CATHERINE VIALLE
Abimélek ou l’homme qui voulut être roi
Juges 9
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Catherine Vialle
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Collection Péricopes, 2 dirigée par Didier Luciani et Jean-Pierre Sonnet, s.j. Des ouvrages courts et centrés sur des textes peu connus, énigmatiques ou même scandaleux des Écritures… qui méritent néanmoins le détour. Une collection de commentaires proposant des analyses fines et accessibles, pour lire seul, ou, mieux, en groupe, à Bible ouverte.
Du même auteur Chez Lessius (collectifs) Révéler les œuvres de Dieu. Lecture narrative du livre de Tobie (avec E. Di Pede, Cl. Lichtert, D. Luciani et A. Wénin), 2014. « Vous serez mon peuple et je serai votre Dieu ». Réalisations et promesse (dir. Ph. Abadie, Fr. Lestang, M. Rastoin et M.-H. Robert), 2016. Chez d’autres éditeurs Une naissance peu banale : celle de Jésus (avec F. Hugon et B. Wiame), Lumen Vitae, coll. À l’école de la Bible, Bruxelles, 2008. M.-H. Robert, J. Matthey, C. Vialle (éd.), Figures bibliques de la mission, Cerf, coll. Lectio Divina, Paris, 2010. Une analyse narrative comparée d’Esther TM et LXX. Regard sur deux récits d’une même histoire, Peeters, coll. Bibliotheca Ephemeridum Theologicarum Lovaniensium no 233, Leuven, 2010. J.-M. Auwers, E. Di Pede, D. Nocquet, J. Vermeylen, C. Vialle, A. Wénin, Psaumes de la Bible, psaumes d’aujourd’hui, Cerf, coll. Lire la Bible no 170, Paris, 2011. C. Vialle, J. Matthey, M.-H. Robert, G. Vidal, Sagesse biblique et mission, Cerf, coll. Lectio Divina, Paris, 2016. L’arbre (Ce que dit la Bible sur…), Nouvelle Cité, Bruyères-le-Châtel, 2016. La miséricorde dans la Bible, Cerf, coll. Cahiers Évangile no 178, Paris, 2016.
© 2018, Éditions jésuites Belgique : 7, rue Blondeau, 5000 Namur France : 14, rue d’Assas, 75006 Paris ISBN : 978-2-87299-353-6 Dépôt légal : D. 2018, 4255-06 Maquette et mise en page : Jean-Marie Schwartz Imprimé en France
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INTRODUCTION
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eu de gens parmi les lecteurs de la Bible savent que le premier roi d’Israël ne fut pas David, ni même Saül, mais un certain Abimélek — du moins si l’on s’en tient à ce qui est raconté dans le livre des Juges. La mémoire biblique elle-même semble avoir oublié ce fils de Gédéon pourtant choisi comme roi par les notables de Sichem. Mais il est vrai que c’est d’une histoire terrible qu’il s’agit, pleine de sang et de fureur. Tout commence avec un fratricide : pour monter sur le trône, Abimélek tue ses soixante-dix demi-frères, tous fils du juge Gédéon. Son règne sera bref, entaché par des querelles avec les notables de Sichem qui l’ont hissé au pouvoir, et se terminera par une véritable guerre civile au cours de laquelle le roi massacrera son propre peuple. C’est une femme, du sommet d’une tour assiégée par l’armée d’Abimélek, qui débarrassera Israël du tyran, en lui envoyant une meule sur la tête. Touché à mort, Abimélek demandera à son écuyer de l’achever par l’épée : personne ne devra savoir qu’il a été tué par une femme ! À première vue, on peut se demander quel est l’intérêt de raconter une telle histoire, et, encore plus, d’y revenir pour la commenter… L’histoire passée et actuelle ne connaît-elle
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introduction
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pas suffisamment d’horreurs ? Faut-il en rajouter, et pourquoi la Bible le fait-elle ? Pourtant, contrairement aux apparences, Dieu est à l’œuvre dans ce sombre récit qui se termine par ces mots qui nous mettent sur la piste : « Dieu fit revenir le mal qu’Abimélek avait fait à son père en assassinant ses soixante-dix frères. Et tout le mal commis par les hommes de Sichem, Dieu le fit revenir sur leur tête ; et vint sur eux la malédiction de Yotam, fils de Yerubbaal » (Jg 9, 56-57). Tout ce qui est rapporté du règne d’Abimélek n’est finalement que le fruit d’un crime fratricide qui s’est retourné contre son auteur et ceux qui ont rendu possible son geste. Ainsi cette histoire est une bonne illustration du pouvoir autodestructeur de la violence : fratricide et trahison engendrent trahison et massacres. Dans le même sens, ce récit illustre comment un pouvoir peut devenir pervers et finir par se retourner contre ceux qui l’ont mis en place. C’est aussi une histoire d’infidélité et d’idolâtrie : les Israélites sont infidèles à la mémoire de Gédéon et à l’alliance avec Dieu, et se tournent vers les baals, divins et humains — ce même mot désignant, en Jg 9, tantôt les propriétaires de Sichem et tantôt la divinité cananéenne combattue à moult reprises dans l’Ancien Testament1. Ce récit invite donc son lecteur, quitte à le choquer, à réfléchir aux fondements du pouvoir qu’il se choisit : se fonde-t-il sur la violence, la trahison et l’idolâtrie ou sur les commandements de Dieu et le respect de l’alliance conclue avec lui ? C’est sans doute à travers cette question implicite que se trouve le lien entre l’histoire d’Abimélek et les autres récits du livre des Juges : tous mettent en place une réflexion 1. Le mot hébreu ba‘al possède plusieurs sens : mari, propriétaire, citoyen, maître, ou bien désigne une divinité cananéenne, notamment quand il est utilisé avec l’article. Cf. L. K!"#$"% et W. B&'()&%*+"%, The Hebrew and Aramaic lexicon of the Old Testament, vol. 1, Leiden-New York-Köln, Brill, 1967, p. 142-144.
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introduction
sur le pouvoir et les modalités d’exercice de celui-ci, à différents niveaux et notamment en lien avec Dieu. L’approche choisie pour la lecture de ce récit se veut essentiellement narrative : elle envisage le texte dans son état actuel et au sein du corpus dans lequel il nous a été transmis, à savoir la Bible hébraïque2. Elle regarde le texte avant tout comme un récit, quelque chose que l’on raconte, fruit des choix d’un narrateur, porteur de message à l’intention d’un lecteur3. 7
2. L’histoire d’Abimélek a été étudiée de la sorte pendant un peu plus d’une année par un groupe dont je fais partie et qui a choisi d’aborder les textes bibliques sous l’angle narratif. Je remercie les membres pour leurs apports respectifs : Elena Di Pede, Birgitta Drobig, Claude Lichtert, Didier Luciani, Constantin Pogor, Marguerite Roman et André Wénin. 3. En fin de volume, on trouvera une traduction originale complète du texte biblique dont ce livre propose l’exégèse.
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LE TERREAU D’OÙ NAQUIT ABIMÉLEK
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vant d’entrer plus en avant dans la terrible histoire d’Abimélek, il est important de poser quelques balises qui permettront au lecteur de s’orienter au mieux. Après quelques lignes sur le livre des Juges et l’historicité du récit d’Abimélek, ce chapitre sera consacré à une évocation des derniers versets du cycle de Gédéon (Jg 8, 20-35). Non seulement parce que Gédéon est le père d’Abimélek, ce qui est raconté en 8, 31, mais aussi parce c’est Gédéon luimême, par les choix qu’il posera après sa victoire sur Madian, qui sèmera les graines de l’idolâtrie, de la rivalité fratricide et du désir de royauté qui s’épanouiront dans le récit d’Abimélek. Est-ce à dire que Gédéon porte la responsabilité des choix calamiteux de son fils et des baals de Sichem ? Nous n’irons pas jusque-là, ce serait nier la responsabilité de chacun des partis sur laquelle insiste le récit. Cependant, il faut considérer que Gédéon a sa part de responsabilité dans ce qui arrive, en tant que juge et en tant que père. Cela conduit le lecteur à s’interroger sur les conséquences graves que peuvent avoir un gouvernement et une paternité défaillante.
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En lecture partielle‌
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TABLE DES MATIÈRES
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Introduction ........................................................................
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Le terreau d’où naquit Abimélek .................................... Du livre des Juges.................................................................. Histoire et historicité du récit d’Abimélek ............................ Fin de l’histoire de Gédéon et prélude à celle d’Abimélek (Jg 8, 20-35) ................................................................................ Fin en demi-teinte de Gédéon : à moitié roi, à moitié idolâtre 15 Idolâtrie, oubli de Yhwh et de Yerubbaal Gédéon.................. La naissance d’Abimélek........................................................ L’importance des noms propres ............................................ Intrigue d’ensemble du récit et découpage en micro-récits ........
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À nous deux Sichem. L’ascension d’Abimélek .............. 31 L’alliance avec les baals de Sichem (9, 1-4) .......................... 31 Abimélek tue ses soixante-dix frères (9, 5) ............................ 35 Abimélek est fait roi. Parabole de Yotam........................ Abimélek est fait roi (9, 6) .................................................... La parabole de Yotam (9, 7-15).............................................. Application de la parabole à la situation présente (9, 16-20) Sortie de scène de Yotam (9, 21)............................................
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table des matières
Prince ou roi ? (9, 22) ............................................................
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Abimélek contre les baals de Sichem (I partie) ............ 55 Dieu s’en mêle........................................................................ 55 La trahison des baals de Sichem (9, 25) ................................ 57 re
Abimélek contre Gaal ........................................................ Provocation de Gaal (v. 26-29).............................................. Intervention de Zebul (v. 30-33) .......................................... Réaction d’Abimélek (v. 34-41) ............................................ 102
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Abimélek contre les baals de Sichem (IIe partie) ............ 69 Vengeance contre les habitants de Migdal-Sichem ...... 73 Les baals de Migdal-Sichem se réfugient dans la crypte de la maison de leur Dieu (v. 46-47).......................................... 73 L’attaque d’Abimélek (v. 48-49) ............................................ 75 Fin lamentable d’Abimélek .............................................. Une imprudence fatale .......................................................... Une seule femme .................................................................... Tué par son écuyer, à sa demande ........................................
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Épilogue .............................................................................. 85 Traduction du texte étudié ................................................ 89 Quelques éléments bibliographiques .............................. 95 Sur le livre des Juges.............................................................. 95 Sur Juges 9 ............................................................................ 96 Table des matières .............................................................. 101
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eu de gens parmi les lecteurs de la Bible savent que le premier roi d’IsraÍl ne fut pas David, ni même Saßl, mais un certain AbimÊlek — du moins si l’on s’en tient à ce qui est racontÊ dans le livre des Juges. La mÊmoire biblique ellemême semble avoir oubliÊ ce fils de GÊdÊon pourtant choisi comme roi par les notables de Sichem. Mais il est vrai que c’est d’une histoire terrible qu’il s’agit, pleine de sang et de fureur. Tout commence avec un fratricide : pour monter sur le trône, AbimÊlek tue ses soixante-dix demi-frères, tous fils du juge GÊdÊon. Son règne sera bref, entachÊ par des querelles avec les notables de Sichem qui l’ont hissÊ au pouvoir, et se terminera par une vÊritable guerre civile au cours de laquelle le roi massacrera son propre peuple. C’est une femme, du sommet d’une tour assiÊgÊe par l’armÊe d’AbimÊlek, qui dÊbarrassera IsraÍl du tyran, en lui envoyant une meule sur la tête. TouchÊ à mort, AbimÊlek demandera à son Êcuyer de l’achever par l’ÊpÊe : personne ne devra savoir qu’il a ÊtÊ tuÊ par une femme ! Catherine Vialle est Docteur en thÊologie. Professeur d'exÊgèse à l'UniversitÊ catholique de Lille. Professeur d'Écriture sainte au SÊminaire de Namur depuis 2007.
ISBN : 978-2-87299-353-6
9 782872 993536
9,00 â‚Ź
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