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Mobilité verte : rêve versus réalité

Texte Juliette Debruxelles

MOBILITÉ : ESPOIR VS REALITÉ

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Filer comme une flèche à l’air libre et traverser la ville en toute liberté, cheveux au vent et visage au contact des éléments : c’est ça, la vraie mobilité.

ES CHIFFRES QUI ROULENTL

La voiture se réinvente. Cette incarnation des années fastes, considérée longtemps comme une extension de la virilité, ne sort plus du garage à tous les coups. La moitié des personnes vivant seules n’ont d’ailleurs pas de voiture… mais il reste près de 6 millions de voitures de particuliers qui filent sur les routes belges. En Wallonie, 75 % des déplacements se font en voiture, en Flandre c’est 60% et à Bruxelles moins de 50% (grâce aux solutions mises à disposition par la STIB/MIVB). Ce qui n’empêchait pas la capitale d’être – avant les lockdowns – la vingtième ville la plus embouteillée au monde (source: Inrix). La bonne nouvelle: l’intermodalité (soit le fait de multiplier les moyens de transport pour effectuer un même trajet) se développe à fond la caisse.

DANS TA BENZ

Une voiture, c’est cher? Oui, c’est cher! L’Institut de recherche Transport & Mobility Leuven parle de 400 € de coût mensuel pour faire rouler, pour assurer et pour entretenir une voiture «classique». Si la voiture à moteur thermiqueessence ou diesel (moins chère à l’achat, et plus autonome que les alternatives, mais aussi plus polluantes) est le moyen de transport le plus répandu en Belgique, les électriques et les hybrides prennent du galon. Elles sont plus chères à l’achat (difficile de descendre sous les 20 k), mais elles gardent leur valeur plus longtemps, bénéficient de primes (genre, en Flandre, pas de taxe de mise en circulation) et polluent moins.

L’électrique, c’est so chic C’est l’avenir. Silencieuse, inodores, lookées. Les exemples parfaits: la Mini Electric (0g de CO2/km, une batterie haute tension, un look parfait à partir de 33.500€), la Polestar 2 (berline sublime aux 470km d’autonomie en une charge, à partir de 59.600€). Électrique, ça veut dire non polluante? Non, pas complètement. Si ces véhicules n’utilisent pas de carburants fossiles, leurs batteries rechargeables ne sont pas éternelles et nécessitent un vrai recyclage pas toujours totalement clean. Reste qu’en comparaison aux voitures classiques, l’impact est réellement moindre (entre deux et trois fois moins, selon les sources, les marques et les modèles).

L’hybride débridé Les hybrides conjuguent moteur thermique et moteur(s) électrique(s) sous le même capot. Le meilleur des deux mondes, en somme. L’info pour se la raconter : avec les «mild hybrides», le moteur thermique est juste aidé par le moteur électrique, les batteries des «full hybrides» se rechargent lors des freinages et décélérations, les «plug-in hybrides» se rechargent sur une prise ou via une borne.

Et l’avenir ? Gaz naturel compressé (GNP), biogaz, piles à combustible ou moteurs à hydrogène existent, reste à les adopter et à comprendre leur impact sur l’environnement. Car tout déplacement (hors marche à pied ou vélo vintage) implique la production de déchets…

PARTAGER POUR GAGNER EN LIBERTÉ

Le carsharing facile Le principe est simple : quand on a besoin de se déplacer en voiture, on la loue via une plateforme spécialisée (Cambio, Poppy…) ou à un·e particulier·e. Intéressant? Oui, quand on roule moins de 10. 000 km par an et que l’on vit en ville. Pour calculer l’avantage de l’autopartage, on se fie au tool savewithcarsharing.be qui permet de comparer les frais en toute objectivité.

Le leasing Privé for all On paye une mensualité fixe à un concessionnaire et on conduit une voiture de leasing – thermique, électrique ou hybride – pour une durée allant de 36 à 60 mois. Le véhicule ne nous appartiendra pas, mais les bads administratifs et techniques (assurances, entretiens…) non plus. À checker: le kilométrage annuel autorisé. Il est indiqué dans le contrat et si on le dépasse, ça pique. Pareil pour les dégâts (hors usure normale du véhicule) et les résiliations anticipées dont la note est salée.

LE VÉLO QU’IL FAUT

Les trucs à savoir avant de l’avoir.

Le vélo à assistance électrique (VAE), c’est quoi ? Une bonne fois pour toutes : c’est un engin à deux roues sur lequel il faut pédaler et qui ne dépasse pas les 25 km/h (45 km/h pour les speed pedelec qui répondent à une législation spécifique et ne peuvent circuler sur les pistes cyclables). Pas d’obligation de s’assurer ni de porter un casque. Vélos tous chemins, vélos tout terrain, cargos, pliables, vélos à double batterie… à chaque usage son modèle. Mais une constante s’impose : si le moteur s’enclenche et tourne hors pédalage, c’est un cyclomoteur et ça change tout question usage et assurances. L’autonomie varie entre 20 et 100 km selon les modèles… et le prix. S’il était plébiscité par les pensionné·e·s il y a encore quelques années, les plus branché·e·s (héhé) s’y sont mis·e·s aussi (oui, on a tenté une recherche «stars en vélo» sur les réseaux, mais comme on se respecte, on a changé d’avis).

ET FILER…

À moins de 6 km/h, on ne se déplace que sur le trottoir (même en roulant). Entre 6 et 25 km/h, on reste sur la piste cyclable ou sur la route. Au-delà de 25 km/h, le moyen de transport est considéré comme un véhicule et il doit être assuré. Si’l est

motorisé, il doit aussi être immatriculé et la personne qui le conduit doit détenir un permis pour le conduire.

LES ENGINS ÉTRANGES

Ce qui freine Les VAE non pliables sont deux à trois fois plus lourds et encombrants que les vélos classiques (compter entre 13 et 30 kg). Dur donc, de les soulever jusqu’au troisième étage de l’appart si on n’a pas de place pour les ranger (les laisser dans la rue n’est pas une option, même avec un bon cadenas, le nombre de vols étant juste hallucinant). Et pédaler quand la batterie est à plat devient vite compliqué… L’entretien et les réparations coûtent également plus cher que sur un vélo classique. Quant à la pluie: notons qu’elle mouille, qu’il s’agisse de rouler électrique ou pas.

Ce qui donne envie On file comme le vent sans suer et on dépasse les bagnoles contraintes de rouler à 30 km en ville (Bruxellois·e, toi-même tu sais) sur son Bzen de 15kg (poids plume) connecté, performant et au design parfaitement tracé (Bzenbikes.com) ou sur son Angell designé par Ora Ito ou sur son Coleen édition « La Marinière », ultra-beau, technologique et autonome (… et cher, on frôle les 6.000€), inspiré par le travail du designer Jean Prouvé dans les années 40 (coleen-france.com). Si un VAE coûte cher à l’achat (entre 750 et 5.000€), il ne l’est pas à l’usage: la conso électrique reviendrait en moyenne à 1,5 € tous les 1.000 km. Le pédalage, même léger, stimule la circulation et mobilise le corps. Quant au bilan carbone, il est de 20 à 25g de CO2/km (10 à 15 fois moins que la voiture, par passager, à titre de comparaison). Les modèles pliables (genre Ahooga, la marque belge qui cartonne) font le job sans aucun inconvénient de poids ou de rangement (ahooga.bike).

Le truc technique à retenir Si le moteur est placé au centre du vélo, la stabilité et la tenue de route seront au top. Plus la capacité en Wh (watt-heure) du moteur est élevée, meilleure sera l’autonomie.

L’ALTERNATIVE DU MONDE D’APRÈS

Gyropodes, skateboards, motos électriques et autres trottinettes de l’espace se multiplient comme des lapins.

Le plus flippant : le monowheel ou monoroue Un système gyroscopique muni de pose-pieds et qui se pilote grâce au poids du corps. Le monoroue fait peur, va vite (jusqu’à 25 km/h) et les gens qui se déplacent sont des super-héro·ine·s. Une conduite «sans les mains» qui nécessite un équipement de protection béton et dont l’autonomie varie de « rien du tout» (moins de 10 km) à « beaucoup » (100 km) selon le prix (entre 500 et 2.000 €). La version «petit joueur» : le gyropode. Même principe, mais un manche donne une impression de stabilité supplémentaire. Encombrant, il est plus cher que le monowheel et dispose de moins d’autonomie.

Le plus retour vers le futur : le skateboard électrique Une planche et un moteur, le skateboard électrique des « vieux qui veulent rester jeunes » peut aller vite (jusqu’à 45 km/h) et coûte moins de 1.000 €. Sa batterie est sous la planche et ses moteurs dans des trucks ou dans les roues. Oui, il est donc possible d’avoir l’air fort cool et d’actionner la télécommande pour avancer ou reculer sans effort. Le top : pas besoin de poser le pied pour freiner. Le sens de l’équilibre, lui, n’est pas fourni…

La plus classique : la trottinette électrique Elle est passée du rayon jouet pour enfants aux trottoirs des grandes villes. Si personne n’a gagné en charisme en conduisant ces engins et si les accidents sont légion, elles restent un moyen de transport idéal en zone urbaine. Si prix d’achat d’une trottinette électrique de qualité est encore dispendieux (jusqu’au 1.500 € pour une autonomie de moins de 25km) et si les versions low cost sont à bannir, les solutions de libre-service restent top.

Hyppy, la coopérative démocratique, sociale et environnementale, propose avant tout une réflexion sur la mobilité, mais aussi des services concrets au profit des citoyens et des communes bruxellois. L’exemple le plus parlant : le ramassage scolaire en calèche (gratuit), baptisé « hippopédibus » dans plusieurs communes de la capitale. Des services payants — comme l’équicoaching — sont également proposés et financent la gratuité de certaines activités. hippy.coop

Langell

LES SOUS ET LA SÉCURITÉ

Les banques proposent des prêts « mobilité alternative » pour se payer des engins de qualité. La règle — comme pour les vêtements et accessoires — est simple : mieux vaut payer plus cher pour du bon que de claquer des ronds pour réparer et remplacer du mauvais matériel. Des primes sont aussi accordées par les Régions et les communes à l’achat de véhicules de mobilité douce et l’employeur peut également intervenir si le véhicule est utilisé pour venir bosser. Question protection, un cadenas trrrrrès fiable (agréé et de top qualité, le reste ne sert à rien face à la détermination des voleurs), une assurance responsabilité civile familiale et une assurance globale contre le vol, les dégâts, les accidents constituent la base.

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