Comment arrêter le cycle de violence dans les familles, les écoles, les banlieues ? Il y a aussi les violences plus cachées : la parole qui écrase, le mépris ou l’ignorance de celui qui est dans le besoin. Ces questions sont abordées avec intelligence et foi dans ce livre que j’ai lu avec passion. Je le trouve si vrai, si abordable et en même temps très pratique : comment aimer mon ennemi, celui qui semble menacer ma liberté ? […] Jésus nous enseigne une voie de vérité et d’amour. Les auteurs nous invitent à nous risquer sur cette voie. Le commandement de Jésus « Aimez vos ennemis » n’est pas une option. C’est un commandement et nous savons qu’il est assorti d’une promesse : il nous donnera la force pour le réaliser. Mais pour cela, nous devons faire un travail sur nous-mêmes ; il faut changer notre regard sur l’autre, l’ennemi. L’avenir de nos sociétés dépend du désir de chacun de nous laisser transformer par le message de Jésus pour devenir son instrument de vérité et de paix. Jean Vanier, extraits de la Préface
Benoît & Ariane Thiran-Guibert Mariés en 1988, ils ont trois enfants. En 1992, travaillant dans un projet de développement en Amérique du Sud, ils sont interpellés par la problématique de la violence et de l’injustice et décident de se former à la non-violence active. De retour en Europe, ils créent l’association « Sortir de la Violence » pour se mettre au service des personnes qui portent en elles le désir d’agir face à la violence. Ils ont publié aux éditions Fidélité Jésus non-violent, t. 1 (2010), t. 2 (2011) et t. 3 (2014). ISBN : 978-2-87356-685-2 Prix TTC : 16,95 €
Une production Sortir de la Violence ASBL
9 782873 566852 2e édition
Benoît & Ariane Thiran-Guibert
Entrer dans l’Evangile pour
sortir de la violence
Entrer dans l’Evangile pour sortir de la violence
Entrer dans l’Evangile pour sortir de la violence
Benoît & Ariane Thiran-Guibert
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Préface de Jean Vanier
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Une production Sortir de la Violence ASBL.
Édition originale : © Éditions Fidélité, 2006 Présente édition : © Éditions jésuites, 2015 Belgique : 7, rue Blondeau, 5000 Namur France : 14, rue d’Assas, 75006 Paris info@editionsjesuites.com • www.editionsjesuites.com Dépôt légal 1re édition : D.2006, 4323.03 Dépôt légal 2e édition : D.2015, 4323.28 ISBN 1re édition : 2-87356-339-7 ISBN 2e édition : 978-2-87356-685-2 Imprimé en Pologne Maquette et mise en page : Jean-Marie Schwartz Dessin de couverture : D.R.
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Benoît & Ariane Thiran-Guibert
Entrer dans l’Evangile pour
sortir de la violence 2e édition revue et augmentée
fidélité
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« Retournez-la sur toutes ses coutures : la violence, c’est le suicide de l’homme. Seule la non-violence, enchâssée sinon cachée dans presque toutes les traditions religieuses et philosophiques, conduit à l’espoir. » Mahatma Gandhi
Nous tenons à remercier tous ceux qui nous ont accompagnés sur notre chemin dans la non-violence et dans la foi, et grâce à qui ce livre et notre travail actuel sont devenus possibles. Merci particulièrement à Shuyana, Sara et Paolo, nos enfants, nos parents, nos frères et sœurs, Isabelle et Alexis, Isabelle et Bruno et leurs enfants, Jean & Hildegard, Jo, Géry, Mieke, Agnès et Thierry, Stéphanie, Françoise et toutes les personnes engagées avec nous dans l’association Sortir de la Violence, André, Julio, Michèle, Franck, Florin, Roger, Jean, Jean-Pierre, tous nos amis équatoriens, Jean Vanier et nos amis de l’Arche, ceux de la communauté de La Viale et des Fraternités du Bon Pasteur tous nos prédécesseurs dans la non-violence qui nous inspirent chaque jour et merci surtout à Toi, Créateur nous créant sans cesse, Semeur infatigable, Veilleur prévenant, Maître de la moisson.
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Préface
de Jean Vanier
Comment arrêter le cycle de violence dans les familles, les écoles, les quartiers et les banlieues des grandes villes ? La violence entre ethnies et entre groupes religieux, la violence terrifiante de la guerre, et celle plus terrifiante encore des génocides ? Il y a aussi les violences plus cachées : le refus d’accueillir celui qui est différent, la violence faite à l’enfant tué dans le sein de sa mère, la parole qui écrase, le mépris ou l’ignorance de celui qui est dans le besoin, la violence par rapport aux personnes plus faibles qui appellent au secours et nous dérangent. Ces questions sont abordées avec intelligence et foi par Ariane et Benoît Thiran dans ce livre que j’ai lu avec passion. Je le trouve si vrai, si abordable et en même temps très pratique : comment « entrer dans l’Evangile pour sortir de la violence » ? Comment aimer mon ennemi, celui qui semble menacer ma liberté ? Pour sortir de la violence, il est indispensable d’identifier les zones de violence en nous. Il ne s’agit pas de dire « telle ou telle personne m’agace », comme si ses défauts ou son caractère justifiaient mes réactions, mais de saisir la violence contenue dans mes réactions. J’ai personnellement senti monter en moi des réactions non seulement d’agressivité mais de violence en face de telle ou telle personne ayant un handicap. En 1980, j’ai quitté la responsabilité de la communauté de l’Arche à Trosly et j’ai passé une année au foyer de la Forestière, qui accueille dix hommes et femmes ayant de lourds handicaps. Parmi eux, il y a Lucien. Il ne marche pas, ne parle pas ; il est totalement dépendant. Il hurlait parfois avec un cri très aigu qui éveillait mon propre cri ; son angoisse éveillait mon angoisse. Je sentais monter en moi une colère qui aurait pu devenir une forme de haine psychologique. Je ne supportais pas son cri. Je voulais fuir. Mais je ne le pouvais pas car
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il fallait rester au foyer auprès de lui et des autres. Heureusement il y avait d’autres assistants dans le foyer ! Si j’avais été seul avec Lucien, je pense que j’aurais pu le frapper. J’avais honte de sentir cette violence en moi ! Ma vocation est d’accueillir des personnes ayant un handicap et voilà que je sentais monter en moi des forces de haine et de rejet. Lucien m’a fait prendre conscience de ces énergies négatives en moi qui pourraient m’entraîner vers des gestes qui font mal à l’autre, mais aussi à moimême. Je suis très reconnaissant à Lucien et à d’autres comme lui, de m’avoir fait découvrir qui je suis, la violence qui est en moi et la peur que je peux éveiller chez d’autres. Il faut se connaître tel que l’on est en vérité pour pouvoir être transformé et cheminer vers un amour vrai. En 1973, j’ai été invité dans une prison au Canada par « le Club 21 ». Ce club réunit des hommes qui ont commis des meurtres et sont condamnés à vingt et un ans de prison. Durant le temps que nous avons passé ensemble, chacun a raconté son histoire et comment il avait été amené à tuer. En les écoutant, je me disais : « Si j’avais été à leur place, dans leur famille ou leur manque de famille, si j’avais vécu tout ce qu’ils ont vécu, il est probable que moi aussi j’aurais pu tuer une personne qui me gênait, me menaçait. » Une agressivité ou une colère justifiée peut devenir une violence non justifiée. J’ai réalisé que nous avons tous en nous la capacité de tuer. Un jour, dans le village de Trosly où j’habite, j’ai rencontré un homme du village hors de lui, hurlant contre l’Arche, contre les personnes ayant un handicap. Avait-il bu ? Je ne sais. Mais il est entré dans un de nos foyers en criant contre tout le monde. Il fallait faire quelque chose. Je ne savais pas quoi. Il s’est jeté sur moi, le poing menaçant. J’étais figé de peur, incapable de discuter avec lui — de toute façon, il criait si fort qu’il était incapable de m’écouter. Finalement, je me suis entendu lui dire : « Si tu veux, tu peux me frapper. » Avec son poing, il m’a asséné un coup sur l’oreille gauche, pas suffisamment fort pour me faire tomber, mais suffisamment fort pour me crever le tympan. Et encore une fois, je me suis entendu lui dire : « Tu peux me frapper encore. » Son angoisse ayant été libérée par son geste de violence, il était alors capable de m’entendre. Il est devenu tout penaud, doux comme un agneau. Il m’a
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tendu la main. Je ne sais s’il m’a demandé pardon ; je n’étais pas en état de l’écouter ! Il m’a invité à entrer dans la maison de son père, pour prendre un verre de jus d’orange ! J’avoue que je tremblais et que j’étais incapable à ce moment-là d’apprécier ce verre d’amitié. Sans m’en rendre compte, j’avais vécu un moment de non-violence active. En mars 1975, à Sao Paolo (Brésil) j’ai été invité à un dîner avec Hildegard Goss-Mayr, Adolfo Perez Esquivel et Mario Carvalho de Jesus, tous les trois engagés dans la lutte non-violente. A cette époque, le Brésil vivait une période de grande tension : l’armée et la police mettaient en prison, torturaient et éliminaient tous ceux qui luttaient pour la liberté d’expression. Le lendemain matin, on m’a dit que tous les trois avaient été arrêtés et mis en prison. Le cardinal Arns a immédiatement pris contact avec les ambassades et ils ont été libérés. Après le déjeuner, je suis allé voir Mario Carvalho de Jesus. Il m’a raconté comment ils avaient été arrêtés, mis en prison, interrogés avec violence, placés dans une cellule avec un fond de hurlements et de cris. A quatre heures du matin, les trois se sont retrouvés et des gardes leur ont offert du café. Ils ont refusé le café, ayant décidé de prier et de jeûner afin que les gardes puissent redécouvrir leur vraie humanité. En chacun de nous, il y a des zones de peur et de ténèbres qui nous font répondre par la violence à des agressions. Si nous répondons à la violence par la violence, si nous entrons dans le cycle de la violence, il y a toujours un gagnant et un perdant ; la spirale de la haine continue. Il y a cependant d’autres formes de violence en chacun de nous dont il est important de prendre conscience. Ce sont toutes ces violences cachées derrière nos préjugés, nos sentiments de supériorité, d’élitisme ; nos refus d’écouter certaines personnes et de les considérer comme des personnes. Ces violences cachées sont plus dangereuses, justement parce qu’elles sont cachées ; elles peuvent éveiller la violence chez ceux qui se sentent infériorisés. Il faut demander de l’aide, peut-être aussi suivre une des sessions d’Ariane et Benoît, pour détecter ces violences et se libérer de leur pouvoir.
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La paix ne peut venir que si nous reconnaissons à la fois les ténèbres dans notre propre cœur — que nous ne sommes pas « purs » — et, dans le cœur de l’autre, de celui qui nous dérange ou nous blesse, la part d’humanité cachée. Etty Hillesum, une jeune femme juive morte à Auschwitz, a écrit dans son journal, en réponse à un ami qui manifestait sa haine des Nazis : « La saloperie des autres est aussi en nous. Et je ne vois pas d’autre solution, vraiment aucune autre solution que de rentrer en soi-même et d’extirper de son âme toute cette pourriture. Je ne crois pas que nous puissions corriger quoi que ce soit dans le monde extérieur, que nous n’ayons d’abord corrigé en nous » (Une vie bouleversée, Paris, Seuil, 1995, p. 104). Le livre de Benoît & Ariane Thiran s’appuie sur l’Evangile, la Bonne Nouvelle de Jésus. Dans notre monde, dans nos sociétés, la violence n’est pas inéluctable. Jésus nous enseigne une voie de vérité et d’amour. Benoît & Ariane nous invitent à nous risquer sur cette voie qui devrait être enseignée à chaque chrétien et dans chaque école. Le commandement de Jésus « Aimez vos ennemis » n’est pas une option. C’est un commandement et nous savons qu’il est assorti d’une promesse : il nous donnera la force pour le réaliser. Mais pour cela, il nous faut faire un travail sur nous-mêmes ; il faut changer notre regard sur l’autre, l’ennemi. Cela prend du temps. Bien sûr, il y aura des échecs. Mais l’avenir de nos sociétés dépend du désir de chacun de nous de nous laisser transformer par le message de Jésus pour devenir son instrument de vérité et de paix. Jean Vanier Trosly, janvier 2006 Fondateur des communautés de l’Arche et de Foi et Lumière Membre d’honneur de l’association Sortir de la Violence
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Indications pour aider à la lecture
Texte de fond
citations bibliques
Quand Jésus propose de « tendre l’autre joue », qu’est-ce que cela veut dire ? « Eh bien ! Moi je vous dis de ne pas rendre le mal au méchant » (Mt 5, 39a).
citations d’auteurs
« Œil pour œil finit par rendre aveugle le monde entier » (Gandhi).
Témoignages
J’avais douze ans, quand un jour, excédée ma mère m’a giflé. J’ai innocemment tendu l’autre joue.
Tous les exemples et témoignages cités sont vrais. Ils proviennent de notre propre expérience ou de celles des participants à nos cycles de formations approfondis. Seuls les prénoms ont été modifiés pour respecter l’anonymat des personnes concernées.
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Introduction Jetez un coup d’œil sur votre journal habituel. Combien d’articles rapportent des actes de violence ? Quel genre de violence rapporte-t-on ? Trouvez-vous que le journal donne une image exacte de la violence qui existe dans votre environnement ? Regardez les actualités à la télévision ou écoutez-les à la radio. Quelles sont les nouvelles qui touchent à la violence ? Quels sont les genres de violence que l’on rapporte ? Pourquoi, à votre avis, ces questions ont-elles été retenues pour le journal télévisé ou radiodiffusé ? Quels genres de films sont projetés au cinéma ou à la télévision ? Quels sont les jeux électroniques ou informatiques préférés des jeunes ? Quelle proportion de violence est présente dans vos divertissements préférés ? La violence nous repousse, mais elle nous attire aussi. La violence nous inquiète, mais elle nous amuse aussi. La violence nous ravage, mais elle nous protège aussi 1. Nous avons tendance à enfermer la violence dans ses manifestations physiques et extrêmes : les cris, les coups, les agressions.
1. c’est par ces questions et réflexions que le comité œcuménique des Eglises (coE) commence son guide d’étude pour aider les particuliers et les groupes au sein des Eglises à réfléchir et à agir en vue de la décennie « Vaincre la violence » (2001 – 2010). www.wcc-coe.org En commençant ce livre, quelles sont vos réponses personnelles à ces questions ?
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celles que nous voyons à la télévision ou dans les journaux. celles qui font peur ! Inconsciemment ou peut-être pour nous rassurer, nous essayons de maintenir la violence aussi loin que possible de notre vie quotidienne, même si l’éventualité que celle-ci y entre un jour, crée en nous une angoisse profonde, souvent inconsciente. Quoi de plus normal ? c’est tout notre besoin vital de sécurité qui est ébranlé. or, face aux manifestations extrêmes de la violence, il faut l’avouer, nous nous sentons souvent bien impuissants ! Cette représentation produit en nous et dans nos sociétés deux effets désastreux : – pour beaucoup, elle nous immobilise et nous déresponsabilise. Elle nous fait entrer dans une relation fataliste avec la violence, comme un grand danger extérieur, comme quelque chose d’inévitable ; nous ne nous sentons pas directement concernés et espérons ne jamais l’être ! – chez d’autres, elle enclenche un processus d’investissement dans des défenses, permettant de faire face aux manifestations extrêmes de la violence : défenses presque toujours violentes et souvent démesurées. Pour s’en convaincre, il suffit de voir les investissements militaires de nos sociétés. Ces manifestations extrêmes, auxquelles nous identifions la violence, ne sont que la partie visible de l’iceberg. la violence est présente de bien d’autres façons. Une de ses forces est de passer inaperçue, de ne pas être nommée comme telle là où nous pourrions avoir prise sur elle, là où elle concerne nos relations au travail, en famille, en couple, là où elle pervertit nos relations et nos conflits, nous laissant blessés, déçus, aigris. ce sont les formes de violence « cachées » ou « non identifiées comme telles » qui sont de très loin les plus répandues dans nos vies, nos villes et nos sociétés occidentales. Souvent, ce sont elles qui déclenchent les manifestations extrêmes que nous craignons tant.
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le Dr Pat Patfoort, anthropologue, qui travaille les questions de violence depuis plus de trente ans l’exprime à sa façon : La violence subsiste, croît et se développe parce que chacun de nous la nourrit continuellement, souvent sans nous en rendre compte et sans que la société s’en émeuve, parce que les premiers mécanismes de la violence ne sont pas identifiés comme tels : ils semblent appartenir à la sphère des comportements “civilisés” et sont donc communément acceptés. Les êtres humains font généralement souffrir leurs semblables non par méchanceté mais par ignorance, et souvent même en étant animés de bonnes intentions 2. La grande arme de la violence consiste en sa dissimulation. La Bible, en montrant la violence humaine comme elle est, comme elle est d’abord chez ceux que Dieu sauve, enlève à cette violence sa ressource principale (Paul Beauchamp 3).
ce sont ces formes de violences qui entretiennent tout un système de structures qui engendre la violence à une échelle de société et enfin mondiale. Voir d’abord la violence en soi et près de soi plutôt que chez les autres, c’est travailler à la racine de la violence ! l’histoire nous montre que beaucoup d’êtres humains sont prêts à s’engager dans une grande lutte non-violente quand la conjoncture les y invite. Il est par contre beaucoup plus difficile de reconnaître et de transformer sa violence quotidienne. c’est pourtant bien là que nous 2. Pat Patfoort, Se défendre sans attaquer. La puissance de la non-violence, Baeckens Books, 2004, distribution Ed. lannoo. 3. Paul Beauchamp, s.j., « la violence dans la Bible », Etudes no 3904, avril 1999, p. 485.
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sommes appelés à agir en premier afin de changer en profondeur les structures injustes de nos sociétés. La violence n’est pas d’abord un grand problème qui nous dépasse… Mais avant tout, sept milliards de défis humains… C’est-à-dire notre défi à chacun ! ce défi, nous pouvons le relever en essayant de préciser « où commence la violence ? » Apprendre à repérer le départ de la violence dans nos relations humaines va nous donner les moyens d’agir face à cette violence. c’est une question essentielle pour notre monde et peut-être plus encore pour nos sociétés occidentales qui tentent le plus souvent de mettre la violence au loin, un peu comme la souffrance et la mort. Qu’est-ce que la violence ? où commence-t-elle ? Quand pouvons-nous dire qu’il s’agit de violence ? En quoi nous concerne-t-elle ? Y a-t-il différents types de violence ? Toute violence est-elle condamnable ? Y a-t-il de « bonnes » violences ? Autant de questions qui doivent être éclairées si nous voulons parler le même langage et nous entendre sur ce thème. Mais cela reste très insuffisant si ces clarifications ne nous amènent pas à la question de notre pouvoir d’action sur la violence. Ne portons-nous pas tous quelque part un rêve ? le rêve de sortir de cette escalade de violence qui engendre la violence, le rêve de trouver une solution pour nous et pour le monde… la violence est-elle une fatalité ? Suis-je impuissant face à elle ? N’est-il pas légitime de se défendre ?
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Sommes-nous condamnés à subir la violence et à la propager nousmêmes ? Y a-t-il un autre chemin que ceux de la passivité et de la violence ? Y aura-t-il toujours de la violence ? les exemples de libérations non-violentes en Inde (Gandhi), des Noirs nord-américains (Martin luther King), aux Philippines, à Madagascar, en Pologne, etc., sont édifiants, mais après ? Qu’est-ce que cela change ? Une goutte d’eau dans l’océan ? En tant que croyants d’autres questions nous habitent : Et Dieu face à la violence des hommes, que fait-il ? Quelle est son attitude face à ce qui détruit l’homme ? Que fait-il quand à Auschwitz, en ex-Yougoslavie, au Rwanda, en Irak, dans les pays du Sud et ailleurs, des milliers de victimes de la violence crient vers lui ? Dieu est-il absent de l’histoire ? Est-il indifférent ? comment concilier la légitime défense avec l’enseignement de Jésus qui nous dit « de ne pas rendre le mal au méchant » et « d’aimer nos ennemis » (Mt 5, 39a et 44a) ? Est-ce une utopie ? En quoi sa vie, son enseignement peuvent-ils nous aider aujourd’hui dans notre vie ? On peut considérer comme une chance que la Bible soit pleine de violence : ainsi il est incontestable qu’elle parle de nous et de nos sociétés (Lytta Basset 4).
4. lytta Basset a écrit notamment : Moi, je ne juge personne, Albin Michel, 1998, et La sainte colère, Bayard, 2002.
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Aujourd’hui plus que jamais, une brèche s’est ouverte dans la conscience humaine. les événements de ces dernières années, nous ont secoués si profondément que de plus en plus de personnes sentent, même confusément, que ce ne sont ni la passivité, ni la « contre-violence » qui peuvent sortir notre humanité de la folie de la violence. Nous nous sentons souvent impuissants mais nous sommes en recherche. Un besoin impératif d’agir émerge en nous. Tout notre être nous pousse à défendre notre vie et celles de nos enfants. En même temps notre conscience nous souffle de défendre non seulement la nôtre, mais aussi celle de tout être humain. Un des premiers nœuds du problème réside dans notre conception de la défense. Souvent, elle nous paralyse et nous empêche de voir d’autres alternatives que la passivité, la fuite ou la contre-violence. Dans notre esprit, « défense » est trop souvent lié à « défense violente 5 ». comme si, face à la violence, quand on ne peut pas fuir, il n’y aurait qu’une double option : se défendre avec violence ou ne pas se défendre, c’est-à-dire accepter le martyre. cette assimilation occulte toute une partie de la réalité et de la vérité : il n’y a pas que la violence pour se défendre. Mais tant qu’on n’y a pas renoncé, on reste aveugle. En 1986, aux Philippines, le peuple a réalisé une révolution non-violente pour mettre fin à la dictature 6. Les leaders de l’opposition au Président Marcos, après l’assassinat du sénateur Ninoy Aquino et les nombreuses manifestations de masse, avaient été contactés par les « marchands de canons » qui leur disaient : « Ce n’est pas avec des manifestations comme ça que vous allez renverser la dictature. Soyez raison-
5. lire à ce sujet le livre de Michel callewaert, Un amour subversif. Jésus, l’Eglise et la légitime défense, Namur, Fidélité, et Paris, cerf, 2012. 6. Parvenu au pouvoir légalement en 1965, F. Marcos s’y était maintenu en proclamant en 1972 la loi martiale, puis en organisant des élections truquées et en réprimant durement tout mouvement démocratique.
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nables, vous voyez bien que ça ne fait qu’augmenter la répression et que le peuple finira par plier ; nous sommes prêts à vous offrir toutes les armes nécessaires. Vous ne vous occupez pas des paiements maintenant, on s’arrangera après ! » Ces mêmes leaders demandèrent à Jean Goss : « Dites-nous ce que vous pensez ? » Celui-ci leur répondit : « Vous seuls pouvez prendre une décision, mais c’est seulement en refusant la violence radicalement qu’on peut découvrir vraiment en profondeur les chemins de la non-violence 7. » Il y a une autre manière de se défendre qui nous est comme cachée tant que nous ne sortons pas du mensonge qui nous fait croire que la contre-violence est la seule manière de se défendre. comme l’affirme le comité œcuménique des Eglises, « le recours à la violence ne semble être de l’ordre naturel des choses que parce que nous n’avons pas pris les comportements alternatifs suffisamment au sérieux, en nous appuyant sur les ressources de la foi pour nous encourager, nous inspirer, nous soutenir ». Dans ce livre, nous avons pris le parti d’aller tout d’abord plonger au cœur de l’Evangile y rejoindre Jésus et ses disciples confrontés à la violence et au conflit. Nous y découvrons un autre regard sur la violence, une autre façon de se défendre, de défendre la Vie, toute vie, une alternative pour sortir de la violence. Jésus n’a jamais parlé de non-violence. Quand il aborde le thème de la violence et la manière de la gérer, il nous parle d’aimer nos ennemis.
7. Extraits de la cassette vidéo : J. Goss : Philippines ’86, une révolution non-violente, série « Témoins de la non-violence » réalisée par G. Martinot, s.j.
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Qui est mon ennemi (au sens que Jésus semble lui donner) ? De quel amour parle-t-il ? concrètement que nous propose-t-il ? Est-ce réaliste ? cette proposition très concrète de Jésus pour gérer la violence est trop souvent méconnue, même parmi les chrétiens. Quand elle est reconnue, elle est souvent perçue comme trop extrême, réservée aux martyrs et aux saints. Elle est trop peu prise au sérieux comme une véritable alternative à vivre au quotidien. Pourtant, elle nous aide à y découvrir nos comportements et comment ils contribuent à renforcer l’escalade de la violence jusque dans nos sociétés. Les seuls démons de ce monde sont ceux qui grouillent dans notre cœur et c’est là que doivent se livrer tous nos combats (Gandhi).
ce livre désire inviter les Eglises et les individus à réexaminer leur compréhension biblique de la question de la violence et de la façon d’y répondre. laisser Jésus mettre de l’ordre dans tout cela, faire œuvre créatrice, donneuse de vie en sortant de ce tohu-bohu, en nommant chaque élément, en séparant ce qui doit l’être et en donnant à chacun une juste place. c’est à ce prix que nous pourrons passer de l’impuissance à l’action, du découragement au pouvoir de changer les choses, du désespoir à l’espérance. Espérance d’être à notre tour créateurs de vie plutôt que transmetteurs de peur, de mort. oui, la violence fait partie de notre condition humaine. Elle contient une force, une énergie toujours révélatrice de notre vécu.
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Il ne s’agit pas de l’ignorer, il est impossible de l’éliminer, par contre, il est possible de la transformer. Jésus est venu nous montrer comment opérer cette transformation et nous révéler que la violence n’avait pas le dernier mot de l’histoire ! Parallèlement à cette plongée dans l’Evangile, nous vous invitons à découvrir un outil concret, la Roue du Changement de Regard©, qui tout en illustrant l’Evangile, nous aide à traduire ce que Jésus propose dans nos vies de tous les jours. Ainsi, nous passerons de l’un à l’autre pour mieux voir comment incarner l’Evangile au quotidien pour devenir artisans de paix, ferment dans la pâte humaine. laissez-nous vous emmener sur ce chemin à travers ce livre. Dans les préliminaires, nous définissons rapidement les termes conflit, agressivité, violence et non-violence tels que nous les employons ; nous donnons quelques indications pour faciliter votre lecture ; et une courte présentation des auteurs. Dans la première partie, « Trouver dans l’Evangile une issue à la violence », nous plongeons au cœur de l’Evangile pour découvrir le sens profond de ce que Jésus appelle « l’amour des ennemis » et que d’autres nomment « la non-violence active ». Au chapitre 1, nous apprenons avec Jésus, dans l’épisode sur la gifle et l’Amour des ennemis, « où commence la violence », ce mur ou ce fossé que nous sentons parfois entre nous et l’autre. Au chapitre 2, nous cherchons « comment faire basculer le mur de la violence ». A travers l’histoire de la prostituée qui s’est introduite lors d’un repas chez le pharisien Simon, et celle de la femme adultère, prise en flagrant délit et traînée jusqu’au Temple, nous découvrons deux clés pour stopper l’escalade de la violence.
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Dans la deuxième partie, « Transformer la violence au quotidien », nous approfondissons les moyens à notre disposition et les répercussions concrètes dans notre vie de tous les jours de cette invitation à la non-violence active. Au chapitre 3, nous précisons « ce qu’est la non-violence active » en examinant deux outils très précieux : la Roue du changement de Regard© et les cinq réponses que nous pouvons donner lorsque nous sommes confrontés à la violence. Au chapitre 4, la non-violence active comme « un chemin pour vivre plus intensément », nous ouvrons quatre portes : - la non-violence, ça s’apprend, il est nécessaire de nous entraîner ; - des outils pour cheminer au quotidien nous sont offerts, à nous de nous engager ; - que nous apporte la Bible sur ce chemin ? - un autre regard sur le monde qui nous invite à être chacun responsable du processus de Paix. Au chapitre 5, « comment agir concrètement ? », nous vous proposons quelques pistes concrètes qui peuvent aider à se mettre en route, illustrées par des exemples et des témoignages. Dans la conclusion, « Vous avez dit impossible », nous plongeons dans un sentiment que nous rencontrons fréquemment sur le chemin de l’amour des ennemis : « c’est impossible ! » Dans l’évangile du partage des pains, Jésus nous demande d’apporter nos cinq pains et nos deux poissons… d’oser et croire… même si cela paraît insignifiant… impossible ! Il est urgent que nous soyons de plus en plus nombreux à oser nous risquer sur ces chemins de vie dont notre monde a tant besoin. Un été, nous nous promenions en montagne, dans les contreforts des Pyrénées. la végétation y était abondante malgré la chaleur. En marchant dans des passages moins entretenus, nous prenions con-
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science combien un chemin a beau avoir été ouvert par nos prédécesseurs et une forêt débroussaillée, si plus personne n’y passe, n’y travaille, la nature les envahit et les rend petit à petit impénétrables. A la même période, nous lisions un dossier de la revue Alternatives non-violentes sur les luttes non-violentes au xxe siècle 8. Nous étions émerveillés par ces hommes et ces femmes de différentes religions, cultures et origines qui ont ouvert des chemins d’humanité dans des situations où la Vie était en danger : la violence régnait ! Une de leurs caractéristiques communes est de voir et nommer la violence chez eux et dans leur environnement avec une clarté telle que cela libère des forces de vie. leurs concitoyens qui étaient perdus et essayaient de survivre dans des situations déshumanisantes, voyaient enfin où aller, que faire, comment lutter pour la vie, en commençant par la leur, là où ils étaient. ce livre, nous l’avons écrit pour vous partager cette espérance, pour vous annoncer cette Bonne Nouvelle… oui ! Sortir de la violence, c’est possible ! cela commence en nous et c’est à la portée de chacun de nous ! oserons-nous prendre Jésus au sérieux ? ce serait une très bonne nouvelle pour notre monde !
8. Les luttes non-violentes au XXe siècle, Alternatives non-violentes, tome 1 : nos 119-120, été-automne 2001 ; tome 2 : no 121, hiver 2001-2002.
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Préliminaires Quelques définitions
Avant de démarrer et afin d’éviter toute confusion, nous désirons définir ici l’acception que nous donnons par la suite aux mots : conflit, agressivité, violence et non-violence. Il existe en effet beaucoup de définitions de ces mots ayant chacune ses richesses et ses limites. Nous nous inspirons de la définition de Jean & Hildegard Goss-Mayr*. Nous l’avons choisie pour son potentiel pédagogique, c’est-à-dire sa capacité à rejoindre les hommes et les femmes d’aujourd’hui et les mettre en mouvement. le conflit, naît de la confrontation de nos différences. Il est inévitable. Il n’est ni bon ni mauvais en soi. Il peut être une occasion de croissance ou un risque de blessure. Jean & Hildegard Goss-Mayr distinguent agressivité et violence. l’agressivité est une force instinctive de préservation de la vie. Elle a un pôle positif et un pôle négatif. l’agressivité est positive, en tant que lutte pour sauvegarder toutes les dimensions de sa propre vie et de celle des autres, en tant que force qui protège la vie, toute vie. on la retrouve chez tous les grands non* Jean & Hildegard Goss-Mayr, bien que peu connus du grand public, ont beaucoup œuvré pour la paix et la réconciliation dans le monde. Pendant quarante ans, ils ont visité un grand nombre de pays pour y faire connaître la non-violence active et former des personnes à cette forme de lutte pour plus de justice. Nous leur devons beaucoup dans tout notre cheminement dans la non-violence. Jean est décédé en 1991. Hildegard, membre d’honneur de notre association Sortir de la Violence, vit à Vienne, en Autriche, et continue encore aujourd’hui son action. Elle raconte leur trajectoire dans un livre passionnant : Hildegard Goss-Mayr, Oser le combat non-violent aux côtés de Jean Goss, Paris, cerf, 1998.
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violents. on pourrait la nommer combativité, véhémence ou virulence : on est prêt à s’engager, à combattre pour la vie, c’est une force positive. l’agressivité devient négative si, dans cette lutte, elle utilise des moyens qui détruisent l’autre, les autres, ou soi-même. c’est elle que nous désignons par le terme violence. la violence est donc définie, sans exception, comme une force destructrice de l’être humain, c’est-à-dire une force qui diminue, blesse, détruit, exclut l’autre ou soi-même. le mot non-violence est la traduction du mot a-himsa utilisé par Gandhi. Il veut dire « lutter, s’engager pour la justice sans himsa », c’està-dire sans une force destructrice de l’adversaire, sans violence. Mais si nous rejetons la violence comme moyen de lutte, nous devons la remplacer par une autre force. Pour Gandhi, cette autre force est satyâgraha : « la force de la Vérité, la force de l’âme ». on peut ajouter : « force de la justice, force de l’Amour ». Malheureusement, quand nous utilisons le terme non-violence, nous prenons un mot qui dit seulement non à la violence, mais n’exprime pas la force constructive et positive de ce concept. En disant non-violence, nous devons donc toujours lier ahimsa et satyâgraha. c’est pourquoi Jean & Hildegard préfèrent employer le terme de nonviolence active.
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Notre parcours L’option pour la non-violence dans nos vies… Même si notre intérêt pour la problématique de la violence et de l’injustice s’inscrit dans notre histoire à chacun depuis l’enfance, l’année 1992 marque pour nous un tournant. Après avoir travaillé deux ans en Belgique, Ariane comme architecte et Benoît comme ingénieur commercial, nous sommes partis en 1990 dans un projet de développement en Equateur. Nous y avons notamment démarré l’Ile de Paix de Pangor. En 1992, plongés au cœur du vécu des populations marginales de Quito et des paysans indiens des Andes, nous sommes révoltés par toutes les injustices et situations de violence que ceux-ci endurent. Deux questions nous travaillent de plus en plus : - la violence est-elle une fatalité ? Que pouvons-nous faire face à ce qui détruit l’être humain ? - Et Dieu, que fait-il face à la violence ? comment y répond-il au long de son histoire avec les hommes ? c’est alors qu’à l’occasion de la rencontre mondiale du Mouvement international de la Réconciliation (MIR-IFoR), nous découvrons la non-violence active. Aussitôt rejoints au cœur de notre vécu et de nos interrogations, nous nous engageons sur ce chemin. Nous essayons de vivre cette non-violence dans notre vie de couple, de famille, de travail, dans nos relations et dans notre foi. Nous approfondissons l’Evangile avec cette nouvelle clé de lecture. Nous nous plongeons dans la littérature non-violente et suivons plusieurs séminaires de formation. En 1997, de plus en plus « brûlés » par la pertinence de « l’amour des ennemis » pour notre monde, nous nous sentons appelés à quitter les pro-
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jets de développement pour nous mettre au service de l’annonce de l’Evangile à travers la non-violence active.
1998–2000 : trois ans de gestation De retour en Belgique, nous vivons trois années de gestation faites de questionnements, de tâtonnements, d’expériences, d’enthousiasmes et de doutes pour découvrir peu à peu ce que veut dire concrètement cet appel : beaucoup de temps passé en ermitage à laisser remonter en nous la résonance de notre expérience de vie avec la Parole de Dieu ; temps d’étude à l’Institut d’Etudes théologiques (IET) qui nous a permis d’ancrer cette expérience dans le courant des croyants qui nous ont précédés et d’approfondir notre recherche au niveau biblique ; temps de formation à travers différents séminaires ; temps d’animations ponctuelles de formations à la non-violence pour des jeunes et des adultes ; temps de mise en pratique pour Benoît comme responsable de la communauté de l’Arche de Jean Vanier à Bruxelles et, plus tard, pour Ariane comme membre de la communauté du Hautbois aux Fraternités du Bon Pasteur à Bruxelles.
2001–2003 : trois ans d’élaboration d’un projet Nos recherches sur l’évangile de Marc et nos expériences d’animation s’approfondissent et nous amènent à repenser complètement notre façon de transmettre ce message de l’amour des ennemis : comment traduire ce cheminement des apôtres avec Jésus en pédagogie active pour notre monde d’aujourd’hui ? Nous développons alors des retraites formations « Gérer les conflits, un cheminement à la lumière de l’Evangile » en trois seuils. Durant ces trois années, nous cherchons aussi un cadre où nous insérer avec notre spécificité. Un long discernement nous amène à faire un grand saut : créer une association et nous mettre au service de cette association comme permanents. Une petite équipe nous soutient et pendant un an va peu à peu définir et mettre sur pied le projet.
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2004–2005 : une construction qui se précise c’est ainsi qu’en mars 2004, nous avons fondé avec onze autres personnes une association sans but lucratif qui s’appelle Sortir de la Violence (présentation en annexe 1). Depuis lors, un réseau de personnes qui s’engagent dans la non-violence active se constitue peu à peu ; les retraites formations et les ateliers de formation se diversifient ainsi que les outils de diffusion de la non-violence active, de son lien avec nos vies et avec l’Evangile. ‘
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Première partie
Trouver dans l’Evangile une issue à la violence
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chapitre premier
où commence la violence ?
A peine né sur la terre des hommes, Jésus a été confronté à la violence et au conflit. l’Evangile est plein de passages qui nous relatent ces affrontements. Il est très intéressant d’observer quelle a été l’attitude de Jésus face à cette violence. Qu’a-t-il fait, qu’a-t-il dit ? comment a-t-il réagi ? comment est-il resté cohérent dans sa mission ?
Jésus nous parle de la gestion de la violence Dans son Sermon sur la montagne, il aborde justement la question de la violence. Ecoutons ce qu’il nous dit… Vous avez entendu qu’il a été dit : « Œil pour œil et dent pour dent… » (Mt 5, 38a) D’emblée, Jésus nous annonce qu’il nous parle de la gestion de la violence. En citant « œil pour œil et dent pour dent », il fait référence à la loi du talion qui est précisément celle qui tentait de gérer la question de la violence. la loi du talion était déjà un grand progrès pour la civilisation. Elle impliquait un dépassement de la loi naturelle de la vengeance aveugle par laquelle on rend beaucoup plus à l’autre que ce qu’il nous a fait. Elle permettait ainsi de limiter la violence. Par exemple, si on avait coupé la main de mon frère ou violé une de mes sœurs, je ne pouvais pas tuer un
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ou plusieurs membres du groupe auquel appartenait le coupable. c’était déjà une façon de freiner l’escalade de la violence. on retrouve même dans la loi du talion l’affirmation de la valeur absolue de l’être humain comme l’exprime si bien Jean-Pierre Sonnet 9. Le talion n’est pas seulement destiné à limiter la violence. Il est aussi une affirmation du « prix sans prix » de la vie humaine. Alors que dans les Codes du Proche-Orient ancien, les coups et blessures étaient le plus souvent l’objet de compensations financières, la Bible exclut toute mise en tarif de ces atteintes à l’intégrité des personnes humaines. Le langage est alors celui de l’hyperbole et de la dissuasion : prends garde à ne pas blesser ton frère ou attenter à sa vie, car le seul prix imaginable pour son œil ou pour sa vie serait ton œil ou ta vie ! Pourtant, cette loi nous paraît barbare. or aujourd’hui, que faisonsnous ? Que fait notre monde soi-disant évolué ? Nous n’en sommes même pas encore à respecter cette loi de limitation de la violence… Il suffit d’écouter les nouvelles à la radio ou la télévision pour s’en convaincre ! les ripostes de nos pays occidentaux n’ont aucune commune mesure avec les dommages dont nous avons été victimes. Dans nos conflits de tous les jours, il en est de même. Quand nous subissons une agression, si nous en avons les moyens, bien souvent nous contre-attaquons, nous essayons de reprendre le dessus ; la plupart du temps au prix d’une escalade de la violence. Œil pour œil finit par rendre aveugle le monde entier (Gandhi).
9. Jean-Pierre Sonnet, prêtre jésuite, est professeur de théologie à l’Institut d’études théologiques de Bruxelles (IET) et exégète spécialisé dans la lecture narrative de la Bible.
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Mais Jésus nous propose d’aller plus loin : « Vous avez entendu qu’il a été dit : “Œil pour œil et dent pour dent.” Eh bien ! moi je vous dis de ne pas rendre le mal au méchant : au contraire, quelqu’un te donne-t-il une gifle sur la joue droite, tends-lui encore l’autre. Et si quelqu’un veut te faire un procès et prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau. Et si quelqu’un te réquisitionne pour faire mille pas, fais-en deux mille avec lui. Donne à qui te demande, ne te détourne pas de celui qui veut t’emprunter » (Mt 5, 38-42). « Ne pas rendre le mal au méchant »… Une nouvelle impulsion est donnée. Il ne s’agit plus seulement de limiter la vengeance et donc l’escalade de la violence mais d’avoir une tout autre attitude face au méchant. De quoi s’agit-il ? ce texte a souvent fait problème. Il a pu même scandaliser certains : « Quoi, je suis victime de la brutalité de l’autre et non seulement je devrais me laisser faire mais encore en redemander ? » ce texte a aussi servi à justifier exactement le contraire de ce que Jésus voulait dire. combien de fois ne l’a-t-on pas utilisé pour prêcher la résignation, la soumission et faire taire ceux qui souffrent, sont opprimés et exclus : « c’est vrai que vous souffrez aujourd’hui, mais ce n’est pas grave, tendez l’autre joue, laissez-vous faire, vous serez récompensés dans le Royaume. Heureux les pauvres, le Royaume des cieux est à eux. » Dans notre société, « tendre l’autre joue » est synonyme de faiblesse et donc de folie. cet appel de Jésus est donc perçu comme irréaliste, utopique, ou comme réservé aux grands saints, aux martyrs. Qu’a voulu dire Jésus ?
En lecture partielle‌
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Annexes
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Annexe 1
Présentation de l’association « Sortir de la Violence »
l’association « Sortir de la Violence » a pour objet de promouvoir la non-violence active comme dynamique positive et profondément humaine pour vivre autrement les situations de violence, que ce soit au sein d’un simple conflit interpersonnel ou d’une situation plus globale de violence. Elle a été créée pour se mettre au service des personnes ou des groupes qui portent en eux le désir d’agir face à la violence et d’être constructeurs de paix, en soi et autour de soi. Sa première spécificité consiste à proposer des moyens concrets pour repérer « où commence la violence » dans les relations humaines en vue de les transformer. Sa deuxième spécificité tient en une approche où Evangile et sciences humaines se complètent pour susciter une dynamique de vie directement applicable au quotidien.
Quatre branches d’activités • Formation Elle a développé plusieurs outils originaux et un tableau de bord de la relation non-violente. Elle a créé différents types de formations (pluralistes, ouvertes à tous), de retraites-formations et de retraites (pour ceux qui sont attachés aux valeurs évangéliques). Elle anime aussi des formations « sur mesure » pour des groupes, associations, institutions et des entreprises.
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• Diffusion Faire connaître la non-violence active, son lien avec nos vies et avec l’Evangile à travers des conférences, des émissions de radio et télévision, des articles, des livres. la collection « Sortir de la Violence » compte actuellement sept ouvrages (cf. annexe 4). • Accompagnement En groupe ou individuellement, sous forme d’entraînement, de médiation ou de coaching. • Recherche De moyens pédagogiques et de leurs applications ; approfondissement du thème de la violence dans la Bible.
Membres l’association est portée par : - Membres d’honneur : Hildegard Goss-Mayr, Jean Radermakers s.j., Jean Vanier. - Membres effectifs : Maïté Barrès, Jean Brasseur, christian Brodkom, Stéphanie chantraine, Aude chatin, Vincent Delcorps, Bruno Eliat, Isabelle Eliat-Serck, Jo Hanssens, Sylvain lohest, Danièle Marx-Timmel, Jean-Paul Marx, Marie-christine MatheyFonteniaud, Thierry Montulé, Agnès Montulé-lefèvre, Joseph Ntamahungiro, Thomas Peeters, Géry de Radiguès, Marie-laure Richarme, Etienne Rozé, Anne Thielen, Marilou Thieren, Benoît Thiran, Pierre Thiran, Ariane Thiran-Guibert, olivier Tomasi, Valentine d’Ursel, Hervé van Baren, claudine van de Kerchove, Françoise van Rijckevorsel, Mieke Vrints.
Réseaux l’association est membre de deux réseaux non-violents internationaux : - Mouvement International de la Réconciliation (MIR-IFoR), www.ifor.org - church and Peace, www.church-and-peace.org
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ANNExE 1
« Sortir de la Violence » ASBl 199, boulevard du Souverain 1160 Bruxelles Belgique info@sortirdelaviolence.org www.sortirdelaviolence.org « Sortir de la Violence » Association française loi 1901 Siège social 11, rue de la chaise 75007 Paris France sdv-france@sortirdelaviolence.org
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Annexe 2
Témoignages de participants à nos retraites-formations
Voici quelques extraits, vous en trouverez plus sur notre site www.sortirdelaviolence.org, à la page des témoignages. C’est une expérience humaine intense, à la découverte de mes zones d’ombres et de lumière. Cela m’a permis de me familiariser avec la violence qui est en moi, de pouvoir la reconnaître sans m’effrayer (un professeur). J’ai découvert avec un nouveau regard l’Evangile de Marc : le chemin que Jésus a accompli malgré les violences auxquelles Il a été confronté. Une lecture à intégrer dans l’éducation à la foi et la pratique des églises à tous niveaux (un prêtre). J’ai réalisé combien l’exemple de Jésus est riche d’enseignements et devient concret dans mon vécu face aux situations de violence et d’injustices. Il est nécessaire que nous nous transformions pour mieux éduquer nos enfants (une institutrice et mère de famille). Par différents moyens, j’ai pris conscience que mon comportement et mes paroles pouvaient être violents, agresser l’autre, même sans que j’en aie conscience. J’ai appris com-
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ment réagir face à un comportement violent ou injuste, tout en respectant l’autre (une religieuse). Les cas historiques de luttes non-violentes m’ont particulièrement touché : de l’injustice, de la violence ont pu émerger la vie, la dignité et le respect ! Ce sont des témoignages actuels et vivants de résurrection ! (un avocat). L’analyse non-violente de situations concrètes vécues dans mon travail m’a apporté beaucoup pour prendre du recul et analyser le travail « politique » que je fais. Cela m’a ouvert de nouvelles perspectives et permis de comprendre comment le monde associatif soutient parfois aussi ces injustices tout en luttant pour les combattre (une éducatrice). ‘
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Annexe 3
Bibliographie
Dans cette bibliographie succincte, nous avons donné la priorité aux livres plus récents. Une bibliographie plus complète est disponible sur notre site.
Bible, Spiritualité et Psychologie • Marie Balmary, Le Sacrifice interdit, Paris, Grasset, 1986 (« le livre de poche », 1997). • André Wénin, Pas seulement de pain. Violence et alliance dans la Bible, Paris, cerf, 1998. • Paul Beauchamp, « la violence dans la Bible », Etudes no 390-4, avril 1999. • Simone Pacot, L’évangélisation des profondeurs, Paris, cerf, t. 1 : 1999, t. 2 : 2002, t. 3 : 2003. • Jean Vanier, La source des larmes, Saint-Maur, Parole et Silence, 2001. • Jean Monbourquette, Apprivoiser son ombre, Paris, Bayard, 2001. • lytta Basset, La sainte colère, Paris, Bayard, 2002.
Témoignages • Amadou Hampaté Bâ, Vie et enseignement de Tierno Bokar, Paris, Seuil, coll. « Points », série « Sagesses », 1980. • Etty Hillesum, Une vie bouleversée, suivi des lettres de Westerbork, Paris, Seuil, 1995. • Jean Van lierde, Un insoumis, Bruxelles, labor, 1998. • Tim Guénard, Plus fort que la haine, Paris, J’ai lu, 1999.
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Non-violence • René Girard, Le bouc émissaire, Paris, Grasset, 1982. • Hildegard Goss-Mayr, Oser le combat non-violent aux côtés de Jean Goss, Paris, cerf, 1998. • Jeanne Gerber, Pour une éducation à la non-violence, lyon, chronique sociale, et Bruxelles, EVo, 2000. • Martin luther King, Minuit, quelqu’un frappe à ma porte, Paris, Bayard, 2000. • Jean-Marie Muller et Alain Refalo, Vers une culture de non-violence, l’Haÿ-les-Roses, Dangles, coll. « Grand angle-Sociétés », 2000. • Jacques Semelin, La non-violence expliquée à mes filles, Paris, Seuil, 2000. • collectif, Le loup de Gubbio. Aimer ses ennemis ?, Namur, Fidélité, et Bruxelles, Racine, 2001. • Les luttes non-violentes au XXe siècle, revue Alternatives non-violentes, t. 1 : nos 119-120, été-automne 2001, t. 2 : no 121, hiver 2001-2002. • Guy Gilbert, La violence, un appel, Mesnil-Saint-loup, le livre ouvert, 2001. • Jean Vanier, Recherche la paix, Mesnil-Saint-loup, le livre ouvert, 2003. • Thomas d’Ansembourg, Etre heureux, ce n’est pas nécessairement confortable, Montréal, Editions de l’Homme, 2004. • léonard Desroches, Spiritualité et pratique de la non-violence, Montréal, Novalis, 2004. • laurien Ntezimana, De la bonne puissance pour la justice et la réconciliation, Antwerpen, Pax christi international, 2004. • Pat Patfoort, Se défendre sans attaquer. La puissance de la nonviolence, Mechelen, Jeugd en Vrede, 2004. • Marshall Rosenberg, La communication non-violente au quotidien, Saint-Julien-en-Genevois, Jouvence, 2004. • Jean-Marie Muller, Dictionnaire de la non-violence, Gordes, le Relié Poche, 2005. • Isabelle & Bruno Eliat, Oser la relation. Exister sans écraser, lyon, chronique sociale, et Namur, Fidélité, 2006.
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Annexe 4
collection « Sortir de la Violence » • Oser la relation… Exister sans écraser Bruno & Isabelle Eliat-Serck, lyon, chronique Sociale, et Namur, Fidélité, 2006 Blanc ou noir. Bon ou méchant. Vraiment ? Et si on découvrait une autre dynamique ? En évitant deux obstacles : d’une part, écraser l’autre ; d’autre part, s’écraser soi-même. ce livre donne des clés et propose un outil très pratique : la roue du changement de regard. Unanimement saluée, elle nous aidera à mieux comprendre et transformer toute relation (personnelle ou sociétale) et à explorer l’enjeu des choix fondamentaux de notre vie.
• Tends l’autre joue. Ne rends pas coup pour coup. Mt 5, 38-42 : Non-violence active et Tradition Etienne chomé, Bruxelles, lumen Vitae, 2007 Tendre l’autre joue : la formule est archiconnue. Mais comment la comprendre aujourd’hui ? Et comment vivre cette parole d’Evangile ? Etienne chomé propose ici une interprétation d’une grande richesse. Etudiant le pas-
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sage à l’aide d’une solide exégèse, l’éclairant de ses connaissances en sciences humaines, il pose sur ce texte les lunettes de la non-violence active. Histoire d’abandonner une vision trop passive du récit. Mais également d’inviter l’Eglise à poser un regard neuf sur cette fameuse « autre joue ».
• Jean Goss. Mystique et militant de la non-violence Hildegard Goss-Mayr et Jo Hanssens, Namur, Fidélité, 2010 Jean Goss est un apôtre de la non-violence. Près de vingt ans après sa mort, les auteurs nous proposent de découvrir ou redécouvrir l’homme, sur base de nombreux éléments méconnus. Sa jeunesse, sa vocation. Mais aussi l’expérience mystique qu’il a faite durant la deuxième guerre mondiale. Vient ensuite son inlassable mission, sur tous les continents, au service de la paix. Pour la première fois, un ouvrage nous permet de véritablement saisir l’intuition profonde qui a guidé Jean Goss tout au long de sa vie.
• Un amour subversif. Jésus, l’Eglise et la légitime défense Michel callewaert, Namur, Fidélité, et Paris, cerf, 2012 légitimer la violence. Même l’Eglise est passée par là. Au lieu de répondre à l’appel de Jésus, elle a peur et privilégie ses intérêts. Michel callewaert interpelle cette Eglise et l’invite à se réapproprier l’impératif de l’Evangile dans toute sa radicalité. Et dans le concret de ses actes. Plus largement, tout un chacun se sentira bousculé par la puissance évangélique. la force d’un amour qui dérange.
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• Jésus non-violent. Nouvelle lecture de l’évangile de Marc Namur, Fidélité, 2010, 2011 et 2014. En ce temps où la violence semble étreindre le monde, beaucoup perçoivent l’urgence d’un profond renouveau mais n’entrevoient pas d’issue. Que fait Dieu face à cette violence des hommes ? la façon d’être de Jésus peut-elle nous aider dans notre façon de vivre les situations de violence ou de conflits de notre vie quotidienne ? cette trilogie nous fait découvrir au fil de l’évangile selon Marc la pédagogie de Jésus sur le chemin de la non-violence. Un regard neuf et interpellant.
Tome 1. Changer notre regard Sans cesse, Jésus appelle à ouvrir la relation. Il aide à se redresser et retrouver la dignité. Il invite à changer notre regard en profondeur. la violence qui nous habite prend alors un autre sens : elle n’est plus objet de condamnation, mais devient voie de libération.
Tome 2. Traverser nos peurs les disciples tentent de mettre en pratique le changement de regard proposé. Pas simple : face à l’annonce de la passion, ils sont confrontés à leurs peurs. comme nous. Mais Jésus ne les abandonne pas. Il leur enseigne une véritable solidité intérieure. Pour l’homme d’aujourd’hui, ce sont des perspectives inouïes qui s’ouvrent alors…
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Tome 3 - Passer de la mort à la vie Jésus entre dans le lieu de la violence. Il ne se contente pas de la dénoncer au prix de sa vie. Il nous révèle un chemin d’action là où nous serions tentés de fuir ou de nous défendre par la violence. Il nous apprend à engendrer la vie au sein de la mort. chemin incroyablement innovant et fécond, pour autant que nous osions nous y engager. ‘
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Table des matières
Préface de Jean Vanier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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Indications pour aider à la lecture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Notre parcours . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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Première partie
TRoUVER DANS l’ÉVANGIlE UNE ISSUE à lA VIolENcE chapitre I où commence la violence ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (L’amour des ennemis, Mt 5, 38-48) Jésus nous parle de la gestion de la violence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Un code pour les mains…. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . C’est la victime qui a le pouvoir de rompre l’escalade de la violence. . . . . « Tendre l’autre joue »… Serait-ce se défendre ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Jésus, subversif ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Jésus nous propose de noyer le mal par le bien ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’Amour des ennemis. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Où commence la violence ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . A qui accordons-nous d’être sauvé ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Perfection du Père et relation à notre imperfection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Jésus a-t-il tendu l’autre joue ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Un appel à la créativité ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Jésus apporte-t-il une nouvelle loi ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Comment aimer ses ennemis ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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TABlE DES MATIèRES
chapitre 2 Faire basculer le mur de la violence. . . . . . . . . . . . . . . .
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— Première clé — « Apprends à reconnaître la vérité de l’autre… » (L’histoire de la prostituée – Lc 7, 36-50) Un regard qui enferme les autres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le rappel de la conscience . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tu vois cette femme ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Une question de regard. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Ton adhérence te sauve . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Une autre façon de construire le mur… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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— Deuxième clé — « Apprends à reconnaître tes erreurs… » (La femme adultère – Jn 8, 1-11) Elle est coupable ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85 Violence rouge, violence blanche. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86 Tendre un piège pour accuser. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89 Se faire petit et prendre le temps du rappel de la conscience. . . . . . . . . . . . 90 Découvrir notre complicité avec la violence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92 La violence retournée contre soi : faut-il toujours un coupable ? . . . . . . . . 93 Oser demeurer malgré ma violence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95 Autre visage de la violence. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 « Je ne te condamne pas ! » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100 Deuxième partie
TRANSFoRMER lA VIolENcE AU QUoTIDIEN chapitre 3 Qu’est-ce que la non-violence active ? . . . . . . . . . . . . . 105
— la Roue du changement de Regard © — L’amour des ennemis, pas un amour sentimental ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 Dynamique de l’homme, dynamique de Dieu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109
— les cinq réponses à la violence — Passivité, contre-violence, non-violence tactique, non-violence spi-psy et non-violence active. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111 Trois critères permettent de distinguer les différentes réactions à la violence 116
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TABlE DES MATIèRES
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Un chemin qui conduit à la non-violence active . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tableau : Les cinq réponses à la violence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Il n’y a pas que la contre-violence qui est violente ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . Etre non-violent, ce n’est pas ne jamais être violent. . . . . . . . . . . . . . . . . . Un cheminement qui peut paraître contradictoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le non-violent est celui qui ne cherche pas à justifier sa violence . . . . . . . La violence est un cri ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Accepter notre humanité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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chapitre 4 Un chemin pour vivre plus intensément. . . . . . . . . . . La non-violence, ça s’apprend ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Des outils pour cheminer au quotidien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Que nous apporte la Bible sur ce chemin ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Un autre regard sur le monde… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Une évolution planétaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Un processus et une responsabilité personnelle de chacun . . . . . . . . . . . .
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chapitre 5 comment agir concrètement ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Démarrer en douceur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Les mécanismes de la violence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Découvrir notre propre violence devient une chance . . . . . . . . . . . . . . . . . Pour désapprendre et réapprendre, s’entraîner . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La fermeté permanente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le chemin se fait en marchant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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conclusion Vous avez dit impossible ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . (Le partage des pains, Mc 6, 30-44) Artisans de paix : mission impossible ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Apporter nos cinq pains et nos deux poissons… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Oser et croire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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ANNExES Annexe 1 Présentation de l’association « Sortir de la Violence » . 209 Annexe 2 Témoignages de participants à nos retraites-formations
213
Annexe 3 Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215 Annexe 4 collection « Sortir de la Violence ». . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
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2e édition achevée d’imprimer le 13 novembre 2015 en numérique par BookPress (Pologne)
Comment arrêter le cycle de violence dans les familles, les écoles, les banlieues ? Il y a aussi les violences plus cachées : la parole qui écrase, le mépris ou l’ignorance de celui qui est dans le besoin. Ces questions sont abordées avec intelligence et foi dans ce livre que j’ai lu avec passion. Je le trouve si vrai, si abordable et en même temps très pratique : comment aimer mon ennemi, celui qui semble menacer ma liberté ? […] Jésus nous enseigne une voie de vérité et d’amour. Les auteurs nous invitent à nous risquer sur cette voie. Le commandement de Jésus « Aimez vos ennemis » n’est pas une option. C’est un commandement et nous savons qu’il est assorti d’une promesse : il nous donnera la force pour le réaliser. Mais pour cela, nous devons faire un travail sur nous-mêmes ; il faut changer notre regard sur l’autre, l’ennemi. L’avenir de nos sociétés dépend du désir de chacun de nous laisser transformer par le message de Jésus pour devenir son instrument de vérité et de paix. Jean Vanier, extraits de la Préface
Benoît & Ariane Thiran-Guibert Mariés en 1988, ils ont trois enfants. En 1992, travaillant dans un projet de développement en Amérique du Sud, ils sont interpellés par la problématique de la violence et de l’injustice et décident de se former à la non-violence active. De retour en Europe, ils créent l’association « Sortir de la Violence » pour se mettre au service des personnes qui portent en elles le désir d’agir face à la violence. Ils ont publié aux éditions Fidélité Jésus non-violent, t. 1 (2010), t. 2 (2011) et t. 3 (2014). ISBN : 978-2-87356-685-2 Prix TTC : 16,95 €
Une production Sortir de la Violence ASBL
9 782873 566852 2e édition
Benoît & Ariane Thiran-Guibert
Entrer dans l’Evangile pour
sortir de la violence
Entrer dans l’Evangile pour sortir de la violence
Entrer dans l’Evangile pour sortir de la violence
Benoît & Ariane Thiran-Guibert
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Préface de Jean Vanier