MINT #13

Page 1

Eat & Explore / #13

Automne / Hiver 2018 - Gratuit

Château Marmont 86 · Claire Boreau, mise à nu(e) 50 Tokyo 98 · Les Terres promises 34  · First Stop : Olympiades 66


2


Découverte

KEIRA KNIGHTLEY porte des bagues COCO CRUSH en diamants, or blanc et or beige. chanel.com


Édito

Amuse-bouche par Déborah Pham

Tout en haut sur l’étagère de Lino - une des plus petites librairies au monde située à Barcelone -, j’observe la couverture du livre d’Emil Ferris My Favorite Thing is monsters. Coup de foudre. Les premières pages défilent et tout est séduisant dans cet ouvrage. Du dessin au choix des mots, au style qui mêle l’enfance, l’Histoire et le roman noir. On a l’impression de lire le journal intime d’une petite fille qui griffonne ses pensées dans un carnet à spirales. Karen Reyes a 10 ans, elle va à l’école à Chicago mais lorsqu’elle a du temps libre, elle aime aller au musée avec son frère et regarder des films d’épouvante. Ce qu’elle aime aussi, c’est tenter d’élucider le meurtre de sa voisine Anka qui se serait tiré une balle dans le coeur. Si l’oeuvre n’est pas autobiographique, Emil Ferris distille un peu d’elle, de sa famille, de son histoire … Il faudra six années de travail (à raison de 16 heures de dessin au stylo-bille par jour) pour arriver à ces 416 pages remarquables. Courez chez votre libraire vous offrir la version française éditée dans l’une des plus belles maisons d’édition et préparez-vous à être complètement happé par ces histoires de monstres… Moi, ce que j'aime, c'est les monstres ­ —­­ par Emil Ferris, Editions Monsieur Toussaint Louverture, 34,90 €



Sommaire

Sommaire 8

Carnet de tendances

22

Les pages blanches Le bon goût

30

Lettre à Bob Ross Humeur

34

Les Terres Promises Découverte

46

Le Couvent, Marseille Get a room

50

Claire Boreau, mise à nu(e) Rencontre

60

C'est gourmand Humeur

66

First stop, Olympiades Découverte

6


Sommaire 74

S'emballer Portfolio

80

Paloma Wool : Ode au féminin Rencontre

86

Château Marmont

90

Porridge banane et beurre de cacahuète

Découverte

Recette 92

Banlieue Ouest Mode

98

Lost in Tokyo Tokyo — Portfolio

108

Explore : Tokyo Tokyo — City Guide

114

Path Tokyo — Rencontre

120

Bonnes adresses

128

Playlist

7


Ours

Journalistes / SR

François Prost, né à Lyon en 1980,

Rédactrice en chef

est un graphiste, directeur artistique

Déborah Pham

Hélène Rocco est journaliste

et photographe français vivant a Paris.

lifestyle. Amoureuse des voyages,

www.instagram/francoisprost

Direction artistique

elle est aussi accroà la bonne

www.francoisprost.com

Noémie Cédille

cuisine et donnerait sa mère pour du fromage de brebis.

www.noemiecedille.fr Céline Saby est photographe et directrice Artistique. Elle développe un

Design graphique

Marine Normand écrit pour Retard,

travail autour de la nature morte, dans

Agathe Boudin

les inRocKs, Noisey, Kiblind et plein

lesquelles elle compose couleurs et

www.agatheboudin.com

d'autres publications sympas. Quand

objets. Elle collabore dans ce numéro

elle a le temps, elle aime aussi

avec Emmanuelle Roule, céramiste,

Mint

promener son chien, lire, parler fort

graphiste et directrice artistique et

www.magazine-mint.fr

et reporter tous les trucs urgents

Seam Soap, studio de design.

contact@magazine-mint.fr

ou utiles au lendemain.

www.celinesaby.com

32, rue Le Peletier, 75009 Paris

www.emmanuelleroule.com Mathilde Froment ne sait pas trop

Impression

www.seemsoap.fr

quoi faire de sa life mais pour l’instant, ça va, elle est en vacances sur une île

Imprimé en Belgique par SNEL

Illustrateurs

grecque.

Distribution Alice Méteigner publie ses dessins

Dans une ville où les publications

Estelle Lubino est community

dans la presse (NY Times, Télérama,

gratuites fusent à tout-va sans jamais

manager et créatrice de contenus.

Feuilleton...). Son premier livre pour

vraiment savoir où elles atterriront,

Dealeuse de bonnes vibes, elle a une

enfants, Max et Marcel, est paru aux

Le Crieur se propose aujourd’hui de

addiction aux smoothie bowls.

Éditions MeMo et a reçu une mention

jouer les aiguilleurs.

spéciale aux Bolognaragazzi Awards. Tatiana Geiselmann est journaliste,

www.alicemeteignier.fr

passionnée de déco et de gâteaux. Quand elle ne traque pas les fautes

Kei Lam est née à Hong Kong, elle

d'orthographe, elle aime préparer

vit Paris. Passionnée de dessin et

Publicité

des forêts-noires à tour de bras.

poussée par l’envie de créer un

Kamate Régie, 01.47.68.59.43

monde à partir de deux fois rien, elle

dolivier@kamateregie.com

se tourne vers l’illustration.

Photographes

www.www.keilam.fr

Tiphaine Caro est architecte.

Zoé Lab est designer graphique et

Le magazine décline toute responsabilité quant

illustratrice freelance. Signe particulier:

aux sujets et photos qui lui sont envoyés. Les

Mentions légales ISSN : en cours. Dépôt légal à parution.

Elle collectionne les vieux appareilsphotos et aime saisir les moments du quotidien à l’argentique. www.tiphainec.com Stéphanie Davilma est photographe et aime inscrire son travail dans la lenteur. Celle de l'errance,

le noir de son trait qui négocie, à plein, les vides du blanc. Elle cultive un vif

articles publiés n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de reproduction réservés pour tous pays. Aucun

intérêt pour la narration courte et la

élément de cette revue ne peut être reproduit

mise en récit de son quotidien.

ni transmis d’aucune manière ni d’aucun

www.zoelab.fr

moyen que ce soient, sans l’autorisation écrite des auteurs.

Designers

de l'observation et du choix d'un sujet, aussi bien dans l'image

Paris se quema est un studio

que dans l'écriture.

créatif fondé par Anaïs et Nicolas

www.stephaniedavilma.com

en 2014. Tour à tour set designers, photographes, graphistes et

Margaux Gayet est photographe

scénographes, leur mot d’ordre

de mode et aime capturer le vêtement

est d’être des couteaux-suisses.

en mouvement. Pour se ressourcer,

www.paris-se-quema.com

elle s'échappe de Paris, équipée d'un petit appareil argentique. www.margauxgayet.com

8



10


Mint Magazine

CARNET DE TENDANCES

11


Tendances

Nomie Épices Depuis cet été, la boutique de Marie-Lou Lizé et Charles Bouchart accueille tous les jours les amoureux des épices. Le couple dépoussière le genre en proposant à la vente des mélanges contemporains pour des recettes clés en main, comme les boulettes de bœuf au paprika fumé et au curry doux. Et pour les néophytes, des ateliers de cuisine sont organisés régulièrement pour apprendre à ponctuer ses plats avec les bonnes épices. Nomie Epices ­ —­­ 35 rue Davy, 75017 Paris — www.nomie-epices.fr

12

Ouverture


Tendances ©Freddy Mamani Silvestre

Exposition

Géométries Sud

Exposition

L'art latino-américain jouit d'une richesse de motifs, couleurs et figures que cette exposition sur l'abstraction géométrique met enfin en lumière. De la céramique à la peinture corporelle, les époques, les territoires et les cultures se répondent à travers près de 250 œuvres. À l'affiche, on découvre notamment les spectaculaires immeubles de l'architecte Freddy Mamani Silvestre qui colorent la ville d'El Alto en Bolivie. Géométries Sud, du Mexique à la Terre de Feu —­­ jusqu'au 24 février 2019 à la Fondation Cartier

13


Tendances

Japon

Livre

Originaire de Californie, Nancy Singleton Hachisu s'est installée au Japon il y a 30 ans et vit désormais dans une ferme au nord de Tokyo avec son époux japonais. Elle s'est liée d'amitié avec deux cuisinières ‒ l'une est nonne, l'autre mère au foyer ‒ qui ont accepté de partager leurs recettes traditionnelles dans ce bel ouvrage. Soupes miso à l'œuf poché, épinards au yuzu et pommes vapeur sont mis à la portée de tous. Japon —­­ par Nancy Singleton Hachisu, Phaidon, 464 p., 45€

14


ŠKenta Izumi Tendances


Tendances

Aussi esthétiques qu'éthiques, ces infusions bio prennent la forme de tiges de thym, de lavande, de camomille et de romarin à plonger directement dans l'eau. Chaque fleur est cueillie et préparée à la main selon une charte pointue, en France et en Turquie. À Noël, les tisanes s'invitent sous le sapin dans deux coffrets noirs et dorés. Idéal pour prendre soin de soi au quotidien. Coffret de Noël — ­­30 €, en exclusivité au Bon Marché, et infusions disponibles à la Grande Épicerie et sur lebenefique.com

16

©Jérôme Galland

Le Bénéfique

Food


Tendances

Épicerie l'Idéal x Merci

Pop-up

Adresse fétiche de tous les épicuriens marseillais, l'épicerie l'Idéal s'invite dans les cuisines de Merci. Pendant dix jours, Julia Sammut et son équipe réchaufferont les cœurs avec une carte solaire allant du boulgour de Maussanne en taboulé aux olives taggiasche confites, citronnade catalane et autres loukoums de l’Ami Journo. Généreux, alléchant et réconfortant. L'Épicerie Idéal —­­ du 8 au 18 novembre chez Merci, 111 boulevard Beaumarchais, 11e

17


Tendances

Food

Ce ne sont pas vraiment des jus et pas vraiment des soupes non plus : imaginés par deux passionnés de gastronomie, ces bouillons naturels, bio et sans arômes ajoutés promettent de rendre l'hiver plus doux. Chauds ou froids, sucrés ou salés, ils se boivent à la bouteille ou s'utilisent pour donner un coup de fouet à des pâtes alphabets, un risotto et des vermicelles de riz accompagnés de crevettes. Bú —­­ www.bubouillons.fr

18


Tendances

Herbarium

Design

Après avoir travaillé dans la finance et dans la mode, les deux sœurs Marion et Pauline Ruilhat ont lancé une marque d'herbiers singuliers. Des plantes et des feuilles dénichées partout dans le monde sont séchées puis encadrées afin de donner à des intérieurs élégants une note de chic naturel. Jusqu'au 31 décembre, il est même possible de réaliser sa propre composition au bar à fleurs du Bon Marché.

Tendances

Herbarium —­­ www.herbarium.fr


20

Tendances


Tendances

Bode

Mode

La créatrice américaine Emily Bode est toujours en quête de tissus rares. Sa marque éponyme transforme des textiles vintage en vêtements uniques pour hommes. La flanelle à rayures devient une chemise et des nœuds de soie se réinventent en pseudo-cravates dans une esthétique subtile et presque naïve. Une collection empreinte d'histoire et d'éthique. Bode ­­ —­­www.bodenewyork.com

21


Tendances

Tarivoci

Art

Pastel, sérigraphie, collage : cette galerie en ligne nous fait une promesse, celle de l'art en barre. Sa fondatrice Victoria Clément tenait à proposer des œuvres de jeunes artistes à prix abordables (à partir de 70 €) avec une double ambition. Permettre le renouvellement de la scène artistique en soutenant de jeunes créateurs mais aussi mettre l'art à la portée de tous. Tarivoci ­ —­­ www.tarivoci.com

Tarivoci ­ —­­ www.tarivoci.com

22


Tendances

Alice Waters

Livre

Locavore de la première heure, la cheffe californienne Alice Waters se bat depuis 40 ans contre la malbouffe. Cette activiste propose dans son restaurant de Berkeley, Chez Panisse, des produits issus de petits fermes biologiques. Qu'on soit amateur ou cuisinier confirmé, son ouvrage est une référence. Soupe de courge butternut ou artichauts sautés aux oignons : pour éviter de complexer les lecteurs, les photos ont été troquées contre des illustrations, moins intimidantes. L'art de la cuisine simple ­­ —­­ par Alice Waters et Camille Labro, Actes Sud et Kéribus, 430 p., 32€

23


Les pages blanches SÊlection & photographie : Paris se quema 24


PÂTISSERIE PIERRE MARCOLINI


CI-DESSOUS : BASKET PIERRE HARDY / LAIT POUR LE CORPS BYREDO CI-CONTRE : SAC STAUD / CHOCOLATS LENÔTRE / BOUGIE OVEROSE CHEZ THE CONRAN SHOP

26


MONTRE HERMÈS, BOUCLES D’OREILLES KEEF PALAS CHEZ À REBOURS.

27


VASE AINO AALTO CHEZ THE CONRAN SHOP / HUILE D’OLIVE KALIOS


SAC STAUD / EAU DE PARFUM 19-69 CHEZ THE CONRAN SHOP / PINCEAU DE VOYAGE FENTY BEAUTY CHEZ SEPHORA / LUNETTES DE SOLEIL IZIPIZI

29



Mint Magazine

EAT & EXPLORE

31


32


Texte : Déborah Pham Illustration : Alice Meteignier

Très cher Bob,

Je pense souvent à cette nuit où je t’ai rencontré. Le thermomètre

affichait 12°C, c’était le début de l’automne. Pas l’automne où les feuilles

des arbres prennent des teintes orangées, pas l’automne des belles balades

dans les parcs parisiens, non. L’automne de la grippe et du nez congestionné. Tu as débarqué dans ma vie sur un parterre de Kleenex usagés, alors que je peinais à trouver le sommeil.

Ce que je considérais alors comme un remède pour me détendre

s’est rapidement transformé en obsession. J’ai lu énormément de choses

sur toi. Tu es né le 29 octobre 1942 en Floride. Ton père était charpentier, tu as d’ailleurs perdu une phalange en travaillant à ses côtés.

À 18 ans, tu t’es engagé dans l’Air Force et tu es parti vivre en Alaska. La peinture prenait déjà une place considérable dans ta vie, tu vendais tes tableaux dans le bar où tu travaillais à mi-temps. Tu es tombé

sur l’émission The Magic of Oil Painting, animée par Bill Alexander.

Un peintre allemand qui t’a ensuite formé. Tu as compris que tu pouvais gagner plus d’argent en faisant ce qui te plaisait vraiment. 33

Humeur

Lettre à Bob Ross


Humeur

Dans une des tes émissions, tu as même dit ô combien tu étais

heureux d’avoir quitté ton poste de sergent-major : « J’étais celui qui te faisait récurer les latrines, celui qui te faisait faire ton lit, celui qui te criait dessus

quand tu étais en retard au boulot. Ce travail nécessite d’être dur et méchant. J’en ai eu assez. Je me suis promis que si je réussissais à quitter cette carrière, je ne ferais plus jamais rien de similaire. » Je suis intimement convaincue

que tu n’as plus jamais crié après cela ; c’était en 1981, je n’étais pas encore née.

Tout s’est enchaîné très vite puisque ton émission a été diffusée

sur PBS dès 1983, j’ai lu récemment que tu faisais ça bénévolement.

Pendant douze ans, tu t’es installé face à ce grand chevalet avec ta coupe afro

et ta chemise bleue, et tu as peint sans gagner un kopeck. Pourtant ce boulot, tu l’as exercé avec passion jusqu’à la fin, Bob. 200. C’est le nombre de lettres que tu recevais par jour. Des lettres de spectateurs te demandant conseil,

des lettres d’encouragement… Quand tu n’avais pas le temps d’y répondre, tu leur passais un coup de fil, comme on prend des nouvelles d’un ami.

Un jour, un téléspectateur t’a expliqué qu’il n’était pas capable de peindre car il était daltonien. Tu lui as consacré une de tes émissions en peignant un paysage en nuances de gris. Voilà le genre de mec que tu es, Bob.

Ce que tu aimes peindre, ce sont les paysages. Tu as très rarement

peint des portraits, ton truc c’est plutôt les montagnes entourées de « petits arbres heureux », comme tu dis, les lacs perdus dans la brume, les cabanons enneigés et les forêts bucoliques. Partout aux Etats-Unis, des clubs

de peinture « Bob Ross » se sont créés grâce à toi ; pourtant, tu n’as jamais été reconnu par tes pairs, tu n’as jamais été exposé dans des musées de renom

et tes oeuvres ne se sont jamais vendues ailleurs que dans de petites expos ou sur Ebay.

34


Humeur

La vérité, c’est qu’on te prenait un peu pour un plouc. Tu étais

le gentil monsieur de la télé avec sa voix douce et ses phrases un peu naïves. Tu étais doux et bienveillant, tu disais : « Tout le monde peut peindre, tout

ce dont on a besoin, c’est un peu de rêve dans le coeur et de l’entraînement. » Hélas, on trouvait que tes peintures ressemblaient à des fonds d’écran Windows 98.

Je ne sais pas comment j’ai pu passer tant d’années sans te connaître.

Tes cours de peinture ont sur moi l’effet qu’ont les vidéos YouTube d’ASMR sur d’autres. J’ai passé des nuits à te regarder, à t’écouter, conservant jalousement ce secret jusqu’au jour où je suis tombée sur des articles qui t’étaient dédiés dans The New Yorker, le Washington Post ou même le New York Times :

« Comment dormir grâce à Bob Ross », « Pourquoi les millenials sont-ils fans

de Bob Ross ». C’était donc ça. Des fans de memes t’avaient ressuscité, moquant gentiment tes punchlines avec les fameux happy little trees, les petits arbres

heureux que tu aimais peindre. Des figurines à ton effigie, des puzzles et des toasters s’empilaient dans les rayons de Target. Puis les réalisateurs

de Deadpool 2 ont sorti un second trailer pour leur film, qui n’est ni plus

ni moins qu’un pastiche de ton émission. L’application de méditation Calm

a inclus un podcast dans lequel on entend ta voix, à la demande des utilisateurs. Voilà Bob, ce n’est plus que toi et moi désormais, je dois bien me rendre

à l’évidence. Tu es dans les oreilles de tous ceux qui cherchent à trouver un peu de bienveillance sur une app’ de startupers.

Si je t’écris cette lettre, Bob, c’est que je crois avoir acquis la maturité

nécessaire pour te partager avec les autres. Je ne garde plus jalousement ce

havre de paix aux couleurs de l’automne, décoré de sapins majestueux, d’aurores boréales et de lacs glacés.

35


36


promises Texte et photos : Stéphanie Davilma

L’un des premiers vins natures que j’ai bus et aimés boire est celui de Jean-Christophe Comor, il y a quelques années déjà. C’est donc lui que j’ai souhaité rencontrer pour raconter ce que j’ai pu observer lors de quelques passages au domaine « Les Terres promises » à la Roquebrussane dans le Var. 37

Découverte

Les Terres


Découverte

J’avais envie de parler de la création du vin, un peu comme je le bois, sans apporter aucune analyse œnologique, sans tenter de parler du nez, des arômes ou toutes ces choses que je ne maîtrise pas. Cette boisson éveille mes sens, bien sûr, et j’admire ceux qui ont un tel savoir, mais pour ma part, je ne veux pas réfléchir, juste ressentir. Je crois profondément que la dégustation du vin est fonction de son histoire personnelle. La mémoire des parfums et celle des arômes sont selon moi intimement liées. Le temps de la dégustation est également important. En fonction du moment, je peux aimer un vin parce qu’il me surprend, me déconcerte ou au contraire parce qu’il me rassure, me rappelle un souvenir ou juste parce qu’il se laisse boire tout simplement...

et des éclats de rire un peu plus loin. La douce lumière est là et les vendangeurs armés de leurs sécateurs ont commencé leur journée bien avant moi. Ici, on vendange à la main. Jean-Christophe n’est pas encore arrivé et c’est Jonas qui m’accueille avant de se remettre très vite au travail. Le rythme est soutenu, mais l’ambiance est joyeuse entre des vendangeurs aux profils variés. Ils sont plus ou moins expérimentés et viennent de toute la France, voire de plus loin et l’accent québécois de Chanelle ne passe pas inaperçu au milieu des vignes. Les caisses se remplissent les unes après les autres avec de belles grappes dorées légèrement rosées, du rolle, un cépage typique du sud de la France, et c’est Jean-Christophe, au volant de son tracteur, qui vient les récupérer. Les allers-retours s’enchaînent entre le champ et la cave.

Bref, je fais partie de ceux qui n’analysent pas. Pour autant, je bois du vin avec l’attention particulière qu’on porte à une boisson qui l’est tout autant. Je bois d’ailleurs essentiellement du vin nature, celui qui loin des goûts standardisés me racontera une histoire, un vin vivant.

C’est là-bas que je pars rejoindre Léa qui réceptionne les grappes pour en extraire le jus. Elle le goûte et effectue très vite un premier test de densité pour calculer le niveau de sucre, premier indicateur de ce que donnera sa vinification. Je ne peux refuser son invitation à goûter aussi et mon analyse sera extrêmement pointue : « C’est vraiment bon. » Jean-Christophe arrive avec quelques grappes dans un sceau, de la clairette blanche. Elles viennent d’une autre parcelle et il va les presser à la main pour effectuer un test avant vendange cette fois-ci.

Ma première visite au domaine « Les Terres promises » a eu lieu un jour de septembre, une des premières matinées où l’on sentait la fraîcheur de l’automne s’installer. J’avais peur d’être en retard et de ne pas voir la lumière du lever du jour sur les champs. Après avoir dépassé la gendarmerie de 300 mètres avant de tourner à droite, je m’avance dans les vignes et distingue des discussions 38


39


40

Rencontre


J’accepte là encore de goûter le jus, mais je crois qu’il est inutile que je partage ici ma nouvelle analyse.

Je croise à nouveau Jean-Christophe qui est en train de choisir les bouteilles pour le repas qu’il partage avec les vendangeurs. Toute l’année, il fait l’acquisition de vins de toute la France, des cuvées prestigieuses, d’autres confidentielles et il en fait découvrir certaines à chacun de ces repas. Il me pose alors la question redoutée : « Vous aimez quoi comme style de vin ? » C’est comme pour la musique, je n’ai jamais su répondre à cette question pour les raisons que j’ai expliquées plus haut. Je balbutie une réponse peu convaincante et il replonge sa tête dans ses cartons. Je n’ai pas le droit de regarder, les dégustations se feront à l’aveugle.

Mes discussions avec Jean-Christophe sont entrecoupées par ses allers-retours dans les vignes et par les différentes choses à faire durant cette période agitée. Il me parle de son histoire, celle de plusieurs copains de Sciences-po qui s’imaginent tous avoir un vignoble un jour. Il est le seul à l’avoir fait, après un temps dans la politique. Pourtant, ce n’était pas gagné, la nature ce n’était pas son truc et il n’avait pas spécialement de connaissances dans le domaine. Alors à la question : « Mais comment compense-t-on ses lacunes ? », il me répond : « Je réfléchis. » Il faut dire que son envie était forte. Il voulait investir une terre, la travailler pour s’ancrer dans celle-ci afin de se forger des racines qu’il dit ne pas vraiment avoir autrement. Le nom de son domaine « Les Terres promises » fait en partie écho à cette quête personnelle. Le fruit du travail de ses terres n’aurait pas pu être autre chose que du vin, mais je n’en saurai pas plus pour le moment, car Léa et Bertrand l’appellent, un problème avec le camion.

Tout le monde se retrouve alors au bastidon où Céline, une organiste, prépare les repas pendant les vendanges. Oui, une organiste cuisinière à ses heures perdues. Les différents vins sont servis à tour de rôle par Nathan qui a suivi des études pour devenir sommelier et à qui Jean-Christophe accorde sa confiance pour cette tâche importante. Chacun donne son avis, analyse avec plus ou moins de connaissances ou encore à l’instinct. C’est plaisant d’écouter cet échange entre le vigneron et les vendangeurs devenus tantôt des hôtes, tantôt des élèves le temps du déjeuner. Je décide de m’éclipser pour en observer davantage une prochaine fois.

L’odeur du raisin pressé est forte, alors je sors prendre l’air devant la cave construite avec les pierres d’une bergerie datant du XVe siècle. L’effervescence du retour de vendange prend progressivement place. Du mourvèdre est placé à l’égrappage pour en retirer la partie végétale avant vinification.

À mon retour au domaine, quelques jours plus tard, une nouvelle journée de vendanges est bien entamée. Je passe par le bastidon où Céline prépare des frites de patates douces 41

Découverte

Jean-Christophe voulait investir une terre, la travailler pour s’ancrer dans celle-ci afin de se forger des racines qu’il dit ne pas vraiment avoir autrement.


42

DĂŠcouverte


43 DĂŠcouverte


Découverte

pour ce midi avant de rejoindre la cave. J’y retrouve Léa qui m’explique ce qu’elle doit faire aujourd’hui, avec le bruit assourdissant du pressoir en fond. Elle me parle du vin de goutte, du vin de presse, de l’importance d’exercer un décuvage au bon moment pour préserver les levures indigènes, essentielles à la vinification du vin naturel, car ce sont elles qui transforment le sucre du raisin en alcool. Ces levures sont présentes sur les baies du raisin, dans l’environnement proche, mais également dans la cuve, contrairement aux levures exogènes, celles qui n’ont pas leur place ici, souvent artificielles et aromatisées. Les premières sont plus délicates à manier, elles impliquent de respecter la terre au préalable et elles sont plus fragiles, mais ce sont elles qui préservent l’identité d’un terroir. C’est bien pour cela que Léa les bichonne.

Il évoque les séries américaines où l’on voit toujours quelqu’un avec un grand verre de vin à la main, il me cite la parabole du figuier stérile et m’explique que les Romains cultivaient déjà la vigne ici, sur ces mêmes terres. Dans les conversations avec Jean-Christophe Comor, les digressions sont reines. Quand je lui demande, pourquoi le vin nature, il me répond que ce n’est pas un souci écologique qui l’a mené à faire ce choix, même si cela s’est imposé par la force des choses. Il s’est tout simplement rendu compte que c’est le vin qu’il aime. Il me confie d’ailleurs avoir une cave pleine de vins « conventionnels » achetés il y a longtemps qu’il devrait revendre. « Dès que j’en ouvre une, je m’emmerde ! » Pour lui, un vigneron travaille au service de la terre pour que le vin puisse exprimer son identité. Il mène la danse certes, mais laisse à la vigne une certaine liberté pour que cette danse soit belle. Léa nous arrête là. Il est temps d’aller rejoindre le bastidon où un barbecue est en préparation.

Son explication est coupée par Jean-Christophe qui arrive au volant du tracteur avec les grappes du jour. Il les place au pressage puis nous reprenons notre conversation là où nous l’avions laissée. Il me parle une nouvelle fois de l’importance pour lui de travailler la terre, mais aussi de pouvoir la transmettre à ses enfants s’ils le souhaitent. C’est selon lui la clé de leur liberté. Ils pourront partir où ils veulent, car ils savent qu’ils auront toujours un endroit où revenir, des racines. Ce ne sont donc pas uniquement les siennes qu’il a cherchées ici.

Le déjeuner commence selon un cérémonial établi par le maître des lieux qui choisit les places de chacun à table. Laurine qui travaille ici toute l’année sera à sa droite et moi à sa gauche. Il se charge également de l’ambiance musicale, en quête de la chanson qui symbolisera les vendanges de cette année. On perçoit l’indécision à la durée d’écoute de certains titres dont on entendra uniquement l’introduction. C’est agaçant, mais il ne nous laisse pas le choix.

Le paysage se devait d’être méditerranéen, car c’est celui qui lui rappelle son enfance et le choix du vin était une évidence. Même s’il ne nie pas le plaisir de l’ivresse, c’est une boisson spirituelle, mystique, objet de tous les fantasmes. Cette boisson le passionne et plus il m’en parle, plus ses bras s’animent, s’agitent…

Comme lors de ma précédente visite, l’ambiance est bon enfant et les bouteilles défilent aussi vite que les avis fusent sur leur contenu. Ces déjeuners semblent d’une grande importance ici. 44


45


46

Rencontre


Découverte

C’est le luxe que s’offre Jean-Christophe Comor pour que les vendanges soient également synonymes de transmission. Lorsqu’il a investi le domaine, il travaillait seul et l’on voit bien qu’aujourd’hui, il savoure ces moments de partage. Il est d’ailleurs très fier que certains vendangeurs passés par ici soient eux aussi devenus vignerons.

Après s’être ancré dans une terre pour avoir des racines et en donner à ses enfants, après avoir travaillé cette terre pour créer du vin, Jean-Christophe souhaite maintenant se tourner vers l’avenir en allant plus loin dans sa volonté de transmission. Son nouveau projet est, en effet, de fonder ici des espaces de création pour accueillir des résidences d’artistes, mais également une bibliothèque.

Ce midi-là, le temps défile comme lors d’un déjeuner en famille un dimanche. Le mistral souffle et les ombres de la vigne qui couvre la pergola dansent sur la table. Difficile d’imaginer que la journée de travail n’est pas terminée et les vendangeurs semblent plutôt contents du retard pris sur la préparation du dessert. Pourtant, lorsque Gigi l’amoroso résonne dans les enceintes, tout le monde se lève et le travail reprend comme si cette trêve n’avait pas eu lieu.

Notre conversation est une nouvelle fois coupée. C’est Jonas qui l’appelle. Les vendanges de l’après-midi sont terminées et le vigneron doit le rejoindre pour récupérer les grappes. Sans attendre, nous nous disons au revoir et il part au volant de son tracteur. Autour de moi, tout est calme, le mistral est tombé et la lumière décline sur les vignes. En les regardant, je me dis que oui, c’est bien la terre à leurs pieds, la nature environnante, les fluctuations du temps cette année-là qui déterminent ce que sera le vin naturel de ce vignoble, mais ce n’est pas si simple. Ce sont les choix d’une personne, son travail et celui de ceux qui l’assistent qui permettent de créer le vin. Et puis, même si je n’ai vu qu’un petit échantillon de ce qu’il se passe ici, j’ai également la conviction que l’histoire de ces terres, celle du vigneron et de chaque personne avec qui il travaille ont une incidence aussi. Ce n’est qu’un ressenti et cela n’a aucune portée scientifique, mais si je ne voyais pas les choses comme cela, le vin n’aurait pas la même saveur pour moi.

Je suis Jean-Christophe qui se dirige vers la cave. Il m’explique que ce travail lui a appris l’humilité, que le vigneron appartient à sa terre, ce n’est pas l’inverse. C’est dur et aliénant, mais paradoxalement la terre oblige à la persévérance, c’est une source inépuisable d’espérance. Les saisons, les années passent et avec elles, l’espoir renaît à chaque fois. La persévérance, c’est d’ailleurs le nom du chemin qui mène au domaine. La fatalité n’a pas sa place ici. Comme lors de nos précédentes conversations, le sujet ne cesse de dériver. Entre quelques phrases sur Napoléon, sur cette parcelle qu’il faut vendanger rapidement ou encore sur son ami Jean-Louis, il me parle souvent de son épouse, Sophie, de son soutien sans faille. Elle ne travaille pas au domaine, mais sans elle, il n’aurait pu accomplir tout cela. Puis, il me confie son envie d’une « troisième vie ».

La prochaine fois que je boirai une gorgée du vin de Jean-Christophe Comor, je ne tenterai toujours pas d’analyser, mais je me souviendrai des moments passés ici, des blagues, des digressions et de la musique lors des déjeuners des vendanges, c’est certain. 47


Get a room

Le Couvent Marseille Texte : Hélène Rocco Photos : Le Couvent

À quelques pas du Vieux-Port, une volée de marches lissées nous mènent jusqu'à une lourde porte. Derrière elle se cache une ancienne bâtisse de jésuites. Il y a quelques années, un couple de passionnés l'a transformée, non pas en hôtel ou en chambre d'hôtes, mais en neuf appartements tout confort. Le nôtre se niche sous les toits et promet de nous accueillir comme une seconde maison. Refuge idéal pour les esthètes qui cherchent le calme et l'indépendance, l'espace dispose d'un vaste salon coiffé de poutres apparentes et meublé de belles pièces chinées. Tout, ici, a été pensé avec un soin particulier, jusqu'à la vaisselle vintage qui occupe les placards de la cuisine équipée. En haut de l'escalier en colimaçon, c'est une chambre lumineuse qui se dévoile. On repère immédiatement l'étagère qui court le long du mur. Remplie de livres lus et relus, elle nourrira nos soirées les plus douces. Un repos monacal au cœur d'un quartier bouillonnant qui nous pousse à rêver de nous retirer au Couvent pour toujours. 48


Eat

Look

Relax

Chaque suite possède sa propre cuisine dotée d’ustensiles dernier cri et appelle les vacanciers à se mettre aux fourneaux. Café Cap Mundo, thé Mariage Frères, chocolat et lait ravissent les lève-tôt. Quant aux plus paresseux, ils peuvent demander à se faire livrer les gourmandises du café Maison Geney, à quelques pas de là. Une brioche maison, un jus de fruits frais et ça repart !

Rien de mieux pour toucher du doigt l'âme de la cité phocéenne que de faire un tour dans son plus vieux quartier. En sortant du Couvent, on tourne à droite et on se perd dans les ruelles escarpées. Les linges pendent aux fenêtres et les œuvres de street art ornent les coins et recoins. Du haut de la colline, on admire la vue sur le Vieux-Port et NotreDame-de-la-Garde. Et avant de rentrer dans son havre de paix, on boit un coup sur la place de Lenche, typique et chaleureuse.

Comme à la maison, une tonne de livres sont à disposition dans les différents appartements : on n'a pas trouvé meilleure excuse pour squatter la chaise longue de Le Corbusier-Perriand-Jeanneret qui trône au milieu du salon. Si tout se passe bien, vous n'aurez même pas à allumer la grande télévision.

49

Chambres à partir de 120 euros (séjour de deux nuits minimum) 6 rue Fonderie Vieille 13002, Marseille


Marseille Eat Maison Vauban

Get a room

Découvrir

Nour d'Egypte Lovée dans l'une des salles du centre culturel égyptien, cette cantine aux banquettes bariolées accueille tous les jours les affamés des mezze. Si le dieu du plaisir est avec vous, il fera assez beau à votre venue pour profiter du toit-terrasse. Citronnade maison sous le soleil de la Provence, falafels légèrement relevés, caviar d'aubergines et pléthore d'autres douceurs méditerranéennes : bref, que du bon. Et en dessert une basboussa, un gâteau de semoule à la noix de coco.

attendu que ce soit la mode pour envoyer de délicieuses pizze au feu de bois. Depuis 1943, le tout-Marseille vient s'offrir une pizza ricotta-gorgonzola-ail, version maxi si l'appétit leur en dit, et de généreuses lasagnes. Leur seul souvenir suffit à nous faire saliver, bouche ouverte.

10, rue Bernex, 1er

10, rue d'Aubagne, 1er

Maison Vauban

Ice cream

En lieu et place d'un ancien PMU, une table « musicale » orchestrée par l'ancien producteur du groupe Synapson s'est fait un nom. Du matin au soir, elle régale les grimpeurs de la butte Vauban d'assiettes gourmandes et de saison. Au menu ce jour-là, comme un câlin, échine de porc confite, polenta crémeuse citronnée et poivron marseillais grillé. Mieux qu'une balade digestive, on peut jouer à la pétanque dans la cour, après le festin. 109, boulevard Vauban, 6e

Chez Sauveur Voilà une auberge typique, à deux pas de la Cannebière, qui n'a pas

Vanille Noire Il n'y a qu'ici que l'on peut être alléché à la vue d'une glace couleur charbon. La faute aux grains de vanille qui, en plus de teinter la spécialité, lui donnent un goût unique de crème doux-amer. Pour un total look noir, accompagnez-la d'une boule cacao et si l'affaire manque de peps, un sorbet pastis viendra contraster le tout, façon Provence.. 13, rue Caisserie, 2e

Emkipop Émeline et Guillaume ont baladé leur triporteur un moment avant d'ouvrir une première boutique de bâtonnets glacés et artisanaux. Ici, pas question de déguster un sorbet fraise en plein hiver, c'est la saisonnalité qui prime. Détox ou réconfortantes, les glaces plongent tête-bêche dans le chocolat fondu pour reproduire la fameuse coque de ces desserts d'enfance. Notre combo préféré ? Lait d'amande, fleur d'oranger, chocolat et granola pour la parure croquante. 80, boulevard Vauban, 6e

50

Coffee

Deep À la fois coffee-shop et torréfacteur, cette adresse de poche a le mérite de maîtriser la préparation du café du grain à la tasse. La machine turbine à l'arrière de la boutique et on s'installe au comptoir pour siroter un espresso. Côté douceur, notre cuillère s'en donne à cœur joie avec le banana bread vegan. Et comme des platines vinyles sont planquées derrière le bar, on chaloupe tout le long de la dégustation. 15, rue des Glandèves, 1er


Relax

See

La Relève

La Vieille Charité

Le bistrot se remplit à l'apéro et ça déborde sur le trottoir. Tables en formica, carrelage rétro et comptoir en marbre pour lever le coude en file indienne : on se sent bien ici. La carte des vins change au gré des humeurs et on savoure, ce soir-là, un blanc du Languedoc et un Touraine Sauvignon en grignotant des tapas qui tabassent et une terrine maison.

On abandonne ses petits tracas à la porte de ce vaste espace bien-être et on se laisse bichonner. Pensé comme un appartement par la chorégraphe Bénédicte Morel, ce centre propose des consultations de sophrologie, des massages thaïs, un sauna japonais, des ateliers de naturopathie, mais aussi des cours de yoga dynamique. 77 cours Pierre Puget, 6e

Get a room

Drink

Avec sa chapelle baroque à coupole, cet hospice du XVIIe vaut le détour à sa seule architecture. Il y règne un calme olympien qui permet de savourer la visite de ce site éblouissant. Le long des galeries se sont installés le Musée d'archéologie et le Musée des arts africains. On y trouve aussi un cinéma et une librairie entre ces murs chargés d'histoire. 2, rue de la Charité, 1er

41, rue d'Endoume, 7e

Shop

→ Y aller ­­—­­ En TGV, au départ de Paris (aller-retour à partir de 70€) et Lyon (aller-retour à partir de 40€)

Maison Empereur Plus vieille quincaillerie de France, ce joyeux bric-à-brac se déploie sur deux étages. Casseroles, vaisselle et toiles de lin envahissent l'espace du sol au plafond et il faut de longues heures pour faire le tour de tous ces trésors. Juste en face, une seconde boutique propose des vêtements, chapeaux et une flopée d'espadrilles colorées. 4, rue des Récolettes, 1er

Archik À mi-chemin entre showroom, galerie d'art et cabinet d'architecture, l'adresse expose des objets d'art qu'elle co-édite pour décorer ses biens immobiliers. Les designers invités imaginent à tour de rôle une pièce exclusive, fabriquée en France et éditée en série limitée. À notre venue, la sublime collection de vases en frêne naturel et en céramique de l'ébéniste Samy Rio était mise en lumière. 50 rue Edmond Rostang, 6e

51

Archik


Rencontre

Claire Boreau,

mise à nu(e) Texte : Hélène Rocco | Photos : Tiphaine Caro

Surtout, ne dites pas d'elle qu'elle est artiste florale, cela gommerait injustement la dure réalité de son métier. Claire Boreau est une fleuriste, une artisane – comme ses parents bouchers avant elle. Il y a deux ans, elle a aménagé un studio dans l'ancien atelier de peintre de son grand-père, où elle compose des bouquets sous le nom de Nue Paris.

52


53 DĂŠcouverte


54

Rencontre


Rencontre

Des notes de musique classique s'échappent du fond du jardin. Derrière la maison de ses grands-parents en banlieue parisienne, Claire Boreau a investi l'atelier d'artiste de la famille. Elle nous accueille, radieuse, en débitant très vite l'histoire du lieu avant d'aller se chercher un café. À la manière d'un cabinet de curiosités, les murs habillés de lambris exposent des illustrations et des peintures anciennes. Des fleurs et des feuillages de toutes sortes peuplent les vases chinés et les porcelaines chinoises. Contre la fenêtre, les portraits de sa grand-mère et son grand-père semblent l'observer. Alors que la fleuriste s'agite dans la pièce baignée de lumière, on s'installe sur la banquette pour écouter son histoire. Claire a grandi dans une famille d'artisans bouchers férus d'art et de littérature : « C'est un fossé bizarroïde dans lequel j'ai toujours vécu. Mon père fait les marchés, parle avec une vraie gouaille et il lit de la poésie ancienne, regarde des films d'auteurs hyper pointus... » Après le lycée, elle étudie le marché de l'art puis plaque tout pour partir vivre à Rome. Quand sa voisine décide d'aller s'installer dans une communauté hippie des Pouilles, elle lui demande de prendre soin de son jardin en permaculture. La jeune femme met les mains dans la terre, regarde les plantes pousser et s'accroche au végétal : « Je n'y connaissais rien, ça m'a vraiment formée. »

c'est une profession à la fois concrète et poétique. Pendant un an, elle prépare un CAP et enchaîne les stages. Le premier se déroule dans une boutique de quartier, où elle apprend la technique de la vrille – du bouquet rond – et la relation client. Le deuxième a lieu du côté de la rue Racine (6e) chez Stanislas Draber. « Il m'apprend à acheter les plus belles fleurs à Rungis et on passe nos journées à parler de poésie. » Puis à la Saint-Valentin, elle découvre l'univers de Majid Mohammad, dont elle admire le travail, chez Muse. Il l'initie aux créations baroques, contemporaines et déconstruites. « Je me suis mise à imaginer des mélanges improbables, à utiliser des végétaux peu connus : je suis devenue plus créative. » Quand vient l'heure de trouver un emploi, l'envie de se mettre à son compte la démange, mais on lui conseille d'abord d'étoffer son expérience. Elle dégote, à contre-cœur, un poste dans une boutique sophistiquée du 16e. « Il y avait des vases Serax partout, c'était sans âme, sans histoire, trop lisse. » Durant l'été, Claire perd l'un de ses grands frères et remet tout en question. Après deux semaines de travail, elle démissionne et lance Nue. « Je n'avais pas de thunes, je vivais au-dessus de l'atelier, j'étais à poil à tous les niveaux. » Sans réseau, elle fait un emprunt à la banque pour façonner la plus belle des vitrines : son site internet. Son compagnon de l'époque est photographe de mode, il capture les compositions dans le petit studio « et quand on n'avait plus de fleurs, on partait en mission près du métro la nuit pour en couper ». Pendant deux mois, elle récolte les adresses de tous les hôtels, cabinets d'avocat, agences de publicité de Paris et leur envoie un PDF qui présente son métier. Les milliers d'envois débouchent sur une dizaine de belles rencontres. Elle décroche notamment un abonnement hebdomadaire pour fleurir

À son retour en France, plus question de chercher un emploi dans l'art ou le tourisme. « J'ai toujours travaillé sur les marchés avec mes parents : je connaissais bien le commerce. Je passais mes week-ends à vendre des biftecks et à fourrer des dindes à Noël. J'ai réalisé que je voulais faire un métier d'artisanat comme Papa. » Claire a l'entrepreneuriat dans le sang et l'idée de devenir fleuriste lui plaît : 55


Rencontre

Ses créations sont spontanées, elle ne les dessine pas et se laisse guider par les odeurs et son intuition.

les hôtels Bienvenu et Panache, et rencontre la créatrice Elsa Le Saux, avec qui elle réalise une série photo pour le magazine Cereal.

un mois de travail, mesure quatre mètres de haut. C'est un jardin suspendu dont les feuillages tropicaux semblent étinceler à la lumière d'un laser violet, dans une salle plongée dans le noir. Lorsqu'elle assiste à la répétition générale du défilé, la fleuriste fond en larmes alors que la pression retombe.

Tous les matins, Claire se rend à Rungis, entre 4 et 5 heures puis elle rentre au studio. Là, elle nettoie les végétaux et retire les feuilles sur du Chopin ou du rap, selon l'humeur et ses lectures du moment. « Sur du Booba, les fleurs sont teintées ou en plastique… » Ses créations sont spontanées, elle ne les dessine pas et se laisse guider par les odeurs et son intuition. Très vite, elle signe avec l'agence Saint-Germain grâce à laquelle elle obtient des campagnes publicitaires. Au bagout et avec le temps, elle remporte des contrats de plus en plus prestigieux dans l'événementiel et la livraison de bouquets. L'hiver dernier, pour les magasins Kenzo, elle crée un flower shop. La maison est séduite par son idée rafraîchissante : plutôt que d'avoir recours à des seaux métalliques, elle fait appel à des céramistes comme Léa Munsch de Gangster Bastille pour présenter les fleurs séchées. Rebelote en juin quand elle fleurit le défilé printemps/été 2019 de la marque. Sa simplicité et son esthétique font mouche. Elle se retrouve à la tête d'une dizaine de fleuristes indépendants, elle qui a 29 ans et deux années d'expérience seulement. Son œuvre titanesque, qui lui a demandé

Si ses créations magistrales et colorées font rêver toute sa communauté Instagram, elle tient cependant à raconter l'envers du décor. « C'est un métier très dur physiquement : la plupart du temps, je porte des seaux d'eau et je fais le ménage. Si tu as de l'eczéma ou un mal de dos, oublie. On fait aussi des horaires de dingue et dans le monde de la mode, on est considéré comme des petites mains, il y a un vrai mépris de classe. » Pour elle, rien à voir avec l'art, elle compose de beaux bouquets sur commande et il ne s'agit pas d'un travail intellectuel, contrairement à ce qu'Internet laisse penser. « Il m'est arrivé un truc hyper drôle récemment, lance Claire en étouffant un éclat de rire. Une nana est venue me donner un coup de main sur un défilé. » Face à toutes les tâches de manutention, la jeune femme a l'air perdu. « Je lui demande donc si elle veut être fleuriste et elle me répond que non. Chelou. Et là, elle ajoute qu'elle, elle veut être artiste florale. Mais c'est juste la manière snob de dire fleuriste ! » 56


57 Rencontre


58

Rencontre


Rencontre

Aujourd'hui, la profession laisse davantage de place aux forces de proposition : ce n'est plus une carrière qu'on embrasse par défaut, car l'artisanat est à nouveau valorisé.

59


Rencontre

Malgré tout, Claire reconnaît qu'aujourd'hui, la profession laisse davantage de place aux forces de proposition : ce n'est plus une carrière qu'on embrasse par défaut, car l'artisanat est à nouveau valorisé. Les clients font confiance aux professionnels. Ce qu'elle aime par-dessus tout, c'est réussir à entretenir des contacts humains avec ceux pour qui elle travaille. « Je leur envoie une carte postale pendant les vacances. Je ne veux pas d'un simple rapport commercial. » Ce qui donne parfois lieu à des échanges chargés de sens. Un jour, une connaissance l'a appelée pour qu'elle s'occupe des fleurs à l'enterrement de sa grand-mère. « Quand mon frère est décédé, j'ai dit à tout le monde que je m'occupais de tout. Je suis allée à Rungis rencontrer les fournisseurs, j'ai demandé de l'aide à des copines et je me suis complètement lâchée sur les arrangements. Mais après ça, je n'ai pas refait des cérémonies de deuil. » Le défi est grand : elle passe une heure au téléphone avec la fille de la disparue. « Dans son jardin, il y avait du jasmin grimpant : je devais donc en trouver, même si ce n'était pas la saison. » Lorsqu'elle découvre le résultat, la mère de son amie lui tombe dans les bras. Pas étonnant : en temps normal, les pompes funèbres commandent du lys très ouvert qui doit faire bonne figure jusqu'à la mise en terre, pas plus. « C'est à la fois logique et terrible symboliquement, c'est le moment où il faut célébrer la vie absolument. » On devine alors que Claire envisage de travailler autour de la disparition. Et elle a de nombreux autres projets en tête, notamment des collaborations avec des amis designers. Pourtant, elle n'imagine pas faire ce métier toute sa vie. « Dans ce milieu, on gaspille beaucoup, ce n'est vraiment pas écologique. Et puis j'ai la bougeotte, j'ai envie de devenir libraire, de quitter Paris ou d'écrire des livres de recettes parce que je ne lis que ça avant de m'endormir… »


61 Rencontre


Humeur

C'est gourmand Texte : Marine Normand Illustration : Zoé Labatut

Assise à la terrasse d’un café du 18e arrondissement, un samedi midi,

je savoure ma victoire sur les complexes d’une adolescence qui s’était un peu

trop prolongée. J’ai enfin la trentaine, une situation financière presque stable, un travail, des potes, de l’amour-propre. Le champ des possibles vient enfin de s’ouvrir à moi, j’ai même commencé à me renseigner sur un quelconque

engagement politique. Je me sens déjà l’âme d’une Martine Aubry qui aurait

une coupe de cheveux vraiment plus classe, sauf les pointes sèches, mais bon, ça arrive aux meilleures. Bravo championne. Je suis enfin une meuf indépendante, une de celles chantées par les Destiny’s Child. Preuve du fait que je sais parfaitement gérer mes petites affaires ? Je suis en train de m’inviter à déjeuner, seule, parce qu’on le sait toutes, Véronique Sanson a toujours raison. Besoin de personne. 62


63 Humeur


Humeur

Cachée derrière des lunettes de soleil, une petite salade de quinoa (cliché) devant un marché de producteurs locaux (cliché encore), je me sens prête à choisir la conclusion de mon repas parisien, avant de me diriger vers de nouvelles aventures.

Après avoir vainement tenté d’alpaguer la serveuse plusieurs fois (je suis

indépendante, mais faut croire que j’arrive pas à gueuler assez fort pour capter l’attention), j’arrive enfin à la choper. Un peu coupée dans son élan, elle s’impatiente et me demande rapidement ce que je souhaite.

Tétanisée par cette réaction (ALLO, ELLE SAIT PAS QUI JE SUIS ? UNE MEUF INDÉPENDANTE OKAY, ALORS QU’ELLE

SE DÉTENDE UN PEU), je vois subitement des années de travail sur moi-même s’écrouler devant mes yeux. Par ma faute. Une erreur dans un parcours que j’avais millimétré. Je prononce : - « Un café gourmand s’il vous plaît. » Les mots sont sortis de ma bouche et il est impossible de les rattraper, de les ravaler. Ils se sont fait entendre, ils résonnent encore les nuits où je ne trouve plus le sommeil. Je voudrais faire marche arrière.

Commander juste un espresso, ou même le fromage blanc avec son coulis aux fruits rouges, merde, MÊME LE FROMAGE BLANC,

mais il faut que je porte dorénavant sur moi la conséquence de mes actes. Toute la terrasse a entendu. Je dois continuer mon chemin. 64


Humeur

La serveuse a souri. Elle aussi sait que c’est dorénavant terminé pour moi. Elle m’a entendue prononcer ces mots. Les dés sont jetés et le respect

s’est envolé. Je l’ai vu faire ses bagages dans les yeux de la jeune femme. Il en a profité pour partir avec mon amour-propre qui m’a demandé son solde de tout compte. Que venait-il de se passer ? Que venais-je de commander ? Mais qui suis-je, bordel ? Le café gourmand, vraiment, ça m’énerve. Ça dit des choses pas jolies sur la société, en vrai. Ça dit des choses pas jolies sur la personne

qui le commande aussi. On succombe aux grosses ficelles du marketing

et on rejoint le troupeau de moutons, le même qui t’a obligé à porter des pulls à manches courtes (QUEL EST L’INTÉRÊT DE CE TRUC,

TU VEUX AVOIR CHAUD OU TU VEUX AVOIR FROID,

MAIS JUSTE AUX BRAS) et à mettre des jupes au-dessus des pantalons. Pour moi, le café gourmand c’est le même délire, mais qui se mange.

C’est la honte de la carte des desserts. C’est le François Bayrou des menus. C’est le plat qui ne prend pas de décisions, qui bouffe à tous les râteliers. C’est un café ? C’est un dessert ? C’est un café avec un dessert ? Pourquoi

tu ne prends pas de décisions, café gourmand, hein ? Pourquoi tu choisis pas

ton camp, et puis tu t’y tiens ? C’est la honte d’être un dessert ? C’est la honte d’être un café ?

BORDEL, C’EST QUOI TON PROBLÈME ?

65


Humeur

Déjà ce nom. Genre le café, c’est Cyril Lignac de 2005 qui l’a adoubé. Franchement. « Gourmand », c’est un adjectif dont le son me dégoute. C’est comme « coquine » (et je te parle même pas du fait de combiner

les deux, j’en frissonne déjà derrière mon clavier). Et puis, en quoi il est gourmand le café ? Genre c’est lui qui va les bouffer la mini-panacotta,

la grosse miette de brownie et la boule de glace à la vanille faite à la petite

cuillère ? Il sait le prix que ça coûte ? S'il a faim, bah, qu’il se fasse plaisir, mais pas dans mon assiette. Franchement je le dis pour lui, il a intérêt

à être zéro gourmand le café. Il est sur le côté et il reste bien tranquille. Et c’est quoi aussi cette manie de rendre tout mini. Quelqu’un a déjà essayé de surligner avec des mini-stabilos ? C’est infernal. D’effacer du crayon

de papier avec une mini-gomme ? Même le concept de minigolf c’est pété. Mini, ça te rappelle juste que y’a une version plus cool du truc qui existe,

mais qui n’est pas à ta portée. C’est la version nulle, c’est juste pour endormir ta frustration, mais sans te donner le plein accès au produit.

C’est un échantillon de ce que pourrait être ta réalité. Tu peux te rassurer en te disant que tu n’as pas besoin de la version « originale », mais bon.

Que c’est toujours mieux et moins calorique que de prendre un mi-cuit au chocolat. Il faut arrêter de se mentir. Ce sont trois mini desserts. C’est obligatoirement pire qu’un dessert.

Toutes ces pensées se bousculent dans ma tête, en attendant le résultat de ma commande. Les larmes montent. Pourquoi pas une choucroute

de la mer la prochaine fois, hein ? C’est ça que je veux ? C’est ça le monde que je choisis de construire pour moi-même, pour mes futurs enfants ? 66


Humeur

Les yeux rivés sur le parcours de vie que j’ai dorénavant choisi, celui

où je « grignote » et « déguste », où je colle des stickers de mots évidents

dans ma salle de bain, je me demande si je ne devrais pas renoncer à tout et aller m’enfermer dans une cabane avec huit chiens et la télévision en boucle sur BFM TV. Je ne mérite peut-être que ça. Que ça, et une mini-panacotta. Le café gourmand finit par arriver, avec un peu de retard. La serveuse

et l’équipe en cuisine n’ont pas dû voir le temps qui passe, trop occupées à se moquer de mon plat. Je me rassure en me disant que le chef doit

se détester aussi d’avoir mis ce truc à la carte. Ça lui prend du temps pour que dalle, gérer à la fois les desserts chauds et les desserts froids, pour

qu’ils arrivent à la bonne température devant le client. Nettoyer les petites verrines où il reste toujours du fromage blanc. Assister au gâchis et jeter

un mini dessert parce qu’il y en a toujours un moins bien que ses copains. Café gourmand, jusqu’au bout du bout, tu es chiant. J’ingurgite rapidement les trois cuillères de crème brûlée, un macaron à la vanille et une salade avec deux fruits. Voilà. J’ai pris mon dessert,

mais en même temps, pas vraiment. Je bois ma tasse de café pour le noyer et tasser mes larmes. Fière de moi ? Je suis un bon petit soldat. Je voulais un café et de quoi manger ? J’ai pas le temps de les prendre l’un après l’autre ? BIM, me voilà rassasiée. Café gourmand, je me sens souillée.

67


Découverte

First stop,

Olympiades Texte : Mathilde Froment Photos : François Prost

L’Asie vous happe d’emblée, dès les premiers pas, si lointaine, si mystérieuse, si différente. Et l’arrivée est déterminante, tant il est difficile de se défaire d’une première impression. Il est donc recommandé par votre serviteur, spécialiste s’il en est des environs, d’arriver dans ce temple à ciel ouvert par la grande porte, j’ai nommé la ligne 14 qui semble avoir été créée dans l’unique but de vous y mener depuis le tout Paris, et même, ce n’est pas anodin, depuis la gare de Lyon qui accueille tous les matins à 9H55 le train de Venise. Est-ce un hasard si la plus belle ville du monde est reliée directement au 13e arrondissement ? Je ne crois pas. 68


69


70

Rencontre


Découverte

Mais trêve de digression, arriver par la station Olympiades est gage de promesses. Veillez néanmoins à éviter les heures de début ou fin de cours, une ruée d’étudiants pourrait gâcher l’expérience. Mais vous n’êtes pas là pour ça. Vous êtes là pour une plongée dans ce que l’Orient offre de plus beau. Alors levez la tête. À peine arrivé, vous voilà transporté par les tours de la dalle. Grandiose. Tout le génie architectural des années 1970 se donne à portée de regard. Une ville tendue vers le ciel. Laissez-vous bercer par la valse géométrique des reflets d’un soleil joueur sur les tours aux noms exotiques, voyez le contraste avec les toits pittoresques aux airs de pagodes. Vous ne seriez pas surpris que surgisse un tigre ou une jonque. Dégainez votre perche à selfie et envoyez une photo narquoise à vos amis en vacances à Singapour ou à Hong Kong, qui ont souffert quinze heures dans un avion bondé. Bientôt, un fumet délicieux vient caresser vos narines. Gingembre, nuoc mam, cardamome, basilic thaï, coriandre, badiane, citron vert, à n’importe quelle heure du jour, le bouillon du pho mijote dans toutes les cuisines.

les néons accrochés au faux-plafond qui vous rappellent furieusement celui de votre salle de classe, l’Asie sommeille en vous depuis l’enfance. Ainsi, perdu dans vos divagations sur le temps qui passe, vous bousculez un monsieur à l’haleine douteuse. Vous posez une main sur son épaule en guise d’excuse. Il émet un grognement et continue son chemin. La rencontre n’est pas des plus agréables mais vous pourrez la raconter dans vos dîners en ville. Vous avez touché du doigt la littérature. Vous venez de croiser Houellebecq. Plein d’une nouvelle énergie vous rejoignez bientôt l’air libre avenue d’Ivry. Et vous vous dirigez d’un pas décidé vers l’épicentre du quartier, le ventre du treizième, le paradis des asiatophiles. Tang Frères n’est pas qu’un supermarché. C’est un empire. Et il est grand temps de faire un point de culture pour le néophyte que vous êtes. Issus de la diaspora chinoise émigrée au Laos, les Rattanavan créent la société Tang au milieu des années 1970 pour importer de la sauce soja en France, où ils se sont réfugiés, fuyant la politique du parti unique, à l’instar de leurs voisins vietnamiens et cambodgiens. La première boutique ouvre au 48 avenue d’Ivry (vous y êtes), bientôt suivie par d’autres, jusqu’à ce que Tang Frères devienne le premier importateur de produits asiatiques en Europe, et notamment d’une multitude de denrées introuvables ailleurs, pour lesquelles se presse chaque jour une foule hétéroclite au milieu de laquelle vous vous engouffrez incognito. « On ne va jamais aussi loin que lorsqu’on ne sait pas où l’on va », disait Christophe Colomb. Quartier libre dans les rayons, rendez-vous dans une heure.

Suivez vos instincts de chasseur et vous arriverez bientôt au bout de la dalle, salivant et affamé. Engouffrez-vous dans la galerie commerçante, « l’expérience est une lanterne attachée dans notre dos, qui n’éclaire que le chemin parcouru », a dit Confucius, ayez confiance, le nem est au bout du tunnel. Passionné de pop vietnamienne, amateur de figurines de manga, inconditionnel de la CCTV (Central China Television), amoureux de nail art, collectionneur de cartes téléphoniques prépayées, admirez le dallage sophistiqué de la galerie, les vitrines chamarrées, 71


72


Découverte

Vous vous dirigez d’un pas décidé vers l’épicentre du quartier, le ventre du treizième, le paradis des asiatophiles. Tang Frères n’est pas qu’un supermarché. C’est un empire. 73


Découverte

fais part de ma science sans réserve. Lao Lane 2 pour le curry rouge aux crevettes frites (d’aucuns l’appellent crevettes frites au curry rouge, ne soyez pas surpris), Pho Tai pour les nems, Pho Bida pour le pho, l’Imperial Choisy pour le poulet Sichuan, Tiang Tiang Wang pour les raviolis, Fleur de Mai pour le canard laqué. Stop. Vous avez assez mangé.

Épuisé par tant de découvertes, vous aspirez maintenant à une retraite solitaire. La spiritualité millénaire touche aux tréfonds de l’âme et vous attire inconditionnellement vers ce parking souterrain, non pour y garer votre Hyundai hybride dernier cri, vous saurez cependant que l’Asie est à la pointe de la technologie automobile mondiale, mais pour honorer Bouddha dans ce petit temple souterrain hors du temps. Déposez une offrande à la sagesse éveillée, les lanternes chinoises vous enchantent, l’encens vous transporte, agenouillez-vous, fermez les yeux, si vous craignez de vous endormir, je ne saurais vous le reprocher, mais veillez à prévoir un réveil, car le nirvana creuse et il est temps de goûter aux joies gustatives d’Extrême-Orient. L’offre est pléthorique, comment choisir me direz-vous ? Ne désespérez pas, je les connais tous, du petit boui-boui à l’institution réputée, du minuscule comptoir à la cantine immense, dans ma grande générosité je vous

Et vous avez assez bu, j’ose espérer, pour achever votre expérience par une pratique discrète, mais incontournable, j’ai nommé le karaoké, qui se pratique ici dans les arrière-salles privées des restaurants. Vous devrez donc, pour en profiter, vous lier d’amitié avec les habitués, mais je ne doute pas que vous y parviendrez, voyageur averti et fin connaisseur de l’Asie que vous êtes désormais. Ne me remerciez pas, « veux-tu vivre heureux, voyage avec deux sacs, l’un pour donner, l’autre pour recevoir », a dit Goethe. 74



Portfolio

S'emballer Une série photographique de : Seem Soap | Studio de design et de création | Mathilde Lehmann et Valentine Sée Emmanuelle Roule | Graphisme, direction artistique et céramique Céline Saby | Photographie, direction artistique et stylisme 76


77


78


79 Portfolio


80

Portfolio


81


82


Texte : Hélène Rocco Photos : Paloma Wool

Biberonnée à la mode par des parents à la tête d'un empire, Paloma Lanna a pris le temps d'observer l'affaire familiale avant de lancer sa propre collection de vêtements, uniquement produite par des femmes. Ses créations aux tons pastel font écho aux couleurs de la Catalogne, la terre qui l'a vue grandir. Petite, Paloma, fascinée par les couleurs, rêve de devenir peintre en bâtiment, puis elle réalise qu'elle veut plutôt devenir designer. Au moment de choisir sa voie à l'université, ses parents lui conseillent d'étudier le commerce afin de savoir diriger une compagnie et éviter la banqueroute à laquelle ils ont dû faire face quelques années plus tôt. À la fac, Paloma a l'envie de créer sa propre marque de vêtements appelée « Little Paloma ». Son père l'encourage, mais sa mère lui conseille de trouver un concept plus fort. Quelques années plus tard, la jeune femme perd son papa et rejoint sa mère à la tête de Nice Things. L'expérience dure deux ans et en 2014, elle se rend compte qu'elle peut lancer un projet artistique sans fonder une marque pour autant. Une ligne de vêtements qui laisse une grande place à la photo : la voilà, l'idée originale qui plait cette fois à sa mère. Son avatar, Paloma Wool, est né.

Impossible pour elle de trouver une seconde à nous accorder par téléphone et pour cause : à seulement 29 ans, Paloma Lanna dirige déjà deux affaires. La première s'appelle Nice Things et a été fondée par ses parents, Miguel et Paloma. La seconde se nomme Paloma Wool et mêle son amour de la mode et sa vocation pour la photo. Car ce qui inspire la créatrice barcelonaise, c'est l'art en général. Fille unique et très proche de son père et de sa mère, Paloma a été nourrie à l'élégance et au style. Elle est née à San Sébastian mais a été baladée de Tokyo à New York toute son enfance, à la recherche des tendances et des meilleurs fournisseurs. Avec leur marque Globe, très populaire chez les ados des années 1980 – plus que Mango et Zara –, les Lanna connaissent un vif succès alors qu'ils n'avaient pas été formés au business. Une crise économique plus tard, la famille a perdu Globe, mais lance Nice Things en 1995. 83

Rencontre

Paloma Wool : ode au féminin


Rencontre

Le féminin est une source d'inspiration permanente pour Paloma et son équipe, entièrement constituées de femmes. Le label va à contre-courant des grands principes de l'industrie de la mode. Pas de saisons, pas de production de masse et pas de soldes, mais des collections capsules fabriquées à Barcelone, avec du tissu européen. Quand un article est épuisé, il n'y a pas de réassort pour ne pas pousser à la consommation. Des États-Unis à la Corée, il faut donc être attentif lorsque sortent les mules en cuir tant convoitées. Les créations fluides, intemporelles et épurées qui font le succès de la maison vont des tops courts jaune citron aux tee-shirts ornés de la silhouette de Cléopâtre, dessinée par l'artiste Tana Latorre. La force de Paloma Wool réside en ses supports artistiques multiples, au-delà des vêtements : on s'habille, mais on adhère en même temps à un imaginaire. Afin que les clientes touchent du doigt l'expérience « Paloma », les coulisses des shootings sont même relayées sur les réseaux sociaux.

variés – des corps ronds, élancés et parfois des mono-sourcils – qui séduisent le public. Les femmes qui posent ne sont pas retouchées et leur naturel n'en est que sublimé. Car le féminin est une source d'inspiration permanente pour Paloma et son équipe, entièrement constituée de femmes. Chaque collection correspond à un concept. Son dernier projet s'intitule « femme créative » et rend hommage aux mères et à la terre nourricière à travers des portraits aux couleurs douces. Avant ça, elle avait sorti des pièces en lin où l'on devinait des figures féminines en train de prendre un bain ; une autre fois, c'étaient les déesses grecques qui l'avaient inspirée. Si vous y faites attention, vous remarquerez que les mêmes visages reviennent souvent dans les projets de Paloma. Ses amies font partie intégrante de son affaire et les collaborations sont multiples. Si elle ne les connaît pas, la Barcelonaise contacte sur Instagram les créatrices avec qui elle aimerait travailler. Le site de la jeune femme sert ainsi de vitrine à des artistes internationales comme Carlota Guerrero, Alba Yruela, Isabella Killoran, Tanya Posternak et Blanca Miró. Avec elles, Paloma imagine des performances, des livres et des installations vidéos qui transcendent l'acte de s'habiller. L'esprit d'équipe lui donne le sentiment qu'elle peut réaliser ce qu'elle veut. Des femmes qui aident des femmes à créer et construire ensemble dans le respect de toutes, voilà le message que Paloma veut que l'on retienne en s'intéressant à son univers.

Tous les portfolios sont photographiés par Paloma, autodidacte touche-à-tout. À l'adolescence, elle n'avait de cesse de créer des albums de ses amis et de sa famille, une tradition transmise par sa mère. Plus tard, en voyage à Hong Kong, elle met la main sur un appareil argentique dans un marché aux puces. Au moment de développer ses photos, elle est sous le charme et abandonne définitivement le numérique. Un choix graphique qui confère à ses collections une atmosphère onirique. Outre l'esthétique minimaliste et délicate de son label, ce sont les campagnes dans lesquelles les modèles ont des profils 84


85 DĂŠcouverte


86

DĂŠcouverte


87 DĂŠcouverte



Découverte

Château Marmont Texte : Déborah Pham Illustration : Kei Lam

Sunset boulevard, Los Angeles. Il est presque midi. Votre Uber file à toute berzingue dans le quartier de Hollywood, croisant motels et restaurants mexicains aux façades pastel. Au loin, se dresse le Château Marmont, refuge de célébrités souvent, lieu de débauche et de drames parfois.

89


Découverte

Les premiers mètres qui vous mènent à la réception sont intimidants, conscient à chaque pas des personnalités qui se sont croisées dans ce couloir, celles de l’âge d’or du cinéma hollywoodien jusqu’aux pop stars des années 2000. Ces histoires font curieusement partie des murs et étoffent la réputation du Marmont depuis toujours, toutefois l’hôtel reste discret. Il est, par exemple, interdit de prendre en photo des célébrités ou de tweeter à leur sujet sous peine d’être banni de l’établissement. Et pour cause, désordre et démesure ont toujours été admis entre les murs de l’hôtel. Le fondateur de Columbia Pictures, Harry Cohn, a d’ailleurs dit : « Si vous devez vous attirer des ennuis, faites-le au Château Marmont. »

Premier constat : on ne vient au Marmont ni pour bien manger ni pour bien boire. Pourquoi vient-on au juste ? À l’origine, on s’y rendait pour faire la fête sans être vu. C’est d’ailleurs la fermeture d’un autre hôtel du même acabit qui aurait poussé les célébrités vers le Château. Imaginez un hôtel où Marlene Dietrich nage nue dans la piscine, tandis que Ronald Reagan enchaîne les conquêtes dans sa chambre. Une orgie, de l’alcool à foison et l’usage de drogues en tout genre étaient absolument communs au Garden of Allah, qui a vu le jour dans les années 1920, et qui a connu un succès innommable dans les années 1930 et 1940. Les soirées étaient légendaires à une époque où la prohibition frappait les États-Unis d’Amérique. On pouvait y croiser F. Scott Fitzgerald, Ernest Hemingway, Ava Gardner, Orson Welles, Buster Keaton ou encore Frank Sinatra. Dans l’entrée, un quatuor à cordes jouait, alors qu’un homme accoutré d’une veste machaon vous accueillait. Dans le salon, des serveurs japonais servaient le thé, mais aussi le punch et les sandwichs. À la tombée de la nuit, des troubadours en costume chantaient sous les jasmins de la propriété. Bref, les acteurs quittaient leur tournage pour pénétrer dans un nouveau décor de film où régnait une atmosphère surréaliste. Imaginez un instant une piste de danse où se déhanchent Marilyn Monroe et Jane Mansfield dans un nuage de fumée de cannabis.

La réceptionniste est française et vous accueille avec un grand sourire, en vous proposant de faire livrer Libération à votre chambre le lendemain matin. Avant de piquer une tête dans la piscine, vous décidez de déjeuner en terrasse. Il n’y a pas foule, la clientèle oscille entre personnages en costard et demoiselles fardées à l’excès. Votre amie vous donne un coup de coude, derrière vous se trouvent deux jeunes filles blondes : « Ce sont les filles de Bruce Willis et Demi Moore. » Votre radar n’est pas encore affuté, vous attrapez le menu. Le cheeseburger est honnête, pas franchement excitant, idem pour les spaghetti alla bolognese. Vous faites descendre tout ça avec un vin californien quelconque. 90


Découverte

Imaginez un hôtel où Marlene Dietrich nage nue dans la piscine, tandis que Ronald Reagan enchaîne les conquêtes dans sa chambre.

Hélas, un beau jour, un acquéreur décida d’en faire une banque et organisa une dernière soirée en 1959. Les célébrités se mirent à la recherche d’un nouvel éden, qui fut donc le Château Marmont. Parmi les premiers résidents, James Dean et Montgomery Clift, s’il vous plaît.

vous, sirote un verre de vin médiocre entre deux poignées de pommes allumettes. Le réveil est un peu difficile, vous sirotez votre café au lait entouré de gens aux visages familiers. Votre acolyte plussoie : « Ce mec là, il a joué dans une série, mais je ne me souviens plus laquelle. » Dehors, l’homme au peignoir est toujours en peignoir ; Anthony Bourdain disait que le Marmont était typiquement le genre d’endroit où l’on pouvait déambuler en pyjama sans choquer personne. Vous traversez les jardins avant d’atteindre la piscine, Lou Doillon prend son petit déjeuner et vous lance un sourire. Le soleil chauffe votre visage tandis que vous songez aux histoires à peine croyables qui se sont déroulées ici, aux excentricités des artistes que vous avez tant admirés, à la fin tragique de certains. Tout cela pourrait être conté ici et finalement, mieux vaut laisser un peu de rêve à chacun.

Un homme aux cheveux poivre et sel fait les cent pas autour de la piscine. Il porte un peignoir et une chevalière, et discute bruyamment au téléphone, alors que nous profitons des derniers rayons de soleil sur un transat. La piscine est entourée d’arbres et de plantes qui forment des couloirs labyrinthiques. Quelques bungalows sont installés là. Il s’agit d’appartements fonctionnels qui permettent aux clients de séjourner plusieurs mois au Château. Ce fut par exemple le cas de Francis Ford Coppola et sa famille, qui choisirent l’hôtel pour se retrouver après l’éprouvant tournage d’Apocalypse Now. Des années plus tard, Sofia Coppola réalisera le film Somewhere, essentiellement filmé au Château Marmont.

Château Marmont —­­ 8221 Sunset Blvd, Los Angeles

Il est presque 20 heures, la nuit est tombée sur L.A. et vous percevez le brouhaha de la terrasse à peine illuminée. Premier cocktail qui ne déroge pas à la règle de l’établissement : vous n’êtes pas là pour ça, contentez-vous d’un gin & tonic la prochaine fois. À nouveau, votre amie vous envoie un subtil coup de coude pour vous indiquer la présence de Marilyn Manson, qui, comme 91


92


Recette et photos : Estelle Lubino

Ingrédients

• 100g de flocons d’avoine • 1 banane (bien mûre) • 1/4 c.à.c de cannelle

• 1 c.à.c de sirop d’érable • 300ml de lait végétal

• 1 c.à.s de beurre de cacahuète • 1 c.à.c d’extrait de vanille

Préparation

1. Faites chauffer le lait végétal dans une petite

casserole à feu moyen. Pendant ce temps, écrasez la banane à l’aide d’une fourchette.

2. Dès que le lait commence à frémir, ajoutez

les flocons d’avoine. Mélangez et laissez cuire à feu doux.

3. Ajoutez la banane, le beurre de cacahuète,

la cannelle, le sirop d’érable et l’extrait de vanille. Laissez cuire en remuant assez régulièrement. 4. Lorsque que vous obtenez une consistance

qui vous convient, retirez du feu, versez dans un bol, ajoutez vos toppings préférés et dégustez !

93

Recette

Porridge banane et beurre de cacahuète


BANLIEUE OUEST

Photos : Margaux Gayet Styliste : Justine Menard / Make-up : Eden Tonda Modèles : Delphine & Anton @ Studio Paris

94


Mode

CI-CONTRE ELLE : Beret TOASTIES / Col roulé stylist’s own / Robe ESSENTIAL BY ANTWERP / Collant stylist’s own / Bottes CAREL / Sac MAJE LUI : Veste ETUDES STUDIO / Chemise FRÈRE / T-shirt MAISON STANDARD / Pantalon ETUDES STUDIO / Bottes LA BOTTE GARDIANE

CI-DESSOUS ELLE : Top vintage / Jupe ESSENTIAL BY ANTWERP / Sac BOCAGE / Botte CAREL LUI : Col roulé stylist’s own / Trench AMERICAN VINTAGE / Trousers ETUDES STUDIOS / Chaussures VANS

95


96

Mode


Mode CI-CONTRE ELLE : veste MAISON PÈRE / Chemise stylist’s own / Foulard stylist’s own / Pantalon MAISON PÈRE / Collant stylist’s own / Chaussures JONAK LUI : Col roulé stylist’s own / Pull CARHARTT / Pantalon ETUDES STUDIOS / Bottes LA BOTTE GARDIANE CI-DESSOUS Beret stylist’s own / Chemise et veste vintage / T-shirt MAISON STANDARD / Collier ALIX D. REYNIS / Pantalon FRÈRE

97


Mode

CI-DESSUS Veste & pantalon SOEUR / Col roulé ETUDES STUDIO / Bijoux ALIX D. REYNIS CI-CONTRE ELLE : Col roulé stylist’s own / Veste & jupe CORALIE MARABELLE / Chaussures CAREL LUI : Chemise stylist’s own / T-shirt MAISON STANDARD / Pantalon FRÈRE / Bottes LA BOTTE GARDIANE


Mode À GAUCHE , ON HER : Dress + Kimono FORTE FORTE / Boots VALENTINE GAULTIER / Earrings MONSHIRO ON HIM : Pants WENDY JIM / Jacket SADAK / Shirt LAURENCE AIRLINE CI-DESSUS : Shirt LAURENCE AIRLINE / Pants + Blazer SADAK

99


100


Tokyo - Portfolio

Lost in

Tokyo Texte et Photos : Noémie Cédille

C’est un enchevêtrement de routes, de ponts, de câbles et d’enseignes. Une ville verticale, empilée sur des dizaines d'étages qui vous resteront mystérieux. Foutraque et ambitieuse. Un paradis pour architectes à l’imagination sans limite. Une ville lumière où les néons, aveuglants, ne s’endorment jamais. Où la musique qui s’échappe des échoppes interlopes à chaque coin de rue vous reste en tête pendant des jours. Une cacophonie que la foule agglutinée semble ignorer dans son itinéraire tout tracé, au propre comme au figuré. Une ville de signes et de symboles, compartimentée, hiérarchisée, organisée. Fourmilière à la chorégraphie bien huilée. Une ville monde. Une ville village. Car c'est dans les interstices de la cité que s'exprime le Japon des traditions. Celui d'un bouillon de ramens englouti en slurpant, en trois minutes chrono. Celui d'une prière dans un micro-temple coincé entre deux buildings anonymes. Celui d'une geisha aperçue furtivement avant qu’elle ne s’engouffre derrière une porte discrète. 101


Tokyo - Portfolio



104

DĂŠcouverte


105 DĂŠcouverte


106

Tokyo - Portfolio


107 Tokyo - Portfolio


Tokyo - Portfolio



Tokyo - City Guide

Explore Tokyo

Textes et photos : Noémie Cédille

Japon

Hyatt Centric Ginza

le lit Hyatt Centric Ginza Ouvert début 2018, c’est le dernier-né des hôtels Hyatt Centric, dont le concept est de s’implanter au coeur des villes et de l’action. L’hôtel est situé dans le quartier tendance de Ginza, haut lieu tokyoïte du shopping et du divertissement, et compte 164 chambres et suites contemporaines,

dans un style élégant entre tradition et modernité. Installé dans les murs de l’ancienne rédaction d’un grand quotidien japonais, l’architecte d’intérieur Yohei Akao a su conserver des traces de ce précieux passé au travers de clins d’œil arty disséminés sur ses douze étages. Le soir venu, vous pourrez vous régaler de la cuisine locale et des cocktails originaux de son restaurant et de son bar à l’ambiance feutrée. 6 Chome-6-7 Ginza, 104-0061

110

Hotel Graphy Nezu Situé dans le quartier résidentiel de Nezu, à deux pas du quartier traditionnel de Yanaka, du parc Ueno et de ses musées, cet hôtel jeune et branché est le point de chute idéal pour visiter la ville. Il propose des chambres individuelles et des dortoirs à la décoration moderne et confortable. Plusieurs espaces communs sont mis à disposition : salon, cuisine, espace de yoga, laverie, café et bar.


Austin - City Guide

On peut aussi louer des vélos pour partir en balade. 4 Chome-5-10 Ikenohata, Tait, 110-0008

Claska Situé dans le quartier de Meguro, non loin des branchés Naka-Meguro et Daikanyama, les chambres de cet hôtel ont été imaginées par des architectes d’intérieurs japonais en vogue, dans différentes ambiances : japonais moderne, tatami ou contemporain. Attention, il n’y a que vingt chambres, mieux vaut réserver ! 1 Chome-3-18 Chuocho, Meguro, 152-0001

Hanare Hagiso Expérimentez le Japon authentique en dormant dans cette auberge traditionnelle du quartier de Yanaka. Ici, les chambres sont sobres avec tatamis au sol. Un petit déjeuner traditionnel japonais est servi et des tickets pour accéder aux bains communaux sont en vente.

3-10-25 Yanaka, Taito-ku, 110-0001

la table Namiki667 Installé au premier étage de l’élégant Hyatt Centric Ginza, Namiki667 envoie une cuisine locale et inventive entre influences asiatiques et occidentales. Son chef Shingo Hayasaka, au parcours prestigieux, utilise des produits frais et locaux : poissons de la pêche du marché de Tsukiji, fruits, légumes et bœuf

Namiki667

wagyu provenant de fermes dans les alentours de Tokyo. Sa terrasse de 100 mètres carrés est le parfait observatoire pour s’imprégner de l’agitation de Ginza en dégustant un plat en cocotte, spécialité du chef. 6 Chome-6-7 Ginza, 104-006

Kotaro Le chef Hayashi offre un menu Omakase composé d’une succession d’assiettes traditionnelles. Omakase signifie « Je m'en remets à vous » et s’utilise généralement pour demander au cuisinier de surprendre ses hôtes en faisant sa propre sélection de plats. Attablez-vous à son comptoir et regardez-le travailler ses produits frais et sourcés. Des sakés finement sélectionnés viennent accompagner chaque mets. 28-2 Sakuragaokacho, Shibuya, 150-0031

Tetamichiya On a adoré l’ambiance punk-rock de cet izakaya (sorte de bar à tapas local) planqué au sous-sol 111

d’un immeuble du quartier de Dainkayama. Au mur : des affiches illustrées mêlant dessin traditionnel et manga. Au plafond : des cymbales en guise de lampes. Dans les oreilles : du rock japonais (mais pas que). Dans l’assiette, que du très bon : sashimi de poissons, croquettes, poulet mariné accompagné de wasabi et la spécialité du chef, le steak d’avocat (si si, vous avez bien lu !). Les patrons sont adorables et vous accueillent par de bruyantes mais chaleureuses salutations. 30-8, Sarugakucho, 150-0033

Afuri Ici, on commande son ramen sur une machine automatique à l’entrée, avant de s’attabler à un long comptoir au style industriel pour déguster un délicieux ramen. Le service est rapide et les places tournent vite. Mention spéciale pour les ramens Yuzu Shio et leur bouillon parfumé au yuzu. 1 Chome-1-7, Ebisu, Shibuya, 150-0013


Tokyo - City Guide

Kabi

Higashiya Ginza

Kabi

Gyoza Ro

Chez Kabi, le Japon rencontre la Scandinavie. Le chef Shobei Yasuda, ancien de chez Kadeau à Copenhague, a imaginé un menu dégustation aux influences éclectiques, accompagné de vins et de sakés natures. Comme son nom le suggère (Kabi signifie fermentation en japonais), la fermentation tient une part importante dans la cuisine du chef. Sa femme, la cheffe pâtissière Kiriko Nakamura, confirme sa réputation de figure montante de la jeune pâtisserie japonaise.

La longue file d’attente qui s’installe quotidiennement devant cette petite cantine prisée du quartier d’Omotesando ne trompe personne. Ici, menu unique à la carte : des gyozas, rien que des gyozas. Ils sont savoureux et servis frits ou bouillis, accompagnés d’une bière locale et le tout pour un prix vraiment mini.

4 Chome-10-8 Meguro, 153-0063

6 Chome-2-4 Jingumae, Shibuya, 150-0001

Commune 2nd C’est un projet éphémère de plusieurs camionnettes-restos et micro-architectures bricolées, installées en plein air pour quelques années. Commune 2nd est le lieu idéal pour manger 112

de la street-food sur le pouce en sirotant une bière ou un cocktail lorsque le temps est clément. L’ambiance est décontractée et la palette de saveurs est large : burgers, thaï, libanais, poisson frit, végétarien, traditionnel japonais ... Le tout ponctué d'événements divers, de concerts et d’expositions.

3 Chome-13 Minamiaoyama, Minato

les douceurs Higashiya Ginza On nous avait prévenu, cet endroit est « spécial ». Planqué au 2e étage d’une tour de Ginza, cet élégant salon de thé japonais offre des wagashi – petites


en sirotant un cocktail. Bonus : tous les soirs a lieu un concert de jazz gratuit à partir de 20 heures. 3 Chome-7-1-2, Nishishinjuku, 60-0023

le shopping Daikanyama Tsutaya Books De mémoire d’amateurs de librairie, on n’en avait jamais vu une aussi impressionnante. Composée de trois immeubles contemporains connectés au rez-de-chaussée par une allée

1 Chome-7-7, Ginza, Chuo, 104-0061

New York Bar

Kayaba Bakery Dans un bel ensemble d’anciennes habitations traditionnelles du quartier de Yanaka, se cache une délicieuse boulangerie. En entrant, l’odeur du pain frais met immédiatement l’eau à la bouche. Pas de doute possible, vous allez vous régaler. Mention spéciale pour les brioches à la crème, fourrées aux pommes encore chaudes et fondantes. Un régal ! 2-15-6 Ueno Sakuragi, Taito, 110-0002

sortir New York Bar Le célèbre bar où Scarlett Johansson et Bill Muray viennent tromper leur ennui nocturne dans le film Lost in Translation. Grimpez au 52e étage du Park Hyatt pour admirer la vue sur la ville à la tombée du jour 113

traversante et ouverte sur un beau jardin, on ne sait plus où donner de la tête dans cette immense boutique qui propose des livres et magazines locaux et internationaux, mais également des films, de la musique, un rayon papeterie et électronique, ainsi qu’un café et un restaurant, le tout ouvert jusqu’à 2 heures du matin.

17-5-1, Sarugakucho, Shibuya, 150-0033

Ginza Six Installé récemment dans le quartier de Ginza, où les boutiques de luxe se succèdent dans des immeubles aux lignes audacieuses, le nouveau

Tokyo - City Guide

douceurs japonaises, fines et délicates – accompagnés de thés rigoureusement sélectionnés. Chaque pâtisserie est un ravissement pour les yeux et une véritable surprise pour le palais. Les thés, crus d’exception, sont servis selon les gestes ancestraux. Pour terminer cette expérience gustative, les feuilles de thé vert, après avoir été infusées trois fois, sont accompagnées d’un peu de citron et de sauce soja. Au déjeuner, la carte tend vers le salé. Et, bonne nouvelle, son propriétaire va ouvrir un salon de thé-restaurant dans le Haut-Marais à Paris sous le nom d’Ogata.


Tokyo - City Guide

centre commercial Ginza Six ne pouvait pas espérer meilleur emplacement. Il abrite 241 marques japonaises et internationales dans une scénographie des plus soignées, où vous trouverez forcément votre bonheur. Ne manquez pas sa terrasse au 14e étage, aménagée en un beau jardin contemporain, qui offre une vue imprenable sur les toits du quartier, ainsi qu’un petit sanctuaire dédié à Inari. 6 Chome-10-1 Ginza, Chuo, 104-0061

Kappabashi-Dôri Surnommée kitchen town, l’avenue Kappabashi est le paradis des amateurs de vaisselle et d’ustensiles de cuisine. Si leur premier public du quartier reste les restaurateurs de la région, les boutiques vendent également aux particuliers. On déniche ici tout le nécessaire pour les arts de la table : céramiques traditionnelles, couteaux, baguettes, théières, poêles et casseroles, lanternes en papier, décorations diverses, meubles… Le tout à des prix défiant toute concurrence. 3 Chome-18-2 Matsugaya, Taito, 110-0036

découvrir Jardin de Hama-Rikyu C’est notre jardin coup de cœur. Réalisé dans la plus pure tradition japonaise, il invite à la flânerie autour de ses parterres de fleurs : pivoines, colza, cosmos qui fleurissent au gré des saisons.

Senso-Ji

Au centre de l’étang d’eau salé se dresse une maison de thé, où siroter un délicieux thé matcha accompagné de pâtisseries locales. Enclavé au milieu des gratte-ciels du quartier d’affaires de Shiodome, il offre une vue étonnante sur la ville. 1-1 Hamarikyuteien, Chuo,104-0046

nouveau musée consacré à l’œuvre excentrique et obsessionnelle de l’artiste nippone Yayoi Kusama. Sur cinq étages se déploie sa passion pour les poids, au travers de sculptures géantes, de peintures bariolées et de pièces immersives, les fameuses infinity rooms. Un immanquable.

107 Bentencho, Shinjuku, 162-0851

Musée Yayoi Kusama Il vous faudra réserver votre billet au minimum trois mois à l’avance pour visiter le tout 114

Temple Senso-Ji Le Senso-Ji est le plus vieux temple bouddhiste de Tokyo.


2 Chome-3-1 Asakusa, Taito, 111-0032

Musée Nezu Une riche collection de près de 7000 oeuvres d’art du Japon et de l’Asie de L’Est , mise

Musée Nezu

en valeur dans un écrin contemporain. Le musée possède un grand jardin, véritable éden caché en plein coeur de la ville, qui mérite à lui seul la visite : bassin aux iris, cascade, forêt de bambous, sculptures bouddhiques, maison de thé… 6 Chome-5-1 Minamiaoyama,

Minato, 107-0062

dans un cadre enchanteur. Il possède un bassin commun, des bains intérieurs et extérieurs, tous ouverts sur une nature luxuriante et apaisante. Si vous êtes pudique, la baignade se faisant obligatoirement nu, l’établissement dispose également de bains privés et mixtes. 250-0315 Kanagawa Prefecture, Ashigarashimo District, Hakone,

S'évader Hakone Yuryo Situé dans la ville d’Hakone, le onsen Hakone Yuryo ‒ un bain chaud naturel ‒ offre un moment de détente

Kappabashi-Dôri

115

Tonosawa

Tokyo - City Guide

Il est dédié à la déesse Kannon, dont il renferme une statue en or qu’on ne peut malheureusement pas admirer. Pour entrer dans l’enceinte du temple, on traverse son imposante porte du tonnerre puis Nakamise-dori, où l’on grignote des dorayaki, petits gâteaux fourrés à la pâte de haricots rouges. Le Senso-Ji possède une belle pagode à 5 étages, ainsi qu’un petit étang aux carpes koï.


Austin - City Guide

Path Les délices de Tokyo Propos recueillis par Hélène Rocco Photos : Path

Tout près du parc Yoyogi, une façade en verre aux lignes épurées se distingue des boutiques des ruelles avoisinantes. Une douce odeur de croissant chaud vient nous caresser les narines. De l'extérieur, on ne sait pas vraiment à quoi s'attendre. Café, bar ou bistrot ? Path est un peu tout ça à la fois. Ouverte en 2015 par les chefs Taichi Hara et Yuichi Goto, l'adresse ne désemplit pas. Les habitants du quartier de Tomigaya le savent, il n'existe pas meilleur endroit à Tokyo pour se régaler d'un pain au raisin – ou au chocolat – fraîchement sorti du four, tandis que tourne un bon vinyle en fond sonore. Selon le moment de la journée, ceux qui ont tout leur temps viennent y siroter un café ou un vin naturel japonais et croquer dans un pancake à la burrata ou une viande braisée. Car de huit heures à minuit, les assiettes se suivent et ne se ressemblent pas sur le comptoir en béton patiné.

116


117 Tokyo - Rencontre


Tokyo - Rencontre

On a souhaité proposer aux clients une cuisine de qualité dans un décor chaleureux, sans chercher à intimider qui que ce soit.

118


Tokyo - Rencontre

Quels plats font le succès de votre adresse ?

Mint : Qui êtes-vous, Taichi et Yuichi ? Taichi Hara : Yuichi est notre pâtissier en chef,

il a notamment travaillé pour Michel Troisgros en France, et je suis le chef cuisinier – auparavant j'ai aussi travaillé pour Troisgros à Tokyo puis j'ai ouvert Bistro Rojiura à Shibuya il y a sept ans.

Probablement les croissants et les Dutch pancakes (des crêpes soufflées, ndlr). Au dîner, on propose uniquement un menu en 7 plats, avec un accord mets-vins. L'hiver, on sert beaucoup de canard japonais et nos clients sont aussi très friands des soupes et des ragoûts. Du petit déjeuner à base de pancakes au menu dégustation le soir, la clientèle est-elle la même ?

Comment est né Path ?

Trois ans après l'ouverture de Rojiura, j'ai eu envie d'ouvrir un restaurant qui proposerait un excellent petit-déjeuner. Au même moment, Goto voulait rentrer au Japon pour ouvrir sa propre boutique. Il m'a demandé des conseils car il ne rêvait pas d'une simple pâtisserie, il avait aussi envie de créer une carte salée. Au fil de la discussion, on s'est dit qu'on pouvait ouvrir une adresse ensemble : son excellent pain serait parfait pour les sandwichs au camembert que je voulais servir ! Vous aviez la même vision de la restauration ?

Oui. Le problème à Tokyo c'est que les gens ont tendance à croire que les très bons restaurants sont réservés aux plus riches, du coup, les tables peinent à se remplir. On a donc souhaité proposer aux clients une cuisine de qualité dans un décor chaleureux, sans chercher à intimider qui que ce soit. Pourquoi avoir choisi le quartier de Tomigaya ?

On se sent bien ici, tout est calme et on est loin du bouillonnement de la ville. Enfants, on adorait déjà venir ici. Ça doit sûrement venir des parcs et des petites maisons typiques du quartier.

Non pas du tout ! Parmi les habitués, il y a autant d'étudiants que de grands cuisiniers, de créateurs de mode, de familles ou de touristes étrangers … Ça nous plaît de voir des chefs renommés assis à côté d'ados qui n'y connaissent probablement rien en gastronomie ou en bons vins. Vos produits sont bio, locaux et issus de l'agriculture durable, pour quelle raison ?

Depuis le début, on essaye de faire appel autant que possible aux petits producteurs bio et on a pas mal été sensibilisé au mouvement slow food qui prône l'amour des bons produits. On a envie que nos clients aient accès à ces superbes fruits et légumes alors on les met toujours à la carte, en respectant les saisons bien sûr. Comment imaginez-vous le futur de Path ?

On se remet en permanence en question, on veut s'améliorer au quotidien. J'aimerais que notre restaurant ait une vraie atmosphère d'izakaya où l'on peut s'arrêter à tout moment de la journée, et ça pour les vingt prochaines années !

119


Tokyo - Rencontre

Les spots de Taichi Big Love Records Dans la salle du resto, on a un lecteur de vinyles et j'aime beaucoup me rendre dans cette boutique pour réapprovisionner mon stock.

Phigvel Makers Co. Ce label tokyoïte mêle héritage japonais et influences américaines. J'aime beaucoup ce style workwear élégant.

Lanterne La spécialité de cet izakaya, une taverne typique, est le poulet frit et je ne peux pas m'en passer.

Bar Trench C'est un bar à cocktails plutôt magique où l'on sert des liqueurs comme la Chartreuse dans une atmosphère très « fin de siècle » à la française.

2 Chome−31−3, Jingumae, Shibuya

3 Chome−5−3, Nishihara, Shibuya

2 Chome-17-10 Aobadai, Meguro

1 Chome−5−8, Ebisunishi, Shibuya

Shibuya publishing & booksellers Dans cette librairie, les vendeurs sont d'excellents conseils et ne cherchent pas à mettre en avant le dernier bestseller. On y trouve aussi quelques livres en anglais et la boutique est ouverte jusqu'à minuit.

17-3 Kamiyamacho, Shibuya-ku

Yoyogi Park Ce parc est à deux pas de Path. Au nord, la végétation est luxuriante et on peut renouer avec la nature. Au sud, il y autant de danseurs de hip-hops que de musiciens qui jouent au quotidien pour les passants.

2-1 Yoyogikamizonocho, Shibuya

Biotop Construite autour d'un arbre qui abrite une cabane, cette boutique de mode avant-gardiste propose une sélection de prêt-à-porter haut de gamme et des collaborations exclusives avec des designers renommés.

4-6-44 Shirokanedai, Minato-ku

120


121



Mint Magazine

BONNES ADRESSES Textes : Hélène Rocco & Déborah Pham

123


Bonnes adresses

Astair

Paris

Vite, vous êtes en retard. Engouffrez-vous dans le passage chico-touristique, évitez cet homme planté là à prendre une photo et ne vous laissez pas distraire par l'odeur de pesto qui émane d'un resto italien. Votre rendez-vous vous attend déjà sagement sur la banquette bordeaux qui court le long de la brasserie. Elle a faim, il faut commander sans tarder. Parmi les entrées, il y en a une qui surnage au milieu des escargots et des huîtres, c'est l'œuf parfait aux champignons des bois, servi avec sa brioche. Plongez, enrobez, savourez ce pain délicieusement moelleux et, tout réconforté, passez à un autre classique de la tambouille française : une sole meunière flanquée de pomme purée. Pour le reste, tout dépend de vous : ganache chocolat aux madeleines, baba au rhum ou riz au lait, l'essentiel est de picorer un dessert de son enfance et de se laisser aller à de délicieux souvenirs. 124

25, passage des Panoramas, 75002 Paris


Bonnes adresses ® Albin Durand

Brûlerie de Belleville Cinq bougies et un nouveau Q.G. : après s'être fait une place sur les hauteurs de Belleville, le torréfacteur parisien a désormais pignon sur rue à quelques encablures des Buttes Chaumont. La maison mère ne lance pas un nouveau coffee shop. Côté rue, la boutique présente plutôt tous les assemblages de la brûlerie et du matériel pour bien préparer le café Belleville. Les férus de café, dont la marque a changé le quotidien, apprécieront : bleu de travail, tote bag, affiche et chaussettes floquées sont également à la vente ici. Mais la magie opère à l'arrière, là où vrombit le torréfacteur. On prend le temps de nous expliquer le fonctionnement de la machine et les secrets d'un bon café. Des ateliers dégustation sont organisés régulièrement et si vous vous sentez l'âme d'un barista, c'est également dans cet atelier que vous pourrez apprendre les dessous du métier. 125

Paris

14bis rue Lally-Tollendal, 75019 Paris


® Lucet Penato

Bonnes adresses

Paris

À deux pas de Baieta, sa planque niçoise, Julia Sedefdjian a ouvert un bar à manger caribéen avec Greg Anelka et Sébastien Jean-Joseph, ses deux acolytes. La nuit, les épicuriens lèvent le coude en sirotant des cocktails aux airs de vacances. Un rapide coup d'œil au bar et une discussion avec le serveur plus tard, on apprend que les bonnes quilles de rhum viennent entre autres de Cuba, de Martinique et de Guadeloupe. Pour vous mettre en jambe, ne résistez pas à l'appel du Bobo servi sur glace, à base de rhum, miel, poudre de piment végétarien et citron vert. Et comme il faut palier la fringale, une foultitude d'assiettes à partager : surtout, on ne boude pas le boudin (créole) et les haricots rouge au groin, parfumés et étonnants. Quand on se tient à carreau, après le dessert, on peut même être invité à déguster deux ou trois crus des Caraïbes.

126

8, rue de Poissy, 75005 Paris


Bonnes adresses

Jord

Helsinki

L'adresse était notée sur un petit bout de papier, mais on est passé à côté sans y croire. Sur le parvis d'un grand centre commercial d'Helsinki, on ne pouvait pas imaginer que la bonne table dont on nous avait chanté les louanges se planquait au 5e étage de la galerie marchande. Entre deux comptoirs à manger, Jord domine la place par une large baie vitrée. Rétrospectivement, on se dit que découvrir dans ces conditions la vraie cuisine nordique a mis la barre très haut pour le reste du voyage. Depuis sa cuisine ouverte, le chef envoie des assiettes bio et de saison. Ce jour-là, comme des serpentins, des carottes croquantes dissimulaient un jaune d'œuf et des graines de moutarde. Sur la table, il y avait aussi un tartare de bœuf aux câpres – incontournable de cette culture –, des harengs lovés sur du yaourt au concombre, des moules très charnues, du cabillaud fondant, des betteraves au yaourt fumé et un parfait de baies de nerprun douces-amères. C'est bon signe : des mois plus tard, on se souvient encore de chaque seconde de ce repas. 127

Urho Kekkosen katu 1, Helsinki, Finlande


Bonnes adresses

Anne

Paris

L’automne s’est installé, notamment dans le restaurant du Pavillon de la reine. Aux manettes, Mathieu Pacaud, chef de renom maintes fois étoilé qu’on ne présente plus. On ne sait pas toujours à quoi s’attendre dans un restaurant d’hôtel, c’est un format particulier entre haute gastronomie et club sandwich. Ici, la magie opère dès la première bouchée avec la tarte aux cèpes. Une pâte friable, des tranches de cèpes généreuses avec un peu d’huile de persil pour booster la rondeur carressante. Une vraie délicatesse. Pour suivre, volaille rôtie sauce Albuferra, coings et châtaignes au four… Surtout ne sautez pas le dessert : on garde un souvenir ému du soufflé au chocolat qui se passe de commentaire tant l’évocation de sa légèreté nous fait encore saliver...

128

28, place des Vosges, 75003 Paris


Bonnes adresses

Sqirl

Los Angeles

Sqirl. J’écris ton nom sur le sable depuis que je t’ai découvert. N’imaginez pas un séjour à Los Angeles sans un petitdéjeuner, un déjeuner ou un goûter dans ce restaurant qui compile le meilleur de la cuisine californienne. Professionnalisme oblige, nous avons accompli la prouesse de cumuler les trois repas en deux heures. Crispy rice salad avec une sauce acidulée, un riz légèrement grillé et un œuf au plat, sunny side up, comme ils disent. Un Turkey breakfast sandwich qui déboule à table avec un couteau au centre, une sorte de burger avec un souvlaki de dinde et des lentilles. Bref, la junk food à la sauce healthy. Palme d’or de la gourmandise, un pain perdu avec une brioche maison fourrée à la confiture de fraise. Sirop d’érable et crème montée sur le côté. Sqirl ouvre à 6h30, parfois le décalage horaire a du bon !

129

720 N Virgil Ave #4, Los Angeles, USA


La playlist Soft Hair - Lying has to stop ClÊa Vicent - Seule sur la lune Air - Le soleil est près de moi Handsome boy modeling school (ft Cat power ) - I've been thinking Blood Orange - Charcoal baby LEISURE - Got it bad Yuno - Fall in love Stephan Kreussel - Mermaid Gus Dapperton - Gum, Toe and Sole Parcels - Tieduprightnow Tunng - ABOP Teleman - Family of Aliens Crumb - Plants Clairo - 4EVER

130


Découverte

Retrouvez-nous en ligne ! Chaque numéro de Mint est téléchargeable en version numérique sur notre site Internet.

iPad

9:45 AM

facebook.com/magazinemint twitter.com/magazine_mint @mint_magazine

web / www.magazine-mint.fr

100%


rouge ALLURE velvet extrême

le nouveau rouge mat intense

132

DISPONIBLE SUR CHANEL.COM

La Ligne de CHANEL - Tél. 0 800 255 005 (appel gratuit depuis un poste fixe).

Découverte


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.