CÔTE D’IVOIRE
BURKINA Kaboré face à un nouveau front
GBAGBO BIENTÔT LIBRE ?
CAMEROUN PRÉSIDENTIELLE 2018
Dernier bilan avant inventaire
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL NO 3012 DU 30 SEPTEMBRE AU 6 OCTOBRE 2018
GUINÉE
Retour vers le futur Soixante ans plus tard, le pays de Sékou Touré et d’Alpha Condé peut-il enfin renouer avec les espoirs de l’indépendance ? SSpécial 28 pagess ÉDITION AFRIQUE DE L’OUEST
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France 3,80 € Algérie 290 DA Allemagne 4,80 € Autriche 4,80 € Belgique 3,80 € Canada 6,50 $ CAN Espagne 4,30 € Éthiopie 67 birrs Grèce 4,80 €
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Guadeloupe 4,60 € Guyane 5,80 € Italie 4,30 € Luxembourg 4,80 € Maroc 25 DH Martinique 4,60 € Mayotte 4,60 € Norvège 48 NK Pays-Bas 4,80 €
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Portugal cont. 4,30 € Réunion 4,60 € RD Congo 6,10 $ US Royaume-Uni 3,60 £ Suisse 7 FS Tunisie 3,50 DT USA 6,90 $ US Zone CFA 2 000 F CFA ISSN 1950-1285
Compagnie des Bauxites de Guinée Certifiée ISO 9001 : 2015, ISO 14001 : 2015, OHSAS 18001
Le partenaire responsable CBG, fleuron de l’industrie minière guinéenne depuis 1973 C’est seulement 5 années après la proclamation de l’indépendance de la Guinée que le gouvernement guinéen de Sékou Toure et Harvey Aluminim Company ont créé la Compagnie des Bauxites de Guinée, en 1963 avec pour objectif d’exploiter l’une des meilleures bauxite au monde et doter le pays d’infrastructures minières, industrielles et de transport. En 2018, la CBG franchira le cap des 500 000 000 de tonnes de bauxite expédiées depuis le début de ses opérations en 1973 et verra l’accomplissement de la première phase de son projet d’extension avec le premier minerai (first ore) qui sera traité par les nouvelles installations lors du dernier trimestre 2018. Première société minière de Guinée, premier employeur après l’État, acteur majeur du développement de la Région de Boké la CBG n’a jamais dérogé à sa mission de toujours mieux servir les intérêts de ses partenaires ! Joyeux anniversaire d’indépendance à la Guinée
15
millions
de tonnes de bauxite expédiées par an depuis 3 ans
de tonnes de bauxite expédiées depuis le début millions des opérations
650
millions USD
5
milliards USD
DIFCOM/JAMG - PHOTOS : DR.
500
mobilisés pour le Projet d’Extension qui doublera à l’horizon 2022 les capacités de production de CBG de contribution à l’État guinéen depuis sa création
▲ Les travaux de prolongement du quai minéralier de Kamsar, induits par le Projet d’Extension se sont terminés en 2017. Cette extension du quai permettra le chargement de deux bateaux de types Kamsarmax à la fois.
www.cbg-guinee.com
GRAND FORMAT
GUINÉE
DR
Pour tout comprendre de l’évolution d’un pays
1958-2018
SPÉCIAL 60 ANS jeuneafrique no 3012 du 30 septembre au 6 octobre 2018
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SOGEAC AÉROPORT DE CONAKRY
POUR QUE LA GUINÉE SOIT MIEUX CONNECTÉE AU MONDE. Les différents acteurs du Transport Aérien de la Guinée (le Ministère des Transports, l’Autorité Guinéenne de l’Aviation Civile (AGAC) et la Société de Gestion et d’Exploitation de l’aéroport de Conakry (SOGEAC) travaillent activement à l’amélioration de la fréquentation de l’aéroport de Conakry.
DES VOLS DE PLUS EN PLUS NOMBREUX Air France, Brussels Airlines, Royal Air Maroc, Asky Airlines, Air Côte d’Ivoire, Mauritania Airlines, Group Transair, Emirates, Turkish Airlines, Ethiopian Airlines et TunisAir et DHL pour le cargo et les colis express.
Une connectivité mondiale pour les voyageurs d’affaires et de loisirs Plusieurs destinations en Afrique, en Europe, au Moyen Orient, en Asie de l’Ouest et d’Extrême Orient, avec des escales à travers les HUB de Paris, de Bruxelles, de Casablanca, de Dubai, d’Istanbul, de Lomé, d’Addis Abeba, d’Abidjan, de Tunis et Lagos.
Ces nouvelles dessertes vont conduire les compagnies aériennes à se réorganiser pour multiplier leurs vols jusqu’à dépasser la fréquence d’un vol quotidien.
SOGEAC AÉROPORT DE CONAKRY
Le plan de masse de l’aéroport de Conakry en cours de mise à jour avec un cabinet spécialisé Le but est d’augmenter la capacité d’accueil (passagers et fret) par l’élaboration d’extension des postes de parkings avions, des parkings automobiles, des zones de traitement des passagers et leurs bagages.
La Sûreté et la Sécurité au cœur de nos préoccupations La SOGEAC est déterminée à travailler continuellement à des projets d’amélioration de la qualité de service et des installations grâce à l’acquisition d’équipements modernes de dernière génération et des formations qualifiantes du personnel.
SOCIÉTÉ DE GESTION ET D’EXPLOITATION DE L’AÉROPORT DE CONAKRY BP 3126 – Conakry République de Guinée / Tél. : (+224) 656 999 080 E-mail : contact@sogeac-conakry.com www.aeroportdeconakry.com
DIFCOM/JAMG - PHOTOS : DR.
Une concurrence croissante qui bénéficie aux voyageurs
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Quand la Guinée s’éveillera
François Soudan
90 À lire, à voir Mémoire vive
92 Développement Les défis d’Alpha
98 ANALYSES & DÉBATS
Omniprésident l avait 20 ans quand la Guinée accéda à l’indépendance et déjà la politique chevillée au corps. En ce 2 octobre 1958, Alpha Condé use ses pantalons sur les bancs de la Sorbonne, à Paris, entre deux meetings enfiévrés de la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France, la mythique Feanf. Dans un film biographique que les Guinéens pourront bientôt voir sur leurs écrans (Alpha Condé, le pouvoir et la vie), celui qui préside aujourd’hui à la vie quotidienne de ses 14 millions de compatriotes raconte combien ce jour-là et le fameux non de Sékou Touré à la puissance coloniale qui l’a précédé ont façonné le destin de la Guinée et l’univers mental de ses habitants. Ces soixante années d’indépendance, le camarade Condé les a dévorées avec l’appétit d’un militant, bues d’un trait et parfois jusqu’à la lie. Tour à tour tiers-mondiste proche de l’extrême gauche, condamné à mort, opposant sans jamais céder à la tentation de la soupe ni à celle du recours à la violence, jeté trente mois durant au fond d’un cul-de-basse-fosse, premier président démocratiquement élu (et réélu), ombrageux, patriote, fidèle en amitié comme à ses convictions, exigeant envers ses proches et charmeur pour ceux qu’il veut séduire, pudique à l’extrême tant il cuirasse sa sensibilité, volontiers cassant mais capable des pardons les plus étonnants. Ainsi est Alpha
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Entretien avec Djibril Tamsir Niane Historien et écrivain
Condé, ainsi sont les Guinéens : même s’ils sont loin de tous se reconnaître en lui, tous savent qu’il leur ressemble et nul ne met vraiment en doute la légitimité de ce président omniprésent.
Navigation au près serré
Organisé dans son désordre apparent et doté d’une mémoire de pachyderme, le chef de l’État – dont l’actuel mandat s’achèvera fin 2020 – se sert des leçons d’un passé chaotique pour que la Guinée, à laquelle les économistes « tropicaux » des années 1950 prédisaient un avenir brillant, s’engage enfin sur les sentiers de l’émergence. Il le fait à sa manière : à la fois directive sur le plan politique, en s’impliquant personnellement auprès des investisseurs et des bailleurs de fonds, et souple sur le plan politique, en évitant autant que possible les rapports de force avec une opposition aux aguets du moindre de ses faux pas. Cette navigation au près serré a porté ses fruits : sur tous les plans, les Guinéens se portent infiniment mieux aujourd’hui qu’en 2010, quand Alpha Condé a reçu en héritage un État en lambeaux et une nation déchirée. Le fait d’avoir à leur tête un homme qui a connu et traversé, un demi-siècle durant, les mêmes espoirs, les mêmes déceptions et les mêmes vicissitudes qu’eux y est sans doute pour beaucoup.
ORGANISÉ DANS SON DÉSORDRE APPARENT, ALPHA CONDÉ SE SERT DES LEÇONS D’UN PASSÉ CHAOTIQUE POUR QUE LE PAYS S’ENGAGE ENFIN SUR LES SENTIERS DE L’ÉMERGENCE.
106 Flash-back
Sékou, le meilleur, le pire et ce qu’il en reste
110 Ce jour-là
Le 28 septembre 2009
112 Opinion
Par Baba Hady Thiam Avocat aux barreaux de Guinée et de Paris et Fassou David Condé Étudiant à l’EHESS
116 SOCIÉTÉ
Bouillon de culture
122 Musique
Manamba Kanté, griot glamour du R’n’B
Suivez toute l’actualité de la Guinée et du soixantenaire sur www.jeuneafrique.com
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Grand format
1958-2018 – L’ANNIVERSAIRE
ON U/A RC HIV ES
JEU NE AFR IQU
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Ahmed Sékou Touré, aux Nations unies, à New York, en octobre 1960.
Quand la Guinée
VIN CE NT FO
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E AF RI QU E-R
Alpha Condé au palais Sékoutoureya, en mai 2015.
s’éveillera
Soixante ans plus tard, le pays de Sékou Touré et d’Alpha Condé renoue enfin avec les espoirs de l’indépendance.
Grand format GUINÉE 1958-2018
MURIEL DEVEY MALU-MALU
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ue reste-t-il de la fierté qu’éprouvèrent les Guinéens, le 28 septembre 1958, après avoir défié le général de Gaulle en se prononçant à 95 % contre son projet de Communauté française? Que reste-t-il de la Guinée d’Ahmed Sékou Touré, le premier président du pays, décédé aux États-Unis en 1984 après vingt-cinq années au pouvoir ? En soixante ans, le pays a traversé bien des tourments, il a considérablement changé. Et le socialisme porté aujourd’hui par Alpha Condé n’a pas grand-chose à voir avec celui prôné au temps des indépendances par Ahmed Sékou Touré. La première rupture intervient en 1984, quand, au lendemain du décès de ce dernier, la République populaire révolutionnaire de Guinée (instituée en 1979) devient République de Guinée. Un an plus tard, Lansana Conté opte pour le libéralisme et met fin à l’économie étatisée instaurée en 1967. En janvier 1986, le franc guinéen est rétabli, et le syli, qui l’avait remplacé en 1972, tombe dans les oubliettes. Honnie par les employés du public, mais saluée par ceux dont les initiatives avaient été muselées pendant la Ire République, la libéralisation a mis fin au repli du pays sur lui-même qui s’était installé au fil des années Sékou Touré : tout ce qui venait de l’étranger était alors considéré comme suspect, et les membres de la diaspora qualifiés d’« anti-guinéens ». Cette ouverture économique s’est cependant rapidement accompagnée d’une forte corruption, et il faudra attendre longtemps avant que le climat des affaires soit amélioré et mieux réglementé. La Guinée est cependant parvenue à se hisser au 153e rang sur 190 pays étudiés dans le rapport « Doing Business » 2018 de la Banque mondiale sur la facilité à y faire des affaires, alors qu’elle émargeait encore au 173e rang sur 183 dans l’édition 2010.
La tentation de s’éterniser au pouvoir
La libéralisation a peu modifié la structure de l’économie, dominée par le secteur minier, qui représente environ 47 % du PIB. Seuls les partenaires ont changé, avec une présence accrue des Chinois, actifs dans de nombreux secteurs. L’agriculture, l’élevage et la pêche produisent davantage. Les infrastructures de transport, l’accès à l’eau potable, à l’électricité, aux télécommunications, à l’éducation et à la santé ont été améliorés. Pourtant, les inégalités sociales se sont creusées, et beaucoup reste à faire. Aux hiérarchisations caractéristiques des sociétés traditionnelles peules et malinkées, fondées sur un système de castes, est venu s’ajouter un clivage par l’argent, accentuant les inégalités entre d’un côté une poignée de riches toujours plus riches, et de l’autre une grande majorité de pauvres jamais moins pauvres. Un faible niveau de développement humain que le pays peine à relever et qui se reflète dans les indicateurs sociaux. Dans le dernier rapport sur le développement humain, publié par le Pnud en mars 2017, la Guinée n’émargeait encore qu’au 182e rang sur 188 pays étudiés. Sur le plan politique, les changements ont aussi leurs limites. Le multipartisme a été instauré en 1990, d’abord limité à deux formations politiques, puis sans restriction de nombre, en avril 1992. Cependant, les pratiques démocratiques ont eu du mal à s’ancrer, symbolisées par la tentation des présidents de s’éterniser au pouvoir. Au temps du parti unique, Sékou Touré, élu en 1961, s’est fait réélire en 1968, 1974 et 1982. Lansana Conté avait lui aussi pris goût au pouvoir et fait modifier la Constitution, en 2001, pour obtenir un nouveau mandat et en allonger la durée. L’actuel chef de l’État, Alpha Condé, sera-t-il tenté à son tour de changer les règles du jeu pour briguer un troisième mandat? Parmi les points positifs à souligner, le retour au régime civil, avec, en 2010, l’élection d’Alpha Condé à la présidence (le seul, avec Sékou Touré, à ne pas être issu de l’armée) et la fin des nombreux coups d’État ou tentatives de putsch. C’est par la force que le colonel
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TEMPS FORTS 1958 (2 octobre)
L’indépendance, proclamée à la suite du référendum du 28 septembre par lequel le peuple guinéen se prononce à 95 % contre son intégration à la Communauté française, instituant des républiques africaines autonomes placées sous le contrôle de la France. Ahmed Sékou Touré devient président.
1984 (26 mars)
Mort de Sékou Touré, suivie, le 3 avril, par le coup d’État militaire des colonels Diarra Traoré et Lansana Conté, lequel est nommé président.
2008 (22 décembre)
Décès de Lansana Conté, suivi quelques heures plus tard par une annonce télévisée du capitaine Moussa Dadis Camara, qui suspend la Constitution. Le 23 décembre, Dadis Camara devient chef du Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD), et, le lendemain, autoproclamé président, il promet des élections « libres, crédibles et transparentes » en décembre 2010.
Lansana Conté avait pris le pouvoir en 1984, tandis que le capitaine Moussa Dadis Camara s’était autoproclamé président en 2008 (voir chronologie).
Amnésie collective
1976 (juillet)
Arrestation de Diallo Telli, l’ancien ministre de la Justice, qui fut le premier secrétaire général de l’OUA (19641972). Emprisonné au camp Boiro, où il meurt le 1er mars 1977, il est l’une des nombreuses victimes de la vague d’arrestations engagée en 1961 par l’exécutif contre de présumés complotistes peuls.
1990 (23 décembre)
La nouvelle Constitution instaurant le multipartisme est adoptée par référendum. Elle ne sera promulguée que le 23 décembre 1991. À l’issue de la première présidentielle pluraliste, le 19 décembre 1993, Lansana Conté est élu.
2009 (28 septembre)
Répression par l’armée d’une manifestation organisée au stade de Conakry par l’opposition pour protester contre la candidature du général Dadis Camara à la présidentielle. Bilan : 160 morts et de nombreux blessés. Le 3 décembre, après que Moussa Dadis Camara a été grièvement blessé, puis hospitalisé au Maroc, le général Sékouba Konaté est chargé d’assurer l’intérim de la présidence et de diriger la transition.
Avec le multipartisme, la liberté d’expression et les droits humains ont fait des progrès, mais les répressions, souvent sanglantes, ont marqué l’évolution du pays (lire p. 90 et p. 110). On se souvient de la répression de la grève lancée en janvier 2007 pour protester contre la corruption et les détournements de deniers publics, comme de celle du 28 septembre 2009, tout aussi meurtrière, qui a mis fin à la manifestation organisée au stade de Conakry par l’opposition pour protester contre la candidature de Dadis Camara à la présidentielle. Parmi les ratés, le plus terrible est le silence qui entoure de plus en plus les exactions commises sous la présidence de Sékou Touré. Des lieux de mémoire d’une sinistre période qui a duré près de vingt ans, comme le camp Boiro, aux manuels d’histoire, peu diserts sur cette époque, tout semble être fait pour gommer le souvenir des nombreuses victimes des prétendus complots mis en avant par Sékou Touré. Une Commission Dialogue et Réconciliation, que certains voulaient élargir aux exactions commises sous Lansana Conté, a été mise en place. Mais bien des tortionnaires de la Ire République n’ont jamais été jugés, alors que l’image de héros de Sékou Touré devient une référence chez certains jeunes et intellectuels en mal de repères de la période des indépendances (lire pp. 106-108). Cette amnésie collective est pesante et dangereuse. Car comment peut-on tourner la page d’un livre que l’on n’a pas lu? Outre la difficulté à dépasser le traumatisme qu’a constitué la Ire République pour nombre de Guinéens, l’autre risque, pour le pays et la sous-région, est de voir se pérenniser la culture de la violence et de l’impunité. Les jeunes de la diaspora, qui compte dans ses rangs de nombreux Peuls, grandes victimes du régime de Sékou Touré, pourraient bien briser ce silence. Leur force? Les réseaux sociaux et le souhait d’investir dans leur pays. Lequel, sur le papier, figure désormais parmi les plus riches d’Afrique de l’Ouest. L’espoir repose aussi sur les nouvelles générations. Engagées dans des mouvements citoyens, plus combatives et mieux organisées que leurs aînés, elles ne connaissent pas la peur dans laquelle vivaient leurs parents pendant et au sortir de la Ire République. Comme aime à le souligner une artiste guinéenne, qui a confiance en l’avenir de son pays : « La Guinée ressemble à une chenille. On ne connaît pas encore les couleurs du papillon qu’elle deviendra, mais le potentiel est là. »
2013 (28 décembre)
2010 (15 novembre)
Alpha Condé est déclaré élu avec 52 % des suffrages exprimés, après un premier tour le 27 juin et un second tour le 7 novembre 2010, au terme de la transition dirigée par le général Sékouba Konaté. Premier président élu démocratiquement de l’histoire du pays, il sera réélu en octobre 2015.
Première victime de l’épidémie du virus Ebola, que l’OMS ne déclarera terminée que le 29 décembre 2015. Cette crise sanitaire a causé 2 544 décès sur 3 814 cas et a évidemment eu de lourdes conséquences économiques. Depuis, la Guinée consacre 5 % de son PIB à la santé, soit le double de ce qu’elle y consacrait avant la crise d’Ebola.
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Performances publiques CHIFFRES CLÉS
GUINÉE MINES
+176 %
MINISTÈRE DES MINES ET DE LA GÉOLOGIE
La Guinée est devenue le 3e producteur mondial de bauxite avec un secteur minier catalyseur de la transformation structurelle de l’économie du pays La Guinée a réussi la relance de son secteur minier grâce à des réformes profondes réalisées sur plusieurs années autour d’une nouvelle politique de développement du secteur. Des investisseurs de divers horizons sont présents dans le secteur minier guinéen notamment de Grande Bretagne, de Russie, de Chine, des Émirats arabes unis, des États-Unis, d’Australie, etc. Le Gouvernement guinéen encourage la venue de tous investisseurs crédibles avec un projet mutuellement avantageux.
Situation du secteur minier
SECTEUR MINIER : DU POTENTIEL À LA RÉALITÉ ! La contribution du secteur minier guinéen dans le PIB (produit intérieur brut) est de 22,71 % et le secteur contribue à plus de 80 % en devises étrangères (euros, dollars) dans l’économie du pays. Le secteur minier guinéen représente aujourd’hui environ 90 % des recettes d’exportations avec un taux de croissance de 33,5 % en 2016. 7 milliards de dollars d’investissements sont prévus entre 2016 à 2020 avec plus de 15 000 emplois créés pour la main-d’œuvre locale. Étant donné les activités de plusieurs sociétés minières dans l’exploitation de la bauxite, la production bauxitique pourrait passer de 47 millions de tonnes à l’heure actuelle à plus de 80 millions de tonnes par an à l’horizon 2020.
22,71% du Produit Intérieur Brut de Guinée
PUBLI-INFORMATION
7
milliards de dollars d’investissements entre 2016 et 2020
80
millions de tonnes de bauxite produite par an d’ici 2020
Le secteur minier guinéen a connu au cours de la dernière décennie une embellie engendrée par la mise en œuvre de réformes profondes parmi lesquelles on peut citer la modernisation du cadastre minier, la révision du cadre légal et réglementaire, la mutualisation des infras frastructures connexes aux mines, la création d’un Guichet unique pour les permis et autorisations, la transpareence à travers la publication des con ntrats, la conformité à l’Initiative pou ur la Transparence dans les Industriess Extractives (ITIE), ainsi que l’adoption n d’une politique de Responsabilité Socciétale des Entreprises (RSE) et de promotion du contenu local dans le sectteur ont permis d’enregistrer des progrès considérables. Ces réformes ont été reconnues par les partenaires de la Guinée dont la Banque B mondiale, qui l’a classé parrmi les 5 pays les plus réformateurs au monde, contribuant à l’acccroissement de la confiance des inveestisseurs. Grâ âce aux réformes entreprises, le pay ys a réussi à passer de moins de 20 millions de tonnes de bauxite exp portées en 2014 à 47 millions en 201 17. Ce qui a fait passer le pays de la 7e place mondiale à la 3e place derrrière la Chine, l’Australie et dev vant le Brésil.
PRODUCTION DE BAUXITE EN TONNES
2010
2017
17 MILLIONS
47 MILLIONS
+200 % EMPLOIS DIRECTS CRÉÉS
2010
2017
5 000
15 000
Plus de 15 000 emplois directs ont été créés au cours des dernières années. A cela s’ajoutent de nouvelles opportunités pour les PME locales, même si des efforts restent à faire dans ce domaine. Ces réformes ont également permis de mobiliser plus 7 milliards de dollars dont 3 milliards en cours d’investissements.
Secteur minier : catalyseur de l’économie guinéeene La mission assignée au secteur par le Président de la République, dès son élection en 2010, a été de jouer effectivement son rôle dans la transformation de l’économie nationale. Le développement du secteur minier en soi ne permet pas d’avoir l’impact ambitionné en termes de création d’emplois et de réduction de la pauvreté. Cependant, les investissements enregistrés par le secteur devraient permettre de doter le pays de nouvelles infrastructures pouvant être utilisées pour développer d’autres secteurs durables dont l’agriculture. C’est aussi à travers, la promotion du contenu local, que le secteur minier développe le tissu de compétences guinéennes et des PME locales pour un véritable développement économique à la base. Les communautés bénéficient d’une partie des emplois locaux et de l’investissement direct des sociétés dans les projets communautaires dans le cadre de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Au niveau de l’État, la contribution au développement à la base doit se
Abdoulaye Magassouba Ministre des Mines et de la Géologie
faire à travers une meilleure utilisation par les collectivités des contributions pour le développement local faites par les sociétés minières. Pour ce faire, un mécanisme de gestion rigoureuse et transparente des ressources du Fonds de Développement Economique Local (FODEL), a été mis en place. L’opérationnalisation du Fonds National de Développement Local (FNDL) dans le cadre du transfert de 15 % de la totalité des recettes minières du pays aux collectivités locales a aussi été engagée. Enfin, l’utilisation des revenus miniers futurs pour le financement d’infrastructures prioritaires permet de garantir que ces revenus servent à poser les bases du développement de la Guinée, comme dans le cas de l’accord-cadre avec la Chine et d’autres accords en cours de négociations, notamment avec la Banque mondiale.
Défis du secteur minier La gestion des impacts sociaux, économiques et environnementaux du secteur minier est le plus grand défi. C’est dans ce cadre que le Gouvernement a adopté une réglementation appropriée pour la prise en charge de l’impact environnemental et renforcer les capacités de l’administration pour une application plus efficace de cette réglementation. En outre, une évaluation par une firme internationale indépendante de la qualité de la conception et de la mise en œuvre des plans de gestion environnementale et sociale
des sociétés a été réalisée. Un suivi des résultats de cette évaluation, a été engagé, en étroite collaboration avec le Ministère en charge de l’Environnement. Aussi, un comité national plurisectoriel a été créé, afin de gérer le processus de compensation des impacts des sociétés minières sur la biodiversité et les écosystèmes. Ce comité travaille actuellement à l’élaboration d’une stratégie nationale de compensation.
Un des chantiers phares du Président de la République : la transformation des ressources minières sur place. Un défi à relever pour la Guinée. Au-delà des mesures spécifiques prises pour une meilleure gestion des impacts, il s’agit de promouvoir le développement intégré et durable des zones minières. Avec l’appui de la Banque mondiale, un projet ayant pour objectif de maximiser les opportunités de développement socio-économique par la création d’activités économiques
Ministère des Mines et de la Géologie Immeuble OFAB - Boulevard du Commerce Kaloum - BP : 295 - Guinée Conakry Tél. : +621 69 58 58 / +620 95 11 95
Il a été auditeur, puis directeur de gestion de projets à KPMG, avant de créer sa propre firme de Consultant avec laquelle il a réalisé des études et recherches
pour la Banque Africaine de Développement, ONUSIDA, France Expertise Internationale, le Centre du Commerce International des Nations Unies etc. Il a aussi travaillé sur la conception et la mise en œuvre de divers projets et programmes financés par des bailleurs de fonds (Banque mondiale, PNUD, BAD etc.) dans de nombreux secteurs. Avant son entrée au Gouvernement en janvier 2016, Magassouba a été pendant 3 ans Conseiller du Président Alpha CONDE en charge de la supervision des dossiers prioritaires des mines, de l’énergie et de l’agriculture. Il a à ce titre, activement participé au montage du projet hydroélectrique de Souapiti, au pilotage de la réforme du secteur de l’énergie, et au montage de dossiers miniers comme le projet GAC (avec Abu Dhabi) et le Simandou Sud. Abdoulaye Magassouba est titulaire d’un master en économie du développement de l’université Williams Collège (USA) grâce à la prestigieuse bourse Fulbright du gouvernement américain.
autres que minières (agriculture, pêche, industrie, énergie, infrastructures diverses, etc…) a été initié. La promotion de la transformation des ressources minières sur place est un autre défi important pour la Guinée. C’est l’un des chantiers phares du Président de la République, et dont la réalisation fait partie des priorités du Premier Ministre, afin d’accroître la valeur ajoutée locale, créer plus d’emplois qualifiés et faire contribuer le secteur au développement industriel de la Guinée. Plusieurs projets de raffinerie d’alumine sont envisagés. La relance de la production de l’usine d’alumine de Friguia après plus de 5 ans d’arrêt, est aujourd’hui effective.
L’insuffisance de main d’œuvre locale qualifiée demeure un défi important. En plus des efforts fournis par les sociétés, l’état a engagé un vaste programme portant notamment sur la construction des Ecoles Régionales des Arts et Métiers, le projet de transformation de l’Institut Supérieur des Mines et de la Géologie de Boké en Centre d’Excellence et le renforcement des capacités des cadres et agents de l’administration minière. Enfin, le pays a besoin de diversifier sa production minière. Un accent particulier est mis sur la recherche afin que la production de nouvelles substances assure une meilleure résilience du secteur face aux turbulences des marchés internationaux.
> www.mines.gov.gn
DIFCOM/DF - PHOTOS : DR.
Visite à la CBG, de Son Excellence, Monsieur le Président de la République de Guinée et de Monsieur le Ministre des Mines et de la Géologie, lors des travaux de prolongement du quai minéralier de Kamsar.
Magassouba a passé plus de 15 ans dans le secteur privé, principalement dans la firme d’audit et de conseil KPMG, avant d’entrer dans l’administration publique. Il y a acquis une expertise en conception, gestion et évaluation d’entités et de projets publics et privés dans les secteurs des mines, de l’énergie, de la santé, des banques et assurances, du renforcement des capacités institutionnelles et du développement local.
Grand format GUINÉE 1958-2018 Lire aussi l’interview d’Aliou Barry, chercheur et consultant, l’un des auteurs, sur www.jeuneafrique.com
FIDH
À LIRE, À VOIR
Mémoire vive
Cet ouvrage est entièrement disponible en libre accès sur www.memoirecollective-guinee.org
CHRISTOPHE BOISBOUVIER
L
’
ouvrage Mémoire collective. Une histoire plurielle des violences politiques en Guinée part de l’idée simple et terrible que la mémoire des crimes est enfouie au plus profond de la terre guinéenne. Pour une fois, les deux principales forces politiques du pays sont d’accord, ou presque. « La violence est une culture politique dans notre pays », déplore Tibou Kamara, conseiller spécial du président Alpha Condé. Le député d’opposition Fodé Marega, de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), accuse tous les successeurs de Sékou Touré d’avoir sciemment organisé une « amnésie » sur les crimes du passé, y compris Alpha Condé, pourtant lui aussi victime du premier président de la Guinée indépendante. Pourquoi la Guinée a-t-elle « scellé un pacte de silence avec son passé », comme le dit un diplomate en poste à Conakry? Bien sûr, il y a la double personnalité de Sékou Touré, l’homme qui a dit non à de Gaulle et s’est
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jeuneafrique no 3012 du 30 septembre au 6 octobre 2018
ensuite comporté comme un tyran sanguinaire. Mais l’écrivain Tierno Monénembo va plus loin : « Les dictateurs humilient, et ce n’est pas facile de parler de sa propre humiliation. » Dans cet ouvrage collectif de 356 pages, réalisé, sous la coordination de Laurent Correau, par sept journalistes de RFI, huit universitaires guinéens et français, et deux chercheurs de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), les épisodes les plus dramatiques de l’histoire guinéenne sont revisités grâce à de nouvelles archives et aux témoignages inédits de bourreaux et de rescapés, aussi bien à l’époque du sinistre camp Boiro de Sékou Touré que lors du massacre du 28 septembre 2009 (lire p. 110), sous le régime ubuesque de Moussa Dadis Camara.
Réconciliation par l’oubli
« À la violence de l’État s’est substituée une violence populaire contre l’État », estime le socio-anthropologue Alpha Amadou Bano Barry.
« Face à des jeunes ultraviolents dans certains quartiers, les policiers ont souvent peur », témoigne l’un d’eux sous le couvert de l’anonymat. De retour de Siguiri, où un commerçant peul a été tué à coups de machette lors de la campagne électorale de 2010, l’historienne Safiatou Diallo dénonce, elle, le poids de l’ethnicité dans beaucoup d’explosions de violence. « Il est grave de constater que l’ethnie sert d’argument déterminant pour des discours politiques épuisés et souvent vides de sens », écrit-elle. Mémoire collective constate que la mémoire guinéenne n’est pas encore collective. Elle est fragmentée, cachée. D’où la volonté des auteurs de contribuer au chantier de la construction de cette mémoire. Pas simple quand les autorités semblent prôner la réconciliation par l’oubli. Les auteurs du massacre de septembre 2009 seront-ils jugés un jour ? « Si on ne met pas un peu de lumière sur notre passé, comment avoir la lumière sur notre avenir ? », lance Tierno Monénembo.
Performances publiques GUINÉE
CHIFFRES CLÉS
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MÉDIAS : les grands chantiers de la modernisation et de la professionnalisation
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Aussitôt nommé à la tête du département, le tout nouveau Ministre de l’Information et de la Communication, Amara Somparé, a engagé une politique de grandes réformes dans le secteur. Sur la même lancée, le Ministre envisage la création d’un Institut Supérieur de l’Audiovisuel qui va accompagner la transition numérique. Par ailleurs, la mise en place d’une redevance pour financer les médias de service public et ce nouvel Institut est envisagée.
Amara Somparé Ministre de l’Information et de la Communication Après l’obtention de son baccalauréat en Option Mathématiques à l’Institution Sainte-Marie de Conakry, Amara Somparé a suivi des études à Grenoble en France où il a obtenu un DESS en Politique Économique et Sociale. Après un passage au Prince’s College de Londres et où il sera diplômé de la London Chamber of Commerce and Industry (LCCI), Amara Somparé revient en Guinée et acquiert plus de huit années d’expérience dans les métiers de la chaîne d’approvisionnement des entreprises minières (Supply Chain management) et la gestion logistique.
et des Délégations de Service Public en septembre 2014. Il y sera notamment chargé de se prononcer sur la pertinence, la régularité et la sincérité du processus de passation des marchés et délégations de service public afin de préparer et de soumettre à l’approbation de l’Administrateur Général des Grands Projets et des Marchés Publics les Avis de Non Objection sur chacune des étapes de la procédure.
À la suite de la réforme du Cadre Institutionnel des Marchés Publics, il est nommé Directeur du Contrôle de la passation des Marchés Publics
Depuis mai 2018, Amara Somparé est Ministre de l’Information et de la Communication de la République de Guinée.
I
l s’agit, d’abord, de la réforme du cadre institutionnel de la presse, qui comprend plusieurs éléments : élaboration d’un code de la presse, respect des règles de déontologie et modification du statut de la RTG. La deuxième grande réforme concerne l’amélioration du cadre de la publicité avec l’évolution du statut de l’Office Guinée de Publicité, appelé
à devenir un organe de régulation de cette activité. L’objectif est de définir un code normatif de la publicité afin de promouvoir une régulation plus adaptée à l’environnement actuel. A ce titre, un nouveau directeur général a été nommé par décret du Président de la République : il travaille activement sur le terrain, aux côtés de son ministre de tutelle, pour mener à bien cette réforme cruciale.
L’autre grand volet des réformes concerne la migration de l’analogique vers le numérique et la mise en place d’un cadre de concertation permanent entre la presse publique et la presse privée. Au vu de l’ampleur de la tâche à accomplir, le Ministre a mis les bouchées doubles et ne ménage aucun effort pour la modernisation si essentielle du secteur de l’information et de la communication. Sur le terrain, on enregistre déjà la création du comité de suivi et de coordination du processus de transition numérique, instauré par le décret du Président de la République en date du 12 Juin 2018. A l’actif de ce comité, il convient de mentionner : l’élaboration des termes de référence pour le recrutement d’un cabinet d’experts, d’un plan national de numérisation et de l’étude de marché ; ainsi que la relance de la requête de financement auprès d’EximBank Chine et la désignation du coordinateur général du Projet.
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RADIOS
COMMUNAUTAIRES
RADIOS
RURALES
CHAÎNES DE TÉLÉVISION
Pour ce qui est de la professionnalisation des médias, le Ministre envisage de mettre en place un cadre permanent de concertation entre la presse publique et la presse privée. Il s’agira de faire cohabiter, autour de cette table, médias de service public et privés dans l’intérêt supérieur de la nation, étant entendu que les citoyens ont droit à une information plurielle et de qualité. Cette démarche est d’autant plus pertinente que le paysage médiatique guinéen comprend une quarantaine de radios commerciales, une trentaine de radios communautaires, six chaînes de télévision, une presse en ligne et écrite abondante et des réseaux sociaux. Les associations de presse adhèrent à cette initiative du Ministère. L’Union des Radios et Télévisions Libres de Guinée (URTELGUI) évoque une grande première et appelle ses membres à soutenir l’initiative. L’Association Guinéenne de la Presse en Ligne (AGUIPEL), le Syndicat de la Presse et d’autres associations apportent leur soutien à la mise place de ce cadre permanent. De son côté, la Haute Autorité de la Communication soutient le projet. Au regard de l’immensité des défis à relever, le Ministre entend s’appuyer sur la volonté politique déjà affirmée et sur la détermination de l’équipe qui l’accompagne.
Ministère de l’Information et de la Communication Conakry - Kaloum Boulbinet - BP 617 Guinée Conakry - Tél.: +224 626 563782 E-mail : infocommunication.gov.gn
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MINISTÈRE DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION
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Pont rénové sur le Rio Nunez, dans la région de Boké.
DÉVELOPPEMENT
Routes, énergie, éducation, santé… Nombreux sont les chantiers engagés par le président Condé pour tenter de pallier les déficits du pays avant le terme de son deuxième quinquennat, en 2020.
Autosuffisance alimentaire
DIAWO BARRY, à Conakry
orsqu’il accède au pouvoir, le 21 décembre 2010, Alpha Condé hérite d’un pays en lambeaux : routes défoncées, manque d’électricité et d’eau courante, lourd déficit en infrastructures de base pour l’éducation et la santé. Ses deux quinquennats vont-ils lui permettre de faire accéder le pays aux progrès auxquels il a appelé pendant ses quarante années dans l’opposition ? Bitumage d’axes routiers, nouvelles infrastructures dans les secteurs de l’énergie, des mines et de la logistique, construction d’hôtels, d’immeubles de bureaux… Les chantiers se multiplient dans la capitale (lire pp. 94-95) et dans les régions. Preuve que l’économie se relève de l’épidémie d’Ebola (2013-2015) et de la chute des cours des matières premières (2014-2015). Avec la hausse de la production de bauxite et d’or, les investissements dans les infrastructures et la bonne résistance de l’agriculture, la croissance du PIB a dépassé 6,6 % en 2016, en 2017 et, selon les projections du FMI, devrait s’établir aux alentours de 5,8 % en 2018.
L
Complexe hydroélectrique
L’un des chantiers les plus emblématiques de cette relance est celui du complexe hydroélectrique de Souapiti (550 MW). Sa mise en service partielle dès 2019 permettra de réduire le déficit en électricité en saison sèche, estimé à 400 MW. Le barrage et sa centrale sont construits, pour 1,2 milliard d’euros, par China International Water and Electric Corporation, déjà maître d’œuvre du complexe hydroélectrique de Kaléta, entré en service en 2015 (240 MW, 380 millions d’euros).
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YOURI LENQUETTE
Les défis d’Alpha
LA CROISSANCE DU PIB A DÉPASSÉ 6,6 % EN 2016 ET EN 2017. ELLE DEVRAIT S’ÉTABLIR, SELON LE FMI, AUX ALENTOURS DE 5,8 % EN 2018.
L’un des principaux défis que s’est fixés Alpha Condé est de permettre au pays d’atteindre l’autosuffisance alimentaire en investissant dans l’agriculture. Depuis 2011, les paysans peuvent bénéficier d’engrais à des prix subventionnés, et, depuis 2016, une double initiative présidentielle met l’accent sur deux cultures de rente: le café arabica et l’anacarde. L’objectif est évidemment de déployer deux filières qui permettent aux exploitants guinéens de vivre de leur production et au Trésor public de faire rentrer des devises. Le chef de l’État a déjà fait importer du Rwanda 1 tonne de semences d’arabica, confiées à l’Institut de recherche agronomique de Guinée et dont les plants sont distribués gratuitement aux exploitants depuis le mois de juillet.
Aménagement régional
Une sorte de « municipalisation accélérée », à l’image du plan d’aménagement des territoires développé au Congo, couplée à la délocalisation de la célébration de la fête
DONKA, UN HÔPITAL AU MEILLEUR DE SA FORME Il était urgent que l’hôpital national Donka se rétablisse. Déjà, en 1996, le réalisateur belge Thierry Michel avait fait un minutieux état des lieux de ce centre hospitalier universitaire (CHU) dans son documentaire Donka, radioscopie d’un hôpital africain. En 2013, le blogueur Alimou Sow le décrivait comme « un grand corps malade ». Mais il aura fallu que le pays soit confronté à l’épidémie d’Ebola, de décembre 2013 à décembre 2015,
pour mesurer la vulnérabilité de son système sanitaire, notamment celle de son plus grand hôpital public, construit en 1959 par les Soviétiques. Dans le cadre du renforcement des structures de santé, il fait l’objet, depuis octobre 2015, d’une importante opération de rénovation-extension financée par le Fonds saoudien pour le développement et par la Banque islamique de développement (BID) à hauteur de 74 millions de dollars, dont
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nationale, a permis d’améliorer les routes et les équipements de quelques localités dans les régions de Boké, Mamou, Nzérékoré et Kankan (marchés, écoles, centres de santé, palais de justice, maisons de jeunes…). Mais la plupart des régions accusent encore de lourds déficits, surtout en matière de routes et d’électricité, et quelques chantiers tardent à être achevés. Par ailleurs, certains dysfonctionnements persistent, tels que l’octroi de marchés de gré à gré.
Dans le hall de l’université Kofi-Annan-de-Guinée (Ukag), à Conakry.
Extension des universités
Faute de places suffisantes dans les établissements d’enseignement supérieur publics, l’État offrait depuis 2006 des bourses à une bonne partie des étudiants qu’il orientait dans le privé. Depuis la rentrée
32 millions pour les travaux de génie civil et 28,8 millions pour la formation du personnel et les équipements, parmi lesquels un plateau technique moderne (IRM, scanner, échographie, mammographie, blocs opératoires, etc.), 600 lits, 350 toilettes, une station d’épuration, une buanderie, des ascenseurs, des espaces verts, des parkings… Selon le Dr Aboubacar Conté, directeur national des hôpitaux et coordinateur du projet, 95 % des travaux ont été exécutés. À l’œuvre,
deux entreprises de BTP sélectionnées sur appel d’offres international : l’italienne Piccini, chargée de la réalisation du lot 1, et la guinéenne Société africaine de commerce, de construction et de financement (Saccof), pour le lot 2. Selon le PDG de la Saccof, Redwan Saad, la livraison de ce dernier, qui concentre 70 % des bâtiments à rénover et comprend la construction d’une deuxième morgue, a été quelque peu reportée à cause du retard des travaux de voirie, confiés à
académique 2017-2018, le gouvernement a stoppé cette « hémorragie financière », estimée à 1450 milliards de francs guinéens (plus de 135 millions d’euros) pour investir dans l’extension des universités publiques du pays. Des travaux sont en cours à l’université Gamal-Abdel-Nasser de Conakry et au centre universitaire de Labé. Ceux de l’université Général-Lansana-Conté de Sonfonia-Conakry et des instituts d’enseignement supérieur de Boké et de Nzérékoré commenceront avant la fin de cette année. Parmi les autres avancées: le recensement biométrique des étudiants et des enseignants, ainsi que la revalorisation des salaires. Des efforts restent indispensables pour promouvoir la recherche et améliorer la qualité de l’enseignement secondaire, marqué par un taux d’échec au baccalauréat d’environ 70 % ces deux dernières années.
État de droit et sécurité
Alpha Condé se plaint d’avoir hérité d’un pays et non d’un État. Ses détracteurs lui reprochent d’avoir échoué à en construire un. Ils estiment que, en dépit des réformes, une certaine impunité perdure et que les infrastructures judiciaires et pénitentiaires, vieillissantes, sont inadaptées. Reste que les forces de défense et de sécurité – auxquelles on doit la répression sanglante des mouvements de grève de 2007 et le massacre du 28 septembre 2009 (lire p. 110) – ont été profondément réformées. « Une vraie révolution », selon le général français Bruno Clément-Bollée, ancien patron de l’opération Licorne en Côte d’Ivoire. Désormais, la place des militaires est dans les casernes.
Piccini. Désormais, l’objectif est de doter d’un CHU les chefs-lieux des quatre régions naturelles du pays. Selon le Dr Aboubacar Conté, les projets ont obtenu un financement de 35 millions de dollars de l’Eximbank de Chine, et les dossiers d’appel d’offres ont été bouclés pour Nzérékoré (Sud-Est) et Kankan (Est). Suivront Kindia et Labé, qui, chacune, accueilleront à leur tour un hôpital de 130 lits et un amphithéâtre de 250 étudiants. D.B.
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VINCENT FOURNIER/JEUNE AFRIQUE-R
Parmi les nouvelles réalisations : la très chic Cité internationale Plaza Diamant, dans le quartier de Kipé…
Conakry se refait une beauté Outre les investissements publics, des dizaines de millions d’euros ont été injectés par des opérateurs privés dans des projets immobiliers qui ont transformé la capitale. DIAWO BARRY
n 2013 était inauguré, à Dixinn, le Palm Camayenne, premier cinq-étoiles du pays, ouvert par la filiale équatoguinéenne du groupe espagnol Unicon. L’année suivante, ce fut le tour du Millenium, également situé sur la corniche nord. Le Sheraton Grand Conakry (de l’américain Starwood), dans le quartier résidentiel de Kipé, et le Noom Hotel, à Kaloum, porté par le holding sénégalais Teyliom, ont ouvert leurs portes à la fin de 2016, suivis par le Kaloum et par l’hôtel-résidence Onomo, récemment inauguré à l’entrée de Kaloum, sur la corniche sud, mais aussi par le Niger et l’Azalaï (en cours de construction), auxquels viendront
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s’ajouter, dans un an, les tours du Weily Kakimbo (lire encadré p. 95). Depuis 2010, la capacité d’hébergement hôtelier de la capitale guinéenne a doublé : elle atteint actuellement 5 052 chambres pour 410 établissements, et plus de 200 milliards de francs guinéens (18,65 millions d’euros) y ont été investis. « Auparavant, on ne pouvait même pas accueillir trois chefs d’État en même temps, et nos hôtes étaient obligés de faire l’aller-retour », constate Mamadou Aliou Barry, directeur des aménagements au ministère du Tourisme. Désormais, entre l’hôtel Kaloum, construit à quelques pas du palais présidentiel, l’Onomo et le Palm Camayenne, jusqu’au Sheraton, dans le nord de la presqu’île, les pouvoirs publics ont l’embarras du choix
pour accueillir dignement, en version quatre et cinq étoiles, les invités des festivités du 60e anniversaire de l’indépendance. D’autres projets ont transformé la capitale. À commencer par les appartements et villas de la très chic Cité internationale Plaza Diamant, à Kipé, à quelques pas du Sheraton, commercialisés depuis près de quatre ans par China Dreal Group. La capitale s’est par ailleurs dotée de son premier centre commercial, le Prima Center, ouvert fin 2015 par le groupe familial ivoirien Hyjazi (pour un investissement de 16 millions d’euros), ainsi que de sa première salle de cinéma et de spectacle, ouverte en janvier 2017 par le réseau CanalOlympia, du français Vivendi (Bolloré), dans la Bluezone de Kaloum.
Habitat précaire
Capitale-presqu’île, Conakry, malgré ces énormes changements, reste étouffée par ses nombreuses zones de constructions informelles et par
YOURI LENQUETTE
… l’hôtel Sheraton, également sur le littoral nord…
VINCENT FOURNIER/JEUNE AFRIQUE
… ou l’hôtel Noom, à Kaloum, sur la côte sud.
ses embouteillages. Hormis la route Fidel-Castro et la route Le-Prince, ses artères principales, qui la traversent d’est en ouest, la capitale a besoin d’être innervée par un réseau routier modernisé et étendu. Surtout, même si la tâche est particulièrement complexe, il va falloir que l’État et le gouvernorat poursuivent la politique d’assainissement et de viabilisation des quartiers ainsi que les opérations d’éradication de l’habitat précaire et de lutte contre l’occupation illégale des espaces publics.
TOURS SIAMOISES Avec ses tours siamoises de 27 étages et 106 m de hauteur chacune, réunies par un rez-de-chaussée commun, le Weily Kakimbo, en cours de construction à Ratoma (Bambéto), est devenu le point culminant de Conakry. Il abrite un total de 250 appart-hôtels de tailles différentes. Le 26e étage de chacune des tours est réservé à une suite présidentielle, et leur 27e étage aménagé en espace public. Le nouveau complexe hôtelier, dont le chantier a démarré en 2012 sur le flanc droit du ravin de Kakimbo et en amont du plateau de Koloma, devrait être inauguré en 2019. C'est un projet en partenariat public-privé financé par l'État guinéen (25 %) et par Cheng Jiin-Suey, alias Kim, un homme d'affaires taïwanais qui a des intérêts dans les mines, les matériaux de construction et l’industrie du bois. D.B.
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LAMINE GUIRASSY
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CHIFFRES CLÉS
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS
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DE 43 301 KM DE ROUTES
Travaux publics : remettre les infrastructures routières au cœur du développement du pays L’effondrement, le 20 juin 2018, du pont de Linsan datant de 1932, a mis à nu l’état des infrastructures routières dans le pays et l’ampleur des défis à relever par le Président Alpha Condé qui a nommé, en mai dernier, un nouveau Ministre des Travaux Publics. Au même titre que l’énergie, les infrastructures routières constituent l’autre préalable essentiel pour ce pays dont les populations n’ont de cesse d’attendre de jouir des retombées économiques issues notamment de l’exploitation des mines.
D LE RÉSEAU ROUTIER GUINÉEN ATTEND LES INVESTISSEURS Le réseau routier guinéen couvre environ 43 301 km toutes routes confondues dont 2 346 km de routes nationales bitumées et 5.230 km de routes non revêtues. Sur l’ensemble de ce réseau, le pays dispose de nombreux ouvrages de franchissement répartis comme suit : 1 946 ponts en béton armé, 39 ponts métalliques, 31 ponts provisoires, 23 ponts bacs et 12 ponts en bois. De l’inventaire réalisé par la Banque de Données Routières (BDR) du Ministère des Travaux Publics, il a été inventorié sur les 8 tronçons de Routes Nationales revêtues, 155 ponts dont 103 grands ponts (longueur supérieure ou égale à 20 mètres) pour une longueur totale de 6.843 mètres linéaires et, sur les 13 tronçons de Routes Nationales en terre, 173 ponts dont 64 grands ponts pour une longueur totale de 3 122 mètres linéaires. À la suite d’une campagne d’inspection visuelle menées sur les routes nationales concernées, il ressort que, de l’état général des ponts sur les Routes Nationales revêtues, plus de 31 % sont en mauvais état et, 53 % en mauvais état sur les Routes Nationales en terre. Pour remettre en état tous ces ouvrages de franchissement, il faudra un financement global de trois cent deux millions soixante dix neuf mille deux cent (302 079 200 USD) Dollars US. Les investisseurs sont attendus à Conakry.
302 079 200 US$
de budget global nécessaire pour réhabiliter l’ensemble des ouvrages de franchissement sur les routes nationales de Guinée.
PUBLI-INFORMATION
ans le cadre de la mise en œuvre de la politique de grands projets de modernisaation des infrastructures initiée au port de Conakry, le Gouvernement guinéen vient d’accorder à un groupe turc, la concession du Port Autonome de Conakry. Cette con ncession visant à développer et oderniser les infrastructures du mo porrt va profiter au trafic de fret avec nterland, notamment le Mali. l’hin À y regarder de plus près, cette ncession rentre dans la logique con de la l nouvelle vision de développement des infrastructures routières. L’idéée centrale réside en ce que le Mali, grand pays enclavé, se doit d’avvoir pour port naturel Conakry. ur matérialiser et concrétiser Pou cettte vision, le Gouvernement a enpris la construction ou la reconstrep trucction des axes qui desservent n seulement le grand voisin non mais qui rapprochent davantage les régions du pays. Les voiries urbaines ne sont pas ur autant laissées pour compte. pou Il esst déjà commencé et également prévu la construction de 158,2 km de Voiries Urbaines à Conakry et à l’iintérieur du pays notamment 78 km à reconstruire dans la capitalee avec un projet (27 M$ obtenus nds Koweitien. Discussions avec Fon ou Dhabi 25 M$ et BID 52M$) de Abo
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DE 2 000 PONTS
4 échangeurs à Hamdallaye, Bambeto, Cosa et Enco5 pour fluidifier la circulation dans cette mégapole encombrée. Des travaux de voiries sont en cours ou prévus à Pita, Dalaba, Labé, Guéckédou, Siguiri, Beyla, Kouroussa, Kérouané, Kondébadou et Mandiana.
La Guinée veut réhabiliter ses ouvrages de franchissement vétustes et rattraper son retard dans la protection de ses infrastructures routières : Ce pays extraordinairement doté par la nature de nombreux cours d’eau se trouve obligé d’élever des ponts et ouvrages de franchissement pour permettre la liaison entre ses régions. Il y a quelques jours, le soulagement des populations suite à la mise en service à Kassonya (45 km de Conakry) d’un ponton qui a permis le désenclavement de 20.000 personnes prouve à suffire l’envergure des besoins en ouvrages de franchissement. Le nouveau Ministre l’a compris et a pris sur lui, de faire jouer les facilités de partenariat public privé autorisé par la nouvelle législation. Avec le concours de deux entreprises françaises et la BPI, 8 ponts seront construits à Diassa entre Kankan et Kérouané, à Faranah et Soya entre Mamou-Faranah, à Tanéné entre Conakry-Boffa, à Diaragbela sur
Moustapha NAITE Ministre des Travaux Publics
Depuis sa prise de fonction en mai 2018, Moustapha NAITE, nouveau Ministre des Travaux Publics a, dès le 11 septembre, procédé à la signature des contrats de réalisation des travaux sur les Routes Nationales N°1 et N°2. Le pont de Kassonya, avant et après travaux.
Le 26 Juillet 2018, à la suite d’une Communication, le Conseil des Ministres a autorisé le Ministre des Travaux Publics à relancer le processus de mise en place d’un système de pesage-péage sur l’ensemble du réseau routier national. Il faut dire que la Guinée, jusque-là, n’est toujours pas en règle vis-à-vis des recommandations de la CEDEAO en la matière en l’occurrence le Règlement 14 relatif au contrôle systématique de la charge à l’essieu dans tous les pays de la Communauté et ce, en dépit de la loi N° L/2016/074/AN portant protection du patrimoine routier qui a été adoptée par l’Assemblée Nationale et promulguée par le Président de la République et de ses Décrets et Arrêtés d’application.
assurant une plus grande longévité des routes, un accroissement des ressources pour l’entretien routier à travers le versement d’une partie des recettes de pesage-péage au Trésor Public pour le compte du Fonds d’Entretien Routier et bien entendu la création de nombreux emplois directs et indirects dans les zones d’implantation des postes de pesage-péage. Pour la transparence des contrats et rendre compte, directement, aux populations, Moustapha NAITE très présent sur les réseaux sociaux, a mis en place une cellule dynamique et interactive de communication ; ce qui lui vaut de temps en temps de nombreuses attaques des « activistes » prompts aux polémiques. « J’ai choisi d’échanger avec les populations sur les réseaux sociaux en toute connaissance de cause. Les critiques et les attaques font partie de la vie d’un homme politique et devraient, a priori, l’amener
d’échanger avec les populations sur les réseaux sociaux en toute connaissance de cause…» Le pont de Kaaka.
Ministère des Travaux Publics Boulevard du Commerce BP: 581 - Guinée Conakry Tél. : (00224) 629 39 29 39 @TravauxPublicsGN
Moustapha NAITE, Ministre des Travaux Publics donnant des explications sur une carte routière.
« J’ai choisi
En attendant la signature de la Convention, on apprend de sources avisées que c’est la société AFRIQUE PESAGE, un des leaders du domaine, qui sera en charge de la mise en place et de l’exploitation de ce système de pesage-péage sur le réseau routier national de la République de Guinée. À moyen et long terme, ce système permettra au pays de disposer d’une meilleure protection du réseau routier national à travers le contrôle de la charge à l’essieu
à mieux faire les choses…. » dit-il en nous expliquant les attaques liées au « nid d’oiseau » en référence au pont de Linsan reconstruit et dont l’effondrement avait coupé, pendant près de 3 mois, Conakry d’une bonne partie du reste du pays.
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la route Kouroussa-Kissidougou, à Bankou entre Telimélé-Fria, à Djelibakoro sur la route Sansandou-Kanakan-Siguiri et à Oule sur la route Nzérékoré-Yomou.
Ces travaux financés par la BID, la BADEA et le Fonds Koweitien permettront la reconstruction de 68,06 km de Dabola à Cissela ; de
Cissela-Kouroussa 82,94 km ; de Kissidougou PK63 à Guéckédou 18 k m et de Guéckédou à Kondébadou 35 km. L’autre volet de ce programme ambitieux des R outes Nationales est financé par la BAD pour CoyahForécariah-Farmoréah sur 75 km, Lola-Frontière Côte d’Ivoire sur 40 km et Coyah-Mamou-Dabola sur 370 km financé par la Chine dans le cadre d’un accord de prêt global.
Grand format GUINÉE
YOURI LENQUETTE
ANALYSES & DÉBATS
En janvier 2017, devant sa bibliothèque, alors encore en chantier.
Djibril Tamsir Niane Historien, écrivain et dramaturge
« Oui, nous sommes entrés dans l’Histoire » Grande figure universitaire de l’Afrique de l’Ouest, il a connu l’enthousiasme des premières années de l’indépendance, la prison sous Sékou Touré, puis l’exil. Il égrène ici ses souvenirs, tout en jetant un regard critique sur l’évolution de son pays et sur celle du continent.
Propos recueillis à Conakry par FRANÇOIS-XAVIER FRELAND
F
in avril, lors de la clôture de la manifestation Conakry, capitale mondiale du livre, Djibril Tamsir Niane a inauguré, en présence du président Condé, la première bibliothèque privée du pays. Construite juste en face de sa villa de toujours, à Belle-Vue, dans le quartier conakryka de la Minière, elle porte son nom. À lui seul, Djibril Tamsir Niane est la mémoire vivante de l’Afrique de l’Ouest. Aussi grand en taille et en notoriété qu’il est modeste et réservé, à 86 ans, il fait depuis longtemps partie des figures universitaires majeures de l’Afrique contemporaine, qu’il a d’ailleurs toutes côtoyées, tels le Sénégalais Cheikh Anta Diop, le Malien Amadou Hampâté Bâ ou le Burkinabè Joseph Ki-Zerbo, son ami, avec lequel il a codirigé la publication du volume IV de l’Histoire générale de l’Afrique, sous les auspices de l’Unesco. Si l’on évoque régulièrement l’histoire du Mandé et, en particulier, celle de l’empire du Mali, qui domina la sous-région du XIIIe au XVIIe siècle, c’est en grande partie grâce à l’immense travail de recherche de Djibril Tamsir Niane, compilé dans son ouvrage le plus célèbre, Soundjata ou l’épopée mandingue (lire p. 100). Après un diplôme d’études supérieures en histoire médiévale à l’université de Bordeaux, Djibril Tamsir Niane a participé au tout début de l’ère Sékou Touré à la grande réforme de l’enseignement. Il a notamment contribué à
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mettre l’histoire de l’Afrique au cœur des manuels scolaires. Mais son intégrité et sa franchise conduiront à son arrestation, en 1961, alors qu’il était membre du bureau du syndicat des enseignants. Il sera détenu au célèbre camp Boiro avant de recouvrer la liberté, quelques années plus tard, pour enseigner de nouveau à l’Institut polytechnique de Conakry, puis, en 1972, sera contraint de s’exiler avec sa famille au Sénégal, où il devint un proche conseiller de Léopold Sédar Senghor.
visite du général de Gaulle à Conakry, le 25 août 1958. Il a été bien reçu par Sékou Touré. À l’époque, j’étais jeune, je venais de terminer ma licence et me destinais à la recherche. Je me souviens que toute la ville de Conakry a été mobilisée pour acclamer de Gaulle. Pour nous, il était le sauveur de la France durant la Seconde Guerre mondiale. Oui, il a été vivement acclamé. Mais les paroles des deux hommes ont donné un tout autre tour à cette visite. Le ton du discours de Sékou Touré fut fort et ferme : « Nous préférons la liberté dans la pauvreté à l’esclavage dans l’opulence. » Après que la foule l’eut applaudi et eut hurlé sa joie, de Gaulle prit la parole et répondit calmement que l’indépendance était à la disposition de la Guinée, qu’elle pouvait la prendre le 28 septembre en votant « non ». C’était net. C’était la rupture. Comme on le sait, la France a tout fait par la suite pour faire échouer le projet politique de Sékou Touré. Dès 1959,
SOUNDJATA OU L’ÉPOPÉE MANDINGUE Ce récit épique retrace la vie de l’ancêtre du grand Manding et la genèse de cet empire du Mali, né en 1235 après la victoire de Soundjata sur le roi du Sosso (Soumahoro) à la bataille de Kirina. Il compile les travaux du mémoire de diplôme d’études supérieures de Djibril Tamsir Niane, pour lequel le médiéviste a collecté les récits et paroles des griots. La première édition de Soundjata ou l’épopée mandingue, parue en 1960 chez Présence africaine, a eu un succès
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phénoménal. En réhabilitant l’oralité, la parole africaine, il a constitué un tournant dans l’approche de l’histoire du continent. « À la soutenance de mon diplôme, j’ai dit : “Il y a des gens qui utilisent la parole et sont des spécialistes. Il y a un enseignement moral, structuré, donné par les griots aux jeunes griots. L’Afrique a une histoire, et elle est enseignée par les griots.” Ce fut un grand tournant », explique l’historien. F.-X.F.
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COSMOS
Jeune Afrique : Quels souvenirs avez-vous des premiers jours de l’indépendance ? Pr Djibril Tamsir Niane : Je me souviens d’abord de la
Le général de Gaulle à Conakry, le 25 août 1958.
les difficultés entre les deux pays commencèrent. La Guinée s’est dressée, elle est entrée en révolution. Elle a traversé de grandes épreuves, et le pouvoir de Sékou Touré s’est raidi. Il s’est maintenu au pouvoir durant vingt-cinq ans, un pouvoir dictatorial, sanglant. On vivait sur le quivive en permanence. Et, dans le même temps, on était en face d’une France hostile, qui ne baissa officiellement les armes qu’en 1978, lorsque le président Giscard d’Estaing fit une visite à Conakry. Quand la France s’est retirée, quelle a été l’atmosphère dans le pays ?
Au début, elle était formidable. Il y avait un grand enthousiasme. La Guinée était très agitée au temps de la lutte anticolonialiste, mais il n’y a pas eu d’actes de violence contre les Français résidant dans le pays. Après les élections, de Gaulle a demandé aux fonctionnaires français de rentrer en France. Cela a créé un vide, qui a été rapidement comblé : avec une grande joie, la Guinée a vu arriver des Russes, des Chinois, etc., des cadres venus d’ailleurs pour la soutenir et l’aider. C’était une nouvelle voie. Y compris pour le milieu universitaire, dont vous faisiez partie ?
L’indépendance était soutenue par tous ceux qui voulaient l’émancipation de l’Afrique. Et la Guinée a connu un formidable élan de solidarité africaine pour sauver son enseignement, menacé par le départ des fonctionnaires français, expressément demandé par de Gaulle. Les intellectuels africains sont venus spontanément en Guinée, et de nombreux enseignants, répondant à l’appel de
Association Professionnelle des Banques de Guinée - APB ENTRETIEN AVEC M. GUY LAURENT FONDJO Président de l’APB Guinée
JJe suis un dirigeant de banque passionné par le développep ment de notre continent et m animé par la volonté de contria buer à l’épanouissement et b a au bien-être des populations vvulnérables en mettant à leur d disposition des outils leur permettant de créer par eux-m eux-mêmes des richesses et de sortir durablement du cycle de la pauvreté. En ma qualité d’Administrateur Directeur Général d’Afriland First Bank Guinée, cela passe d’une part par l’appui à la promotion du secteur privé, la création d’une nouvelle classe de « champions » africains, capitaines d’industries et véritables chefs d’entreprises; et d’autre part par le financement des jeunes, des femmes et des couches défavorisées à travers les instruments de développement endogène que sont les MUFFA et MC2 dont j’accompagne depuis quelques années la mise en œuvre en Guinée. Par ailleurs, les responsabilités de Président de l’APB et de Président du Cadre de Concertation des Acteurs de la Finance Inclusive qui m’ont été confiées par mes confrères des secteurs bancaire et de la microfinance, m’interpellent à jouer un rôle transversal et systémique en rapport avec les partenaires de la place en vue de l’amélioration du niveau de bancarisation de la Guinée.
Présentez-nous s’il vous plaît l’Association Professionnelle des Banques de Guinée ?
COMMUNIQUÉ
L’Association Professionnelle des Établissements de Crédit de Guinée, en abrégé APB, est une organisation socio-professionnelle régie par la loi bancaire et regroupant l’ensemble des établissements de crédit exerçant leurs activités en République de Guinée. Elle a pour objet de représenter les intérêts collectifs des établissements de crédit notamment auprès des pouvoirs publics et de favoriser la coopération au sein de la profession ainsi que l’organisation et la gestion des services d’intérêt commun.
L’APB Guinée compte aujourd’hui 15 banques commerciales : Afriland First Bank, BCI, BICIGUI, BIG, BNG, BPMG, BSIC, ECOBANK, FBNBank, FIBANK, NSIA Banque, ORABANK, SGBG, Skye Bank, UBA et 2 banques de développement : BDG et BNIG.
Parlez-nous de l’évolution du système bancaire depuis l’avènement de la 3ème République ? Globalement les indicateurs clés du secteur bancaire guinéen ont connu une forte croissance depuis l’avènement de la troisième République en 2010 sous la présidence de son Excellence le Professeur Alpha Condé. Ainsi, on note les progressions pour les ressources (+60 %), les emplois (+114 %), le total bilan (+111 %), fonds propres (+91 %), le nombre d’agences bancaires (+79 %). Le système financier s’est également fortement modernisé avec une progression de plus de 50 % du nombre de distributeurs de billets (DAB/GAB) ainsi que des terminaux de paiements électroniques. Aussi, il faut signaler une évolution emblématique liée à la modernisation des systèmes de paiement pour améliorer la qualité des services bancaires.
Pouvez-vous maintenant nous donner quelques chiffres caractérisant le système bancaire guinéen ? Au 30 Juin 2018, le système bancaire guinéen est constitué de 15 banques commerciales et 2 banques de développement avec un effectif de 2 241 employés, un réseau de 175 agences réparties sur l’ensemble du territoire, 169 distributeurs (DAB/GAB), 600 000 clients représentant un taux de bancarisation d’environ 8 %. C’est aussi un total ressources de GNF 15 664 milliards et un total emplois de GNF 7 814 milliards pour un total bilan de GNF 21 119 milliards, une participation active des banques au financement de l’état à travers les bons du trésor et les emprunts obligataires dont l’encours à date est de plus de 1 000 milliards GNF Comme vous pouvez le constater, le paysage bancaire guinéen est en pleine croissance, se modernise et représente un levier important du développement de l’économie de la Guinée.
Association Professionnelle des Établissements de Crédit de Guinée – APB Immeuble Archevéché – Téminétaye B.P. : 343 Conakry – République de Guinée Contact : M. Adama MBAYE, Secrétaire Permanent Tél. : +224 622 69 67 73 / 664 83 69 39 - E-mail : secretariatpermanent.apbguinee@yahoo.com
Site web : www.apbguinee.org
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B Bonjour M. FONDJO, pouvez-vous vous p présenter à nos lecteurs ? p
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Mais le PDG est rapidement devenu un parti unitaire, qui a englobé tout le monde. Et tout le monde obéissait au chef. On était pour ou contre, et quand on était contre, on devenait un ennemi. Le parti avait des slogans anti-impérialistes écrits sur des panneaux que l’on retrouvait partout – « À bas le capitalisme ! À bas le colonialisme ! » –, des slogans qui dénonçaient les ennemis intérieurs (qu’on appelait les « valets du colonialisme ») et que l’on criait avec force. En tant qu’historien, je peux dire que c’était comme sous la Terreur, en France, au temps où la Révo lution faisait peur. Mais il fallait suivre. Même quand on n’y croyait plus, il fallait suivre.
Sékou Touré et son homologue français, Valéry Giscard d’Estaing, le 21 décembre 1978.
SIPA
Que s’est-il passé ?
Sékou Touré, sont arrivés du Sénégal, du Mali, du Niger, de Côte d’Ivoire, du Dahomey, de Haute-Volta, et ont pris avantageusement la relève des professeurs français. Parmi eux, le Voltaïque Joseph Ki-Zerbo, agrégé d’histoire, le Nigérien Abdou Moumouni, le Dahoméen Louis Behanzin, agrégé de mathématiques, Mame Ndiack Seck, professeur de sciences naturelles, etc. Ils ont sauvé le système éducatif en assurant la première réforme de l’enseignement. Après « nos ancêtres les Gaulois », on s’est enfin mis à enseigner l’histoire de l’Afrique. Idem du côté de la littérature. Au fil des ans, les relations avec la France se sont tendues. Les Guinéens se sont donc tournés vers les pays de l’Est, qui leur accordaient des bourses. On allait à Pékin ou à Moscou bien plus facilement qu’en Europe. L’Ouest était presque devenu interdit. Si l’on revenait de France, on était tout de suite suspect pour le régime. Nous avons lentement perdu contact avec l’ancienne métropole, dont nous avons commencé à sentir de plus en plus le manque… Ce qui explique que lorsque le président Giscard est venu à Conakry, le 21 décembre 1978, les Guinéens lui ont offert un accueil extraordinaire. J’ai vu cela à la télévision, depuis Dakar.
Le désenchantement est venu rapidement. Tout le monde a applaudi quand, en 1960, la Guinée a créé le franc guinéen, une monnaie indépendante. Mais celle-ci dégringola rapidement. Or tout venait de l’extérieur (huile, sucre, farine, tomate…) et, comme nous n’avions pas l’expérience de devoir commander et gérer les ravitaillements, les ruptures de stock ont commencé, puis les pénuries, et le gouvernement a été contraint de réduire tous les salaires – des cheminots, enseignants, agents administratifs, etc. –, ce qui provoqua un grand émoi. C’est là que les heurts ont commencé. Et vous avez senti que le régime allait mal tourner ?
Au début, j’y croyais. Nous, les jeunes, nous étions tous à gauche et farouchement pour l’indépendance. On critiquait les Senghor, les Houphouët, qu’on disait à droite.
À L’ÉPOQUE, ON ALLAIT À PÉKIN OU À MOSCOU BIEN PLUS FACILEMENT QU’EN EUROPE. L’OUEST ÉTAIT PRESQUE DEVENU INTERDIT.
À l’époque, vous étiez en exil volontaire au Sénégal. Pourtant, vous avez été proche de Sékou Touré au début de sa présidence ?
Oui. C’était vraiment un tribun hors pair, toujours en première ligne pour le combat anticolonialiste. À l’époque, Conakry était une petite ville coquette. Tout le monde se connaissait. On y parlait beaucoup de politique. Il y avait alors plusieurs partis, et la Guinée était très politisée, grâce à Sékou Touré, qui avait donné une orientation marxiste à son parti, le Parti démocratique de Guinée [PDG]. Le pouvoir était très centralisé, avec des sections bien formées, et le parti était une force incroyable.
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Lorsque les étudiants de France venaient en vacances en Afrique, ils faisaient des conférences, tenant des discours révolutionnaires. Quand je suis rentré en Guinée, j’étais professeur d’histoire. Je devins proviseur du lycée technique, puis du lycée classique de Donka et, en 1961, je fus élu au bureau du syndicat des enseignants. Ce dernier s’éleva contre la diminution des salaires, qui était difficilement ressentie. Au congrès de la Confédération nationale des travailleurs de Guinée [CNTG], Sékou Touré dénonça les enseignants et créa un complot : les enseignants furent traduits devant la Haute Cour de justice et condamnés, les lycéens se soulevèrent. Sékou Touré ferma toutes les écoles et nous accusa d’être « à la solde de l’étranger ». Nous avons alors été enfermés au camp de la Garde républicaine, lequel deviendra plus tard le sinistre camp Boiro. Qu’est-ce qu’a raté la France dans sa relation avec la Guinée et, plus généralement, avec l’Afrique ?
Soixante ans plus tard, diriez-vous que la Guinée est pleinement indépendante ?
D’une manière générale, l’Afrique n’est pas indépendante car elle est encore sous-développée. On ne parle pas d’égal à égal avec les grandes puissances. Nous sommes indépendants en théorie, mais, en fait, nous dépendons étroitement de l’extérieur, de la France, de la Chine, de la Russie, des États-Unis. Nous n’avons ni agriculture ni industrie développée. Nous ne produisons rien, pas de voitures, pas de machines agricoles. Tout ou presque vient de l’extérieur, à commencer par la nourriture. L’Afrique est bien entrée dans l’Histoire, contrairement à ce qu’a dit Sarkozy. Mais le continent d’aujourd’hui doit se battre durement. Oui, nous avons une histoire et, oui, elle a été perturbée par la domination européenne, par l’esclavage et la colonisation. Mais si nous sommes encore dépendants de l’extérieur en 2018, c’est la faute des Guinéens, c’est la faute des Africains. Car cela fait soixante ans que nous sommes indépendants. Regardez le Vietnam, la Corée du Sud, les « Tigres d’Asie », eux sont vraiment indépendants. Nos gouvernements successifs n’ont pas assumé leurs responsabilités. Le continent doit s’affranchir et se prendre en main. On n’arrive pas à maîtriser les structures nouvelles, la démocratie marche mal, on tente de créer une unité africaine alors que nous n’avons pas d’armée pour la défendre, ni de budget suffisant pour lui donner son autonomie. On attend toujours l’aide extérieure. Pour rassembler les Africains, l’Union africaine doit s’en donner les moyens.
L’ex-camp d’internement militaire de sinistre mémoire porte le nom d’un inspecteur de police assassiné en 1969. Ici le 9 avril 1984, jour de la libération de tous les prisonniers.
PHILIPPE LEDRU/AKG-IMAGES
La France nous a profondément marqués. Elle a enseigné de grands principes (liberté, égalité, fraternité) et s’est battue pour ces principes. Or elle a conquis la Guinée et lui a imposé sa force, ainsi qu’à beaucoup d’autres pays. Moi j’étais français, né sénégalais – la citoyenneté française n’était pas donnée à tout le monde, elle ne revenait qu’aux seules quatre communes du Sénégal (Dakar, Gorée, SaintLouis et Rufisque). Le premier mouvement des Africains était d’obtenir l’égalité avec les Français. On ne voulait plus du régime de l’indigénat, on n’aimait pas être appelés « indigènes », le terme était méprisant. Après le discours de De Gaulle à Brazzaville, en 1944, un vent de liberté a soufflé sur l’Afrique. L’empire français a senti qu’il fallait lâcher du lest. C’est alors que nous avons pris conscience de notre existence et que s’est enclenché le combat pour la libération du continent. Le débat s’était installé autour de l’union française, fraîchement créée par la France, mais de quoi s’agissait-il ? Fallait-il l’égalité entre Français et Africains dans une même nation ? Créer l’égalité entre la France et des entités africaines indépendantes ? Il y avait une dichotomie dans les luttes. Finalement, on voulait tous l’égalité, mais quelle égalité ?
Des moyens qui ne sont pas uniquement financiers, évidemment…
Nous parlons beaucoup d’économie et de développement. Or, en Europe, en Asie ou en Amérique, le développement est fondé sur l’enseignement et la recherche. Aux États-Unis, la plus grande fête est celle des universités, lors de la graduation, quand toute la famille et le pays entier applaudissent les jeunes lauréats. En Afrique aujourd’hui, où est l’école ? Où est la recherche ? L’un des grands défauts du continent est de n’avoir pas compris cela et de ne pas donner à l’éducation – le pilier de toute nation – la place qui lui revient. La bibliothèque que je viens d’ouvrir est consacrée à la recherche. Ma précédente bibliothèque avait été ravagée par un incendie en 2012 – plus de cinquante ans de travail partis en fumée. Heureusement, grâce au soutien du président Alpha Condé, elle a été restaurée et agrandie, ce qui va lui permettre d’accueillir plus de lecteurs ainsi que des chercheurs venant de l’extérieur. Elle reste l’une des rares bibliothèques et l’un des rares centres privés de lecture publique du pays.
SI NOUS SOMMES ENCORE DÉPENDANTS AUJOURD’HUI, C’EST LA FAUTE DES GUINÉENS, C’EST LA FAUTE DES AFRICAINS.
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FAIRE DU SOUS-SOL DE LA GUINÉE LA RICHESSE DE TOUS LES GUINÉENS
Les immenses ressources en bauxite de la Guinée doivent constituer un socle sur lequel le pays peut bâtir son émergence économique. À son niveau, le Consortium SMB-Winning veut contribuer durablement à la transformation des territoires en y construisant des infrastructures et en créant de l’emploi.
Conscient de son rôle, le Consortium SMB-Winning est persuadé que travailler dans les territoires de la mine implique de vivre dans les territoires de la mine. C’est pourquoi la Fondation SMB-Winning soutient et participe à de nombreux projets dans les domaines de la santé, du sport ou de la culture.
À terme, le Consortium SMB-Winning entend également jouer un rôle de catalyseur du secteur de la bauxite en Guinée, avec un projet de raffinerie auquel sera associé un chemin de fer. Cette nouvelle infrastructure permettra à la fois de désenclaver toute une région et de développer des activités agricoles et agro-industrielles aux alentours, la meilleure manière de transformer l’impulsion économique de l’activité extractive en diversification économique de long terme.
Située au carrefour des grands défis de la Guinée, la mine est indiscutablement porteuse de solutions. Il est temps pour le secteur minier d’être à la hauteur des attentes des populations et des États en participant à la promotion du développement durable, de la diversification économique et du capital humain. Au sein du Consortium SMB-Winning, nous nous efforçons chaque jour de faire du sous-sol de la Guinée la richesse de tous les Guinéens.
SMB Building - B.P. : 2162 Tombo 1, Kaloum, Conakry contact@smb-guinee.com
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Société minière de Boké (SMB)
En plus de ses activités de formation et de développement communautaire, le Consortium SMB-Winning a créé sa Fondation dénommée « Fondation SMB-Winning Consortium ». Cette fondation s’est donnée pour mission de promouvoir et de soutenir les projets culturels guinéens, de donner un rôle majeur à la culture en Guinée, de participer activement au développement local et communautaire, d’initier et promouvoir des actions d’entraide et de solidarité.
PUBLI-INFORMATION
Fondation SMB-Winning
Grand format GUINÉE ANALYSES & DÉBATS Voir aussi notre vidéo reportage au Palais du peuple sur www.jeuneafrique.com
Sékou, le meilleur, le pire et ce qu’il en reste
Icône du panafricanisme pour les uns, autocrate paranoïaque et sanguinaire pour les autres, le père de l’indépendance était un personnage ambivalent. Autant que l’est son héritage.
FRANÇOIS-XAVIER FRELAND, envoyé spécial à Conakry
a première fois que j’ai foulé le sol guinéen, c’était en 2007, sous la présidence de feu Lansana Conté, dans le cadre d’un reportage sur les victimes du camp Boiro. À l’époque, Thierno Diallo Telli, fils de l’ancien ministre des Affaires étrangères (et premier secrétaire général de l’OUA), disparu dans les geôles de « Sékou », m’avait – on le comprend – dressé une image des plus sombres du régime d’Ahmed Sékou Touré. Je me souviens de la maison ronde du ministre martyr sur la corniche, où son fils, qui était devenu un ami, ne cessait de ressasser. « Vers 18 heures, le téléphone a retenti. C’était le président qui voulait parler à mon père. Papa avait filé au palais avec un dossier sous le bras. D’après des témoins, il y a eu une dispute entre eux. “Je n’aime pas ceux qui cherchent à me surprendre !”, avait menacé Sékou. “Mais qui cherche à vous surprendre président ?”, avait dit mon père. Et Sékou Touré avait alors répondu froidement : “Bonsoir, Telli.” C’était le 18 juillet 1976. Nous ne l’avons jamais revu. » À près de 60 ans, Thierno Diallo Telli pleurait encore. Il est mort en 2016 d’une longue maladie, de tristesse aussi.
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ARCHIVES JEUNE AFRIQUE-REA
« Goulag tropical »
Visionnaire panafricaniste pour les uns, dictateur sanguinaire pour les autres, Sékou Touré n’a jamais laissé indifférent. Mais, chose étrange, même ses ennemis lui reconnaissent certains traits positifs. Comme s’il y avait deux Sékou Touré, « l’homme du non » à de Gaulle, lors de son discours anticolonialiste du mois d’août 1958, resté dans les annales, et celui qui sombrera rapidement dans la paranoïa mortifère des complots contre lui. Aujourd’hui encore, en visitant ce qui reste du
L’ancien président devant le portrait de son ancêtre, Samory Touré, grand résistant à l’expansion coloniale.
PUBLI-INFORMATION
Pourriez-vous présenter CIMAF ? Le groupe CIMAF est implanté dans 12 pays d’Afrique de l’ouest et centrale, à savoir la Guinée Conakry, Guinée Bissau, la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Burkina Faso, le Gabon, le Congo-Brazzaville, le Ghana, le Mali, la Mauritanie, le Tchad et le Maroc. Nous sommes présents en France depuis 2016 et avec un développement sur le continent européen.
30 ans d’expérience Directeur général régional CIMAF Guinée
40
millions d’euros d’investissement en guinée
80
emplois directs
200
emplois (familles) indirects
500 000
t/an de capacité de ciment
2013
rage de CIMAF Guinée G démarrage
CIMENTS DE L’AFRIQUE SA
1er étage im. kazem, Route du buffet de la gare Almamya, commune de Khaloum BP 1775 - Conakry République de Guinée Tél. : (224) 628 68 98 10
Les cimenteries de CIMAF ont été réalisées selon les dernières technologies disponibles, permettant de respecter les standards nationaux et internationaux les plus exigeants, aussi bien en matière de process et d’économie d’énergie qu’en matière de protection de l’environnement. Le groupe CIMAF offre à ses clients des produits développés et adaptés à des mises en œuvre courantes ou spécifiques : ouvrages d’art, voirie, maisons individuelles, bâtiment industriel, résidentiel, immeuble, barrage, pont… selon le besoin. Un groupe cimentier à taille humaine et proche de ses clients.
CIMAF Guinée a-t-elle vocation à durer ? Bien que les capacités actuelles dépassent les besoins d’un marché atone, CIMAF travaille actuellement sur l’augmentation d’1 million de tonnes de ciment supplémentaires sur son usine de Kagbelen dans le courant de l’année 2019, cette nouvelle capacité permettra de positionner CIMAF en leader sur un marché difficile. Cet investissement important pour CIMAF et qui représente des dizaines de millions d’euros permettra de générer de nouveaux emplois directs et indirects pour la jeunesse guinéenne et ainsi contribuer au développement de notre pays. Nous sommes donc engagés à rester sur le long terme pour répondre à la fois aux attentes quantitatives et qualitatives de la guinée. Le fait de bénéficier d’usines de dernières générations nous permet de nous conformer aux règles environnementales avec des filtres à manches de dernière génération permettant un niveau d’émission de poussière inférieur à 10 mg/Nm3 et un ainsi signé notre engament sociétal. Il est important que les ambitions de développement durable engagées par le groupe soient celles de tous et être présent ensemble pour le centenaire de la guinée en 2058.
WWW.CIMAF.COM
Sur quels axes êtes-vous engagés ? Le premier axe est de contribuer à ce que les produits que nous mettons sur le marché y soient accessibles aux consommateurs finaux à un prix abordable. Ceci passe par une professionnalisation de nos partenaires distributeurs d'où par exemple des actions marketing ciblées avec de la formation pour les artisans (briquetiers, maçons…) et de l’accompagnement sur des opérations de communication. Le second axe touche au développement des ressources locales, je suis fier de faire partie d’un groupe qui a toujours su mettre en avant les ressources humaines du pays. Pour y arriver le groupe met à disposition son centre technique basé à Casablanca, les différentes fonctions supports du groupe et un programme de formation qui propose aux collaborateurs et selon les thématiques métiers de partir se former au Maroc. Le groupe CIMAF a toujours travaillé pour le développement humain à long terme en guinée.
Cimaf couvre 30% du marché guinéen, comment vous positionnez vous par rapport à la concurrence ? Nous avons identifié sur ce marché la valeur que représente la qualité et le service peuvent apporter pour la construction en guinée. Nous sommes engagés sur un effort qui vise à prendre en compte les attentes des différentes parties prenantes de la construction, et développer des ciments permettant de répondre à ces attentes, diversifier notre gamme de produit qui permet de construire avec des ciments de qualité, à coût abordable, et plus facilement. Par ailleurs notre collaboration au plus grand barrage de guinée Souapiti en est un bel exemple.
©DIFCOM - photos : D.R.
Entretien avec M. TOURE BOUBACAR
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Simplicité et patriotisme
Quoi qu’il en soit, soixante ans plus tard, difficile d’oublier Hamed Sékou Touré, alors que Conakry est truffée de vestiges de son règne. Au Musée national de Guinée, non loin du palais Sékhoutoureya, le buste du père de l’indépendance trône encore au milieu de la cour. Porté au pouvoir par le référendum-plébiscite du 2 octobre 1958, il y restera vingt-cinq ans, jusqu’à son décès, le 26 mars 1984, aux États-Unis, où il avait été évacué en urgence pour une opération de chirurgie cardiaque. Ceux de ses partisans qui l’ont côtoyé lui reconnaissent deux qualités majeures : « Sa simplicité et son patriotisme », comme le résume Madifing Diané, l’ex-directeur des services de sécurité et des services rattachés à la présidence. « On le voyait souvent passer dans les rues, au volant de sa propre voiture, une DS noire,
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son mythique calot blanc sur la tête, son sourire et, parfois, une cigarette guinéenne, une Milo, aux lèvres. Il agitait un mouchoir blanc par la fenêtre. » Sa fille, Aminata Touré, victorieuse aux élections communales à Kaloum (Conakry centre), en février, se souvient aussi de cette simplicité. « Il aimait les repas en famille, la cuisine guinéenne. Il se servait lui-même. Il nous a toujours transmis des valeurs d’humilité et de travail. D’ailleurs, il refusait qu’un chauffeur nous emmène à l’école. Parfois, il nous faisait réciter nos leçons. Je n’ai pas non plus oublié son allure : il portait un soin particulier à sa tenue, c’était une manière de respecter son peuple, de le rendre fier de son chef. »
Lire aussi « Aminata Touré, la fille de Sékou, est entrée en politique » sur www.jeuneafrique.com
Comme un empereur
SÉKHOUTOUREYA Construit par la Chine à la place de l’ancien Palais des gouverneurs – où le premier président du pays vécut et gouverna de 1953 jusqu’à sa démolition, en 1983 –, le palais Sékhoutoureya (« Chez Sékou Touré », en soussou) a été inauguré en 1998 par Lansana Conté. Ce dernier ne quitta cependant jamais sa résidence du camp Almamy-Samory-Touré (ex-camp Mangin). Le palais n’est redevenu le siège de la présidence de la République qu’en 2010.
YOURI LENQUETTE
camp Boiro, on est pris de vertige. Sur les murs des cellules sont parfois restés gravés à jamais les messages de souffrance, creusés avec les ongles, de ceux qui ont séjourné dans ce « goulag tropical ». Ibrahima Sory Tounkara est le fils d’un autre célèbre disparu, Tibou Tounkara, ancien ambassadeur en France et ex-ministre de Sékou Touré. « Pour nous, c’était “Tonton Sékou”, jusqu’au jour où mon père a été arrêté. » Aujourd’hui, le dramaturge et scénographe « pardonne lentement, mais n’oublie pas ». Depuis le 25 septembre, il présente la pièce Mourir au pouvoir, sur la scène du Petit Musée, à Conakry, dans le cadre des cérémonies du soixantenaire. Un « hommage » aux chefs d’État qui s’éternisent dans leurs fonctions. « En revanche, il faut reconnaître que, sur le plan culturel, la Guinée brillait de tous ses feux à l’époque de Sékou, car la culture était au service de l’idéologie. J’ai moi-même pu devenir comédien et metteur en scène grâce aux excellents professionnels de l’époque. Mais je me souviens que, tous les matins, on scandait à l’école : “À bas le colonialisme ! À bas l’impérialisme ! Vive la révolution !” Malheureusement, beaucoup de gens de ma génération ont été marqués par ce complexe et ce rejet du Blanc. Et, dès que ça va mal, c’est la faute de l’Occident… »
Pour une partie de la jeunesse actuelle, « Sékou » représente le héros révolutionnaire, une sorte de Che Guevara guinéen. D’ailleurs, en 1965, le Comandante fera un court séjour à Conakry, où il sera reçu avec tous les honneurs par Sékou Touré avant de rejoindre le maquis congolais. Idem pour Fidel Castro, en 1972. « Je suis fier d’Ahmed Sékou Touré. C’est lui qui a donné l’indépendance et la souveraineté à notre pays », estime Lassine Koné, 29 ans, directeur d’une agence de communication, qui se dit « démocrate, mais pas révolutionnaire ». Il reconnaît ainsi l’héritage du premier président : « Il a aussi construit les infrastructures majeures de la Ire République, qui perdurent encore aujourd’hui : les principaux bâtiments de Conakry, le Palais du peuple, les grands axes routiers, etc. Mais, c’est vrai, il y a eu les purges. » Les milliers de « S » – pour « Sékou » – gravés sur la façade du monumental Palais du peuple (qui fut longtemps le plus grand édifice de l’Afrique de l’Ouest), inauguré en 1967, ressemblent aux traces laissées dans l’histoire par certains empereurs. Certains ont d’ailleurs comparé le premier président guinéen à Napoléon, pour son intelligence tactique et sa mémoire phénoménale. Pour beaucoup, Sékou Touré serait surtout la réincarnation de Samory Touré, son ancêtre, qui ne fut ni plus ni moins que le fondateur de l’empire Wassoulou, lequel, de 1878 à 1898, résista à l’armée coloniale française.
LA BANQUE CENTRALE DE LA RÉPUBLIQUE DE GUINÉE
Banque Centrale de la République de Guinée
Six décennies de gestion monétaire Depuis sa création, la Banque Centrale de la République de Guinée a connu de profondes mutations qui lui permettent d’assurer aujourd’hui sa mission avec efficacité et rigueur.
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ée en 1960 avec la monnaie nationale, la Banque Centrale de Guinée (BCG) a, à ses débuts, à la fois la vocation d’institut d’émission, de banque commerciale et de banque de développement. Elle est alors l’instrument du premier plan national de développement du pays. En 1961, elle devient la Banque Centrale de la République de Guinée (BCRG). En 1972, le syli remplace le franc guinéen. À partir de 1984, le gouvernement entreprend des réformes structurelles qui permettent, notamment, la dévaluation de la monnaie.
PUBLI-INFORMATION
Dans les années 1990, la BCRG connaît une Louncény NABE, mutation profonde, qui jette les bases d’une Gouverneur de la BCRG. supervision bancaire efficace. Les lois sur la réglementation des établissements de crédit et le statut de En collaboration avec la Banque Africaine de Développela BCRG donnent des pouvoirs étendus à la BCRG pour la ment et l’Institut Monétaire de l’Afrique de l’Ouest, le Sysgestion monétaire et la surveillance du système financier. tème National de Paiement est développé. Pour favoriser La BCRG pratique alors une politique d’encadrement du la bancarisation et l’inclusion financière, une structure de crédit. Elle est également chargée de la gestion des lignes Gouvernance de la Monétique Nationale, chargée de la de crédit extérieures négociées par le gouvernement en mise en œuvre et de l’exploitation d’un centre de traitement monétique interbancaire et délégataire, voit le jour. faveur du secteur privé. Avec l’évolution de l’économie de marché, la BCRG abandonne les instruments directs de la politique monétaire au profit des instruments indirects. Le régime de change devient plus souple, le taux est déterminé librement, et le marché de change se libéralise. A la faveur de l’élection du Professeur Alpha CONDÉ en décembre 2010, de nouvelles réformes sont engagées. Elles permettent d’assurer la stabilité du taux de change, l’assainissement de la circulation fiduciaire, le renforcement du dispositif de surveillance des institutions financières et le développement du système de paiement.
Les différentes réformes monétaires entreprises depuis 2011 ont ainsi permis de contenir l’inflation à un chiffre et de stabiliser le taux de change du franc guinéen. La BCRG poursuit sa politique monétaire équilibrée, afin de maîtriser l’inflation sans compromettre la dynamique de la croissance. Elle continuera à moderniser le système financier national et le système de paiement. Elle poursuivra également le développement de la monétique pour mieux stimuler l’inclusion. La lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme figurent aussi en tête des priorités.
Banque Centrale de la République de Guinée www.bcrg-guinee.org
©DIFCOM-JAMG - PHOTO : D.R. sauf en-tête ©ADOBESTOCK.COM
Pour contenir les tendances inflationnistes de l’intermède de la transition (2009-2010), les instruments de politique monétaire sont activés pour absorber l’excès de liquidité et stabiliser le taux de change. Le marché interbancaire de change est restauré pour financer les besoins d’importation du pays. Grâce à cette politique vigoureuse, les réserves de change sont reconstituées. La supervision des institutions financières est repensée, la circulation fiduciaire assainie et les billets de banques mieux sécurisés. Un Système d’Information du Crédit (SIC) est mis en place pour assurer la transparence dans l’octroi des crédits avec l’appui technique et financier de la Banque Mondiale.
Grand format GUINÉE ANALYSES & DÉBATS
CE JOUR-LÀ… LE 28 SEPTEMBRE 2009
Lundi noir DIAWO BARRY
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Un procès d’envergure
Le 13 avril 2018, un comité de pilotage pour l’organisation du procès a été créé par arrêté ministériel du garde des Sceaux guinéen, Cheick Sako, qui le préside. Composé de représentants des ambassades des États-Unis et de l’Union européenne, du système des Nations unies, de la société civile ainsi que des services de sécurité et de la justice, le comité veille sur l’organisation matérielle du procès: calendrier, lieu, budget, sécurité, etc. Sa première réunion, le 1er août, n’a permis de connaître que le budget prévisionnel, estimé à 78 milliards de francs guinéens (7,3 millions d’euros). L’UE y a déjà contribué à hauteur de 450000 euros, et les États-Unis de 900000 dollars (770000 euros). 110
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Neuf ans plus tard, les nombreuses victimes attendent encore que justice soit rendue.
AFP
enir meeting au stade du 28-Septembre, le jour anniversaire du référendum sur la Communauté française rejetée par le peuple guinéen, avait une valeur symbolique pour les opposants à une éventuelle candidature du chef de la junte, Moussa Dadis Camara, à la présidentielle de 2010. Pourtant, il semble avoir été moins périlleux de dire « non » à un général, fût-il aussi célèbre que de Gaulle, qu’à un capitaine paranoïaque. Le lundi 28 septembre 2009, dans ce stade de Conakry, 157 personnes tombèrent sous les balles de l’armée, 1500 furent blessées, 89 portées disparues et 109 femmes furent violées, selon la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH). Neuf ans après ce massacre, les victimes attendent encore que justice soit faite.
Avec 392 victimes qui se sont constituées partie civile, des centaines de témoins, des officiers supérieurs parmi les accusés – dont l’ancien chef de la junte au pouvoir entre décembre 2008 et décembre 2010, Moussa Dadis Camara –, les capacités d’accueil de la cour d’appel et des trois tribunaux de Conakry sont dépassées par ce procès d’envergure, qui devrait durer six mois. D’où l’obligation d’identifier un site, dans la capitale ou en province, qui puisse l’héberger. Pour mettre en place le dispositif sécuritaire qui s’impose, le comité de pilotage bénéficie notamment de l’expertise du haut commandant de la gendarmerie nationale, le général Ibrahima Baldé. Plusieurs fois annoncé, plusieurs fois reporté, le procès se tiendra-t-il sous le mandat d’Alpha Condé, qui se termine fin 2020? Oui, répondent le ministre de la Justice et un diplomate membre du comité. Toutefois, Cheick
Sako est conscient qu’il sera tributaire d’un contexte marqué par la tenue de deux scrutins: les législatives, qui devraient avoir lieu en toute fin d’année ou au début de 2019, et la présidentielle, prévue pour 2020. Autres inconnues: la date du retour de Moussa Dadis Camara en Guinée, ses conditions et son impact sur le pays, où il jouit d’un certain soutien. En attendant, il vit en exil au Burkina Faso, où il a été entendu et inculpé de « complicité de viol et d’assassinat, coups et blessures, abstention délictueuse » par une commission rogatoire. Son compagnon d’armes, Sékouba Konaté, qui vit en France, continue de narguer la justice guinéenne, devant laquelle il a juré de ne pas comparaître – alors que d’autres inculpés, comme Moussa Tiégboro Camara et Claude Pivi, jouissent encore de leur statut de commis de l’État. Seul Toumba Diakité croupit à la maison centrale de Conakry.
PUBLIREPORTAGE
Bolloré Transport & Logistics :
MOTEUR DE LA TRANSFORMATION LOGISTIQUE DE LA GUINÉE Présent en Guinée depuis 1987, Bolloré Transport & Logistics emploie près de 700 personnes dans le pays. Ses activités sont principalement la manutention portuaire avec Conakry Terminal, le shipping sous la marque Afritramp, le transport terrestre et le fret aérien opéré par Bolloré Logistics. Opératrice du 1er réseau de logistique intégrée du continent, l’entreprise se positionne comme le partenaire logistique de référence pour accompagner les grands projets miniers, pétroliers et gaziers de Guinée.
SC BTL-09/18
Développer les infrastructures portuaires et logistiques du pays Dans le cadre d’un partenariat public privé avec l’état guinéen, Bolloré Ports opère depuis 2011 le terminal à conteneurs de Conakry. 170 millions d’euros ont déjà été investis pour transformer Conakry Terminal et lui permettre d’être un formidable outil de développement au service des armateurs et acteurs économiques guinéens. Il met à la disposition des clients une plate-forme de 200 000 m2 située dans le port autonome de Conakry, dont 38 000 m2 dédiés au stockage de véhicules et un parc à conteneurs vides extérieur de 26000 m2. Grâce à ses investissements, ConakryTerminal a traité plus de 203 000 EVP (Equivalent Vingt Pieds) l’année dernière. La congestion représente un vrai défi et un frein à la croissance économique des pôles urbains africains. Dans le cas spécifique de Conakry, Bolloré Transport & Logistics porte le projet de développer une zone logistique intégrée à Kagbelen. Avec ce projet de port sec, situé à 40 kilomètres du port de Conakry, l’entreprise souhaite créer une plateforme multimodale desservant le corridor malien, qui permettrait de répondre à la double exigence de performance et de développement de l’économie guinéenne. Partenaires des projets miniers De même que les projets d’infrastructures logistiques, la production de minerai est en plein essor dans l’ouest du pays, notamment de la Bauxite. Bolloré Transport & Logistics a ainsi développé des services spécifiques pour accompagner les projets miniers du pays. Depuis les ports
bollore-transport-logistics.com
de Kamsar et de Conakry, il est actuellement en charge de la logistique de colis lourds et conventionnels nécessaires à la construction d’une infrastructure d’exportation de Bauxite, alimentée par une mine située à une centaine de kilomètres des côtes. Depuis 18 mois, plusieurs milliers de m3 ont été réceptionnés dont certains colis pesant plus de 230 tonnes. Ainsi Bolloré Transport & Logistics se trouve au cœur d’une opération industrielle et logistique qui dote la Guinée d’une infrastructure lui permettant d’augmenter de plusieurs dizaines de millions de tonnes ses exportations de minerais de bauxite dès la fin de 2019.
Étudiants de l’Université catholique de l’Afrique de l’ouest.
Des engagements forts envers les guinéens Déployant une politique RSE qui favorise le développement local, Bolloré Transport & Logistics s’engage au quotidien dans des actions de santé, d’éducation, de solidarité et de protection de l’environnement. En 2017, Bolloré Transport & Logistics a soutenu en Guinée pas moins de 44 projets sociétaux, parmi lesquels la prise en charge financière de 15 étudiants pour toute la durée de leur licence en agroalimentaire assurée par l’Université catholique de l’Afrique de l’ouest. L’entreprise a également soutenu un projet porté par l’ONG Guinée Solidarité pour la construction d’un centre de formation pour les handicapés dans la préfecture de Mamou.
OPINION
Jeunesse, engage-toi! E
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es maux qui gangrènent aujourd’hui la société – repli identitaire, omniprésence de la corruption, court-termisme, injustice et impunité, non-renouvellement des élites, individualisme exacerbé, faiblesse de l’État, manques criants dans l’éducation, clientélisme, etc. – sont bien connus de tous.
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Cela ressort clairement du sondage effectué par l’initiative « Penser la Guinée de demain » à l’occasion du soixantenaire de l’indépendance : près des deux tiers des personnes interrogées affirment être pessimistes sur l’avenir du pays à moyen terme.
L THIAM & ASSOCIÉS
n 2030, les moins de trente ans représenteront 70 % de la population guinéenne. Une richesse à bien des égards pour un pays qui va fêter les soixante ans de son indépendance et qui a du mal à décoller. Cette jeunesse devra néanmoins vite faire un choix entre reproduire le modèle et les codes de la société actuelle ou servir de force de rupture et de transformation. Alors on pourra mesurer l’impact qu’elle aura dans l’Histoire. Comme le disait le physicien Albert Einstein : « La folie, c’est se comporter de la même manière et s’attendre à un résultat différent. » Si elle veut marquer un virage positif, la nouvelle génération devra donc faire attention à ne pas reproduire les erreurs de ses aînés. Car ces jeunes, qui n’ont pas connu les deux premières républiques guinéennes, constituent la seule force à même de permettre le décollage du pays, l’histoire nous ayant démontré que, quelles que soient ses ressources, le développement d’un État dépend avant tout de ses femmes et de ses hommes.
BABAHADYTHIAM Avocat aux barreaux de Guinée et de Paris
LA NOUVELLE GÉNÉRATION DEVRA REFUSER LA FATALITÉ ET ÊTRE EXIGEANTE ENVERS ELLE-MÊME ET ENVERS SES ÉLITES.
e salut ne viendra que d’une franche rupture avec les codes de la société actuelle, qui résultera d’un profond désir de changement, une volonté inébranlable de vivre et d’agir ensemble. Dans cette perspective, la jeunesse devra respecter une condition sine qua non : être exigeante envers elle-même et envers ses élites, et ne pas accepter la fatalité. Elle devra être consciente que certaines choses ne sont pas inéluctables et, surtout, ne sont pas normales, comme le fait que la corruption imprègne le quotidien, que la médiocrité soit récompensée au détriment de la méritocratie, que l’opacité règne dans la gestion de la chose publique, qu’une petite frange de la population s’enrichisse de manière illicite sur les deniers publics, que certaines décisions de justice ne soient pas exécutées, que les partis politiques et les coordinations régionales poursuivent une ethno-stratégie, etc. Pour y mettre bon ordre, les citoyens disposent de nombreux outils tels que les réseaux sociaux, les enquêtes parlementaires, judiciaires ou journalistiques et,
FRANÇOIS GRIVELET POUR JA
FASSOU DAVID CONDÉ Étudiant à l’EHESS, écrivain
Dur dur d’être étudiant surtout, le vote. En ce sens, la nouvelle génération a toutes les cartes en main et est le vrai maître du jeu. Elle pourra aussi s’appuyer sur les nombreux atouts de son temps (ouverture sur le monde, études, formations et séjours à l’étranger, accès à l’information, etc.) pour apporter une contribution unique au développement, présent et futur, du pays.
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lle devra également tirer les leçons du passé et ne jamais oublier que, au-delà des ethnies et des religions, nos destins sont intimement liés. Elle doit d’ores et déjà s’élever contre leur utilisation au service de la division. Enfin, elle devra se refuser à revenir sur les représentations d’hier. Il y a eu des combats, il y a eu des erreurs, des fautes et des malheurs. Il y a eu des réalisations, des histoires heureuses et de belles choses. Elle ne devra pas rester enfermée dans ce passé. Cette jeunesse pleine de ressources, de talents et de créativité porte donc en elle une grande partie de la solution pour la Guinée de demain, qu’elle sera un jour amenée à gouverner, et est un atout majeur pour le développement du pays. Les mêmes causes produisant nécessairement les mêmes effets, gageons qu’elle servira de force de changement de la société guinéenne.
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amara Laye, Williams Sassine, Tierno Monénembo, Djibril Tamsir Niane, Kiridi Bangoura, Alpha Condé… Qu’ils soient décédés ou bien vivants, tous ont étudié en France, et leur contribution à l’histoire du pays est indéniable. Aujourd’hui encore, nombreux sont les jeunes Guinéens qui, à chaque rentrée académique, comme leurs aînés dans les années 1950, 1960 et 1970, posent leurs valises dans l’Hexagone afin d’y poursuivre leurs études. En 2017, on en recensait plus de 4 100 inscrits dans les établissements d’enseignement supérieur hexagonaux. Malgré le parcours du combattant qu’ils doivent vivre pour obtenir des services consulaires le visa étudiant, indispensable sésame pour prétendre à une nouvelle vie et à de nouveaux savoirs, quitter le pays ne les désole guère. Au contraire, c’est une fête, une réjouissance, qui prend d’autant plus de sens et d’importance que le candidat au voyage est issu d’un milieu peu favorisé. Il est alors porteur de tous les espoirs d’une famille qui, souvent, a consenti d’énormes sacrifices pour lui donner des chances de réussir. Pourtant, depuis le début des années 1990, un étudiant guinéen à l’étranger, en particulier en France, vit un peu comme un enfant abandonné par sa mère. Abandonné par sa patrie, en l’occurrence. En effet, depuis plus de vingt ans, la Guinée, indifférente, ne semble plus se soucier le moins du monde du sort de ses ressortissants partis apprendre
à l’étranger. Jamais elle ne vient à leur rescousse lorsqu’ils doivent faire face aux dépenses administratives énormes auxquelles ils sont astreints ou à des problèmes d’intendance. Pour s’en sortir, la plupart concilient les cours avec des petits boulots. Leur (sur)vie quotidienne et la garantie de leur séjour sur le territoire français en dépendent. L’État guinéen, qui n’accorde plus aucune bourse à ses élèves les plus méritants, fait par défaut la promotion de la sélection par l’argent aux dépens de l’excellence. Et faire des études en France n’est désormais possible que lorsque vous en avez les moyens. À commencer par les 7000 euros nécessaires pour espérer obtenir un visa étudiant.
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ne fois leur cursus bouclé, les diplômés des universités françaises sont par ailleurs de moins en moins enclins à rentrer en Guinée. Beaucoup s’y voient reprocher leur exubérance, leur manque de réserve, leur esprit critique à l’égard de la société, etc. À tel point qu’ils proposent de plus en plus volontiers leurs services sous d’autres cieux, où leur valeur est reconnue et, si possible, correctement rétribuée. Les années passant, la Guinée semble oublier l’essentiel. Qu’elle ne célébrerait pas aujourd’hui ses soixante ans d’indépendance si des esprits éclairés, et ce grâce à l’école, puis à l’université, ne s’étaient pas battus pour elle.
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SOCIÉTÉ
Bouillon de culture « Fonctionnarisés » sous l’ère de Sékou Touré, les artistes flirtaient allégrement avec l’idéologie. Désormais indépendants mais en difficulté, ils ne diraient pas non à un petit coup de pouce de l’État.
FRANÇOIS-XAVIER FRELAND
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es vagues s’échouent contre la jetée, les taxis filent à vive allure sur la corniche en passant devant le vieux Palais du peuple. Les années passent, et le monument qui fit la fierté de Sékou Touré est toujours là, à l’entrée de la presqu’île de Kaloum. Devant lui, sur le monument du 22-Novembre-1970, dit « de l’agression portugaise », on peut encore lire gravé dans le marbre: « L’impérialisme trouvera son tombeau en Guinée. » Tandis que des enfants font du skate ou dansent sur des airs de Soul Bang’s (lire pp. 122-123).
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Malgré les années et un manque criant d’entretien, le Palais du peuple, inauguré le 2 octobre 1967, tient toujours debout. Il abrite l’Assemblée nationale et, dans sa salle des congrès, accueille des cérémonies, des conférences, des manifestations culturelles et des spectacles en tout genre. Sa forme minimaliste à angles droits a permis à ce palais de traverser les modes… Même s’il reste un parfait modèle d’architecture socialiste plus impressionnante qu’esthétique. « Le président Sékou Touré en avait fait sa maison. Il avait aménagé un appartement dans l’une
des ailes du bâtiment, qui était l’une des expressions de sa dignité », se souvient Bakary Kourouma, le directeur technique du Palais. Dès le hall, on est impressionné par l’espace et par le silence. Un silence qui donne encore plus d’écho aux événements du passé, comme cet attentat manqué du 14 mai 1980 – date anniversaire de la création du Parti démocratique de Guinée (PDG), en 1947 – contre le guide de la nation. « Il présidait dans la grande salle des congrès lorsqu’un homme a lancé une grenade sous sa chaise. Heureusement, il a eu le temps de s’enfuir et n’a
REDFERNS
Le Bembeya Jazz en tournée aux Pays-Bas, en 2005.
pas été touché », se souvient Bakary Kourouma. Depuis, rien n’a changé. Tout est là, des fresques révolutionnaires au mobilier en citronnier, jusqu’aux anciens slogans politiques.
Vive la patrie… et le dénuement
Au temps de « Sékou », les arts flirtaient avec l’idéologie. Pour retrouver la trace du célèbre orchestre officiel du régime révolutionnaire, le Bembeya Jazz National, créé en 1961, il suffit de pousser la porte de la direction du
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Palais du peuple. On y retrouve ni plus ni moins que l’un de ses fondateurs, El Hadj Moury Diabaté, ex-trompettiste. Aujourd’hui, le septuagénaire, désormais administrateur général du Palais, reçoit dans son grand bureau aux fauteuils un peu usés. Sur les murs, autour de la table de réunion ovale, on trouve, à côté du portrait officiel d’Alpha Condé, celui d’Ahmed Sékou Touré, coiffé de son inséparable calot blanc. Et quand M. Diabaté referme la porte, on a l’impression d’entendre la voix fluette de feu Demba Camara, mythique chanteur du groupe, sur quelques notes de guitare de Doni-Doni, dont le refrain répétait en boucle : « Mes copains ont des voitures, mes copains ont des villas, mais moi je m’en fous. » À l’époque, les paroles du Bembeya Jazz National louaient la patrie et le dénuement. « L’orchestre est intrinsèquement lié au Palais du peuple, rappelle Moury Diabaté. On y a joué des centaines de fois, en particulier lors de grandes occasions. Je me souviens de la visite de Fidel Castro. Le président Sékou Touré était venu en personne nous donner des conseils. Il adorait nos rythmes ! »
La relève est là. Moriba Kaba, le batteur du nouveau Bembeya Jazz, fils du mythique trompettiste Mohamed Achken Kaba (décédé en 2015), est venu discuter avec l’ami de son père. « Je suis tombé dedans tout petit et pour moi, jouer avec le Bembeya, c’est comme faire partie d’un monument. On revient d’une tournée en Europe, nous nous préparons pour un grand concert à Abidjan, et on a beau vouloir jouer nos nouvelles compositions, les gens nous demandent toujours de chanter les airs d’autrefois. Pas facile de faire évoluer notre répertoire! » Malgré sa réputation légendaire au niveau international, les beaux jours du Bembeya Jazz sont derrière lui. Si l’État soutenait le groupe moralement et économiquement, ce n’est plus le cas aujourd’hui, où le secteur culturel n’est pas encore redevenu une priorité. Actuellement dirigé par le guitariste de toujours, Sékou Diabaté, alias Diamond Fingers, le Bembeya Jazz vivote. « On tire un peu le taureau par les cornes, reconnaît en souriant Moriba Kaba. Mais on est toujours vivants. » Jean-Baptiste Williams, alias Jeannot, l’incontournable directeur national de la Culture, n’a pas oublié
Studio Kirah, la nouvelle scène
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Exposition de peinture, en mai. DR
an dernier, un nouveau centre culturel dynamique est né à Conakry. Situé à La Minière, à quelques pas du Petit Musée et en face de l’hôtel du Golfe, le studio Kirah (« la route », en soussou) est en train de devenir incontournable pour les jeunes Guinéens branchés. Grâce à l’incroyable énergie de son fondateur, Bilia Bah, 38 ans, déjà célèbre dramaturge, metteur en scène et directeur de la compagnie La Muse, cet espace « ouvert à tous et à toutes les idées » s’est installé au rez-de-chaussée d’une confortable maison. Chaque jeudi, autour du bar, on y organise les « Jeux dis’Arts », et à l’extérieur, sous le préau, une petite scène permet à des groupes et à des compagnies de danse ou de théâtre de se produire. « Le but est de recevoir et d’aider les artistes guinéens et ouest-africains, dans un continent où rien n’est fait pour eux, explique Bilia Bah. C’est un lieu pour s’exprimer, ce qui est vital pour un artiste. Grâce
à l’expertise de notre réseau, on peut aussi porter des projets qui, sans nous, seraient restés dans les cartons. » Lors de la 6e édition du festival biennal L’Univers des mots, en octobre et novembre 2017, le studio Kirah a reçu une centaine d’artistes venus de quinze pays de
trois continents différents. « On a réussi à tous les loger chez des particuliers de La Minière, ce qui a insufflé une ambiance créative dans l’ensemble du quartier, raconte Bilia Bah. Et, petits et grands, tout le monde venait voir les spectacles. » F.-X.F.
Votre partenaire guinéen
Équipé d’une flotte de plus de 600 camions allant de la benne au porte-char, et de sa flotte aérienne de deux hélicoptères et de deux avions, UMS compte également parmi ses clients plusieurs sociétés industrielles ainsi que des organisations internationales et gouvernementales. Créée en 2015, la filiale United Trade Services dispose quant à elle d’une flotte dédiée de plus de 50 camions-citernes qui permet à UMS de gérer toute la chaîne du carburant. La solide im-
plantation d’UTS à Boké lui permet de proposer ses services à tous les clients miniers de la région. Il y a plus de 5 ans, UMS a été l’une des premières entreprises guinéennes à obtenir la certification ISO 9001 et un processus est en cours pour les certifications ISO 14001 et ISO 18001. UMS est aussi certifiée ICMI pour le transport de cyanures. Fort de 4000 employés, le groupe UMS est fier de ses racines guinéennes avec plus de 90% d’employés Guinéens et des programmes de formations interne et externe visant à significativement augmenter ce chiffre à court terme, notamment en recrutant parmi la jeunesse du pays.
Pour en savoir plus : www.ums-international.com
Immeuble WAZNI, Tombo 1, Kaloum, Conakry, Guinée – BP 2162
DIFCOM/JAMG - PHOTOS : DR.
Fondé en 2002, le groupe United Mining Supply (UMS) a été établi pour accompagner les sociétés minières en leur fournissant des prestations de transport et de logistique intégrée de bout-en-bout.
Grand format GUINÉE SOCIÉTÉ
Fils de « djely » avant tout
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n quelques mots, tout est dit. « Sékouba » est le digne héritier du grand Sory Kandia Kouyaté, « la voix de la révolution » guinéenne, disparu en 1977. « À travers ma musique, j’essaie de transmettre les valeurs humanistes, sociales et culturelles du Mandingue, comme elles étaient écrites dans la charte du Manden au XIIIe siècle, explique Sékouba Kandia Kouyaté. Je suis un djely, un griot, comme vous dites en français, et les djely sont là pour faire vivre le souvenir de notre grande culture. » Son enfance n’a pas toujours été musicale, ni facile.
Il est né en 1962, le 28 septembre, jour anniversaire du référendum de 1958, qui aboutit à l’indépendance. Tout un symbole. « Sékou Touré
l’omniprésence du politique. L’ex-guitariste a cofondé presque clandestinement, en 1974, le premier groupe indépendant du pays, le Sextet Camayenne. Il se souvient de la fermeté du chef de l’État: « La jeunesse a toujours raison, mais il faut quand même respecter les règles de notre révolution. Je prendrai des dispositions pour que l’orchestre ne soit pas dissous, mais vous serez intégrés au cadre idéologique du pays. »
Rayonnement international
Autre fierté du régime : Les Ballets africains, aujourd’hui dirigés par l’un de ses anciens danseurs, Hamidou Bangoura, 76 ans. Créée en 1948 par le poète Keïta Fodéba, la compagnie a reçu la mission, en 1958, d’être une ambassadrice de la culture et de l’art africains à travers le monde. « Nous avons arpenté les cinq continents, on était parfois une centaine de danseurs à voyager par bateau. On faisait de grandes tournées d’un an, puis on revenait. On était
Premier site guinéen d’information
était un très proche ami de mon père. À votre avis, pourquoi je m’appelle Sékouba ? » Sory Kandia Kouyaté, plutôt strict, l’envoya étudier à l’école, avant de lui apprendre les rudiments de la musique. Puis Sékouba a formé le groupe Talibo, en 1985. Il a tracé son propre chemin et a produit huit albums, dont un double sorti en avril : Mémoire du futur et Kouma. Depuis 2017, parallèlement, il dirige l’Ensemble instrumental national de Guinée, un autre géant de l’époque « Sékou », dont les chœurs et les musiciens l’accompagnent dans ses chansons. F.-X.F.
des fonctionnaires payés comme les autres, se souvient Hamidou Bangoura. Aujourd’hui, des compagnies privées naissent ici et là, mais dès que les artistes se font connaître à l’étranger, ils y restent! » Une culture à l’abandon ? Comme le suggère le triste panorama qu’offre aujourd’hui la mythique salle des congrès du Palais du peuple : sièges arrachés, plancher usé, rideau de scène troué, toilettes hors service, etc. ? Si elle n’est plus soutenue par l’État et n’est plus « fonctionnarisée » comme à l’époque de la régie et du label d’État Syliphone, sous « Sékou », la culture guinéenne reste particulièrement vivante. Comme le prouve le rayonnement actuel, au-delà des frontières du pays, de ses auteurs (du romancier Tierno Monénembo au dramaturge et nouvelliste Hakim Bah), de ses musiciens (du griot Mory Kanté à la nouvelle star Soul Bang’s en passant par le reggaeman Takana Zion), sans oublier les acrobates du Terya Circus et les comédiens de ses compagnies théâtrales.
+224 620 202 080 +224 622 120 816 Av. de la Rep. Conakry
PUBLI-INFORMATION
© RICCARDO NIELS MAYER / FOTOLIA
SOCIÉTÉ DES EAUX DE GUINÉE, L’ACTION AU LONG COURS La modernisation du réseau national de distribution d’eau potable aborde la dernière ligne droite
Mamadou Diouldé DIALLO, Directeur Général de la Société des Eaux de Guinée, lors de la remise de citernes alimentaires par le Japon à la SEG.
SOCIÉTÉ DES EAUX DE GUINÉE SIÈGE SOCIAL
Almamya - BP : 150 Conakry, République de Guinée Tél. : (+224) 657 22 00 58 E-mail : info@segguinee.com
www.segguinee.com
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epuis 2011, le président Alpha Condé a initié une politique volontariste de l’eau, en s’appuyant sur l’expertise de la Société des Eaux de Guinée (S.E.G) et des partenaires internationaux.
L’alimentation en eau potable de Conakry est assurée à 85 % par les eaux de surface et à 15 % par les eaux souterraines issues des forages industriels implantés dans la capitale. La capacité de production d’eau potable y est d’environ 167.000 m3 par jour. Sur les 33 centres urbains de l’intérieur du pays, 25 sont équipés de systèmes modernes d’alimentation en eau potable. Parmi les 8 autres villes, les travaux sont engagés dans cinq d’entre elles (Lola, Yomou, Tougué, Lélouma et Gaoual) et les requêtes de financement sont lancées pour les trois autres.
Projets en cours Le remplacement de 3,5 km de conduite principale sur financement de l’Agence Japonaise de Coopération Internationale (JICA) pour un montant de 13 millions de dollars a déjà été réalisé. La même agence finance la réhabilitation en cours des installations des stations de pompage d’eau des forages de Konayah et Kakimbo pour un montant de 1,17 million de dollars.
La ville de Siguiri bénéficiera du même type de programme, avec l’aménagement d’une prise sur le fleuve Tinkisso et la construction d’une station de traitement d’eau d’une capacité de 10 000 m3 par jour. La construction d’une station de pompage d’eau traitée et de deux réservoirs est également prévue. Le gouvernement financera la fourniture et la pose de 17,7 k m de réseau de distribution, pour 22,5 millions de dollars.
Actions financées par les Fonds de contrepartie Japonaise (JICA) La requête de financement adressée au JICA est destinée à la réalisation de quatre actions prioritaires : l’acquisition de produits de traitement d’eau pour une durée de 3 mois, la construction et l’équipement de 20 bornes fontaines publiques à Kankan et à Siguiri, la c o n s t r u c t i o n e t l ’é q u i p e m e n t d e 10 forages individuels pour alimenter les 10 bornes fontaines de Kankan et l a c o n s t r u c t i o n , l ’é q u i p e m e n t e t l e raccordement d’un forage industriel de 25m3/h pour renforcer la production d’eau potable de Kouroussa.
Le remplacement des 3,5 km de conduite principale en acier entre Enta et Sangoyah est lui en cours d’exécution. Son financement est assuré par le Royaume du Maroc à travers l’Office National de l ’Eau et de l ’Energie (ONEE) pour un montant de 4 millions d’euros. La ville de Conakry prévoit aussi de renforcer son système d ’alimentation en eau potable grâce un programme en partie financée par la BID.
Visite de chantier de Ibrahima Kassory Fofana, Premier Ministre de Guinée, lors du déboitement de la conduite principale de transport d’eau traitée.
DIFCOM/DF - PHOTOS : DR SAUF MENTION.
de production et
Grand format GUINÉE SOCIÉTÉ Lire aussi « Soul Bang’s, un bon supplément d’âme » sur www.jeuneafrique.com
MUSIQUE
Comme un air de Beyoncé Fille d’un des plus célèbres griots ouest-africains et épouse de la nouvelle star de la soul guinéenne, Manamba Kanté est surtout une chanteuse hors pair et une self-made-woman. chant « Africa stop Ebola », organisé au Palais du peuple de Conakry, en juillet 2015. Après quelques singles, elle prépare son premier album solo, qui devrait sortir début 2019 sur le label de Soul Bang’s, Rnb Boss Musik. Une dizaine de titres, dont un premier single baptisé Nany Bally, qui parleront de l’amour, des enfants démunis et du rôle des femmes en Afrique. « Je considère qu’on les cantonne trop aux tâches ménagères. Or elles ont le droit, aussi, d’exister », affirme-t-elle. Et de se mettre à chanter a capella : « On peut rester ici en Guinée, devenir quelque chose… » Elle claque des doigts. Soul Bang’s l’accompagne en battant le rythme du pied. Un duo figurera d’ailleurs sur l’album qu’elle est en train d’enregistrer dans le studio de leur villa.
FRANÇOIS-XAVIER FRELAND
oulard multicolore sur la tête, Manamba Kanté Bangoura se présente. « Je suis née en 1996 et je suis chanteuse. » Et c’est tout. Celle que beaucoup considèrent comme la star montante de la musique guinéenne n’aime pas beaucoup parler d’elle, ni parler tout court, d’ailleurs. À l’inverse de son époux, père de ses deux enfants (Idrissa, 2 ans, et Nala, 10 mois), le chanteur Souleymane Bangoura, 25 ans, alias Soul Bang’s, lauréat du prix Découvertes RFI 2016, déjà surnommé le R’n’B Boss. À eux deux, ils forment une belle carte postale de la Guinée. Lui est soussou, elle est malinkée. Certains fans les comparent même au célèbre couple américain Beyoncé et Jay-Z, et la presse people locale les suit régulièrement depuis leur mariage, en mai 2016, pour montrer qu’ils sont « très amoureux ». Assis à côté d’elle, Soul Bang’s soutient Manamba du regard et, en habitué des médias et des plateaux télé, lui souffle quelques mots à l’oreille, la conseille. « Je suis son premier coach, dit-il. Elle travaille beaucoup et devra encore travailler beaucoup, mais Manamba a un talent naturel extraordinaire. » L’intéressée sourit en le dévisageant à son tour. « Avec Soul Bang’s, on s’est connus sur scène, et ça a été tout de suite le coup de foudre. Il est tendre et très respectueux. Et c’est pour ça que je l’aime ! » Manamba Kanté s’est fait connaître grâce à ses reprises (notamment dans l’émission « Toumboui », en 2012), sa présence régulière sur les scènes conakrykas, où elle accompagne d’autres musiciens, et pour avoir remporté le concours de
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jeuneafrique no 3012 du 30 septembre au 6 octobre 2018
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En 2015, elle remporte le concours « Africa stop Ebola », à Conakry.
SON PREMIER ALBUM SOLO, COMPOSÉ D’UNE DIZAINE DE TITRES, DEVRAIT SORTIR DÉBUT 2019.
Mauvaises langues
« On est heureux ici en Guinée, on se serre les coudes. Je n’irai jamais vivre en France, ajoute-t-elle. J’ai accouché de mon premier enfant à Paris et j’avais hâte de revenir. Mon mari me manquait trop, et j’aime profondément Conakry. Je voudrais que les jeunes restent ici, croient en leur pays, qu’ils réussissent ici, comme nous. » De son illustre père, Mory Kanté, grand complice de Salif Keïta à l’époque du Rail Band, Manamba ne dit rien, ou presque. Elle est la onzième des quatorze enfants du célèbre chanteur. « J’ai toujours été très fière de lui, mais j’ai rarement été à ses concerts. Il m’a invitée une fois sur scène et j’ai chanté avec lui, j’avais 11 ans, ça a été le début pour moi. Le seul conseil qu’il m’ait donné c’est : “Ma fille, tu es une descendante de griots, n’oublie jamais que tu es là pour chanter, conseiller les F
gens et que tu dois toujours bien te comporter.” » « Son père ne l’a jamais aidée, contrairement à ce que disent certaines mauvaises langues, précise Soul Bang’s. Manamba doit tout à sa mère, elle-même griotte, qui l’a éduquée et lui a appris à chanter. » Manamba poursuit : « Mon père est un homme bon, mais strict, qui nous a toujours poussés à nous débrouiller par nous-mêmes. D’ailleurs, quand j’étais enfant, mes copines me disaient : “Hé, toi, tu es la fille du chanteur, alors pourquoi tu es simple comme nous, pourquoi tu ne fais pas le boss?” »
Avec son mari, Souleymane Bangoura, alias Soul Bang’s.
PYS PIC
Voix de velours
Depuis toute petite, Manamba Kanté n’a jamais songé à être autre chose que chanteuse, bien qu’elle ait décroché un diplôme de droit des affaires à l’université de Conakry pour faire plaisir à sa mère. « J’ai tenté de jouer en douce de la kora, mais la tradition [dans sa famille, l’instrument noble est le balafon] et mon statut de griotte ne me le permettaient pas, raconte-t-elle. Alors j’ai chanté… » Sa voix a fait le reste. Elle peut monter très haut puis se faire velours, comme celle des divas du blues, avec un peu du grain de Miriam Makeba. Manamba Kanté a d’ailleurs aussi un peu de l’allure et du look sixties de l’icône panafricaine et féministe exilée à Conakry et naturalisée guinéenne à l’époque de Sékou Touré. Elle regrette que ses compatriotes n’aient pas « pris conscience de leur histoire » : « En 2010, j’étais invitée au Mali, en tant que majorette, pour le cinquantenaire de l’indépendance. À Bamako, il y avait d’immenses festivités, qui attiraient des milliers de gens. Ici on dirait que tout le monde s’en moque… Pourquoi ? On devrait être fiers ! »
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