SANTÉ
15 pages
QUE VALENT (VRAIMENT) NOS HÔPITAUX ?
ENQUÊTE Dans le secret des Rotary
CANNABIS Ruée vers l’or vert
NUMÉRO DOUBLE EN VENTE DEUX SEMAINES
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL NO 3068-3069 DU 27 OCTOBRE AU 9 NOVEMBRE 2019
Dix mois après son élection, le président impose peu à peu son style. Mais réformer en profondeur un système politique à bout de souffle ne sera pas une mince affaire.
Les douze travaux de Rajoelina
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MADAGASCAR
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France 6 € Algérie 390 DA Allemagne 8 € Autriche 8 € Belgique 6 € Canada 11,90 $ CAN DOM 8 € Espagne 7,20 € Éthiopie 95 birrs Grèce 8 € Italie 7,20 € Luxembourg 8 € Maroc 40 DH Norvège 75 NK Pays-Bas 7,50 € Portugal cont. 7,20 € RD Congo 11 $ US Royaume-Uni 6 £ Suisse 11,80 FS Tunisie 6 DT USA 13$US Zone CFA 3200 F CFA ISSN 1950-1285
Spécial 18 pages
MADAGASCAR
DONNER À LA GRANDE ÎLE LES MOYENS DE SON DÉVELOPPEMENT
L
e 18 janvier 2019, jour de l’élection d’Andry Rajoelina, l’île de Madagascar est entrée dans une nouvelle ère : celle du développement, de l’ouverture, de la modernité. Celle aussi des défis, des ambitions et de la confiance retrouvée, sur le plan national comme international. En effet, le projet Émergence
Madagascar 2019-2023 se présente comme une véritable révolution pour sortir le pays de l’ornière et le remettre sur la voie du développement. À l’heure des premiers bilans, force est de constater que, depuis son élection, Andry Rajoelina n’a pas perdu
de temps pour redresser le pays, comme en attestent les nombreux chantiers auxquels il s’est déjà attelé. Qu’il s’agisse de la lutte contre la corruption, de la recherche d’investisseurs étrangers ou encore du développement des infrastructures du pays, il met tout en œuvre pour porter haut les ambitions de Madagascar et redonner confiance à la
population, aux investisseurs ainsi qu’aux instances internationales.
Q Le président Andry Rajoelina (au centre) a reçu la délégation de Medef International le 7 octobre 2019 au Palais d’État d’Iavoloha.
PUBLI-INFORMATION
Q Dans le domaine de la sécurité publique, plusieurs compagnies de gendarmerie ont été équipées d’un véhicule 4x4.
REGAGNER LA CONFIANCE DE LA POPULATION ET DES INVESTISSEURS Au fondement de l’engagement du président Rajoelina, il y a la volonté de mettre fin à la défiance de la population à l’égard du pouvoir, nourrie par des années de corruption. « Lutter activement pour faire reculer la corruption, voire l’éradiquer » était en effet l’une de ses promesses de campagne. Et en neuf mois, il a déjà pris de nombreuses mesures pour assainir le climat politique du pays. Dès le 20 février 2019, il a fait le choix de nommer à la tête du Comité pour la sauvegarde de l’intégrité une personnalité issue de la société civile, Sohondra Rabanarivo. La nomination de cette figure de la lutte anti-corruption, passée par l’Observatoire de la vie publique et militante de la bonne gouvernance, est un premier signal fort. Le Président n’a pas tardé à doter le pays d’un arsenal juridique en matière de lutte contre la corruption : une loi contre le blanchiment d’argent a été promulguée, une loi sur le recouvrement des avoirs illicites a été adoptée par ordonnance et le Bianco a été réorganisé par décret. Plus généralement, c’est tout un ancien monde qui s’est effondré avec l’arrivée au pouvoir d’Andry Rajoelina : au sein des forces de l’ordre, de la magistrature, de la fonction publique, les arrestations
Q Le 24 juin 2019, Andry Rajoelina (au centre) lors de la remise officielle des équipements de l’armée.
et condamnations pour des faits de corruption se sont multipliées. L’ancien directeur général de la douane, Éric Narivony Rabenja, a notamment été incarcéré à Antanimora pour détournement de fonds publics. Le gouvernement mise enfin sur la transparence : pour la gestion des marchés publics, trois décrets ont été adoptés pour fixer les conditionsdemiseenœuvredesprocédures applicables en matière de passation des marchés publics. De même, pour veiller à la transparence des concours administratifs, le gouvernementaadoptélelogicielAharihary, qui en garantit le bon fonctionnement.
Q Le climat des affaires ainsi que les opportunités offertes par la Grande Île ont été au cœur des discussions entre le Président et une délégation du patronat français, conduite par le président du comité Afrique, M. Momar Nguer.
Lutter activement pour faire reculer la corruption, voire l’éradiquer.
MADAGASCAR
Q Pour son premier déplacement sur le continent africain, le président de la Banque mondiale, David Malpass, s’est rendu à Madagascar.
REDONNER AU PAYS SA PLACE SUR LA SCÈNE INTERNATIONALE
Depuis janvier 2019, Madagascar a retrouvé un Président dynamique et tourné vers l’international. Le pays s’affirme sur la scène diplomatique et envoie des signaux positifs aux investisseurs et aux partenaires potentiels. Dès février, au 32 e sommet de l’Union africaine à Addis-Abeba, Andry Rajoelina a affirmé la volonté de son pays de «reprendresaplacesurlecontinentafricain». Île Maurice, Kenya, Tanzanie : le président Rajoelina a multiplié les déplacements en Afrique de l’Est. En mai, sa visite en France a débouché sur la signature de quatre conventions de partenariat avec des groupes français dans les domaines de l’énergie et de l’agriculture. Plus récemment, en août, c’est au Japon qu’il s’est rendu pour participer à une conférence internationale sur le développement de l’Afrique. L’élection d’un Président entrepreneur et dynamique, issu du monde de l’entreprise, rassure et attire les investisseurs étrangers. Ainsi, le nouveau président de la Banque mondiale, David Malpass, s’est rendu à Madagascar en avril 2019 pour son premier voyage en Afrique. Ce séjour a débouché sur le déblocage de 392 millions de dollars, destinés à l’aide au développement de Madagascar. Cette somme sera consacrée
Q Andry Rajoelina en compagnie de Louise Mushikiwabo, Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF)…
à l’amélioration de l’accès à l’électricité (150 millions), à l’aide aux familles démunies (90 millions), à la sécurisation des titres fonciers (52 millions) et à une aide budgétaire (100 millions). En octobre, une délégation de 35 représentants de Medef International a rendu une visite officielle à Madagascar, à la recherche d’opportunités et de partenariats. Cette délégationarencontréleprésidentRajoelina et les membres du gouvernement.
Le pays envoie des signaux positifs aux investisseurs et aux partenaires potentiels.
Q Rencontre entre Paul Kagame, président de la République du Rwanda et le président Rajoelina.
PUBLI-INFORMATION
Q ...d’Emmanuel Macron, président de la République française...
Q et du pape François.
FAIRE PROFITER LE PAYS DE SON POTENTIEL TOURISTIQUE EXCEPTIONNEL
Q Cinq avions de type Cessna viendront s’ajouter aux équipements de l’armée et de la police nationale.
Q Lors de la cérémonie du 24 juin, le Président a remis plusieurs véhicules tout-terrain à l’armée et à la police nationale.
« Wave Madadagascar », la première édition du forum d’investissements pour la promotion du tourisme malgache, s’est tenue à Antananarivo en septembre 2019.
www.presidence.gov.mg
DIFCOM/DF- PHOTOS : © PRÉSIDENCE DE MADAGASCAR.
D’autres chantiers amorcés par le président Rajoelina promettent une relance du développement et de l’économie de Madagascar. Ainsi, le Président veut mettre en valeur les ressources naturelles de l’île et faire de Madagascar la première destination touristique de la région. Le tourisme tarde à se développer et à libérer son potentiel malgré d’immenses atouts naturels, culturels et humains. La destination reste pour l’instant confidentielle sur le marché international et reste fréquentée essentiellement par des voyageurs avertis, souvent européens. En septembre, la première édition du forum d’investissements «Wave Madagascar » s’est tenue à Antananarivo pour promouvoir le développement du tourisme malgache. Afin de favoriser l’essor du tourisme, l’amélioration des infrastructures de transport est essentielle. Le réaménagement du canal des Pangalanes, 800 kilomètres de voie fluviale, a commencé en septembre.
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WOLFGANG KAEHLER/LIGHTROCKET VIA GETTY IMAGES
Pour tout comprendre de l’évolution d’un pays
MADAGASCAR
Les douze travaux de Rajoelina Dix mois après son élection, le nouveau président impose peu à peu son style. Mais réformer de fond en comble un système à bout de souffle ne sera pas une mince affaire! jeuneafrique no 3068-3069 du 27 octobre au 9 novembre 2019
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PEOPLE VISION INDUSTRY FOR... MORE AFRICA EARTH LEGACY Né à Madagascar il y a plus de 45 ans, le Groupe Sipromad est un leader de la diversification industrielle. De l’entreprise locale malgache, le groupe s’est transformé en conglomérat de plusieurs activités allant du produit de première nécessité à l’immobilier, en passant par le tourisme, l’aviation ou encore le broadcasting. Fier de ce chemin et de ceux qui l’ont accompagné, le groupe partage les fruits de ce succès avec la société au travers notamment de la Fondation Akbaraly. Aujourd’hui, le groupe est un partenaire majeur de l’océan Indien, présent en Afrique, en Europe, en Asie et aux États-Unis.
BUREAUX : MADAGASCAR · MAURICE · FRANCE · ÉTATS-UNIS Sipromad.com
132 ENJEUX
Le plus dur commence
136 Ministres sous haute surveillance
Olivier Caslin
138 Une opposition qui navigue à vue
OlivierCaslin
À Grande Île, grandes ambitions ndry Rajoelina a une vision pour son pays. Tout entière décrite dans les 124 pages du Plan Émergence Madagascar (PEM), que son gouvernement a présenté aux bailleurs de fonds en octobre. Élu sans contestation possible au début de l’année, le nouveau chef de l’État malgache a maintenant cinq ans pour moderniser la Grande Île et lui permettre de révéler toutes ses potentialités. En 2023, le pays aura changé de visage, tout comme sa capitale. Engorgée, polluée, surpeuplée, Antananarivo veut retrouver son lustre passé, quand elle était l’une des plus belles villes d’Afrique. Aéroport flambant neuf, routes et autoroutes, connexions électriques et voies d’adduction d’eau : les chantiers en cours et à venir ne manqueront pas de façonner un nouveau destin à la métropole. Ainsi en est-il du nouveau quartier de Tana Masoandro, d’où doivent émerger, dès 2020, les tours de verre des nouveaux ministères, reliées à la vieille ville par un train fonctionnant à l’énergie solaire. Mais les ambitions du président Rajoelina vont bien au-delà de Tana et concernent l’ensemble du territoire. Le Nord, autour de Nosy Be, doit devenir l’une des destinations touristiques les plus prisées de la sous-région, avec la construction de nombreux hôtels de luxe. Sur la côte orientale, Toamasina va certainement demander plusieurs années pour devenir le « Miami de l’océan Indien » annoncé par le chef de l’État, mais son port ne devrait plus attendre que quelques mois pour enfin jouer son rôle de porte maritime du pays, voire de hub logistique pour l’ensemble de la sous-région. Alors qu’un
A
projet portuaire de grande dimension est également annoncé à Toliara, de l’autre côté de l’île, avec le soutien des Marocains de Tanger Med, Madagascar pourrait disposer à moyen terme des infrastructures nécessaires pour doper son commerce extérieur, et notamment ses exportations agricoles. Une bonne nouvelle pour le secteur, lui-même en plein renouveau grâce aux programmes de soutien aux différentes filières de production que le gouvernement a mis en place ces derniers mois.
Agenda « nationalisé »
En décidant d’avancer tous azimuts, le président prend le risque de provoquer une certaine incompréhension chez ses partenaires financiers, mais lui et son équipe justifient leur stratégie par une «malgachisation» du développement socioéconomique de l’île – soit le respect de certaines traditions et de rapports de force propres à la société malgache. En « nationalisant » son agenda et en s’émancipant des influences extérieures, Andry Rajoelina retente l’expérience lancée des décennies plus tôt par Didier Ratsiraka. Sauf qu’à l’inverse de son prédécesseur il mise avant tout sur l’apport du secteur privé, local et international, pour soutenir ses initiatives. Flatté d’avoir été qualifié de « patriote » par le pape François lors de la visite du souverain pontife à Madagascar en septembre, le président Rajoelina a rappelé qu’il restait avant tout un libéral, convaincu que les frontières doivent s’estomper devant les intérêts économiques, mais toujours dans le respect de ceux de la nation malgache.
140 ÉCONOMIE À la recherche du temps perdu
144 Énergie À la rescousse de la Jirama
146 Tribune
Développement, pourquoi ça coince
148 Entrepreneuriat Retour à la case Mada
152 SOCIÉTÉ
Tana dévoile enfin ses joyaux
157 Questions à… Jean-Claude Dubois Architecte
RAJOELINA MISE AVANT TOUT SUR L’APPORT DU SECTEUR PRIVÉ, LOCAL ET INTER NATIONAL.
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Grand format MADAGASCAR
ENJEUX
Le plus dur commence
Maintenant qu’il a pris ses marques, Andry Rajoelina va pouvoir s’atteler à réformer le pays. Réussira-t-il à faire montre de pragmatisme dans la mise en œuvre de son programme ? 132
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MAMYRAEL / AFP
Le chef de l’État à Analakely, le 8 janvier.
OLIVIER CASLIN, envoyé spécial à Antananarivo
L
e 19 janvier 2019, Madagascar a enfin tourné la page d’une décennie de crise politique qui a laissé le pays sur les genoux. En prêtant serment, main levée et tournée vers le peuple qui l’a clairement élu quelques semaines plus tôt, Andry Rajoelina a gagné son pari. Il a mis moins d’un an à revenir sur le devant de la scène politique malgache, qu’il avait été contraint de quitter quatre ans plus tôt, un triste soir de janvier 2014.
En l’emportant assez nettement face à Marc Ravalomanana, à la fin de 2018, il fait plus que régler son compte une bonne fois pour toutes à son vieux rival. Le voilà enfin légitimé par l’onction populaire ainsi que par la communauté internationale, dont les représentants sont venus en nombre assister à son investiture. À 45 ans, l’ancien président de la transition peut endosser le costume de président tout court et se débarrasser au passage de l’étiquette de putschiste que ses
adversaires s’évertuaient à lui coller depuis son accession au pouvoir en 2009, à bord d’un véhicule militaire. Et si le plus dur commençait maintenant pour le chef de l’État ? Bientôt dix mois après son installation au palais présidentiel d’Iavoloha, le doute persiste. Non pas sur son énergie ou son talent à entraîner dans son sillage les bonnes volontés, mais sur sa perception des réalités du pays. Certaines de ses déclarations – à propos du retour des îles Éparses dans le giron malgache comme
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Grand format MADAGASCAR ENJEUX
A
près la présidentielle de la fin de 2018, les législatives du mois de mai, place aux municipales. Le 27 novembre, les Malgaches vont se rendre une nouvelle fois aux urnes pour élire les 1700 maires du pays, avec la possibilité pour la mouvance présidentielle regroupée sous la bannière IRD, si elle remporte cette dernière levée, de réaliser un grand chelem, rare dans l’histoire de la Grande Île. C’est notamment le cas à Antananarivo, détenue traditionnellement par le camp opposé à celui du chef de l’État. Rien de surprenant donc que le 11 septembre bruissent les rumeurs d’une possible candidature de Marc Ravalomanana, le patron du TIM. Grand perdant des dernières joutes électorales, l’ancien chef de l’État donnerait un peu plus de poids à ses revendications de leader officiel de l’opposition en retrouvant à l’hôtel de ville un siège qu’il a occupé entre 1999 et 2002 et sur lequel il a placé sa femme, Lalao, depuis 2015. La plateforme du Rassemblement des opposants à Madagascar (RMDM) lui a même déroulé le tapis rouge, vingt-quatre heures plus tôt, devant la presse malgache au grand complet. L’affaire semble entendue, avant que les cartes ne soient rebattues le 12 septembre. Le leader du TIM refuse d’abord l’invitation, préférant envoyer en première ligne le jeune Ny Rina Randriamasinoro, actuel secrétaire général de la commune d’Antananarivo et parfait inconnu du grand public. Avant que l’IRD ne dévoile, quelques heures plus tard et à la surprise générale, son champion OLIVIER CASLIN en la personne de Naina Andriantsitohaina. Ne lui reste plus qu’à démissionner de ses fonctions de ministre des Affaires étrangères, quelques jours plus tard, pour commencer à labourer méthodiquement la capitale. Tout juste si ce très proche du président Rajoelina ne regrette pas aujourd’hui que le combat des chefs tant attendu n’ait pas lieu. Ce n’est pourtant pas un boulevard vers la place du 18-Mai qui s’ouvre devant lui, tant le TIM reste populaire dans les bas quartiers de la capitale. Naina Andriantsitohaina, qui concourt pour la première fois à un mandat électif, sait qu’il peut compter sur la machine électorale bien huilée de l’IRD pour l’emporter. Il aura ensuite cinq ans devant lui pour faire ses preuves et moderniser la capitale. Avec peut-être à l’esprit l’ambition de quitter un jour l’hôtel de ville pour rejoindre directement le palais présidentiel d’Iavohola, comme Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina avant lui.
EN DÉBAT
Tous à l’hôtel de ville !
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de la réalisation de ses projets de villes nouvelles à Antananarivo (lire pp. 152-155) ou à Toamasina, avant la fin de son présent mandat en 2023 – ont pu le faire passer « pour un doux rêveur » aux yeux d’une partie du corps diplomatique comme de certains bailleurs de fonds. Il a néanmoins su les rassurer en sachant s’entourer. Il a d’abord gardé à la primature un Christian Ntsay apprécié depuis mai 2018 pour sa connaissance des dossiers, avant de respecter l’une de ses principales promesses de campagne en nommant un gouvernement de techniciens (lire p. 136), « en rupture avec les pratiques politiciennes qui ont mené ce pays à la ruine », selon l’un de ses conseillers à la présidence.
Préjugé favorable
Et que ce soit dans les télécoms ou dans le secteur énergétique, les ministres n’hésitent pas à bousculer certaines mauvaises habitudes. L’opérateur Telma se voit reprocher son monopole, de fait, sur la fibre optique, pendant que les compagnies pétrolières tentent encore de jouer la montre pour conserver les marges indécentes qu’elles enregistrent depuis des décennies grâce aux subventions de l’État (lire p. 144). « Andry Rajoelina a sifflé la fin de la partie, et il est temps que certains le comprennent », menace à mots couverts Hajo Andrianainarivelo, ministre de l’Aménagement du territoire et des Travaux publics, qui a déjà pu constater « une baisse de 20 % par rapport à l’année dernière » des coûts de réalisation de 1 kilomètre de route bitumée.
LE PRÉSIDENT SEMBLE DOUCEMENT RÉUSSIR À IMPOSER SON PROPRE STYLE DE GOUVERNANCE. SÉDUISANT ET APAISANT, IL GARDE INTACTE SA POPULARITÉ.
Grand format MADAGASCAR ENJEUX
Le président semble doucement réussir à imposer son propre style de gouvernance. Séduisant et apaisant, il garde intacte sa popularité auprès des Malgaches, qui espèrent toujours récolter les fruits de l’émergence qu’il leur a promise pour 2023, malgré les incertitudes qui entourent toujours son programme économique (lire pp. 140-142). Il a en revanche su, dès le début de son mandat, s’attaquer à une question sécuritaire qui avait empoisonné le mandat de son
prédécesseur. Dans les campagnes, la lutte contre les dahalo (les voleurs de zébus) s’est intensifiée avec l’utilisation d’hélicoptères de combat, pendant que dans les villes la police multiplie les patrouilles, provoquant la quasi-disparition des enlèvements contre rançon qui s’étaient intensifiés ces dernières années. Si Andry Rajoelina bénéficie toujours d’un préjugé favorable aussi bien au sein de la population que de la communauté internationale, une partie de son entourage suscite
davantage de méfiance. « La vraie question est de savoir si Andry Rajoelina sera suffisamment fort pour résister dans la durée aux intérêts particuliers de certains de ses amis », commente un diplomate en poste à Antananarivo. Premier élément de réponse lors du prochain remaniement ministériel, attendu après les élections municipales de la fin de novembre. L’occasion de remettre au pas les ministres indociles ou, au contraire, de signifier que les temps ont bien changé à Madagascar.
Ministres sous haute surveillance
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Le chef du gouvernement, Christian Ntsay, était déja en poste sous la présidence précédente.
RIJASOLO / AFP
La rentrée ministérielle de janvier 2019 était très attendue, puis qu’elle allait donner le ton du quinquennat d’Andr y Rajoelina. Et, heureuse surprise, ce dernier avait honoré l’une de ses principales promesses de campagne en désignant un gouvernement composé de responsables politiques madrés et de jeunes techniciens pas forcément au courant des us et coutumes. Le tout sous l’autorité du Premier ministre, Christian Ntsay, déjà en poste sous le régime précédent et apprécié pour son sérieux et sa discrétion. Neuf mois plus tard, certains sont déjà sur le gril et pourraient bien faire les frais du remaniement attendu au lendemain des résultats des municipales. « Même si certains n’ont pas atteint leurs objectifs, ils ne sont pas en mauvaise posture pour autant aux yeux de l’opinion », analyse le juriste Toavina Ralambomahay. À part à l’Enseignement supérieur, où le déroulement
du baccalauréat 2019 a été gâché par la fuite des sujets sur les réseaux sociaux. « Je ne démissionnerai pas », s’est vite défendue la ministre Blanche Nirina Richard, qui accuse ses détracteurs de « déstabilisation », sans doute pour contrer ses volontés de réforme.
Libéraliser le marché
Deux autres ministres doivent continuer à faire leurs preuves sur des dossiers difficiles à gérer, mais
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imposés par le président lui-même. Aux Télécoms, Christian Ramarolahy a la lourde tâche de libéraliser le marché de la fibre optique, monopolisé par Telma. À l’Énergie, Vonjy Randriamanga a ouvert les négociations avec les compagnies pétrolières ainsi qu’avec les principaux producteurs d’électricité, pour les pousser à baisser leurs marges (lire p. 144). Parmi les poids lourds nommés en janvier, Hajo Andrianainarivelo ne devrait pas être menacé
à l’Aménagement du territoire. À moins que le patron du MMM, l’un des principaux alliés politiques d’Andry Rajoelina, ne commence à être trop sur le devant de la scène. Aux Affaires étrangères, le successeur de Naina Andriantsitohaina, démissionnaire à la fin de septembre pour briguer la mairie d’Antananarivo (lire p. 134), continue de se faire attendre. Pour l’heure, c’est le Premier ministre qui assure l’intérim. C’est lui qui s’est r e n d u à l ’A s s e m b l é e générale des Nations unies en septembre, à la place du président. Pourtant, aujourd’hui, certains s’interrogent sur sa durabilité. « Trouver un autre Christian Ntsay ne sera pas aisé, objecte un conseiller. Il ne fait pas d’ombre au chef de l’État, applique sa politique, plaît aux bailleurs de fonds, tout en étant côtier… [une obligation tacite à Madagascar, le président étant de l’ethnie Merina, du centre de l’île]. » EMRE SARI, à Antananarivo
Extension du
port de Toamasina :
L
e projet d’extension du port de Toamasina, ce port qui traite plus de 75 % du volume total des marchandises qui entrent et qui sortent de Madagascar, devrait pallier les déficiences actuelles. Il aura des conséquences très positives sur le trafic portuaire mais aussi sur l’économie malgache. Les principaux facteurs physiques limitant la capacité du port de Toamasina sont le nombre de postes d’amarrage (actuellement, un seul poste d’amarrage de 280 m et à profondeur limitée, dédié au trafic de conteneurs), le manque de zone de stockage des conteneurs et la capacité insuffisante des équipements de manutention des conteneurs. Résultat, il y a en permanence des navires en attente de mise à quai dans la rade et le terminal à conteneurs souffre d’une congestion avérée.
Horizon 2026
951000 EVP en 2035
www.port-toamasina.com
Pour faire face à cette situation, le Projet de Développement du port de Toamasina a été lancé. Cet investissement bénéficie d’un financement du Japon, via un prêt de la JICA. Le projet compor te deux phases. La première porte sur le remblayage d’une plateforme de 10 ha et la construction de blocs de béton (dolos), destinés au prolongement du brise-lames. La deuxième phase comporte le prolongement du brise-lames de 345 m de longueur ; la construction du quai à conteneurs C4 (470 m de longueur et -16 m de profondeur) ; le revêtement de 10 ha de terre-plein pour l’aire de stockage des conteneurs ; et l’approfondissement des quais C1 et C2 jusqu’à -14 m et C3 jusqu’à moins 16 m. Les travaux ont commencé en mars 2018 et l’ensemble du projet devrait être achevé en juin 2026.
Le projet a fait l’objet d’une étude d’impact environnemental et social (EIES) très détaillée. De plus, un plan de mesures préventives a été mis en place.
Des impacts très positifs Le projet d’extension du port de Toamasina va permettre une augmentation du volume du trafic portuaire. Les prévisions tablent sur une hypothèse dite de trafic « moyenne » de 951 000 EVP en 2035, contre la capacité actuelle de 245 000 EVP. Des navires de plus grande capacité, notamment des méga porte-conteneurs, pourront être accueillis au port de Toamasina. Et le temps d’attente des navires sera réduit. Pour ce qui est de la manutention de conteneurs, la productivité sera accrue en raison d’un volume supérieur de trafic et de la mise en place de nouveaux équipements. L’augmentation du trafic et du nombre de touchées entrainera une augmentation des recettes de la Société du Port à Gestion Autonome de Toamasina (SPAT ) qui gère le port. À terme, c’est l’économie nationale qui en sera bénéficiaire.
Une vision de transformation Enfin, le projet devrait se traduire par un important transfert de compétences et de technologie. De nouveaux emplois, directs et indirects, seront créés. Lors de la présentation du programme « Initiative pour l’Émergence de Madagascar », SEM Andry Nirina Rajoelina avait comme mot d’ordre « Transformer notre vision en actions ! » pour un développement durable à Madagascar. Le Projet de Développement du port de Toamasina s’inscrit parfaitement dans cette vision.
DIFCOM/DF - PHOTOS : © DR.
COMMUNIQUÉ
des retombées économiques et sociales
Grand format MADAGASCAR ENJEUX
Une opposition qui navigue à vue
Hétéroclites et désorganisés, sans leader véritable, les adversaires d’Andry Rajoelina se cherchent encore un statut au sein du Parlement. vraiment s’organiser. Et aujourd’hui encore, ils n’y parviennent toujours pas. Une plateforme baptisée HFI a un temps rassemblé plusieurs partis, avant qu’en août Marc Ravalomanana sorte de son chapeau sa propre coalition, réunie sous la bannière RMDM. Les propres soutiens de l’ancien chef de l’État avaient pourtant eux-mêmes lancé un peu plus tôt le mouvement Dinike en sa faveur. Une cacophonie qui n’arrange pas la mauvaise image qui colle déjà à l’opposition en général. Trop de leaders compromis avec les régimes passés, trop de démagogues et d’opportunistes qui l’empêchent de définir une stratégie autre que la dénonciation des fraudes pour justifier ses échecs électoraux à répétition.
JAMES RAMAROSAONA, à Antananarivo
es débats qui ont inauguré l’ouverture de la deuxième session parlementaire le 14 octobre ont été aussi véhéments que ceux qui avaient conclu la session extraordinaire de mi-août. Et ce n’est pas la loi de finances 2020, pourtant inscrite comme priorité du jour, qui a été au centre des échanges, mais bien le statut officiel de l’opposition. La question, récurrente, dispose pourtant d’une réponse claire depuis la Constitution de 2010, mais elle n’a jamais été appliquée. Plusieurs partis opposants comme le TIM de Marc Ravalomanana ou ce qu’il reste du HVM du précédent président Hery Rajaonarimampianina ont eu beau jeu d’envoyer quelques députés en première ligne pour alerter l’opinion, quand eux-mêmes n’ont rien fait pour résoudre l’équation lorsqu’ils en avaient l’occasion. « Cela est dû à l’évolution historique des partis malgaches. Jusqu’en 2000, faire de la politique signifiait défendre une idéologie claire. À partir de 2002, cela s’est effrité progressivement pour laisser la place à une défense d’intérêts ou de clans », estime Mahamoudou Ndriandahy, leader de la société civile. Les idéologies ont disparu et avec elles les anciens partis, Arema, Monima, MFM… Ceux qui les ont remplacés restent difficiles à identifier, faute d’avoir su
L
TROP DE CHEFS COMPROMIS AVEC LES RÉGIMES PASSÉS, TROP DE DÉMAGOGUES ET D’OPPORTUNISTES L’EMPÊCHENT DE DÉFINIR UNE STRATÉGIE.
Divergences et querelles
Si elle veut tenter de redorer son blason, l’opposition va devoir surmonter les divergences et les querelles entretenues par des dirigeants incapables de se fédérer derrière un leader, soit-il constitutionnel. À bientôt 70 ans, Marc Ravalomanana rêve de revêtir le seul costume qu’il estime digne de le relancer. Sans mandat législatif, le toujours leader du TIM est pourtant loin d’être assuré d’avoir le rôle qu’il entend jouer à l’Assemblée, alors que le Sénat reste toujours entre les mains fermes de l’ancien parti présidentiel HVM.
MADAGASCAR
PUBLI-INFORMATION
AGROBUSINESS
REDEVENIR LE GRENIER RIZICOLE DE L’OCÉAN INDIEN
L
e secteur agricole doit être l’un des piliers du développement de Madagascar, dont les ressources naturelles, d’une richesse extraordinaire, ont été jusqu’à présent largement inexploitées. Fort de ce constat, le gouvernement a fait de la moderni-
sation de l’agriculture l’une des priorités du plan Émergence Madagascar 2019-2023.
ASSURER L’AUTOSUFFISANCE ALIMENTAIRE ET RELANCER L’ÉCONOMIE
Q Le programme national pour l’entrepreneuriat «Fihariana » finance déjà plusieurs projets. Ici, Andry Rajoelina dans la région Vakinankaratra.
Q Le Président constate l’avancement des travaux du barrage hydraulique de Bevava, dont dépendront 3 600 ha de terrain cultivable.
L’autosuffisance alimentaire du pays s’obtiendra grâce à la ferme volonté du ministère de consolider, moderniser et industrialiser l’agriculture.
Q Vue du barrage hydraulique de Bevava.
www.presidence.gov.mg
DES MESURES CONCRÈTES ET INNOVANTES De nombreuses actions ont déjà été menées et prouvent le volontarisme et la capacité d’action du ministère dans ce domaine. La liste des mesures précises qui ont été prises est longue. Elle concerne aussi bien la formationetl’équipementquel’incitationàl’action avec la création de fermes « modèles » ou encore d’un concours pour récompenser les agriculteurslesplusproductifs.Surcedernier point,leministèreredoubled’inventivitéafin d’associer au mieux les exploitants agricoles au développement du secteur. L’exemple du secteur rizicole suffit à prouver l’importance des investissements réalisés et l’ambition du ministère. Ainsi le le passage à une riziculture intensive s’appuie sur la mise en place de plus de 7 000 agriculteurs formateurs déployés dans les 22 régions.Vingt-cinq mille producteurs de riz ont été dotés de starting-packs pour se lancer dans la riziculture pluviale. Quatre-vingt-neuf tonnes d’engrais ont été distribuées. Enfin, l’accent a également été mis sur l’implication du secteur privé dans la production agricole et l’amélioration des infrastructures comme la création d’unités de transformation des produits.
DIFCOM/DF- PHOTOS : © PRÉSIDENCE DE MADAGASCAR.
Pourleministèredel’Agriculture,del’Élevage et de la Pêche, l’objectif est double : assurer l’autosuffisance alimentaire du pays et renforcer le poids du secteur agricole dans son économie, en conquérant notamment de nouveaux marchés d’exportation. L’année 2019 est principalement consacrée à la modernisation des structures agricoles, qui sont encore de petite taille et ont des rendements faibles. Il s’agit de passer d’une agriculture traditionnelle au développement d’un agrobusiness structuré et productif. Car en 2019, ce secteur ne représente que 30 % du PIB alors qu’il emploie plus de 80 % de la population. Le ministère a lancé 3 chantiers prioritaires pour cette première année : l’autosuffisance en riz et
en sources de protéines ; la modernisation de l’agriculture ; l’exploitation durable et rationnelle des ressources naturelles.
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ÉCONOMIE
À la recherche temps perdu
Atelier de confection à Antananarivo, en juillet 2018.
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du
Malgré une croissance positive et de premières réformes encourageantes, le pays n’est pas encore complètement engagé sur la voie de l’émergence, fixée à l’horizon 2023... OLIVIER CASLIN
MIORA RAJAONARY / BLOOMBERG VIA GETTY IMAGES
L
e président bénéficie d’un contexte des plus favorables pour relancer le pays même si l’impatience des Malgaches – et de certains bailleurs de fonds – est de plus en plus perceptible. Après une décennie de crise, la machine semble être repartie, et Madagascar a enregistré en 2018 son meilleur taux de croissance depuis longtemps, avec 5,1 %. Dopé par la demande domestique et la bonne tendance actuelle des exportations, il est même censé atteindre 5,3 % en 2021 et 5,4 % l’année suivante. Un rythme encourageant, même s’il reste bien en deçà des 8 % minimum nécessaires pour que le pays puisse rêver d’émergence à l’horizon 2023, comme le prévoit le PEM. Il semble surtout trop faible encore pour que la Grande Île résiste au moindre choc extérieur, de la guerre commerciale que se livrent Chine et États-Unis – deux des principaux partenaires commerciaux de Madagascar – à l’ajustement des cours internationaux du pétrole comme de la vanille. Sans oublier les catastrophes naturelles, qui, chaque année, coûtent 1,3 point de PIB au pays. D’où l’urgence de voir l’économie malgache « enfin décoller, insiste un économiste de la Banque mondiale, et le gouvernement suivre la politique de relance keynésienne qu’il a lui-même promise. » Or force est de reconnaître que, jusqu’à présent, la politique volontariste fondée sur l’investissement public continue de se faire attendre. « L’argent est disponible, mais ce sont les projets de qualité qui manquent », déplore un spécialiste international des infrastructures. Les seules réalisations réceptionnées ces derniers mois avaient été lancées par la présidence précédente, alors
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que le taux d’exécution budgétaire a atteint un niveau historiquement bas cette année, à moins de 40 %. Ce n’est pourtant pas faute de besoins, notamment dans les secteurs sociaux, classés prioritaires par les pouvoirs publics malgaches comme par leurs partenaires internationaux. « Le pouvoir a perdu de précieux mois à réorganiser l’administration. Difficile de lancer de grandes réformes ou de larges programmes d’infrastructures dans le même temps », explique un diplomate, qui observe néanmoins une accélération des décaissements ces derniers mois, mais pas à un rythme qui permettrait de rattraper le temps perdu.
REPÈRES
Une croissance stable et soutenue
142
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(variation annuelle en %)
PIB réel, à prix constants Inflation (moyenne annuelle)
4,3 8,3
5,1 7,3
5,2 6,7
5,3 6,3
(en % du PIB)
Solde budgétaire global (base caisse) • Recettes totales et dons • Dépenses totales et prêts nets
- 1,0 14,8 17,2
0,1 14,8 16,3
- 0,4 16,4 18,7
0,1 15,0 19,4
Solde courant (dons inclus)
- 0,5
0,8
- 1,9
- 3,5
Investissement
20,1 5,5 14,7 3,1
20,4 5,7 14,8 4,1
22,4 8,3 14,2 3,2
23,6 8,4 14,3 3,2
Dette publique1
46,0 16,5 29,5
45,7 15,2 30,5
46,4 14,6 31,8
47,5 13,9 33,6
• Public • Privé dont IDE
« Chasse au gaspi »
dont dette intérieure1 dont dette extérieure
(1) Y compris dette des entreprises publiques pour lesquelles l’État est majoritaire.
Comparé aux voisins de l’océan Indien
IDE : flux constant, stocks en hausse
(pour l’année 2018)
(investissements directs étrangers, en millions de $)
PIB réel, à prix courants (en milliards de $)
Flux entrants
Croissance du PIB, à prix constants (en %)
Maurice
3,8
Madagascar Comores SOURCES : AUTORITÉS MALGACHES ET FMI, SEPT. 2019 ; CNUCED ; BANQUE MONDIALE ; PNUD
Si le gouvernement préfère pour l’instant garder les cordons de sa bourse serrés, c’est d’abord pour améliorer ses comptes en « coupant le gras », selon l’expression d’un consultant, dans les dépenses de fonctionnement de l’État. « Aucun nouveau véhicule n’a été acheté, les quotas de carburant ont été revus à la baisse », confirme un ministre. L’État a surtout renégocié ses contrats de fourniture, jugés « léonins » par de nombreux observateurs, avec les compagnies pétrolières, obligées de revoir à la baisse leurs marges bénéficiaires. « L’objectif est de réduire les subventions publiques pour que l’argent puisse aller à l’investissement », reprend notre analyste de la Banque mondiale. Parti avec un certain succès à « la chasse au gaspi », pour reprendre la formule du président Rajoelina lui-même, le gouvernement cherche également à améliorer ses recettes, avec une réussite plus mesurée. « L’impôt et les droits de douane rentrent bien, constate le FMI, mais représentent toujours moins de 12 % du PIB. » Insuffisant, donc, pour donner au gouvernement les moyens financiers de ses ambitions. L’État doit pourtant vite montrer l’exemple s’il veut rassurer le secteur privé – local et international – et le voir investir à son tour dans le futur du pays. « Rien ne se fera sans le soutien des entreprises », estime la Banque mondiale, qui plaide pour une clarification des relations entre public et privé afin que ce dernier puisse jouer tout son rôle. L’autre grand sujet qui pourrait fâcher, à terme, c’est l’orientation des dépenses. Les bailleurs de fonds veulent voir les secteurs sociaux se développer et en ont même fait une condition – certes indicative – pour continuer à apporter leur soutien au pays. Une menace toute relative, mais qui pourrait prendre un peu plus de poids d’ici à la fin de cette année, une fois que l’actuelle facilité de crédit, accordée depuis 2016 par le FMI, sera terminée.
Projections
2017 2018 2019 2020
Seychelles
5,2
6 277
5 882
5 619
Stocks 6 472 6 360
14,2 12,1
1,2 2,9 1,6
314 4,1
2014
436
451
2015
389
2016
349
2017
2018
Les retards du développement humain (pour l’année 2017)
Population
26 millions
d’habitants, dont 50 % a moins de 18 ans
Urbanisation
36,5 %, moins que la moyenne de 39,7 % au sud du Sahara
PIB par habitant (en $ de 2011, en parité de pouvoir d’achat, PPA)
Espérance de vie
Durée moyenne de scolarisation d’un Malgache âgé de 25 ans : 6,4 ans, contre 10,5 ans attendus, et une moyenne de 5,6 ans en Afrique subsaharienne
Population vivant sous le seuil de pauvreté (moins de 1,90 $ par jour)
1 416 $
66,3 ans
plus que la moyenne de 60,7 ans en Afrique contre une moyenne subsaharienne de 3 489 $ en Afrique subsaharienne
38,6 %
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MYRIAD GLOBAL MEDIA
L’huile lourde de Tsimororo pourrait alimenter les générateurs de la Jirama pour un prix inférieur à celui des combustibles importés, selon l’exploitant.
ÉNERGIE
À la rescousse de la Jirama
Résolues à sauver de la faillite la compagnie nationale d’eau et d’électricité, les autorités renégocient ses contrats d’achat et cherchent d’autres fournisseurs.
EN 2018, L’ÉTAT A SUBVENTIONNÉ LA SOCIÉTÉ PUBLIQUE À HAUTEUR DE 78 MILLIONS D’EUROS. QUAND LE BUDGET DE LA SANTÉ N’EXCÈDE PAS 53 MILLIONS. 144
EMRE SARI
e dossier énergétique symbolise à lui seul la volonté du gouvernement de rompre avec les pratiques qui pénalisent depuis des décennies les finances publiques et qui ont mené la Jirama, la compagnie nationale d’eau et d’électricité, à la ruine. Depuis des années, la société publique vend sa production à perte. Au 30 juin, elle cumulait une dette de 412 millions d’euros, après avoir essuyé une perte opérationnelle de 149 millions d’euros lors de l’exercice précédent. Pour maintenir la tête de la Jirama hors de l’eau, l’État l’a subventionnée à hauteur de 78 millions en 2018… Quand l’ensemble du budget annuel de la Santé n’a pas dépassé les 53 millions. Afin de sauver la compagnie, le gouvernement a commencé par renégocier ses contrats d’achat d’électricité auprès des producteurs indépendants. Les discussions, entamées dès le 19 février, se poursuivent, avec comme objectif pour les autorités de revoir les prix à la baisse, pendant que les opérateurs se plaignent, eux, des sommes colossales que leur doit toujours la Jirama, donc l’État. Depuis plus de deux ans pour Enelec, filiale du groupe Filatex, depuis dixhuit mois pour Jovena, du groupe Axian. Cette dernière est également le principal fournisseur de combustibles des centrales thermiques du pays, mais pourrait bien devoir laisser un peu de place sur ce marché estimé à plus de 85 millions d’euros par an. La Jirama, soutenue par le gouvernement, a en effet annoncé son intention d’utiliser ses propres licences d’importations pour
L
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lancer des appels d’offres auprès de nouveaux fournisseurs.
Coût de production élevé
Enfin, l’autre front qui reste à ouvrir, cette fois avec l’aval de la Banque mondiale, porte sur l’augmentation des tarifs industriels. Quand les usines profitent de 1 kWh à 5 centimes d’euro, les particuliers paient en moyenne 14 centimes une énergie dont le coût de production revient à plus du double. En parallèle à ces négociations, la Jirama diversifie ses sources de production, notamment dans les énergies renouvelables. Deux barrages hydroélectriques sont en construction, l’un à Sahofika, pour une capacité de 192 MW, l’autre à Volobe, pour 120 MW, ce dernier étant notamment porté par Axian. La compagnie nationale a également signé des contrats de fourniture dans le solaire avec GreenYellow, du groupe Casino. Autre piste suivie par les responsables de la Jirama, l’extraction de l’huile lourde de Tsimororo par Madagascar Oil. L’opérateur, qui dispose d’un stock de 100 000 barils commercialisables, a déjà investi 400 millions d’euros supplémentaires et prévoit de doubler cette somme. Cette production (transformable en fioul lourd sans raffinage) pourrait alimenter les générateurs de la Jirama pour un prix bien inférieur au combustible importé, selon l’exploitant. Mais la route et le port d’évacuation font encore défaut. Les contrats signés dès 2017 entre la Jirama, Madagascar Oil et l’État demeurent inutilisés malgré la visite du ministre des Mines le 4 octobre. En attendant celle d’Andry Rajoelina…
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TRIBUNE
Développement, pourquoi ça coince M
LAURENT HABERSETZER/ DNA
adagascar est le cinquième pays le plus pauvre de la compétence technique des acteurs. La corruption du monde. En 1960, l’année de son indépendevient alors le remède universel pour échapper à la dance, son PIB par habitant était d’environ 500 dolparalysie économique et sociale. lars ; en 2019, il est estimé à 470 dollars. Même si la Il en va de même pour la compréhension de la loi. population a été multipliée par 5 et a atteint 26 milThéoriquement identique pour tous, elle est interlions d’habitants, le bilan est accablant. Qualifiée de prétée dans la logique de la coutume, variant selon « point aberrant » dès 1998, l’économie malgache l’ethnie ou la caste, selon que la transgression est devient une « énigme » et un « paradoxe » vingt ans publique ou pas, et en fonction de la crainte qu’inspire plus tard ! le transgresseur. Ainsi, et malgré les apparences, l’État En dépit des thérapies de choc appliquées par le n’est qu’une coquille vide. Le véritable pouvoir réside FMI, des financements de la Banque mondiale et de la hors des institutions, dans un rapport de force per« communauté internationale », la situamanent entre politiques et notables, au tion reste toujours la même : enrichissenom d’intérêts particuliers et sans aucun ment des élites, appauvrissement de frein. La tradition ignore l’intérêt généla population, corruption, inégalités et ral. L’horizon des solidarités se limite à insécurité généralisées. Avec deux excepla famille élargie, au mieux à l’ethnie. tions : les dernières années de pouvoir de Ratsiraka (2001) et de Ravalomanana es dominances culturelles ont (2007). La hausse du PIB atteint alors été répertoriées par le collectif 6 %, mais les deux présidents sont renVoankazoanala, qui en a retenu sept : le versés peu après, faute de redistribution henamaso (honte du regard de l’autre), Sylvain Urfer des fruits de la croissance. puissant inhibiteur social, l’extrême Politologue jalousie, l’obligation du consensus, la et écrivain. Madagascar, les discours et les lois peur omniprésente, le parasitisme du se succèdent, mais rien ne change. fihavanana (relations sociales sur le La parole est considérée comme opéramode parental), l’impunité généralitoire. C’est-à-dire que quand un choix est sée et le laxisme pratiqué par tous. Ces opéré il est considéré comme réalisé dans les faits, et pratiques convergent pour empêcher l’autonomie de son suivi ne préoccupe plus personne. De même, il est la personne au sein du groupe, pour bannir l’esprit impossible de prendre une décision si elle ne fait pas critique et ainsi brider l’exercice du pouvoir. l’unanimité. Elle sera alors contournée ou, pis, rejetée. Aucun processus de développement, compris et Sanctionner, dans une culture fondamentalement relaintégré par tous, ne sera possible sans la disparition tionnelle, obligerait à rompre, pour celui qui est mis en de tels comportements. Alors et alors seulement, la cause, avec ses parents, son réseau. Plus largement, politique ne sera plus une contre-culture d’impunité, l’affrontement verbal est honni, au point qu’aucun élu l’économie ne sera plus gérée par des entrepreneurs ne veut endosser le titre d’opposant, pourtant reconnu paralysés par le consensus et le henamaso, et la vie constitutionnellement depuis 2010. Il en découle une sociale ne sera plus plombée par la peur, la jalousie incapacité structurelle à décider et à contester, en dépit et le laxisme.
À
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C
COMMUNIQUÉ
INDUSTRIE MALGACHE
LE RHUM D’EXCEPTION
Mis sur le marché depuis 1982, le rhum malgache continue ses exploits. Élaboré par la compagnie Vidzar, ce produit d’exception se démarque par ses saveurs uniques et persistantes. Son goût unique résulte de l’exploitation de la canne à sucre. Ce trésor liquide se dote de parfums extraordinaires au contact des girofliers, des poivriers et de la vanille dont les racines s’entremêlent avec celles de l’ylang-ylang. Toute une flore exceptionnelle qui pousse en abondance sur l’île de Nosy Be, au nord de Madagascar, lieu où la compagnie Vidzar a installé sa première rhumerie en 1981. S’y ajoute, le savoir-faire de son maître de chai qui a fait ses études d’œnologie en France. Il maîtrise parfaitement l’art de l’assemblage, de l’élevage et du vieillissement de rhum. Grâce à son esprit créatif, d’innovation et surtout d’excellence, il continue toujours à concevoir des produits uniques, exceptionnels, envoûtants et savoureux.
Tous les membres du personnel l’accompagnent dans ses démarches et donnent le meilleurs d’eux-mêmes afin de réaliser les objectifs fixés.
GAMMES DE PRODUITS Afin de répondre aux différentes sensibilités des consommateurs, DZAMA propose actuellement trois gammes de produits avec 56 variétés. La gamme classique, dédiée au marché local, est distribuée dans toute la grande île. Quant aux gammes prestige et luxe, elles ont été concoctées afin de séduire le marché international. Elles sont façonnées avec soins par de talentueux ouvriers spécialisés, sous le regard exigeant des contrôleurs a chaque étape. Des produits raffinés qui conjuguent tradition et modernité.
AMBITION Apporterdesaméliorationsconstantes, non seulement au niveau de la qualité intrinsèque des produits, mais également sur le packaging, tel est le défi quotidien de cette entreprise citoyenne qui souhaite devenir un étendard de l’excellence malgache dans la production de rhum. Prête à s’internationaliser, la compagnie Vidzar a commencé l’exportation en 2010. Les rhums DZAMA sont actuellement présents dans 13 pays d’Europe, 4 états d’Amérique et 2 états canadiens. Dans l’étendue de sa renommée, DZAMA participe toujours à divers foires et concours internationaux dans le domaine des spiritueux et elle a été plusieurs fois récompensée. Ainsi, DZAMA dispose actuellement 30 médailles dont 10 en or, 12 en argent et 8 en bronze. Celles-ci ont été obtenues lors des concours organisés à Miami, à Londres, à Paris, à Bruxelles, à Madrid et à Berlin. Beaucoup de chemin a été parcouru. Mais, il reste encore énormément à faire afin de concrétiser l'ambition de l'entreprise qui souhaite accroître la visibilité de la marque DZAMA sur le marché international. Pour y arriver, toute l’équipe de la compagnie Vidzar s’investit à fond.
Compagnie Vidzar - Tél. : (+261) 47 484 04 - Email : exportmada@dzama.mg
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L'abus d'alcool est dangeureux pour la santé
JAMG - PHOTOS : D.R.
RAFFINEMENT MALGACHE
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Retour à la case Mada
Ils sont rentrés au pays pour lui donner un nouvel élan. Portraits de quatre jeunes visionnaires prêts à relever tous les défis. EMRE SARI
Romy VOOS ANDRIANARISOA De Marx à BP
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DR
R
omy Voos Andrianarisoa, 42 ans, n’est pas rentrée à Madagascar en 2017 pour la croissance de 5 % affichée alors par le pays. « Je n’ai pas du tout vu d’embellie à l’époque. C’est plutôt le constat de mauvaise croissance qui m’a fait revenir », assure aujourd’hui la jeune femme. Son père, journaliste politique, lui fait lire Marx dès ses 9 ans. C’est peut-être de là que vient son engagement. Elle vit la grande Histoire au quotidien, en Russie, où sa mère est attachée d’ambassade pendant dix ans. De Gorbatchev à Poutine, en passant par Eltsine. Premier retour au pays en 2012. Elle trouve un poste chez Madagascar Oil, qui tente d’exploiter l’huile lourde de Tsimiroro. « Je voulais tracer le chemin vers une industrie extractive propice au développement. » Pour son second retour, en 2017, elle rêve « d’intégrer une grosse structure pour apporter du changement ». Elle est aujourd’hui responsable pays chez British Petroleum (BP) et travaille au sein du groupe multisectoriel Filatex comme directrice des relations publiques et du mécénat. Elle dirige notamment le fonds de dotation qui promeut l’art et la culture malgaches. Romy Voos Andrianarisoa a également créé, en 2012, l’ONG Miaro Madagascar, qui vise à renforcer les capacités des femmes en grande vulnérabilité. Elle s’exprime enfin comme conférencière à l’université. Et n’oublie jamais de citer Thomas Sankara, passé par l’école militaire d’Antsirabe, dont elle admire le parcours et l’audace.
Matina RAZAFIMAHEFA L’avenir en quelques clics
«
J
’aime aller au-devant des défis. » Et à 21 ans, Matina Razafimahefa a trouvé s on b onheur à Madagascar. « C’est bien parce que l’économie n’est pas bonne » qu’elle est rentrée au pays en février 2018. Matina Razafimahefa grandit dans la Grande Île mais intègre dans un collège de Nantes (France) un cursus en sport-études, option tennis. « Durant ces années, tu es égoïste, très focalisé sur toi-même, ton tennis, ta santé et tes études. Tu ne penses qu’à toi. » C’est à cette époque qu’elle réfléchit à la formation sur internet. « Je ne comprenais rien en maths avec ma prof. J’ai regardé des tutoriels en ligne et j’ai eu 16 au bac. » C’est pendant ses premières années de sciences politiques à la Sorbonne qu’elle entend l’histoire d’une Suédoise qui a créé une application pour venir en aide aux migrants. « Cela a été un déclic. » En janvier 2018, Matina Razafimahefa lance la start-up Sayna et donne à des Malgaches la possibilité d’apprendre l’informatique, avant de les placer ensuite elle-même en entreprise. Elle associe sa mère, qui avait déjà tenté – sans succès – de monter une structure identique au début des années 2000. « Elle est ma plus grande source d’inspiration », assure-t-elle, en souhaitant s’appuyer également sur le gouvernement. « Les pouvoirs publics doivent utiliser les nouvelles technologies pour faire de l’entrepreneuriat un levier de croissance. J ’e n c o u r a g e énormément le président, car je veux croire en ce qu’il fait. » DR
ENTREPRENEURIAT
COMMUNIQUÉ
Entretien avec Niriko Rosalien TSIRENGE, Directeur Général de la Société de Manutention des Marchandises Conventionnelles (SMMC) Pouvez-vous présenter la SMMC ? La SMMC a l’exclusivité de la manutention des marchandises de type conventionnel et fait partie des principaux concessionnaires au port de Toamasina. Nos activités concernent les opérations nécessitées par l’embarquement et le débarquement des marchandises, la manutention, le magasinage et le stockage des marchandises de types conventionnels, ainsi que la location des matériels de transport y afférents. Le terminal occupe une superficie totale de 7 hectares et dispose d’un parking pour 1 820 véhicules. Il est doté des équipements nécessaires : tracteurs avec ou sans remorques, grues de quai, et élévateurs. La SMMC est une société à participation majoritaire de l’État. Elle a été créée par le décret n° 2007-867 du 4 octobre 2007, dans le cadre de la mise en œuvre de la Politique de Réforme du sous-secteur portuaire à Madagascar, notamment au port de Toamasina. Nous sommes opérationnels depuis le 15 février 2008. Depuis septembre 2019, le conseil d’administration de la SMMC est présidé par monsieur Herilaza IMBIKI. Pouvez-vous nous parler du trafic ? En 2018, la SMMC a traité 642 831 tonnes de marchandises, principalement à l’importation : ciment en big-bags avec 313 499 tonnes, sacheries telles que riz en sac, chrome et véhicules automobiles (12 161 unités). Avec l’extension du port de Toamasina, le trafic de ciment devrait augmenter. À l’exportation, notre produit phare est le litchi avec 15 000 t en 2018. Bien sûr, nous sommes ouverts à d’autres produits.
Email : contact@smmc.mg / Tél.: + 261 53 321 63
Quels sont vos projets d’investissements ? La durée des escales des navires et le coût de transit ont été réduits. Le coût de passage portuaire est acceptable. Nous avons acquis récemment un reach stacker et quatre chariots élévateurs pour la manutention des palettes de litchi. Nous avons mis en place un processus de décongestionnement et de fluidité en vue d’un plus grand trafic afin d’accroître la productivité et poursuivre la réduction des coûts. Mieux, nous investissons actuellement dans l’informatisation du terminal. L’installation d’un logiciel Open Source, accessible à distance, permet le suivi des mouvements des véhicules depuis le débarquement jusqu’à l’enlèvement. La cotation en ligne est en cours d’installation et devrait être opérationnelle au début de l’année 2020. La mise en place des barcodes pour la traçabilité logistique des marchandises est en cours. Une attention partiUN PROGRAMME DE MISE culière est accordée à EN CONFORMITÉ AUX la sécurité. Actuellement, le terminal est NORMES INTERNATIONALES sécurisé par des clôDE SÉCURITÉ, AVEC UN tures et une surveilFOCUS PARTICULIER SUR lance vidéo HD. Nous sommes en train de LE MONITORING DES réorganiser les orMARCHANDISES ganes de contrôle et de sécurité : renforcement du Time and attendance systems et de l’EPI (casque, masque de poussière, lunettes de protection, chaussures de sureté, gants de protection). La formation du personnel est une autre priorité. Nous organisons des sessions régulières en matière de maintenance, de conduite et de sécurité. Par ailleurs, la SMMC a un important projet de construction de logements sociaux pour le personnel répondant à la politique du Président RAJOELINA. Notre objectif est de répondre aux enjeux des grands projets de la stratégie du pays en cohérence avec toutes les phases du programme ÉMERGENCE mis en place par le président : villes nouvelles, infrastructures, industries, etc.
www.smmc.mg
JAMG / © D.R.
RENFORCER LES STANDARDS DU TERMINAL SMMC
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Ranto ANDRIAMBOLOLONA Il donne l’exemple
«
J
DR
’ai toujours le regard tourné vers Madagascar, où j’essaye modestement d’apporter ma contribution. » Même si c’est parfois depuis la France. À 42 ans, Ranto Andriambololona n’a toujours pas clairement choisi entre son île d’origine et sa terre d’adoption. Et ce n’est pas une question d’argent. « On m’a déjà proposé d’être directeur d’innovation chez BMW », affirme l’ingénieur. Né à Antananarivo, il grandit à Diego-Suarez, puis fait toutes ses études sur l’île et sort diplômé de l’Institut supérieur polytechnique. En 2001, il part pour la France afin de participer à la création de logiciels et comprend vite que « le niveau était largement atteignable pour des développeurs malgaches. Avec des coûts bien plus supportables ». Il décide donc de
rentrer et fonde, en 2017, HaiRun Technology, une SSII spécialisée dans le développement de logiciels. Il lance en parallèle Smartpredict, une plateforme d’intelligence artificielle, et lève, au début de 2019, 250000 euros auprès du fonds d’investissement Miarakap, avant une seconde levée prévue pour 2020. Sa société emploie actuellement 60 personnes et réalise 1 million d’euros de chiffre d’affaires. Le chef d’entreprise plaide pour que la diaspora suive son exemple. « Beaucoup refusent de rentrer par peur des rackets de l’État… Ils exagèrent. L’administration ne nous empêche pas de travailler correctement. Le président Rajoelina a envie de faire avancer les choses, assure l’ingénieur. Même s’il accompagne son programme d’une bonne dose de spectacle. »
Yann KASAY Le changement, c’est depuis un an
J
e me suis toujours dit que je reviendrais pour faire quelque chose d’utile pour mon pays. En 2015, j’ai senti que le moment était venu. » À 32 ans, Yann Kasay s’est définitivement installé à Mada en avril 2018. Pari gagnant. « Au cours des douze derniers mois, le changement a été impressionnant. Il se passe vraiment quelque chose. » Né en France de mère bretonne et de père malgache, Yann Kasay grandit à Angers avant d’obtenir une bourse
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d’étude s à l’un iver sité Washburn, dans le Kansas. Il revient ensuite dans l’Hexagone et se met en tête d’acquérir une expérience professionnelle en cabinet de conseil dans une start-up. « Tout cela dans un but très précis », explique-t-il aujourd’hui. E n 2 0 1 7, i l f o n d e Jirogasy – littéralement « lumière malgache » – avec son frère Lauric, ingénieur. La société commercialise trois grandes familles de produits : des kits solaires de 40 à 1000 W, des valises pour
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transporter et recharger les tablettes, et des ordinateurs solaires. « Nous
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«
équipons des salles informatiques en brousse, en essayant de tout faire fabriquer à Madagascar, par de la main-d’œuvre locale », précise Yann K a s ay. Au j o u r d ’ h u i , Jirogasy profite de l’effet Rajoelina. « Le président attire les projecteurs, et cela fait du bien au pays. Je ne serais pas invité à parler lors de certaines conférences si Madagascar n’inspirait pas la curiosité. » Comme un signe de renouveau.
PAOSITRA MALAGASY
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SOCIÉTÉ
Tana enfin
Modernisation de l’aéroport, fluidification du trafic routier, rénovation des palais… La capitale se réorganise et s’embellit pour prendre une nouvelle dimension. EMRE SARI
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VAN DER MEER/ARTERRA/ANDIA.FR
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n 2019, Antananarivo n’est encore qu’un point de passage pour touristes en transit vers Nosy Be, Tuléar, ou encore Sainte-Marie. Mais la capitale a vocation à devenir elle-même une destination touristique à part entière à l’horizon 2023. C’est ce que prévoit le gouvernement, qui souhaite pour cela voir la ville et ses principaux équipements changer, s’embellir et se moderniser. À bout de souffle et incapable de digérer les flots de visiteurs supplémentaires, le vieil aéroport d’Ivato fait peau neuve. « Le chantier avance bien », assure Patrick Collard, le directeur général de Ravinala, constructeur et futur exploitant de l’infrastructure attendue dans les tout prochains mois. « Le travail le plus important porte sur la formation des équipes au sol, des douanes, des services de sécurité, et même des différents opérateurs économiques du site. Au total, 700 personnes, toutes équipées de badges : « Une première dans l’aéroport », souligne le chef d’un chantier de 220 millions d’euros, dimensionné pour accueillir entre 1,5 et 1,8 million de passagers par an. Pour atteindre le centre de la métropole, une nouvelle route a été mise en service en 2018, qui coupe à travers les rizières et désengorge l’antique RN4. Et, partout dans la ville, des dizaines de kilomètres de voirie ont été rénovés dès les premiers mois du mandat d’Andry Rajoelina. Les travaux ont provoqué des embouteillages monstres… Mais le trafic s’est légèrement fluidifié depuis. Afin d’améliorer encore la circulation, la mairie devra également évacuer
dĂŠvoile ses joyaux
Le lac Anosy et le monument aux morts, dans le centre d’Antananarivo.
MADAGASCAR
PUBLI-INFORMATION
REVERDIR LA GRANDE ÎLE
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e 19 janvier 2020, le président Andry Rajoelina entend marquer les esprits par une action forte : 60 millions d’arbres seront plantés sur le territoire de Madagascar en une seule journée. En effet, la reforestation de la Grande Île est l’un des engagements de
campagne du Président, qui entend se montrer à la hauteur de l’enjeu. Après des années de déforestation massive, il s’agit de rendre à Madagascar ce qui constitue sa richesse et de lutter
contre le réchauffement climatique, en faisant de l’île le véritable poumon de l’océan Indien.
Le président Andry Rajoelina a compris que parvenir à une gestion rationnelle et durable desressourcesforestièresdel’îleétaitunenjeu vital pour le pays.
Q Dix milliards de graines forestières seront plantées. Et six millions d’élèves, étudiants et militaires seront mis à contribution.
LA REFORESTATION, UN ENJEU VITAL POUR MADAGASCAR
L’île de Madagascar présente un écosystème d’une richesse exceptionnelle, mais, en soixante ans, la surface de forêt a diminué de 45 %, si bien que 75 % des espèces végétales ont disparu depuis l’indépendance. Feux de brousse, défrichement, destruction des aires protégées,traficderessourcesnaturellessont autant de fléaux pour l’île et sa biodiversité. Ladéforestationentraîneeneffetunehausse des émissions de gaz à effet de serre, qui contribue au réchauffement climatique. Les espèces animales et végétales disparaissent : sil’onnefaitrien,c’esttoutunécosystèmequi sera définitivement bouleversé.
Chaque année, l’objectif est de reboiser 40 000 hectares de terrain et de replanter 80 millions d’arbres en associant la population malagasy.
www.presidence.gov.mg
Afin de lutter contre la déforestation, le gouvernement a décidé de mener une politique volontariste.Lebudgetquiyestalloués’élève ainsi à 2,5 milliards MGA (soit 705 000 USD) pour l’année 2019. Le gouvernement s’est fixé des objectifs clairs et ambitieux. Il ne s’agit pas seulement d’empêcherladisparitiondelaforêtmaisaussi d’étendrelessurfacesboisées:chaqueannée, 40 000 hectares de terrain seront reboisés, et jusqu’à 80 millions d’arbres seront replantés. Lesarbresplantéssontdesvariétésàcroissance rapide comme le paulownia, le Pinus kesiya, le bambou, ou encore l’eucalyptus hybride. Pour mener à bien ce projet, l’objectif est également d’associer efficacement la population malagasy en la rendant actrice de la reforestation. Six millions d’élèves, étudiants, et militaires seront mis à contribution dans les opérations de plantation. L’ensemble du projetseraenfinassociéàuneéducationenvironnementale etcitoyennedelapopulation, afin que la plantation ne soit pas l’acte d’un seuljour,maisqu’elles’inscrivedansletemps.
DIFCOM/DF- PHOTOS : © PRÉSIDENCE DE MADAGASCAR.
UNE POLITIQUE VOLONTARISTE
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les marchands des trottoirs pour – enfin – rendre ces derniers aux piétons. Elle devra aussi organiser les activités de Taxi-Be, les minibus locaux, en leur imposant de rénover leurs véhicules et surtout de respecter des arrêts déterminés, plutôt que de stopper inopinément au milieu de la chaussée pour prendre ou laisser des passagers. Les autorités ont aussi commencé à refouler du centre les charrettes à bras. Du coup, après une période de tension, les embouteillages devraient se résorber et trois heures ne devraient plus être nécessaires pour parcourir les 15 kilomètres qui séparent la ville de l’aéroport.
aussi mettre un terme aux constructions anarchiques, voire détruire certains bâtiments construits illégalement par le passé. À la place, des jardins pourraient être aménagés – autant de passages vers les petites ruelles pleines de charme qui descendent vers la plaine. En cours de réhabilitation avec le soutien de l’Agence française de développement (AFD), elles permettent de découvrir en déambulant les multiples secrets des royaumes malgaches. Et dans toute la ville, on peut joindre le gastronomique à l’historique, grâce aux nombreuses tables de renom, du Rossini à La Varangue, sans oublier les nouveaux venus comme L’Arrivage ou La Fabrik. Mais la grande histoire du moment concerne le développement d’une ville nouvelle, baptisée Tana Masoandro. Sa réalisation est prévue en quatre phases, et les premiers travaux de terrassement doivent démarrer dès l’année prochaine. Elle doit permettre de désengorger la capitale en accueillant in fine plus de 300 000 personnes sur 1000 hectares. Outre les 20 000 logements déjà annoncés, le site verra également l’arrivée de nombreuses administrations de premier plan, dont certains ministères, ainsi que d’importantes zones commerciales et autres centres d’affaires. « L’État a déjà annoncé qu’il allait investir 650 millions d’euros dans les remblais et les équipements publics. Au secteur privé de contribuer pour le reste », tranche Gérard Andriamanohisoa, urbaniste et conseiller à la présidence sur ce dossier suivi de très près par Andry Rajoelina, qui espère bien couper les premiers rubans inauguraux avant la fin de son présent mandat.
LA VILLE NOUVELLE, TANA MASOANDRO, VA DÉSENGORGER LA CAPITALE EN ACCUEILLANT PLUS DE 300 000 PERSONNES SUR 1 000 HECTARES.
Symboles retrouvés
La capitale elle-même retrouve ses symboles. Des quartiers du nord au sud pourraient un jour prochain être reliés par un système de télécabines. La société française LST Transports, associée à un partenaire malgache, a présenté un projet en ce sens au début d’octobre, lors de la première mission organisée par le Medef dans le pays depuis près de quinze ans. C’est toute la ville haute qui, à terme, doit retrouver son prestige pour être un jour classée au patrimoine mondial de l’Unesco. Le périmètre identifié de 80 ha s’étend sur la crête qui domine la cité et l’emblématique lac Anosy. Il englobe différents musées, et surtout les palais du Premier ministre et de la reine, le Rova. Ce dernier doit être rénové pour le 26 juin 2020, jour des 60 ans de l’indépendance, comme l’avait promis le président Andry Rajoelina. Pour éviter tout risque d’éboulement, les autorités devront
À LIRE… CONTE INITIATIQUE À Madagascar, dans la partie sud des terres centrales de l’île, vivent les Zafimaniry. Un peuple peu connu, si ce n’est par les sculptures et constructions en bois réalisées par ses menuisiers, dont le savoir-faire séculaire est inscrit au patrimoine oral et immatériel de l’humanité par l’Unesco. Sitôt ce décor planté, l’intrigue se noue. Un jour, le petit Tsiry se rend sur le tombeau familial. Là, l’esprit de son arrière-grand-père lui demande de convaincre son
père, menuisier, de ne plus couper d’arbres dans la forêt tant qu’elle n’est pas reboisée, sinon elle disparaîtra. Comment le jeune garçon parviendra-t-il à faire entendre la voix de son ancêtre feu Papy Faly pour sauver sa forêt – et l’âme de son peuple ? C’est tout l’objet de ce roman pour enfants, qui se lit à la fois comme un appel écologique contre la déforestation, comme un voyage hommage à la découverte du peuple zafimaniry et comme un
conte initiatique sur la nature et sa magie, sur le respect des anciens et le rapport aux esprits. Des valeurs indissociables de la culture malgache, dont l’auteur semble vouloir imprégner le lecteur. Après plusieurs essais, FrançoisXavier Freland, journaliste pour divers médias (dont Jeune Afrique, TV5 Monde
et France Inter), signe ici son premier roman pour la jeunesse – qui parvient aussi fort bien à embarquer les plus grands. CÉCILE MANCIAUX
L’Arbre des voyageurs, par François-Xavier Freland, éditions Magellan & Cie, collection Romans jeunesse. Parution en octobre 2019 96 p., 12 €
jeuneafrique no 3068-3069 du 27 octobre au 9 novembre 2019
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Jean-Claude Dubois
Architecte
« J’évite les effets de mode ! »
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l est l’un des principaux concepteurs de la modernité d’Antananarivo. L’agence Dubois et Associés, qu’il dirige avec Alexandre Ramarosaona, a imaginé la Tour Orange, le Coliseum d’Antsonjombe, la Villa Pradon ou l’immeuble Fitaratra. L’architecte a aussi dessiné les formes élancées des hôtels Ibis et Novotel ainsi que les ailes du nouvel aéroport… Pour que la capitale puisse enfin prendre son envol. Jeune Afrique : Comment concevez-vous les bâtiments que vous dessinez ? Jean-Claude Dubois : Ils doivent être de forme simple mais facilement reconnaissables. Éviter surtout l’effet de mode pour que, quinze ans plus tard, le visiteur ait l’impression que le bâtiment a toujours été là. Dans le cas de l’hôtel Ibis, j’ai gardé la structure classique à l’intérieur, mais les surfaces sont globalement plus grandes que dans un établissement français. À l’extérieur, je cherchais une architecture qui se ferait remarquer. C’est le cas de cette forme arrondie, reconnaissable au premier coup d’œil. Je ne pense pas qu’il existe un autre Ibis identique dans le monde. L’immeuble de bureaux Fitaratra a été construit autour d’un noyau central d’où partent deux couloirs qui mènent aux bureaux à gauche et à droite. Tout cela est très traditionnel, mais le porche d’entrée, lui,
est plus décalé, avec ses gros piliers et ses terrasses extérieures. La façade vitrée elle-même reste d’une facture très simple, mais le verre employé réfléchit le ciel et lui permet de changer de couleur au fil de la journée. C’est par ce genre de détail que l’on reconnaît mes projets. Ce sont mes morceaux de bravoure. Quelles sont les particularités de vos autres projets emblématiques à Antananarivo ? J’ai décidé de poser le bâtiment de la Tour Orange – qui se réfléchit d’ailleurs dans la galerie de verre de Filaratra – en oblique afin qu’il soit orienté vers le centre du lac Anosy, que je considère comme le cœur de la capitale. Il prend également plus d’ampleur sous un tel angle pour ceux qui entrent dans la ville.
Les piliers sont en forme d’ogive de façon à jouer avec la lumière et à se réfléchir dans l’eau du bassin. Pour les « Kubes » de l’ensemble Galaxy, je n’ai pas placé de piliers sous les porte-à-faux qui surplombent l’entrée : on a l’impression que la masse va s’écrouler. J’ai réalisé un bâtiment à « double peau » pour le Novotel, et une autre partie vitrée à l’intérieur, un vide d’air et des murs intérieurs. L’isolation phonique et thermique est parfaite. Jamais un tel bâtiment n’a été réalisé jusqu’à présent dans la sous-région, pas même à Maurice. Comment trouvez-vous vos inspirations ? Je réfléchis plus que je ne dessine au départ. Je discute aussi beaucoup avec les donneurs d’ordres. C’est important de se connaître avant de démarrer les croquis, qui ressemblent à des petits dessins d’écoliers et sont plus des pense-bêtes qu’autre chose. Mais je sais déjà à cette étape de la conception où je souhaite aller, à quoi je veux arriver. La vraie réflexion est davantage en amont. Quand un projet me plaît, je suis comme harponné. Je travaille bien sûr avec les dernières technologies disponibles, mais je me méfie des images 3D. Une phrase de Gaudi résume mon approche : « Pour qu’une œuvre d’architecture soit belle, il faut que tous les éléments possèdent une justesse de situation, de dimensions, de formes et de couleurs. » EMRE SARI POUR JA
Propos recueillis par EMRE SARI
jeuneafrique no 3068-3069 du 27 octobre au 9 novembre 2019
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MADAGASCAR
INFRASTRUCTURES
L’HEURE DE LA MODERNISATION EST ARRIVÉE
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utter contre les infrastructures défaillantes, améliorer l’accès à l’eau, désengorger la capitale grâce à la construction d’une ville nouvelle… Réhabiliter et développer les infrastructures, à commencer par le réseau routier du pays, constituent
la pierre angulaire du programme de développement du président Andry Rajoelina.
Sous la houlette du ministère de l’Aménagement du territoire national, de l’Habitat et
des Travaux publics, nombre de chantiers ont été amorcés et seront achevés d’ici la
fin de l’année. À Madagascar, moins d’un tiers de la population bénéficie de l’accès à l’eau potable. Face à cette situation inacceptable, plus de 12 millions d’euros ont été alloués à des projets d’adduction d’eau potable cette année. Cet investissement, qui permettra de fournir de l’eau dans 16 districts malgaches, va notamment se traduire par la construction de stations de captage dans les régions Sud, Nord et Sud-est d’Antananarivo, la réhabilitation du barrage de PK7 et le renforcement de la pompe d’Ambodimanga (province de Toamasina). Une unité de purification d’eau de 500 m3 et un groupe électrogène d’une capacité de 630 kVA seront installés dans la province de Toamasina. Dans la province de Mahajanga, une centrale de purification d’eau
Q Andry Rajoelina devant le programme national Initiative pour l’émergence de Madagascar, à Amborovy-Mahajanga.
Q Démarrage du chantier d’un programme immobilier.
d’une capacité quotidienne de 3 600 m3 verra bientôt le jour. De son côté, la province de Tolaria bénéficiera d’un forage capable de produire chaque jour 6 000 m3 d’eau. Autant de mesures qui permettront d’alimenter en eau 1,5 million de Malgaches supplémentaires. Mi-octobre, l’extension d’un système de forage à eau a été lancé à Ambodiakondro-Ambalavato,afinderéglerlesproblèmes d’accès à l’eau potable dans cette capitale régionale grâce à la production de 20 m3 d’eau par heure. De leur côté, les travaux de réhabilitation du barrage hydraulique de Bevava, réalisés à 90 %, et la réhabilitation du barrage de Sahamaloto permettront d’irriguer 43 000 ha de surface agricole, contribuant à l’autosuffisance alimentaire de la Grande Île.
Q Détail du projet de construction de dix immeubles sur 4 étages.
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RÉHABILITATIONS ROUTIÈRES TOUS AZIMUTS Q Après la rénovation totale du stade Rasolonjatovo, Andry Rajoelina a annoncé la construction de nouvelles infrastructures sportives.
DÉSENGORGER LA CAPITALE
La ville nouvelle de Tana-Masoandro, qui sera achevée en 2023, pourra accueillir 300 000 habitants.
Promessedecampagned’AndryRajoelina,la ville nouvelleTana-Masoandro, à proximité immédiate d’Antananarivo, permettra d’ici 2023 de désengorger la capitale, soumise à une pression démographique excessive. Conçue pour 500 000 habitants maximum, elle en compte actuellement quelque 3,2 millions, un chiffre qui devrait atteindre 6 millions d’ici 2033.Tana-Masoandro s’étendra sur 1 000 hectares au nord d’Antananarivo, sur la rive gauche du fleuve Ikopa, afin d’éviter les inondations sur la rive droite. Andry Rajoelina ayant été maire d’Antananarivo, il sait qu’il est impossible de transformer la capitale dans sa configuration actuelle faute d’espace disponible pour construire de nouvelles infrastructures, agrandir les rues et loger tous ses habitants. Cette ville nouvelle ambitionne donc d’accueillir 300 000 habitants (dont 100 000 résidents), des infrastructures administrative, scolaires, sanitaires et sportives, et d’assurer 42 % du PIB produit par la capitale actuelle. À la clé de ce projet pluriannuel, pas moins de 100 000 emplois directs et indirects.
Q Le Président sur le chantier de réhabilitation de la RN 5A reliant Ambilobe à Vohemar.
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Alors que 90 % du trafic se fait par le réseau routier, les routes nationales, provinciales et communales ne couvrent qu’une partie du territoire. Ce maillage est insuffisant pour l’acheminement des produits et la desserte des régions enclavées. Sur 48 000 km, seuls 7 200 km sont bitumés. En matière de transport,ledéfimajeurrestedonclaréhabilitation et la construction de routes, surtout dans les zonesàfortpotentieléconomique.Danscette optique, le gouvernement concentre pour l’heure ses efforts sur le réseau structurant, le développementdesespacesdecroissanceet lerenforcementdumaillagedesroutesrurales, afin de désenclaver les zones de production. Dans le périmètre de la capitale, si la liste des travaux de réhabilitation en cours des routes nationales est longue, les travaux de réparation et d’entretien ont également concerné les rues de nombreuses villes, mais aussi des digues et des ponts. Cette dynamique sera maintenue l’an prochain, les travaux de mise en place et d’entretien de divers ponts (Manakara,Soanala,Amborondolo,etc.)ainsi que la poursuite de la construction et de la réhabilitationderoutesnationalesàtraversle pays figurant parmi les chantiers prioritaires.
Q Le Président s’est engagé à bâtir une trentaine d’écoles primaires publiques, chacune pouvant accueillir 500 élèves.
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