Que penser de… ?
DÉMOCRATIE ET ÉGLISE
Que penser de… ?
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ÉMOCRATIE ET ÉGLISE
La Belgique est un pays démocratique. C’est un royaume et la démocratie y est parlementaire (Chambre et Sénat). La France est un pays démocratique, également selon le système parlementaire. C’est une république. Sous le régime soviétique et jusqu’à la chute du mur de Berlin, l’Allemagne de l’Est s’autoproclamait République Démocratique Allemande. Or on sait ce qu’il en était sur le plan de la démocratie… On pourrait ainsi continuer ce tour d’horizon des « démocraties ». On verrait que la démocratie est une notion relative dont les applications peuvent varier selon les époques et les pays. Elle n’est pas une formule mathématique ni un système de gouvernement bien défini qu’il « n’y aurait qu’à » appliquer pour réaliser le bonheur de la société. Elle est un ensemble de valeurs dont la forme évolue au cours du temps et varie avec les cultures. Après avoir informé le lecteur sur l’origine de la notion de démocratie et son évolution jusqu’à nos jours (ch. 1), ce numéro 50 de Que penser de… ? poursuivra par une description du système démocratique belge (ch. 2). Une analyse critique de l’état actuel de la démocratie sera 1
ensuite proposée : où en sommes-nous aujourd’hui, quelles sont les forces et les faiblesses du système, les points à améliorer ? (ch. 3). Cela conduira à une réflexion plus prospective sur certains dangers qui guettent la démocratie et sur les signes d’espoir qui devraient permettre de remédier à certaines faiblesses et d’éviter les écueils qui la menacent (ch. 4). Cette brochure a été rédigée par Georges Bihin, Anne Brisbois, Gerda et Pierre Compère, Tony Dhanis, Jean Legein et Denise Loute du groupe « Démocratie dans l’Eglise ». Il était donc normal que cette question soit abordée (ch. 5). Que l’Eglise ne soit pas une démocratie politique est une chose. Qu’elle doive adopter des manières de faire démocratiques en est une autre. « Et c’est indispensable aujourd’hui parce que, à notre époque, la démocratie représente la meilleure manière — ou la moins mauvaise — de vivre en commun quand on est nombreux » (Henri Bourgeois). Le fondement de cette évidence est théologique. L’Esprit Saint est donné à tous en vertu de leur baptême. Le Concile a d’ailleurs parlé de l’Eglise en termes de communion, et une communion, c’est plus qu’une démocratie. Ce n’est donc sûrement pas moins. Une Eglise davantage polyphonique ferait entendre une si belle symphonie… C.D.
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U’EST-CE QUE LA DÉMOCRATIE ET COMMENT A-T-ELLE ÉVOLUÉ ?
Un peu d’histoire Chez les Grecs La démocratie est un régime où le pouvoir (kratos) est exercé par le peuple (demos). Elle s’oppose à l’aristocratie (pouvoir exercé par une élite), à l’oligarchie (pouvoir exercé par une minorité), à l’autocratie (ou monarchie absolue). C’est le grand poète Eschyle qui, au Ve siècle avant Jésus Christ, a uni les deux mots dans sa tragédie Les Suppliantes pour former le terme de démocratie, créant ainsi une nouvelle conception de l’autorité. En fait, c’est même un peu plus tôt qu’un Athénien resté inconnu lança l’idée d’associer le peuple au pouvoir. Cet homme, un sage ou un philosophe, se demandait pourquoi des lois religieuses assujettissaient le peuple et les souverains. Pour lui, tout homme était capable, par sa raison, de découvrir la vérité. Ainsi, dès 3
sa conception, la démocratie se révélait antagoniste des lois religieuses dont elle refusait l’absolutisme. Au IVe siècle, Aristote reprend l’idée, tout en proposant un mixage entre « démocratie » et « aristocratie ». Il distinguait la démocratie (ou démagogie) qui poursuivait les intérêts de la foule et la politeia qui visait au bien de la communauté et à la stabilité du régime. Ainsi, occasionnellement, les Athéniens, réunis parfois par milliers, étaient invités à se prononcer sur un problème de politique. Sur les points portés à l’ordre du jour, chaque participant avait le droit de prendre la parole. A vrai dire, peu de gens s’exprimaient. Le regard de tous était fixé sur quelques hommes capables de tracer les lignes politiques entre lesquelles l’Assemblée aurait à choisir. Au moment de conclure, la décision était prise par un vote à la majorité simple des présents. Tel demeure le type le plus pur de démocratie directe où aucune décision n’est valable sans que chacun ait pu opiner librement à ce sujet. Mais, même à Athènes, ce « chacun » n’était pas tout le monde. Les femmes ne participaient pas aux délibérations. Les esclaves en étaient exclus. Bref une personne sur six détenait le pouvoir. Dans nos pays Dès les premiers siècles de notre ère, il y eut des velléités d’adapter cette notion de démocratie au fonctionnement du pouvoir. 4
Au Moyen Age, des cités, des villes s’opposent au Seigneur féodal et commencent en balbutiant certaines expériences de démocratie. Par exemple, Huy, où les corporations de métiers obtiennent la première charte d’Europe (1066). Mais encore une fois en étaient exclus les paysans (ou « vilains »), les travailleurs non inscrits dans un métier et les serfs. En Angleterre, limitant l’absolutisme du pouvoir royal, les aristocrates obtiennent des protections par la « Grande Charte » (1215). A cette époque aussi, dans de nombreux ordres religieux, est instaurée une forme directe de pouvoir populaire. Au XVIIe siècle, selon les philosophes anglais Hobbes et Locke, ainsi que le Hollandais Grotius, la démocratie doit protéger non seulement le bien commun, mais aussi les intérêts des individus. C’est dans l’individu qu’on trouve le fondement de tout gouvernement politique (tout en excluant, dans leur esprit, les paysans et les pauvres). Au XVIIIe siècle, siècle des Lumières, les Encyclopédistes introduisent dans la démocratie des notions révolutionnaires pour l’époque, telles que l’universalité, la justice, le mieux-être et le bonheur pour tous. Cependant, à leurs yeux, les conditions de cette libéralisation, c’est la formation et l’éducation du peuple. En effet, les Encyclopédistes n’imaginent pas la démocratie sans démocrates conscients de leurs devoirs comme de leurs 5
droits, et instruits des choses, donc capables d’avoir un sens critique (une des initiatives actuelles dans ce genre est celle d’ATD Quart Monde). Révolutions La Révolution française élargit la notion de démocratie en Europe par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et l’établissement d’un système électoral. Quant aux gouvernements révolutionnaires, ils furent autocratiques ou oligarchiques, pour des raisons que l’on peut deviner facilement : dirigeants avides de pouvoir absolu n’acceptant pas les compromis et considérant les opposants comme des traîtres. Durant la Révolution en France, le peuple fut livré à ses fantasmes. La démocratie que la Révolution avait voulu instaurer fut foulée aux pieds et le pays fut soumis au pouvoir absolu de Napoléon. En 1848, après une nouvelle Révolution, la France connut un pouvoir plus démocratique. Mais Lamartine, qui y avait œuvré, dénonçait, deux ans après son instauration, son incapacité, en fustigeant la violence et la démesure des urnes. Ce vent de liberté et de révolution souffla sur toute l’Europe. Cependant, en Angleterre, les choses se passèrent moins violemment, malgré de nombreux conflits à ce sujet avec l’Irlande et l’Ecosse. Si aux XVIIe et XVIIIe siècles, le Parlement existait déjà comme groupe de 6
pression sur la monarchie, celle-ci gardait une forte autorité sur le peuple. Depuis la Déclaration des Droits de 1689, la monarchie anglaise est une monarchie de représentation et a eu la réputation d’être le premier pays démocratique du monde, même si les classes sociales supérieures y restèrent longtemps privilégiées. Aux Etats-Unis, la Révolution (1774-1776), un peu antérieure à celle de la France, fut plus générale. Cependant, les esclaves étaient exclus du système. D’ailleurs, même durant la Révolution française, l’esclavage (à part quelques tentatives de libération au début), ne fut pas éradiqué. Il ne le fut nulle part ailleurs en Occident, jusqu’à la fin du XIXe siècle. En Belgique, la Constitution, signée en 1831, malgré l’opposition du Saint-Siège, fut considérée à cette époque comme un modèle. En effet, si le pays était une monarchie, celle-ci était parlementaire : le Roi ne gouverne pas et ses décisions doivent toujours être contresignées par un ministre. Cependant, le suffrage n’était que censitaire (en fonction de la fortune ou de la notabilité). En 1919, sous la pression des socialistes, le suffrage devint universel, mais réservé aux hommes. Ce ne fut qu’en 1949 qu’il fut étendu aux femmes. Rappelons enfin que la Suisse, présentée comme un modèle de démocratie, n’a vu les femmes accéder au vote dans tous les cantons qu’en 1990.
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Différents modèles En France, la notion de laïcité est intimement associée à l’idée de démocratie, contrairement à l’Allemagne, aux pays scandinaves et même à la Belgique (ce qui ne veut pas dire que la démocratie y soit liée à la religion, mais elle la reconnaît). La démocratie, telle que définie par Montesquieu, comporte l’exercice de trois pouvoirs : législatif, exécutif et judiciaire. En principe, ces trois pouvoirs sont indépendants les uns des autres.
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Aux Etats-Unis, la Cour Suprême (composée de cinq ou six magistrats) a le pouvoir le plus étendu, car c’est elle qui doit décider si une loi reste valide face à la Constitution (ainsi la loi sur l’avortement). Il en résulte que son élection donne lieu à de multiples luttes. En France, comme aux Etats-Unis, l’exécutif (président et gouvernement) est le plus puissant des trois pouvoirs. Le judiciaire y est dominé par l’exécutif. L’Assemblée ou le Congrès ont moins de pouvoir que notre Parlement. La démocratie peut être à la base d’un gouvernement fédéral (c’est le cas des Etats-Unis, de l’Allemagne, de l’Autriche, de la Suisse, de la Belgique) ou unitaire (France, pays nordiques, etc.) Liberté – Egalité – Fraternité Quand on parle aujourd’hui de démocratie, on se réfère à des valeurs telles que la liberté, l’égalité et la fraternité, prônées par la Révolution française (1789), ainsi qu’à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (1948). La démocratie n’est cependant pas synonyme de liberté totale, comme certains veulent le croire. Liberté veut dire accès au débat, au dialogue. C’est la capacité pour chacun de faire respecter ses droits, mais aussi de reconnaître ses erreurs. C’est cette liberté qui est à la base de la proclamation des Droits de l’Homme. Toute liberté est toujours limitée par le droit de l’autre et des 9
autres. Ainsi, une des bases de la démocratie est le respect des minorités dont tout gouvernement doit tenir compte. Pour certains, l’égalité consiste à donner à tous les mêmes droits, les mêmes moyens, ce qui est fallacieux. Il faut protéger les plus faibles (cf. chez nous, dans l’enseignement ou la justice). Quant à la fraternité, il s’agit en fait d’une solidarité organisée par l’Etat. La Déclaration des Droits de l’Homme a été ratifiée par la majorité des Etats. Elle constitue une base de recours devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme (Strasbourg) pour tout citoyen de ces Etats, en cas de violation de ses droits par un autre citoyen ou par une autorité quelconque. La démocratie n’est pas une chose achevée une fois pour toutes. La démocratie est une façon de vivre ensemble qui permet à chacun de s’épanouir et d’être respecté : ce n’est pas toujours facile. La démocratie est une idée qui fait son chemin parmi les hommes. On dit souvent à son sujet qu’elle est sans cesse à refaire : la démocratie demande un effort permanent. Elle n’est pas gagnée une fois pour toutes. 10
La démocratie peut se rencontrer partout où au moins deux êtres humains vivent ensemble : en famille, en classe, dans une bande de copains, au niveau d’un groupe organisé, d’une commune, d’un pays. Vivre en démocratie 1 ce n’est pas laisser faire chacun à sa guise ; ce n’est pas uniquement dire « je ne suis pas d’accord » ; ce n’est pas non plus être toujours d’accord. La démocratie, c’est avoir la liberté de donner son avis et avoir le devoir de respecter l’avis de l’autre.
« La démocratie est une manière de vivre ensemble, d’être libre ensemble, dans le respect des différences et dans un perpétuel effort collectif de discernement. La liberté en démocratie ne peut se vivre qu’au prix d’une éducation et la démocratie doit s’apprendre. » Robert Guelluy
1. Extrait de l’exposition : « Citoyen si tu le veux », Province de Namur.
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A DÉMOCRATIE AUJOURD’HUI EN BELGIQUE
La démocratie politique 2 Au sens étymologique, le terme démocratie signifie « gouvernement par le peuple ». Si elle existait dans sa forme la plus pure, ce serait donc un système politique où il n’y aurait pas de distinction entre les gouvernants et les gouvernés : faire les lois serait l’affaire de tous et tous pourraient accéder aux fonctions exécutives (gouvernements, bourgmestres, échevins…), c’est-à-dire la responsabilité de faire appliquer les lois et les règlements. Cette sorte de démocratie directe, avec une telle conception de l’exercice des pouvoirs législatif et exécutif, est généralement considérée comme impraticable aujourd’hui. C’est par l’intermédiaire de ses représen2. Larges extraits de l’excellent site internet du CRISP : www.crisp.be/ La_Commune
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tants que le peuple exerce le pouvoir. C’est en ce sens que l’on parle de démocratie représentative. Les régimes démocratiques qui ont succédé aux monarchies de l’Ancien Régime sont essentiellement des démocraties constitutionnelles représentatives. Les fondements du régime politique sont définis par une règle de base, la Constitution, et l’exercice du pouvoir passe par un mécanisme de représentation du peuple par la voie d’élections. Dans ces régimes, la démocratie est organisée à plusieurs échelons. Le pouvoir est décentralisé, ce qui constitue souvent une caractéristique du pouvoir démocratique. Dans le cadre actuel de la Belgique fédérale, des pouvoirs politiques démocratiques existent au niveau fédéral (ou national), des Régions, des Communautés, des provinces et des communes. Trois principes de base de la démocratie politique Un premier principe de base de la démocratie est que le pouvoir de diriger appartient à l’ensemble des citoyens. Ce pouvoir, la souveraineté collective, est exercé d’une manière qui est établie par une règle fondamentale, la Constitution. Dans tout régime démocratique, le pouvoir de diriger la collectivité appartient de droit à l’ensemble des membres de cette collectivité. En Belgique, l’article 33 de la Constitution stipule que « tous les pouvoirs émanent de la nation ». La nation est 13
formée par l’ensemble des citoyens du pays. Le pouvoir de diriger les affaires du pays n’appartient donc pas à une personne particulière, ni à une catégorie de personnes, ni à une classe sociale. La Constitution prévoit — second principe — que le pouvoir législatif est exercé par des représentations. En Belgique, la Constitution prévoit que les citoyens désignent des représentants qui exerceront une part importante du pouvoir législatif (c’est-à-dire le pouvoir de proposer et de voter les lois). Les représentants partagent d’ailleurs ce pouvoir avec le gouvernement qui, en plus de l’exercice du pouvoir exécutif, a aussi celui de préparer des projets de loi. Ces principes s’appliquent aussi au niveau des Régions et des Communautés où les textes législatifs s’appellent des décrets (ou, dans la Région de Bruxelles-Capitale, des ordonnances). On peut dire que les citoyens prêtent ou délèguent leur pouvoir législatif à des représentants qui agissent en leur nom. Les représentants exercent donc un pouvoir qui appartient à tous. Et enfin — troisième principe — la Constitution prévoit que ces représentants sont élus au suffrage universel. On pourrait imaginer bien des méthodes pour désigner des représentants. Seront-ils tirés au sort ? Seront-ils nommés à vie sur base d’un examen en sciences politiques ? Dans un régime démocratique, les représentants sont désignés au moyen d’une élection. Chaque 14
citoyen peut donc demander à ses concitoyens de lui faire confiance et de le choisir comme représentant, lors d’une élection organisée selon des règles précises. Les pouvoirs de l’Etat sont décentralisés : on trouve des représentants élus à plusieurs niveaux de décision politique : - au niveau fédéral, à la Chambre des représentants et au Sénat (qui forment ensemble le Parlement fédéral). C’est en ce sens que l’on parle de démocratie parlementaire ; - au niveau communautaire et régional, dans les Conseils (c’est-à-dire les parlements) de Communauté et de Région ; - au niveau provincial, dans les Conseils provinciaux ; - au niveau communal, dans les Conseils communaux. Le fonctionnement de la démocratie On dit parfois que les décisions politiques ont pour objet « l’intérêt de tous » et que des assemblées législatives se dégage une sorte de « volonté générale ». Cette idée est l’idéal ou la fiction sur laquelle est bâtie la démocratie. En réalité, les décisions sont rarement prises à l’unanimité. Et lorsqu’elles le sont, le consensus apparent cache souvent des motivations ou des interprétations très différentes. C’est qu’un régime démocratique est aussi, en pratique, une manière de « gérer », de réguler des conflits d’intérêts entre des groupes — classes sociales, agents économiques, groupes linguistiques, etc. — qui tentent d’imposer leur point de vue. Les 15
capacités d’intervention de ces différents groupes sociaux sont d’ailleurs très différentes et inégales. Un certain nombre de conditions doivent être réunies pour organiser concrètement l’exercice du pouvoir démocratique. Nous en évoquerons certaines ici. L’organisation distincte des pouvoirs En Belgique comme dans beaucoup d’autres pays, on ne peut pas parler de séparation des pouvoirs au sens strict. Il est plus exact de parler d’organisation distincte des pouvoirs. Le pouvoir législatif fédéral a trois branches : la Chambre, le Sénat et le Roi (c’est-à-dire le gouvernement). Tous trois peuvent préparer les textes qui seront discutés au Parlement. On les appelle des propositions de loi s’ils sont préparés par les députés ou les sénateurs, et des projets de loi s’ils sont préparés par le gouvernement. Le mécanisme est le même au niveau des Régions et des Communautés, mais dans ce cas il n’y a qu’un parlement (Conseil flamand, Conseil régional wallon) par entité au lieu de deux. Le pouvoir exécutif est exercé par les gouvernements au niveau fédéral, régional et communautaire, gouvernements qui participent donc à la fois au pouvoir législatif et au pouvoir exécutif. Quant au pouvoir judiciaire, il revient aux cours et tribunaux, dont les magistrats sont nommés par le gouvernement fédéral. 16
On voit donc le rôle central joué dans ce système de répartition des pouvoirs par les gouvernements. En Belgique comme dans beaucoup d’autres pays, on observe une autonomie ou une prééminence de plus en plus grande des gouvernements par rapport aux parlements. Souvent les parlements sont réduits à un rôle de chambre d’entérinement des décisions du gouvernement correspondant, même si on observe des tentatives récentes de revalorisation du rôle des parlements. La prise de décision Une assemblée législative où siègent des représentants élus n’est évidemment pas composée de personnes ayant toutes les mêmes opinions sur tous les sujets. L’unanimité ne pourrait se faire, la plupart du temps, que sur des questions très générales. Sur bien des questions, il est illusoire de vouloir faire l’unanimité. C’est la règle de la majorité qui est la plus généralement adoptée pour la prise de décision. Les opinions et les intérêts s’expriment à travers des groupes de pression ou des partis. Les partis politiques ont vu le jour très tôt dans la plupart des régimes démocratiques. Ces regroupements ne sont pas dus au hasard : ils reflètent des clivages réellement existants dans la société et peuvent être de nature idéologique, religieuse, linguistique, sociale… Les partis politiques existants en Belgique correspondent à des clivages de cet ordre.
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Pour qu’une assemblée législative puisse prendre une décision, il faut qu’elle puisse trouver en son sein une majorité favorable à un programme déterminé. Pendant tout le XIXe siècle et durant de brèves périodes du XXe siècle, un parti a pu avoir à lui seul la majorité absolue à la Chambre et au Sénat. Mais depuis l’introduction du suffrage universel (encore réservé aux hommes) en 1919, les majorités dégagées pour les décisions du pouvoir législatif sont obtenues au moyen de coalitions entre deux partis au moins. D’un autre côté, pour assurer une certaine stabilité au pouvoir exécutif, il est utile qu’il soit composé de la même manière que la majorité de la ou des assemblées législatives correspondantes. En Belgique, les exécutifs sont traditionnellement composés sur base d’un programme négocié entre partis formant une majorité par leur coalition. Dans un régime démocratique, la majorité dirige, mais ne peut imposer sa volonté sans respecter la minorité. Il ne s’agit pas là seulement d’une règle morale. Les règles de fonctionnement des assemblées permettent aux membres, donc aussi à la minorité, de disposer de certains droits : - le droit à l’information ; - le droit à l’interpelIation, c’est-à-dire le droit de demander des justifications sur des décisions en vue de les mettre éventuellement en cause ;
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- le droit de participer à des commissions d’enquête, chargées d’investiguer sur toutes matières ou événements susceptibles d’entrer dans le champ des décisions ; - le droit de faire des propositions de loi ou de décret et de déposer des amendements lors des discussions législatives. Les libertés fondamentales et individuelles La démocratie n’est pas seulement un régime politique au sens strict, mais aussi tout ce qui permet à ce régime de fonctionner, comme par exemple : - les libertés fondamentales : liberté d’association, d’enseignement, de culte, de presse, la liberté d’opinion et de conscience, etc. Certaines de ces libertés sont parfois interprétées de façon restrictive et ne sont pas exercées pleinement lorsque s’établit un régime démocratique. En Belgique par exemple, alors que la Constitution de 1831 accordait la liberté d’association, Ia liberté syndicale ne fut reconnue que beaucoup plus tard. - des garanties individuelles telles qu’elles sont définies par exemple dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 : l’égalité devant la loi et la justice, la garantie de ne pas être arrêté (sauf de façon non arbitraire dans les formes prévues par la loi), le droit de propriété, la non-violation du domicile, etc.
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NALYSE CRITIQUE
La démocratie n’est qu’un moment d’un mouvement qui jamais ne s’arrête. C’est un idéal exigeant, parfois porteur de valeurs contradictoires. Par exemple, la liberté éconornique ne répond pas nécessairement à l’attente de justice sociale et la solidarité peut exiger une restriction des libertés individuelles. Le plus beau titre de gloire d’une société démocratique, mais c’est aussi son talon d’Achille, c’est de permettre l’expression de toutes les opinions, même celles qui lui sont le plus opposées. Jusqu’où peut-elle aller dans la tolérance d’opinions ouvertement antidémocratiques qui menacent sa propre existence ? Bien des questions restent ouvertes et les solutions ne sont jamais que provisoires. Il importe dès lors de faire preuve de vigilance critique dans l’analyse des structures et du fonctionnement de la démocratie. Majorité et minorités Les systèmes démocratiques se basent sur le principe que les décisions sont prises par la majorité. Une critique 20
courante est que les solutions proposées par la majorité ne sont pas nécessairement les meilleures. On peut remarquer cependant qu’ici l’important n’est pas d’arriver à la meilleure solution, mais de refléter la volonté de la nation. Une décision politique n’est pas valable parce qu’elle est conforme à des opinions fondées idéologiquement a priori, mais parce qu’elle a été mise en débat et adoptée suite à une discussion sur l’intérêt général. Il existe d’ailleurs des correctifs prévus par le fonctionnement démocratique : les mandats sont temporaires et la minorité d’aujourd’hui peut être la majorité de demain, ce qui lui permettra de mettre en œuvre des réponses alternatives. D’autre part, le désir d’être réélue amènera la majorité à proposer des réponses qui respectent à la fois les attentes des populations et le réalisme politique. Un système à représentation proportionnelle, comme c’est le cas en Belgique, aboutit le plus souvent à des gouvernements de coalition. Aucun parti n’a la majorité absolue et chacun doit tenir compte de ses partenaires au gouvernement, souvent en sacrifiant une partie de son programme ou en oubliant certaines de ses promesses. Les politiques mises en œuvre ne refléteront jamais l’entièreté du programme d’un parti, mais résulteront toujours d’un compromis entre les différents partenaires. Toute autre est la situation de minorités ethniques, religieuses ou linguistiques qui n’ont guère de chances 21
d’accéder au pouvoir, mais qui ont droit au respect de leurs particularités. Un système démocratique doit en tenir compte et prévoir des mesures de protection adéquates. Ainsi, il est normal que des lois garantissent aux francophones en Belgique, comme aux flamands à Bruxelles, des droits plus importants que ne leur donnerait leur simple représentation numérique. Remarquons au passage que la communauté germanophone de Belgique est la minorité la plus protégée en Europe. On peut toutefois se demander si d’autres minorités, notamment celles d’origine extra-européenne, ont les mêmes possibilités de se faire entendre. Les risques du pouvoir L’exercice du pouvoir comporte en soi des risques de dérives contraires aux valeurs démocratiques. Le premier est lié au désir d’efficacité. Parce que la procédure devant les assemblées comporte beaucoup de lourdeur, la tentation est grande de les court-circuiter pour aboutir plus rapidement à une décision ; par exemple en votant des lois d’exception qui donnent tous les pouvoirs à l’exécutif dans certains domaines. Par l’adoption de loiscadres dans des domaines tels que l’Europe, la sécurité sociale ou l’emploi, un gouvernement empêche le Parlement d’exercer sa fonction de contrôle. Il confisque du même coup le débat public sur des questions qui concernent les citoyens au plus haut point. Pour justifier les pouvoirs spéciaux, le gouvernement invoque souvent la « situation de crise ». Par exemple, 22
pour lutter contre le terrorisme, certains voudraient voir adopter des lois d’exception, contraires à la protection de la vie privée et autorisant les écoutes téléphoniques, la fouille des coffres de voiture, des arrestations préventives, etc. Est-on bien certain que tout cet appareil antiterroriste ne pourrait pas un jour se retourner contre des opposants non terroristes, des journalistes ou des syndicalistes, notamment en cas de grèves gênantes pour le gouvernement ? S’il paraît légitime que nos pays s’organisent contre toute éventualité d’attentat, il est également important qu’ils veillent à doser leurs réactions dans un souci de respect de la démocratie et de protection de la vie privée. Il s’agit aussi pour la société civile de faire preuve de vigilance à l’égard des dispositions autoritaires, voire liberticides, de certaines lois anti-terroristes. Un autre risque résulte de conflits ou de confusions entre les différents niveaux de pouvoir. En principe, ils ne devraient pas empiéter les uns sur les autres, chaque échelon assumant ses propres compétences. Ainsi, ce qui est attribué par la loi au niveau communal n’est pas du ressort des provinces, des régions, des communautés ou de l’Etat fédéral. Il faut donc donner à chaque niveau les moyens de sa politique et éviter que des décisions prises à un niveau supérieur n’empiètent sur les budgets ou les autres prérogatives de niveaux qui n’ont eu aucune part à la décision. Si la tentation d’empiéter sur les compétences des autres est bien réelle, on peut noter, à l’inverse, le désir de se décharger sur d’autres pouvoirs de matières ou de dossiers 23
difficiles ou peu porteurs vis-à-vis des électeurs, comme l’accueil des réfugiés ou la gestion de la politique d’immigration. L’éthique du pouvoir L’éthique du pouvoir demande que l’élu exerce son mandat pour le bien du plus grand nombre, en tant qu’élu de la nation et pas seulement comme représentant d’une circonscription particulière ou d’un groupe d’intérêts particuliers. Il faut bien constater que ce n’est pas toujours sa première préoccupation. L’élu peut être tenté de profiter de son mandat pour en tirer des avantages personnels, pour favoriser ses proches ou pour placer des membres de son parti à des endroits stratégiques. Enfin, plus préoccupé de sa réélection que du bien général, il aura parfois tendance à privilégier les vues ou les intérêts particuliers de ses électeurs. Ceux-ci, de leur côté, se feront surtout entendre lorsque l’intérêt général, le bien commun imposent à une communauté locale des devoirs ou des désagréments importants, dus par exemple au traitement des déchets ou à la proximité d’un aéroport. Dans ce cas le principe NIMBY (Not In My BackYard, « pas dans mon jardin ») est d’application et il n’est pas facile pour les élus locaux de prendre un peu de hauteur pour évaluer le problème objectivement. On remarque aussi que bien souvent l’élu éprouve des difficultés à tenir les promesses du candidat. L’exercice du pouvoir, surtout en coalition avec d’autres, réduit singulièrement les marges de manœuvre, ce qui n’em24
pêchera jamais certains de faire les promesses les plus démagogiques. Faire le bon choix entre programme raisonnable et promesses irréalistes demande donc du citoyen une bonne capacité de discernement. Le citoyen La démocratie ne s’impose pas par la vertu de mécanismes qui lui seraient propres ; elle a besoin de citoyens qui, la vivant en eux, la font vivre pour tous, de citoyens capables de dépasser leurs intérêts privés pour tenir compte de l’intérêt de la société. L’éloignement entre le citoyen et ses représentants ainsi que la complexité des niveaux de pouvoir, tant au niveau national que supranational, entraînent l’incompréhension et le désintéressement des citoyens pour la politique, désintéressement qui se marque notamment par un grand nombre d’abstentions surtout dans les pays où le vote n’est pas obligatoire. L’écart entre ceux qui prennent les décisions et ceux qui en subissent les conséquences au quotidien entraîne des incompréhensions et des maladresses dans l’application de certaines décisions politiques. Si le décideur se donnait la peine d’écouter ceux qui sont concernés par la mise en œuvre de son projet et tenait compte de leur expérience de terrain, il s’épargnerait des échecs. La plupart des réformes dans l’enseignement secondaire des dernières décennies, concoctées au niveau des cabinets ministériels ou des bureaux pédagogiques 25
sans concertation avec les enseignants, n’ont pas abouti aux résultats souhaités. Un autre danger est que la délégation de pouvoir aux élus n’entraîne la démission du citoyen dans nombre de secteurs, dans la mesure où il estime que la responsabilité n’est plus la sienne, mais entièrement celle des gouvernants, à quelque niveau qu’ils se situent. « Je ne dois plus entretenir mon trottoir, c’est à la commune de le faire », ce qui lui donne le droit de se plaindre amèrement de la malpropreté de la ville alors qu’il ne fait rien pour améliorer la situation. Elire des représentants, ce n’est pas leur remettre un chèque en blanc pour toute la durée de leur mandat. Cela implique aussi de contrôler leur action par tous les moyens possibles. Le citoyen ne profite pas assez des possibilités offertes par le fonctionnement démocratique pour manifester son opinion, notamment en participant aux consultations organisées sur les projets de développement de sa ville, en faisant connaître son opposition à certaines options, en proposant des alternatives par des manifestations ou en s’associant à des comités de quartiers ou à d’autres organisations. Il y a un risque d’affadissement de l’idéal démocratique s’il ne désigne plus qu’un mode de vie collective où le pouvoir repose sur l’acceptation des citoyens mais n’est pas contrôlé par eux. Dans cette optique l’éducation des futurs citoyens est fondamentale.
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L’école pourrait être un instrument clé de développement démocratique. Elle pourrait s’impliquer davantage dans la formation à la citoyenneté, notamment en formant à l’utilisation des médias et au décryptage de l’information, en développant les conseils de participation ou en encourageant toute la communauté scolaire à prendre part au plus grand nombre possible des décisions qui la concernent (locaux, équipements, horaires, transports, cantine…) sans oublier une formation théorique sur le sujet. Il existe encore bien des lieux où le citoyen devrait saisir des occasions de s’exercer à la démocratie et de participer aux prises de décision. Dans les organisations et associations dont il fait partie, se contente-t-il de suivre quelque leader ou prend-il ses responsabilités, en participant aux assemblées, en faisant des propositions, en exprimant ses opinions ? Même si les entreprises ne sont pas, par nature, des organisations démocratiques, il y existe des espaces ouverts à la concertation comme les conseils d’entreprise et les comités de sécurité et d’hygiène ; ne pourraiton aussi y vivre certaines formes de démocratie participative ? De manière générale, pour accéder à un niveau de fonctionnement démocratique, il faut que les besoins élémentaires du citoyen soient assurés : minimum pour vivre humainernent, logement, nourriture, sécurité, soins de 27
santé. Sans ce minimum, il est bien difficile à quiconque d’user de sa liberté de citoyen. C’est au pouvoir politique de garantir ce minimum vital pour tous, au besoin en s’impliquant dans l’organisation économique et sociale. Démocratie et réalisme économique La démocratie implique que les gouvernants élus par la nation soient mandatés pour décider souverainement de la politique d’un pays dans tous les domaines. Or une pensée largement dominante prétend qu’il existe des « lois économiques » qui s’imposent à tous — on parle de globalisation — et qu’il faut s’y soumettre. Au nom de ces « lois », la politique économique d’un pays est soumise aux diktats d’organismes supranationaux comme l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), la Banque Mondiale ou le Fonds Monétaire International (FMI), plus soucieux de croissance économique que de progrès social et culturel. La tentation est grande de s’abriter derrière ces «lois» et ces organismes pour justifier des décisions contraires à la justice sociale ou le non-respect d’un programme ou de promesses électorales. Ce qui fait problème ici, c’est la distance entre ces organismes supranationaux non démocratiques et les citoyens affectés par leurs décisions. En outre, dans le domaine de l’économie, les gouvernements et les syndicats ont accepté la délégation au privé du pouvoir de décision. Beaucoup de citoyens ont le sentiment que les décisions sont prises au-dessus de leur tête et s’inquiètent de l’augmenta28
tion des inégalités. Faute de relais démocratiques fiables, il ne leur reste que le recours à des manifestations pour faire connaître leur opposition. Quant à ceux qui se rallient à la «raison économique», ne devraient-ils pas s’interroger sur les motifs réels de leur refus d’envisager des alternatives aux diktats économiques ? Ne serait-il pas temps, dans le débat autour de la mondialisation, de faire une plus large place à ceux qui refusent, au nom des valeurs démocratiques de justice et de solidarité, de sacrifier les acquis sociaux aux contraintes de la croissance et de la rentabilité ? Les impératifs de la finalité humaine sont au moins aussi rigoureux que ceux de la raison marchande. L’économie, activité de transformation de la nature visant à satisfaire les besoins des hommes, n’a de sens que par rapport à la promotion de l’humain. Le secteur public manque à son devoir démocratique quand il tolère des fusions, acquisitions ou concentrations susceptibles de remettre entre les mains d’intérêts particuliers des pouvoirs parfois supérieurs à ceux de l’Etat. Particulièrement quand ce libéralisme économique, non content de marginaliser et de fragiliser de larges couches de la population, vise dans le même temps à freiner et à limiter l’action de l’Etat dans sa fonction de redistribution des richesses par la voie de l’impôt et des aides sociales. Par contre, un pouvoir démocratique se doit de favoriser des activités dont la rentabilité est d’ordre social (emploi, environnement, développement 29
durable) et de long terme et pas uniquement de profit. C’est au pouvoir démocratique qu’il incombe d’assurer la suprématie des valeurs sociales et culturelles sur les valeurs marchandes. Le citoyen est souvent tenté de se laisser envahir par un sentiment de défaite : il sait qu’il ne pèse pas lourd face aux impératifs économiques. Mais est-il vrai que nous n’avons le choix qu’entre deux formes de déclin : économique ou social et politique ? Faut-il nécessairement opposer les exigences de l’efficacité économique et celles du développement humain ? Comme si ce qui était gagné sur le plan du respect de l’humain était toujours perdu en terme de rentabilité économique. Pour sortir de ce dilemme, il faudrait poser une sorte d’acte de foi démocratique en un dynamisme capable de dépasser les oppositions paralysantes entre l’efficacité et la justice sociale. Ce n’est pas nécessairement l’un ou l’autre. Un peu plus d’humanité peut aussi être une condition et un effet bénéfique d’une gestion économique plus efficace.
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ROSPECTIVE ET DÉFIS
La démocratie est donc une valeur dont le concept et l’application évoluent. L’analyse faite au chapitre précédent en a montré certaines faiblesses ainsi que les menaces qui pèsent sur elle. Quels sont aujourd’hui les défis à relever et les éléments susceptibles d’y apporter une réponse ? L’abus de pouvoir La tentation du pouvoir comme domination plutôt que service est toujours présente chez ceux qui ont été élus. Formellement, le « pouvoir du peuple » ne s’exerce réellement qu’à intervalles plus ou moins réguliers : élections politiques, renouvellement de mandats dans les associations, etc. Entre deux échéances électorales, les élus ont généralement les mains fort libres. Ceux-ci sont alors bien souvent tentés, vu l’évolution rapide des situations, de prendre des décisions personnelles qui ne reflètent pas nécessairement les perspectives qu’ils ont annoncées avant leur élection. Lorsque de telles déci31
sions s’accumulent, on parle de dérive, mais il faut généralement que l’élu ait commis une faute grave pour qu’il soit mis fin à son mandat. Des instruments officiels existent pour éviter cela — Cour des Comptes, Conseil d’Etat, opposition parlementaire, commissions d’enquête, etc. —, mais ne sont pas toujours aussi efficaces qu’on le souhaiterait. Il y a aussi la presse que l’on qualifie communément de quatrième pouvoir mais son impact, quoique réel, est sporadique et ponctuel, et pas toujours indépendant. Un phénomène porteur d’espoir, à notre avis, est la montée en force de ce qu’on appelle la « société civile ». Celle-ci se compose de citoyens qui se regroupent en associations, syndicats, ONG (Organisations Non Gouvernementales). Chacun de ces groupes se donne un objectif particulier qu’il poursuit de manière permanente. Cet objectif peut être local : un comité de quartier qui milite pour la qualité de la vie dans un périmètre déterminé. Il peut aussi être international, c’est le cas de ATTAC (Association pour la Taxation des Transactions financières et l’Aide aux Citoyens) ou d’Amnesty International qui lutte contre la torture dans tous les pays où elle se pratique encore. Il peut être mondial, tel le mouvement pour une autre mondialisation qui proteste à Seattle en 1999 et fait des propositions pour un autre modèle de société mondiale à Porto Alegre (2000 et 2002). Les différentes composantes de cette société civile sont de plus en plus reconnues par les autorités 32
officielles, y compris celles de l’ONU, vu leur expérience de terrain à propos d’enjeux de société très divers. La société civile s’implique dans le fonctionnement démocratique en suscitant le débat public. Ceci se fait sous forme de colloques, assises et autres manifestations. Elle dépasse les oppositions classiques et opère des synthèses, notamment entre la liberté du marché et l’Etat providence, entre les valeurs de liberté et de solidarité. Elle ouvre aussi des possibilités inédites de fonctionnement démocratique et permet aux citoyens de continuer à exercer le contrôle du pouvoir, contribuant à éviter les dérives citées plus haut. L’abandon de pouvoir Peut-être pire que l’abus de pouvoir, un certain « abandon du pouvoir » semble être une menace grave pour la démocratie. Pensons ici non seulement aux compromis que bien des élus disent inévitables, mais surtout à ce qui pourrait devenir un fatalisme devant la domination économique, « les lois du marché ». L’idéal de la démocratie est de donner le pouvoir au peuple. Il s’agit d’atteindre le « bien commun », c’est-àdire la vie la meilleure possible pour le plus grand nombre si pas pour tous. Il n’est pas démontré que le « tout à l’économie » soit la meilleure voie à suivre. Le contraire pourrait être vrai.
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Quels éléments de « contre pouvoir » voit-on émerger qui renforceraient la démocratie et la recherche du bien commun face à la domination de l’économique ? Le mouvement pour une autre mondialisation cité plus haut en est un. Ce mouvement est constitué d’un très grand nombre d’associations diverses qui se rejoignent sur des propositions de changement global de fonctionnement économique de notre société. Les syndicats suivent le mouvement d’internationalisation de la vie économique et s’organisent de mieux en mieux aux niveaux continental et mondial, luttant pour une amélioration de l’emploi et des conditions de travail. Plus proches de nous, des entreprises dites « d’économie sociale » ou « à finalité sociale » démontrent la pertinence d’un fonctionnement différent de celui des « lois du marché » en donnant priorité à la personne, à l’emploi, à un fonctionnement démocratique au sein de l’entreprise plutôt qu’au profit. De même, des associations reposant essentiellement sur la collaboration de bénévoles témoignent d’une solidarité qui donne sens à la vie. Ces associations répondent à des besoins, parfois nouveaux, que l’Etat ne couvre pas et interpellent les politiques à ce sujet. Il n’en reste pas moins vrai que le bien commun serait mieux servi par un pouvoir politique plus fort pour résis34
ter aux pressions du marché grâce au soutien d’une large base démocratique. Ceci suppose un effort d’éducation à la démocratie et à la citoyenneté. Conclusion L’abus de pouvoir d’un côté et l’abandon de pouvoir de l’autre semblent être les deux principaux défis à relever pour assurer le développement de la démocratie. Il y en a bien sûr beaucoup d’autres comme l’indique l’analyse faite au chapitre précédent. Ces défis sont d’ordres très différents, depuis une question de fond telle que : « Jusqu’où la démocratie doit-elle défendre le droit à l’expression de groupes ou partis qui veulent abolir la démocratie ? » jusqu’à des questions plus pratiques du style : « Elections proportionnelles, majoritaires, ou un mélange des deux ? » Les réponses à ces questions ne sont ni évidentes ni définitives. Elles varient selon les époques et les lieux, les cultures. Si l’idéal démocrate semble être universel, son mode d’application est essentiellement contingent des circonstances de lieu et de temps. Ne rêvons donc pas d’une démocratie parfaite, uniforme dans l’espace et immuable dans le temps. La démocratie est à construire chaque jour et cette construction est la responsabilité de chacun et de chacune d’entre nous.
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’ÉGLISE CATHOLIQUE ET LA DÉMOCRATIE
Notre groupe « Démocratie dans l’Eglise » s’est donné pour objectif de promouvoir un fonctionnement plus démocratique de l’institution Eglise catholique. Il nous a donc semblé naturel d’examiner plus en détail comment fonctionne la démocratie dans cette institution. Le cas nous a semblé d’autant plus intéressant que l’Eglise a joué un rôle précurseur dans le développement de la démocratie en Occident, notamment à ses débuts et sous l’impulsion des grandes congrégations religieuses, et qu’elle semble aujourd’hui accuser un déficit démocratique par rapport à la société. Dès l’an 529, saint Benoît a édicté une règle utilisée encore aujourd’hui par les Bénédictins et les Cisterciens. L’élection de l’abbé se fait collégialement par le chapitre conventuel, le consentement de ce dernier étant également requis sous forme d’un vote à la majorité absolue pour des actes importants tels que l’admission de novices ou pour créer une nouvelle fondation. Actuellement, le mandat de l’abbé est limité à six ans. 36
La règle très démocratique des Dominicains (ordre fondé en 1206) a souvent servi de modèle à l’organisation des communes qui, au Moyen Age, avaient réussi à obtenir de leur seigneur suzerain des chartes leur accordant une certaine autonomie. On peut se demander dans quelle mesure l’Eglise catholique doit être une démocratie. Comme l’écrivait récemment le théologien Maurice Jourjeon de Lyon, « L’Eglise est et reste une christocratie qui établit la souveraineté du Christ par le Peuple de Dieu ». Rien n’empêche cependant son fonctionnement d’être démocratique, elle y gagnerait en crédibilité. Evolution récente Si les premières communautés chrétiennes fonctionnèrent de manière très démocratique, cette façon de faire se perdit rapidement avec son institutionnalisation qu’elle copia sur le modèle de l’empire romain. Sous l’empereur Justinien (527-565), l’Eglise coïncidait avec l’empire. Cet état de choses se perpétua, au travers d’alliances et de conflits avec le pouvoir civil, tout au long du Moyen Age et des « monarques de droit divin ». Le concile Vatican Il (1962-1965) se voulut un aggiornamento de l’Eglise. Il réhabilita la notion de « peuple de Dieu » auquel il donna priorité par rapport à la hiérarchie. Il encouragea aussi les chrétiens à « lire les signes des temps », condition indispensable si l’on veut annoncer la Bonne Nouvelle de Jésus Christ à ses contemporains. 37
Dès les années 1970, des prêtres novateurs mirent en place des équipes pastorales, des conseils paroissiaux et des conseils décanaux. En 1989, le Vicariat francophone de Bruxelles publiait une brochure intitulée Paroisses coresponsables qui eut un grand retentissement. Cette brochure invitait tous les chrétiens, prêtres, religieux et laïcs, à participer aux structures mises en place après le concile. Des initiatives semblables furent prises dans bon nombre de diocèses. La nécessité de ces structures de coresponsabilité était rendue encore plus apparente par la pénurie croissante (à partir de 1968) des vocations sacerdotales et religieuses. La situation actuelle Cet engouement pour la coresponsabilité donna des résultats disparates. Tel curé de paroisse se considéra comme un membre parmi d’autres de son équipe pastorale alors que son collègue de la paroisse voisine disait à son équipe : « Je vous consulte, vous dites ce que vous voulez mais c’est moi qui décide. » De même, tel évêque organisait un synode diocésain alors que tel autre « régnait » toujours depuis son palais épiscopal. « Le synode diocésain est la réunion des prêtres et diacres et des autres fidèles de l’Eglise locale, choisis pour apporter leur concours à l’évêque diocésain pour le bien de la communauté diocésaine tout entière » (Art. 460 du code de droit canonique). Cette réunion se prépare durant plusieurs années, les sessions plénières réunissant parfois six cents personnes. 38
Comme on pouvait s’y attendre, les diverses avancées démocratiques ont suscité des oppositions. Pour certains, vouloir réorganiser le fonctionnement de l’institution, c’était toucher au sacré. Historiquement, l’Eglise semble avoir sacralisé beaucoup de choses et notamment le pouvoir. Cela repose entre autres sur le dogme de l’infaillibilité pontificale voté en hâte lors du concile Vatican I en 1870, au moment où se déclenchait la guerre franco-allemande. Pour d’autres, l’Eglise n’est pas une démocratie et donc toute tentative de démocratiser son fonctionnement est nulle et non avenue. Certes, ni le dogme ni la Révélation ne sont objets de vote par le peuple. Nous pensons néanmoins que certaines manières d’agir et de gérer l’institution gagneraient beaucoup à se démocratiser. En voici quelques exemples. Le pouvoir du pape Celui-ci est absolu et sans appel. Comme le précise le droit canonique : « Il possède dans l’Eglise, en vertu de sa charge, le pouvoir ordinaire, suprême, plénier, immédiat et universel qu’il peut toujours exercer librement » (canon 331) et « contre une sentence ou un décret du Pontife romain, il n’y a ni appel ni recours » (canon 333). En 1941, année marquée par l’apogée des dictatures hitlérienne et fasciste, le pape Pie XII déclara que la démocratie était le meilleur régime politique. Pour sa part, Jean-Paul Il lui-même préconise la sépara39
tion des pouvoirs : « L’organisation de la société en trois pouvoirs reflète une conception réaliste de la nature sociale de l’homme qui requiert une législation adaptée pour protéger la liberté de tous. Dans cette perspective, il est préférable que tout pouvoir soit équilibré par d’autres pouvoirs et par d’autres compétences qui le maintiennent dans de justes limites » (encyclique Centesimus annus, chap. V, § 44). Au paragraphe 46, le pape ajoute : « L’Eglise apprécie le système démocratique comme celui qui assure la participation des citoyens aux choix politiques et garantit aux gouvernés la possibilité de choisir et de contrôler leurs gouvernants ou de les remplacer de manière pacifique lorsque cela s’avère opportun. » On peut donc espérer que l’Eglise appliquera un jour ces excellents principes dans son fonctionnement interne. Les évêques Sans avoir, bien sûr, les mêmes pouvoirs que le pape, l’évêque exerce cependant aussi les trois pouvoirs : législatif, exécutif et judiciaire. Des Conseils diocésains (décrits en détail dans le droit canonique) sont mis en place un peu partout mais sans voix délibérative, ce qui limite singulièrement leur efficacité. De plus, l’évêque est nommé à vie (limite d’âge de 75 ans) et ne peut être démis que par le pape. Les évêques sont nommés par le pape après consultation restreinte menée par l’archevêque et le nonce apostolique du pays concerné. De plus, avant d’être nommé, le futur évêque doit émettre sa profession de foi (ce qui 40
est normal) et prêter serment de fidélité au Siège apostolique, ce qui revient à soumettre sa volonté et son intelligence à celles du pape (ce qui est contestable). Les curés de paroisse Ici, la situation est très diversifiée. Certains curés s’intègrent très bien dans leur Equipe pastorale pour gérer la paroisse. D’autres se considèrent toujours comme « seuls maîtres à bord après Dieu » et découragent ainsi toute collaboration effective des laïcs prêts à s’engager. Des conseils paroissiaux ou équipes pastorales sont généralement mis en place mais, encore une fois, leur véritable implication au niveau des responsabilités est très variable. Quelques propositions Les évêques Rien n’empêche de mener une large consultation auprès des diocésains d’un futur évêque. Tout en laissant la décision finale au pape, une telle consultation éviterait des nominations arbitraires créant des conflits avec les forces vives du diocèse. Ceci serait d’ailleurs conforme au principe énoncé notamment par le pape Célestin 1er (422-432) : « Le consentement du clergé, l’approbation des ordres monastiques et des laïcs sont requis : il faut que celui qui gouverne soit choisi par tous. » C’est ainsi que jusqu’au XIe siècle, beaucoup d’évêques ont été nommés par élection, comme cela se vit encore dans les Eglises orientales catholiques. 41
Tout en maintenant l’âge limite de 75 ans, un système de mandats (2 ou 3 x 6 ans par exemple) pourrait être mis en place permettant une évolution salutaire dans l’adéquation entre l’évêque et ses diocésains. La composition des Conseils diocésains devrait être repensée en vue d’améliorer leur représentativité et la compétence de leurs membres. De tels Conseils pourraient avoir voix délibérative en certaines matières, parmi celles-ci, la désignation des prêtres candidats à l’épiscopat parmi lesquels le pape nomme le nouvel évêque. Cette procédure est utilisée actuellement pour la nomination des évêques des Eglises orientales rattachées à Rome. Chaque évêque devrait organiser au moins un synode diocésain (dont les conclusions sont contraignantes) au cours de son mandat. Il devrait aussi élaborer avec l’aide de son Conseil pastoral un projet pastoral avant de le soumettre à l’approbation des diocésains. Le « serment d’allégeance » devrait être modifié ou même supprimé, rendant ainsi à chaque évêque sa liberté de pensée et de parole. Enfin, la responsabilité des Conférences épiscopales devrait être reconnue et encouragée par le Magistère. Les paroisses et les doyennés « Ne vous faites pas appeler maître, car vous n’avez qu’un seul maître et vous êtes tous frères » (Mt 23, 8).
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Jésus de Nazareth a, le premier, promu les liens de fraternité entre ses disciples, hommes et femmes qui leur confèrent une égale dignité (celle de fils et filles de Dieu) et les mêmes droits (accès au Royaume de Dieu). D’autre part, Jésus a révélé que Dieu est un mais en trois personnes. Cette révélation, spécifique à la religion chrétienne, est à la base du concept de l’Eglise-Communion, concept remis en valeur par Vatican Il. La communion définit en effet la nature des relations existant entre les trois personnes divines qui devraient être prises comme modèle par les disciples de Jésus Christ. La communion entre des personnes implique qu’il y a entre elles dialogue, écoute, liens de fraternité et de solidarité. C’est sur base de cet idéal «religieux» que nous préconisons un fonctionnement démocratique dans l’Eglise catholique. Comme nous l’avons indiqué précédemment, les valeurs de base de la démocratie comprennent précisément celles de la fraternité et de la reconnaissance de l’égalité en droit et en dignité de tous les êtres humains (Art. 1 de la Déclaration Universelle des droits humains de 1948). Ces valeurs sont en concordance avec ce que nous appelons les valeurs évangéliques. Dans l’Eglise, un système qui réalise ce fonctionnement démocratique se nomme « synodalité ». Ce terme vient du grec synodos qui veut dire « marcher ensemble ». Cette communion implique le dialogue (parler ensemble) et l’exercice de la coresponsabilité (élaborer et exécuter ensemble les décisions). Ces principes pourraient être appliqués à tous les niveaux depuis les paroisses, les doyennés, les diocèses jusqu’à 43
l’Eglise universelle sans porter atteinte ni à son être ni à sa mission… A titre d’illustration, nous décrirons brièvement le fonctionnement synodal de l’Eglise anglicane. Il y a dans chaque paroisse une assemblée paroissiale et un conseil paroissial (comme dans bon nombre de nos paroisses). Pour faire partie de l’assemblée paroissiale, les laïcs doivent être inscrits sur la liste électorale, c’est à dire répondre aux critères suivants : avoir au moins 17 ans, être baptisé, être pratiquant, bref être un chrétien de réputation établie. C’est cette assemblée qui élit les membres laïcs du conseil paroissial et du synode décanal. Le conseil paroissial est l’organe administratif principal de la paroisse grâce auquel le laïcat peut participer avec le clergé (dans une relation de partenariat) au gouvernement de l’Eglise locale. Avant qu’un prêtre soit nommé curé dans une paroisse, il doit, après une période probatoire de six mois à un an, être accepté par le conseil paroissial. Les délégués des paroisses d’un même doyenné se retrouvent au synode décanal (celui-ci a des fonctions mieux définies que celles de nos conseils décanaux dont beaucoup n’ont ni projet pastoral ni statuts reconnus). Le synode décanal anglican promeut toutes les activités liées à la mission de l’Eglise. Pour les décisions importantes, il se réunit en deux « chambres », celle des laïcs et celle du clergé. Il faut, pour les décisions importantes 44
n’ayant pas été acquises par consensus, une majorité des deux tiers des voix dans chaque chambre pour adopter une proposition. Le synode décanal a également comme fonction de transmettre aux paroisses les questions qui lui sont confiées par le synode diocésain. Les délégués des synodes décanaux complétés par l’évêque et ses collaborateurs immédiats (chez nous les vicaires généraux et épiscopaux) ainsi que des représentants des facultés de théologie, aumôniers etc. constituent le synode diocésain. Celui-ci, pour les décisions importantes, se réunit en trois chambres : celle des évêques, du clergé et des laïcs. Cela revient, notamment, à accorder le droit de veto à chacune des trois chambres. Enfin, les délégués de synodes diocésains se retrouvent au synode général de l’Eglise anglicane qui est l’organe suprême de gouvernement. Il faut constater que les laïcs présents dans ces différents organes sont élus par la base et pas désignés par « le haut ». Certes, pour promouvoir un fonctionnement plus démocratique dans notre Eglise, il n’est pas requis de copier le système anglican ou celui des autres Eglises issues de la Réforme. Par contre, notre Eglise pourrait s’en inspirer largement puisque c’est un système éprouvé depuis plusieurs siècles. Dans l’Eglise aussi, toute avancée démocratique est de la responsabilité de tous, c’est-à-dire de chacune et de chacun d’entre nous, membres du peuple de Dieu. 45
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ONCLUSION
La démocratie est donc un idéal vers lequel tendre, un concept qui évolue dans le temps et se diversifie dans l’espace. Elle est toujours à construire, tout comme l’Eglise est semper reformanda. La démocratie étant le pouvoir du peuple, c’est celui-ci qui en déterminera l’évolution. Tout progrès démocratique viendra de la base, c’est-à-dire de chacune et chacun d’entre nous, très concrètement là où nous sommes. Pour qui veut aller plus loin dans la réflexion et faire avancer la démocratie, il pourrait être intéressant de comparer différents sytèmes de gouvernement en différents lieux ou à différentes époques. Afin de faciliter cette comparaison, voici une grille d’analyse limitée à cinq paramètres applicables aux différents champs de l’activité humaine : - les valeurs fondamentales (droits humains, liberté…) ; - les libertés et droits personnels (éducation, mariage…) ; - les droits des citoyen(ne)s (vote, association…) ; 46
- l’exercice du pouvoir (législatif, exécutif…) ; - le statut des dirigeants (régimes présidentiel, parlementaire…). Cet exercice permet de mieux percevoir les avancées possibles aujourd’hui et la contribution que chacun peut y apporter.
ÉLÉMENTS DE BIBLIOGRAPHIE • Centre de Recherche et d’Information Socio-Politique (CRISP), 35, rue du Congrès, 1000 Bruxelles. www.crisp.be • Encyclopædia Universalis : article « Démocratie ». • Internet : « Démocratie » dans un moteur de recherche. Documents ecclésiastiques • Jean XXIII, Pacem in terris (différentes éditions). • JEAN-PAUL II, Lettre encyclique Centesimus Annus, Paris, Cerf, 1989. • SESBOÜÉ Bernard, s.j., Le magistère à l’épreuve, Paris, DDB, 2001. • Code de Droit Canonique annoté, Paris, Cerf, 1989. • BIHIN G. ; VAN VLAENDEREN Ph., Gouverner l’Eglise autrement ? Pour une Eglise-Communion, Bruxelles, EVO, 1998. • CREFOT, Recherche no 81, décembre 2001, 49/3, rue Dr Grégoire, 7100 La Louvière. • Groupe de Recherche et d’Animation en Paroisse (GRAP), Paroisses coresponsables, Vicariat de Bruxelles, 14, rue de la Linière, 1060 Bruxelles.
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ABLE DES MATIÈRES
Introduction 1. Qu’est-ce que la démocratie et comment a-t-elle évolué ? 2. La démocratie aujourd’hui en Belgique 3. Analyse critique 4. Prospective et défis 5. L’Eglise catholique et la démocratie Conclusion
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Ce cinquantième numéro de la collection « Que penser de… ? » a été rédigé par des membres du groupe Démocratie dans l’Eglise : Georges Bihin, Anne Brisbois, Gerda et Pierre Compère, Tony Dhanis, Jean Legein et Denise Loute.
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a démocratie est une notion relative dont les applications peuvent varier selon les époques et les pays. Elle est un ensemble de valeurs dont la forme évolue au cours du temps et varie avec les cultures. Où en sommes-nous aujourd’hui, quelles sont les forces et les faiblesses du système, les points à améliorer ? Quels dangers guettent la démocratie, comment remédier à certaines lacunes et éviter les écueils ? L’Eglise, quant à elle, n’est pas une démocratie politique. Mais ne doit-elle pas adopter des manières de faire démocratiques ?
Que penser de… ? - No 50 15 mars 2002 Ce numéro a été rédigé par « Démocratie dans l’Eglise » Dossiers sur des questions actuelles Trimestriel - Namur 1 ISBN 2-87356-225-0 PRIX TTC : 1,95 €
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Editions idélité 61, rue de Bruxelles B-5000 Namur