HENRI MADELIN
Heurs et malheurs de l’autorité
au singulier
Entretiens avec Yohan Picquart
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Henri MADELIN
Heurs et malheurs de l’autorité Entretiens avec Yohan Picquart
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Au singulier, 38 Une collection dirigée par Françoise Le Corre et Annie Wellens
Du même auteur
Pétrole et politique en Méditerranée occidentale (préf. J.-M. Jeanneney), Armand Colin, 1973. Les chrétiens entrent en politique, Cerf, 1975. La menace idéologique, Cerf, 1988. Dieu et César : essai sur les démocraties occidentales (avec S. Toscer), Desclée de Brouwer, 1994. Sous le soleil de Dieu (entretien avec Y. de Gentil-Baichis), Bayard/Centurion, 1996. L’évangile social : guide pour une lecture des encycliques sociales (avec F. Boëdec), Bayard/Centurion, 1999. Jeunes sans rivages : héritiers et novateurs, Desclée de Brouwer, 2001. « Si tu crois » : l’originalité chrétienne, Bayard, 2004. Refaire l’Europe : le vieux et le neuf (préf. J. Delors), Le Rocher, 2007. Ainsi fait-il (avec C. Pigozzi), J’ai lu, 2015.
© 2018 Éditions jésuites, 7, rue Blondeau, 5000 Namur (Belgique) 14, rue d’Assas, 75006 Paris (France) www.editionsjesuites.com ISBN : 978-2-87299-332-1 D 2018/4255/1
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PRÉSENTATION
D’où vient l’autorité d’une personnalité politique ou religieuse ? Tient-elle à son charisme, à son intelligence ? Est-elle naturelle ou construite ? Questions aussi éternelles que brûlantes, à l’heure où beaucoup prétendent que tout ce qui fondait traditionnellement l’autorité semble s’être effondré : de parents à enfants, de maîtres à élèves, de gouvernants à citoyens, d’entrepreneurs à salariés, etc. À en croire Hannah Arendt, cet effondrement date déjà de plus d’un siècle et demi. Et pourtant, peu de thèmes sont à ce point réinterrogés à chaque génération — preuve à tout le moins qu’à l’égal des religions, les sociétés ont du mal à se passer de ces figures d’autorité qui ont bénéficié d’un moment favorable pour réaliser un dessein de Dieu sur terre ou pour concrétiser l’idéal politique d’un monde plus ouvert à la justice et à la paix. À l’expérience, cependant, rares sont les hommes et les femmes de pouvoir faisant aussi autorité, car si le pouvoir ne se partage guère, l’autorité se mesure au contraire à sa capacité de laisser place à des disciples, des héritiers. Reste que, contrairement au pouvoir qui est soumis à des mécanismes maintes et maintes fois analysés, l’autorité — son origine, son exercice — a partie liée au mystère. Elle ne se décrète pas, aucune école ne saurait apprendre à l’acquérir à bon marché. Tel est l’argument de fond qui a encadré les entretiens que l’on va lire. Pourquoi avoir proposé à Henri Madelin de s’y prêter ? Parce
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Présentation
qu’il est une des rares personnes vivantes aujourd’hui à avoir fait et faire autorité dans les deux ordres : le monde politique et le monde religieux. Professeur à Sciences-Po, conseiller d’hommes politiques influents, il a eu par ailleurs des charges importantes au sein de la Compagnie de Jésus, dès l’âge de 35 ans : directeur de l’Action populaire (Ceras), provincial, président du Centre Sèvres, aumônier du Mouvement chrétien des cadres (MCC), rédacteur en chef des Études, représentant de la Compagnie dans les institutions européennes… Son parcours se situe toujours dans l’entrecroisement du politique et du religieux. Paradoxalement, il faut faire preuve d’une grande humilité pour accepter de relire sa propre vie avec comme fil rouge un sujet à aussi forte charge humaine et symbolique. De sa petite enfance jusqu’à son âge étudiant, Henri Madelin tente de discerner entre les exemples et les contre-exemples d’autorité qui ont compté dans le discernement de sa vocation ; puis, dès qu’il fait lui-même autorité, ce que cela suppose pour soi et pour les autres ; sans occulter les périodes où il a perdu toute autorité avant d’en retrouver une de façon inattendue. Au cours de ces pages se dresse aussi une petite géographie de la croissance ou du retrait de cette « autorité » dans les temps que nous vivons. L’autorité grandit lorsqu’elle se relie à des sources qui la dépassent ; elle faiblit lorsqu’elle est livrée à ses seules forces et à son seul bon vouloir1. Yves Roullière 1er septembre 2017
1. Yohan Picquart s’est entretenu avec Henri Madelin à Paris au cours du premier semestre 2016.
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Chapitre premier ENFANCE ET ADOLESCENCE OU LIRE SUR LE VISAGE DES PARENTS (années 1930-1940)
ENFANCE – Pouvez-vous nous dire quelques mots sur vos origines ? – Je suis né le 26 avril 1936 à Guebwiller, en Alsace, quelques années avant le début de la Seconde Guerre mondiale. Mon père y était ingénieur des eaux et forêts. J’ai de maigres souvenirs de cette ville remplie de l’élégance alsacienne. Nous avons dû la quitter en 1939, ce qui était une heureuse décision car la menace de la guerre se profilait à un horizon tout proche. J’ai cependant, enfouies en moi, quelques images de ces premières années. J’y suis retourné dix ans après la fin de la guerre de 1939-1945 comme jeune scout. Comme tout enfant qui retrouve un espace d’autrefois grossi dans ses souvenirs, j’ai été déçu par la petitesse du jardin, des jouets et de l’habitat. Quand on est jeune et fourré dans les jambes des adultes, on a tendance à grossir les éléments, et je n’ai pas échappé à cette déformation du regard nostalgique. Mes parents ont découvert en Alsace le protestantisme qu’ils ne connaissaient pas. L’Alsace est une terre d’œcuménisme. Leurs amis et connaissances de cette période, qui appartenaient à la bourgeoisie industrielle, vinicole ou textile locale, étaient souvent des protestants. J’ai croisé moi-même beaucoup d’Alsaciens pleins de
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Chapitre premier
ferveur quand j’ai reçu des responsabilités dans l’Europe en construction à Bruxelles et Strasbourg. Pour vivre, un enfant doit apprendre de ceux qui l’ont engendré. J’ai découvert que la vie est un don que l’on reçoit, qui ne vient pas de vous. On pourra ensuite le partager et l’offrir. Nous avons à faire confiance à ceux qui nous parlent de leur expérience, de leur vécu personnel. Si l’on veut mieux comprendre et rêver, il est bon d’interroger ses proches. Leur vision est importante, y compris sur nos propres souvenirs que l’on a tendance à jeter aux orties, mais que nos parents n’oublient pas. Il est bon de recevoir ainsi le témoignage de témoins crédibles. On croit des témoins qui ont vu et peuvent nous parler d’un passé disparu. Nous n’avons pas été témoins de notre commencement. Il faut croire ceux qui l’ont vu. L’origine est encore plus insaisissable, car enveloppée d’ombre, alors que le commencement, la naissance, est daté et inscrit dans des registres. Dans la vie, nous sommes entourés de beaucoup de gens qui n’ont pas vu, mais croient. Nous sommes invités à la confiance. Nous ne sommes pas témoins, mais nous faisons confiance à des témoins. Le savoir du monde repose sur des croyances multiples que nous ne pouvons pas vérifier par nous-mêmes, mais en lesquelles nous croyons. Nous étions une famille de neuf enfants. Une famille nombreuse entraîne une coéducation avec parents, frères et sœurs, et amis. L’éducation reçue était assez affective, peu contraignante. La fratrie régulait la marche de l’ensemble. Je suis arrivé à trois ans à Blois, une ville calme mais qui, en 1940, était sur la route des Français qui partaient en « exode » et voulaient franchir l’unique pont sur la Loire avant qu’il ne soit trop tard. Nous sommes nous aussi partis vers le sud. Le convoi, après avoir subi des bombardements, s’est arrêté dans une ferme sise dans un petit village de la Creuse appelé Dun-le-Paletot, aujourd’hui Dun-le-Palestel. Quelques semaines plus tard, nous avons fait le chemin en sens inverse pour retrouver à Blois notre maison occupée. Il a fallu parlementer. Nous, les enfants, il nous fallait passer à une autre vie, du rural à l’urbain, d’une vie de plein air à l’enfermement dans une classe.
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Enfance et adolescence
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– Aviez-vous quelque conscience de la gravité des évènements qui s’abattaient sur l’Europe ? – En 1940 et 1944, la situation n’était pas gaie. Mais les enfants s’amusent plutôt de ces situations sans en percevoir le tragique. Ils vivent cependant des moments agités quand la peur et parfois la détresse se lisent sur le visage des parents. Les esprits se préparaient à recevoir les appels pour un renouveau européen : « Jamais plus la guerre. » Un enfant est courageux un peu malgré lui. Il ne réalise pas les dangers, ce qui lui donne des ailes dans les situations confuses. Nous aimions quand il y avait une alerte dans le quartier. J’appartiens encore à une génération qui a vécu des tranches de vie pleines de contrastes, des moments de restrictions sévères comparées au débordement d’achats d’aujourd’hui. Les descentes fréquentes dans les caves et abris le jour et la nuit nous faisaient découvrir les « grandes personnes » sous un autre jour : adultes cérémonieux et enrobés de noir, maniaques et peu rassurants. Nos parents n’aimaient pas du tout ces expéditions sous terre et la faune rassemblée dans ces lieux prétendument salvateurs. Mais il fallait faire face et ne pas devenir grincheux pour le reste de ses jours. – De la témérité ou le sentiment d’être protégés ? – Un peu des deux sans doute. Mais avant tout, le contraire de la routine. – Pourriez-vous dire quelques mots sur les membres de votre famille ? – J’avais un frère aîné de trois ans. Il est décédé il y a peu. Je pense que la position de second est assez enviable, car c’est souvent l’aîné qui subit les tâtonnements de l’invention pédagogique parentale. Il y a en moi quelque chose qui a besoin de distance, de liberté, de respiration personnelle loin de tous. Peut-être cela a-t-il un lien avec cette position de cadet dans ma fratrie. – Quel garçon étiez-vous ? – Apparemment obéissant, plus souriant que rieur, écoutant plutôt que questionnant.
En lecture partielle‌
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INDEX DES NOMS CITÉS
Alois, frère : 90 Arrupe, Pedro : 32, 73, 87, 88 Augustin, saint : 38, 61 Bartholomée, patriarche : 85 Bazin, Hervé : 13 Benoît XVI : 15, 42, 47, 115, 130 Bergoglio, Jorge Mario (voir François, pape) Bernanos, Georges : 86 Blondel, Maurice : 37 Boëdec, François : 111 Bonhoeffer, Dietrich : 82, 108 Borgia, François de : 27 Calvez, Jean-Yves : 47, 50, 51, 88, 105 Carter, Jimmy : 92 Certeau, Michel de : 114 Cesbron, Gilbert : 49 Ceyrac, Pierre : 85 Chateaubriand, François-René de : 35
Chevènement, Jean-Pierre : 59 Coty, René : 67 Cyrille, patriarche : 85 Cyrus : 131 David, André : 23 Debray, Régis : 106, 112, 113 Debré, Jean-Louis : 106 Debré, Michel : 106 Delbrêl, Madeleine : 50, 129 Delors, Jacques : 52, 99 Desbuquois, Gustave : 45 Dickens, Charles : 13 Dostoïevski, Fedor : 133 Emmanuelle, sœur : 85 Fauroux, Roger : 59 Fénelon : 118 Fernandel : 51 Flaubert, Gustave : 35, 36 François, pape : 30, 39, 42, 49, 82, 85, 92, 121, 126
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Index des noms cités
François Xavier, saint : 78, 79, 87 Gandhi, Mohandas K. : 134 Gaulle, Charles de : 34, 42, 6164, 66, 67, 106, 134 Gilbert, Guy : 85 Giuliani, Maurice : 32 Green, Julien : 35, 36 Greene, Graham : 86 Gremion, Catherine : 112 Havel, Václav : 134 Hegel, Georg W.F. : 37 Hevenesi, Gábor : 27 Hillesum, Etty : 129 Hugo, Victor : 35 Husák, Gustáv : 134 Ignace de Loyola, saint : 27, 28, 30, 31, 71, 81, 84, 86, 88 Jean, saint : 108 Jean XXIII : 35, 37 Jean-Paul II, saint : 40, 47, 55, 84, 89, 130 Jeanne d’Arc, sainte : 134 Jésus Christ : 29, 30, 108, 110, 133 Jospin, Lionel : 52 Lacouture, Jean : 98, 99 Leclerc, Philippe : 63 Le Corre, Françoise : 108 Leroy, Henri-Joseph : 45 Leroy, Roland : 51 Lustiger, Jean-Marie : 74 Macron, Emmanuel : 122 Malot, Hector : 13
Marc, saint : 28, 29 Maritain, Jacques : 37 Martini, Carlo Maria : 82, 102, 103 Marx, Karl : 21, [48], 50, [88] Matthieu, saint : 98 Mauriac, François : 19, 86 Mendès-France, Pierre : 66, 67 Michelet, Edmond : 43 Mitterrand, François : 19, 72, 90 Mollet, Guy : 67 Moltmann, Jürgen : 97 Montesquieu : 38 More, Thomas : 134 Newton, Isaac : 36 Pascal, Blaise : 64, 75, 135 Pasquier, Étienne-Denis : 63 Patocka, Jan : 134 Paul, saint : 29, 71, 83, 97, 112, 120, 132, 135 Paul VI : 42, 49 Pie XII : 24, 35, 49 Pierre, abbé : 85 Pierre, saint : 114 Pierre Chrysologue, saint : 41 Pigozzi, Caroline : 84, 126 Pivot, Bernard : 131 Pleven, René : 22 Poupard, Paul : 59 Rahner, Karl : 30, 31 Reagan, Ronald : 92 Rejadell, Thérèse : 28 Rémond, René : 74 Ricci, Matteo : 81 Rimbaud, Arthur : 134 Rocard, Michel : 52
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Index des noms cités
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Roger, frère : 89, 90 Rufin, Jean-Christophe : 20
Tocqueville, Alexis de : 113, 115 Toscer, Sylvie : 101
Sangnier, Marc : 46 Sarkozy, Nicolas : 72, 73, 110 Schuman, Robert : 83 Socrate : 134 Sommet, Jacques : 43, 50 Spadaro, Antonio : 110 Staline, Joseph : 24, 134 Stendhal : 35
Vallet, Odon : 121 Vatican II : 37, 39, 85, 88, 102 Verdier, Jean : 46 Vermeersch, Jeannette : 34 Videla, Jorge Rafael : 86 Vingt-Trois, André : 109
Teilhard de Chardin, Pierre : 59, 106, 129 Teresa, mère : 85 Thorez, Maurice : 34
Zola, Émile : 13
Weber, Max : 60, 61, 111
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TABLE DES MATIÈRES
Présentation ............................................................................................
5
Chapitre premier. Enfance et adolescence ou lire sur le visage des parents (années 1930-1940) ............................................................
7
Chapitre II. Premiers pas dans l’âge adulte ou l’entrée en politique (années 1950) ....................................................................................
17
Chapitre III. L’entrée dans la Compagnie de Jésus ou l’autorité comme service et comme don (fin des années 1950)....................
23
Chapitre IV. Décolonisation, fin de la guerre d’Algérie ou l’effritement des autorités (années postconciliaires)..................................
33
Chapitre V. À l’Action populaire ou le primat de la question sociale (1968-1978) ........................................................................................
45
Chapitre VI. Provincial des jésuites ou l’art de conjuguer liberté des personnes et efficacité des actions (1979-1985) ............................
69
Chapitre VII. Président du Centre Sèvres ou comment travailler avec des intellectuels (1984-1991) ..................................................
91
Chapitre VIII. Aumônier du MCC ou la responsabilité sociale (1991-1995) ........................................................................................
95
Chapitre IX. Rédacteur en chef d’Études ou comment parler des choses de la terre sans oublier celles du ciel (1995-2004) ............ 105 Chapitre X. Au Conseil de l’Europe, à Bruxelles, ou l’épreuve de la perte d’autorité (2005-2010)............................................................ 117
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Table des matières
Chapitre XI. Entre Paris et Strasbourg (de 2010 à nos jours) .......... 125 Chapitre XII. Ouvertures ...................................................................... 129 Annexe. Faire autorité, par H. Madelin .............................................. 133 Index des noms cités.............................................................................. 137 Table des matières .................................................................................. 141
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ImprimĂŠ en Belgique Janvier 2018 Imprimerie Bietlot.
R
Henri MADELIN s.j., politologue et Êcrivain, reprÊsente l’Office catholique d’information et d’initiative pour l’Europe (O CIPE ) au Parlement de Strasbourg. Il est l’auteur de nombreux ouvrages
Yohan PICQUART, journaliste, a publiĂŠ des entretiens notamment avec Mgr GĂŠrard Defois et le cardinal Albert Vanhoye s.j.
ISBN : 978-2-87299-332-1
9 782872 993321
14,50 â‚Ź
www.editionsjesuites.com
En couverture : City tree Š Rafał Sie czyk | Dreamstime.com
ares sont les hommes et les femmes de pouvoir qui font aussi autoritÊ. Car si le pouvoir ne se partage guère, l’autoritÊ se mesure au contraire à sa capacitÊ de faire grandir autrui pour lui permettre de donner sa pleine mesure. Contrairement au pouvoir qui est soumis à des mÊcanismes maintes fois analysÊs, l’autoritÊ — son origine, son exercice — a partie liÊe au mystère. Elle ne se dÊcrète pas, aucune Êcole ne saurait apprendre à l’acquÊrir à bon marchÊ. Tel est l’argument de fond qui a sous-tendu ces entretiens avec Henri Madelin. Pourquoi avoir choisi ce jÊsuite ? Parce qu’il est de ceux qui, dans le monde francophone, ont fait et font autoritÊ à la fois dans le monde politique et le monde religieux. Professeur à Sciences-Po, conseiller d’hommes politiques influents, il a eu par ailleurs des charges importantes au sein de la Compagnie de JÊsus, dès l’âge de 35 ans : directeur de l’Action populaire (C ERAS ), provincial, prÊsident du Centre Sèvres, aumônier du Mouvement chrÊtien des cadres (MCC), rÊdacteur en chef d’Études, reprÊsentant de la Compagnie dans les institutions europÊennes‌ Son parcours s’est toujours situÊ dans l’entrecroisement du politique et du religieux.