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HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 52e année • N° 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
PALMARÈS QUI SONT LES SPORTIFS AFRICAINS LES MIEUX PAYÉS?
ENQUÊTE LE VRAI POUVOIR DES FRANCS-MAÇONS
NIG
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L’eff Isso et ufou Dossier de 22 pages
MALI Spécial 10 pages
ÉDITION AFRIQUE DE L’OUEST France 6 € • Algérie 350 DA • Allemagne 8 € • Autriche 8 € • Belgique 6 € • Canada 11,90 $ CAN • Danemark 60 DKK • DOM 6 € Espagne 7,20 € • Éthiopie 95 birrs • Finlande 8 € • Grèce 8 € • Italie 7,20 € • Maroc 35 DH • Mauritanie 2000 MRO • Norvège 70 NK • Pays-Bas 7,20 € Portugal cont. 7,20 € • RD Congo 11 $ US • Royaume-Uni 6 £ • Suisse 11,80 FS • Tunisie 4,50 DT • USA 13 $ US • Zone CFA 3200 F CFA • ISSN 1950-1285
LE PLUS
de Jeune Afrique
POLITIQUE Démocratie, an I
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INTERVIEW Mohamed Bazoum, chef de la diplomatie CARNET DE ROUTE Zinder, fière et dépendante ÉCONOMIE Mines, agriculture, services… L’effervescence
NIGER
L’effet Issoufou JEUNE AFRIQUE
P. STERCZEWSKI/RESERVOIRPHOTO
Un an après l’investiture du chef de l’État, le pays confirme sa progression sur la voie de la démocratie et du développement. Il est parvenu à maintenir la sécurité, à équilibrer les pouvoirs et à consolider la croissance.
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Le Plus de Jeune Afrique
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Prélude Cherif Ouazani
Gérer l’insoutenable fragilité
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des cours des matières premières, séchei l’on devait décrire le cheminement de la démocratie nigérienne resses cycliques et leur lot de menaces de famine planant sur plus de la moitié de la depuis la Conférence nationale de 1991, le moins que l’on pourrait population) – ; une institution militaire dire est qu’il a été parsemé d’embûches, moins aventuriste qu’il n’y paraît et une voire chaotique : trois putschs et un régiclasse politique plus mature qu’on ne cide. Avec son alternance en 2002 et celle le pense. qui était annoncée pour 2012, la diversité Pourquoi alors cette démocratie tropicale semble-t-elle si fragile ? Sans doute de ses parlements successifs et le fonctionparce que la menace n’est pas endogène, nement de ses institutions, le voisin malien avait des allures de bon élève de l’expécomme au Mali, mais exogène. Il est fort rience démocratique, recevant satisfecit peu probable que les Touaregs nigériens soient tentés par l’aventure Azawad, ils et chaudes félicitations des chancelleries et des ONG internationales en matière de auraient trop à perdre. Le Premier ministre démocratie et de bonne gouvernance. Un est l’un des leurs, les anciens chefs rebelles vieux souvenir, depuis le 22 mars 2012, sont tous retombés dans les bras de la date de la chute de Koulouba. À Niamey, nul ne saurait Il est fort peu probable que les se réjouir de ce qui arrive au Touaregs nigériens soient pays de Soundiata Keïta, mais on a bien du mal à ne pas tentés par l’aventure Azawad. en tirer une sorte de fierté République et sont aujourd’hui d’honationale. « Aucun des trois coups d’État norables élus nationaux ou locaux, de qui ont jalonné notre parcours n’a réussi hauts commis de l’État, au service de la à entamer notre choix irréversible pour la démocratie ou à constituer une menace République, celle du Niger. pour l’unité de notre territoire national, Si l’irrédentisme des Hommes bleus affirme un général nigérien à la retraite. En revanche, un seul putsch au Mali a de l’Aïr est contenu, la criminalité transsuffi pour que l’État se désagrège, que frontalière couplée au phénomène salala République se délite et que son unité fiste, avec Al-Qaïda au Maghreb islamique territoriale implose. » (Aqmi) à l’Ouest et Boko Haram au Sud, ainsi que les conséquences néfastes de Est-ce à dire que le Niger est à l’abri la crise libyenne obsèdent le leadership d’un tel scénario catastrophe ? La lecture nigérien, civil et militaire. Ce n’est sans de ce dossier que nous consacrons à l’an I doute pas un effet du hasard si l’armée de la VIIe République vous aidera sans nigérienne est le partenaire le plus actif au doute à répondre à cette question par sein du Comité d’état-major opérationnel l’affirmative : une croissance consolidée conjoint (Cémoc, basé à Tamanrasset, qui et, semble-t-il, durable ; un capital symregroupe les armées algérienne, malienne, pathie à l’étranger pour cette démocratie mauritanienne et nigérienne). Grâce à ce partenariat, le Niger a pu annihiler du pauvre qui fait face, le plus souvent seule, aux défis – qu’ils soient constants toutes les tentatives d’intrusion de convois d’hommes armés. Ce ne fut pas le cas au (hostilité de la géographie et complexité de l’Histoire) ou conjoncturels (fluctuation Mali, avec les conséquences que l’on sait. ●
JEUNE AFRIQUE
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POLITIQUE Démocratie, an I
p. 82
QUE DEVIENT… Salou Djibo
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ÉCONOMIE Un optimisme à toute épreuve
p. 90
DIPLOMATIE Mohamed Bazoum, ministre des Affaires étrangères
p. 93
COHÉSION Le défi touareg à la mode nigérienne p. 96
CARNET DE ROUTE Zinder, fière et dépendante p. 100 MINES ET PÉTROLE Des échanges à forte teneur en uranium p. 104 AGRICULTURE Faire du Sahel un jardin extraordinaire… p. 106 PORTRAITS Esprits d’entreprises Mahamadou Sako, Mohamed Wan Jada, Alhassane Halid, Moussa Kaka, Halimatou Tourey Magagi p. 109 MÉDIAS Une liberté vite apprivoisée
p. 114
Le Plus de Jeune Afrique
STEPHEN JAFFE/IMF VIA GETTY IMAGES
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POLITIQUE
Démocratie, Depuis l’investiture de Mahamadou Issoufou, le 7 avril 2011, le pays a tout fait pour rester le bon élève de la région. Malgré des indicateurs encore médiocres en termes de développement humain, la croissance est bien là. Même constat pour la stabilité et la bonne marche des institutions.
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an I
PIERRE BOISSELET,
B
envoyé spécial
arack Obama veut mettre en avant les « démocraties africaines » ? En juillet 2011, Mahamadou Issoufou est invité à la Maison Blanche. Christine Lagarde cherche des points de chute pour sa première visite africaine de directrice du Fonds monétaire international (FMI) ? Elle est reçue à Niamey en décembre. Le candidat à la présidentielle française JEUNE AFRIQUE
L’effet Issoufou François Hollande désire s’afficher aux côtés d’un chef d’État africain? C’est vers celui du Niger que, mimars, il se tourne. Depuis le retour de la démocratie, avec l’élection, le 12 mars 2011, du président Issoufou, les grands de ce monde ne sont pas avares d’honneurs envers un pays hier encore au ban de la communauté internationale. C’est que le Niger impressionne,etpasseulementpar son activité diplomatique. D’après le FMI, son économie va croître de 14,1 % cette année (lire pp. 89 à 91). Un boom dû en grande partie à l’aboutissement de chantiers engagés de longue date (la production pétrolière et le démarrage de la raffinerie de Zinder). Et l’essor devrait se poursuivre, tiré par le développement des industries extractives et le retour de la confiance.
Du Tazartché à la VIIe République Mai-juin 2009 MamadouTandja dissout le Parlement et la Cour constitutionnelle, opposés à son projet de maintien au pouvoir, qu’il fait adopter par référendum le 4 août.
Côté politique, l’enthousiasme collectif des lendemains de la présidentielle – quand l’opposition saluait l’initiative de Mahamadou Issoufou de créer un statut à son chef de file battu, Seini Oumarou – a fait long feu. GRINCEMENTS DE DENTS. Le
chef de l’État n’étant pas homme à sacrifier ses convictions sur l’autel d’un hypothétique consensus, la lutte contre la corruption, qu’il a placée parmi ses priorités, fait grincer bien des dents. Huit députés, dont deux de la majorité, se sont vu retirer leur immunité le 18-22 février 2010 2 avril pour être entendus par la Coup d’État.Tandja est renversé. Salou Djibo justice. La coalition présidentielle est nommé président a résisté, mais avec l’opposition, pour une période de la rupture est consommée. transition. Reste que le combat politique se 31 octobre 2010 déroule désormais dans un cadre démocratique, bâti par les autoriRéférendum. Adoption de la Constitution de STABILITÉ. L’année écoulée n’a tés de la transition, consolidé par e la VII République, pourtant pas été tendre. La guerre le gouvernement de Brigi Rafini promulguée le en Libye a contraint des dizaines de et gardé par un Conseil constitu25 novembre. milliers de travailleurs expatriés à tionnel intransigeant. Mi-février, 11 janvier 2011 rentrer au pays. Les convulsions du ce dernier n’a pas hésité à déclaÉlections locales. Nigeria, aux prises avec l’islamisme rer anticonstitutionnel l’octroi radicaldeBokoHaram,et,depuisla d’un marché public à un député 31 janvier 2011 fin 2011, la rébellion touarègue au du parti au pouvoir par deux Législatives et Mali, ont achevé de faire du Niger ministres, celui de l’Économie premier tour de l’un des rares îlots de stabilité dans et celui de l’Équipement, égalela présidentielle. la région (lire pp. 93-94 et 97). Si le ment membres du Parti nigérien 12 mars 2011 pays a été épargné par la violence pour la démocratie et le socialisme Mahamadou Issoufou des crises de ses voisins, ces der(PNDS-Tarayya). Le 2 avril, ils ont est élu au second tour nières lui pèsent: dépenses accrues été limogés et l’opposition parlede la présidentielle de sécurité pour préserver la stamentaire a déposé une motion de (57,95 % des suffrages). Il est investi le 7 avril. bilité, situation socio-économique censure contre le gouvernement. p Christine Lagarde a précaire des rapatriés, échanges Il faudrait plus que le courroux Choisi niamey pour sa commerciauxrendusplusdifficiles, de l’opposition et les attaques de première visite sur le alors qu’une nouvelle crise alimentaire menace sa presse, désormais libre (lire p. 114), pour faire continent en tant que 5,4 millions de Nigériens. Avec plus de 40 % de sa dévier Mahamadou Issoufou de la trajectoire directrice du FMI (le population vivant au-dessous du seuil de pauvreté qu’il a choisie et qui, estime-t-il, doit passer par 21 décembre, devant l’Assemblée nationale). des réformes en profondeur et des projets de (soit avec moins de 1,25 dollar par jour), le Niger stagne à l’avant-dernier rang du classement de long terme. l’indice de développement humain du Programme L’an I de la VIIe République a donc été celui du des Nations unies pour le développement (Pnud). renforcement de la cohésion nationale et de la restauration des services publics. Pour préparer Les premiers revenus du pétrole et ceux de l’uranium, même à prix l’avenir, 2800 salles de classe (presque autant qu’en Érigée en priorité, la lutte renégocié, ne lui ont pas encore dix ans de Tandja, souligne le gouvernement) contre la corruption permis de changer radicalement ont été construites, plus de 3 000 enseignants le quotidien de la population. recrutés, de même que 500 médecins. divise la classe politique. Toutefois, l’État est parvenu à Les défis restent aussi impressionnants que maintenir la paix et à soulager les fardeaux des les monts de Bagzans, point culminant du pays plus modestes: programmes d’urgence pour éviter dans le massif de l’Aïr. Comme eux, ils ne sont pas la famine, revalorisation des salaires et pensions hors de portée. Il faudra cependant plus qu’un des fonctionnaires (de 10 % pour les plus faibles) retour à la démocratie, aussi réussi soit-il, pour y ou encore baisse des prix de l’eau et de l’électricité. parvenir. Mais Niamey a pris la bonne direction. l jeune afrique
20 octobre 2009 Législatives boycottées par les principaux partis d’opposition. Le Niger est suspendu de la Cedeao.
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L’effet Issoufou
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Gouvernance
issoufou dans un gant de velours Au bras de fer avec les Occidentaux qu’affectionnait son prédécesseur, le chef de l’État préfère le dialogue.
M
PreMier CerCle. Au bureau à 7 h 30 chaque matin (une demi-heure avant l’horaire officiel de l’administration), il reçoit pendant une heure ses principaux conseillers, avant de passer à la correspondance puis aux audiences. « Il lit énormément la presse lui-même, et pas seulement les notes que lui transmettent ses services », ajoute un familier du Palais. Il délègue peu. En tout cas, rares sont les décisions qui ne passent pas par lui et son premier cercle de collaborateurs. Celui-ci est composé quasi exclusivement jeune afrique
de fidèles du PNDS-Tarayya, parmi lesquels son directeur de cabinet, Hassoumi Massaoudou, son ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bazoum (lire pp. 93-94), et son ministre du Pétrole et de l’Énergie, Foumakoye Gado. iNTerNATiONAle SOCiAliSTe. Très
respectueux des procédures et profondément démocrate, le chef de l’État nigérien est parfois trahi par sa bonne foi. Comme lorsqu’il a reconnu devant l’exambassadrice américaine Bernadette Allen, médusée par sa « franchise », s’être « fait rouler » par l’ancien président Mamadou Ce qui compte selon lui, Tandja lorsque celui-ci lui c’est « la force des arguments, avait assuré qu’il ne briguerait pas un nouveau pas les arguments de la force ». mandat, selon un câble diplomatique de juillet 2009 dévoilé Il s’efforce aussi de conserver les liens par WikiLeaks. À la différence de Tandja, directs qu’il a tissés avec ses concitoyens Issoufou pense aider davantage son pays lors des nombreux déplacements sur le en restaurant sa crédibilité internationale terrain qu’il effectuait lorsqu’il était dans sur les plans politique et économique, l’opposition, déplacements au cours desen communiquant sur ses points de vue, quels, assurent ses conseillers, il aurait ses stratégies, ses atouts et ses besoins visité plus de la moitié des 10 000 villages – ce à quoi il s’emploie en voyageant du pays. l fréquemment –, plutôt qu’en se livrant à Pierre BOiSSeleT
P. STERCZEWSKI/RESERvoIRPhoTo
odeste, cultivé, disponible pour répondre aux médias internationaux… L’image que Mahamadou Issoufou offre à l’étranger est en décalage avec le surnom que lui ont donné ses compatriotes : Zaki, « le lion » en haoussa. Un apparent paradoxe que le président nigérien dissipe d’une formule : ce qui compte, c’est « la force des arguments, pas les arguments de la force ». Le chef de l’État, 60 ans, est réputé intransigeant sur la scène politique nationale. Succédant à trois militaires – Ibrahim Baré Maïnassara, Mamadou Tandja et Salou Djibo –, il est le premier civil à présider aux destinées du Niger depuis Mahamane Ousmane (1993-1996). Mathématicien de formation, ingénieur, il a été directeur national des Mines, de 1980 à 1985, avant d’intégrer la Société des mines de l’Aïr (Somaïr), dont il a été le secrétaire général. Il démissionne en 1991 pour se consacrer au parti qu’il a fondé quelques mois auparavant avec d’anciens compagnons, le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya), sous la bannière rose duquel il a été élu à la magistrature suprême, le 12 mars 2011. C’était sa cinquième candidature depuis 1993.
des bras de fer avec les Occidentaux. Les passes d’armes de Tandja avec Paris sur la question de l’uranium « n’étaient que de la propagande destinée à préparer les esprits à la violation de la Constitution », persifle-t-on dans l’entourage du nouveau président. Engagé dans une politique de réformes profondes et de projets à long terme, accordant une grande place à la planification rationnelle, Mahamadou Issoufou, en bon socialiste – il est vice-président de l’Internationale –, veille cependant à garder une marge de manœuvre financière pour améliorer le quotidien des plus modestes (électrification des campagnes, baisse des prix des produits et services de première nécessité…).
p Zaki, « le lion » en haoussa, est le premier président civil du pays depuis plus de quinze ans. n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
Le Plus de J.A. Niger trajectoire
Salou Djibo au repos
Principal artisan du coup d’État contre Tandja et président de la transition, le jeune général coule une retraite bien méritée.
PANAPRESS/MAXPPP
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p L’officier nigérien, à la tête de la mission d’observation de la Cedeao, appelle au calme lors du premier tour de la présidentielle en Guinée-Bissau (le 18 mars).
A
nimé par une foi quasi mystique, il courait des imprimeries aux magasins de stockage en passant par l’aéroport de Niamey. Surtout, il fallait s’assurer que tout le matériel électoral était en place, éviter à tout prix le moindre report de la présidentielle… C’était il y a à peine plus d’un an, lorsque Salou Djibo était encore le président de la transition. Ensuite, du 12 mars au 7 avril 2011, tout s’est enchaîné sans qu’un grain de sable ne vienne gripper le processus : second tour du scrutin, reconnaissance de sa défaite par Seini Oumarou, remise des pouvoirs au président élu, Mahamadou Issoufou. Puis plus rien. PUTSCHISTE VERTUEUX. Après treize
mois et demi passés à remettre le pays sur les rails de la démocratie et du développement, Salou Djibo, chef du Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSRD) et président de la transition, a disparu des écrans radar presque aussi vite qu’il y était
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paysage politique ». Cela tombe bien, ce silence correspond parfaitement à son tempérament discret. Même lorsque les quatre officiers qu’il avait placés en détention pour « atteinte à la sûreté de l’État » ont obtenu un non-lieu qui le désavouait, le 19 mai 2011, il n’est pas sorti de sa réserve. Au pays, il partage son temps entre sa résidence de Niamey, mise à sa disposition avec tout le protocole en raison de son statut d’ancien chef d’État, et son immense villa de Namaro, son village natal, situé au bord du fleuve Niger, à environ 50 km au nord-ouest de la capitale. Souvent, il s’envole pour Ouagadougou et le siège de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), où travaille sa deuxième épouse. Même sa Fondation africaine pour la démocratie et le développement (FADD), qui aurait pu lui permettre de continuer à jouer un rôle, « n’a pas vraiment décollé pour l’instant », reconnaît son cofondateur, le colonel Ibrahim Yacouba, inspecteur principal des douanes (nommé le 2 avril ministre des Transports). MISSION. Le soldat qui sommeille en
Djibo n’a en revanche pas perdu le sens du devoir et des missions délicates. Il n’a pas rechigné lorsque la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) lui a demandé de prendre la tête de sa mission d’observation électorale pour la présidentielle en Guinée-Bissau, un scrutin consécutif au décès du président Malam Bacai Sanhá (en janvier) estimé essentiel pour la stabilisation politique et sécuritaire du pays. Le 19 mars, au lendemain du premier tour (le second devrait avoir lieu le 22 avril), le rapport préliminaire indi-
apparu, le 18 février 2010, en renversant Mamadou Tandja. De nombreux observateurs doutaient pourtant que l’auteur du putsch se retire purement et simplement. À seulement 46 ans, ne risquait-il pas de s’ennuyer ferme, lui qui avait connu le feu de l’action et le sommet de l’État ? Son ombre n’allait-elle pas planer sur le débat politique ? Eh bien non. Un an plus tard, le général quatre étoiles (promotion accordée par sa propre junte au chef d’esAprès avoir connu le feu de l’action cadron qu’il était) semble et le sommet de l’État, il risquait au contraire tout à fait à son aise dans sa retraite. de s’ennuyer ferme… Eh bien non. « Il était assez embarrassé par son rôle de chef de l’État et pressé de quait qu’il s’était déroulé « dans des quitter le pouvoir », assure un témoin de conditions acceptables de liberté et de l’époque. Depuis que c’est chose faite, transparence », en soulignant des proentré dans le cercle restreint des putsblèmes de logistique et des inquiétudes chistes vertueux, il savoure son repos et relatives à l’égalité d’accès aux médias évite de faire parler de lui. Libéré de ses publics. Un texte pondéré, précis et, charges, « il en a profité pour beaucoup surtout, aussi éloigné que possible des voyager, surtout dans les premiers mois, querelles politiciennes. À l’image de son indique l’un de ses familiers. Il évite chef de mission. l de s’exprimer pour ne pas perturber le PIERRE BOISSElET jeune afrique
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L’effet Issoufou DÉCRYPTAGE
Opinions & éditoriaux Alain FAUJAS
L’avenir en rose?
J
ANVIER LITSE, vice-président chargé des opérations de la Banque africaine de développement (BAD), est formel : « La situation économique du Niger est globalement positive. » Les estimations du Fonds monétaire international (FMI) en décembre dernier le confirment : la croissance devrait y bondir de 3,8 % en 2011 à 14,1 % en 2012 sans que l’inflation s’emballe pour autant, puisqu’elle tombera de 3,4 % à 2 %. Tous ses partenaires couvrent de fleurs le gouvernement pour la sagesse de sa gestion. Le déficit budgétaire primaire est contenu à 3 %; les arriérés de la dette domestique seront soldés en 2017. La Constitution fait désormais obligation de publier les contrats miniers ainsi que les recettes attendues. Le bon élève nigérien se voit même prédire un avenir très rose par le FMI, qui s’attend à une croissance moyenne annuelle de 6,7 % jusqu’en 2031 sans que l’inflation excède 2 % par an. La croissance moyenne de l’Inde et l’inflation moyenne de la France ! Il faut dire que le sous-sol est pour quelque chose dans cette prospérité annoncée. Les exportations minières et pétrolières nigériennes (lire pp. 104-105) tripleront entre 2011 et 2016. Avec les gisements d’uranium d’Azelik, exploité par la China National Nuclear Corporation, et d’Imouraren, par le français Areva, le pays deviendra le deuxième producteur au monde de carburant nucléaire. Côté pétrole, le pactole viendra d’Agadem, développé par les Chinois, qui alimentera la raffinerie de Zinder. Les 20000 barils produits chaque jour excéderont une demande domestique de 7000 barils et permettront des exportations supplémentaires. Le gouvernement du président Issoufou a profité de ces atouts pour mener à bien plusieurs projets qui devraient accélérer la croissance. Le barrage de Kandadji assurera une production correspondant à une année de consommation électrique du pays et permettra l’irrigation de 45 000 ha. Ce qui facilitera la politique baptisée 3N (« les Nigériens nourrissent les Nigériens »), qui ambitionne de parvenir à l’autosuffisance alimentaire. On parle d’un réseau ferré Cotonou-Niamey-Ouagadougou-Abidjan. On rêve de réduire, grâce au charbon, la dépendance énergétique à l’égard du voisin géant, le Nigeria.
développement humain du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), plus de 40 % de la population vit dans une extrême pauvreté avec moins de 1,25 dollar par jour, une pluviométrie erratique menace en permanence les récoltes et ce sont près de 690000 tonnes de céréales qui ont fait défaut en 2010, année terrible. Les bailleurs de fonds ont tenu compte de cette extrême vulnérabilité, mais aussi de la situation géopolitique du Niger, dont les voisins libyens, nigérians et maliens traversent une période d’instabilité qui pourrait se révéler contagieuse. Le FMI n’a donc pas persisté dans son projet – moralisateur mais dangereux – d’obliger Niamey à créer, grâce au pétrole, un fonds pour les générations futures sur le modèle tchadien : les Nigériens sont trop pauvres pour se lancer dans ce genre d’épargne collective. Tous les donateurs ont mis la main au portefeuille pour éviter un désespoir populaire qui pourrait être le terreau de l’islamisme ou de l’irrédentisme. En décembre, le FMI a promis par la voix de sa directrice générale, Christine
Le FMI prédit au pays une croissance moyenne annuelle de 6,7 % pour les vingt prochaines années.
Les Nigériens devront toutefois raison garder. Leur pays est abonné aux dernières places de l’indice de JEUNE AFRIQUE
Lagarde, une aide de 123 millions de dollars (92 millions d’euros) de 2012 à 2014. La Banque mondiale, elle, y va de 15 millions de dollars d’appui budgétaire chaque année. La BAD n’est pas en reste, etc. Le pays devra assumer sa part de réformes pour que sa bonne fortune minière et pétrolière se consolide en développement durable et équilibré. Citons deux domaines où il lui incombe de faire bouger les choses : la natalité et la corruption. Avec sept enfants par femme et la perspective d’accueillir sur son sol désertique 50 millions d’habitants en 2050, le Niger court à la catastrophe si rien n’est fait pour amorcer une modération démographique. Si le classement de la Banque mondiale pour le climat des affaires situe le Niger au 173e rang sur 183 pays étudiés, c’est parce que les entreprises y vivent un parcours du combattant administratif qui favorise la corruption: 43 % d’entre elles reconnaissent avoir payé pour s’assurer un marché public! De rudes chantiers en perspective. ● N o 2674-2675 • DU 8 AU 21 AVRIL 2012
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Le Plus de J.A. Niger ÉCONOMIE
Un optimisme à toute épreuve
Début de la production pétrolière, nouvelle politique agricole, investissements soutenus, lutte contre la mauvaise gouvernance… Les bases de la relance se consolident et la croissance s’envole. Durablement ?
L
e Niger est sur un petit nuage. La croissance comme les investissements décollent, et, même s’il a son lot d’inquiétudes, même si rien n’est jamais acquis, le pays résiste vaillamment aux crises des voisins libyens, nigérians, maliens (lire pp. 93-94 et 97) et fait ses preuves. C’est aussi l’occasion pour le Niger de montrer aux investisseurs étrangers qu’ils peuvent venir sans crainte miser sur un pays aux multiples atouts, mais qui manque de tout. Le premier objectif du gouvernement est de diversifier les activités. Les recettes du pays sont très dépendantes des industries extractives, en particulier des mines d’uranium (lire pp. 104-105), alors que l’agriculture et l’élevage sont prédominants (80 % de la population en dépend) mais restent cantonnés à l’exploitation de subsistance et soumis aux aléas climatiques. Conséquence, le taux de croissance du PIB est extrêmement volatil, ainsi que l’a rappelé l’an dernier le Premier ministre, Brigi Rafini, dans son discours de politique générale : « Le taux de croissance du PIB est passé de 9,6 % en 2008 à – 0,9 % en 2009
pour remonter à 8 % en 2010. » La crise alimentaire qui sévit actuellement dans le nord du pays est une parfaite illustration du paradoxe nigérien. Niamey produit du pétrole depuis quelques mois, il devrait accéder au rang de deuxième producteur mondial d’uranium d’ici à 2015, il a distribué nombre de permis d’exploration aurifère, le Fonds monétaire international (FMI) prévoit qu’il triplera ses exportations de matières premières d’ici à 2016… mais il est encore incapable de subvenir aux besoins de sa population.
qui correspond notamment au lancement de l’initiative 3N (« les Nigériens nourrissent les Nigériens »), annoncée par le président Issoufou au lendemain de son élection (lire p. 106). Le pays peut par ailleurs compter dès cette année sur des revenus substantiellement supérieurs à ceux de 2011. De fait, le budget national 2012 prévisionnel est de 1 262 milliards de F CFA, contre 933 milliards de F CFA en 2011. Si les nouvelles recettes liées aux investissements en cours dans les filières de l’uranium et de l’or n’arriveront pas avant 2016, les effets de la rente pétrolière devraient se faire sentir rapidement. La raffinerie de Zinder (lire p. 105) produit ainsi quotidiennement 15000 barils d’essence, dont environ la moitié est consommée par les Nigériens, le reste étant exporté (Nigeria, et bientôt Mali et Burkina Faso). Auparavant,Niameyimportaitsonessence et dépendait de la volatilité du cours du baril. Afin de ne pas étouffer les Nigériens, l’État subventionnait le prix à la pompe, ce qui lui coûtait entre 30 et 40 milliards de F CFA par an.
RECETTES. Pour y remédier, « le gouvernement a adopté un plan de développement ambitieux basé sur l’utilisation des revenus miniers et pétroliers pour réaliser des investissements publics dans les infrastructures, l’agriculture, la santé et l’éducation », souligne le FMI dans son rapport publié en décembre. Parmi les signes positifs, dans la loi de finances 2012, le secteur agricole bénéficiera de 100,3 milliards de F CFA (153 millions d’euros), contre 21,8 milliards de F CFA en 2011. Un investissement majeur
Des résultats encourageants
Routes principales
Imouraren
Or
Agadez
BURKINA FASO
Agadem
TAHOUA
TILLABÉRI Niamey DOSSO Dosso
MARADI
Zinder
Maradi
BÉNIN
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TCHAD Diffa
6
9,6
5
5,4
15
7
12
5,5
6
9
3
6 3
3,8
2 0 − 0,9
300 km 0
PIB 2011 (en dollars)
2008
2009
* Estimations 2010
1 096
Côte d’Ivoire
1 049
Mali
796
Bénin
8
1
NIGERIA
5,3
4
DIFFA
ZINDER
14,1
Sénégal
7
Pétrole
Tahoua
(variation du PIB en %, en prix constants, éch. de droite)
8
AGADEZ
MASSIF DE L’AÏR
Charbon
MALI
Croissance
PIB (en milliards de dollars, en prix courants, éch. de gauche)
Arlit
Uranium
Tillabéri
INFLATION 2%
POPULATION 15,7 millions d’habitants
SUPERFICIE 1 267 000 km2
LIBYE
ALGÉRIE
2011*
2012*
756
Burkina Faso
670
GuinéeBissau
586 511
Togo Niger
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JEUNE AFRIQUE
L’effet Issoufou à Ouagadougou : il a pour voisin le plus important marché d’Afrique de l’Ouest, le Nigeria. » En l’occurrence, le gouvernement va publier prochainement un appel d’offres pour deux licences téléphoniques 3G et a décidé d’accélérer la renationalisation de l’opérateur Sonitel, détenu à 51 % par un consortium sino-libyen, qui n’a pas tenu ses engagements en termes d’investissements (lire p. 125). L’objectif de Niameyestdeporterrapidementletauxde pénétration du téléphone mobile de 25 % en 2010 à 50 % d’ici à 2015. « Le pays a un atout de taille : il a Les défis sont lancés, et, dans les différents secpour voisin le plus grand marché teurs, les bailleurs internad’Afrique de l’Ouest, le Nigeria. » tionaux répondent présent. Pour exemple, mi-mars, le OUSMANE DIAGANA, responsable pays à la Banque mondiale fonds koweïtien de dévedoit relier l’oléoduc tchadien à Agadem loppement économique a accordé un commencera d’ici à la fin de l’année. Les prêt de 5 milliards de F CFA pour l’aménagement des 220 km de route reliant exportations de brut ne devraient pas Arlit et Assamaka. démarrer avant 2013. De son côté, l’État devra maintenir la cadence sur le front de l’amélioration de SERVICES. L’État entreprend par ailleurs une réforme du secteur des services. « Le l’environnement des affaires, sans oublier pays pourrait tout à fait connaître les succelui du développement social et de l’incès du Burkina Faso, notamment dans les sertion, notamment des jeunes, sachant télécoms: comme lui, le Niger est enclavé que près de 85 % de sa population a moins et ils ont la même monnaie, explique de 35 ans. Car, ainsi que le soulignait il y a Ousmane Diagana, responsable pays à tout juste un an dans les colonnes de Jeune la Banque mondiale. Grâce à sa stabiAfrique Marou Amadou, alors président lité politique et à un environnement des du Conseil consultatif national et désoraffaires plus sain, le Burkina attire plus mais ministre de la Justice : les Nigériens d’investissements dans le tertiaire. En n’accepteront pas un état permanent de revanche, le Niger a un atout de taille face misère. ● MICHAEL PAURON
INVESTISSEMENTS (en % du PIB) • 2009 33 % (25,2 % non gouvernementaux, 7,8 % du gouvernement) • 2010 45,9 % (41,1 % non gouvernementaux, 4,8 % du gouvernement) • 2011 38,9 % (32,6 % non gouvernementaux, 6,3 % du gouvernement)
INVESTISSEMENTS DIRECTS ÉTRANGERS (en millions de dollars)
• 2008 566 • 2009 739 • 2010 947
QUELLE PLACE AU SEIN DE L’UEMOA ? Développement humain (rang sur 187 pays classés) Sénégal Togo Bénin Côte d’Ivoire Mali
155e 162e 167
175
Investissements (en % du PIB, en 2011)
Mali
146e
Niger
Burkina Faso
150e
Sénégal
e
Sénégal
e
Togo
170 e
Climat des affaires (rang sur 187 pays classés)
Côte d’Ivoire
e
154
e
162 e
167
Niger
38,9 31,5 20,4
Sénégal
Togo
19,4
Mali
Burkina Faso
17,9
Bénin
176
e
Niger
173
Bénin
Burkina Faso
181e
Bénin
175e
Côte d’Ivoire
10,8
GuinéeBissau
10,4
Niger
186e
GuinéeBissau
176e
17,8
0 20 40 60 80 100 JEUNE AFRIQUE
947
Côte d’Ivoire
Mali
GuinéeBissau
e
Investissements directs étrangers
418 237 148 111
Togo
41
Burkina 37 Faso Guinée- 9 Bissau 0
(en millions de dollars, en prix constants, en 2010)
250 500 750 1000
SOURCES : FMI, SEPT. 2011 ET DÉC. 2011 ; BANQUE MONDIALE, OCT. 2011 ; PNUD, NOV. 2011 ; CNUCED, JUILL. 2011
À court terme, le secteur pétrolier deviendra un important contributeur de l’économie nationale. Le ministre de l’Énergie et du Pétrole, Foumakoye Gado, enestimelesrecettesà115millionsd’euros pour l’État, une fois que le pays sera en mesure d’exporter sa nouvelle richesse. Pour l’heure, les champs d’Agadem n’ont pas atteint leur pic de production, qui devrait se situer entre 60000 et 80000 barils par jour, et Foumakoye Gado espère que la construction du pipeline de 600 km qui
N o 2674-2675 • DU 8 AU 21 AVRIL 2012
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L’effet Issoufou
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Diplomatie
Mohamed Bazoum « nous ne sommes pas tranquilles » Entré en fonction au plus fort de la guerre en Libye, le ministre des Affaires étrangères revient sur les conséquences dans la région, et en particulier au Mali, de la chute de Kaddafi.
F
L’ancien professeur de
phiLosophie fait valoir le point de vue de son pays avec courtoisie, pragmatisme… et fermeté.
TAGAZA DJIBO
idèle d’entre les fidèles de Mahamadou Issoufou, qu’il connaît depuis plus de vingt ans, numéro deux du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya, parti présidentiel), Mohamed Bazoum, nommé ministre des Affaires étrangères en avril 2011, avait déjà l’expérience de la fonction pour l’avoir occupée entre janvier 1995 et mai 1996. L’ancien professeur de philosophie n’a jamais hésité à s’engager pour défendre la démocratie, que ce soit lors de la Conférence nationale en 1991, en déposant une motion de censure contre l’ex-Premier ministre Hama Amadou en 2007 ou en s’opposant au Tazartché (« continuité » en haoussa, slogan utilisé pour légitimer le maintien de Tandja au pouvoir) en 2009. Ce qui lui a valu plusieurs fois la prison. Depuis un an, cet intellectuel au caractère bien trempé fait valoir le point de vue du Niger avec courtoisie,
en restant vigilants. Chez nous, la crise libyenne a déjà eu un impact retentissant. De nombreux Nigériens expatriés sont revenus, beaucoup d’armes ont été mises en circulation, nos forces de défense et de sécurité ont eu des accrochages avec des bandes armées hostiles venant de Libye, et nous avons dû déployer notre armée pour couvrir
Mali. C’est un pays très riche, on y trouve des armements très sophistiqués et cela permettrait à Aqmi de se rapprocher des populations qu’il vise, à savoir les peuples du Maghreb. Il faut craindre que la fin du régime de Kaddafi, telle que programmée par l’Otan, ne donne un nouveau souffle à Al-Qaïda, pourtant usée en Afghanistan.
La situation risque de donner un nouveau souffle à Al-Qaïda, pourtant usée en Afghanistan.
Le président issoufou et vous-même aviez mis en garde les occidentaux contre les risques d’une intervention armée. estimez-vous que l’histoire vous donne raison ?
pragmatisme et fermeté. Notamment sur la crise libyenne, dans laquelle il a toujours marqué son hostilité à une intervention militaire et son refus de procéder à l’arrestation de Saadi Kaddafi, exigée à plusieurs reprises par le Conseil national de transition (lire p. 94). jeune AFrique : insécurité, dissémination des armes, rébellion touarègue… L’onde de choc de la chute du colonel Kaddafi continue de se propager. Va-t-elle épargner le niger ? MohAMed BAzouM : La situation est
inquiétante, mais nous tenons et allons continuer à tenir, en évitant les erreurs et jeune afrique
notre vaste territoire, ce qui nous a coûté beaucoup d’argent, que nous aurions aimé dépenser autrement. Ce n’est pas fini. Le pouvoir central libyen a beaucoup de difficultés à asseoir son autorité face à des tribus organisées en milices qui imposent leur pouvoir sur des fractions du territoire. Les élections prévues risquent d’être insuffisantes pour instaurer un gouvernement légitime aux yeux de la majorité des Libyens. En outre, on constate un mouvement d’Al-Qaïda au Maghreb islamique [Aqmi, NDLR] vers la Libye, où ses hommes pourraient trouver un espace bien plus avantageux que l’Adrar des Ifoghas au
Nous avions dit aux grandes puissances que la feuille de route de l’Union africaine, même si elle était difficile à mettre en œuvre, restait la meilleure des options et qu’elles devaient avoir le courage de parier sur la négociation. Elles ont choisi l’apparente facilité, qui était de faire partir Kaddafi par la force, bien que nos informations aient indiqué que les risques qui en découleraient seraient considérables. Malheureusement, nous avons eu raison. Nous n’avons pas compris leur cécité. Peut-être la haine du colonel Kaddafi ne leur a-t-elle pas permis de voir la situation de manière froide et lucide. n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
Le Plus de J.A. Niger
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La rébellion touarègue au Mali, en partie issue de cette crise, risque-t-elle de s’étendre au Niger ?
C’est le discours irrédentiste et sécessionniste proféré par les rebelles au nom de la « targuité » qui nous inquiète particulièrement. Il y a plus de Touaregs chez nous qu’au Mali, vous imaginez donc que nous ne sommes pas tranquilles. Jusqu’à présent, cela se passe plutôt bien au Niger, du fait de plusieurs différences avec nos frères maliens. D’abord, contrairement aux leurs, nos forces occupent bien le territoire. Ensuite, nous avons eu une gouvernance habile de cette question [lire tribune p. 97]. Enfin, l’épilogue de la rébellion de 2007 [qui a fait de nombreuses victimes sans que Niamey accorde de concession majeure] y est pour beaucoup. Les ex-rebelles ne sont pas près de l’oublier et doivent maintenant
réfléchir par deux fois avant de prendre les armes, alors qu’au Mali les accords d’Alger leur avaient donné l’impression d’une victoire. Considérez-vous qu’Amadou Toumani Touré (ATT) a été trop faible vis-à-vis d’Aqmi et des rebelles ?
En 2006, ATT s’était fait fort de régler la rébellion touarègue par la négociation. Depuis, et c’est aussi l’une des conséquences des accords d’Alger, l’État malien a été relativement absent de la partie septentrionale du territoire, ce qui a permis à Aqmi de conforter sa position. Peut-être s’agit-il d’erreurs de la part des autorités maliennes, dont elles ont fait les frais. Au Niger, nous n’avons jamais permis à quiconque de prendre pied dans les montagnes de l’Aïr, qui offrent pourtant un refuge tout à fait propice.
Est-il envisageable qu’Aqmi utilise le territoire nigérien pour réaliser une « jonction » avec Boko Haram, qui ensanglante le nord du Nigeria ?
Nous sommes conscients que notre territoire peut servir de base arrière aux terroristes de Boko Haram. Et un faisceau d’indices indique très clairement qu’ils l’utilisent. Nous avons arrêté plusieurs personnes en possession de produits indiquant des intentions malveillantes et avons aussi appréhendé des suspects qui se rendaient au Mali pour y suivre des entraînements avec Aqmi, ou d’autres qui en revenaient. Il nous semble toutefois que leurs actions sont liées à la politique nigériane et devraient rester confinées à ce pays. l Propos recueillis à Niamey par PiErrE BoissELET
Niamey et l’après-Kaddafi
MaHMud TurKia/afP
Le pays abrite une trentaine de dignitaires du régime libyen déchu, que Tripoli lui reproche de ne pas extrader.
p Manifestation devant l’ambassade du Niger à Tripoli, le 11 février.
C
ombien de Nigériens émigrés en Libye sont rentrés au Niger depuis un an ? Quelque 250 000. Fini les transferts d’argent entre Tripoli et Niamey. Économiquement, le Niger est sans doute le pays africain le plus touché par la guerre de Libye. Qui plus est, faute de garanties pour leur sécurité, ces rapatriés n’osent plus repartir en Libye. Le 24 février, la Banque mondiale a prêté 7,5 milliards de F CFA (11,4 millions d’euros) au Niger pour soutenir les projets de réinsertion n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
–agriculture,élevage,artisanat,commerce, etc. – en faveur de tous les rapatriés de Libye, mais aussi de Côte d’Ivoire et du Nigeria. Pas sûr que cela suffise. D’autant que ce retour massif coïncide avec une année agropastorale déficitaire. FugiTiFs. Le choc de la guerre de Libye est économique. Il est aussi politique. En septembredernier,leNigeravuarriverune trentaine de dignitaires du régime déchu. Parmi eux, l’un des fils du « Guide », Saadi
Kaddafi – le footballeur raté du championnat d’Italie. Le 10 février, sur les ondes d’Al-Arabiya, celui-ci a appelé les Libyens à se soulever contre le Conseil national de transition (CNT). Dès le lendemain, à Tripoli, des hommes armés ont fait irruption dans l’ambassade du Niger et en ont expulsé le chargé d’affaires. Le CNT a exigé l’extradition du fugitif. Comme Niamey n’a pas obtempéré, le ton est monté. Début mars, le numéro un libyen, Mustapha Abdeljalil, a déclaré : « Nos relations avec les pays africains dépendront de leur degré de coopération avec nous dans la traque des pro-Kaddafi. » Premiers visés: l’Algérie et le Niger. En fait, le CNT ne supporte pas que les rescapés du clan Kaddafi vivent chez ses voisins les plus proches. Un transfert de Saadi dans un pays tiers pourrait-il calmer le jeu ? Peut-être. Mais cette mesure ne réglera pas tout du jour au lendemain. Depuis la chute de Kaddafi, le Niger et la Libye ne s’échangent plus d’ambassadeurs. L’un et l’autre se font représenter par un chargé d’affaires. Le 11 mars, à Tripoli, pour la conférence sousrégionale sur la sécurité des frontières, la plupart des pays sahéliens ont délégué leur ministre de l’Intérieur. Le Niger, lui, n’a envoyé que des militaires. Face aux terroristes et aux trafiquants, Tripoli et Niamey ont tout intérêt à se coordonner. Un jour, ils y viendront. Nécessairement. l CHrisToPHE BoisBouviEr jeune afrique
Le Plus de J.A. Niger
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Cohésion
Le défi touareg à la mode nigérienne
Avec le retour des mercenaires du « Guide », la rébellion a repris dans le nord du Mali. Des effets que Niamey a réussi à éviter sur son territoire. Quelles sont ses recettes ?
Boureima Hama/afp
présidence du conseil régional d’Agadez. Rhissa Ag Boula, autre rebelle historique, siège au même conseil. Rhissa Feltou, neveu du mythique Mano Dayak, est quant à lui le nouveau maire d’Agadez (et conseiller du président). Organisées par la junte du général Salou Djibo, les élections locales de janvier 2011 ont été un moteur de fusion. Pour que les collectivités locales du Nord ne soient pas des coquilles vides, le président Mahamadou Issoufou a organisé en janvier dernier, près d’Arlit, un Forum Paix et Développement. À ses interlocuteurs touaregs, il a promis un plan pluriannuel doté de 1 000 milliards de F CFA (1,5 milliard d’euros).
Ex-chEfs rEbEllEs lors du Forum Paix et Développement, le 22 janvier (à Arlit).
P
ourquoi la rébellion touarègue du Nord-Mali ne s’est-elle pas propagéeauNord-Niger?«Parce que l’armée nigérienne quadrille mieux son territoire que l’armée malienne », répondent les autorités de Niamey. Pas faux. « Au Mali, quand une rébellion éclate, le pouvoir cherche tout de suite à négocier. Au Niger, le pouvoir combat d’abord et négocie ensuite », explique un diplomate en poste à Niamey. De fait, lors de la dernière guerre, entre 2007 et 2009, les rebelles du Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ)d’AgalyAlambon’ontjamaisprisune ville et n’ont pas pu s’installer durablement dans le massif montagneux de l’Aïr. Est-ce un héritage du général Kountché? Tandja a joué la fermeté et a fini par obliger le MNJ
à signer la paix. « Beaucoup de Touaregs gardent un mauvais souvenir de ce conflit, confie un de leurs frères d’Agadez. Ça s’est finiparunedébandade,etseulsleschefsdu MNJ ont profité de l’argent que Kaddafi a versépourgarantirlapaix.»Autantdireque ces anciens chefs rebelles sont discrédités aux yeux de beaucoup de leurs hommes. Autre facteur de paix : l’intégration des « hommes bleus » dans la société nigérienne. À l’image de cet enfant d’Iferouane, Brigi Rafini, qui est devenu Premier ministre du Niger (lire encadré). C’est précisément à Iferouane qu’a éclaté la révolte de 2007 ! Trois autres figures de la communauté touarègue occupent aujourd’hui des postes à responsabilités. Mohamed Anako, ancien rebelle des années 1990, a été élu l’an dernier à la
JAMAIS SEUL. Mais le secret de la pax nigerana se trouve aussi à Tripoli et… à Paris. « La chance du Niger, estime notre diplomate de Niamey, c’est que les Touaregs de ce pays ne sont pas, à la différence de leurs frères du Mali, des vétérans de l’armée libyenne. Au Nord-Niger, il n’y a donc pas l’équivalent d’un Mohamed Ag Najim », cet ex-colonel de l’armée libyenne quicommandeaujourd’hui,auNord-Mali, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Autre paramètre, l’uranium. Pour la France, l’exploitation de la mine d’Arlit est indispensable au fonctionnement de son parc nucléaire civil et militaire. Vu de Paris, le Nord-Niger est beaucoup plus stratégique que le Nord-Mali. Pour réduire une rébellion au Nord-Niger, Niamey n’est donc jamais seul. Reste que, si la terre tremble au Nord-Mali, le Niger n’est pas à l’abri d’une réplique. l ChrIStoPhE BoISBoUvIEr
BrIgI rAfINI, ENfANt D’IfEroUANE Et DU NIgEr
Tagaza DjiBo
Pour beaucouP, sa nomination à la tête du gouvernement était un pur symbole. Né à Iferouane (agadez), brigi rafini, 59 ans, est touareg. c’est aussi un homme doté d’une longue expérience au service du pays que le président Issoufou a choisi. Diplômé de l’École nationale d’administration de Niamey, il a été sous-préfet de Dosso et de Keita, d’où Seyni Kountché l’appela pour le nommer secrétaire d’État à l’Intérieur en 1987. rapporteur du conseil des sages après le coup d’État de Maïnassara en 1996, rafini assura aussi la vice-présidence du conseil consultatif national au lendemain du putsch de 1999. Député-maire d’Iferouane et vice-président de l’assemblée nationale de 2004 à 2009, il quitte le rassemblement pour la démocratie et le progrès, lui reprochant de soutenir leTazartché, CéCILE MANCIAUx et rejoint le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme d’Issoufou. l n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
jeune afrique
L’effet Issoufou
TRIBUNE
Opinions Opin & éditoriaux
Un rempart contre les fanatismes
L COLONEL MAHAMADOU ABOU TARKA Président de la Haute Autorité à la consolidation de la paix
E COUP D’ÉTAT AU MALI montre la fragilité des institutions démocratiques dans nos pays. C’est une constante dans l’Histoire: les guerres et les rébellions ramènent sur le devant de la scène des acteurs qui, pour gérer les problèmes de la cité, préfèrent la violence au débat politique. Présentant nombre de similitudes avec le Mali et craignant les pires conséquences de la guerre en Libye, le Niger a donc engagé deux types d’actions complémentaires. Il fallait d’abord empêcher les groupes armés fuyant la Libye de créer une base. En s’installant, ils auraient pu acquérir un avantage tactique décisif et devenir difficiles à déloger. Cet objectif a été atteint par la mise en place de patrouilles fréquentes dans le désert. Composées de petites unités très mobiles capables de fixer l’ennemi le temps de recevoir du renfort, secondées par l’observation aérienne et le renseignement humain, elles ont obligé les bandes armées déjà éprouvées par des combats meurtriers en Libye à chercher refuge hors du territoire. Très tôt également, avec la redynamisation de la Haute Autorité à la consolidation de la paix, structure chargée de maintenir le contact avec les ex-combattants, l’État a engagé le dialogue avec les communautés du nord et de l’est du pays susceptibles d’être influencées par la situation. Ce dialogue a été relayé par les conseils régionaux et municipaux, composés en grande partie d’exrebelles reconvertis dans l’action politique.
La situation même du peuplement touareg au Niger ne rend pas crédible la revendication identitaire: il y a desTouaregs dans chacune des huit régions, 70 % à 80 % d’entre eux vivant dans la bande centrale du pays (et non dans le Nord), qu’ils partagent avec les autres groupes ethniques. Enfin, dans le long combat politique pour la démocratie, les intellectuels touaregs engagés ont toujours perçu la rébellion comme susceptible de les maintenir dans le rôle étriqué de représentants d’une ethnie plutôt que dans celui de leaders de dimension nationale auquel ils étaient naturellement en droit d’aspirer. Notre cheminement démocratique a été difficile, mais, à y regarder de près, c’est cette difficulté même qui fait la solidité de la démocratie nigérienne. Depuis 1990, l’essentiel du combat pour la démocratie a été mené par une génération d’hommes venant de la gauche de l’échiquier et ayant derrière eux les expériences des luttes estu-
Dans le Niger démocratique, il n’y a pas de place pour la violence.
Ces deux actions n’auraient pas été possibles sans certaines conditions historiques et politiques. L’armée nigérienne a toujours conduit ses opérations de police dans le Nord avec professionnalisme, ce qui lui a valu le soutien de la population. Il n’y a donc pas eu de départs massifs entraînant la création d’une génération de réfugiés susceptible de constituer une bombe à retardement, comme on l’a vu au Mali avec la génération du colonel Najim. Par ailleurs, grâce aux différents accords auxquels le gouvernement nigérien a souscrit en 1995 et 1998, les ex-combattants intégrés dans les forces de défense et de sécurité l’ont été dans toutes les unités, sur l’ensemble du territoire, avec le même régime que leurs collègues. Il n’a jamais été question de stationner des troupes essentiellement composées d’ex-rebelles dans certaines zones, comme cela semble avoir été le cas au Mali. JEUNE AFRIQUE
diantines puis syndicales. Ils ont poursuivi ce combat sans relâche. L’idéal démocratique s’est ainsi imposé au reste de la société et les représentants de l’ex-parti unique s’en sont accommodés, jusqu’à l’expérience malheureuse duTazartché. L’histoire des coups d’État au Niger, en lien avec l’actualité politique et visant le rétablissement de l’ordre républicain, montre que l’idéal démocratique a fini par pénétrer les secteurs traditionnellement autoritaristes des forces armées. La courte aventure d’Ibrahim Baré Maïnassara montre qu’aucun pouvoir militaire ne peut survivre s’il ne correspond à une réelle demande politique de régulation. Le contraste est net avec le putsch militaire au Mali, qui est survenu à contre-courant et à quelques semaines des élections générales. Dans ce Niger démocratique, il n’y a pas de place pour la violence. La démocratie est un rempart contre les fanatismes, et donc un excellent outil de résolution pacifique des conflits. Nul ne peut totalement exclure la contagion, surtout si le Mali ne parvient pas à remettre sa maison en ordre, mais nous faisons le pari de disposer des atouts supplémentaires pour gérer au mieux et éteindre sans trop de dégâts toute éventuelle poussée de revendications identitaires. ● N o 2674-2675 • DU 8 AU 21 AVRIL 2012
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Rimbo
TransportVoyageurs Le roi de la route
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L’Essentiel des relations internationales - www.prestigecommunication.fr
a société RIMBO TRANSPORT VOYAYEURS a été créée le 2 mai 2003, grâce à la volonté d’un opérateur économique nigérien qui a choisi d’investir dans le secteur du transport pour faciliter la circulation des personnes et de leurs biens, vecteur incontournable des brassages des peuples. La société a pour vocation la desserte des lignes régulières interurbaines. Lors de sa création, elle disposait de seulement de trois bus ; aujourd’hui, elle en compte plus d’une soixantaine, flambant neufs, certains même climatisés. RIMBO TRANSPORT VOYAYEURS est présent dans toutes les grandes villes du Niger, à savoir Dosso, Maradi, Zinder, Diffa, Agadez, Arlit, Tahoua et Tillabéry, mais aussi dans des grandes villes d’autres pays africains telles que Cotonou, Lomé, Ouaga, Bamako, Dakar, Gao et Kano, avec des flux de passagers journaliers très importants. L’effectif était de 36 agents à la création de la société, et atteint aujourd’hui 536 agents directs ou indirects. Notre personnel est sérieux et compétent. Conscients que des moyens de travail hautement performants sont nécessaires, nous portons une attention particulière à notre parc de véhicules, qui a considérablement évolué.
Nos perspectives s’inscrivent dans la droite ligne de nos ambitions, notre priorité étant de donner une image nouvelle du transport interurbain, une image plus moderne. Nous comptons jouer le rôle de leader national et international dans ce secteur, car nous sommes déjà une valeur sûre dans le domaine du transport au Niger. Nous pensons aller plus loin encore, en nous appuyant sur la volonté manifeste des autorités de la VIIe République d’améliorer le secteur en créant des opportunités. En effet, conformément à sa politique de promotion du secteur privé, l’État nous a permis de bénéficier du Code des investissements, dont les dispositions spéciales nous ont aidés à acquérir des bus neufs. C’est dans cette optique que nous avons le plaisir d’informer la population que RIMBO TRANSPORT VOYAGEURS mettra bientôt en circulation des bus climatisés flambant neufs, renforçant ainsi ses capacités en vue de satisfaire la demande d’une clientèle qui devient de plus en plus exigeante. Car aujourd’hui plus que jamais, la satisfaction de notre clientèle est la nôtre. Le Directeur général, Monsieur Boumoudjou ABDERRAHMAN
AGENCES RTV AU NIGER NIAMEY Boulevard Mali-Bero Tél. : +227 20 74 14 13 – Fax. : +227 20 73 21 66 Mobile : +227 90 90 24 04 / 90 33 10 78 AGADEZ Route Nationale, face à la station BAGZAN Tél. : +227 90 58 61 00 ARLIT Face au Palais de justice Tél. : +227 90 58 61 01 / 90 63 78 59 ANNEXE Cominak : +227 90 90 24 28 / 90 90 24 27 / 90 00 14 01 BADAGUICHRI À 100 m de la sortie de l’autogare face au marché Tél. : +227 90 90 24 23 / 96 52 82 72 / 94 32 88 04 KONNI Centre-ville sur RN1 Tél. : +227 90 90 24 14 - 90 52 05 92 DIFFA Centre ville Tél. : +227 90 11 77 30 / 90 90 24 12
GAYA Quartier ACAJOU face au cimetière. Tél. : +227 90 90 24 30 / 90 02 02 25 / 96 24 87 87 MADAOUA Route Nationale, en venant de Konni à l’ancien autogare à 300 m de la douane Tél. : +227 90 90 24 18 / 96 67 26 01 MARADI Route principale menant au Nigeria à 100 m du lycée technique Dan Kassaoua Tél. : +227 90 90 24 21 / 90 90 24 35 / 96 87 75 75 / 96 60 42 39 TAHOUA Boulevard Avenue Tandja Mamadou, 500 m avant l’embranchement Tahoua-Agadez. Tél. : +227 96 75 75 75 / 90 90 24 11 / 96 00 78 20 / 90 98 24 43 ZINDER À 100 m de l’école de filles en allant vers la station NAGARI en face de l’ANPE Tél. : +227 96 99 51 29 / 96 59 63 78 / 90 90 24 12 90 90 24 13 / 90 90 24 36
DOSSO Route Nationale à 500 m de la Brigade des douanes Tél. : +227 90 90 24 15 / 90 90 24 16 / 96 88 89 17 E-mail : aminanefr@yahoo.fr
AGENCES RTV À L’ÉTRANGER BÉNIN COTONOU Quartier ZONGO Ehzu, carré 327, maison Daouda Badarou, 2e en venant de la Bourse du travaill à gauche, maison en face du rail. Tél. : +229 93 23 33 43 / 97 69 36 99 / 93 85 00 01
BURKINA-FASO OUAGADOUGOU 3, rue du Commerce, Sankaryare, porte 1381, Ouaga 12 Tél. : +226 50 46 42 27 / 78 88 59 74 / 78 00 87 11 BURKINA-FASO BOBO DIAULASSO Tél. : + 226 75 12 17 43 CÔTE-D’IVOIRE ABIDJAN Tél. : +227 90 77 07 07 / +226 78 00 87 11 / +225 66 40 04 87 GHANA ACCRA - KOMASSI Ouverture bientôt Tél. : +227 90 77 07 07 / +228 98 35 90 75 MALI BAMAKO Avenue de LOUA face au lycée KAN KAN MOUSSA Tél. : +223 71 09 72 17 / +227 90 98 24 41 MALI GAO Collée à la pharmacie Ati Béye, face au Bazi Natché Club. Tél. : +223 78 41 77 17 / 76 73 86 77 / 90 90 24 20 SÉNÉGAL DAKAR Ouverture bientôt Tél. : +227 90 77 07 07 / 71 09 72 17/90 98 24 41 LOMÉ TOGO Boulevard de la République, derrière Agattou Marché Tél. : +228 91 12 921 / 46 18 815 / 91 98 440
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Le Plus de J.A. Niger Carnet de route
Zinder, fière et dépendante Des céréales au carburant, dans la deuxième agglomération du pays, nombreux sont les produits qui viennent du Nigeria. Lorsque ce dernier vacille, tout se complique.
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algré le soleil de plomb, les va-et-vient sont incessants sous le drapeau frappé du cercle orange. Au-delà des quelques policiers qui tuent le temps devant un petit verre de thé touareg commence le Nigeria. C’est ce petit postefrontière, posé sur la route principale du village de Mai Moujia, qui voit passer l’essentiel de l’approvisionnement de Zinder, la capricieuse deuxième agglomération du Niger (250 000 habitants), qui ne mange pas à sa faim. Héritière d’une histoire précoloniale glorieuse dont témoigne encore aujourd’hui le palais du sultan du Damagaram, la cité a toujours eu la réputation d’être frondeuse. Elle fut conquise en 1899 par les Français, qui la choisirent comme capitale de la colonie du Niger en 1922, avant de se raviser et de lui préférer Niamey, dès 1926. La raison officielle invoquée fut la difficulté d’approvisionnement en eau – bien réelle encore aujourd’hui. Mais il se dit aussi que le tempérament des Zindérois, forts de leurs traditions étatiques, y fut pour beaucoup. Les émeutes de décembre 2011 ont montré que ce tempérament était toujours vif. Commerces pillés, bâtiments détruits… Zinder s’est embrasée après la mort de deux habitants (une femme atteinte par une balle de la police et un lycéen) en marge d’une manifestation de soutien à un opposant local, Aboubacar Mahamadou. Ce dernier était accusé d’avoir préparé les manifestations hostiles à la venue du président Mahamadou Issoufou, le 28 novembre. Il a finalement été acquitté, certains responsables de la police locale ont été limogés et le calme est revenu. Mais depuis, la sécheresse s’installant, la situation sociale s’est encore dégradée (lire p. 106). Devant la flambée des cours du mil, qui ont dépassé 20 000 F CFA (30,50 euros) pour un sac de 100 kg, Niamey a commencé dès février ses « ventes à prix modéré » (13 000 F CFA le sac de 100 kg) n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
grâce à des subventions. C’est-à-dire bien avant le début de la période de soudure, comprise entre la fin des stocks de céréales et les récoltes suivantes, et qui démarre généralement en mai-juin pour s’achever en septembre. Cette aide n’a cependant pas suffi à retenir les villageoises en quête de nourriture qui, déjà, ont afflué à Zinder et se regroupent aux carrefours de la cité avec leurs enfants sur le dos. Alors, dans ce coin du pays haoussa où passe une frontière qui ne sépare pas vraiment, c’est vers le Nigeria que l’on se tourne. Pour à peu près tout. RICHESSES DE KANO. Une fois arrivé à
Mai Moujia, le point le plus accessible de la frontière, quelques minutes de voiture suffisent pour rallier la bourgade nigériane de Maiaduwa et son grand marché. Les richesses de Kano (deuxième ville nigériane après Lagos, avec 4 millions d’habitants), qui attirent les commerçants comme des aimants, sont à moins de 150 km, alors qu’il faudrait près de deux jours de route cahoteuse pour rejoindre la capitale nigérienne et son 1,3 million d’habitants. À longueur de journée, des voitures aux amortisseurs fatigués par l’excès de marchandises traversent la frontière, pendant que les deux-roues sillonnent les ruelles du village chargés de sacs de céréales. Céréales made in Nigeria, qui, grâce à ses pluies plus généreuses, en produit plus qu’il n’en consomme. À Zinder, les précieux sacs sont échangés contre des bœufs, des moutons et des agneaux nigériens, étonnamment vigoureux vu l’état des pâturages. On comprend qu’ils fassent la fierté de la région (où est élevé un quart du bétail du pays) et suscitent l’envie des Nigérians, qui viennent les chercher par camions entiers. « Si les échanges étaient interrompus, ce serait un coup dur pour eux, résume Abdou Issa, maire du 2e arrondissement de Zinder. Mais pour nous, ce serait une catastrophe. » Ce scénario n’est malheureusement pas improbable.
Signe du changement, à Mai Moujia, un nouveau type de commerce a fait son apparition. « Viens, je t’emmène faire un tour de moto. On va aller voir les filles légères, lance un policier hilare, pointant un faubourg poussiéreux. Les islamistes les ont chassées du Nigeria, alors elles se sont installées ici. » À CRAN. À la vue d’un appareil photo,
mon guide change de ton. « Si vous voulez vous en servir du côté nigérian, restez caché derrière cet arbre, recommandet-il. C’est leur pays, et je ne sais pas comment ils peuvent réagir. » Les policiers et militaires nigérians ont en effet quelques raisons d’être à cran. Depuis décembre, jeune afrique
l’effet issoufou
leurs camarades sont régulièrement visés par des attaques de la secte islamiste Boko Haram. Fin janvier, une série d’attentats a fait près de 200 morts à Kano. Jusque-là, dans le nord du Nigeria, le terrorisme touchait surtout Maiduguri, berceau de l’organisation, situé plus à l’est, aux confins du Cameroun et du Tchad. Désormais, l’onde de choc se fait donc sentir sur le plan des échanges avec le voisin nigérien. Pour priver Boko Haram de base arrière, Abuja a en effet fermé unilatéralement sa frontière orientale, qui permet d’alimenter la ville nigérienne de Diffa (25 000 habitants), où l’on échange plus fréquemment en naira (monnaie nigériane) qu’en franc CFA. Le commerce jeune afrique
PIerre BOISSelet POUr J.A.
PIerre BOISSelet POUr J.A.
SIA KAMBOU/AFP
Un qUart dU bétail nigérien est élevé dans la région, notamment à Danagari (ci-contre). Poste-frontière de Mai Moujia (en bas, à g.). Palais du sultan du Damagaram, à Zinder (en bas, à dr.)
de denrées alimentaires s’en est trouvé perturbé au mauvais moment. « Avec l’arrivée des paysans venus du nord [de la région de Diffa, NDLR], la situation s’est brutalement dégradée en ville, indique Moustapha Kadi, membre du Collectif des organisations de défense des droits de l’homme et de la démocratie. Les prix ont explosé. » CARBURANT. Dans la région de Zinder, la situation est moins grave, mais elle s’est également tendue fin 2011. Les autorités nigérianes exigent désormais des papiers d’identité en bonne et due forme pour autoriser le passage des voitures, minibus et camions. Or moins de 10 %
des habitants en sont dotés, indique le gouverneur de la région, Oumarou Saïdou Issaka. « Nos commerçants nous appellent souvent lorsqu’ils sont bloqués à la frontière, confirme le capitaine Hassan Issa, responsable du poste-frontière avancé de Dan Barto. Alors nous essayons d’aller négocier avec eux, mais cela ne marche pas toujours. » En début d’année, un groupe d’une dizaine de personnes en possession d’explosifs a été arrêté à Diffa, et le gouvernement ne cache plus l’existence de liens entre Boko Haram et Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi, lire pp. 93-94). De l’aveu même du capitaine Hassan Issa, nombreux sont ceux qui empruntent ces « voies suspectes » que ses modestes moyens ne permettent pas de contrôler. « La seule chose qui fait que le Niger est épargné par Boko Haram, assure une source diplomatique, c’est que l’organisation n’a pas décidé de frapper son territoire. Pour l’instant. »
Pour priver Boko Haram de sa base arrière, Abuja a fermé unilatéralement sa frontière orientale. L’inauguration, le 28 novembre dernier, de l’unique raffinerie du pays (lire p. 105), qui distille le brut du champ d’Agadem, a pourtant ouvert des perspectives de développement à Zinder. Les habitants profitent des emplois créés, mais, comme un symbole, c’est avec du carburant frauduleusement importé du Nigeria que la plupart remplissent leurs réservoirs. À 579 F CFA (0,88 euro) le litre, prix fixé par le gouvernement de Niamey, l’essence produite localement ne résiste pas à la concurrence venue du Nigeria, où le prix à la pompe est de 140 nairas (0,66 euro). Le rapport des forces serait tout autre si ce dernier ne subventionnait pas si fortement sa propre production. La décision d’abolir cette pratique, prise début janvier par Abuja, a brièvement permis à la raffinerie de Zinder de devenir compétitive. Mais devant la pression de la rue, l’État nigérian est revenu en arrière. Niamey n’a rien pu faire. l PieRRe BoisseleT n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
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CNSS Caisse Nationale de Sécurité Sociale
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lacée sous la tutelle du ministère de la Fonction publique et du Travail, la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), aux termes de la loi n° 2003-34 du 5 août 2003, est un établissement public à caractère social chargé d’assurer la gestion des régimes de protection sociale institués en faveur des travailleurs visés à l’article 2 de l’ordonnance 96-039 du 29 juin 1996 portant du Code du travail de la République du Niger et des personnes ayant souscrit à l’assurance volontaire. Ces régimes sont les suivants : • Le régime des prestations familiales et de maternité, dont le but est d’alléger pour les assurés sociaux les charges inhérentes à la naissance, l’entretien et l’éducation de l’enfant du travailleur.
• Le régime des accidents du travail et des
maladies professionnelles, qui vise à prévenir les accidents du travail et les maladies professionnelles, et, le cas échéant, à atténuer les conséquences pouvant résulter de la survenance de ces risques (incapacité temporaire ou partielle de travail et décès). • Le régime des retraites, qui couvre la vieillesse, l’invalidité et le décès. La CNSS gère, en outre, un fonds de l’action sanitaire et sociale dont les activités consistent notamment en la protection sanitaire de la mère et de l’enfant. Pour financer les charges afférentes à ces régimes, la CNSS dispose de ressources constituées essentiellement de cotisations patronales et ouvrières sur le salaire, actuellement plafonné à 5 100 000 francs CFA par an et par salarié, au taux global de 20,65 % dont 15,40 % à la charge de l’employeur et 5,25 % à la charge du travailleur. Pour mieux servir ses assurés, outre les directions centrales, la CNSS dispose également de neuf (9) représentations à l’intérieur du pays et cinq (5) à Niamey, la capitale.
Les résultats enregistrés au cours de la période allant de 2007 à 2011 au niveau de la gestion des cotisations, des prestations et des finances permettent de classer aujourd’hui la CNSS parmi les structures viables qui contribuent efficacement à la réduction des inégalités et à la lutte contre la pauvreté au Niger ; tout ceci a été favorisé par l’engagement de la CNSS, avec l’appui des pouvoirs publics et du Conseil d’administration, dans des réformes qualitatives tant sur le plan institutionnel que réglementaire. On peut citer, entre autres, l’augmentation du plafond et du taux des cotisations, l’ouverture de comptes bancaires dans presque toutes les banques primaires de la place, la revalorisation des pensions et des rentes d’accidents du travail, l’augmentation du taux d’annuité de la pension qui passe de 1,33 % à 2,00 %, etc. Grâce à ces mesures, le montant des cotisations recouvrées est passé de 10 milliards en 2007 à environs 22 milliards en 2011, avec un taux annuel moyen de progression d’environ 20 %. Au cours de cette même période, la CNSS a distribué près de 39 milliards sous
forme de soutiens aux familles avec enfants à charge, aux victimes d’accident du travail (rentes, indemnités et prestations en nature) et aux retraités ou à leurs survivants. Consciente de la nécessité de concilier ses obligations de satisfaire une demande sociale multiforme et pressante d’une part, et de conformer ses actes et son action aux exigences d’efficience et de transparence d’autre part, la direction générale actuelle, avec l’appui et la collaboration de tous les acteurs, ambitionne de moderniser la CNSS en offrant de meilleurs services de qualité à la clientèle et en créant les conditions d’une meilleure lisibilité de la gestion de l’institution. Les actions en cours pour 2012-2014 s’inscrivent dans cette logique. D’autres réformes en perspective, telles que l’extension de la couverture sociale, la mobilisation des ressources à long terme pour le financement adéquat de la sécurité sociale, la relance de l’emploi, la résorption du déficit courant et actuariel de la branche retraite, vont permettre à la CNSS de jouer pleinement son rôle d’avant-garde dans la lutte contre la pauvreté au Niger.
Dr Akilou Ahmet Baringaye, DG de la CNSS.
À L’AVANTGARDE DE LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ
B.P. : 255 NIAMEY-NIGER, TÉL. : 00(227)-20-73-35-17/18 - FAX: 00(227)-20-73-42-44 E-MAIL: CNSS@INTNET.NE
Le Plus de J.A. Niger Mines et hydrocarbures
des échanges à forte teneur en uranium Encore largement tributaire de ses gisements uranifères, le pays développe les autres filières extractives. Les investisseurs étrangers sont à l’affût.
À
ceux qui en doutaient et malgré les rumeurs persistantes, Areva le confirme : le développement d’Imouraren (voir carte p. 90), l’un des plus grands gisements d’uranium au monde (200 000 tonnes de réserves), demeure l’un des six projets phares de l’entreprise. Malgré quelques retards dus à des problèmes d’insécurité – quatre collaborateurs du groupe français, enlevés en septembre 2010, sont toujours détenus par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) –, la phase de développement se poursuit et même s’accélère. Sur place, les engins miniers sont en cours d’assemblage, les travaux de la base de vie et de la piste d’atterrissage sont en passe de s’achever, le bassin de rétention d’eau est fini. Déjà, 1 100 statutaires et 800 sous-traitants s’activent; ils devraient être quelque 4 000 à terme pour mener à bien la construction. « Nous souhaitons démarrer la production le plus rapidement possible, peut-être fin 2014 », indique-t-on au siège d’Areva, à Paris.
YELLOW CAKE. De quoi apaiser le président Mahamadou Issoufou, qui souhaite que ce projet titanesque réussisse avant la fin de son quinquennat, en 2016.
djibo tagaza pour j.a.
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p Près d’Arlit, l’un des sites exploités par ArevA NC Niger, viA lA SomAïr.
Avec une production attendue de 5 000 t par an, l’exploitation d’Imouraren propulsera le pays au rang de deuxième producteur mondial de combustible nucléaire – il occupe actuellement la sixième place, derrière le Canada et devant le Kazakhstan, l’Australie et la Namibie. Malgré Fukushima-Daiichi et la contraction du marché de l’uranium, les investissements n’ont pas été remis en cause et le minerais demeure la principale source de recettes du Trésor public. L’activité d’Areva sur les sites d’Arlit est réalisée par deux sociétésde droit nigérien, SomaïretCominak,dontlegroupefrançais est l’opérateur et le principal actionnaire à travers sa filiale, Areva NC Niger. Avec 5 161 t produites en 2011, elle permet déjà au pays d’engranger 190 millions
rêvE d’éLECtrOnuCLéAirE OuEst-AfriCAin C’est un Chantier pharaonique qui, pour lui, va dans le sens du développement durable. Le chef de l’État semble bien décidé à faire avancer son projet de centrale nucléaire ouest-africaine, qui pourrait aboutir d’ici à quinze ou vingt ans. après l’avoir évoqué dès juillet 2011, il en a précisé les contours lors de sa visite en France, début février, à l’occasion du forum francophone préparatoire au sommet rio+20. si une centrale standard (1000 MW) est surdimensionnée pour le niger, elle pourrait être en revanche partagée par les États membres de la Communauté économique des États de l’afrique de l’ouest (Cedeao). « Le président ne dit pas que nous accueillerons forcément les installations, indique un responsable à niamey. Mais nous PiErrE BOissELEt continuerons à pousser l’idée auprès de la Cedeao. » l n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
d’euros par an en taxes, dividendes et contributions diverses. De son côté, la China Nuclear International Uranium Corporation (Cniuc), filiale de la China National Nuclear Corporation (CNNC), monte en puissance. Exploitée par la Sociétédesminesd’Azelik(Somina),coentreprise entre la CNNC, l’État du Niger (33 %, dont une minorité de blocage en cas de conflit), le fonds d’investissement chinois ZXJOY Invest et Korea Resources Corporation, la mine d’Azelik, opérationnelle depuis décembre 2010, a produit 105 t de yellow cake en 2011 et devrait en fournir 305 t cette année, selon le ministre des Mines, Omar Hamidou Tchiana. LEndEmAins En Or. Cependant, pour ne pas se reposer sur cette manne uranifère, le gouvernement s’active à la diversification de la production minière. En premier lieu, il s’est attaché à multiplier l’attribution de permis de recherche, d’or notamment. Les candidats ne manquent pas, les cours restant à des niveaux records (1 700 dollars l’once fin mars, soit quatre fois son prix d’il y a cinq ans). En juillet dernier, le gouvernement a accordé six permis d’exploration : deux au canadien AMI Resources, deux à son compatriote Cassidy Gold Corporation (qui doit investir plus de 2 millions de dollars d’ici à 2014, soit 1,5 million d’euros) et deux autres à Geodrill-Ghana Ltd (qui mobiliseront jeune afrique
l’effet issoufou chacun 2 millions de dollars). Dans ces contrats, en cas de découverte, l’État s’est gardé la possibilitéd’entrer jusqu’à hauteur de 40 % dans le capital d’une coentreprise sur chacun des permis (dont 10 % cédés gratuitement). Pour l’heure, le canadien Semafo, à travers sa filiale Société des mines du Liptako, reste l’unique producteur d’or dans le pays avec sa mine de Samira Hill, située dans la ceinture aurifère d’Horizon Samira, à 90 km à l’ouest de Niamey, dont il indique avoir extrait 46 700 onces, soit 1,45 t d’or, en 2011. Galvanisé lui aussi par les cours du métal jaune, le groupe investira encore 6 millions de dollars cette année (contre 5,9 millions en 2011) dans ses activités d’exploration. cHaRBOn PROFOnD. L’État relance éga-
lement la production de charbon, le pays disposant d’importantes réserves, bien que très profondes, et a signé mi-2011 une convention de recherche avec la Société nigérienne de charbon (Sonichar,
publique à 70 %). « Certes, ce n’est pas une dans son discours de politique généénergie très propre, mais les pays riches rale, « la diversification de la production l’ont utilisée largement : au nom de quoi minière se traduira par le redressement de pourraient-ils empêcher aujourd’hui la Sonichar et la mise en exploitation du les nations du Sud de l’exploiter à leur gisement de charbon de Salkadamna », tour pour se développer ? » a demandé dans la région de Tahoua. Enfin, le pays espère signer cette année le président Mahamadou Issoufou le de nouveaux contrats d’exploration 8 février dernier, lors du forum prépapétrolière et, peut-être, augmenter sa ratoire Rio+20 tenu à Lyon (sud-est de la France) sous l’égide de l’Organisation internationale côté or, en juillet dernier, de la francophonie (OIF). le gouvernement a accordé L’objectif est de s’assurer des réserves suffisantes, six permis de recherche. notamment pour alimenter production, démarrée en novembre (lire les sites miniers existants en électricité (issue du charbon), ainsi que la centrale article suivant). « Une dizaine de permis électrique d’une puissance de 200 MW en font l’objet de demandes de la part de projet (dont le coût est estimé à 300 milplusieurs juniors pétrolières, elles sont lions de dollars). à l’étude », explique Foumakoye Gado, La Sonichar prévoit d’investir 1,72 mille ministre de l’Énergie et du Pétrole. La liard de F CFA (2,6 millions d’euros) sur route est encore longue mais l’État est trois ans à compter de la signature, soit bien décidé à s’affranchir de sa dépendance au yellow cake. l d’ici à mi-2014. Ainsi que l’a indiqué l’an MicHael PauROn dernier le Premier ministre Brigi Rafini
l’ami chinois Les premiers barils de carburant made in Niger sont sortis fin 2011. Des champs à la raffinerie, sans oublier l’export, la china national Petroleum corporation s’occupe de tout.
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subventions à l’essence d’Abuja ait perturbé, jusqu’à présent, les velléités de compétitivité du carburant nigérien. Le prix de ce dernier est fixé à 579 F CFA le litre, quand le prix à la pompe au Nigeria oscille autour de 400 F CFA/l, soit l’équivalent du prix à la sortie de la raffinerie de Zinder, auquel il faut ajouter les coûts de transport.
djibo tagaza pour j.a.
est fait. L’an dernier, le Niger est le 28 novembre, à laquelle ils sont reliés devenu un pays producteur de par un oléoduc de plus de 400 km. pétrole. Mieux, depuis le mois Exploitée par la Société de raffinage de Zinder (Soraz), qui est une coentreprise de décembre, il produit son propre carentre la CNPCI (60 % du capital) et l’État, burant. « La raffinerie devrait atteindre, comme prévu, 20 000 barils par jour (b/j) la raffinerie fournit quotidiennement Dans le PiPe. Cependant, d’autres persd’ici peu », assure le ministre de l’Éner15 000 barils d’essence au pays, qui n’en pectives s’ouvrent à l’export. Si les contrats consomme que 7 000. gie et du Pétrole, Foumakoye Gado. Un en cours de négociation se concrétisent, le miracle… tout asiatique! En effet, du puits Le reste est exporté vers le nord pays exportera aussi de l’essence raffinée à la roue, ce sont des sociétés chinoises du Nigeria, bien que le maintien des vers le Mali et le Burkina Faso dans le qui œuvrent à l’exploitation de courant de cette année. la nouvelle richesse du pays, Deux pipelines sont aussi sous la houlette de la China prévus pour évacuer les National Petroleum Corporation 60 000 à 80 000 b/j que doit International (CNPCI). Pour produire à terme Agadem. L’un des oléoducs traversera l’heure, personne ne semble s’en plaindre. le Cameroun, l’autre rejoindra Côté production, les champs celui du Tchad, à 600 km. Les pétrolifères d’Agadem, dans la accords de principe ont été région de Diffa (voir carte p. 90), signés et les études de faisadont les réserves sont estimées bilité, ainsi que les derniers à 483 millions de barils, sont détails juridiques et adminisexploités par la CNPCI. Ils fonctratifs, devraient aboutir protionnent sans difficulté et approchainement. Le début de la visionnent sans interruption la construction est prévu pour raffinerie de Zinder, inaugurée p L’inauguration de La raffinerie, à Zinder, le 28 novembre. la fin d’année. l M.P. jeune afrique
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Agriculture
Faire du Sahel un jardin extraordinaire… Une fois encore confronté à une grave crise alimentaire, le pays cherche, pour en finir avec les programmes d’urgence, à changer en profondeur les pratiques de production.
Des ventes à prix modéré (13 000 F CFA le sac de céréales de 100 kg, contre plus de 20 000 sur le marché) ont été lancées dès la fin du mois de janvier. Disposant dans un premier temps de 12 500 t par mois, le plan doit se poursuivre jusqu’en septembre. À partir du mois de juin, il comportera en outre des distributions gratuites dans les zones les plus durement touchées.
Djibo Tagaza pour j.a.
MARAÎCHAGE. D’autres projets visent à
L
p Vergers et potagers de contre-saison dans la région de Dosso.
e soleil n’est plus tout à fait au zénith, mais ses rayons sont encore assez brûlants pour que bœufs et chèvres cherchent à s’abriter sous les quelques arbres au feuillage clairsemé. De chaque côté de cette route de la région de Zinder, le paysage n’est que désolation tant la saison des pluies, achevée il y a déjà plus de six mois, a été mauvaise. Soudain, quelques reliefs apparaissent et, en contrebas, des jardins verdoyants, avec des régiments de salades et de choux plantés au cordeau. Ces cultures de contre-saison – qui ne dépendent pas des pluies, mais d’une eau pompée ou récupérée et, dans le meilleur des cas, d’un système d’irrigation – sont exactement ce que Niamey veut développer pour atteindre l’autosuffisance et la sécurité alimentaires (lire Jeune Afrique no 2669, du 4 au 10 mars, p. 59). MAUVAIS SCÉNARIO. On en est très loin,
bien sûr. Une fois encore, les précipitations trop faibles et irrégulières de 2011 ont abouti à un déficit de production céréalière de plus de 700 000 tonnes (un cinquième des besoins nationaux). n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
racheter aux éleveurs les têtes de bétail les plus fragiles, qui ne pourront de toute façon pas survivre, ou encore – et c’est une façon de voir à plus long terme – à soutenir le développement des cultures de contre-saison. Les premiers résultats sont déjà visibles sur les marchés nigériens, désormais envahis de choux, salades, tomates et pommes de terre. Au point de faire chuter les prix. Par rapport à la même période l’an dernier, ceux de certains légumes ont été divisés par cinq, voire par dix à la mi-mars, à l’inverse du prix des céréales, qui était en hausse de plus de 12,5 % en février. Une tendance qui devrait faire entrer les fruits et légumes dans les habitudes de consommation. Le gouvernement prendra en compte les résultats de cette première campagne maraîchère pour lancer son initiative 3N (« les Nigériens nourrissent les Nigériens »), un programme quinquennal de 1 000 milliards de F CFA, dont l’un des principaux objectifs est de réduire
Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), d’ici aux prochaines récoltes, en septembre, 5,4 millions de Nigériens (35 % de la population) sont menacés d’insécurité alimentaire. En particulier, 400 000 enfants risquent de souffrir de malnutrition sévère. La situation était prévisible depuis de nombreux mois, selon le récurrent scénario sahélien. À la différence que, cette fois, elle a été anticipée. Là où un Mamadou Tandja, soucieux d’éviter une invasion d’ONG occidentales, aurait minimisé Les résultats sont déjà visibles l’urgence jusqu’à confisur les marchés, envahis de choux, ner au déni, les nouvelles autorités ont tiré la sontomates et pommes de terre. nette d’alarme dès le mois d’août 2011, avant même la récolte, sitôt la dépendance aux aléas climatiques que la pluviométrie a auguré les proen concentrant les investissements sur blèmes à venir. Cela a permis à l’État, l’irrigation, les techniques de récupéainsi qu’aux partenaires et bailleurs de ration des eaux de pluie et les intrants. fonds, de se mobiliser et de s’organiser Il y a urgence. Avec le réchauffement pour faire face à la situation. climatique, le rythme des sécheresses, Depuis, le gouvernement pare au plus qui touchent désormais le pays presque pressé, avec plusieurs programmes d’urune année sur deux, ne devrait pas gence dotés d’une enveloppe de 100 milralentir. l liards de F CFA (152,4 millions d’euros). PIERRE BOISSELEt jeune afrique
NIGER TRANSIT
Société Anonyme d’économie mixte Créée le 13 juillet 1974 Avec un capital de 1 milliard de FCFA Son siège social est en zone industrielle de Niamey (Niger) SOUS LA TUTELLE DU MINISTÈRE DU COMMERCE ET DE LA PROMOTION DU SECTEUR PRIVÉ. LA NITRA A POUR MISSION D’ASSURER DANS LES MEILLEURS CONDITIONS DE SÉCURITÉ ET DE SURETÉ DES OPÉRATIONS D’IMPORTATION DU NIGER, AFIN D’ATTÉNUER LES EFFETS NÉGATIF DE LA CONTINENTALITÉ DU PAYS, AUSSI ELLE CONTRIBUE À L’ESSOR DU COMMERCE EXTÉRIEUR, EN ASSISTANT LES SOCIÉTÉS D’ÉTAT, D’ÉCONOMIE MIXTE ET LES PRIVÉS NIGÉRIENS DANS LEURS RELATIONS COMMERCIALES AVEC L’EXTÉRIEUR.
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Email : nitra_transit@yahoo.fr
COTONOU :
Tél : +229 21 31 20 27 Fax (+229) 21 31 64 04
PARAKOU :
Tél : +229 21 61 09 70
Nitra Air Service
Tél : 93 92 58 24 - Email : nitraairsce@yahoo.fr
Nitra Agadez
Tél : 20 44 00 57 - Email : nitraagdez@yahoo.fr
BP : 2017 - Email : nitracotonou@yahoo.fr BP : 110 Email : nitraparakou@yahoo.fr
Nitra Arlit
Tél : 20 45 22 08 -Email : nitraarlit@yahoo.fr
Nitra Maradi
Tél : 20 41 02 84 - Email : nitramaradi@yahoo.fr
FILIALE AU TOGO
Tél : 20 68 03 50 – Fax : 20 68 04 87
LOMÉ :
Nitra Gaya
Tél : +228 22 27 05 69 fax : +228 22 27 67 51 BP : 1765 - Email : nitralomé@yahoo.fr
Email : nitragaya@yahoo.fr
FILIALE AU GHANA TEMA :
Tél : (+223) 22 21 29 45 - Email : nitratma@yahoo.fr
L’effet Issoufou
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Portraits
esprits d’entreprises
vincent fournier/J.A.
L’amélioration de l’environnement économique engagée dès la période de transition a favorisé l’initiative et les nouveaux projets. Consulting, tourisme, énergie, presse, éducation… Dans tous les secteurs, des patrons du privé et du public se démarquent.
Mahamadou Sako le sens des affaires
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’
il ne fallait retenir qu’un mot pour décrire Mahamadou Sako, ce serait celui de réseau. Président de l’association des anciens élèves de l’École supérieure des sciences économiques et commerciales (Essec, France, promo 1985), vice-président du comité Afrique du Medef, le syndicat des patrons français, président fondateur de l’association Afrique SA… Dans le monde des affaires, cet homme de 56 ans a l’un des carnets d’adresses les plus fournis de l’axe Paris-Niamey. Après avoir fondé un cabinet de conseil à Paris, Renoovo, qu’il gère avec un associé, il en a ouvert un autre à Niamey en mars. Ses spécialités ? jeune afrique
Le développement du secteur privé en associés à la sulfureuse Françafrique, Afrique, les privatisations et restructuraSako, lui, affiche sa proximité avec les tions, l’audit et le conseil de sociétés, sans puissants. Dans son bureau parisien oublier le conseil aux gouvernements. figurent en bonne place des photos de Ministre des Privatisations dans le lui en compagnie de l’actuel ministre gouvernement de Hama Amadou en 2000 et expert incontournable de aujourd’hui conseiller l’essor du secteur privé en Afrique, du président Issoufou, c’est un homme de réseaux. Mahamadou Sako a toujours évité d’être trop marqué politiquement, ce qui lui a perfrançais de la Coopération, Henri de mis de rester dans le coup malgré les Raincourt, ainsi que, encadrée sur un changements de régime. Avec le même mur, une cartographie des activités afrientregent, alors que d’autres auraient caines du groupe Bolloré. l tendance à faire profil bas de crainte d’être Pierre BoiSSelet n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
Le Plus de J.A. Niger
Mohamed Wan Jada Voyage en plein Aïr
Djibo tagaza pour j.a.
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e désert, la route, les bivouacs… Voilà pour les points communs entre le quotidien de Mohamed Wan Jada, dit Tombola, et son passé. Tout le reste est radicalement différent. Cet ancien rebelle touareg dirige aujourd’hui Croix d’Agadez, l’une des agences de voyages les
plus prospères du Niger, basée à Niamey, qu’il a créée il y a trois ans. Né « en brousse », cet autodidacte – il n’a « jamais passé une minute à l’école » – a grandi entre Arlit (nord du pays) et Tamanrasset (sud de l’Algérie). Après une adolescence faite de menus trafics,
il rejoint, comme beaucoup de Touaregs de sa génération, la Légion verte de Mouammar Kaddafi. Mais l’armée n’est visiblement pas son truc. Pas assez de liberté, sans doute. La vingtaine passée, il retourne dans le nord du pays pour rejoindre son cousin voyagiste. La suite de son parcours est une succession d’expéditions, armées ou touristiques. Lorsque, début 2007, une nouvelle rébellion naît dans la région d’Agadez, il est à Tokyo pour promouvoir les circuits dans le désert (il sera par la suite l’un des premiers à faire venir des touristes nippons). Il saute dans le premier avion pour rejoindre le Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ) et sera conseiller militaire auprès de sa cellule politique (2007-2008). Aujourd’hui, lassé des combats, il aimerait que toutes ces histoires appartiennent au passé. L’insécurité dans le Nord lui a coûté plus de la moitié de ses clients. Quand tout va bien, il en compte tout de même par an entre 700 et 800, auxquels il fait découvrir toute la beauté du désert. l P.B.
Alhassane Halid Horizons électriques
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on programme d’action a des allures de mission impossible. Le nouveau directeur général de la Société nigérienne d’électricité (Nigelec), Alhassane Halid, 43 ans, doit faire passer son pays du statut d’importateur (80 % de sa consommation provient du Nigeria) à celui d’exportateur. Sept mois après sa nomination, il est déjà sur le gril avec la saison des fortes chaleurs et des délestages qui lui sont associés. Barrage de Kandadji, centrale à charbon de Salkadamna, centrale solaire de Niamey… Nombre de nouveaux projets ont donc été lancés. D’ici à 2020, le pays devrait couvrir « entre deux et trois fois ses besoins » en électricité, s’enthousiasme l’ingénieur électromécanicien. Ancien élève de l’École supérieure interafricaine de l’électricité (Esie), en Côte d’Ivoire, et de l’institut d’administration des entreprises (IAE) de Paris, il est aussi militant de longue date du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya, au pouvoir). Son travail ne se limite pas à surveiller l’avancement des travaux. « Normalement, des investissements de cette ampleur s’accompagnent d’une hausse des prix, explique Alhassane Halid. Mais le président Issoufou a décidé au contraire de créer un tarif social pour plus du tiers des abonnés. » Il s’agit aussi de redresser l’image d’une entreprise ternie par les scandales – Foukori Ibrahim, son ancien administrateur, est aujourd’hui n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
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sur la sellette. « L’assainissement fait partie de mes missions, cela va de soi compte tenu de mon profil », souligne Alhassane Halid, qui a été chef du service études et évaluation du Fonds de solidarité africain. l P.B. jeune afrique
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Le Plus de J.A. Niger
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Moussa Kaka La voix du Niger
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chaque événement d’importance au Niger, sa voix résonne, ponctuée d’un « Moussa Kaka, Niamey, RFI ». Si tous les auditeurs de la radio francophone le connaissent, combien savent que ce journaliste est aussi chef d’entreprise ? Ils sont plus nombreux, en revanche, à se souvenir de son arrestation, en 2007, par le régime de Mamadou Tandja, qui lui reproche ses contacts avec la rébellion touarègue. « En m’arrêtant, Tandja m’a rendu plus célèbre », constate Moussa. D’autant que RFI et Reporters sans frontières (RSF), l’ONG dont il est le correspondant local, ont mené une campagne de soutien jusqu’à sa libération, au bout de un an et dix-sept jours. Pendant sa détention, Saraounia, la radio qu’il a fondée en 1999, a continué d’émettre sur ses cinq antennes locales. En avril 2011, la petite entreprise est passée à la vitesse supérieure en obtenant une fréquence de télévision, grâce « à la vente de deux villas et à un prêt bancaire sur trois ans ». Désormais, le groupe Radio Télévision Saraounia (RTS) emploie près de 100 collaborateurs, dont 45 à Niamey et
28 uniquement pour la télévision. C’est surtout la radio qui permet pour l’instant d’équilibrer les comptes, la chaîne de télévision faisant face à une forte concurrence (lire p. 114). Comment se distinguer dans ce paysage audiovisuel ? « Par le professionnalisme », répond Moussa. Évidemment. Il a déjà un nouveau projet pour parachever le groupe, celui de créer un quotidien. l P.B.
Halimatou Tourey Magagi Élémentaire et nécessaire
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Djibo tagaza pour j.a.
lle n’a pas eu le temps de faire autrement. Pour monter sa petite entreprise, Halimatou Tourey Magagi, 37 ans, a choisi une maison de Niamey. Une cour et deux pièces. Dans l’une, elle s’est installée avec sa famille ; l’autre est devenue une salle de classe. Là où se sont déroulés, en 2009, les premiers cours
de la Knowledge Haske School (« école lumière de la connaissance », en haoussa et en anglais). Pour cette première rentrée, il n’y avait pas encore les salles de classe en tôle, installées depuis. Mais déjà, l’idée – évidente pour elle qui est née en Sierra Leone – de combiner le français et l’anglais pour proposer un enseignement
différent. « Les parents savent que cela offre plus de possibilités à leurs enfants. Surtout ici, avec le Nigeria à proximité. » En dépit des frais (70 000 F CFA par an, soit 106 euros, l’équivalent d’un bon salaire mensuel à Niamey), dans un pays au système scolaire laminé par le manque d’investissement, l’école a tout de suite attiré. Chaque année depuis 2009, une nouvelle classe (du niveau supérieur à la précédente) a été créée et l’établissement compte désormais une centaine d’élèves. Parmi les nouveaux, qui affluent, ceux de l’enseignement public doivent parfois entreprendre une sérieuse remise à niveau. « L’un d’eux venait du CE2 [cours élémentaire deuxième année, NDLR], explique Halimatou Tourey, mais nous l’avons remis en CP [cours préparatoire] car il ne pouvait pas suivre. » Fière de ses élèves, elle a fait encadrer une photo d’eux. Ils posent sur une pelouse verte, devant un bel immeuble à colonnades. Un photomontage… Mais la directrice espère bien que cela préfigure l’avenir de son école. l P.B.
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DJIBO TAGAZA POUR J.A.
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t Le pays compte désormais plus de 70 titres, contre 50 à la mi-2011. Médias
Une liberté vite apprivoisée
Journaux, radios et télévisions se multiplient, dans un pays où la presse n’est plus considérée comme une ennemie.
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ersonne n’a fait mieux. D’après l’ONG Reporters sans frontières (RSF), le Niger est le pays qui a connu l’an dernier la plus forte progression en matière de liberté de la presse. Dans le classement mondial 2011-2012 publié en janvier, il pointe à la 29e place (entre le Royaume-Uni et l’Australie) après avoir gravi 75 marches par rapport à 2010. La différence, tous les journalistes l’ont ressentie. Arrestations, détentions arbitraires, suspensions de titres, interdictions d’émettre… Dans les derniers mois du régime de Mamadou Tandja, les rapports entre la presse et le pouvoir s’étaient considérablement dégradés (lire p. 112). Depuis sa chute, ce n’est plus qu’un mauvais souvenir. « Aujourd’hui, les journalistes nigériens victimes d’exactions sont très rares », explique Ambroise Pierre, responsable du bureau Afrique de RSF. Les autorités de la transition ont opéré un changement radical avec la dépénalisation des délits de presse, adoptée par ordonnance dès juin 2010, soit quatre mois après leur arrivée au pouvoir. Le président Mahamadou Issoufou n’a pas tardé à leur emboîter le pas. En novembre 2011, il est devenu le premier (et à ce jour l’unique) chef d’État à signer la déclaration de la Montagne de la Table, une charte rédigée n o 2674-2675 • du 8 au 21 avril 2012
désormais plus de 70 titres – « Je n’arrive plus à tenir le compte ! » confesse le président de la Maison de la presse, Boubacar Diallo –, contre une cinquantaine en juin 2011. Un titre privé, L’Enquêteur, est même devenu quotidien – le seul, avec Le Sahel, propriété de l’État. Cette effervescence ne règle cependant pas tous les maux. La plupart des journaux sont des hebdomadaires et restent fragiles (ils n’ont parfois ni siège social, ni personnel permanent), leurs ventes plafonnent à 2 000 exemplaires pour les plus populaires, la publicité est rare et mal répartie, et la qualité laisse bien souvent à désirer. Quant aux dérives qui avaient déjà cours dans la profession, elles n’ont malheureusement pas été freinées par cet appel d’air, la diffamation, voire le chan-
par l’Association mondiale des journaux, réclamant la fin des sanctions pénales en Afrique pour les délits de diffamation et d’insulte. « Un autre élément, qui n’apparaît pas dans nos classements, me paraît fondamental,ajouteAmbroisePierre.C’est l’attachement des nouvelles autorités à la liberté de la presse. » Ainsi, dans les cent premiers jours de son mandat, Mahamadou Issoufou a organisé une conférence de presse d’un genre inédit pour un président nigérien : elle était ouverte à tous les médias, publics comme privés. Ces derniers sont maintenant invités, à neuf chaînes privées sont tour de rôle, à prendre part désormais autorisées à émettre, aux voyages officiels dans contre quatre il y a deux ans. le pays (pratique initiée par l’ancien Premier ministre de Mamadou Tandja, Seini Oumarou). tage à la publication d’articles embarrassants, restant monnaie courante. Ces EffErvEscEncE. Le paysage médiatique derniers mois, quatre titres ont ainsi été nigérien n’a pas tardé à se laisser porter condamnés à des amendes pour avoir par ce vent de liberté. Les chaînes de manqué à la déontologie. S’ils persistent télévision ont poussé comme des chamdans ces mauvaises pratiques, les sancpignons. Elles sont désormais onze (deux tions pourraient s’alourdir jusqu’à la suspubliques, neuf privées) autorisées à pension de leur parution. Toutefois, leurs émettre, alors que le pays ne disposait que directeurs de la publication ne craignent de quatre chaînes privées il y a deux ans plus d’être envoyés en prison. Au Niger, (Radio Télévision Ténéré, Dounia, Canal 3 on ne traite plus la presse comme une et Bonférey). Même foisonnement du ennemie. l côté de la presse écrite : le pays compte PiErrE BoissElEt jeune afrique