunesse Malienne (PAJM), financé par l’ambassade de France, s’adresse aux jeunes de 21 à 35 ans qui ont la capacité à présenter l’ébauche d’un projet de création ou de développement de micro-entreprise ● Le Programme d’Appui à la Croissance Économique et Promotion de l’Emploi Stimulé par le Secteur Privé (PACEPEP), financé par l’ambassade du Danemark, sous la gestion administrative du Conseil National du Patronat du Mali (CNPM), s’adresse aux PME ayant au moins deux ans d’existence et actives dans six filières (volailles, bétail/viande, maïs, lait local, fruits et légumes, artisanat).
Le Fonds de Développement Économique/Programme d’Appui à la Promotion de la Sécurité Alimentaire (FDE/ PAPSA), financé par la Banque Islamique de Développement, s’adresse aux MPME évoluant dans tous les secteurs liés à la sécurité alimentaire. ● Le Fonds de Garantie du Secteur Privé (FGSP) ● Le Fonds de Solidarité Africain (FSA) ●
En dehors de ces partenaires, la BMS lève des fonds auprès des institutions financières internationales (BOAD, BAD, BIDC, CRRH, etc.) pour faire face aux besoins de financements des PME et SFD (équipement et fonds de roulement). APPUIS FINANCIERS DE LA BMS ET DE SES PARTENAIRES EN FAVEUR DES MPME De 2015 à 2016, l’encours des appuis financiers de la BMS et de ses partenaires a presque doublé, passant d’un montant total de 34,4 milliards à 64,1 milliards de F CFA. Sur ce total, les financements directs de la BMS en faveur des MPME (équipements et fonds de roulement) sont passés de 31,8 milliards de F CFA en 2015 à 59,5 milliards en 2016, ceux réalisés par la BMS avec l’appui de ses partenaires, toujours dans ce cadre de l’accompagnement des MPME, ils sont passés de 2,6 milliards de F CFA en 2015 à 4,6 milliards en 2016. L’encours des financements en faveur des MPME est réparti entre les secteurs suivants : commerce général (22 % des financements accordés en 2016, pour un volume de 14,1 milliards de F CFA en 2016), BTP (18 %, pour un volume de 11,5 milliards), transport (17 %, pour un volume de 10,9 milliards), agriculture (14 %, pour un volume de 8,7 milliards), ainsi que ceux de l’éducation, de l’élevage, de l’industrie, de la santé, de la communication et des services. Pour faciliter l’accès des MPME aux financements, la BMS a collaboré avec des structures de garantie nationales et sous-régionales, dont le FGSP (pour un volume de prêts garantis à hauteur de 2,6 milliards de F CFA), le FARE (pour un volume de prêts garantis à hauteur de 0,5 milliard de F CFA) et le FSA (pour un volume de prêts garantis à hauteur de 3,6 milliards de F CFA). ■
Banque Malienne de Solidarité (BMS) Siège : Hamdallaye, ACI 2000 – BPE 1280 – Bamako, MALI
Tél. : (223) 20 29 54 16 / 12/ 08
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Le Plus de JA Mali
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Moussa Mara Président fondateur du parti Yéléma « Dans notre vaste pays, la centralisation frise l’irrationnel »
M
VINCENT FOURNIER/JA
inistre de la Politique de la ville en 2013, Premier ministre d’avril 2014 à janvier 2015, le président de Yéléma (« le changement », en bambara) continue de soutenir la majorité présidentielle « par fidélité à son mandat moral ». Ce qui ne l’empêche ni d’être critique ni d’avouer à demi-mot son intention de se porter candidat en 2018. Son objectif : dépasser les clivages traditionnels pour rassembler le Nord et le Sud, la société civile et l’appareil d’État, et les mobiliser autour d’un pôle centriste fort, qu’il compte bien incarner.
JEUNE AFRIQUE : Quel bilan faites-vous du mandat d’Ibrahim Boubacar Keïta ? MOUSSA MARA: Le président a respecté
son engagement de consacrer 5 % du budget de l’État à l’agriculture, ce qui fait du Mali un exemple pour l’Afrique. D’autres dossiers peinent à aboutir, notamment celui du déploiement de l’État dans le nord du pays. L’Administration est aujourd’hui moins présente sur le territoire qu’en 2012. Que pensez-vous du débat sur la révision constitutionnelle ?
Une réforme est indispensable. Notre Constitution a presque trente ans et l’accord de paix exige sa refonte. Mais ceux qui se sont emparés du dossier l’ont mal géré. En 2014, dans ma déclaration de politique générale, j’avais recommandé de procéder suffisamment tôt à cette révision pour que le débat ne soit pas pollué par les élections. Il aurait fallu lancer ce chantier en 2015. En politique, le timing compte beaucoup. Par ailleurs, dans le premier projet proposé [lire p. 64], on sentait une volonté inutile de présidentialiser un peu plus notre régime. Selon moi, on devrait plutôt proposer que le président ne puisse plus dissoudreleParlementetquecedernierait un droit de regard sur certaines nominations.Bref,enfiniravecleprésidentialisme. Serez-vous candidat en 2018 ?
Il est probable que Yéléma participe à l’élection. Mais je pense qu’aucun parti ne devrait se lancer seul dans une telle aventure. Il faut essayer de concourir à la JEUNE AFRIQUE
tête d’un mouvement où la société civile non partisane ait sa place. Si vous vous présentez, quels seront vos axes de campagne ?
Il y aura la décentralisation. Notre pays est vaste, très vaste, et la concentration y frise l’irrationnel. L’État doit épouser
d’avoir une analyse de la situation, j’affirme en connaissance de cause que l’armée a trop été mobilisée pour « faire le job » des services de sécurité et de la police. Aujourd’hui, je réfléchis à la possibilité de concentrer en un seul ministère les services de police et de l’armée, le temps de tout réorganiser.
C’est en 2015 qu’il aurait fallu lancer la révision constitutionnelle, pour que le débat ne soit pas pollué par les élections. la diversité territoriale et humaine. En tant qu’ex-élu municipal et en tant que conseil des collectivités locales dans le privé [il est expert-comptable], je sais ce que pèse la centralisation : 80 % des dépensespubliquessontdébourséesselon des plans entièrement pensés depuis la capitale. Or l’accord de paix est clair: 30 % des ressources publiques devraient être allouées aux collectivités locales – moi, j’irais même jusqu’à 40 %. La sécurité est une autre priorité, quand on voit la situation dans le nord et le centre dupays.Deparmonpassageàlaprimature et grâce au parti, dont les relais dans les institutions sécuritaires me permettent
Certains vous reprochent de mettre trop en avant votre « islamité »…
Je suis croyant et je ne dissimule pas ma foi. Et je ne partage pas l’avis de ceux qui pensent qu’il faudrait se cacher pour aller à la mosquée. Les valeurs religieuses peuvent être convoquées en politique, ce n’est pas un problème. Pourquoi l’État se priverait-il de tenir un discours religieux? Il doit au contraire avoir une réelle politique du culte et organiser la vie religieuse. En revanche, il ne faut pas laisser passer les manifestations négatives de la religiosité et, lorsqu’elles se présentent, reprendre la main sans attendre. Propos recueillis par JULES CRÉTOIS N 0 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
RÉPUBLIQUE
DU MALI
DIRECTION GÉNÉRALE DU BUDGET (DGB)
LE BUDGET-PROGRAMMES AU MALI : GOUVERNANCE, PERFORMANCE, RÉUSSITE.
L
a loi de finances 2018 du Mali marque le passage budget de moyen vers le budget en mode programme, au 1er janvier 2018. Ce basculement a été rendu possible grâce aux efforts de la Direction Générale du Budget, dont la mission est d’élaborer les éléments de la politique nationale en matière budgétaire et d’assurer la coordination et le contrôle de sa mise en œuvre. Bâtie autour d’une croissance économique de 5,3 % en 2018 et un taux d’inflation de 1,8 %, la loi de finances 2018 réaffirme la détermination du Gouvernement malien d’assurer la convergence du déficit budgétaire, qui est projeté à 3,3 % du PIB, vers la norme de 3 % du PIB, établie par l’UEMOA, à l’horizon 2019. Pour la réussite de ce basculement en un budget en mode programmes, le Ministère de l’Économie et des Finances a conduit un certain nombre de réforme afin de moderniser le cadre de gestion budgétaire au Mali conformément au cadre harmonisé de la gestion des finances publiques au sein des pays de l’UEMOA, qui a institué la budgétisation par programme. À cet effet, en plus de la Direction Générale du Budget, d’autres structures techniques ont été mises à contribution, notamment la Direction Nationale du Trésor de la Comptabilité Publique pour le volet comptable, la Direction Nationale du Contrôle Financier pour les aspects liés au contrôle, la Cellule de Réforme des Finances Publiques, la Direction Générale des Marchés Publics et des Délégations de Service Public. Ces différentes structures ont mené des réformes dans leur domaine respectifs concourant à l’achèvement de la réforme budgétaire. La réforme du budget-programmes va au-delà d’une réforme budgétaire, elle constitue une réforme administrative et de modernisation de l’administration publique. C’est pourquoi elle est l’un des piliers du nouveau programme de Développement Institutionnel du Mali.
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La réforme du budgetprogrammes constitue une réforme administrative et de modernisation de l’administration publique.
COMMUNIQUÉ
LA RÉFORME DU BUDGET-PROGRAMMES : LE COURONNEMENT D’UN LONG PROCESSUS L’effectivité du Budget de l’État en mode programmes au 1er janvier 2018 a nécessité la réalisation de plusieurs activités préparatoires portant sur : ① De nouveaux textes et manuels d’application Ils s’inscrivent dans le cadre d’une meilleure définition des attributions des acteurs dans la gestion en mode programmes. Pour ce faire, un décret portant organisation de la gestion budgétaire en mode budget-programmes a été adopté et l’actualisation du manuel d’exécution des dépenses en vue de son adaptation au système de gestion budgétaire en mode programmes, a été réalisée.
② L’adaptation des outils informatiques La prise en charge de la nouvelle nomenclature budgétaire et le développement de nouveaux modules sur la gestion des cadres de performance des programmes et de la pluri-annualité ont permis l’adaptation des outils informatiques à la nouvelle méthode de gestion budgétaire.
Une réforme qui va permettre de mieux évaluer les performances des programmes. À la suite à l’adaptation des outils et procédures budgétaires, le budget en mode de gestion axée sur le résultat qui aura un impact sur les administrations publiques à travers les adaptations des systèmes et processus de contrôle interne, externe et budgétaire, ainsi que de l’audit interne, en vue d’une meilleure évaluation des performances des programmes. Des actions visant à relire les cadres organiques des services techniques et de leurs démembrements au niveau régional et local, afin de mieux adapter les services au contexte du changement, ont été entrepris par le Ministère de l’Économie et des Finances, de m^me que la transformation de la Section des Comptes de la Cour Suprême en Cour des Comptes, qui permettra de mieux répondre aux exigences de recevabilité qu’impose le système de budgétisation en mode programmes au Mali. ■
③ L’adaptation et l’amélioration des canevas des documents budgétaires La stabilisation de la structure, l’amélioration continue de leur cadre de performance et le découpage des programmes en actions ont permis l’adaptation et l’amélioration des canevas des documents budgétaires afin d’améliorer leur lisibilité et de les rendre conforme aux normes fixées par l’UEMOA.
④ La sensibilisation et le renforcement des capacités des acteurs budgétaires
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Sidiki Traoré Directeur Général du Budget
Direction Générale du Budget BP 234 Quartier du Fleuve Bamako. MALI
Tél. : (223) 20 22 58 06 / (223) 20 22 52 87 Fax : (223) 20 22 08 33
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La mise en œuvre de cette nouvelle réforme a nécessité la mobilisation de l’ensemble des acteurs budgétaires, notamment les membres du Gouvernement, les parlementaires, les secrétaires généraux des départements ministériels, les responsables de Programme et les services d’appui aux Responsables de Programme, ainsi que les structures de contrôle.
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Le Plus de JA Mali SÉCURITÉ
Vers une armée unitaire? l’Azawad (MSA), groupe indépendantiste dissident du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Ici, il n’y a aucun représentant de la Plateforme (groupes armés progouvernementaux, lire encadré). Ansongo organise plusieurs fois par mois Visiblement pas très à l’aise, l’officier des patrouilles communes avec les Forces des Fama, le lieutenant Sidibé, et son armées maliennes (Fama) dans le cercle. Leur objectif : traquer les quelques cenhomologue français, le capitaine Nicolas, taines de jihadistes des groupes armés commandant de la base d’Ansongo, viennent à leur rencontre. À défaut terroristes (GAT) qui continuent de sévir d’être cordiale, la première poignée de dans la région et accompagner le retour des Fama sur le territoire. Et, dans leur main est polie. Le contact est établi. Le sillage, la souveraineté de l’État. petit groupe se dirige vers des puits que soldats maliens et français comptent VILLAGE FANTÔME. Le 21 juin, après remettre en état, et ensuite dans la salle deux jours d’un voyage éprouvant de classe d’une petite école désaffectée depuis Ansongo, une poignée de milipour rencontrer les représentants de la taires maliens suivis d’un long cortège localité. Là, officiers maliens et chefs militaires du MSA entament les négociations sur le retour À défaut d’être cordiale, des Fama dans le village. Un la première poignée de main embryon de patrouille mixte est est polie. Le contact est établi. en train de prendre corps. Après d’interminables discussions, le de blindés français font leur entrée dans groupe se met d’accord sur le trajet de la In Delimane. Déserté par l’administrapremière patrouille mixte prévue dès le lendemain matin. tion centrale depuis 2012, le bourg a des À la tombée de la nuit, la petite unité allures de village fantôme. Observant la des Fama installe son bivouac à côté progression de la vingtaine de véhicules de celui des hommes de Barkhane, à dans la « grand-rue » depuis leur pick-up, des hommes enturbannés et lourdement l’extérieur du village. Au loin, des phares armés les attendent. Ce sont les comde motos se rapprochent, peut-être des battants du Mouvement pour le salut de indicateurs des GAT, ou simplement des
Des patrouilles mixtes se forment enfin. Comme à In Delimane, où hommes des forces régulières et membres de la Coordination des mouvements de l’Azawad ont fait leurs premières rondes ensemble.
À
l’horizon, sur un pick-up, flotte un drapeau indépendantiste aux couleurs de l’Azawad. On approche d’In Delimane, une bourgade à majorité touarègue (daoussak) située à une centaine de kilomètres d’Ansongo (à l’ouest) et de Ménaka (à l’est), non loin des frontières avec le Niger et le Burkina Faso. Parmi les premières à être tombées aux mains du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) en 2012, la région de Gao est désormais le fief de l’État islamique dans le Grand Sahara, groupe jihadiste fondé en 2015 par Adnane Abou Walid al-Sahraoui après sa séparation d’avec Al-Mourabitoune. Elle vit aussi sous la menace du Groupe pour le soutien de l’islam et des musulmans, autre nébuleuse née en mars de la fusion de plusieurs organisations terroristes, dont Ansar Eddine, du Touareg Iyad Ag Ghali (Nord) et le Front de libération du Macina, la katiba du Peul Amadou Koufa (Centre). Dans le cadre de l’opération Barkhane, qui supplée les Casques bleus de la Minusma dans les zones à haut risque, un détachement opérationnel basé à
UNE COOPÉRATION QUI NE VA PAS DE SOI
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n application de l’accord pour la paix et la réconciliation, signé les 15 mai et 20 juin 2015 à Bamako à l’issue des négociations d’Alger, le Mécanisme opérationnel de coordination (MOC) a été créé en 2016 afin d’assurer le redéploiement progressif des forces de défense et de sécurité du Mali dans le nord du pays. Son objectif est de prévenir et d’éliminer les vides sécuritaires avant, pendant et après le processus de désarmement, démobilisation et réinsertion N 0 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
(DDR). Après plusieurs reports, le MOC a enfin pu commencer, en février, à former des patrouilles mixtes de sécurisation dans les villes, notamment Gao et Tombouctou, mais aussi dans les villages. Composées de militaires des Forces armées maliennes (Fama), de combattants de la Plateforme (alliance de huit groupes armés progouvernementaux formée en 2014 lors des négociations d’Alger) et de ceux de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), ces unités ont pour
vocation de préfigurer la future armée unitaire malienne. Leurs opérations sont menées de façon autonome, avec l’appui de Casques bleus de la Minusma et parfois, comme à In Delimane, de militaires français de Barkhane. À Kidal, où le gouvernement espérait qu’elles seraient mises en place avant fin juillet, ces patrouilles ont vu leur constitution rester bloquée par la persistance des affrontements entre membres de la CMA et de la Plateforme (notamment du
Groupe autodéfense touareg Imghad et alliés, Gatia). Ils ont signé un cessez-le-feu définitif à Bamako le 20 septembre. La veille, le gouverneur de la région avait pu rejoindre Kidal, marquant le retour de l’État et des Fama dans la ville, dont ils avaient été chassés en 2012. Un nouveau chronogramme pour l’organisation de patrouilles mixtes entre combattants des Fama, de la CMA et de la Plateforme devrait être arrêté dans les prochaines semaines. F.-X.F. JEUNE AFRIQUE
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FRANÇOIS-XAVIER FRELAND
Le 22 juin, première patrouille entre éléments du Mouvement pour le salut de l’Azawad (au premier plan) et de l’armée régulière (au second plan).
bergers que quelques puissants coups de projecteur des Français font fuir. LABYRINTHE. Le lendemain, à 8 heures, la
douzaine de soldats de l’armée malienne retrouve les membres du MSA. L’ambiance est cordiale et relativement décontractée. Les hommes se postent en rangs : quatre MSA devant, puis quatre Fama, et ainsi de suite, ébauche d’une armée enfin unie. Derrière eux, les soldats de Barkhane, en retrait mais prêts à intervenir en renfort en cas d’attaque surprise. Ils semblent confiants. Le village est désert. Les habitants ont préféré rester chez eux. La marche, prudente, dure une bonne heure. Tout est calme, trop calme. Les hommes traînent lentement dans le labyrinthe des ruelles vides en tournant nerveusement la tête de gauche à droite. À l’approche du marché, où sont assis quelques commerçants
arabes, les soldats des Fama semblent tendus. Située au cœur du village, la place semble propice à une embuscade. Finalement,rienàsignaler.Malgrél’accueil mitigéquiluiaétéréservéparleshabitants, la patrouille termine sa première ronde dans la bonne humeur. « Quand nous revenons dans les villages, les populations nous accueillent en général plutôt bien, car elles savent que nous apportons la sécurité et de quoi améliorer leur sort », explique le colonel Félix Diallo, commandant de la première région militaire à Gao. D’ailleurs, dès le lendemain, devant le dispensaire de fortune où officie un médecin français assisté d’un aide-soignant malien et de deux infirmières, les villageois sont là, surtout des femmes et des enfants. Alors que le convoi militaire francomalien s’apprête à repartir pour Ansongo, le lieutenant Sidibé arbore un large sourire. « Je suis très satisfait. Chacun de nous
veille au respect des accords d’Alger, lance-t‑il. Notre souhait, c’est de revenir à In Delimane sans Barkhane. J’ai pris contact avec le chef du MSA ici et nous allons essayer de continuer à travailler ensemble. » À côté de lui, ce dernier, grand chèche blanc autour du front, acquiesce: « Oui, nous n’avons aucun problème avec le Mali. Je suis malien. Nous voulons la paix et la sécurité. » Dans ce Nord si vaste, les efforts à accomplir par les uns et les autres restent immenses pour que la paix avance, à tout petits pas. Le 8 septembre, des jihadistes d’Adnane Abou Walid al-Sahraoui ont fait une incursion sur le marché d’In Delimane. Ils ont pillé les marchandises, incendié des boutiques, puis s’en sont allés, en enlevant un jeune du village qui avait tenté de s’opposer. FRANÇOIS-XAVIER FRELAND, envoyé spécial à In Delimane
RÉPUBLIQUE
DU MALI
CELLULE D’APPUI À LA RÉFORME DES FINANCES PUBLIQUES (CARFIP)
RÉFORME DE LA GESTION DES FINANCES PUBLIQUES (GFP) : UN ATOUT MAJEUR POUR LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE AU MALI
L
a gestion des finances publiques est au cœur de la bonne gouvernance et constitue un critère déterminant dans l’appréciation des efforts des gouvernants face aux légitimes aspirations des populations et autres acteurs bénéficiaires de l’action publique.
Le Ministère de l’Économie et des Finances, fidèle à sa mission de gestion de l’économie et des finances publiques, continue à œuvrer de façon vigoureuse à l’améliorationetàlaconsolidationdelastabilitéducadre macro-économique, ainsi qu’à l’approfondissement de l’ensemble des réformes du système de gestion des finances publiques, afin d’évoluer vers les normes internationales. Le Gouvernement de la République du Mali a adopté en septembre 2016, le Plan de Réforme de la Gestion des Finances Publiques au Mali (PREM) 2017- 2021, qui succède aux deux premières générations de Plan d’Actions Gouvernemental pour l’Amélioration et la Modernisation de la Gestion des Finances Publiques, PAGAM /GFP I (2006-2010) et PAGAM/GFP II (20112015). Le Plan de Réforme de la Gestion des Finances Publiques au Mali (PREM) 2017- 2021 s’inscrit dans la vision d’un cadre de gestion des finances publiques qui offre au Mali l’une des conditions préalables à l’émergence.
Ce cadre se traduit par des institutions, des ressources humaines, des pratiques de gestion et des systèmes d’information qui permettent au pays de s’aligner sur les normes et meilleures pratiques internationales, en particulier dans les différents domaines de la gestion budgétaire et du contrôle parlementaire et citoyen de l’action publique. Au cœur de cette vision se retrouvent trois concepts-clés : l’optimisation de l’espace budgétaire, dans lequel une montée en puissance des recettes fiscales intérieures doit jouer le rôle moteur et qui constitue le socle d’une accélération des politiques de développement dans le cadre du nouveau paradigme des Objectifs de Développement Durable (ODD), ●
COMMUNIQUÉ
● l’efficience et l’efficacité de la dépense publique,
à travers des logiques optimales d’allocation des ressources pour les actions prioritaires de développement,
● l’alignement avec bonnes pratiques internationales avec les engagements communautaires, en particulier le cadre harmonisé des finances publiques de l’UEMOA.
Aussi, l’effet ultime du PREM est-il de parvenir, à l’horizon 2021, à « optimiser l’espace budgétaire afin d’exécuter de manière transparente et efficace les dépenses publiques en vue d’atteinte les objectifs de croissance et de développement durable ».
La mise en œuvre du PREM soutiendra les efforts de mobilisation accrue des recettes fiscales en vue d’atteindre l’objectif communautaire de taux de pression fiscale de 20 % à l’horizon 2020, accompagnera le basculement vers la budgétisation par programmes à partir du 1er janvier 2018 et le renforcement de la gouvernance financière pour une gestion optimale des dépenses publiques. La stratégie de transfert des ressources aux Collectivités Territoriales, en vue d’atteinte de l’objectif de 30 % des ressources budgétaires en 2018, fait partie des priorités du PREM. Ainsi, par sa lisibilité réelle dans la dynamique de la croissance économique et les enjeux de sa poursuite sur la consolidation de ladite croissance, la réforme de la gestion des finances publiques constitue un atout de taille pour réussir le développement économique et social au Mali. ■
Madame Barry Aoua Sylla, Coordonnatrice de la Cellule d’Appui à la Réforme des Finances Publiques
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La Cellule d’Appui à la Réforme des Finances Publiques (CARFIP) assure l’animation et la coordination de la mise en œuvre des activités de réformes dans le domaine de la gestion des finances publiques au Mali.
Cellule d’Appui à la Réforme des Finances Publiques (CARFIP) BP 1862 Immeuble de l’Inspection des Finances, 3ème étage, Hamdallaye ACI 2000 - Bamako - MALI
Tél. : (223) 20 23 09 01 Fax : (223) 20 23 46 54
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Dans cette perspective, le Plan de Réforme de la Gestion des Finances Publiques au Mali s’articule autour de quatre pôles de changement, portant sur : la modernisation des administrations et des politiques fiscales ; la mise en œuvre du nouveau cadre de programmation, d’exécution et de suivi budgétaire ; la mutation vers un système de contrôle interne et externe aligné sur les bonnes pratiques internationales ; et l’établissement d’un système contractualisé et transparent de gouvernance financière locale.
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Le Plus de JA Mali DÉCRYPTAGE Alain Faujas
Excès de prudence
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l y a ceux qui trouvent des excuses à la faible efficapublics : la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) est en train de resserrer sa politique cité économique du gouvernement malien. « Il n’a monétaire, et les prochaines élections risquent de pas le contrôle de son territoire, dit l’un. Comment veut-on qu’il mette en œuvre le programme de pousser à relâcher la discipline sur les dépenses ordinaires au détriment des dépenses en capital. décentralisation nécessaire pour développer les Tout laisse à penser que la production d’or (qui régions jusqu’à présent délaissées ? » Un autre de représente 65 % à 70 % des exportations maliennes) renchérir : « En matière de macroéconomie, ils font sera en retrait en 2017 et que les investissements ce qu’il faut, et, avec une tendance de 5 % de croissance annuelle, ils ne se débrouillent pas si mal dans dans le secteur minier baisseront en 2018 à cause le climat dégradé actuel. » Certes, dans un rapport de l’insécurité mais aussi parce que la remontée des prix des matières premières pourrait rester modérée, publié en juillet, le Fonds monétaire international (FMI) délivre au Mali un satisfecit mesuré, affirmant selon la Banque mondiale. que le contrôle des dépenses et l’amélioration des Face à ces incertitudes, il faudrait choisir un cap et recettes publiques ont permis de maîtriser le déficit s’y tenir fermement. Or les autorités tergiversent. Le budgétaire. redressement de la Banque malienne de solidarité Il y a aussi ceux qui désespèrent. « Je ne vois (BMS) et celui de la société Énergie du Mali (EDM) pas ce qui va permettre à court terme à l’éconose font à trop petite allure. mie malienne de croître de façon solide, explique Laurent Bossard, directeur du Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest de l’OCDE. Elle demeure fondée sur l’exploitation de l’or et du coton, ce qui la met à la merci des fluctuations des cours mondiaux et du chaos sécuritaire, deux données que personne ne maîtrise. Il faudrait mener à On chipote pour la mise en place de la bien plus de grands projets, symboliques Le Mali reste « malgré tout » le déclaration de patrimoine des élus et des d’une volonté forte de développement, hauts fonctionnaires, pourtant indispenquitte à mettre le paquet pour en assurer sable pour lutter contre une corruption la sécurité. Pourquoi le chantier du bargalopante. rage de Taoussa, sur le Niger, n’a-t‑il pas On explique qu’il est très difficile d’évaencore démarré, alors qu’il est financé producteur d’or du par des fonds arabes, que le déplacement luer les biens traditionnels dont le propriécontinent, son taire n’est pas bien identifié. des populations locales est prévu et que On traîne les pieds pour fixer et appliquer ses avantages sont multiples (électricité, la formule de revalorisation automatique navigabilité, irrigation) ? Malheureusement il existe beaucoup de projets de ce genre des prix des carburants (ce qui permetproducteur trait d’en finir avec des subventions qui en panne ! » de coton et le grèvent le budget de l’État et profitent aux plus aisés), arguant qu’il faut prendre le La croissance semble se stabiliser à 5 % en 2017, après avoir été de 7 % en 2014, de temps d’expliquer la mesure pour éviter 6 % en 2015 et encore de 5,8 % en 2016, des manifestations populaires… pays de la zone sous l’effet d’une bonne récolte de coton et Ces prudences sont compréhensibles, Uemoa en matière d’investissements publics importants. Mais mais leur multiplication et la paralysie de cheptel elle est si fragile, malgré son taux convequ’elles entraînent trahissent le manque nable, que le FMI répète que le « soutien » de volonté de responsables qui semblent de la communauté internationale est « essentiel » surtout chercher à survivre aux aléas politiques et économiques qu’ils subissent. Cette apathie est peu pour la maintenir et éviter un creusement du déficit budgétaire. En effet, les vents ne sont pas favorables. enthousiasmante et risque de doucher les espoirs de Deux facteurs vont peser sur les investissements tous ceux qui croient dans les potentialités du Mali.
Face à toutes les incertitudes, il faudrait choisir un cap et s’y tenir fermement. Or les autorités tergiversent.
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JEUNE AFRIQUE
RÉPUBLIQUE
DU MALI DIRECTION GÉNÉRALE DES IMPÔTS (DGI)
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Sidima Dienta, Directeur général
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a Direction Générale des Impôts (DGI) élabore et met en œuvre la politique fiscale de l’État afin de contribuer au financement du développement du pays.
Première structure pourvoyeuse de recettes pour le budget de l’État du Mali, avec 55,12 % des recettes fiscales réalisées au titre de l’exercice budgétaire 2016, la DGI a déjà mobilisé 521,424 milliards de F CFA au 31 août 2017, soit un taux de réalisation de 66 % de l’objectif annuel de 2017. La DGI a entamé son processus de modernisation en 1998 à travers la mise en place du système d’information dénommé Système Intégré de Gestion des Taxes et Assimilées (SIGTAS). Cette acquisition a permis d’automatiser l’application des règles de gestion des impôts et les opérations d’assiette et de recouvrement. Soucieuse d’être constamment à l’écoute des usagers en général et des contribuables en particulier, elle a procédé, dès 2007, à la migration de son système vers la deuxième version de SIGTAS, afin de pouvoir étendre sa couverture aux fonctions de vérification et de recoupement, ainsi qu’à tous les impôts du système fiscal malien.
COMMUNIQUÉ
L’accroissement des besoins de mobilisation et les exigences d’assouplissement des procédures de facilitation pour les contribuables ont conduit à améliorer les performances de ses structures et d’offrir un meilleur service à travers la migration du système d’information vers la version SIGTAS 3.0. Cette version comprend de nouvelles fonctionnalités, corrige certaines insuffisances de la version précédente et possède l’avantage d’être développée sur une technologie Web qui facilitera son extension et son utilisation par le personnel. Ces nouvelles fonctionnalités permettent de promouvoir la dématérialisation des opérations fiscales, avec l’implémentation de services en ligne tels que la souscription des demandes d’immatriculation,
la déclaration, le paiement des impôts et la consultation des dossiers en ligne. Elles faciliteront également la mise en œuvre automatique du contrôle de gestion à travers un module destiné au suivi des tâches. Utilisé en temps réel, à travers un réseau interconnecté qui couvre l’ensemble des services des impôts situés dans le District de Bamako et les Centres des Impôts de Kayes, Kita, Kati, Koulikoro, Ségou et San, SIGTAS 3.0 gère environ 97 % des contribuables et offre une importante base de données sur les opérations d’assiette, de recouvrement, de contrôle et de contentieux des différents impôts et taxes. Son extension est en cours dans les 3e et 5e région pour les centres des Impôts de Sikasso, Bougouni, Koutiala et Mopti. L’un des objectifs de SIGTAS 3.0 est de contribuer à l’indépendance financière du pays, par la sécurisation et la cohérence des données, en s’appuyant sur des ressources humaines et financières bien gérées. Le nouveau système doit permettre l’élargissement de l’assiette fiscale, à travers une gestion plus rigoureuse de différentes fonctions, à savoir l’identification du contribuable et de la matière imposable, le recouvrement de l’impôt et la fiabilité des données. Cela permettra au personnel de la DGI et au ministère de tutelle d’améliorer la performance fiscale. Outre l’augmentation des performances du système, la mise à disposition de services plus adaptés et plus modernes aux usagers, la sécurisation et la fiabilisation des données, l’une des innovations marquantes du nouveau système est la gestion automatisée des exonérations. En effet, SIGTAS 3.0 comprend un module dont la mise en service effective au 31 décembre 2017 permettra de gérer automatiquement les formalités administratives des bénéficiaires d’avantages fiscaux et de mieux évaluer leur mise en œuvre. Enfin, l’ensemble de ces fonctionnalités, combinées à la mise en œuvre des réformes structurelles en cours, les activités de communication issues du plan stratégique de la DGI et le renforcement des contrôles internes seront de nature à contribuer à la réalisation des objectifs annuels tant en 2017 qu’en 2018. ■
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LES ACQUIS DE LA MODERNISATION SE CONSOLIDENT
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Le Plus de JA Mali ENTREPRENEURIAT
Mamadou Sinsy Coulibaly « En 2025, ilfera bon vivre dans notre pays, sinon c’est que nous aurons disparu » Croissance honorable, nouveaux chantiers, activités des opérateurs locaux en hausse : le patron des patrons maliens est optimiste. Ce qui ne l’empêche pas de remettre quelques pendules à l’heure.
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résident du Conseil national du patronat du Mali (CNPM) depuis octobre 2015, Mamadou Sinsy Coulibaly a l’esprit d’initiative et le goût de l’innovation chevillés au corps. À 61 ans, le PDG fondateur du groupe Kledu est célèbre pour son parcours de self-made-man, son ultralibéralisme, son franc-parler et sa constance, jusque dans le look chic et décontracté dont il ne se départ presque jamais : casquette de base-ball, veste sur chemise ou polo, sans cravate. Né au Sénégal, Mamadou Sinsy Coulibaly a grandi au Mali et passé son bac au lycée Prosper-Kamara de Bamako. En France, il étudie la mécanique, via un cursus en sciences et structure de la matière à la faculté de Jussieu, à Paris, puis à l’École supérieure du commerce des réseaux automobiles (Escra), au Mans. Il s’envole ensuite aux ÉtatsUnis, où il crée une société de pompes funèbres spécialisée dans les funérailles à l’africaine, qu’il revend pour investir dans une compagnie aérienne reliant Haïti à Miami. Rentré au Mali au début des années 1980, il tisse un réseau de relations d’affaires en travaillant notamment dans le commerce de véhicules d’occasion, crée une société de vente de matériel vidéo et, à la faveur de l’ouverture démocratique, en 1991, lance l’un des premiers médias privés du pays, Radio Kledu. Son groupe emploie aujourd’hui environ 2 000 personnes au sein d’une constellation de sociétés actives dans les médias et la communication, avec Radio Kledu, K2FM, le mensuel gratuit Le Dourouni ou encore Malivision, mais aussi l’imprimerie et les technologies numériques (ImprimColor), le tourisme (Tam voyages), la distribution et les services (Tam courrier, Kledu pressing, SPI bureautique…), l’agroalimentaire, N 0 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
la restauration, etc. À Bamako, tout le monde connaît le tycoon et la magnifique villa à l’italienne qu’il a fait construire au milieu d’une palmeraie, à l’entrée de la Cité du Niger. Mais c’est dans son immense bureau d’ACI 2000 que l’influent patron des patrons maliens a reçu Jeune Afrique, avant d’embarquer dans sa Classe S Berline noire qui le conduira chez le ministre des Finances « pour une audience privée ». JEUNE AFRIQUE : Quelles missions vous êtes-vous fixées à la tête du patronat ? MAMADOU SINSY COULIBALY : Mon
rôle est de booster le secteur privé, de faire connaître le monde de l’entreprise et de sensibiliser l’État pour qu’il travaille avec nous. Pour ça, on doit se dire la vérité. Par exemple en ce qui concerne
que ça va marcher. L’État investit dans les routes et autres infrastructures, partout des chantiers fleurissent : ça, c’est du concret. On voit aussi que l’économie malienne prend son envol dans tous les secteurs, notamment grâce à la présence étrangère militaire et humanitaire. En fait, notre pays profite de l’économie militaire. Les soldats étrangers sont des consommateurs et, dans une certaine mesure, remplacent les touristes d’hier. L’immobilier décolle, dans certains quartiers les restaurants marchent mieux qu’avant, etc. On ne peut pas se plaindre. Cela profite-t‑il vraiment au Mali, de façon pérenne ?
Bien sûr ! D’abord, il y a une forte redistribution locale et des créations d’emplois, y compris dans les bases militaires. Ensuite, cet argent est reversé dans les caisses de l’État à travers les taxes et les impôts. Enfin, ce sont des entreprises maliennes qui sont désormais chargées
On demande au politique d’assurer la sécurité. Nous, on s’occupe du reste. l’exigence d’une culture du travail et de la compétitivité, ou la nécessité de mettre en place un système de taxes équitable, puisque c’est le privé qui donne tout et le public qui dépense. Pour moi, c’est un défi permanent. Que pensez-vous de la situation économique du pays ?
Sur un plan macroéconomique, malgré la crise sécuritaire, on peut dire que cela va à peu près. Le taux de croissance s’est élevé à plus de 5 % en 2016, des projets se montent… Aujourd’hui, ce que l’on demande au politique, c’est d’assurer la sécurité. Nous, on s’occupe du reste. Je suis très optimiste, car dans le pays on prend enfin conscience de l’importance du secteur privé, et nous, les entrepreneurs, commençons à rêver. On sait
de la plupart des travaux et services. La sous-traitance s’est développée à cause de l’insécurité, car nombre d’entreprises étrangères ne veulent pas prendre le risque de travailler au Mali. Cela a provoqué un déclic: nos entrepreneurs ont pris conscience qu’il faut croire en ce pays et que, même dans un climat d’insécurité, leurs sociétés peuvent gagner de l’argent. Par ailleurs, la diaspora malienne est très active, en France et dans le monde. L’argent qu’elle envoie est plus important que l’aide technique apportée au Mali. C’est une vraie force ! Quelles sont les voies à explorer pour accélérer le développement ?
Je suis persuadé que, très prochainement, les entreprises maliennes vont revenir travailler dans le Nord. JEUNE AFRIQUE
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EMMANUEL BAKARY DAOU POUR JA
Dans ses locaux du quartier ACI 2000, le 30 août.
Personnellement, je suis prêt à aller m’installer à Tombouctou ou à Gao. Il y a de l’argent à y gagner dans la construction, l’énergie, l’eau, etc. Depuis les indépendances, tout s’est dégradé au Mali. On a des problèmes partout, y compris au palais présidentiel de Koulouba. Il faut tout reconstruire ! Une telle tâche ne peut être assurée par une seule société, et les financements ne sont pas tout. Il faut des entreprises spécialisées, il faut des compétences. Sur ce point, les étrangers peuvent nous aider.
Comment améliorer le climat des affaires, notamment en ce qui concerne la corruption ?
C’est la plaie de notre société ! Or on peut la stopper par la numérisation de l’administration publique, qui supprime le contact entre usagers et agents de l’État. Si j’ai une carte ou que je fais des virements, l’argent va directement dans les caisses de l’État, pas ailleurs. Nous avons aussi un problème de compétitivité. L’emploi est cher, les charges sont lourdes, notre administration n’est
pas concurrentielle… En revanche, Bamako est à équidistance de toutes les capitales d’Afrique de l’Ouest. Nous devons miser sur cet atout et investir dans la logistique et la sous-traitance. Le pays peut retrouver la voie de l’émergence, et cela très rapidement. Dès 2025, il fera bon vivre au Mali, ou alors c’est qu’on aura disparu à cause du jihadisme. Soit on lutte, et l’économie redémarre, soit on crève. C’est quitte ou double. Propos recueillis à Bamako par FRANÇOIS-XAVIER FRELAND
Le Plus de JA Mali
Des ressources avant tout humaines gouverneur de Koulikoro, ensuite comme contrôleur de gestion, avant de devenir directeur de l’Office des relais touristiques de l’intérieur (Orti) puis de l’hôtel Sofitel-Amitié, à Bamako. C’est là qu’un client canadien, cadre chez SNC-Lavalin, lui dit : « Vous êtes fait pour travailler dans le privé ! »
À la tête d’une trentaine de sociétés, Diadié Sankaré, le PDG de SAER, a l’art de repérer les créneaux porteurs et de réussir dans les affaires. En toute simplicité.
FRANÇOIS-XAVIER FRELAND POUR JEUNE AFRIQUE
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Ses entreprises ont réalisé un chiffre d’affaires de 30,5 millions d’euros en 2016.
Q
uandilparledeNiafunké,Diadié Sankaré aime à raconter ses souvenirs d’enfance et ceux du Mali paisible qu’il a partagés notamment avec Ali Farka Touré, le célèbre bluesman (décédé en 2006), natif de cette même petite ville posée sur le fleuve Niger, à 250 km au sud de Tombouctou. « Je ramenais régulièrement Ali Farka à Niafunké. On s’arrêtait sur le bord des routes pour faire des pauses et les gens le reconnaissaient, alors il sortait sa guitare et acceptait de chanter avec eux. » Une simplicité que ce grand patron sportif, amateur de promenades sur le fleuve et féru de littérature – en particulier de philosophies grecque et chinoise –, a toujours conservée. Et c’est sûrement là que réside sa vraie richesse. À 58 ans, le PDG de la Société africaine d’études et de réalisations (SAER) reste accessible et discret, sans chauffeur ni secrétaire. Il gère son groupe comme une PME familiale, sans jamais se mettre en avant. À tel point que, si les quelque trente d’entreprises qu’il a créées ont réalisé en
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2016 un chiffre d’affaires global d’environ 20 milliards de F CFA (30,5 millions d’euros), il n’a toujours pas donné de nom à son groupe : « Je le cherche encore. Par défaut, ce pourrait être “DS”, mes initiales, mais je n’aime pas ça. Et je n’aimerais pas non plus que le groupe porte mon nom, ce n’estpasmonstyle.Jeveuxtrouverquelque chose de plus africain et de positif. » TRANSFORMÉ. Après une maîtrise en
PROACTIF. Dès 1993, Diadié Sankaré crée SAER, qui rapidement se spécialise dans la gestion des ressources humaines pour accompagner les sociétés minières et de BTP, notamment les filiales de groupes internationaux et des institutions nationales ou régionales. Recrutement, placement, formation, audit, gestion du personnel, de la paie, des conflits socioprofessionnels… SAER-Emploi, la société mère, est aujourd’hui le leader des services de gestion des ressources humaines en Afrique de l’Ouest francophone, où elle est présente dans sept pays, avec plus de 7 000 employés, dont 1 000 en Guinée. Elle réalise 30 % du chiffre d’affaires du groupe, qui, depuis 2007, a diversifié ses activités dans des domaines aussi divers que la finance, l’ingénierie, l’agro-industrie, en passant par les transports, avec notamment MaliCréances (recouvrement), DS Consulting (bureau d’études), IMS (infrastructures), DSBI (transit et import-export), Bio Mali (huile pour le secteur pharmaceutique) ou encore Seyam (purée de mangues). Diadié Sankaré est un entrepreneur proactif et optimiste. « Dans leur histoire, les Maliens ont su se relever de toutes les crises, alors je pense qu’on se remettra de celle-là. Il faut juste davantage dialoguer entre nous, assure-t‑il. Le transport, le commerce, on les a dans le sang. Nous voulons être les meilleurs et créer la différence, alors adaptons-nous ! » Conseil
économie et sciences de gestion à l’université Cheick-Anta-Diop de Dakar, un DESS en comptabilité au Conservatoire national « Le transport, le commerce, on des arts et métiers à Paris les a dans le sang. On veut être les puis un MBA en ingénierie meilleurs, alors adaptons-nous ! » comptable et financière et management des sociétés à l’université du Québec à Montréal, ce fils qu’il ne manque pas de suivre lui-même, comme l’illustre la société qu’il a créée de médecin est rentré au Mali transformé, en 2014, Securinord, spécialisée dans la avec l’envie de relever les défis, mais a su attendre son heure. sécurité pour la Minusma dans le nord De 1982 à 1992, il commence sa cardu pays. De quoi redonner aux routes rière comme fonctionnaire, d’abord leur sérénité. en tant que conseiller économique du FRANÇOIS-XAVIER FRELAND JEUNE AFRIQUE
Initiative
Une histoire qui ne manque pas de sel
À
L’occupation de la ville par les jihadistes, d’avril 2012 à février 2013, y met un coup d’arrêt. Les locaux sont réquisitionnés par les terroristes, l’unité de production est saccagée, les stocks volés ou détruits. Moktar BenWahab devra redoubler d’efforts pour Après le voir son entreprise rouvrir ses portes en 2015 sous le nom de départ des Sel de l’Azalaï. Entre-temps, terroristes, son partenaire français est Moktar Ben décédé et il s’associe à un ancien guide touristique que Wahab devra la crise sécuritaire a également lutter pour privé d’activité, Alpha Oumar rouvrir son Ascofaré. Grâce au soutien entreprise. financier du conseil régional, ils restaurent les locaux, rachètent des machines. L’ONG Swisscontact, qui soutient les projets de relance économique dans le nord du Mali, prend en charge la formation d’une douzaine d’ouvriers, pour la plupart ex-guides, ainsi que le financement de matériel et d’une moto-tricycle pour faciliter le transport des sacs (fabriqués en coton équitable malien). Ses activités relancées, la société a un peu diversifié son offre, amélioré la qualité de son sel, mais n’en produit qu’une centaine de kilos par mois. « Elle possède la seule usine de conditionnement du sel de Taoudéni encore existante au Mali, souligne Koumba Keïta, chargé de communication de Swisscontact, et sa production est encourageante. Mais à cause de la situation sécuritaire, elle peine encore à exporter… Sa réussite est liée au retour d’une paix durable à Tombouctou. » FRANÇOIS-XAVIER FRELAND JEUNE AFRIQUE
BAMAKO AU DÉPART DE
PARIS-ORLY SUD
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800 km au nord deTombouctou, où passaient jadis la route du sel et ses caravaniers,Taoudéni est réputée depuis le XVIe siècle pour ses mines de sel gemme, extrêmement rare (il contient de l’iode), fossilisé dans les bassins sédimentaires du désert. Et ce sel deTaoudéni revient d’une fort longue traversée du désert… C’est en 2008, lors d’une visite dans la région, qu’un voyageur français tombe sous le charme de ces mines abandonnées. Quelques mois et études de faisabilité plus tard, il s’associe avec un jeune entrepreneur deTombouctou, Moktar Ben Wahab, pour en relancer l’exploitation et créer les Comptoirs de l’Azalaï (en tamasheq, azalaï désigne la caravane qui assurait le transport et le commerce du sel). De 2008 à 2012, la société décolle et parvient à embaucher jusqu’à une dizaine de femmes dans son usine de Tombouctou pour laver, piler et ensacher le sel.
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Le Plus de JA Mali
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INTERVIEW
Konimba Sidibé Ministre de la Promotion des investissements et du secteur privé « Oui, on peut faire des affaires au Mali! »
L
e ministre de la Promotion des investissements et du secteur privé attend beaucoup du forum Invest in Mali 2017, qui se tiendra à Bamako les 7 et 8 décembre. Objectif : changer l’image du pays, montrer que le cadre et le climat des affaires sont propices aux capitaux étrangers, et persuader les investisseurs qu’il fait bon y travailler.
Le 7 septembre, au palais de Koulouba, à Bamako.
bien. Depuis plusieurs années, notre taux de croissance tourne autour de 5 %-6 %. L’inflation oscille entre 0,9 % et 1,5 % depuis trois ans. Notre déficit budgétaire se réduit. Notre filière coton a connu une récolte record en 2016. Comment évoluent les flux d’investissements étrangers vers le pays ?
Nous n’avons pas de chiffres très précis, mais de nombreux investisseurs étrangers viennent nous voir dans le but d’ouvrir de nouvelles entreprises. À l’exception de 2013, où l’élan s’est affaibli, le flux demeure vigoureux. C’est bon signe.
SÉBASTIEN RIEUSSEC
JEUNE AFRIQUE : Comment se porte l’économie malienne ? KONIMBA SIDIBÉ : Elle se porte très
Pour simplifier le travail de l’entrepreneur et lui éviter de courir en tous sens, nous avons mis en place un guichet unique qui lui permet de créer sa société en soixante-douze heures. C’est un progrès énorme. Nous sommes en train de dématérialiser les procédures, notamment pour le commerce transfrontalier. Et la réforme de notre code
On juge le pays à partir d’impressions qui n’ont rien à voir avec la réalité. Qu’attendez-vous du forum Invest in Mali ?
D’abord, nous voulons changer l’image de notre pays. On a tendance à le juger sur la base d’impressions qui n’ont absolument rien à voir avec la réalité. Par exemple, beaucoup de gens s’imaginent qu’il y a des gendarmes à tous les coins de rue à Bamako ! C’est faux. Ensuite, nous voulons faire connaître les potentialités du Mali, qui sont considérables. Enfin, nous voulons répondre par l’affirmative à la question « peut-on faire des affaires au Mali? ». Le dernier classement « Doing Business » de la Banque mondiale nous place au premier rang de la sous-région. Quelles réformes avez-vous menées à bien pour faciliter la vie des entreprises? JEUNE AFRIQUE
des investissements rendra notre pays encore plus attrayant. Quels sont les secteurs identifiés comme prioritaires ?
L’agriculture, parce que nous sommes le premier producteur de céréales de la région, le deuxième producteur de coton d’Afrique et que 2 millions d’hectares attendent d’être mis en valeur, ainsi que l’élevage, parce que nous disposons du premier cheptel d’Afrique de l’Ouest et qu’il tarde à être valorisé comme il le devrait. Ensuite, le secteur de l’énergie, car notre déficit en électricité atteindra 22 600 GWh d’ici à 2030 : qu’il s’agisse de futures centrales thermiques, solaires, hydroélectriques ou de biomasse, l’État s’est engagé à acheter toute leur
production. Enfin, quatrième priorité : le transport, un secteur vital dans notre pays, où les distances sont énormes. Où en est la lutte contre la corruption engagée par votre gouvernement ?
La corruption est un obstacle majeur au développement. C’est pourquoi nous avons créé des institutions pour la réprimer, comme l’Office central contre le crime organisé, dont les rapports sont publiés et montrent que la transparence s’améliore. Il faut que tous les hauts fonctionnaires fassent connaître leur patrimoine. Au bout de la chaîne, reste à assurer la punition des fautifs. Il y a encore beaucoup à faire en ce domaine, mais nous travaillons à réformer notre justice pour que les magistrats prennent les bonnes décisions. Comment apaiser les craintes des étrangers concernant l’insécurité ?
La majorité de notre territoire est peu affectée par les troubles. Notre effort sécuritaire est de plus en plus efficace et la mise en place du G5 Sahel le rendra encore plus pertinent. Par ailleurs, les accords de paix avancent à grands pas, avec la création de nouvelles régions et l’installation de nouvelles autorités locales. C’est de très bon augure. Propos recueillis par ALAIN FAUJAS N 0 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
Dans l’objectif d’accélérer la modernisation de l’administration malienne, les collectivités locales et les écoles, sous l’impulsion de l’actuel directeur général de l’AGETIC, M. Hamed Salif CAMARA, il a été adopté une politique volontariste et pragmatique qui consiste à concevoir des logiciels par nos développeurs et à les proposer à l’administration, les collectivités, les universités et les écoles. C’est dans cette perspective que, depuis bientôt deux ans, l’agence a conçu un certain nombre d’applications de sorte à dématérialiser les processus de métiers en leur sein. Pour justement développer ces applications, en interne, l’AGETIC met à contribution ses propres ingénieurs, mais fait également appel aux talents de jeunes informaticiens maliens. Aussi, pour permettre l’affirmation de jeunes talents au niveau national, l’AGETIC met désormais à disposition une salle d’incubation pour accompagner les porteurs d’idées novatrices et la création de start-up. L’AGETIC, en partenariat avec ONU-Femmes Mali pour le renforcement de capacités des femmes, a aménagé une salle de 33 ordinateurs connectés à Internet pour abriter les différentes activités de formation. Le projet comporte également un volet « conception de contenus applicatifs ». Pour la réussite du déploiement de ses applications dans les administrations, l’AGETIC a adopté une stratégie de mise en œuvre qui consiste à : 1. Développer les applications en tenant compte des besoins réels de l’admi nistration ; 2. Procéder aux tests applicatifs et de qualité en utilisant l’AGETIC comme structure pilote d’implémentation ; 3. Faire la promotion des applications en utilisant différents canaux de commu nication et de marketing, de sorte à créer la confiance numérique au niveau des acquéreurs ; 4. Procéder au déploiement et à la formation des utilisateurs. A ce jour, certaines applications sont déjà proposées à l’administration malienne :
PUBLI-REPORTAGE
INFORMATISER L’ADMINISTRATION MALIENNE www.agetic.gouv.ml
CORE est une l’application de gestion des Consultations Res-
treintes qui permet la gestion intégrale du processus de consultation restreinte des marchés d’une organisation. Elle vise la dématérialisation du processus en entier ; ce qui rend transparent et crédible la gestion des ressources publiques.
eGESCO
est l’application de gestion de courrier développée par L’AGETIC. C’est une application web servant au traitement des courriers arrivée et départ, qu’ils soient ordinaires ou confidentiels. E-gesco est un logiciel sécurisé, adaptable, facile à maintenir, évolutive et utilisable dans le réseau local.
Office Manager est une application web sécurisée composé plusieurs modules qui sont : • module gestion des ressources humaines permettant de gérer les informations relatives aux personnels ; • module gestion des ressources financières et matérielles qui gère : • module tableau d’affichage permettant d’économiser le tableau d’affichage physique; • module suivi des opérations sur l’application permettant de suivre les activités effectuées par un utilisateur ; • module gestion de programmes d’activités permet de faire le suivi des activités programmés et des éventuelles heures y afférentes.
AGIC
est le Système d’Archivage Electronique qui permet aux entreprises de contrôler la production, le stockage, la
gestion et la distribution de documents électroniques, en donnant plus d'efficaci-
té et en réutilisant l'information et en contrôlant le flux des documents. Il intègre tous les documents essentiels de gestion, de collaboration et une fonctionnalité de recherche avancée. Le système comprend également des outils d'administration pour définir les rôles des différents utilisateurs, le contrôle d'accès, le quota utilisateur, le niveau de sécurité des documents, les journaux détaillés d'activités.
Le Plus de JA Mali TENDANCE
Ces objets qui ont une âme Après avoir bâti sa renommée internationale depuis la France, le designer Cheick Diallo est revenu s’installer à Bamako en 2014. Au plus proche de ses rues et de ses artisans.
D
errière la célèbre place des Chasseurs, à Niarela, dans le centre de Bamako, Cheick Diallo vit dans une belle villa rongée par la pluie et la végétation, au bout d’une impasse. La grande maison ocre, dessinée dans les années 1960 par son père, Seydou Diallo, lui-même architecte, respire la chaleureuse atmosphère des villas des indépendances. Quand on entre chez le designer, on a un peu l’impression de remonter un pan de l’histoire du Mali : les premiers présidents venaient partager un café sur cette terrasse. Les arcs et les voûtes rappellent le style néosoudanais, les pylônes en béton supportant une partie du toit sont un clin d’œil à la modernité et à l’esprit du Corbusier. Fauteuils, tables, luminaires, jusqu’à la bibliothèque, où des livres vantent le minimalisme : dans les meubles et objets dessinés par Cheick Diallo, tout est un mélange de récup et de raffinement, épuré, impeccablement fini. Les bureaux et ateliers de Diallo Design sont installés sur les hauteurs de Bamako, mais le créateur aime travailler chez lui, sur un bout de table de la terrasse. Parfois, ses artisans – qui travaillent le fil de pêche, tordent le fer à béton, martèlent les couvercles de bouteille, frappent de vieux pneus – viennent œuvrer dans le jardin jouxtant la maison de leur patron. « Diallo Design, c’est un peu le chaos organisé, tout le monde met la main à la pâte », explique ce dernier. DIDACTIQUE. Cheick Diallo,
56 ans, a étudié en France, à l’École nationale d’architecture de Normandie (promotion 1991), à Rouen, puis à N 0 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
EMMANUEL BAKARY DAOU POUR JA
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l’École nationale supérieure de création industrielle, à Paris. Et c’est pour le design qu’il s’est passionné. Influencé par l’école anglo-saxonne, notamment par l’Américain Frank Gehry et par l’Israélien Ron Arad, mais aussi par les Français Philippe Starck et Patrick Jouin, il a un style à la fois bien à lui et indéfinissable : « Je suis une éponge. Mon design est une influence de beaucoup de choses. Je ne veux pas être enfermé dans une boîte. Et je ne cherche pas à faire du mali-malien, ma culture est métisse. » Membre du réseau Design Network Africa (DNA), qui compte quelques pointures telles que la Kényane Adele Dejak et le Burkinabè Hamed Ouattara, Cheick
Diallo avait été l’un des créateurs les plus remarqués lors de la retentissante exposition « Africa Remix », qui, de 2004 à 2007, a tourné du Kunstpalast de Düsseldorf à la Johannesburg Art Gallery, en passant par la Hayward Gallery de Londres, le Centre Pompidou, à Paris, le Mori Art Museum Tokyo et le Moderna Museet de Stockholm. Depuis, il est régulièrement invité aux biennales du design dans le monde entier – il sera prochainement à celle d’Amsterdam. Pendant des années, Cheick Diallo a gardé sa résidence principale à Rouen et passait une partie de l’année à Bamako, pour s’inspirer et travailler avec ses artisans. C’est l’un d’eux qui a donné sa forme définitive et son surnom au fauteuil Sansa, l’un des plus célèbres modèles imaginés par le créateur, en maillage de fer de couleur rouge ou bleue. En 2014, le designer a décidé de s’installer définitivement dans sa ville natale. « On me disait : “Tu es dingue! Tu es reconnu, qu’est-ce que tu vas faire au Mali ?” Et moi, je répondais : “Justement, il y a tout à faire chez moi, chez vous c’est saturé” », raconte-t-il. Désormais considéré comme LE designer malien, y compris par ses compa t r i o t e s, f o r mat e u r e t consultant en design pour de grandes institutions, Cheick Diallo a décoré plusieurs ambassades à Bamako, notamment celles de France et de Belgique. Son atelier réalise un chiffre d’affaires annuel d’environ 40 millions de F CFA (61 000 euros) et emploie une dizaine de personnes. Ses clients sont majoritairement sud-africains, sénégalais et ghanéens, mais il y a aussi des Américains, des Allemands, des Français… Ce dont Diallo rêve aujourd’hui, c’est d’ouvrir un « showroom didactique » à Bamako, « où tout le monde pourrait voir les meubles, les objets, en discuter et parler déco ». FRANÇOIS-XAVIER FRELAND
Dans sa villa du quartier de Niarela, le 31 août. JEUNE AFRIQUE
RÉPUBLIQUE
DU MALI DIRECTION GÉNÉRALE DES DOUANES (DGD) DIRECTION
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Aly Coulibaly Inspecteur Général Chevalier de l’Ordre National
COMMUNIQUÉ
L’atteinte des objectifs assignés à l’Administration douanière s’explique essentiellement par la mise en œuvre de réformes en profondeur allant de l’informatisation des procédures douanières, à la maitrise de l’assiette fiscale, en passant par la formation et par une gestion rationnelle des ressources humaines. Ces dernières années, à l’instar des autres services d’assiette, l’Administration des Douanes est confrontée à de nouveaux défis. Ceux-ci vont de la demande de plus en plus forte en recettes fiscales à la nécessaire adaptation de son outil de gestion aux exigences actuelles. La facilitation des procédures de dédouanement et la maîtrise de l’assiette nécessitent des réformes adaptées. Pour toutes ces raisons, l’Administration des Douanes du Mali travaille à apporter des réponses adéquates et durables afin d’atteindre de ses objectifs. La dématérialisation des procédures à travers le déploiement du système douanier automatisé SYDONIA-WORLD a permis, depuis plusieurs mois, d’améliorer la productivité des agents de l’Administration douanière. Très tôt, la Direction générale des Douanes avait compris que la numérisation de procédures était indispensable pour une gestion efficace, transparente et sécurisée des opérations de dédouanement. Du SYDONIA (Système douanier automatisé) en 1982, en évoluant vers le SYDONIA+, puis le SYDONIA++, le déploiement de SYDONIA-WORLD, depuis plusieurs mois, dans la quasi-totalité des bureaux des douanes a permis de dématérialiser près des 98 % des procédures et de se projeter sur des nouvelles applications informatiques à développer pour aboutir à une parfaite maîtrise de la gestion du personnel, des exonérations douanières et du contentieux douanier. Ce processus de digitalisation est soutenu par des réformes structurelles qui ont abouti à la création
de nouvelles structures répondant aux recommandations de l’Organisation Mondiale des Douanes (OMD), du Fonds Monétaire International (FMI) et de la Banque Mondiale. La création de la Direction de la Facilitation et du Partenariat avec les Entreprises, du Bureau du Contrôle après dédouanement, de la Direction du Contrôle du Transit, du Bureau des Études, Appui et Communication répondent à ces impératifs de performance, tant sur le plan des recettes fiscales que du soutien à l’économie nationale. La formation du personnel est hissée au premier rang des priorités à travers la formation continue des agents et les formations de perfectionnement des cadres. Pour la sécurité des biens et des personnes, une unité d’intervention spécialisée est créée cette année. Les efforts déployés par la Direction Générale des Douanes, sous l’impulsion du Ministre de l’Économie et des Finances, constituent une modeste contribution dans l’effort de développement du Mali post-crise. De 337,8 milliards en 2013, l’Administration des Douanes a réalisé 525,6 milliards de F CFA de recettes fiscales en 2016. Des résultats qui confirment la pertinence des réformes engagées. À la date du 31 décembre 2017, l’Administration douanière est appelée à mobiliser pour le compte du Trésor Public la somme de 585 milliards de F CFA, soit 59,4 milliards de plus que pour l’année 2016. D’autres réformes, notamment sur le plan sécuritaire, sont en cours. En effet, l’Administration des Douanes joue un rôle essentiel dans la sécurisation des personnes et de leurs biens du fait de son implantation à toutes les frontières et à l’intérieur du pays. Les saisies régulières des armes et munitions, de cigarettes de contrebande, de viande de volaille impropre à la consommation de produits stupéfiants motivent la vigilance accrue de la Direction Générale des Douanes et de ses services des Douanes qui œuvrent à se donner les moyens pour renforcer son maillage territorial. ■ DIRECTION GÉNÉRALE DES DOUANES Faladié, BP 269 Bamako MALI Tél. : (223) 20 20 23 57 Email : info@douanes.gov.ml
www.douanes.gouv.ml
DIFCOM / © D.R. - FOTOLIA
LES RÉFORMES NÉCESSAIRES À LA PERFORMANCE
Le Plus de JA Mali
Alioune Ifra Ndiaye, dans le patio du nouveau BlonBa. SOCIÉTÉ
Que le spectacle recommence! Le dramaturge Alioune Ifra Ndiaye rouvre le BlonBa, fermé depuis 2012. Nouveau quartier, nouveaux espaces: cette version « remastérisée » du complexe culturel promet de faire bouger Bamako.
I
l a été menacé de mort par des ultrareligieux mais a résisté aux intimidations et aux tentatives d’incendie. Pourtant, en 2012, à la suite de la crise politico-sécuritaire et de quelques soucis avec le fisc, Alioune Ifra Ndiaye a été contraint de fermer la salle qu’il avait inaugurée en 2007 dans le quartier Faladié. Si la compagnie BlonBa n’a jamais cessé de jouer depuis, l’un des phares de la vie culturelle à Bamako s’était éteint. « J’ai pensé jeter l’éponge définitivement et m’installer au Canada », confie-t‑il aujourd’hui. Mais le chef de troupe n’est pas du genre à baisser les bras, et il a fait le tour de ses proches et amis pour obtenir les fonds nécessaires à la reconstruction de son navire amiral. Il a vendu sa maison et ses terrains pour réinvestir plus de 350 000 euros dans les bâtiments et 150 000 euros en nouveau matériel, qui s’ajoute à celui qu’il avait déjà. Son titanesque chantier est presque terminé, et le complexe a été inauguré le N 0 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
organisée en trois parties. Le Nyanajé Club, la plus grande salle (500 places), essentiellement consacré à la musique et au cinéma, est également conçu pour se transformer en discothèque les weekends. En contournant quelques cases, dont l’une abrite le bureau rond (pas encore tout à fait ovale) du « président Alioune », on s’aperçoit que le bouillonnant metteur en fête est bien décidé à frapper fort pour que son centre culturel soit à la hauteur de la renommée artistique du pays.
30 septembre. Immense chapiteau aux quatre coins posés sur de petites cases, de loin, le nouveau BlonBa ressemble un peu au musée Sainte-Sophie d’Istanbul, minarets en moins. Alioune Ifra Ndiaye espère y attirer la jeunesse branchée « qui a envie de tourner définitivement la page de la crise ». Situé dans le quartier populaire et en plein développement de Au programme de sa future chaîne Baco-Djicoroni, pas de télévision, Wôklôny : talk-shows, très loin du Moffou (le studio de producséries et éducation civique. tion de Salif Keïta), le Dans la deuxième salle, Djinè So (« la complexe a tout pour devenir le nouveau temple du spectacle vivant et des nuits maison des génies »), d’une capacité bamakoises. de 300 personnes, il compte accueillir les meilleures compagnies de théâtre et de danse maliennes, continentales METTEUR EN FÊTE. Au centre de l’amphiet internationales. Enfin, un dernier théâtre « à l’acoustique parfaite », lunettes espace, plus petit, le Faridrome, sera à monture noire rectangulaire soulignant loué pour des fêtes et utilisé pour des son regard de promoteur rigoureux et de génial « créatif », le maître des lieux n’est concerts privés, afin de dénicher de futurs pas peu fier de présenter la structure, talents. « Je veux attirer les meilleurs JEUNE AFRIQUE
EMMANUEL BAKARY DAOU
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La troupe lors des répétitions de la comédie musicale Hôron, en septembre.
artistes et former les prochains “très grands”. BlonBa doit aussi être un lieu d’étude, de rencontre et de résidence pour musiciens, peintres, humoristes, comédiens, danseurs et DJ. Je compte d’ailleurs créer un festival de musique électronique », ajoute le féru de culture africaine-américaine. PARABOLE. Ses projets sont loin de
s’arrêter là. Car BlonBa est aussi une référence de l’audiovisuel malien. À côté du Nyanajé Club, Alioune Ifra Ndiaye est en train de faire construire les locaux de la chaîne de divertissement Wôklôny, dont
il prépare le lancement depuis dix ans et qui attend toujours sa licence. « Ici, il y aura bientôt tout le matériel nécessaire : caméras, tables de montage, etc. Je vais recruter des acteurs et nous allons faire des talk-shows, de la production de séries télévisées et du cinéma, explique-t‑il. Mais attention, il y aura toujours un axe éditorial : celui de l’éducation à la citoyenneté, car je suis exigeant sur la pédagogie et le rôle des médias dans l’avenir de ce pays. » Le combat qu’il mène depuis longtemps pour appeler à un plus grand civisme (lire encadré) a même redoublé
d’intensité. En août 2016, il a publié On ne naît pas Banyengo, on le devient (éditions La Sahélienne), un essai sur les dérives de l’incivisme de la société malienne. Protagoniste d’une fiction réalisée par Ifra Ndiaye en 2006, Banyengo, dont le nom est entré dans le vocabulaire courant, concentre tous les travers de l’incivisme et préfère provoquer la chute des gens compétents plutôt que de les voir réussir à sa place. Au-delà de la parabole, l’auteur invite les Maliens à réfléchir aux moyens de reconstruire une société citoyenne. Afin de toucher les plus jeunes, Alioune Ifra Ndiaye a adapté son essai en livret et, après les séances d’enregistrement en studio, suivies de six mois de répétition, sa troupe est fin prête pour jouer la comédie musicale Hôron (« loyal », « droit », « libéré », en bambara), dont Fatoumata Diawara a composé une partie des titres. Après la générale, qui a eu lieu le 30 septembre lors de la soirée d’inauguration du nouveau BlonBa, une cinquantaine de représentations, destinées principalement aux lycéens et aux universitaires et suivies de débats, doivent être programmées par BlonBa dans une vingtaine de villes du pays. Et pour sensibiliser encore plus ses compatriotes au b.a.-ba du civisme, Alioune Ifra Ndiaye envisage de créer très prochainement un mouvement politique – au sens premier et non partisan du terme : Wélé, qui signifie « l’appel » en bambara. FRANÇOIS-XAVIER FRELAND
À LA SCÈNE COMME À L’ÉCRAN
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uteur, metteur en scène, directeur de troupe, producteur, réalisateur… Alioune Ifra Ndiaye, 48 ans, est un créateur et un entrepreneur pluridisciplinaire et pugnace. Né dans un milieu privilégié – son père est colonel de police, sa mère, femme d’affaires –, il a toujours eu le sens de la discipline et de l’action. Après des études de cinéma et un master en ingénierie culturelle à l’université du Québec à Montréal et des stages en France, il rentre à Bamako en 1997 pour passer une N 0 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
maîtrise d’histoire. L’année suivante, avec le dramaturge français Jean-Louis SagotDuvauroux, il fonde la compagnie BlonBa, qui prend la relève du célèbre MandékaThéâtre. Dix-neuf ans plus tard, la troupe est toujours aussi active. Elle enchaîne les spectacles au Mali, en Afrique de l’Ouest et en région parisienne (où elle dispose d’une antenne). Son directeur continue de produire, d’écrire ou de coécrire la plupart de ses spectacles. Il utilise la satire sociale inspirée du kotèba, le
théâtre traditionnel mandingue, pour faire réfléchir la société sur ses travers, notamment la corruption, comme dans La Cité des profiteurs, qu’il a écrite et montée après le coup d’État de 2012, ou encore AlaTè Suno Go (« Dieu ne dort pas »), mis en scène par Jean-Louis Sagot-Duvauroux en 2013. Autre grand domaine d’activité de BlonBa, l’audiovisuel, avec la conception, la réalisation et la production de clips, documentaires, fictions et émissions de télévision.
Inventeur du concept de « télékotèba », Ifra Ndiaye s’est fait connaître des téléspectateurs de l’Office de radiodiffusion télévision du Mali (ORTM) avec Jouvence Show, Le Bal des costumes traditionnels, Fatobougou (« la cité des fous ») et À nous la citoyenneté, un rendez-vous hebdomadaire mêlant pédagogie et courts-métrages satiriques dans le cadre du Programme national d’éducation à la citoyenneté, dont il a piloté le volet audiovisuel de 2006 à 2010. F.-X.F. JEUNE AFRIQUE
COMMUNIQUÉ
RÉPUBLIQUE
DU MALI CELLULE D’APPUI À L’INFORMATISATION DES SERVICES FISCAUX ET FINANCIERS (CAISFF)
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Madame Tall Mariam Touré Coordinatrice de la CAISFF
LES FINANCES PUBLIQUES À L’ÈRE DU NUMÉRIQUE
que pour les ordonnateurs secondaires, le réseau intranet de l’administration, géré par l’Agence des Technologies de l’Information et de la Communication (AGETIC) a été mis à contribution afin d’assurer le transport de l’information.
C
La CAISFF a procédé à l’intégration des systèmes en réalisant des interfaces entres les différentes applications et au renforcement de capacité des services en termes d’équipements et de formations de haut niveau en informatique. Une solution de messagerie sécurisée avec Microsoft Exchange a été déployée afin de permettre à tous les agents du département de disposer d’une adresse électronique professionnelle. Ces réalisations ont été faites en étroite collaboration avec l’ensemble des services, avec un appui des Partenaires Techniques et Financiers.
réée en 1994, la Cellule d’Appui à l’Informatisation des Services Fiscaux et Financiers (CAISFF) a pour mission d’animer et de coordonner l’ensemble des activités se rapportant à l’informatisation des services du Ministère des Finances et plus particulièrement des administrations fiscales et financières. Elle vise à renforcer et à rationaliser l’utilisation de l’informatique au sein du département, en utilisant de façon judicieuse les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC), qui constituent aujourd’hui des vecteurs de changement réel dans la gestion des finances publiques.
Les expériences vécues en matière d’informatisation des services ont permis de démontrer l’intérêt que les TIC apportent dans la production de données financières fiables et la nécessité d’un Système d’Information automatisé intégré et fiable. La normalisation aux standards internationaux des procédures, méthodes et outils informatiques et la sécurisation du Système d’Information ont été, ces dernières années, au cœur des activités de la CAISFF. En 2015, celle-ci a procédé à l’élaboration de son premier schéma directeur informatique afin de mieux piloter le développement de l’informatique au sein du Ministère de l’Économie et des Finances. Ce document de référence évolutif, fruit d’un important travail collaboratif, repose sur une vision partagée de l’évolution de son système d’information.
Un système d’information fiable et sécurisé
Plusieurs applications informatiques ont été développées par la CAISFF afin de soutenir les services métiers du département. Afin d’assurer la communication entre ces différentes applications, l’interconnexion, par réseau informatique, des différents services du Ministère de l’Économie et des Finances a été mise en place à travers deux technologies : la Boucle Locale Radio (BLR) et la Fibre Optique.
Une gouvernance informatique alignée sur ses objectifs stratégiques du Ministère Le Ministère de l’Économie et des Finances a su générer de la valeur pour les investissements qu’il consacre au numérique à travers la CAISFF, qui veille de façon permanente à leur utilisation efficace et innovante. Dans cette perspective, la CAISFF continuera à mettre en œuvre les projets structurants du schéma directeur informatique quinquennal, afin de faciliter l’évolution de l’ensemble des services du département dans un cycle de maturité numérique acceptable aux niveaux interactifs, transactionnels et intégrés. Les axes de progrès réalisés par le département des finances, à travers la CAISFF, s’alignent sur la Vision « Mali Numérique 2020 » du gouvernement du Mali. Cette vision est construite autour d’une stratégie et d’ambitions réalistes et affirmées, visant à faire du numérique un vecteur du développement, une source de productivité et de valeur ajoutée pour les autres secteurs d’activités de l’économie, ainsi qu’un moteur de relance de l’économie malienne. ■
Cellule d’Appui à l’Informatisation des Services Fiscaux et Financiers (CAISFF) Ex-mess des officiers Marché Dibida - Bamako - MALI
Tél. : (223) 20 22 81 56 Fax : (223) 20 22 37 94
Email : caisff .mef@finances.gouv.ml Site : www.www.finances.gouv.ml
DIFCOM - PHOTOS : DR.
Cette interconnexion a été possible grâce au réseau local du Ministère de l’Économie et des Finances, dont le nœud central est situé dans sa salle technique. Pour l’ensemble des sites déconcentrés intervenant dans l’exécution des dépenses, ainsi
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Le Plus de JA Mali
TRIBUNE
Des lumières contre l’obscurantisme
ADAMA TRAORÉ Dramaturge, directeur de la compagnie Acte Sept et du Festival du théâtre des réalités
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epuis l’éclatement de la crise, début 2012, des artistes et des acteurs culturels de tous bords multiplient les initiatives et les créations pour valoriser la diversité et promouvoir la paix. Le renforcement du secteur culturel devrait être un axe majeur de toute stratégie de sortie de crise. Rempart essentiel contre l’intégrisme, la culture aura aussi un rôle majeur à jouer dans la construction d’une paix durable. La réconciliation exigera que toutes les communautés puissent s’exprimer librement et s’écouter mutuellement. Un secteur culturel dynamique peut faire beaucoup à cet égard. Il peut ouvrir les esprits, les aider à se comprendre et à se respecter. Il peut casser les cloisonnements, faire fondre les antagonismes. Lorsque des artistes se produisent un peu partout, l’occasion est donnée aux gens de les découvrir, de s’exprimer eux-mêmes, de se rencontrer autour d’une œuvre d’art ou d’activités culturelles. Cela peut tout changer en matière de cohabitation. Un secteur culturel actif sur toute l’étendue du territoire, ce sera aussi plus d’emplois. Ils procureront des revenus modestes, mais dans des localités très pauvres ce complément sera vital. Des expériences ont déjà été faites en ce sens. Elles ont été très enrichissantes et ont permis de distribuer un peu d’argent à 1 500 jeunes des cercles de Douentza, de Diré, de Niafunké, de Goundam et de Tombouctou via des activités artistiques.
Parmi les résultats que l’on souhaite obtenir, il en est cependant un auquel tous les acteurs du secteur donnent la priorité : le maillage du territoire en centres culturels. Ces espaces d’animation dynamiques pourraient jouer un rôle actif dans la mise en valeur des expressions culturelles locales, le soutien à la création, la diffusion des artistes, l’accès des populations à des biens culturels ou encore la promotion de pratiques artistiques en amateur. Des centres et des espaces qui viendront enfin « infrastructurer nos cultures », comme l’a formulé le Burkinabè Joseph Ki-Zerbo. Ils pourront servir de pépinières pour les jeunes talents et les jeunes entrepreneurs culturels. Un travail en réseau leur permettra d’élargir leur offre et de promouvoir le dialogue interculturel. C’est le sens du projet Sirabo – qui signifie « tracer la route », en bambara –, lancé par Acte Sept dans la région de Sikasso à la suite de concertations avec les acteurs cultu-
Un secteur culturel dynamique peut œuvrer à la réconciliation en cassant les cloisonnements.
Au sein de ma compagnie Acte Sept, j’ai pour ma part écrit et mis en scène une pièce de théâtre, Air Accord, afin de susciter le débat autour de l’accord d’Alger de 2015 pour la paix et la réconciliation au Mali. La tournée que nous avons organisée nous a permis de rencontrer des populations très diverses dans le nord comme dans le sud du pays pour débattre du vivreensemble. Le succès de cette expérience est la preuve de l’intérêt que la culture suscite et de son impact positif sur la société malienne. N 0 2961 • DU 8 AU 14 OCTOBRE 2017
rels et de la mise en place de bureaux dans les sept cercles de la région. Depuis octobre 2015, chaque mois, un groupe d’artistes – comédiens, danseurs, conteurs, musiciens, acrobates… – est programmé pour faire le tour des cercles avec son spectacle. Des artistes régionaux sont invités à se produire lors de chaque représentation, et 40 % des recettes reviennent au bureau local. L’évaluation de la première saison (octobre 2015-mai 2016) a permis d’engager un plaidoyer pour que la dimension culturelle soit prise en compte dans le programme de développement local. Les autorités maliennes et leurs partenaires ont montré leur détermination à chasser les ennemis déclarés de la vie culturelle. Puissentils se montrer aussi déterminés à soutenir les acteurs qui s’évertuent à l’animer et mettre à leur disposition, sur toute l’étendue du territoire, des outils de travail appropriés. JEUNE AFRIQUE
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