Jean-Henri Fabre en Corse : 1849-1852 La conversion du mathĂŠmaticien en naturaliste
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L’OBSERVATEUR INCOMPARABLE
De 1879 à 1907 Jean-Henri Fabre, qui vit alors à Sérignan-du-Comtat (Vaucluse), publie les dix tomes des Souvenirs entomologiques1. Cette somme de plus de 4 000 pages, véritable « hymne à la nature et à la connaissance » va le consacrer comme le meilleur connaisseur des mœurs des insectes de la seconde moitié du xixe siècle. Les descriptions précises et patientes de la vie de nombreux insectes, les expérimentations simples et ingénieuses, font de ces dix tomes une somme inégalée d’observations minutieuses et de déductions souvent pertinentes. Charles Darwin lui attribuera, en 1862, dans L’origine des Espèces, le titre d’« observateur incomparable »2 et lui écrira en 18803 « Jamais les étonnantes mœurs des insectes n’ont été décrites d’une façon aussi vivante, et l’on peut dire qu’à lire vos descriptions, l’on croit assister à la réalité… Je regrette que vous soyez aussi fortement opposé à la théorie de la descendance ; j’ai trouvé que les recherches dans l’histoire de chaque organe ou instinct constituent un secours précieux pour les observations, et à un observateur merveilleux comme vous, cela suggérerait de nouveaux points de vue. Si je devais écrire au sujet de l’évolution des instincts, je pourrai faire bon usage de quelques-uns des faits que vous citez ». Il est aujourd’hui considéré par de nombreux scientifiques comme l’un des pères fondateurs de l’éthologie et pour certains comme un des précurseurs de l’écophysiologie4.
1. Le premier tome a été rédigé juste avant l’installation à l’Harmas. Le titre exact de chacun des dix volumes est : Souvenirs entomologiques. Études sur l’Instinct et les Mœurs des Insectes. 2. Cette citation a été très utilisée et pour certains détournée par J.-H. Fabre lui-même qui cite à plusieurs reprises Darwin, réalise des expériences suggérées par Darwin, tout en condamnant le transformisme. Cette appréciation élogieuse date de 1862, Fabre a alors 39 ans. Elle fait suite à ses trois premières publications scientifiques sur les hyménoptères et les coléoptères. 3. Lettre cité par P. Tort. Fabre, le miroir aux insectes, 2002. 4. Fontaine M. et Delange Y., 1985. Jean-Henri Fabre, précurseur de l’écophysiologie. In Actes du congrès Jean-Henri Fabre (13-18 mai 1985).
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Le Virgile des insectes5 Le style agréable et clair des Souvenirs entomologiques et de nombreux autres ouvrages (Histoire de la bûche ; récits sur la vie des plantes, etc.) vaut à J.-H. Fabre, « l’Homère des insectes » pour Victor Hugo, d’être proposé, en 1911, au crépuscule de sa vie, au prix Nobel de Littérature. Plusieurs écrivains Français : Romain Rolland, Maurice Maeterlinck, et d’autres, ne tarissaient pas d’éloges à son sujet : « Un grand savant qui pense en philosophe, voit en artiste, sent et s’exprime en poète » disait de lui Edmond Rostand6. Le célèbre biologiste Jean Rostand, fils d’Edmond, lui aussi en partie autodidacte et brillant vulgarisateur, avait découvert les Souvenirs entomologiques à l’âge de dix ans et devait à leur lecture son engagement de chercheur7. En réalité, le style de Fabre, accessible à tous, le desservira auprès de certains scientifiques qui lui reprocheront des textes trop littéraires à leurs yeux, trop emprunts de poésie et de spiritualité8, mais surtout et sans l’avouer, le fait d’être avant tout un autodidacte9 de province, en marge des milieux scientifiques officiels. « Or, si j’écris pour les savants, pour les philosophes qui tenteront un jour de débrouiller un peu l’ardu problème de l’instinct, j’écris aussi, j’écris surtout, pour les jeunes, à qui je désire faire aimer cette histoire naturelle que vous faites tant haïr ; et voilà pourquoi, tout en restant dans le scrupuleux domaine du vrai, je m’abstiens de votre prose scientifique, qui
5. Comparaison, rapportée par le docteur Legros, attribuée à Edmond Rostand, puis reprise dans le titre de plusieurs livres comme par exemple : En lisant J.-H. Fabre : « Le Virgile des insectes » par J.-G. Millet. Delagrave. 1922, 239 p. 6. Les Souvenirs entomologiques auraient été les livres de chevet d’Edmond Rostand au cours d’une longue convalescence. 7. Yves Delange, cite une lettre, du jeune Jean Rostand, datée de 1904. Il a tout juste 10 ans, et il demande à Fabre une épreuve de la photographie le montrant travaillant sur sa petite table afin de la faire reproduire et l’afficher dans sa chambre. 8. Citons en particulier le petit ouvrage (144 p.), J.-H. Fabre et la science, publié en 1924, dans lequel Émile Rabaud considère que le style même des souvenirs, dissimulerait sous la luxuriance de la forme… la pauvreté du fait. Le texte de Rabaud est polémique et il exécute à la fois le contenu des Souvenirs entomologiques et ses admirateurs, qui ne peuvent qu’être incompétents. Si certaines des critiques sont parfaitement fondées, leurs formulations excessives en entraînant des réponses tout aussi brutales de la part des inconditionnels de Fabre détourneront adversaires et partisans de Fabre des vrais débats scientifiques. 9. Fabre est en réalité parfaitement diplômé. Il est titulaires de 3 licences : physique, mathématiques et sciences naturelles et a soutenu brillamment sa thèse en 1855.
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trop souvent, hélas ! semble empruntée à quelque idiome des Hurons ». (Souvenirs entomologiques, IIe série, I). Il est également probable que le desserviront aussi, les très nombreux ouvrages de vulgarisation (une trentaine) qu’il écrira pour vivre lors de son séjour à Orange et surtout le succès inespéré de ces ouvrages qui va lui permettre d’acquérir, alors qu’il a déjà 56 ans, un mas provençal entouré d’un hectare de terrain, le fameux Harmas, à proximité du village de Sérignan-du-Comtat. « C’est là ce que je désirais, hoc erat in votis10 : un coin de terre, oh ! pas bien grand, mais enclos et soustrait aux inconvénients de la voie publique : un coin de terre abandonnée, stérile, brûlé par le soleil, favorable aux chardons et aux hyménoptères ». (Souvenirs entomologiques, deuxième série). C’est dans le jardin réaménagé et dans la campagne environnante que J.-H. Fabre observera pendant de longues heures, presque chaque jour et pendant de nombreuses années, les insectes ; c’est dans le laboratoire aménagé dans l’aile gauche du bâtiment qu’il réalisera ses expériences ; c’est dans son cabinet de travail, sur une petite table toute simple, qu’il écrira les milliers de pages des Souvenirs entomologiques et réalisera également observations et expériences, y compris sur lui-même11.
Le parc actuel de l’Harmas et la maison de Fabre. En premier plan, le bassin aux libellules. Photo A. Gauthier
10. Hoc erat in votis = voici ce que je désirais. Mots d’Horace que l’on rappelle en parlant d’un souhait dont la réalisation a comblé tous les désirs. 11. Expériences diverses notamment sur le caractère urticant des poils de certaines chenilles et qui amènent à la découverte de la cause du prurit provoqué par ceux-ci.
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L’opposant au transformisme Fabre restera jusqu’à la fin de sa vie un farouche opposant au transformisme et un partisan de la fixité des espèces et de leur comportement. Voilà ce qu’il écrit en 1912 dans la préface aux Souvenirs entomologiques : « Pendant cette longue période de près de quarante ans, de nombreux travaux se sont multipliés sur ces importantes questions, auxquelles j’ai été un des premiers à ouvrir la voie ; mais aucun fait, à ma connaissance n’est venu ébranler la solidité de mes observations sur les instincts, tout au moins dans leurs conclusions essentielles. Le Transformisme, en particulier, qui croyait expliquer par l’intervention de l’intelligence, un grand nombre d’actions accomplies par les insectes, ne semble avoir justifié en rien ses prétentions. Le domaine de l’Instinct est régi par des lois qui échappent à toutes nos théories. C’est donc avec les mêmes convictions inébranlables que je maintiens les idées que je n’ai cessé de soutenir et de défendre… »12. Fort de ses remarquables observations sur les mœurs de quelques hyménoptères paralysants (Cerceris, Sphex, ammophiles, etc.) et autres insectes (Osmies et Anthophores et leurs parasites Anthrax13 et Sitaris14), Fabre restera aveugle aux idées nouvelles : de la découverte des lois de la génétique (1860-1900), à la mise en évidence des chromosomes (vers 1880) et des mutations (fin du xixe siècle).
Grande scolie à front jaune (Megascolia maculata flavifrons) sur un chardon (Onopordon). Photo A. Gauthier
12. On pourrait multiplier les citations des Souvenirs entomologiques ou Fabre s’oppose au transformisme, sans nous semble-t-il l’avoir réellement compris : « théorie qui s’appuie trop souvent sur des hypothèses et pas assez sur des faits établis » : IV, 164 ; « Immutabilité des Espèces » : II, 85 etc. Chaque tome des souvenirs contient au moins une tentative de récusation du transformisme. 13. Diptères brachycères : une seule paire d’ailes et des antennes courtes, parasites des hyménoptères dont les anthophores. 14. Sitaris : coléoptères.
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Ce refus obstiné sans autre argument qu’une conception rigide de l’instinct, et semble-t-il sans une véritable lecture des textes fondateurs de Darwin15 : « Quelles ténèbres derrière ce vocable, l’hérédité ! »16 va, très justement, le desservir et ses adversaires souligneront les erreurs ou approximations de certaines de ses observations, l’anthropomorphisme de ses conclusions et, pour les plus acerbes, l’accusation de falsification17. Il est vrai que dans plusieurs de ses ouvrages pédagogiques et entre autres dans les Notions d’histoire naturelle datées de 1884 son opposition au transformisme l’oblige à admettre la théorie des créations successives, alors que celle-ci appartient depuis quelques décennies à un passé révolu. En réalité Fabre est résolument un homme du début du xixe siècle en ce qui concerne l’essor de la biologie alors qu’il est un pionnier dans l’étude des comportements animaux.
Reconnaissance tardive et critiques virulentes Son isolement à l’abri des murs de l’Harmas18, son refus d’accepter les théories récentes, son attachement à certaines idées passéistes, associé à un certain non-conformisme, à un mépris du qu’en-dira-t-on (il se remarie par exemple
15. Il aurait déclaré à Legros, à propos de l’origine des espèces de Darwin qu’il « n’a guère fait que l’entrouvrir, tant la lecture lui en parut tout de suite ennuyeuse et mortelle… ». Cité par P. Tort (cf. note 27). 16. Souvenirs entomologiques : série vi, chapitre iii, l’atavisme, page 34. 17. Cette opposition frontale et publique se fait jour après la reconnaissance officielle de Fabre et surtout peu de temps après sa mort. 18. Il vivait à l’écart d’un village dont il n’était pas natif, village où il a été longtemps considéré comme un original, pour ne pas dire plus. Il est vrai que J.-H. Fabre ne mettait pas beaucoup de bonne volonté pour s’y faire adopter. Lors de ses observations ou réflexions, il était obsédé par le bruit et pouvait entrer dans de violentes colères, même avec ses proches, y compris ses enfants, s’il considérait que leurs activités étaient trop bruyantes. Son comportement lors de la réalisation de certaines de ses expériences devait passablement intriguer les habitants de Sérignan. On imagine aisément ce que dut raconter, à son retour au village, la vieille paysanne qui le surprit un jour en pleine campagne, faisant tournoyer au-dessus de sa tête un sac contenant des Chalicodomes (hyménoptères) et ce afin de tenter de les désorienter avant de les relâcher, après marquage, à plusieurs kilomètres de leur nid. « Vé, lou fada ! » fut, parait-il prononcé plus d’une fois à son encontre, lorsqu’il était rencontré à plat ventre, une loupe à la main dans les garrigues sérignanaises.
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avec sa gouvernante de 41 ans sa cadette)19 et sans doute aussi une certaine dose d’égoïsme, comme tous les scientifiques obsédés par leur œuvre, ne vont pas aider à sa reconnaissance. Celle-ci viendra très tard, presque au terme de sa vie20. Elle s’accompagnera d’hommages qui tenteront de rattraper le temps perdu et feront de Fabre une espèce de saint laïque : • allocations diverses pour lui permettre de subsister correctement, alors que ses ouvrages se vendent plus ou mal21 ; • publication, en 1912, d’une biographie qui participera grandement à faire découvrir son œuvre ; • jubilé de 191022 ; • visite à l’Harmas du Président de la République, R. Poincaré23, en 1913, deux ans avant la mort de Fabre. Citons également après sa mort, l’érection de plusieurs monuments à Sérignan, Avignon, Saint Léon, Millau, la réalisation d’un film « Monsieur Fabre » en 1951 avec Pierre Fresnay dans le rôle-titre, l’édition d’un timbre à son effigie en 1956, ou l’apparition de son personnage dans une bande dessinée de Gotlib, dans les années soixante-dix-80, ainsi que l’existence de santons à son effigie, etc. Ces hommages tardifs, mais nombreux, ne font pas taire les critiques qui se sont manifestées dès la parution de certaines observations24, mais vont redoubler peu de temps après sa mort et perdurent encore aujourd’hui, aux motifs : • que certaines de ses observations peuvent être remises en cause (ce qui, entre parenthèses, est le cas de bon nombre d’observations, de théories ou de lois scientifiques) ; 19. Ce mariage fut l’objet d’un spectaculaire et bruyant charivari qui fut très peu apprécié de Fabre. 20. Son biographe le docteur Legros, qui ne rencontra Fabre qu’à partir de 1907, joua un rôle capital dans cette reconnaissance nationale. Notons toutefois que bien avant celle-ci, J.-H. Fabre est connu dans un cercle étroit de scientifiques et que le succès de ses ouvrages pédagogiques lui valut, outre une certaine aisance financière, médailles et prix. 21. Son opposition obstinée à toute évolution des espèces rend certains de ses ouvrages pédagogiques en complète opposition avec les nouveaux programmes et justifie leur abandon. 22. On remarquera avec Delange que pratiquement aucun biologiste ne participera à cet hommage ! 23. La visite, précédée par celle du ministre des Travaux publics, eut lieu le 14 octobre 1913, lors d’un déplacement dans le midi du Président de la République. 24. Fabre répond de façon argumentée aux critiques qui portent sur la paralysie des proies par les hyménoptères dans la série 4 des Souvenirs entomologiques, chapitres xv et xvi : « Objections et réponses » et « Le venin des apiaires ».
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• qu’il a parfois généralisé ou conclu trop vite, sans vérification suffisante ; • de son opposition à l’évolutionnisme25 et de sa récupération par les antiévolutionnismes américains ; • de son peu de goût pour la systématique ; • de ses supposés ou réels emprunts à des prédécesseurs qu’il oublie de citer ; • qu’il n’a finalement pas apporté beaucoup de faits entièrement nouveaux dans ses recherches26.
Timbre à son effigie
Statue de J.-H. Fabre sur la place de l’église à Sérignan (photo A. Gauthier)
25. Il s’agit évidemment de la critique la plus justifiée. Fabre fut en effet « un ennemi entêté du transformisme, croyant en la création harmonieuse et providentielle des espèces » et cela alors que la conception fixiste « était déjà de son temps abandonnée par presque tous les naturalistes ». Ferton, 1916. Fabre entomologiste (cf. annexe v). 26. Il nous semble au contraire que ses très nombreuses observations ont apporté ou confirmé une multitude d’informations quand bien même l’interprétation qu’il en donne est souvent erronée ou contestable.
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Citons pour illustrer ces critiques les quelques lignes de la présentation de l’ouvrage de P. Tort : Fabre, le miroir aux insectes27 (Éd. Vuibert, 2002). Cet ouvrage a le mérite de fournir une critique approfondie de l’œuvre scientifique, mais les critiques systématiques de l’anti-transformisme de Fabre, le conduisent parfois à minimiser l’apport des observations naturalistes. « Ses Souvenirs entomologiques, malgré des contradictions massives dans la caractérisation de l’instinct, sont l’œuvre d’un talentueux scénariste de la vie animale. Mais aussi celle d’un chevalier de la foi animé d’une hostilité sans mesure contre la biologie évolutive, allant de l’incompréhension élémentaire jusqu’à la falsification d’énoncés. L’opposition de Fabre à des pans fondamentaux de la biologie moderne rend presque incompréhensible son exceptionnelle popularité d’auteur naturaliste et de pédagogue des sciences. ». P. Tort. Op. Cité.
Fabre : observateur incomparable ou naturaliste imperméable aux idées nouvelles ? J.-H. Fabre est-il un « savant occitan »28 pétri de religiosité, un peu borné dans son opposition aux théories de l’évolution, parfois malhonnête ou au contraire un observateur incomparable et un écrivain au style agréable qui « a aussi permis à des milliers de lecteurs d’entrer agréablement dans le monde des insectes » (L. Chopard, 1973.) Et s’il était les deux à la fois ? Citons pour illustrer la dualité du personnage, la conclusion du texte sur les Ammophiles où Fabre observe la technique employée par cet hyménoptère pour paralyser sa proie : un gros ver gris : Souvenirs entomologiques, série i, chapitre xv, page 254-255. « Campé sur le dos du monstre, l’Hyménoptère recourbe l’abdomen, et méthodiquement, sans se presser, comme un chirurgien connaissant à fond l’anatomie 27. Cet ouvrage, très documenté, tente une analyse des véritables apports de Fabre à la Science. Il relève la qualité de nombreuses observations, même s’il en souligne certaines limites. Il fait le procès, en grande partie justifié, de l’antiévolutionnisme aveugle de Fabre. Il critique la prétendue extrême pauvreté de Fabre à la fin de sa vie. Il n’échappe pas, par moments, à la critique systématique. Il constitue, en quelque sorte, le symétrique critique des hagiographies du docteur Legros ou d’Yves Delange. 28. Allusion perfide au fait que Fabre avait un fort attachement à la langue provençale, mais aussi réaction « parisianiste » à l’endroit d’un scientifique qui a toujours préféré sa province à Paris. Cette insistance chez certains à le qualifier de « Sérignanais » ou d’Occitan nous paraît révélatrice d’un certain mépris pour le provincial.
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de son opéré, plonge son bistouri à la face ventrale, dans tous les segments de la victime, du premier au dernier. Aucun anneau n’est laissé sans coup de stylet ; avec pattes ou sans pattes, tous y passent, et par ordre, de l’avant vers l’arrière. Voilà ce que j’ai vu avec tout le loisir et toute la facilité que réclame une obserAmmophile et vers gris. DR vation irréprochable. L’Hyménoptère agit avec une précision que jalouserait la science ; il sait ce que l’homme presque toujours ignore ; il connaît l’appareil nerveux complexe de sa victime, et pour les ganglions répétés de sa chenille réserve ses coups de poignards répétés. Je dis : il sait et connaît ; je devrais dire : il se comporte comme s’il savait et connaissait. Son acte est tout d’inspiration. L’animal, sans se rendre nullement compte de ce qu’il fait, obéit à l’instinct qui le pousse. Mais cette inspiration sublime, d’où vient-elle ? Les théories de l’atavisme, de la sélection, du combat pour l’existence, sont-elles en mesure de l’interpréter raisonnablement ? Pour moi et mon ami, ce fut et c’est resté une des plus éloquentes révélations de l’ineffable logique qui régente le monde et guide l’inconscient par les lois de son inspiration ». Il s’agit ici d’un exemple, parmi d’autres où se côtoient l’excellence des observations et l’utilisation, hors de propos de ces dernières, pour s’opposer à certaines théories. Fabre refuse, avec d’autres naturalistes, toute influence de la sélection naturelle sur l’instinct et le comportement animal. Les conclusions que tirent Fabre de ses observations, l’anthropomorphisme29 qui imprègne de nombreux passages des Souvenirs entomologiques prêtent à l’évidence le flanc aux critiques. Ainsi, dans la quatrième série des souvenirs ses tentatives de distinction entre l’instinct30 et le discernement chez différents insectes, en occultant « l’intelligence » ou le hasard sont tout à fait erronées. 29. J.-M. Drouin dans Philosophie de l’insecte multiplie les exemples tirés des Souvenirs ou Fabre file les métaphores attribuant aux insectes divers métiers « à la signification sociale bien marquée… ». 30. Le désaccord sur la signification de l’instinct constitue le point fort de l’opposition de Fabre à l’idée d’évolution. Pour lui l’instinct des insectes est « fixe, invariable, non acquis, non conscient de sa finalité, infaillible – c’est-à-dire parfait dans l’activation et le déroulement de
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A contrario ses observations, en 1903, sur l’attirance des mâles du grand paon de nuit (un lépidoptère) par la femelle sont un modèle du genre et ouvrent la porte à la découverte des phéromones31. Constatons simplement, qu’un siècle après sa mort, Jean-Henri Fabre reste dans de nombreux pays comme l’un des scientifiques français les plus admirés. Il est particulièrement populaire au Japon où il est considéré comme la juste symbiose entre l’écrivain et le scientifique, mais également en Russie, aux États-Unis, etc. Les Souvenirs entomologiques, mais également plusieurs des ouvrages scolaires écrits il y a plus Le dispositif expérimental utilisé par Fabre lors d’un siècle sont réédités ou traduits de sa découverte de l’attraction des grands paons mâles par la femelle. Photo A. Gauthier en plus de quinze langues. Empruntons à C.-K. Starr les conclusions de son long article publié dans les actes du congrès (Actes du congrès de J.-H. Fabre de 1985) : « Fabre était-il un grand observateur ? Avec le passage des ans au cours desquels ses observations ont pu être mises à l’épreuve, et en accord avec la plupart des premiers commentateurs, nous pouvons conclure qu’il en était un. Il était aussi un expérimentateur digne d’estime. Ses observations et expérimentations ont-elles été affectées par sa conception erronée de la classification, de la variation intraspéci-
ses séquences d’actes en conditions non perturbées -, et imperfectible par apprentissage… Pour Darwin, l’instinct est lié à l’organisme, et spécialement au cerveau. Comme l’organisme donc, ou plus exactement avec lui, il varie. Avec l’organisme, il est susceptible d’améliorations sélectives, et par conséquent ne saurait être immédiatement parfait. Ces améliorations lui sont, comme les perfectionnements organiques, livrées à travers un processus de sélection de variations avantageuses coextensif à l’histoire phylogénétique de l’animal concerné… ». P. Tort, op. cité. 31. Il s’agit de substances chimiques émises par les animaux et qui agissent comme messager chimique entre animaux de la même espèce. Elles jouent souvent un rôle important dans l’attraction sexuelle. Il est de bon ton chez certains, de minimiser l’apport de Fabre en prétextant qu’elles n’ont rien apporté de réellement nouveau. Il nous semble que ces observations et les expériences qu’il réalise sont au contraire assez remarquables, quand bien même, elles n’aboutissent pas à la découverte formelle des phéromones !
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fique et de l’évolution, ainsi que de sa conception idéaliste dépassée de l’Univers ? Oui, mais très peu, de façon assez surprenante… ». Actes du congrès de 1985. De plus l’œuvre de Jean-Henri Fabre a le mérite incontestable d’avoir fait découvrir et admirer le monde des insectes à des lecteurs innombrables à travers le monde et cela grâce à des observations aussi méticuleuses que remarquables, observations retranscrites dans un style que même ses détracteurs sont obligés de célébrer. Quant à l’Harmas, il est, depuis 1922, propriété du Muséum national d’histoire naturelle et classé au titre des Monuments historiques depuis 1998. Il s’agit de la première maison de mémoire dédié à un naturaliste. Elle a été entièrement restaurée (2000 à 2006) dont plusieurs pièces rendues à l’identique et rouverte au public en 2006.
La pendule offerte par les jeunes filles de Saint Martial à Avignon (cours du soir d’éducation populaire)
Mappemonde offerte par son éditeur Delagrave
La fameuse petite table de travail de J.-H. Fabre Photos A. Gauthier avec l’aimable autorisation de l’Harmas
Plaque à l’entrée de l’Harmas
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Les collections de J.-H. Fabre à Sérignan. Cliché MNHN
Détails d’une des armoires du cabinet de travail. (Cliché MNHN. Harmas Jean-Henri Fabre)
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Une des boîtes d’hyménoptères. Photo A. Gauthier
Lorsque Fabre débarque à Ajaccio, âgé de moins de 26 ans, fort de son récent diplôme de physique, il est bien loin des premières déductions sur les hyménoptères et des expériences de l’Harmas. Il paraît hésiter entre les équations mathématiques et les observations naturalistes au profit des premières. Son séjour en Corse est considéré Quelques coquillages et piquants d’oursins recueillis par la plupart de ses biographes comme par Fabre à Ajaccio. Photo A. Gauthier le point de départ de sa vie scientifique et osons l’écrire comme le déclencheur d’une véritable métamorphose qui fera d’un modeste régent de physique l’un des plus grands entomologistes de l’humanité32. 32. Pour être tout à fait exact, Fabre ne repart pas de la Corse converti à l’étude des insectes. Il a dans l’île plutôt développé son goût pour la botanique et la malacologie. Son appétence pour l’entomologie naît ou renaît en Avignon à partir de sa découverte des travaux de l’entomologiste Léon Dufour.
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Paradoxalement ce séjour capital est mal connu et souvent décrit en quelques lignes. Il est vrai que J.-H. Fabre lui-même a été peu loquace sur son séjour. Nous tenterons ici de faire le point sur les quatre années passées en Corse par le jeune Jean-Henri Fabre, après avoir rappelé quelques éléments indispensables de sa biographie et avoir grâce à sa correspondance avec Requien tenté de replacer son séjour dans l’île de Beauté. La découverte d’un de ses lieux de résidence à Ajaccio, o, la mise à jour des discours prononcés lors du seul hommage ge rendu dans l’île, en 1927, à l’ancien professeur au collègee Fesch, et une relecture des lettres corses replacées dans leur environnement naturaliste, constituent notre modeste contribution à la commémoration du centième anniversaire de sa mort.
Santon des établissements Fouque
Extrait d’une planche de Rubrique-à-brac de Gotlib. Éd. Dargaud. 1978
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Ce buste en bronze de Fabre, d’une quinzaine nzaine de cm de hauteur, sur socle de serpentinite, pourrait ait être la reproduction, en modèle réduit, de la tête de laa statue en pied située devant sa maison natale à Saint-Léon, Léon, ire de statue inaugurée en 1924. Un second exemplaire cette statue se trouvait à Millau. Elle fut détruite te en 1942, pour en récupérer le métal. Les deux statues ues et le buste sont l’œuvre du sculpteur L. Malet. Le buste a-t-il été modelé seul, puis utilisé pour la réalisation de la statue en pied ? Nous l’ignorons. La photo ci-dessous, prise en 1910 ou 1911, 1, montre le sculpteur François Sicard en train de modelerr le buste de Fabre, pour une fois sans le fameux chapeau. L’original original est aujourd’hui au musée d’Orsay. Le troisième personersonnage sur la photo est le Docteur Legros. Celui-ci elui-ci était très sévère sur la statue de Sérignan (sculpteur lpteur Auguste Maillard) et sur celle d’Avignon (sculpteur lpteur Charpentier). Il ne tarissait pas d’éloge au contraire ntraire sur le buste de Sicard. Il ne parle pas de la statue tue de Saint-Léon due à L. Malet. Collection particulière : A. L. Photo : A. Gauthier
Photo P.-H. Fabre. Collection A. Gauthier
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« Grande comme un mouchoir, occupée à droite par l’encrier, fiole d’un sou, à gauche par le cahier ouvert, ma table de travail fournit tout juste la place nécessaire au maniement de la plume. J’aime ce petit meuble, l’une des premières acquisitions de mon jeune ménage. Cela se déplace aisément où l’on veut, devant la fenêtre si le temps est obscur, dans un recoin d’éclairage discret si le soleil est importun ; cela permet en hiver l’intime voisinage du foyer où se consume une bûche. Pauvre petite planche de noyer, voici un demi-siècle et davantage que je te suis fidèle. Maculée d’encre et balafrée du canif, tu fournis maintenant ton support à ma prose comme jadis à mes équations… Un de tes angles est ébréché ; les ais commencent à se disjoindre, j’entends de temps à autre, le coup de rabot de la vrillette, l’exploiteuse des vieux meubles… ». Souvenirs entomologiques, série 9, chapitre xiv. Photo A. Gauthier
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JEAN-HENRI (CASIMIR) FABRE (1823-1915)
Avant la Corse Fabre n’a pas encore 26 ans lorsqu’il est nommé professeur au collège d’Ajaccio (il est né le 21 décembre 1823 à Saint-Léon du Lévézou dans l’Aveyron). Il en a 29 quand il quitte la Corse pour Avignon. C’est son deuxième poste. Il a enseigné en effet, comme instituteur à Carpentras, pendant sept ans à la sortie de l’École Normale d’Avignon, après l’obtention de son brevet de capacité pour l’enseignement primaire. Au cours de son séjour à Carpentras, il prépare en solitaire et réussit successivement son baccalauréat ès lettres (1844), puis ès sciences (1846). Il a passé sa licence de mathématiques en 1847 et sa licence de physique en 1848. À Carpentras, il a épousé l’institutrice Marie-Césarine Villard, en octobre 1844. Il aura avec elle sept enfants. Les deux premiers, nés avant son arrivée en Corse, sont morts très jeunes et le couple débarque en Corse sans enfant. Le troisième, une fille naîtra pendant le séjour de Fabre en Corse, mais la naissance aura lieu à Carpentras. Pendant cette première période carpentrassienne, il se perfectionne en mathématiques, mais développe un goût certain pour la botanique en particulier et les sciences d’observation en général. Il postule, sans succès, à un poste de professeur de mathématiques à Tournon, puis Avignon.
Le séjour en Corse Il est enfin nommé, le 22 janvier 1849, comme professeur de physique au collège d’Ajaccio1. 1. « C’est une récompense bien tardive et depuis longtemps méritée, que l’on vient d’accorder à l’esprit des plus heureusement doués, qui, par la seule force de sa volonté et de son travail, s’est avancé si loin dans l’étude des sciences mathématiques. » Écho du Ventoux, 10 février 1849.
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C’est donc un jeune enseignant dûment diplômé qui arrive en Corse pour enseigner la physique2. Il restera en poste quatre ans (février 1849-janvier 1853) même si son séjour réel à Ajaccio n’a pas dû dépasser trois ans et demi, si l’on enlève les vacances d’été à Carpentras et une convalescence fin 1851-début 1852 (?) sur le continent.
Ajaccio et son golfe aujourd’hui, vue prise depuis le château de la Punta. Photo A. Gauthier
Avignon, Orange et Sérignan Il rejoint, début 1853, un poste de répétiteur de physique au Lycée d’Avignon. Il y restera 17 ans et passera successivement sa licence ès sciences naturelles et sa thèse de doctorat en 1855, ce qui indique qu’il a abandonné l’idée de préparer l’agrégation de mathématiques3. Il publie la même année de remarquables articles scientifiques, qui lui valent ses premières récompenses. Citons en particulier : « Observations sur les mœurs des Cerceris, et sur les causes de la longue conservation des Coléoptères dont ils approvisionnent leurs larves »4 et « Étude sur l’instinct et les métamorphoses des sphégiens »5 qui lui vaut un prix décerné par l’Académie des Sciences en 1856.
2. Le professeur de physique de collège enseigne également, à cette époque, la chimie, l’histoire naturelle et un peu de mathématiques. Les cours sont essentiellement dogmatiques et l’expérimentation y a peu de place. 3. Il indique à Moquin-Tandon, dés 1853, qu’il va passer sa thèse. 4. Annales des sciences naturelles, Zoologie, 4e Série, 4 (1855), 129-150. 5. Il semble bien que ce soit J.-H. Fabre qui a le premier mis en évidence l’hypermétamorphose.
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C’est à cette époque que Fabre met au point sa méthode de travail, faite d’observations patientes et méticuleuses ainsi que d’expérimentations simples et ingénieuses. C’est à la même époque qu’il choisit ses sujets d’étude : les insectes. Par contre ses brevets déposés en 1860 sur l’extraction de l’alizarine de la garance, se révèlent sans valeur car le colorant vient d’être synthétisé. Fabre va ensuite abandonner provisoirement la publication de ses observations et se lance dans la rédaction d’ouvrages scolaires à partir 18636. Sur l’instigation de V. Duruy, Fabre dispense des cours d’éducation populaire. Il reçoit à Paris, en 1868, la légion d’honneur des mains de Napoléon III, mais refuse d’être le précepteur du Prince Impérial et retourne à Avignon. Ses cours sur la fécondation des fleurs devant des jeunes filles sont probablement un prétexte, mais ils déclenchent une cabale et lui valent d’être chassé de son appartement en 1870. Il se replie alors à Orange où il restera neuf ans. Il est alors père de cinq enfants dont Jules, le fils en lequel Fabre voit sa descendance scientifique. Il démissionne de l’enseignement fin 1870 et se met à produire de façon régulière et méthodique des ouvrages scolaires. En 1873, il est licencié de son poste de conservateur du musée Requien. Au cours de son séjour à Orange, il publie près de trente livres scolaires ou autres. Jules meurt en 1877, laissant son père inconsolable. Avec l’argent rapporté par les droits d’auteur de ses livres il achète en 1879 une propriété à Sérignan, l’Harmas7 où il va vivre jusqu’à sa mort en 1915. C’est ici qu’il va publier successivement les 10 séries des Souvenirs entomologiques et, au moins les premières années, de très nombreux ouvrages scolaires. Il se remarie en 1887 après le décès de sa première femme en 1885. Il aura trois enfants de ce second mariage dont Marie Pauline qui assistera à l’inauguration de la plaque du collège Fesch et Paul qui réalisera les très nombreuses photos d’insectes qui illustrent les dernières éditions des Souvenirs entomologiques ainsi que les photos de son père à la fin de sa vie. À la fin du xixe siècle, ses livres scolaires cessent peu à peu de se vendre et les droits d’auteur des Souvenirs entomologiques ne peuvent pas les remplacer. Des 6. Cette nouvelle orientation va profondément décevoir Dufour qui écrira : « Fabre : professeur au Lycée d’Avignon s’est mis en relation avec moi sur l’entomologie principalement. Observateur d’un tact exquis, écrivain d’une imagination brillante, il donnait à ses descriptions un charme qui ravissait l’admiration et un style entraînant. Il s’était livré avec une rare distinction à l’étude des mœurs du genre de vie des métamorphoses des Méloès, des Sitaris, des Cerceris, des Antophora. Malheureusement il n’a pas persévéré dans cet esprit d’observation… ». Cité par P. Duris (cf. bibliographie). 7. Harmas : de l’occitan ermàs, signifiant terre inculte, en friches. C’est dans cette demeure que Fabre se consacrera à l’observation des insectes dans un véritable laboratoire de pleine nature.
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difficultés financières apparaissent et vont affecter Fabre pendant plusieurs années au début du xxe siècle. Elles seront très partiellement atténuées par un prix décerné régulièrement, chaque année, par l’académie des Sciences. Grâce au docteur Legros, ami et biographe, un jubilé est organisé en 1910 et, la renommée étroite du cercle scientifique devient planétaire. Il est même proposé pour le prix Nobel de littérature. En 1913, le Président de la République viendra en personne lui rendre visite à l’Harmas. Les deux dernières années, Fabre est accablé d’hommages qu’il n’a plus la force de repousser et sans doute d’apprécier. Il meurt, le 11 octobre 1915, en pleine boucherie de la Grande guerre.
L’œuvre de Fabre Y. Cambefort a calculé que Fabre avait publié un total de 584 éditions ou rééditions en un demi-siècle représentant près de 2 millions d’exemplaires. Les bonnes années il touchait 16 000 francs de droit d’auteur à comparer au salaire d’un enseignant débutant : 1 600 francs/an. Si l’œuvre qui l’a rendu célèbre dans le monde est constituée par les dix tomes des Souvenirs entomologiques, on ne peut passer sous silence la centaine d’ouvrages pédagogiques également publiés et traduits en de nombreuses langues et dont certains sont encore réimprimés cent ans après sa mort.
Les 10 volumes des Souvenirs entomologiques, la biographie de Fabre par le docteur Legros et le recueil des poésies de Fabre contenant le « fameux » poème à la gloire du nombre, poème composé en Corse en 1852.
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Fabre en famille à l’Harmas, les dernières années de sa vie. Au premier rang et de gauche à droite : la seconde épouse de Fabre, le docteur Legros, J.-H. Fabre et Aglaé, sa fille, née en 1853 de son premier mariage. Elle restera à ses côtés jusqu’à la fin. Au second rang : son fils Paul, un ami de ce dernier, Mme Legros, une amie, Pauline et une autre amie. Collection A. Gauthier
Fabre au crépuscule de sa vie à l’Harmas. Photo P.-H. Fabre. Collection A. Gauthier
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Photo aérienne de l’Harmas à Sérignan dans les années 1950. Le nord est en haut de la photographie
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TABLE DES MATIÈRES
L’observateur incomparable .................................................................................................................................................
7
Le Virgile des insectes................................................................................................................................................................................................
8
L’opposant au transformisme ...........................................................................................................................................................................
10
Reconnaissance tardive et critiques virulentes .............................................................................................................................
11
Fabre : observateur incomparable ou naturaliste imperméable aux idées nouvelles ?..................
14
Jean-Henri (Casimir) Fabre (1823-1915) ..................................................................................................................
23
Avant la Corse .....................................................................................................................................................................................................................
23
Le séjour en Corse .........................................................................................................................................................................................................
23
Avignon, Orange et Sérignan..............................................................................................................................................................................
24
L’œuvre de Fabre .............................................................................................................................................................................................................
26
Le séjour en Corse...........................................................................................................................................................................
23
Durée exacte du séjour .............................................................................................................................................................................................
26
Un désir lancinant de retour ................................................................................................................................................................................
30
« Quiconque l’a vue voudrait la revoir » ..................................................................................................................................................
35
Souvenirs naturalistes de Corse ....................................................................................................................................................................
41
Biographie de Legros ..................................................................................................................................................................................................
44
L’Ajaccio de J.-H. Fabre...............................................................................................................................................................
23
L’appartement de Fabre...........................................................................................................................................................................................
44
M. Fabre au n° 12 de la Place Bonaparte ...........................................................................................................................................
48
La conf irmation du naturaliste.........................................................................................................................................................................
53
La Corse, après la Corse........................................................................................................................................................................................
58
Le souvenir de Jean-Henri Fabre en Corse.......................................................................................................................................
60
Annexes.........................................................................................................................................................................................................
68
Annexe I : le collège Fesch : 1849-1853, la présence de Fabre ..................................................................................
68
Annexe II : les lettres de Fabre à Requien ............................................................................................................................................
73
Annexe III : les discours du 30 juin 1927 ...............................................................................................................................................
107
Annexe IV : une excursion botanique au Monte Renoso par Requien .................................................................
125
Annexe V : Charles Ferton (1856-1921) : un remarquable entomologiste corse, admirateur critique de Jean-Henri Fabre .............................................................................................................................................
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Bibliographie ...........................................................................................................................................................................................
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