DÉCEMBRE 2021
GABON 2023, C’EST DÉJÀ DEMAIN
SPÉCIAL 30 PAGES
NO 3107 – DÉCEMBRE 2021
www.jeuneafrique.com
RD CONGO Tshisekedi compte ses forces MAROC-UE Le grand reset ?
Covid-19, crise économique, coups d’État… L’année qui s’achève n’incite guère à l’optimisme. Pourtant, de bonnes nouvelles émergent grâce à la détermination de quelques-uns, qui se battent pour une Afrique plus moderne, plus juste, innovante et fière d’elle-même. Portraits de ces pionniers qui, chacun dans son domaine, tirent le continent vers le haut.
Édition IA
3’:HIKLTD=[U\^U^:?n@b@k@h@a";
SPÉCIAL 20 PAGES
Algérie 420 DA • Allemagne 9 € • Belgique 9 € Canada 12,99 $CAN • Espagne 9 € • France 7,90 € Grèce 9 € • DOM 9 € • Italie 9 € • Maroc 50 MAD Mauritanie 200 MRU • Pays-Bas 9,20 € • Portugal 9 € RD Congo 10 USD • Suisse 15 CHF • Tunisie 8 TDN TOM 1 000 XPF • Zone CFA 4 800 F CFA • ISSN 1950-1285
UNE AUTRE IDÉE DE L’AFRIQUE
M 01936 - 3107 - F: 7,90 E - RD
JEUNE AFRIQUE N O 3 1 07
CÔTE D’IVOIRE Pourquoi Laurent Gbagbo redescend dans l’arène
SYLVAIN CHERKAOUI POUR JA
Dossier Emploi & formation
À l’Institut supérieur de management (ISM) de Dakar, Sénégal.
PALMARÈS
Les business schools en ordre de bataille Accélération de la digitalisation, réactivation des échanges et des partenariats internationaux, amélioration de l’accompagnement des étudiants, telles sont les trois grandes priorités post-Covid des écoles de commerce africaines classées par JA. CHRISTOPHE LE BEC
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ême si les étudiants sont revenus sur leur campus, tout n’est pas comme « avant » dans les meilleures business schools du continent, qui se sont adaptées tant bien que mal à ces temps pandémiques perturbés. En premier lieu, la digitalisation des études se poursuit. Certes, les cours ont à nouveau lieu dans tous les établissements francophones maghrébins et subsahariens classés par Jeune Afrique, mais leurs responsables doivent trouver le juste équilibre entre un enseignement classique in situ et des cours à distance, notamment dispensés depuis l’étranger. La majorité des établissements continue également à élaborer et à étoffer des bibliothèques universitaires accessibles via internet, ainsi que des espaces de travail de groupes mixtes permettant des collaborations fructueuses, à la fois sur place et en ligne, entre étudiants, professeurs et intervenants extérieurs. Grande priorité depuis la rentrée de septembre-octobre 2021 : la relance des échanges et des partenariats internationaux, cruciaux pour
former des cadres dirigeants africains dans un monde des affaires globalisé. Mis en veille lors de l’année scolaire 2020-2021, il n’est pas toujours aisé de les ranimer, notamment avec l’Asie et l’Amérique du Nord, qui continuent de fermer leurs frontières aux étudiants (lire p. 176).
Alternatives pédagogiques
Nombreux sont les étudiants qui ont dû rester dans leur pays d’origine au lieu de partir en échange universitaire, et le report d’une année de cette expérience clé a rarement été possible. Les business schools doivent gérer au mieux cette frustration en trouvant des alternatives pédagogiques, notamment sur le plan de la formation en langues étrangères. Enfin, l’accompagnement individuel des futurs diplômés, dans leurs études comme dans leurs choix d’orientation, est également devenu un point d’attention majeur des responsables des business schools, compte tenu des difficultés traversées et de l’isolement des jeunes confinés loin de leur entourage amical et familial. Finalement, si plusieurs établissements ont décidé de ne pas participer
à l’édition 2021-2022 de ce classement des meilleurs masters des écoles de commerce – notamment l’Esca de Casablanca et Dauphine Tunis, toutes deux en pleine redéfinition de leurs formations et de leur fonctionnement –, on observe peu de bouleversements en tête des deux palmarès francophones.
Grande priorité à la relance des échanges et des partenariats internationaux, cruciaux pour former des cadres dirigeants africains. Au nord comme au sud du Sahara, les établissements qui ont le mieux relevé les défis de la pandémie et des perturbations économiques sont ceux qui figuraient déjà parmi les mieux classés lors des éditions précédentes du classement de JA : Rabat Business School et l’Iscae côté maghrébin, BEM Dakar et Sup de Co Dakar côté subsaharien.
Méthodologie Cinq grandes catégories de critères Voici les éléments pris en compte pour la 10e édition du classement 2021-2022 par Jeune Afrique des meilleurs masters d’écoles de commerce francophones du continent.
C
ette édition du classement des écoles de commerce francophones est la dixième du genre. En 2015, ce palmarès avait été scindé en deux classements régionaux – Maghreb et Afrique subsaharienne – pour mieux tenir compte des attentes locales et des différents environnements. Depuis le premier palmarès, en décembre 2007, JA a affiné sa méthodologie pour noter les masters de business school autour
de cinq grandes catégories. Voici les principaux éléments pour cette édition, recueillis sur la base d’un questionnaire et de documents probants remis par les établissements. • Attractivité et sélectivité : taille des effectifs étudiants et enseignants, type de sélection (examen, dossier, oraux), accréditations par des labels régionaux ou internationaux. • Ouverture internationale : part des langues étrangères dans
l’enseignement, proportion des étudiants partis à l’étranger, mise en place de doubles diplômes, part d’étudiants étrangers et modalités d’accueil. • Pédagogie : taille du corps professoral permanent, part de docteurs (PhD) parmi les enseignants, création et utilisation d’études de cas concrets dans les enseignements, importance des travaux de recherche fondamentale et appliquée. •Professionnalisation :
nombre et part des intervenants professionnels dans la formation, nombre et durée des stages, existence de projets tutorés en entreprise, préparation à l’employabilité et modalités des liens avec les entreprises. • Services aux étudiants : budget rapporté au nombre d’élèves, appui à l’entrepreneuriat (junior entreprise, incubateur…), accès à l’informatique, taille et influence du réseau des anciens (alumni). Christophe Le Bec
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DOSSIER EMPLOI & FORMATION
Afrique subsaharienne Dakar toujours à la pointe BEM Dakar, Sup de Co Dakar et l’Institut supérieur de management (ISM) continuent de truster les premières places du palmarès des meilleurs masters de business school d’Afrique subsaharienne francophone, tandis que Saint-Jérôme se distingue au Cameroun.
U
ne fois encore, les écoles sénégalaises sont en pole position, comme lors des deux dernières éditions du classement. BEM Dakar, filiale du campus bordelais de Kedge Business School, peut se targuer d’obtenir les meilleures performances en matière de pédagogie, de
Note finale
professionnalisation et de services aux étudiants, ce qui explique sa note globale de quatre étoiles. Sup de Co Dakar, établissement indépendant qui était en 4e position lors des classements 2019 et 2020, a progressé notablement en matière d’ouverture internationale et obtient la même note globale. L’ISM
École
Pays
Diplôme
BEM DAKAR
Sénégal
Master en sciences de gestion
SUP DE CO DAKAR
Sénégal
Programme grande école
ISM
Sénégal
MBA management des projets
SAINT-JÉRÔME BUSINESS SCHOOL
Cameroun
Master en sciences de gestion
BBS SCHOOL
Gabon
Master BFA option banque
LOMÉ BUSINESS SCHOOL
Togo
Master management
IGG
Cameroun
Master comptabilité contrôle audit
ESCG YAOUNDÉ
Cameroun
Master EMBA, EDBA
talonne ses deux compatriotes grâce à ses trois points forts : son attractivité, sa sélectivité, ainsi que son ouverture internationale. Au Cameroun, le sérieux pédagogique de Saint-Jérôme Business School est reconnu, ce qui lui fait prendre la 4e place du palmarès subsaharien, devant ses compatriotes
Attractivité/ sélectivité
Ouverture à l’international
Institut du Golfe de Guinée et ESCG Yaoundé (nouvellement classée). Parmi les nouveaux entrants de cette édition, à noter la place honorable de la petite Lomé Business School, qui décroche la 6e place pour sa première participation, notamment grâce à ses services aux étudiants. Christophe Le Bec
Pédagogie Professionnalisation
Service aux étudiants
COMMUNIQUÉ
AFRIQUE
Une institution de référence en Afrique
L’ESSEC Afrique dispose d’avantages nombreux. Tout d’abord, le choix de s’installer au Maroc, pays à la culture millénaire, au croisement de l’Europe, de la Méditerranée, du monde arabe et de l’Afrique, permet aux étudiants et professionnels en formation continue de bénéficier d’une immersion unique dans un écosystème dynamique et ouvert sur le monde. La stratégie partenariale de l’institution, très active, permet d’entretenir des relations fortes avec les tissus économique et universitaire locaux. Ce mouvement déjà bien amorcé au Maroc a vocation à s’étendre à tout le Continent. Situé dans la commune de Sidi Bouknadel, à quelques kilomètres de Rabat, le campus s’inscrit dans un paysage naturel et préservé en pleine mutation. Intégré à un complexe immobilier de haut standing, il offre toutes les commodités nécessaires à des études réussies, dont un centre pour l’innovation et l’entrepreneuriat (IN-LAB), un studio audiovisuel et de nombreuses activités culturelles et sportives.
La notion d’excellence est au cœur du projet pédagogique de l’ESSEC Afrique, l’une des rares business schools triplement accréditées du Continent (AACSB, AMBA et EQUIS). L’offre de formation initiale s’articule autour du programme phare du Global Bachelor of Business Administration, en quatre années post-bac. Ce parcours dédié à l’innovation et au management digital, construit en partenariat avec l’Ecole Centrale Casablanca, a déjà accueilli une centaine d’étudiants depuis son DES INVESTISSEMENTS lancement. Le campus reçoit égaleMASSIFS DANS LE DIGITAL ment de nombreux étudiants en mobilité issus des autres campus de La crise sanitaire a été l’ESSEC, inscrits en Global BBA ou en l’occasion d’évoluer vers programme Grande Ecole. Parmi ces un modèle innovant, derniers, certains ont choisi de suivre incluant de nouvelles les programmes Global Manager in méthodes d’apprentissage Africa et Entreprendre en Afrique.
✔
Les équipes du campus ont également développé des programmes de formation continue, à l’attention des cadres et dirigeants implantés en Afrique. Par exemple, le programme exécutif certifiant GENERATION AFRICA vise à former les professionnels désireux de se projeter sur le Continent dans le but d’en saisir notamment toutes les subtilités géopolitiques, économiques et culturelles. A savoir : ces programmes de haut niveau ont d’ores et déjà su convaincre de nombreuses entreprises du secteur privé au Maroc comme Wafa Assurance, CDG Développement, Valyans, la SOREC…. L’ESSEC Afrique aspire à rayonner à l’international comme un centre académique d’excellence où des étudiants et professionnels du monde entier viendront décrypter les nombreuses opportunités d’un Continent sur le chemin de l’émergence.
et d’évaluation à distance, notamment via le campus numérique augmenté de l’ESSEC, lancé en 2019. Durant l’été 2020, l’ensemble des salles de cours ont été équipées pour l’enseignement hybride. Aujourd’hui, la pédagogie est adaptée en permanence, ce qui nécessite de repenser à la fois les contenus, les espaces et les modalités d’interaction.
RECORD D’ÉTUDIANTS INTERNATIONAUX L’ESSEC a reçu un nombre record de candidatures
+50% vs 2019
pour ses programmes Masters et Bachelor.
ESSEC BUSINESS SCHOOL AFRIQUE Plage des Nations - Golf City - Route de Kénitra - Sidi Bouknadel, Rabat-Salé, Maroc - www.essec.edu/afrique VOTRE CONTACT : Salma BENYOUSSEF - Directrice Marketing et Communication ESSEC AFRIQUE Tél.: (+212) 6 84 88 55 79 - Email : benyoussef@essec.edu
JAMG/DF - PHOTOS : DR.
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ondée en 1907 à Paris,l’ESSEC Business School est implantée depuis 2016 sur le Continent. Forte de son esprit pionnier et de ses valeurs humanistes,l’école propose à ses étudiants une vision renouvelée et innovante du leadership, consciente des nombreux enjeux du monde contemporain,qu’il s’agisse de la transition écologique ou de la révolution digitale.Gros plan sur les atouts du campus de Rabat.
DOSSIER EMPLOI & FORMATION
Maghreb Deux écoles marocaines et une tunisienne sur le podium
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opée par son accréditation AACSB, qu’elle a ob te nue l’année dernière (lire ci-contre),la Rabat Business Schooldécrocheencoreune fois la note de quatre étoiles pour son excellence pédagogique, son attractivité et sa sélectivité, ainsi que pour ses services offerts aux étudiants. Sa rivale casablancaise Iscae est dans la même catégorie : tout aussi sélective, elle se distingue particulièrement par son ouverture internationale ainsi que par la professionnalisation de sa formation. La Mediterranean School
Note finale
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of Business de Tunis n’est pas loin derrière ces deux établissements élitistes marocains, du fait de son excellence pédagogique et de la professionnalisation de son master of business management. À noter le retour du campus casablancais de l’EM Lyon dans le classement, qui en était absent l’an dernier. Ses masters professionnels continuent de se révéler attractifs, ce qui lui vaut sa 4e place. Parmi les challengers, l’établissement marocain Adalia, en 5e position, qui attire une bonne proportion de Subsahariens
École
Pays
Diplôme
RABAT BUSINESS SCHOOL
Maroc
Programme grande école
ISCAE
Maroc
Programme grande école
MEDITERRANEAN SCHOOL OF BUSINESS (MSB)
Tunisie
Master of business management
EM LYON CASABLANCA
Maroc
Master spécialisé
ADALIA
Maroc
Master digital transformation et innovation
ESPRIT BUSINESS SCHOOL
Tunisie
Master pro en management digital et systèmes
ESAA
Algérie
Executive master in business administration
ISMAGI
Maroc
Ingénierie informatique et sciences du management
UNIVERSITÉ CENTRALE
Tunisie
Master pro en ingénierie financière
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ONS ABID
Les réputées Rabat Business School et Iscae de Casablanca, très sélectives, restent en tête, tandis que la Mediterranean School of Business de Tunis, qui les talonne, soutient bien la comparaison avec ses rivales du royaume chérifien.
À la Mediterranean School of Business (MSB) de Tunis, le 15 novembre 2021.
dans ses effectifs, a su positionner son master de transformation digitale et
Attractivité/ sélectivité
Ouverture à l’international
d’innovation sur un créneau porteur. Christophe Le Bec
Pédagogie Professionnalisation
Service aux étudiants
DOSSIER EMPLOI & FORMATION
L’AACSB Label international d’excellence, une accréditation très convoitée Sésame américain accordé à une business school à l’issue d’un examen approfondi de sa pédagogie et de ses processus de fonctionnement, il ouvre les portes d’une reconnaissance internationale.
L
L’association veille aussi à ce que l’institution respecte les promesses faites aux étudiants. « En accréditant une business school, AACSB distingue l’ensemble de la formation offerte par l’établissement, mais aussi tous les processus de fonctionnement : sélection des étudiants, recrutement des professeurs, liens internationaux, recherche,
RBS
abel international d’excellence américain créé en 2016, l’AACSB (Association to Advance Collegiate Schools of Business) a fait sa première incursion africaine en 2006, avec l’accréditation de l’American Business School du Caire. En l’espace de quinze ans, huit écoles de commerce africaines ont rejoint le label, dont deux marocaines : l’Esca, en 2018, et la Rabat Business School, en 2020. BEM Dakar et l’EM Lyon Casablanca revendiquent également ce label accordé à leurs maisons mères françaises respectives de Bordeaux et de Lyon, mais elles ne sont pas accréditées en tant qu’établissements.
La Rabat Business School fait partie des huit écoles africaines ayant acquis le label.
solidité financière… L’association veille aussi à ce que l’institution respecte les promesses faites aux étudiants », expliquait Olivier Aptel, le directeur de la Rabat Business School, juste après son accréditation.
Impact sociétal de l’école
« Être accrédité par l’AACSB, c’est le moyen d’accéder aux grands classements internationaux, et d’attirer
des étudiants et des partenariats à travers le monde », fait valoir Tim Mescon, vice-président de l’organisation pour l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique, situé à Amsterdam. « Désormais, dans notre processus d’accréditation, nous analysons aussi l’impact sociétal et l’engagement de l’école au niveau local, régional ou international », précise-t-il. Majda El Ofairi
DOSSIER EMPLOI & FORMATION
ÉCHANGES INTERNATIONAUX
Ramsess, futur Erasmus africain ? Lancé par le Tunisien Kaïs Mabrouk, ce réseau rassemblant huit établissements francophones privés se veut la réplique du célèbre programme interuniversitaire de l’Union européenne. Les institutions du continent ont également engagé des initiatives similaires.
MAJDA EL OFAIRI
L
Ramsess (le Réseau africain pour la mobilité scientifique des étudiants Sud-Sud), première initiative privée du genre, a été mis en route par Kaïs Mabrouk. Ancien directeur du développement international de Honoris United Universities, actuellement directeur général adjoint de Bouebdelli Education Group, ce Tunisien a fédéré huit établissements privés africains francophones autour de ce projet ambitieux. Parmi les membres pionniers de Ramsess, on compte des écoles de commerce et de management – BBS Business School (Gabon), MDI Alger, l’IME de Douala –,
NADIA GUENDOUZ & SAWSSEN BEN CHAABANE
e programme européen interuniversitaire Erasmus a bénéficié à près de 4,4 millions d’étudiants depuis sa création, en 1987. Un succès qui fait au sud de la Méditerranée des envieux, désireux d’un système équivalent sur le continent. Côté institutionnel, l’Union africaine (UA), l’Agence universitaire de la francophonie (AUF) et l’Association des universités africaines (AUA) ont lancé plusieurs initiatives pour que les jeunes aient l’occasion d’étudier dans un autre pays du continent (lire p. 174).
Présentation du projet Ramsess aux étudiants de l’Université libre de Tunis, à la rentrée de2021.
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l’École de droit et de sciences politiques Akadémia (Sénégal), l’École d’architecture d’Abidjan, ainsi que des établissements pluridisciplinaires – l’Université libre de Tunis (ULT), l’Université privée de Fès (UPF) et l’Université Kofi-Annan de Conakry.
Mobilité sans frontières
Inspiré d’Erasmus, Ramsess vise à donner aux jeunes la possibilité d’effectuer un échange académique pour renforcer leurs connaissances, leurs compétences et leur employabilité. Le réseau va s’ouvrir à des candidats au départ venus des établissements partenaires – qui comptent à eux tous 15 000 étudiants –, mais il démarrera très modestement au premier semestre de 2022, avec une première promotion de 40 à 80 jeunes en échanges interuniversitaires. « Ramsess encouragera la mobilité étudiante, mais aussi celle des enseignants et du personnel administratif, explique Kaïs Mabrouk. Nous prévoyons également un partage des cours en ligne des universités membres sur tout le réseau. Tout est à construire, mais dans une dynamique libre et indépendante », fait valoir le responsable éducatif tunisien. « La mobilité internationale est à la fois une priorité et un positionnement stratégique de notre établissement. L’efficacité d’un séjour académique d’études ou d’un stage à l’étranger n’est plus à prouver. C’est l’occasion rêvée de découvrir
Bâtir ensemble un avenir prometteur 1498 Candidats
152
Pré-sélectionnés
86 Evalués
20 Choisis
Félicitations aux nouveaux lauréats du programme Graduate de Ecobank Togo Suite à un processus de sélection rigoureux, Ecobank est fière d’annoncer la sélection de 20 lauréats togolais pour son prestigieux programme panafricain de formation de jeunes diplômés. En tant qu’employeur dynamique, et qui croit fortement en la jeunesse togolaise et panafricaine, nous accueillons cette nouvelle génération de talents avec grand espoir. Nous sommes impatients de nos futures réalisations ensemble pour la prospérité de notre continent.
DOSSIER EMPLOI & FORMATION
d’autres modes d’apprentissage, de s’ouvrir à des cultures différentes, de pratiquer une langue étrangère au quotidien, de se dépasser et de nouer de solides relations », affirme quant à lui le Marocain Mohamed Aziz Lahlou, président de l’Université privée de Fès. Le réseau de huit établissements entend se développer par cooptation d’autres universités ou d’écoles privées, francophones dans un premier temps. Le budget de Ramsess est pour le moment à la discrétion des universités et des écoles associées : les étudiants seront exonérés des droits de scolarité, et les membres pionniers – dont l’ULT et l’UPF – ambitionnent d’offrir des bourses spécifiques. Pour gonfler les promotions partant étudier dans un autre pays africain et améliorer leurs conditions de vie, Ramsess compte solliciter la BAD et l’UA.
LES INITIATIVES PANAFRICAINES INSTITUTIONNELLES • L’Agence universitaire de la francophonie (AUF) encourage les mobilités académiques sur le continent auprès de ses 400 membres africains. De 2001 à 2021, 5 417 bourses ont été accordées à des étudiants pour qu’ils suivent leur cursus dans un pays francophone, dont les bénéficiaires les plus nombreux ont été, dans l’ordre, les ressortissants du Cameroun, de la Tunisie, de Madagascar, du Sénégal et de l’Algérie. • Soutenu conjointement par l’Union africaine et l’Union européenne, l’Intra-Africa Academic Mobility Scheme (IAAMS) comprend différents programmes d’échanges interuniversitaires ciblés par thème, notamment autour des formations médicales et de la gestion de l’eau. De 2012 à 2018, 1 255 Africains ont pu bénéficier de ce programme, dont 722 étudiants en master et 187 professeurs. • Le dernier projet conjoint de l’Association des universités africaines (AUA) avec la Cedeao intitulé « Nnaldi Azikiwe Academic Mobility Scheme » (en l’honneur du premier président du Nigeria), centré sur les filières scientifiques, a profité à 50 étudiants en master et à 25 doctorants de 2015 à 2018. M.E.O.
uqat.ca/futurs-etudiants-internationaux
COMMUNIQUÉ
AVIS D’EXPERT
Honoris United Universities
Le plus grand réseau panafricain d’enseignement supérieur privé 380, boulevard Roudani, Casablanca Maroc. Mobile : (+212) 6 99 68 94 54 E-mail : Lkakon@honoris.net
L’Éducation 4.0 pour développer une nouvelle génération de talent africains
N
Repenser collectivement les approches pédagogiques pour enseigner les compétences nécessaires au 21e siècle L’enseignement supérieur connait une transformation fondamentale, notamment grâce à l’adoption de nouveaux systèmes d’apprentissage qui accélèrent et améliorent l’acquisition des compétences. À la croisée des chemins entre neurosciences, intelligence artificielle, data et pédagogie, l’Adaptive Learning permet notamment de réduire significativement le temps de formation de sorte à se concentrer sur le développement d’une compétence accrue chez l’apprenant. Les innovations technologiques comme la réalité virtuelle et/ou augmentée ou la simulation permettent également à l’apprenant de vivre des expériences interactives et immersives, physiques ou virtuelles, de manière à être mieux préparé au monde réel grâce à une pratique et mise en situation systématiques. Il
Laura Kakon,
Directrice de la Croissance et de la Stratégie, Honoris United Universities
s’agit notamment de pratiques devenues incontournables pour la formation de professionnels de santé performants. La quatrième révolution industrielle nécessite aussi l’hybridation des compétences de différents domaines et une interaction permanente avec les professionnels. L’ingénierie, l’énergie, l’architecture et l’urbanisme par exemple sont intimement liés pour bâtir la ville de demain. L’hybridation des systèmes et des contenus permet de développer des programmes axés sur l’employabilité de l’apprenant permettant ainsi de répondre aux défis locaux. La pollinisation croisée entre différents partenaires académiques au-delà des frontières contribue à encourager et à étendre l’innovation à travers plusieurs institutions, ainsi qu’à repenser collectivement l’éducation et ses pratiques afin de préparer des talents africains de classe mondiale capables de relever les défis locaux et mondiaux. Le développement des compétences du 21e siècle nécessite des approches pédagogiques du 21e siècle offrant une plus grande flexibilité et un meilleur accès à une éducation de qualité.
JAMG - PHOTOS DR
ous sommes au cœur de la quatrième révolution industrielle. Notre relation aux autres, à l’environnement, notre façon de vivre et de travailler changent. Les implications en termes de croissance économique et d’emploi sont autant d’opportunités pour développer des talents africains compétitifs sur le marché mondial du travail et capables d’avoir un impact transformateur sur le continent. Cette mutation profonde induite par l’adoption accrue de nouvelles technologies, l’automatisation, la data et l’intelligence artificielle dans le monde du travail génère une demande croissante de compétences alliant l’humain au numérique et crée de nouveaux métiers. Dans ce contexte de numérisation et digitalisation accrue, il est impératif de repenser la conception des approches pédagogiques traditionnelles et l’expérience académique de l’apprenant afin de développer les compétences nécessaires pour répondre aux enjeux du 21e siècle.
DOSSIER EMPLOI & FORMATION
CHINE
Les cursus contrariés des étudiants africains Privés de visas depuis mars 2020 au nom de la politique « zéro Covid » du gouvernement de Xi Jinping, des milliers de jeunes n’ont pu reprendre leurs cours en présentiel. MAJDA EL OFAIRI
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JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
LI GA/XINHUA-REA
À
la veille des vacances du nouvel an chinois de janvier 2020, Yousra, étudiante marocaine en architecture de 21 ans à l’université de Tongji, de Shanghai, a décidé de retourner dans sa famille, à Casablanca. Elle a donc laissé l’essentiel de ses affaires en Chine et dit au revoir à ses camarades, pensant revenir sur les bancs de l’université quelques semaines plus tard. Yousra ne pouvait pas se douter que son départ coïnciderait avec le début de la pandémie de Covid-19, qui l’a empêchée, ainsi que des dizaines de milliers d’autres étudiants africains, de revenir dans l’Empire du milieu après la fermeture des frontières du 26 mars 2020. En 2019, parmi le demi-million d’étudiants internationaux que la Chine a accueillis, 14 % étaient africains, soit environ 70 000 jeunes, ce qui représente une forte augmentation de ce contingent, qui n’était que de 2 % en 2003. Selon le cabinet de conseil Development Reimagined, spécialisé dans les relations sino-africaines, l’amélioration de l’attractivité universitaire de la Chine s’est traduite par une croissance de 258 % du nombre d’étudiants internationaux inscrits dans une université chinoise entre 2011 et 2017. Avant la pandémie, la Chine pouvait se vanter d’être devenue le premier pays d’accueil d’étudiants étrangers. Yves, Ivoirien de 31 ans
Quelque 70 000 étudiants africains ayant prévu de suivre leurs études en Chine sont dans le désarroi.
en master d’océanographie à l’université de science et de technologie de Nankin, à 300 km de Shanghai, énumère les raisons qui l’ont poussé à partir en 2017 se former à plus de 11 000 km de son pays : « Les études sont abordables (lire p. 178), les campus sont équipés de laboratoires performants, et il est plus facile d’obtenir un visa étudiant pour la Chine que pour un pays occidental. » Keïta, étudiant guinéen en administration publique à l’université de technologie de Wuhan, cœur de l’épidémie de Covid-19 dans le pays, est l’un des rares à être resté en Chine. Dans un dortoir universitaire
devenu étrangement silencieux, il a vécu, à partir de mars 2020, 77 jours de confinement des plus stricts, jonglant entre cours en ligne et groupes de discussion solidaire sur l’application chinoise WeChat.
Diplômes en péril
« Les responsables de l’université ont pris soin de ceux qui sont restés, on nous livrait trois repas par jour ainsi que les biens de première nécessité. Après deux semaines de retard, le semestre a commencé avec des cours en ligne pour tous », explique-t-il. Mais pour la grande majorité des étudiants africains, rentrés chez
Campus SMU Les Jardins du Lac 2, 1053Tunisie Tél. : (+216) 71 194 444 Fax : (+216) 71 194 500
COMMUNIQUÉ
AVIS D’EXPERT
www.smu.tn
L’Éducation pour l’Intégration Économique de l’Afrique L’inscription d’étudiants internationaux est créatrice d’un environnement multiculturel fort bénéfique tant aux étudiants du pays d’accueil que pour les étudiants internationaux. En effet, le développement de liens d’amitié entre les étudiants de différentes nationalités est de nature à favoriser le développement ultérieur de projets conjoints et d’échanges commerciaux. Enfin, l’étudiant international est un futur ambassadeur du pays d’accueil dans son pays. Les programmes offerts par la majorité des universités africaines ne répondent pas aux normes de qualité des universités de renommée, ce qui limite les échanges d’étudiants entre les pays africains. Les jeunes africains à la recherche d’une éducation de qualité font leurs études dans des universités européennes ou nord-américaines pour une formation déconnectée du contexte et des spécificités de leurs pays d’origine. Ceux qui reviennent à leurs pays d’origine doivent adapter les connaissances acquises aux spécificités et réalités de leurs pays. Il y a lieu de :
Dr. Mahmoud Triki,
Universitaire Fondateur de la South Mediterranean University
●
L’invitation de professeurs visiteurs d’universités nord-américaines et européennes de renommée et le développement graduel de son propre corps professoral.
●
L’adoption de méthodes pédagogiques développant les compétences « soft » (capacité d’analyse, communication, esprit d’initiative).
●
La signature de partenariats avec des universités européennes et nord-américaines pour l’organisation de programmes d’échange d’étudiants et de professeurs, l’offre de programmes conjoints pour une double diplomation et le développement de matériel pédagogique reflétant les spécificités de la région).
●
L’octroi de bourses aux candidats exceptionnels (Bourses d’Excellence) et aux étudiants de différentes nationalités (Bourses de Diversité).
● Encourager
le développement de programmes d’échanges de professeurs et d’étudiants avec des universités africaines.
● Accorder
des incitations financières des gouvernements africains pour favoriser les relations inter-universités africaines.
Étant le fondateur de la première université tunisienne anglophone et en guise de contribution à l’amélioration des programmes offerts par les universités africaines, les principaux axes stratégiques pour le développement de la South Mediterranean University (SMU) à Tunis qui a attiré des étudiants de 35 différentes nationalités et jugée par le Financial Times comme modèle à considérer par les pays africains comprennent : ●
L’excellence à tous les niveaux (Potentiel des étudiants admis, qualité des programmes, un corps professoral compétent, et des infrastructures répondant aux exigences pédagogiques.
Le développement de systèmes d’éducation africains performant et le soutien financier aux programmes d’échange d’étudiants et de professeurs inter-universités africaines sont de nature à contribuer au développement économique des pays africains et à favoriser le renforcement des relations économiques interpays africains, ce qui aboutira graduellement à l’intégration économique de l’Afrique.
JAMG - PHOTOS DR
● Améliorer la qualité des programmes offerts.
DOSSIER EMPLOI & FORMATION eux pour les vacances ou par souci de protéger leur santé, le retour au pays a été synonyme de passage à une vie d’oiseau de nuit. À Casablanca, pour suivre ses cours en ligne, Yousra se connecte de minuit à 8 heures du matin à cause du décalage horaire. Joint à Abidjan, l’Ivoirien Yves dit peiner aujourd’hui à se convaincre d’avoir fait le bon choix : « Avec les sessions en visio qui durent depuis presque deux ans, la reconnaissance de nos diplômes est en péril », s’inquiète-t-il.
Les étudiants déplorent une difficile et coûteuse connexion à internet de leur domicile africain. Au-delà du décalage horaire, compliqué à vivre, certains étudiants déplorent une difficile et coûteuse connexion à internet depuis leur domicile africain et la suspension des bourses d’étude du gouvernement chinois, en mars 2020. En juillet 2020, la Chine a rouvert les portes de ses universités aux étudiants présents en Chine – donc y compris au Guinéen Keïta resté à Wuhan – et autorisé les Sud-Coréens – premier contingent
d’étudiants étrangers – à revenir. Une décision qui a réveillé la frustration de leurs camarades d’autres pays, désespérés de ne pas obtenir le même droit. Naturellement, le fossé s’est creusé entre les étudiants présents physiquement et ceux cantonnés à leur domicile. Pour Hervé, étudiant burundais en quatrième année de médecine à l’université médicale de Wenzhou, à 500 km au sud de Shanghai, suivre les cours en ligne n’est plus viable, particulièrement s’il y a un apprentissage technique, impossible à assimiler derrière un ordinateur : « Au début de la crise sanitaire, malgré le décalage horaire, j’étais sur la même longueur d’onde que mes camarades chinois, qui devaient eux aussi suivre les cours en visio. Aujourd’hui, ils sont en stage dans un hôpital en Chine, contrairement à moi qui suis bloqué ici sans possibilité de le faire sur place. J’avais tout misé sur ces études », se désole-t-il. Pour donner voix à leur désespoir, l’association internationale des étudiants étrangers en Chine Cisu a lancé sur Twitter le hashtag #takeusbacktochina et adressé, en janvier, une lettre ouverte au ministre des Affaires étrangères chinois, exigeant qu’une date de retour rapide leur soit communiquée. La porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Hua Chunying,
s’est exprimée à ce sujet le 28 septembre dans un communiqué laconique : « Compte tenu de la propagation continue du coronavirus à travers le monde, la priorité du gouvernement chinois est de garantir un flux sûr, sain et ordonné des voyageurs chinois et étrangers. » Une réponse officielle typique de la politique « zéro Covid » suivie par Pékin, drastique, et qui ne satisfait évidemment pas les jeunes empêchés d’étudier en présentiel.
Statu quo
Interrogés par Jeune Afrique, les services de l’ambassade de Chine au Maroc ne sont pas plus encourageants. « Aucun visa étudiant ne sera accordé pour le moment. Il faut attendre la décision du gouvernement chinois », indiquent-ils. Les établissements d’enseignement supérieur, de concert avec leur gouvernement, restent peu réceptifs aux préoccupations des étudiants étrangers face à l’avenir. Certains d’entre eux envisagent de poursuivre leurs études dans un autre pays et de quitter le système chinois, telle la Marocaine Yousra, qui effectue un stage à Barcelone. D’autres, comme le Burundais Hervé, ne veulent pas renoncer à poursuivre leurs études en Chine et sont prêts à attendre un retour espéré en septembre 2022.
DES BOURSES ET UN COÛT DE LA VIE JUSQUE-LÀ ATTRACTIFS En 2018, près de 30 000 bourses ont été octroyées aux étudiants africains partis se former en Chine. La bourse du gouvernement chinois (Chinese Scholarship Council, CSC), accordée aux étudiants étrangers selon des critères d’âge – pour les moins de 35 ans pour un étudiant de master –, couvre l’hébergement, l’assurance-maladie et une allocation mensuelle pouvant aller jusqu’à 480 euros. Il y a un nombre défini de bourses CSC pour chaque établissement
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d’enseignement supérieur, ce qui fait que tous les étudiants étrangers des universités chinoises les plus attractives n’en bénéficient pas, contrairement à ceux d’établissements moins prestigieux. L’Université des langues et cultures de Pékin (BLCU), communément appelée « la petite assemblée des Nations unies », est l’établissement qui a accueilli le plus d’étudiants étrangers (environ 9 000, pour 13 000 étudiants reçus
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à la BLCU). L’institution, comme beaucoup d’autres en Chine, propose une panoplie de moyens de financement pour les étudiants venus d’ailleurs, à commencer par une bourse propre à l’université, qui finance les frais de scolarité (4 300 euros) de première année de licence, master et doctorat. Si l’étudiant justifie d’un niveau intermédiaire en mandarin (B1), il peut prétendre à la bourse de l’Institut Confucius, qui couvre également les frais d’hébergement,
l’assurance médicale et une allocation mensuelle. Pour un logement étudiant, il faut débourser environ 130 euros pour un hébergement en dortoir et 860 euros pour un appartement en ville, selon le site en ligne Educations. Il existe toutefois de fortes disparités dans le pays : dans une grande métropole – Pékin, Shanghai, Tianjin, Canton – le budget moyen mensuel sera d’environ 1 000 euros, contre 550 euros dans une plus petite cité. Majda El Ofairi
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MANAGEMENT
Comment accompagner les cadres expatriés Alors que les mobilités professionnelles s’accélèrent, les entreprises africaines et occidentales négligent trop souvent la préparation de leurs dirigeants étrangers, natifs du continent ou non, appelés à piloter leurs équipes locales.
GETTY IMAGES
PIERRE-OLIVIER ROUAUD
Contrairement aux grands groupes, les PME ont trop peu recours aux formations interculturelles.
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n Afrique comme ailleurs, une promotion internationale, pour un manager, est souvent un accélérateur de carrière. Mais cela se prépare, sous peine de déconvenues. Il en va de même pour l’encadrement d’équipes multinationales et de la recherche de partenaires commerciaux dans les 54 pays du continent. Tel est l’enjeu de l’approche interculturelle. Les grandes entreprises occidentales
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ont intégré de longue date la préparation de leurs managers à l’expatriation. C’est le cas du groupe TotalEnergies, y compris pour ses mouvements intra-africains. « La mobilité internationale au sein des filiales africaines fait partie de nos objectifs en matière de RH, au même titre que la promotion des talents locaux ou la féminisation jusqu’aux comités de direction de ces sociétés », témoigne le Nigérien Omar
Cheick Diallo, DRH de la branche marketing-services du groupe sur le continent. « Mais cela se prépare : d’abord par une formation « métiers », puis de langue si cela se justifie, et ensuite par les soft skills comme le management ou l’approche interculturelle. Des formations sur l’éthique ou les droits humains complètent systématiquement ce parcours. Pour cela, le groupe s’appuie sur TotalEnergies Learning
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DOSSIER EMPLOI & FORMATION Solution, sa filiale qui, à l’échelle mondiale, organise un large éventail de formations, des plus techniques aux soft skills. » « En général, les grands groupes développent des parcours rodés pour leurs expatriés, que ce soit en interne ou en s’appuyant sur des opérateurs de formation comme nous », témoigne Georges Jourdain, PDG d’Akteos. Avec 10 000 cadres formés chaque année sur la plupart des pays du monde, cette entreprise, qui accompagne des grands groupes français et des PME, est un des principaux opérateurs de formations interculturelles avec une trentaine de consultants spécialistes de l’Afrique. « Ce continent représente entre 5 % à 10 % de notre volume de formation, un taux faible comparé à l’Asie, l’Europe ou l’Amérique. Nous formons beaucoup moins de PME en comparaison des autres zones. »
Éviter les dysfonctionnements
Outre la préparation pratique (système de santé, logement, etc.), un parcours de mobilité s’accompagne le plus souvent d’une formation courte (un à trois jours), individuelle ou collective, selon les besoins. Il revêt deux aspects principaux. L’un tient à l’appréhension du contexte social et culturel d’un pays : religion, importance des liens familiaux, contexte historique ou ethnique. L’autre concerne la vie en entreprise, comme l’organisation locale du travail, la relation à l’autorité ou au temps, la place des femmes, l’éthique, ou encore la culture juridique (common law, droit civil ou islamique…). Pour faciliter les choses, TotalEnergies a mis en place un système interne, facultatif, de mentor, connaissant bien le pays d’accueil, pour mieux accompagner ses cadres. Pour le monde des affaires, l’interculturel n’est pas à envisager seulement dans le cas de l’expatriation. À l’heure de l’économie digitale triomphante et de la généralisation de l’approche projet, cette dimension prend aussi tout son sens dans la gestion d’équipes présentes dans plusieurs pays. On pense aux plateformes de relation client ou aux grands projets d’ingénierie. « Souvent, le primat y est celui des compétences métiers, souligne Georges Jourdain,
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les différences socioculturelles sont négligées. Un simple concept, comme le oui par exemple, n’a pas toujours le même sens en Asie, en Afrique du Sud, au Maghreb ou en Europe du Nord. » Sur le continent, certaines règles non écrites sont partagées au sein d’une grande région – Maghreb, Afrique de l’Ouest, Afrique centrale… –, voire de plusieurs d’entre elles, mais il existe aussi de fortes singularités du Sénégal à la Côte d’Ivoire, en passant par Madagascar ou la Tunisie. « Au Sénégal, « inch Allah » est omniprésent dans le langage, même professionnel. Le nouvel arrivant doit en saisir la portée », insiste Olga Ouédraogo. Cette Burkinabè est fondatrice à Paris de Yeelen Horizon, société spécialisée en management interculturel. Le manager en mobilité doit intégrer tous ces sujets pour réussir sa mission, éviter les dysfonctionnements quotidiens ou extrêmes, comme une grève d’usine ou de plateforme. Ce qui passe d’abord par un travail sur soi. « Changer d’environnement et s’y adapter, c’est d’abord faire une introspection, prendre conscience de son propre cadre socioculturel. Je privilégie une approche
Un simple concept comme le oui n’a pas le même sens en Asie, en Afrique du Sud ou au Maghreb. personnelle, si nécessaire en couple, poursuit Olga Ouédraogo. L’objectif est de découvrir ses futurs partenaires et leurs propres bagages dans une approche miroir pour parvenir à une relation de travail efficace et respectueuse des identités. » Établi de longue date à Dakar, Philippe Cordier, PDG de la société de conseil Ceemo, également implantée à Abidjan, accompagne les entreprises voulant se développer dans la sous-région. Il intervient aussi en formation stratégie « business et risque interculturel » y compris pour l’Asmex, l’Association marocaine des exportateurs. « Les entreprises françaises de
type PME ou ETI sous-estiment ces sujets », observe-t-il, considérant que trop de responsables d’entreprises se focalisent sur leur business plan et négligent l’aspect culturel. Sans parler de l’inclination des Français à avoir toujours raison où qu’ils soient dans le monde. « Paradoxalement, remarque-t-il, je vois des entrepreneurs américains mieux préparés arriver à Dakar ayant, pour certains, fait l’effort d’intégrer des notions de wolof. Ce que je n’ai jamais constaté au sein des sociétés de l’Hexagone. »
Différences socioculturelles
Une impasse qui n’est pas le travers des seules PME françaises. Ardent promoteur des relations entre le Maroc et l’Afrique subsaharienne, Alioune Guèye est PDG et fondateur du groupe Afrique Challenge, société de conseil située à Casablanca. Selon lui, la formation interculturelle reste aussi en devenir pour des entreprises chérifiennes qui se projettent pourtant, très nombreuses, au sud du Sahara. « Il y a une prise de conscience, note-t-il. Mais j’observe une quasi-absence de formation des managers au sein des grands comptes marocains et plus encore des PME. Les liens culturels historiques et religieux entre pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale ainsi que la forte impulsion politique du Palais royal sur le continent conduisent beaucoup d’entreprises marocaines à négliger cet aspect. Ou à le considérer, à tort, comme acquis. » Cet exemple intracontinental n’est pas isolé. Comme le décrit un autre expert : « J’ai été alerté par une banque régionale de développement, où se côtoyaient une dizaine de nationalités, sur des incompréhensions faute de prise de conscience des différences socioculturelles. » « En général, les mobilités intra-africaines se passent bien. Nous n’avons pas connu d’échec, même entre régions dissemblables comme l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique de l’Est », relativise Omar Cheick Diallo de TotalEnergies, lui-même ancien directeur de filiale en Guinée. « La directrice commerciale réseau de notre filiale M&S en Tanzanie, d’origine sénégalaise, a rapidement intégré tous les codes de son pays d’accueil. »
COMMUNIQUÉ
AVIS D’EXPERT
AACSB International UP Building, Piet Heinkade 55, 1019 GM Amsterdam,The Netherlands Tel : +31 20 509 1070 E-mail : mediarelations@aacsb.edu
www.aacsb.edu
Combiner micro-diplômes et diplômes de commerce pour un apprentissage efficace tout au long de la vie professionnelle.
Le débat existe pour savoir si les micro-diplômes peuvent ou doivent, remplacer les traditionnels cursus diplômants. Les employeurs semblent aujourd’hui convaincus du besoin et de l’utilité des deux. Chaque mode d’enseignement apporte en effet ses propres compétences, dont la somme contribue à répondre aux objectifs d’une entreprise. Les deux devraient donc idéalement coexister. Les micro-diplômes augmentent les connaissances fondamentales inculquées aux étudiants dans les programmes traditionnels. Les écoles de commerce sont donc toutes disposées à s’associer à des organisations désireuses d’assurer une formation continue à leurs personnels, tout au long de leur vie professionnelle, en leur offrant à la fois diplômes et micro-diplômes. Encore faut-il que les écoles engagent le dialogue et les collaborations avec ces organisations, pour satisfaire les besoins des apprenants tout en répondant aux contraintes de l’employeur. Dans le dernier rapport d’AACSB, intitulé The Future of Microcredentials, 80 % des organisations et entreprises interrogées ont confirmé qu’elles recourraient déjà aux formations micro-diplômantes, pendant que 70 % pensaient que leur organisme jugeait indispensable l’embauche d’un titulaire de diplôme en quatre ans. Les responsables de l’éducation et du développement professionnel sont-ils
Geoff Perry,
Vice-Président exécutif et directeur général pour l’Asie-Pacifique chez AACSB International
Les micro-diplômes n’ont pas pour but de remplacer les diplômes traditionnels, mais de les renforcer, avec des options de formation plus rapides et accessibles. prêts à évaluer sérieusement l’efficacité des programmes de micro-diplômes et à les mettre en œuvre ? Dans le cas contraire, quelle autre ressource ont-ils à leur disposition ? En tant qu’organisateur et « connecteur », AACSB propose une plateforme sur laquelle les écoles de commerce, les chefs d’entreprises et les fournisseurs de technologie peuvent créer des modules de formation et d’enseignement capables de répondre aux besoins des apprenants et des différentes parties prenantes. Respectant la mission de s’engager en faveur d’une accélération de l’innovation dans le but d’améliorer l’impact des formations commerciales, AACSB soutient les écoles de commerce dans leur constante progression à former les leaders qui influenceront positivement la société et le monde de l’entreprise de demain. Il est crucial pour les écoles de commerces et les entreprises de poursuivre un dialogue ouvert et constructif sur les opportunités et les manques qui caractérisent aujourd’hui l’offre éducative et l’acquisition de compétences, afin de mieux préparer l’avenir de l’enseignement.
JAMG - PHOTOS DR
Alors que les traditionnels diplômes en quatre ans sont toujours requis dans la plupart des secteurs et pour la majorité des postes à responsabilité, les micro-diplômes sont de mieux en mieux perçus par les étudiants comme par les employeurs. L’impact de la pandémie a été tel qu’il nous a obligé à être plus réactifs, créatifs et souples. La popularité grandissante des micro-diplômes reflète ce besoin en matière d’éducation. Les écoles de commerce proposent la plupart du temps des diplômes de niveau licence et maîtrise. La pandémie a montré le besoin de changement, tant dans la manière d’enseigner que dans celle d’apprendre, basé sur une offre flexible, financièrement abordable et professionnellement enrichissante. À mesure que les besoins du marché du travail changeaient spectaculairement durant la dernière année et demie, les employés ont gagné de nouvelles compétences, quel que soit leur rôle, leur secteur d’activité, ou leur niveau d’expérience.