Vivre le Christ au quotidien

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André de Jaer André de Jaer, jésuite, a pendant plus de vingt ans exercé un ministère d’accompagnement spirituel pour les jeunes jésuites du monde entier en « troisième an ». Il est actuellement installé en Belgique, où il anime de nombreuses sessions et retraites et collabore à la Formac (formation à l’accompagnement). Il a travaillé ici avec une équipe composée de Philippe Franchimont, Jean Burton, Daniel de Crombrugghe et Suzy de Gheest, du Centre spirituel de La Pairelle, à Namur (Belgique). ISBN 978-2-87356-405-6 Prix TTC : 19,00 €

9 782873 564056

André de Jaer et une équipe

VIVRE LE CHRIST AU QUOTIDIEN Pour une pratique des Exercices spirituels dans la vie

Spiritualité

ignatienne

fidélité

Spiritualité

André de Jaer

Peut-on faire les Exercices spirituels sans se retirer dans une « maison de retraite » ou dans un monastère ? Saint Ignace avait déjà prévu la possibilité de les faire chez soi. Ce livre est d’abord destiné aux personnes qui désirent prendre ce chemin de vie spirituelle avec le Christ au quotidien et à ceux ou celles qui les accompagnent. Mais il peut aussi intéresser les personnes qui désirent mieux connaître la spiritualité ignatienne, enracinée toute entière dans la démarche des Exercices spirituels qui se déploie dans ces pages.

VIVRE LE CHRIST AU QUOTIDIEN

VIVRE LE CHRIST AU QUOTIDIEN

ignatienne



Vivre le Christ au quotidien Pour une pratique des Exercices spirituels dans la vie



André DE JAER, jésuite et une équipe

Vivre le Christ au

quotidien Pour une pratique des Exercices spirituels dans la vie 2e édition


Du même auteur : « Je veux que tu nous serves », Namur, Fidélité, 1990. À cause de Jésus et de l’Évangile. Des prophètes pour notre temps, Bruxelles, Vie consacrée, 1994. « Je veux que tu nous serves », Namur, Fidélité, 1990. « Faire corps pour la mission ». Lire les Constitutions de la Compagnie de Jésus, Bruxelles, Lessius, 1998. Traduction anglaise (2001). « Vivre le Christ au quotidien », Namur, Fidélité, 2003. Traduction néerlandaise (2005) et espagnole (2007).

Nihil obstat : Xavier Dijon, s.j., Provincial de Belgique Méridionale, 5 juin 2003.

Toute reproduction ou adaptation d’un extrait quelconque de ce livre par quelque procédé que ce soit, et notamment par photocopie ou microfilm, réservée pour tous pays. © Éditions Fidélité • 7, rue Blondeau • BE-5000 Namur • BELGIQUE • info@fidelite.be Dépôt légal 1re édition : D/2003/4323/17 Dépôt légal 2e édition : D/2008/4323/12 ISBN 1re édition 2-87356-265-X ISBN 2e édition 978-2-87356-405-6 Imprimé en Belgique Photo de couverture : Détail d’un vitrail de l’église du Sacré-Cœur à Arlon (Belgique) : Ignace et François Xavier. Photo © Jean Lecuit, s.j.


Présentation

Ce livre voudrait être un guide pour un chemin de prière parcouru à l’aide des Exercices spirituels de saint Ignace et une ouverture à la spiritualité ignatienne. Il a été constitué progressivement à partir de plusieurs sessions de formation aux Exercices spirituels dans la vie quotidienne étalées sur un an et données au centre spirituel de La Pairelle (Wépion, Belgique). Chacune de ces sessions groupait une vingtaine de personnes désireuses de faire la démarche des Exercices de cette manière. Une rencontre mensuelle permettait de se soutenir mutuellement, de mieux percevoir le point où chacun en était et de donner des orientations et des conseils pour la suite de la démarche. Chaque personne recevait au fur et à mesure les feuilles qui la concernaient à l’étape où elle se trouvait et était évidemment accompagnée individuellement pour respecter son rythme propre. On trouvera donc ici des documents de divers types. Introductions aux différentes étapes de la démarche et leur sens, suggestions, pistes et références bibliques pour la prière, indications sur les différentes manières de prier, conseils pour se guider selon l’Esprit, fiches pédagogiques, etc. À première vue, cela pourra paraître disparate au lecteur, mais il s’agit de documents qui permettent une introduction progressive à une démarche qui a sa cohérence et son dynamisme propres. Cette dynamique parcourt les différentes étapes de l’existence chrétienne, à réactualiser sans cesse dans notre vie, et qui correspondent au déroulement du Dessein d’amour de Dieu dans l’histoire du salut accompli par le Christ.

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PRÉSENTATION

De plusieurs côtés on nous a dit que ces textes pouvaient être une aide et éclairer des personnes qui s’intéressent d’une manière ou d’une autre à la spiritualité ignatienne. Ce dossier peut donc être lu et utilisé de différentes manières. Nous voudrions y rendre attentif.

❶ On pourra par exemple lire ou consulter ces pages comme une introduction ou plutôt une ouverture non seulement aux Exercices, mais aussi à la spiritualité ignatienne. Cependant on ne la découvrira pas ici sous la forme d’une présentation ou d’une information théorique. Elle se déploie plutôt comme l’entrée dans une démarche qui interpelle l’ensemble de l’existence humaine et l’invite à convertir son cœur et à se laisser introduire et conformer progressivement au mystère du Christ et de son Évangile pour œuvrer avec lui au « rassemblement dans l’unité des enfants de Dieu dispersés » (Jn 11, 52) et ainsi chercher et trouver Dieu en toute chose.

➋ Mais ce dossier peut sans doute être plus utile encore à des personnes qui souhaitent faire elles-mêmes la démarche des Exercices dans la vie quotidienne et entrer ainsi au cœur de la spiritualité ignatienne. Pour réaliser cette démarche avec fruit, il est évidemment plus que souhaitable de l’accomplir en lien régulier avec une personne qui vous accompagne et vous aide à discerner le point où vous en êtes et la manière d’avancer, ainsi qu’à reconnaître les signes de l’Esprit de Dieu ou de l’ennemi dans cette démarche, et les fausses pistes ou les impasses dans lesquelles on risque de s’engager. Elle pourra aussi indiquer au fur et à mesure les documents qui aideront selon l’étape que l’on habite dans la prière. Cependant, si une régularité au moins bimensuelle de rencontre n’était pas possible, une personne qui souhaiterait faire les Exercices dans la vie quotidienne trouvera dans ce dossier un certain nombre d’éléments aptes à soutenir sa démarche personnelle plus solitaire. Qu’elle garde toutefois le souci de rencontrer régulièrement une personne compétente en vue de faire le point avec elle. ➌ Enfin, ce dossier peut aider aussi des personnes qui sont appelées à donner les Exercices spirituels dans la vie quotidienne, en leur fournis-

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PRÉSENTATION

sant des matériaux qu’elles peuvent utiliser pour elles-mêmes, ou pour les donner en temps opportun aux personnes qu’elles accompagnent. L’origine de ces textes explique que l’on ait gardé parfois le style direct du « vous », du « nous » ou du « je » plutôt qu’une formule impersonnelle. Ce « vous » pourra aider le lecteur à entrer dans une lecture spirituelle et existentielle des Exercices. Nous nous rendons bien compte du caractère limité et imparfait de ce travail. C’est pourquoi nous le présentons sous forme de dossier. (Invitation donc à être corrigé, complété, etc.) Mais nous espérons que, tel quel, il pourra déjà être utile à celles et ceux qui ont soif d’enraciner leur existence dans un terreau fécond et de l’ouvrir à une vision où l’espérance est nourrie par un amour qui prend corps dans notre monde.

Remerciements Toute une équipe est à l’origine de ce dossier. Elle se compose de Philippe Franchimont, Jean Burton, Daniel de Crombrugghe, Suzy de Gheest, André de Jaer. Ce livre est né de notre collaboration fraternelle et de notre désir de partager avec d’autres notre joie de « vivre le Christ au quotidien ». Nous voudrions remercier tous ceux et celles qui par leurs publications et leurs travaux nous ont aidé à écrire ces pages, en particulier le père Giuliani grâce à son livre L’expérience des Exercices spirituels dans la vie, et le père Albert Chapelle, qui vient d’entrer dans la Vie, et qui a pétri plusieurs d’entre nous par ses travaux et son expérience des Exercices spirituels. Nous voudrions remercier aussi toutes les personnes qui ont participé aux sessions de formation aux Exercices spirituels dans la vie quotidienne et dont l’intérêt et le chemin spirituel parcouru nous ont stimulés à publier quelque chose de ce que nous avons vécu ensemble, espérant que cela pourrait être utile à d’autres.



Introduction

Description L’expérience spirituelle proposée par les Exercices spirituels de saint Ignace peut être vécue sous des formes diverses, également authentiques. La plus connue a été longtemps appelée « retraite fermée de cinq, huit, dix, trente jours », vécue dans un cadre où le retraitant accepte une rupture avec sa vie familiale et professionnelle — cadre de silence, de conférences spirituelles avec un accompagnement éventuel, de nombreux temps de prière quotidienne, etc. Dans notre vie moderne et agitée, cela favorise un retour à soi-même, une redécouverte de la source de sa vie et de son action. « Une autre forme se développe de plus en plus, déjà prévue par Ignace mais quelque peu adaptée pour aujourd’hui. Au lieu d’opérer la séparation évoquée, le retraitant parcourt l’itinéraire des Exercices et en assure les conditions spirituelles à l’intérieur du cadre de vie habituel de son existence, sans renoncer aux responsabilités qui sont les siennes. Bien sûr, il faut modifier quelque peu le rythme des journées : temps quotidien à assurer à la prière, rencontre régulière avec un accompagnateur (et avec le groupe s’il s’agit d’un groupe), mais le déroulement normal de la retraite s’accomplit dans la vie courante, et donc en relation immédiate avec les événements de la vie » (cf. M. GIULIANI, L’expérience des Exercices spirituels dans la vie, DDB, Paris, 1991, p. 14).

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INTRODUCTION

Motivations Cette expérience, ce type de retraite peut être vécu par toutes celles et tous ceux « qui ont la volonté de consacrer, pendant une certaine période, une part notable de leur journée à la recherche de Dieu dans leur vie courante afin de conformer plus franchement leur vie au Christ et à son évangile. Ce qui amène à le faire peut être lié à une décision à prendre, à un niveau professionnel, ou de relations, ou d’engagement de vie, etc. […] Mais bien souvent, il s’agit moins d’une décision à prendre que d’une orientation à préciser : faire le point, en un moment de trouble, d’incertitude, un tournant dans la vie, une nouvelle étape qui commence. Ou encore désir de retrouver la paix du cœur qu’on sent menacée ou perdue, ou de situer sa vie à neuf devant Dieu après dix ou vingt ans d’engagement, alors qu’un sentiment d’usure, de regret, voire d’amertume vient miner le cœur ou la conscience, ou de se livrer avec plus de détermination à la prière, la relation à Dieu en toutes choses, comme une aventure intérieure dont on ressent l’appel » (GIULIANI, ibid. p. 14-15). « La réponse à ces questions et à ces désirs ne sera évidemment pas trouvée autrement que par une lente conversion du cœur et une docilité de tout l’être à l’Esprit de Dieu. En se proposant de faire les Exercices dans la vie, on s’ouvre donc à une expérience fondamentale, pour laquelle saint Ignace propose un soutien dont les traits essentiels peuvent être rappelés de la manière suivante » (GIULIANI, ibid. p. 15).

Traits essentiels et conditions La prière personnelle « Le retraitant, quelle que soit son activité, consacre chaque jour un bon temps à la prière personnelle. Sans déterminer nécessairement à l’avance le temps que l’on pourra y consacrer, qui peut dépendre des contraintes s’exerçant sur une vie, il sera bon d’en parler

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INTRODUCTION

avec la personne qui accompagne. (Habituellement ce temps se situe entre une demi-heure et une heure, en fonction du rythme de vie, du tempérament, etc.) L’essentiel est que, peu à peu, d’un jour et d’une semaine à l’autre, s’établisse entre les thèmes priés et les attitudes vécues comme une trame, une continuité, des constantes qui habitent aussi les journées et sont révélatrices des tendances profondes dans lesquelles il devient possible de percevoir comment Dieu conduit » (GIULIANI, ibid. p. 15). Bien souvent il n’est pas facile de se ménager ce temps. Il importe de prendre une décision ferme, en accord autant que possible avec les membres de son entourage.

La réflexion personnelle dans le courant de la journée Il s’agit de s’éduquer à faire une lecture spirituelle du quotidien que l’on vit. Apprendre à vivre sa vie progressivement dans la lumière habituelle de la foi, à reconnaître effectivement la voix discrète du Seigneur, à lire les signes qu’Il nous donne de sa présence et de son œuvre dans notre travail et notre vie. C’est là que se situe l’originalité des Exercices spirituels dans la vie courante. La vie quotidienne est prise en compte, comme une manière de prier. Cette réflexion portera d’abord sur la lecture du présent, la manière dont il est vécu, les sentiments, les motions spirituelles qui l’habitent, pour mieux le situer et l’ordonner vers Dieu et en Dieu et son dessein d’amour (aidé aussi par le thème de la prière quotidienne). « On apprendra également à relire ce qui a été vécu dans des périodes plus anciennes, éventuellement dans une relecture de l’histoire sainte de notre vie, pour prendre conscience des motifs qui déterminent les choix et les comportements ; pour découvrir sous le regard de la foi où sont les joies, les craintes, les sources de dynamisme et de vie, ou au contraire d’inhibition et de repli sur soi. On apprendra à reconnaître ces alternances entre sentiments divers. Pourquoi ce malaise en moi, ou cette décision rapide ; cet énervement ou cette joie. D’où vient ce dynamisme ou cette résistance ?

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INTRODUCTION

Ainsi se précise lentement pour chacun une habitude de discernement spirituel du quotidien et de la vie, qui amène par étapes à choisir de se laisser conduire par le Seigneur afin de collaborer à notre place au service du Royaume de Dieu dans l’Église » (GIULIANI, ibid. p. 16).

La relecture de la journée Pour nous aider à entrer dans cette lecture spirituelle du quotidien, saint Ignace propose dans les Exercices de prendre chaque jour, de préférence dans la soirée, un temps de relecture de la journée. On l’expliquera par ailleurs et le schéma de cette relecture se trouve dans l’Annexe 3 ; là se rejoignent la vie et la prière. J’y relis mon existence quotidienne avec les yeux du Seigneur, et j’apprends à aimer ma vie avec le cœur de Dieu. Ma vie en vaut la peine, avec sa beauté mais aussi ses côtés sombres et décevants. Relire ma réalité quotidienne me prédispose pour le futur. Ce que je vis maintenant de manière plus réfléchie transforme ma réalité profonde, afin de vivre le quotidien de manière plus intégrée. On fait mémoire du passé pour nourrir l’espérance du lendemain.

La relation avec la personne qui accompagne Pour vivre cette attention théologale au quotidien, il est important d’être en relation avec un témoin, qui aide à relire ce qui est vécu, l’expérience dans laquelle on se trouve engagé. On lui rend compte dans la confiance et l’ouverture du cœur de la manière dont s’est passée l’étape écoulée et la prière. Ce guide « apporte au retraitant une garantie indispensable non seulement pour soutenir et stimuler de l’extérieur, mais pour vérifier et interpréter les forces qui agissent dans notre conscience humaine travaillée par la grâce créatrice de Dieu » et son Esprit, mais aussi par « l’ennemi de la nature humaine » comme le dit Ignace.

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INTRODUCTION

« Des entretiens sont donc à prévoir proposés au rythme de deux fois par mois environ, à évaluer au cours de la démarche, où l’on évoque les joies et les difficultés du cheminement, les lumières et les obscurités de la saisie de soi-même dans l’expérience de la docilité à l’Esprit », que ce soit dans la prière ou dans les situations de la vie quotidienne. La conviction fondamentale de la personne qui accompagne est, comme le dit Ignace, l’assurance que « le Créateur agit immédiatement avec sa créature », et que sa tâche à lui ou à elle, accompagnateur ou accompagnatrice, est d’aider la personne à se disposer, à être docile, pour laisser Dieu faire son œuvre en elle et lui manifester lui-même sa volonté d’amour.

Les rencontres communes Finalement, comme il s’agit d’Exercices spirituels dans la vie courante en groupe, un dernier trait concerne les rencontres communes mensuelles. Elles consistent en une mise en commun par petits groupes de cinq ou six personnes, et d’autre part en orientations données pour le mois suivant. Dans ces petits groupes, préparés par un temps de prière personnelle, chaque personne pourra partager très librement quelque chose des joies, des difficultés, de la manière dont le Seigneur a parlé, conduit, manifesté sa présence pendant le mois écoulé. Les orientations données ensuite consisteront en un temps d’enseignement qui introduit à l’étape du mois suivant, avec des références d’Écriture pour nourrir la prière. Cette dimension commune a bien des avantages, mais elle comporte des limites. À chaque rencontre, on présente une étape nouvelle du chemin des Exercices. Il peut se faire qu’un des retraitants n’en soit pas encore là, et sente la nécessité de demeurer dans l’étape précédente, n’en ayant pas encore reçu tout le fruit. Il est clair que c’est le chemin personnel de chaque personne qui est prioritaire ; celle-ci discernera donc avec son accompagnatrice, son accompagnateur ce qui est bon pour elle et prolongera la durée de l’étape qu’elle est en train de vivre et dans laquelle elle reçoit peut-

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INTRODUCTION

être encore des lumières, ou éprouve des combats qu’il lui faut mener. Si l’on ne respecte pas l’expérience dans ce qu’elle a de plus personnel, les Exercices spirituels dans la vie courante risquent de ne plus être une école de transformation du cœur. Il importe donc que l’influence du groupe ne joue pas contre l’expérience de la personne (pression psychologique involontaire…) et que la pleine liberté de chacun soit assurée dans l’expérience spirituelle, car rien ne peut remplacer la rencontre personnelle avec Dieu.

Étapes de la démarche Saint Ignace propose un cadre souple qui est celui-là même de l’expérience chrétienne dans une vie d’action. Il y aura d’abord un bon temps de préparation où l’on assure le fondement de l’expérience, puis une étape de purification du cœur et d’entrée dans la miséricorde. Ensuite nous écouterons l’appel du Christ et nous serons invités à contempler longuement sa vie et sa Bonne Nouvelle. Dans cette lumière nous percevrons mieux quel est l’appel, l’invitation que le Christ nous adresse en ce moment de notre existence, comment il nous invite à mieux ordonner notre vie selon son évangile. Nous demanderons d’y être confirmés dans la contemplation de sa Passion et de sa Résurrection, pour qu’il nous prenne avec Lui dans son mystère pascal et situe notre décision dans son œuvre de salut qui s’accomplit dans son Église. Le rythme de la retraite est celui du progrès dans cet itinéraire intérieur. Comme vous le constaterez, une certaine durée est proposée pour chaque étape, qui déploie l’ensemble de la démarche sur neuf mois environ. Mais il n’y a là rien d’absolu. L’essentiel est de discerner si le fruit de la grâce demandée pour l’étape en cours est obtenu. D’où l’importance de vérifier cela avec la personne qui vous accompagne. Il est possible que tel d’entre nous pressente pendant ces premières semaines que ce n’est pas ce qui lui est demandé pour l’instant. C’est pour cela que le premier mois est une mise en route qui

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permet de vérifier la possibilité et le désir de nous engager dans l’expérience ; Il est important de sentir que l’on pourra vivre ce chemin dans une paix suffisante, sans stress continuel. Il serait possible aussi que l’une ou l’autre personne estime en cours de route qu’il vaut mieux pour elle de s’arrêter à la fin de la première étape. Ce sont des choses qui peuvent être normales. Il est simplement souhaitable que la décision se prenne en discernement avec la personne qui accompagne. Le dialogue permet de mieux reconnaître ce qui est bon pour moi au point où j’en suis pour le moment. Dans ce cas, un arrêt du parcours entamé ne sera pas vécu comme un échec. On reconnaît simplement que c’est à cette étape que Dieu me rejoint et qu’il m’accompagne. Vouloir avancer et continuer la progression serait devancer ce qui est bon pour moi, la grâce qui m’est offerte pour le moment et en laquelle je suis invité à demeurer.

Conclusion Ce n’est pas une entreprise facile en laquelle nous nous engageons. C’est un long chemin, et exigeant. Mais riche d’espérance et que nous pouvons aborder dans une grande confiance paisible. C’est le Seigneur qui nous y invite aujourd’hui. Il donnera au jour le jour ce qui est bon. Confions-lui cette démarche et confionsnous les uns les autres à l’Esprit Saint qui nous guidera dans notre pèlerinage. Note : Les textes du livret des Exercices spirituels sont extraits d’Ignace de Loyola, Exercices spirituels, trad. F. Courel ou E. Gueydan, coll. « Christus », DDB, Paris, 1960 et 1985. Ils sont cités entre parenthèses avec les références aux numéros du livret précédés du sigle ES. Le signe ☞ suivi d’un texte en italique indique une explication du texte ignatien.


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Mise en route

• INTRODUCTION. Vous avez choisi de vivre ce parcours de prière pour chercher et trouver Dieu, et nous espérons que vous y trouverez beaucoup de profit. Cette première étape est une mise en route. Il s’agit de prendre du temps pour que mon désir de Dieu s’épanouisse en moi. Comme toute mise en route, il s’agit de quitter quelque chose. Ici, il nous faut renoncer à certaines choses pour avoir du temps pour la prière : trente minutes par jour au début afin d’arriver à soixante minutes (ou deux fois trente minutes), mais ce temps peut dépendre de bien des contraintes, à évaluer avec la personne qui accompagne. Il s’agit aussi de prendre du temps pour explorer plusieurs lieux de prière jusqu’à ce que je puisse m’établir dans celui qui va le mieux m’aider. Ainsi dans cette première étape, nous prenons le temps de trouver un rythme de prière ; et dans cette prière d’exprimer à Dieu mon désir de le chercher et trouver. Pour aider à la prière, vous trouverez, en annexe, trois fiches que nous vous invitons à lire au cours de cette étape : (1) comment méditer un texte d’Écriture ; (2) pour relire sa prière ; (3) pour relire sa journée. Il sera bon d’y revenir de temps en temps. Il s’agit également de rencontrer votre accompagnateur (si ce n’est déjà fait) : l’annexe (4) vous propose quelques questions pour vous aider à préparer cette rencontre. Si vous faites la démarche en groupe, l’annexe (5) vous donne quelques indications pour favoriser le partage et l’écoute.

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MISE EN ROUTE

• DURÉE DE CETTE ÉTAPE. Une quinzaine de jours (à voir avec la personne qui vous accompagne).

GRÂCE

À DEMANDER DURANT CETTE

1ère

ÉTAPE

> Demander la grâce qu’augmente mon désir d’une relation plus profonde et plus vraie avec mon Créateur et Seigneur. 1. Reconnaître ce désir en moi. 2. Me disposer à accueillir le don que Dieu veut me faire. 3. Dans l’aujourd’hui de mon histoire sainte.

DISPOSITION

À NOURRIR

> Écouter et rassembler tous ces désirs qui tissent ma vie afin de les déposer entre les mains du Seigneur. > Me disposer intérieurement pour recevoir et vivre ce que le Seigneur voudra mettre en mon cœur. > Prendre tous les moyens nécessaires pour entreprendre les Exercices spirituels dans la vie courante.

Ces deux premières rubriques sont importantes. Elles définissent le sens dans lequel je suis appelé à vivre la période, et ce dans une double dimension : ♦ une grâce à recevoir, car cela dépasse mes seules forces ; je désire l’aide de Dieu et m’ouvre à la recevoir ♦ une disposition intérieure que je vais nourrir, à laquelle je vais m’appliquer dans ma vie quotidienne, en y tendant autant que je le puis ; je m’engage déjà en ce sens. C’est là que se trouve le fil conducteur pour la période qui vient. C’est donc un point à garder présent au cœur tout au long de chaque période.

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MISE EN ROUTE

• RÉFÉRENCES

BIBLIQUES

Prendre un temps avant la prière pour choisir le texte que je vais prier, et relire l’Annexe 1.

Is 55

Ps 63 Ps 42

Jn 1, 35-42 Os 2, 16-21 Ps 139 Gn 12, 1-9 Ex 3, 1-6 1 R 19, 1-15

• MON

Dieu nous invite : « Vous qui n’avez pas d’argent, venez gratuitement » et Il nous invite à recevoir sa Parole « qui ne me revient pas sans avoir produit son fruit ». Prier à partir du désir de mon cœur : « Dieu, c’est toi, mon Dieu, que je cherche… » Le cœur de l’homme cherche Dieu : « Comme languit une biche après l’eau vive, ainsi languit mon âme vers toi, mon Dieu… » Deux disciples de Jean, sur ses indications, suivent Jésus : « Que cherchez-vous ? » Dieu aussi désire vivre en relation avec moi. Présence de Dieu à toute ma vie (y compris les ténèbres). Appel d’Abraham. Vocation de Moïse (et chapitre 2 : son histoire). La rencontre d’Élie avec Dieu.

HISTOIRE SAINTE

Après une dizaine de jours, nous vous proposons de prendre cette fiche de prière pendant quelques jours.

• Composition de lieu Je me vois par le regard de l’imagination, en communion avec tant d’hommes et de femmes, témoins de Dieu pour moi. • Grâce à demander Je demande à Dieu la grâce de voir et de réaliser comment il a été présent dans ma vie et m’a conduit jusqu’aujourd’hui.

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MISE EN ROUTE

• Points Je revois les rencontres, les événements, les lieux les plus significatifs de mon histoire. Je demeure là où je sens que Dieu s’est donné à moi et je goûte sa présence agissante tout au long de ces années. • Dialogue libre ou Colloque Je me tourne vers le Père, avec Jésus, et je prie en communion avec tous ceux et celles qui m’ont fait vivre et grandir. • PROPOSITION POUR RELIRE SA JOURNÉE. En faisant la relecture de la journée, être attentif à tout ce qui éveille mon désir de Dieu. En parler avec Dieu. • EXERCICE-QUESTIONNAIRE. Cet exercice peut vous aider à prendre conscience des désirs qui vous habitent et à les déployer, ce qui vous aidera à vivre toute la démarche des Exercices. – Quels sont mes rêves, mes idéaux, ce pour quoi je désirerais investir de mon temps et de ma vie ? – Si je me mets en mouvement, en action, c’est qu’il y a quelque chose qui m’y pousse : puis-je y reconnaître mon et mes désirs ? Et mon désir le plus grand, le plus profond, là au cœur de mon agir, quel est-il ? – Où sont mes manques, ces lieux de ma vie où je suis insatisfait, où j’ai soif d’un plus, d’un davantage ? – Faire mémoire de ce qui, dans ma vie, a éveillé mon désir de Dieu (une rencontre, une parole, un livre, une prière, un texte de la Bible…). Et là, qu’est-ce qui m’a séduit, attiré, mis en route ? – Écrire une prière où je confie à Dieu ces désirs qui m’habitent. « Pour celui qui reçoit les exercices, il est très profitable d’y entrer avec un cœur large et avec une grande générosité envers son Créateur et Seigneur, lui offrant tout son vouloir et toute sa liberté pour que sa divine Majesté se serve de sa personne aussi bien que de tout ce qu’il possède, conformément à sa très sainte volonté » (ES 5).


Principe et fondement de ma vie



Fondement 1 « Le dessein d’amour de Dieu »

« Créé par amour pour aimer » Saint Bernard

• INTRODUCTION. Nous vous proposons de prier l’amour créateur de Dieu. Après avoir fait votre demande à Dieu, prenez un des textes proposés, en étant attentif à ce qui vous touche, là où l’amour de Dieu pour vous se révèle. • DURÉE DE CETTE accompagnateur).

ÉTAPE.

Une quinzaine de jours (à voir avec votre

GRÂCE

À DEMANDER

> Consentir à être aimé et créé continuellement par Dieu pour accomplir avec Lui ma vocation en ce monde.

ATTITUDES

À NOURRIR

> Réaliser et goûter combien Dieu est présent, avec Amour, dans ma vie et dans toute mon histoire jusqu’aujourd’hui. > Laisser grandir le désir et le goût de consentir à cette création d’Amour et d’y collaborer. > Laisser s’enraciner en moi une confiance fondamentale en ce Dieu de la Vie.

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PRINCIPE ET FONDEMENT DE MA VIE

• RÉFÉRENCES

BIBLIQUES

Prendre un temps avant la prière pour choisir le texte que je vais prier, et relire l’Annexe 1.

« Ne crains pas, je suis avec toi. » « D’un Amour éternel, je t’ai aimé. » Nous sommes créés par Amour dans un monde qui nous est confié. Os 11, 1-4 Dieu m’aime et me crée dans toute mon histoire. Ep 1, 3-14 Action de grâce pour le dessein bienveillant de Dieu. Jn 1, 1-14 Le Verbe, centre et source de toute vie. Rm 8, 19-39 Le projet d’amour de Dieu. Col 1, 15-23 Le Christ au cœur de la création et de nos vies. Ps 103–105 Bonté, grandeur, fidélité de Dieu. Is 43, 1-5 Is 54, 1-10 Gn 2, 4-25

À lire avant de commencer la prière.

« L’homme est créé pour louer, respecter et servir Dieu notre Seigneur et par là sauver son âme. Les autres choses sur la face de la terre sont créées pour l’homme, pour l’aider à poursuivre la fin pour laquelle il est créé » (Saint Ignace, première partie du « Principe et Fondement », ES 23).

• PROPOSITION POUR RELIRE SA JOURNÉE. En faisant la relecture de la journée, être attentif à tout ce qui « parle » de l’Amour créateur de Dieu. M’en émerveiller et Lui rendre grâce. « Ce n’est pas d’en savoir beaucoup qui rassasie et satisfait l’âme, mais de sentir et de goûter les choses intérieurement » (ES 2, 5).

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Pour aider la méditation du « Principe et Fondement »

À la fin de ce premier temps d’Exercices spirituels dans la vie courante, où en sommes-nous dans notre démarche ? Après une à deux semaines de mise en route, nous sommes entrés peu à peu dans la méditation du « Principe et Fondement ». Pour cela, nous avons demandé la grâce de vivre une attitude fondamentale de confiance du cœur dans le Dieu de la Vie. Des textes d’Écriture nous y ont aidés pour nourrir la prière. Et nous nous efforçons, avec sa grâce, de vivre cette attitude dans la réalité concrète de la vie quotidienne ; jusqu’à goûter, sentir cette attitude au niveau de notre cœur au sens biblique du terme, si cela nous est donné. Il s’agit d’abord de réaliser combien je suis aimé de Dieu, et cela dans le concret de mon existence. Il est bon de me rappeler — de noter peut-être — les détails de ma vie et de mon histoire, de tout ce que je suis. Dieu m’aime et me choisit dans cet environnement, cette époque, ces parents, cette famille, ce pays, etc. Est-ce que je peux l’accepter pleinement comme signe de son amour ? Jusqu’à le louer et le remercier de tout cela ? Ce n’est pas toujours facile. Je ne suis pas toujours réconcilié avec ce que je suis. Nous pouvons noter d’autres caractéristiques de ce que nous sommes sans l’avoir choisi nous-mêmes : tempérament, intelligence, classe sociale, langue, sexe, allure physique, culture, etc. Des choses me plaisent, d’autres me déplaisent. Reconnaître que c’est en tout cela que je suis choisi et aimé de Dieu ; il y a aussi toute mon histoire, qui m’a façonné et que j’ai aussi façonnée (cf. Ps 139 [138], 13-14).

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PRINCIPE ET FONDEMENT DE MA VIE

Dieu m’y a accompagné, choisi, aimé, quelles que soient les sinuosités, quels que soient les hauts et les bas de mon chemin de vie. Puisje m’accepter ainsi tel que je suis ? Voyez les oiseaux du ciel et les lys des champs (Mt 6, 25-34). Puis-je en remercier le Seigneur, ne pas m’étonner qu’il ne soit pas toujours facile de consentir à être choisi et aimé comme je suis et dans la situation actuelle qui est la mienne ? Je peux sentir des résistances en moi, ne pas m’en sentir capable pour l’instant. Le reconnaître simplement. Sans m’en culpabiliser, ni me révolter. Demander la grâce d’avancer sur ce chemin de consentement, de réconciliation éventuelle. Nous avons considéré et demandé de réaliser aussi que non seulement nous sommes aimés de Dieu, mais continuellement créés par Dieu. Créés non pas comme par une chiquenaude, un « big bang », mais créés actuellement et continuellement. Son amour créateur, passionné, brûle au plus intime de moi-même. C’est maintenant, en ce moment même, que je surgis dans l’être et dans tout le concret de mon existence. Est-ce que je consens pleinement à être ainsi choisi, aimé, créé maintenant par Dieu ? Et créé parce qu’avant même d’exister, je suis choisi et aimé dans le cœur de Dieu. Est-ce que j’accepte de me recevoir ainsi tout entier de Lui tel que je suis ? Et ce Dieu, qui m’aime à tout instant et m’habite au plus intime de moi-même, espère être aimé librement par moi. Que je lui fasse confiance. Son désir respecte pleinement ma liberté. Il ne s’impose pas, ne violente pas. Son désir est habité par un projet d’amour inscrit, caché au plus profond de moi. Non pas comme un plan tout fait, déjà écrit dans un grand livre, auquel j’aurais à me conformer. Non, c’est un projet que le Seigneur désire réaliser avec moi à travers toute mon histoire et qui se crée pas à pas. C’est un peu là que nous en sommes et c’est cela qu’il nous est bon de creuser pendant les jours et les semaines qui viennent. Car ce projet de Dieu est inscrit au plus intime de toute chose et en moi. Le désir d’amour du Seigneur (sa volonté) est que tout ce qu’Il a choisi, créé, aimé soit un jour pleinement accompli, rassemblé, sauvé en Lui (cf. Ep 1, 4-10 ; Jn 11, 52). Nous sommes engagés avec Dieu dans une entreprise, un dessein d’amour immense : éta-

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POUR AIDER LA MÉDITATION DU « PRINCIPE ET FONDEMENT »

blir le Royaume de Dieu (Mt 6, 34), le règne de l’amour dans notre monde. Le Seigneur m’invite et m’appelle à accomplir avec Lui dans ce monde son projet d’amour inscrit en moi. Car chacun nous avons une place unique dans cette entreprise qui se concrétise là où Dieu me crée maintenant avec tout ce que je suis, et à partir des désirs inscrits au plus profond de mon être et qui prennent leur source en Lui, puisque c’est Lui qui est à l’origine de mon identité profonde et qui met en moi ces désirs profonds. Le sens de ma vie est d’accomplir, de réaliser ces désirs qui sont suscités par son Esprit et signes de sa volonté d’amour en moi. Et c’est ainsi que je construis avec Lui, à ma place, son Royaume d’amour. S’il en est ainsi, on voit l’importance de nos désirs et combien nous avons à être attentifs pour discerner nos vrais désirs, ceux qui sont enracinés en Dieu. Car nos désirs peuvent être multiples, contradictoires parfois. Plus artificiels ou plus profonds, plus immédiats ou plus fondamentaux, plus ordonnés et authentiques ou plus désordonnés. Ils peuvent aussi avoir l’apparence du bien et pourtant ne pas être bons pour moi. De plus, nous désirons souvent des tas de choses : biens de consommation, assurance financière, situation confortable, relations, santé, culture, voyages, etc., et toutes ces choses sont bonnes en elles-mêmes. Car toutes ces choses sur la face de la terre sont créées par Dieu. « Et Dieu vit que cela était bon » (Gn). Et tout est créé pour nous, les êtres humains, c’est-à-dire pour nous aider à grandir dans la vie, réaliser le but de notre existence. Or, certaines choses nous attirent, nous les désirons. D’autres ne nous intéressent pas, nous répugnent ou nous en avons peur. Comment connaître celles qui sont bonnes pour moi ? Quelles sont celles qui vont m’aider à réaliser le sens de ma vie ? Quels choix dois-je faire, parmi toutes ces choses bonnes, sans me laisser conduire par mes envies, mes désirs trop superficiels ou illusoires ? Ni me laisser freiner par mes peurs. On voit donc l’importance des « choses créées » dans notre relation à Dieu. Nous serions parfois tentés de croire que notre relation à Dieu se réalise et se vit uniquement dans notre prière, notre relation intime, personnelle avec lui. Non ! Elle implique et se réalise aussi

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PRINCIPE ET FONDEMENT DE MA VIE

dans notre relation aux « choses », c’est-à-dire aux personnes avec qui je vis, à ma famille, ma communauté, mon métier, mes biens, mon corps, mes projets, etc. Toutes ces « choses » sont le milieu où se réalise mon rapport à Dieu ; c’est à travers elles que nous le cherchons, le trouvons, et se réalise son Dessein d’amour en nous ; et les Exercices spirituels dans la vie courante mettent l’accent davantage sur les « choses créées » qui forment la trame de mon existence ; un des critères de vérité de la prière est de vérifier si elle m’aide à ordonner « les choses créées » de ma vie concrète et mes désirs selon Dieu. Pour vivre cette orientation, cette attitude fondamentale, il faut une liberté intérieure face aux choses créées et à mes désirs ou mes peurs ; saint Ignace dira qu’il faut « nous rendre indifférents ». Car de fait, je ne suis pas libre spontanément par rapport à tous mes désirs ou mes peurs ainsi qu’à toutes « les choses » qui font mon milieu, mon environnement, les situations de mon existence. Un réajustement sera donc nécessaire par rapport à nos désirs et notre attachement aux choses. Il nous faut opérer un certain dégagement lorsqu’il y a des choix à faire qui touchent quelque part à notre existence. Je suis parfois tenté de choisir selon la mode ou suivant ma pente naturelle, selon ce qui me plaît instinctivement, ou pour réaliser mes projets, mes ambitions. Il y a en nous des pulsions ou des résistances, des lourdeurs, des peurs qui rendent difficile un choix pleinement conforme à l’accomplissement de notre vie et de nos désirs selon le dessein d’amour de Dieu pour nous et en nous. Il y a un long pèlerinage à accomplir qui nous demande de nous détacher intérieurement des conditionnements qui nous encombrent, et de ne pas nous laisser conduire simplement par notre spontanéité instinctive. En ce sens, il faut nous rendre libres, et donc indifférents. Comprenons bien cette expression « me rendre indifférent ». Cela ne signifie pas que nous ne pouvons pas ressentir préférence ou attachement ou peur ou que nous n’ayons plus de désirs ; mais il y a une manière d’être attaché à des choses, des relations, des projets, une carrière… qui empoisonne ma liberté. Je risque de m’identifier à ces choses, j’y colle un peu. Les choses peuvent nous séduire et nous en devenons esclaves. Elles deviennent un absolu. Il nous

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POUR AIDER LA MÉDITATION DU « PRINCIPE ET FONDEMENT »

faut donc travailler avec la grâce du Seigneur sur cet attachement désordonné, ou cette peur instinctive. Par un dégagement en notre cœur, nous devenons libres intérieurement et pouvons faire un choix juste. C’est cela, nous rendre indifférents. Dans la liberté intérieure ainsi retrouvée nous pourrons rejoindre notre vrai désir le plus profond qui coïncide avec le désir de Dieu sur nous. Nous reconnaîtrons alors ce qui dans nos attachements rejoint ce désir fondamental, et nous pourrons « désirer et choisir ce qui nous conduit davantage au but de notre création » (ES 23). C’est toute la démarche des Exercices spirituels dans la vie courante. La grâce à demander et à recevoir durant ces jours et ces semaines, c’est de comprendre et de sentir ces vérités, de faire l’expérience de leur réalité dans notre vie. Il s’agit de comprendre par notre intelligence et de sentir en le laissant descendre dans notre cœur : – que Dieu me choisit, m’aime et me crée sans cesse et actuellement ; – qu’Il suscite des désirs au plus profond de moi qui correspondent au sens de ma création et à ce que je suis au meilleur de moi-même ; – qu’en mettant en œuvre ces désirs, je réalise et rends vivant le Royaume de Dieu à ma place dans l’humanité, c’est-à-dire le but de ma vie ; – que cela nécessite une disponibilité, une liberté, une indifférence active par rapport aux choses créées et à mes désirs, pour ne désirer et ne choisir que ce qui me conduit davantage au but de ma création ; – que je n’en suis pas encore là. Reconnaître en vérité ce décalage, sans culpabilité, ni dépit, ni volonté d’y arriver par mes propres forces, mais dans la confiance en Dieu qui veut me faire vivre. C’est un travail spirituel à accomplir avec sa grâce pendant ces semaines. Car ces vérités et ces attitudes sont le principe et le fondement sur lesquels repose l’entièreté du chemin des Exercices spirituels dans la vie courante.

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Fondement 2 « Ma liberté disponible »

• INTRODUCTION. Nous vous proposons de prier de la manière suivante, avec le texte du « Principe et Fondement » proposé par saint Ignace : – prenez la première fiche de prière pendant une semaine : elle vous propose des pistes pour prier le texte de saint Ignace (vous trouverez en annexe une fiche pédagogique (6) qui explique quelques mots du vocabulaire ignatien) ; – ensuite, poursuivez votre prière avec les textes d’Écriture proposés dans la seconde fiche de prière ; – poursuivez deux ou trois jours avec la version adaptée du père Tetlov et l’un ou l’autre texte d’Écriture (fiche de prière 3) ; – et pour terminer cette étape, nous vous proposons d’écrire votre propre « Principe et Fondement », avec vos mots à vous, et d’en parler avec la personne qui vous accompagne (fiche de prière 4). La fiche pédagogique, en annexe (7), propose des pistes pour vivre sa prière et prier sa vie. • DURÉE DE L’ÉTAPE. Quinze jours environ (selon ce que vous verrez en accompagnement).

GRÂCE

À DEMANDER

> Demander la grâce à Dieu, notre Seigneur, d’une pleine assurance qu’Il a un dessein d’amour sur moi et sur le monde et de

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FONDEMENT 2

reconnaître qu’il y a dans ma vie des obstacles et des résistances à être pleinement disponible pour désirer et choisir ce dessein d’amour.

ATTITUDES

À NOURRIR

> Me recevoir de Dieu avec tout ce que je suis, mes dons, mes qualités, mes limites, mon environnement, mon histoire. > Nourrir l’assurance confiante que le Seigneur désire se communiquer à moi et susciter en moi mon désir le plus profond. > Consentir à l’ordre et à l’harmonie qu’il y a dans la bonté de la Création et la loi de vie qui y est inscrite. > Éveiller en moi l’attention et le goût d’une disponibilité à me laisser conduire dans le quotidien par le désir de Dieu sur moi et non par mes envies trop immédiates ou instinctives.

• FICHE DE PRIÈRE 1 : « LE PRINCIPE ET FONDEMENT » (ES 23) L’homme est créé pour louer, respecter et servir Dieu notre Seigneur, et par là sauver son âme. Toutes les autres choses sur la face de la terre sont créées pour l’homme, pour l’aider à poursuivre la fin pour laquelle il est créé. Il s’ensuit que l’homme doit en user dans la mesure où elles lui sont une aide pour sa fin, et s’en dégager dans la mesure où elles lui sont un obstacle. Pour cela, il faut nous rendre indifférents à toutes les choses créées, en tout ce qui est permis à la liberté de notre libre arbitre et ne lui est pas défendu ; de telle sorte que nous ne voulions pas, quant à nous, santé plus que maladie, richesse plus que pauvreté, honneur plus que déshonneur, vie longue plus que vie courte, et ainsi de tout le reste. Mais que nous désirions et choisissions uniquement ce qui nous conduit davantage à la fin pour laquelle nous sommes créés.

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PRINCIPE ET FONDEMENT DE MA VIE

• Points de prière – Prendre le temps de lire et comprendre le texte du « Principe et Fondement », s’arrêter sur ce qui semble éclairant, mais aussi sur ce qui est plus difficile. – Quand vous le lisez, qu’est-ce qui se passe en vous ? – Êtes-vous d’accord avec cette vision de l’homme ? – Acceptez-vous le « Principe et Fondement » dans le concret de votre propre vie ? • Colloque – En parler avec Dieu comme on le sentira. Saint Ignace propose durant toute la durée des Exercices une prière préparatoire avant chaque temps d’oraison, qui reprend le « Principe et Fondement »

PRIÈRE PRÉPARATOIRE (ES 46) « La prière préparatoire est de demander à Dieu notre Seigneur sa grâce pour que toutes mes intentions, mes actions et mes opérations (activités) soient purement ordonnées au service et à la louange de sa divine Majesté. »

• PROPOSITION POUR RELIRE SA JOURNÉE. En faisant la relecture de la journée, être attentif à tout ce qui « parle » de cette orientation fondamentale de la vie de l’homme et de l’ordonnance des choses. Dans quelle mesure ma vie est-elle ordonnée à cette lumière du Fondement ?

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FONDEMENT 2

• FICHE

DE PRIÈRE

2 : RÉFÉRENCES

BIBLIQUES

Prendre un temps avant la prière pour choisir le texte que je vais prier, et relire l’Annexe 1.

Recevoir tous les dons de Dieu et en faire usage selon son désir. Mc 10, 17-23 L’homme riche. Mt 6, 25-34 Faire confiance en Dieu. Dt 30, 11-20 Choisir la Vie. Ph 3, 7-16 « Tous ces avantages, je les considère comme un désavantage, à cause du Christ. » Dt 8, 7-20

• FICHE DE PRIÈRE 3 : « LE PRINCIPE ET FONDEMENT » ADAPTÉ PAR LE PÈRE TETLOV « Toute personne en ce monde est ainsi faite, que c’est en louant, respectant et ayant une vie accordée à la volonté aimante de Dieu, notre Seigneur, qu’elle sera pleinement accomplie dans le Royaume de Dieu. Voilà le but fondamental de chaque existence humaine. » Les autres choses sur la face de la terre sont faites pour l’être humain, pour aider chaque personne à réaliser cet accomplissement unique que Dieu suscite en chacun(e) de nous. » Donc ce qui donne sens à l’usage des autres choses, c’est que la personne en fasse usage dans la mesure où elles l’aident à la réalisation de la fin originale et unique inscrite en elle, et se dégage de tout ce qui l’éloigne de cette fin. » Il s’ensuit que, mis à part ce qui serait obligation de conscience, il nous faut demeurer libres de toute préférence fixée sur les choses créées, quelles qu’elles soient. Nous devons plutôt nous tenir en équilibre devant toute chose. Cela signifie que face à toute décision que nous aurions à prendre, nous ne choisissions pas à l’avance de faire tout ce qui nous maintiendra en bonne santé et rien qui

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PRINCIPE ET FONDEMENT DE MA VIE

pourrait nous rendre malade, ni d’être riche plutôt que pauvre, ni d’être considéré comme quelqu’un d’important plutôt que peu reconnu, ni de vivre âgé plutôt que mourir plus jeune, etc. De cette manière, nous pourrons nous trouver en équilibre face à toute chose créée lorsqu’il nous faudra prendre une décision. » Nous nous établissons ainsi dans un équilibre et gardons une distance intérieure par rapport à toute chose, afin de ne désirer et de ne choisir que ce qui peut nous conduire davantage au but fondamental de notre vie » (Choosing Christ in the World, Institute of Jesuit Sources, Saint Louis, 1989). • FICHE DE PRIÈRE 4 : ÉCRIRE MON PROPRE « PRINCIPE ET FONDEMENT » À cette étape-ci, il peut être utile d’écrire dans mes propres mots ce qui petit à petit devient le « Principe et Fondement » de ma propre vie. Pour ce faire, suivez les étapes du texte de saint Ignace : – Quelle est l’orientation de ma vie ? – Comment situer « les choses » ? – Comment vivre et assumer le détachement et la liberté intérieure nécessaire ? – En vue de quoi chercher, vouloir et vivre « cela » ?


Première Semaine



Introduction à la Première Semaine des Exercices

Où en sommes-nous ? À la lumière du « Principe et Fondement », nous avons reconnu la bonté et la beauté du dessein d’amour de Dieu sur notre monde et sur chacune de nos vies qu’il crée et appelle sans cesse à l’existence. Comme le dit la lettre aux Éphésiens, chacun de nous est choisi, élu par Dieu dès avant la création du monde, pour être accompli, saint et immaculé en sa présence dans l’amour. Ignace dira de manière plus laconique : « Pour louer, respecter, servir Dieu notre Seigneur et ainsi sauver son âme », c’est-à-dire accomplir son existence dans l’amour. Nous sommes dans le cœur de Dieu et tout son désir est que notre existence soit pleinement accomplie selon la loi de vie inscrite par lui au fond de notre être. C’est là que s’origine et surgit notre désir le plus fondamental, parfois enfoui sous d’autres désirs plus immédiatement envahissants. D’où l’importance de reconnaître qu’il faut nous rendre disponible, « indifférent », ne pas nous laisser emporter par nos désirs instinctifs. C’est ainsi que nous constatons que notre monde et notre existence à chacun sont en grand décalage par rapport à cette vision. Un des fruits de la méditation du « Principe et Fondement » est de nous rendre conscients de ce décalage, de cette distance entre le projet de Dieu et notre réalité concrète, celle de notre monde et la nôtre à chacun. Notre monde est blessé, et moi-même je suis loin d’être pleinement disponible à ce dessein de Dieu, je ne suis pas indifférent spontanément à : ri-

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chesse ou pauvreté, estime ou mépris, santé ou maladie. J’ai des attaches désordonnées en moi. Je ne suis pas en pleine liberté intérieure.

L’entrée en Première Semaine C’est ce décalage reconnu, et que je désire réduire autant que possible pour mieux accomplir mon existence selon la volonté, le dessein d’amour de Dieu, c’est ce décalage reconnu qui permet l’entrée en Première Semaine des Exercices. Nous allons descendre dans ce monde blessé, cassé, et dans notre existence blessée. À vue humaine je pourrais être tenté de désespérer de ce monde déchu et aussi peut-être de moi-même. Le regard chrétien voit pourtant ce monde et l’homme comme formé beau et bon, même si mystérieusement il le constate blessé, brisé. Les blessures et les cassures sont visibles, sont criantes. Nous n’aurons jamais fini d’essayer de comprendre ce contraste. Mais il ne s’agit pas, dans la démarche des Exercices spirituels, de vouloir faire une réflexion philosophique ou théologique sur le problème ou le mystère du mal et du péché. Nous sommes invités à écouter ce que Dieu nous en dit à travers sa Parole. Or, d’un bout à l’autre l’Écriture nous dit que Dieu est fidèle à son Alliance malgré toutes les ruptures de son peuple. Il ne juge pas, ne rejette pas, ne condamne pas, mais accompagne dans l’amour et la vérité. Et lorsque paraît Jésus, son Fils, il ne nous donne pas d’explication, encore moins de solution au problème du mal et du péché, mais il vient dedans, il se plonge au cœur de notre monde, s’en fait solidaire, frère universel, se « fait péché » pour nous, comme dit saint Paul, alors qu’il est sans péché, pour nous révéler cet amour fidèle du Père. Il nous a aimés jusqu’au bout, jusqu’à livrer sa vie par amour, alors que le monde le rejette, pour mourir en croix. Et c’est en aimant ainsi jusqu’au bout qu’il nous sauve du mal et du péché. Nous le savons depuis notre catéchisme, mais c’est souvent d’une connaissance théorique, livresque. Dans notre cœur, une résistance souvent demeure. Notre intelligence se bloque, se rebelle. Comment

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INTRODUCTION À LA PREMIÈRE SEMAINE DES EXERCICES

surmonter cette résistance, comment avoir une connaissance intérieure du péché de notre monde et du mien, plongé dans l’amour ? Comment pouvoir dire avec la liturgie « Heureuse faute qui nous a valu un tel Rédempteur » ? Comment regarder notre monde si blessé avec confiance et espérance parce qu’enveloppé, porté, habité par la miséricorde, dans son gémissement en travail d’enfantement ? Comment entrer dans l’humble joie d’être un pécheur aimé et pardonné ? C’est la grâce que nous demandons à cette étape. L’essentiel de cette étape consiste donc à demander la grâce d’une connaissance intérieure du péché du monde et de mon péché, dans la lumière de l’amour du Père qui m’est révélé en Jésus, de manière à être réconcilié en profondeur avec ce mystère et apaiser mon cœur. Mais pour bien entrer dans cette démarche, il importe, au préalable, d’avoir un sens juste du péché dans le monde et en moi. Évoquons quelques réflexions à ce sujet. Peut-être n’est-ce qu’un rappel, mais il est important. – Nous pouvons tous reconnaître les conséquences du péché. Les médias en sont pleins. Guerres, violences, injustices, abîme entre riches et pauvres, structures de péché, familles brisées. – Mais le péché lui-même demeure un mystère. Nous ne pouvons pas le reconnaître par nous-mêmes. Nous avons besoin de la grâce, de l’Esprit de Dieu pour nous éclairer. – Par ailleurs on a beaucoup identifié péché et infraction à la loi. Certes le péché est cela aussi, mais il est avant tout et plus profondément une rupture de la relation d’amour entre moi et mon Dieu, entre moi et ceux que Dieu me donne à aimer. Et finalement aussi rupture avec mon vrai moi le plus profond. – Nous sommes souvent vivement conscients des désordres économiques à l’origine de l’injustice, de la violence, etc., ainsi que des déterminismes psychiques et des blessures de chaque personne, datant, entre autres, de la petite enfance et de l’éducation. Et nous sommes tentés de réduire le péché à ces causes, et de nous justifier ou de nous excuser ainsi. Mais nous oublions que, même s’il y a en nous des déterminismes psychologiques et

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des brisures, il demeure une zone de liberté au plus profond de nous, liberté peut-être diminuée et difficilement exercée parfois, mais elle est là. Il n’y a pas que désordre économique ou psychologique, mais il y a plus profondément oubli, méconnaissance, refus, manque envers l’Amour qui m’appelle. – Nous sommes appelés aussi à reconnaître que notre monde et nous-mêmes serons toujours pécheurs jusqu’à notre mort. C’est le cri de Paul : « Malheureux homme que je suis » (Rm 7, 24). Mais nous savons, par la foi, que le Christ vient nous rejoindre dans notre péché. « Grâce soit rendue à Dieu par Jésus Christ notre Seigneur ». Cette réalité du péché de notre monde et de notre péché est la douleur profonde de l’existence humaine. Mais cette douleur peut être le lieu d’une joie parce que nous sommes sans cesse sauvés du péché. Joie du pécheur pardonné. Encore une fois il ne suffit pas de l’affirmer théoriquement. Par les Exercices, nous demandons la grâce d’en faire l’expérience existentielle et d’en vivre. – C’est uniquement dans la lumière de l’amour miséricordieux et du pardon de Dieu que nous découvrons la vraie profondeur du péché et de notre péché, de notre misère. Dieu commence par nous révéler son amour et son pardon. Il ne s’agit pas de connaître d’abord mon péché dans sa vérité profonde, et ensuite de découvrir sa miséricorde. C’est l’inverse qui est vrai. Bien sûr, nous pouvons peut-être nommer les transgressions de la loi, les dysfonctionnements du monde, mais la profondeur de notre vraie misère nous ne la découvrons que plongés dans la miséricorde divine. Le mot même l’évoque : une misère dans le cœur de Dieu. – Sans cette expérience, cette connaissance profonde de mon péché et de notre misère dans cette lumière du Christ, je ne puis ni me comprendre moi-même, ni le mal dans le monde, ni Jésus comme Sauveur. « Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs » (Mt 9, 13). « Si nous nous prétendons sans péché, nous nous trompons nous-mêmes et faisons du Christ un menteur » (1 Jn). Charles de Foucauld et François d’Assise le disent :

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INTRODUCTION À LA PREMIÈRE SEMAINE DES EXERCICES

« il n’y a pas de plus grand pécheur que moi ». Ignace s’en souvient dans son Récit : le souvenir de son péché réveille en lui l’amour. Bernadette encore, et le Curé d’Ars… Qui a raison ? Eux qui voyaient, sentaient leur être pécheur, ou nous, aveugles insensibles ? Mais comment voir, sentir une connaissance intérieure de mon péché ?

Comment « voir » et sentir une connaissance intérieure du péché, de mon péché ? Il nous sera peut-être utile de prendre en compte, pendant quelques jours ou parfois davantage, la dimension affective du péché (nous donnons quelques suggestions à ce sujet dans les Annexes 8, 9 et 10). Dans une première étape, nous serons invités à descendre dans ce monde blessé et cassé. Les conséquences du péché y crèvent les yeux. Il y a là une dimension objective du péché, des structures de péché dans notre monde. Et nous sommes solidaires de ce péché objectif. Le mystère du péché ne se réduit pas à mon péché. Il vient de plus loin que moi, il englobe toute l’histoire et je suis impliqué dans cette réalité blessée, cassée. Je ne peux pas dire que cela ne me regarde pas. Nous allons demander la grâce de nous ouvrir à cette réalité objective et de percevoir notre implication, notre solidarité avec cette situation chaotique de notre monde. C’est le sens de la grâce de « honte et de confusion » de moi-même que nous allons demander ces semaines-ci. Et c’est en étant plongés dans cette situation blessée et brisée que nous ferons le colloque en regardant très longuement le Christ en croix dans ce monde. Et en faisant ce va-etvient entre la situation du monde et le Christ en croix, Ignace nous invite à nous demander : Comment est-ce possible qu’Il en soit venu là ? C’est alors que nous serons invités à en venir à la méditation de nos péchés personnels. Saint Ignace, dans les Exercices, demande de relire le déroulement de tous les péchés de ma vie. Mais attention, ce

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n’est pas une incitation à nous replier sur nous-mêmes ni à vouloir nous en rappeler tous les détails ni toute la somme précise. Il s’agit beaucoup plus de laisser remonter à la conscience, sans essayer de me cacher à moi-même, ou de me justifier, ce que je reconnais comme le plus important, le plus grave, dans mon existence pécheresse. De toute manière, ce n’est pas l’accumulation qui va m’éclairer. Le péché personnel — tout comme le péché du monde — ne se reconnaît pas à la lumière humaine. Le propre du péché, c’est de s’ignorer lui-même, de se banaliser, de s’aveugler. Le péché est mystère, mystère du décalage et de la distance entre l’appel de Dieu et notre réponse — ma réponse — entre ma vocation à louer, respecter et servir Dieu notre Seigneur et par là entrer dans la vraie vie, de la distance entre la source des eaux vives et mon goût des citernes lézardées, crevassées, comme dit Jérémie. Le péché est un mystère qui ne peut être connu que dans une perspective de foi et d’amour : ce décalage ne se perçoit qu’à la lumière divine (comme la poussière en suspension dans l’air n’est visible que dans un rayon de soleil). C’est dans la lumière de Dieu, de Jésus le Christ qui me le révèle dans son regard d’amour et qui me pénètre et m’éclaire au plus profond, que la vérité de mon péché m’est révélée. Et cela sans me juger, sans me condamner, sans me rejeter, mais au contraire dans l’amour qui fait la vérité. C’est avec le Christ que je suis invité à descendre dans les zones obscures de mon péché. C’est là qu’il désire venir avant tout (« Je suis venu pour les pécheurs »). C’est avec lui que je pourrai reconnaître ce qui dans ma vie refuse, blesse, résiste à son amour. Il est le bon Samaritain qui vient toucher mes plaies et mes péchés pour les guérir. On comprend dès lors l’importance de demander la grâce d’une connaissance intérieure de mon péché. Cette grâce à recevoir, saint Ignace va la détailler : honte devant le péché du monde, qu’avonsnous fait de ce monde si beau ; confusion de moi-même, tristesse aimante, horreur du péché. Et pour obtenir ces grâces il nous conduira, à la fin de chaque exercice, à un colloque avec le Christ, là devant moi suspendu à la Croix, qui me révèle la miséricorde du Père. C’est là le centre, le cœur des méditations de cette Première Semaine. Après

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INTRODUCTION À LA PREMIÈRE SEMAINE DES EXERCICES

m’avoir conduit dans les profondeurs du péché du monde et des péchés de ma vie, toutes les méditations m’y conduisent. Il ne s’agit donc pas tellement de méditer sur le péché, mais de vivre une prière de pécheur, donc une attitude pauvre, confuse qui implore. Rappelons-nous la prière des moines d’Orient : « Seigneur Jésus, Fils du Dieu vivant, prends pitié de moi, pécheur. » Dans ce sens, ces méditations de Première Semaine ne sont pas des exercices de tension ni de force, mais de grâce à recevoir de Dieu comme il le voudra.

Par quel chemin avancer pour recevoir cette grâce ? Votre accompagnateur vous expliquera que saint Ignace propose deux exercices, qu’il invite à reprendre plusieurs fois pour que leur contenu descende peu à peu de la tête dans le cœur. Comme nous l’évoquions ci-dessus, le premier exercice invite à méditer le péché « dans le monde » : depuis le péché de l’ange qui nous révèle la racine d’orgueil présente en tout péché, en passant par le péché de toute l’humanité depuis les origines, dont nous sommes tous solidaires, et enfin le péché de tout homme, pour aboutir au colloque du Christ en croix. Le deuxième exercice nous mène alors aux péchés personnels présents tout au long de notre vie, dont nous pesons la laideur et la malice (même s’il n’était pas défendu, dit Ignace, parce qu’il s’oppose à la vie en nous), et nous nous découvrons, dans le colloque, toujours et encore plongés dans la miséricorde. Ces exercices sont alors à reprendre dans des « répétitions », sans faire l’économie de la possibilité pour notre liberté de refuser l’amour (l’enfer possible). Il en sera question ci-dessous. Vous pourrez vous aider de textes d’Écriture à recevoir de votre accompagnateur ; mais ne pas en prendre trop, car cela pourrait vous distraire du but : recevoir la grâce d’une connaissance intérieure de mon péché et de la miséricorde de Dieu pour moi (car il s’agit de moi, de l’Écriture de ma vie, voir Annexe 11).

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Ce chemin demande du temps, de la patience, de la persévérance. Nous pouvons prévoir un mois environ. Au début on n’a pas envie de descendre dans ce monde et ces zones obscures. Ce n’est pas beau. Et nous ne sommes pas fiers de nous. Nous préférons spontanément nous cacher cela. Il arrive que dans ces méditations nous passions par des réactions d’insensibilité (nous nous sentons devant un mur), d’ennui (je connais mes péchés, toujours les mêmes choses, j’en ai vite fait le tour), de justification personnelle (ce n’est pas bien grave, c’est lié à mon histoire, à mon tempérament) et aussi de remords, de dépit de moi-même, de découragement en découvrant la laideur, la perversité du péché, et de me sentir infecté par ce péché (je n’en sortirai jamais, je serai toujours le même). Tout cela peut amener des moments de « désolation » dans la prière. Il est très important de parler de ces mouvements affectifs avec la personne qui accompagne pour qu’elle vous aide à discerner ce qui se passe (à l’aide des règles du discernement des esprits, voir Annexe 15) et vous propose que faire. Le Seigneur permet que nous traversions des zones de ténèbres où Il nous purifie. Il est important alors de persévérer fidèlement dans la prière le temps prévu malgré la tentation de raccourcir et de passer à autre chose. À ce moment nous n’avons pas encore fait l’expérience profonde de notre péché pénétré et baigné par la grâce de miséricorde. Il faut traverser ces zones et c’est peu à peu que nous passons de ce remords ou découragement qui déprime et replie sur soi au repentir, cette tristesse aimante qui pacifie. « Je suis pécheur, mais aimé, pardonné ». Cela ne se fait pas en une fois. Je n’en finis pas de découvrir mon péché dans la lumière du pardon. Je découvre que Dieu est là. Non seulement là, mais je découvre petit à petit ce dont il m’a préservé. « Il ne m’a pas laissé tomber en enfer », écrit saint Ignace, c’est-à-dire dans l’enfermement total en moi-même, alors que je suis fait pour la communion d’amour. Chaque exercice réalise de quelque manière cette traversée : depuis le monde chaotique de l’exil et du péché jusqu’au colloque qui accueille le don de la miséricorde reçue dans le Christ, Lui qui vient

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INTRODUCTION À LA PREMIÈRE SEMAINE DES EXERCICES

me rejoindre au cœur de mon péché pour me guérir et me revivifier. C’est un parcours en spirale où s’approfondit de plus en plus la conscience de mon péché et se reconnaît l’insondable de la miséricorde. Tout ce mouvement est œuvre de grâce, d’où l’importance de demander cette grâce, dans une prière persévérante et confiante, à travers les aridités, les résistances, les découragements qui peuvent survenir. À chacun de nous de prendre cette route dans la confiance que le Seigneur nous y accompagne et l’assurance qu’il nous donnera ce qui est bon pour nous, même si c’est inattendu. On aimera à ce moment-là, célébrer le sacrement de réconciliation en une confession « générale », c’est-à-dire qui reprend les points importants sur lesquels une lumière m’a été donnée — en une rencontre plus explicite avec le Christ que j’ai blessé, ainsi qu’avec son Corps qui est l’Église blessée, elle aussi, par mon péché (voir Annexe 12).

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Le mal dans le monde L’actualité, signe d’un monde blessé en même temps que sauvé

• INTRODUCTION. Nous vous proposons de prier le péché en commençant par vous mettre devant le mal dans le monde, mal qui nous dépasse toujours et y reconnaître aussi les signes d’espérance. En annexe, vous trouverez la possibilité de prier la dimension affective du péché : voyez cela en accompagnement. • DURÉE DE L’ÉTAPE. Une semaine environ (selon ce que vous verrez avec votre accompagnateur). • PRIER L’ACTUALITÉ • Se mettre en présence de Dieu • Prière préparatoire (ES 46) « La prière préparatoire est de demander à Dieu, notre Seigneur sa grâce pour que toutes mes intentions, mes actions et mes opérations (activités) soient purement ordonnées au service et à la louange de sa divine Majesté. » • Composition de lieu Voir par le regard de l’imagination le monde cassé en lequel je suis plongé aujourd’hui. Un monde blessé et aimé.

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LE MAL DANS LE MONDE

• Grâce à demander Demander à Dieu de m’inspirer honte et confusion pour ce monde pécheur et pourtant aimé. • Points – Faire mémoire des situations de mal dans le monde que vous avez vues et entendues dernièrement (si cela vous aide, vous pouvez utiliser la carte du monde de la page suivante et y inscrire cela). – Faire mémoire des situations d’espérance dans le monde que vous avez vues ou entendues dernièrement. • Dialogue libre ou Colloque Parler de tout cela à Dieu notre Seigneur comme un ami parle à son ami, selon ce qu’on sentira en soi. Dire un Notre Père. • TEXTES

QUI PEUVENT AIDER LA PRIÈRE

Gn 6, 5 – 9,17 Noé : déluge et alliance Gn 18, 20-33 L’intercession d’Abraham pour Sodome et Gomorrhe Ps 44 Dieu oublie-t-il son peuple ?

• PROPOSITION POUR RELIRE SA JOURNÉE. En faisant la relecture de la journée, être attentif aux situations de mal rencontrées. En parler avec Dieu.

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Le péché

• INTRODUCTION. On peut soit prendre une semaine pour prier chacun des quatre exercices sur le péché proposés par saint Ignace, soit reprendre chaque semaine l’ensemble des quatre exercices. Cette deuxième manière semble plus aidante pour approfondir le sens du péché et de la miséricorde. Le cinquième exercice ne sera à prendre qu’une ou deux fois durant la dernière semaine (cf. l’introduction à ce cinquième exercice). L’ensemble peut prendre environ quatre semaines (à voir avec la personne qui accompagne).

GRÂCE

À DEMANDER

> Demander à Dieu de m’inspirer honte et confusion pour le péché.

ATTITUDES

À NOURRIR

> Reconnaître et habiter la situation réelle de notre monde créé bon et beau, mais blessé et cassé, et de l’existence humaine — et la mienne — appelée à son accomplissement, mais habitée par la souffrance et le mal. > Nourrir ma foi en l’amour et la miséricorde du Père révélés au cœur de ce monde brisé, en Jésus, dans toute sa vie et sa mort en croix. > Accepter d’être dépassé par le mystère du mal et du péché dans le monde et en moi, sans désespoir ni révolte, mais le regard tourné vers le Christ livré pour moi à la croix.

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• PREMIER

EXERCICE PROPOSÉ PAR IGNACE (ES 45-54) Ignace propose une méditation où vont s’exercer la mémoire, l’intelligence et la volonté (le cœur) sur un donné qui parle du péché pris en luimême (indépendamment de la matière qui en est l’occasion), comme une réalité qui me concerne mais qui me précède et me dépasse — et donc être touché (affecté) par ma découverte.

• Se mettre en présence de Dieu • Prière préparatoire (ES 46) La prière préparatoire est de demander à Dieu notre Seigneur sa grâce pour que toutes mes intentions, mes actions et mes opérations soient purement ordonnées au service et à la louange de sa divine Majesté. • Le premier préambule (ES 47) Le premier préambule est une composition en se représentant le lieu. Ici, il faut remarquer que, dans la contemplation ou la méditation des choses visibles, par exemple dans la contemplation du Christ notre Seigneur, qui est visible, la composition consistera à voir par le regard de l’imagination le lieu matériel où se trouve ce que je veux contempler. Je dis « lieu matériel », par exemple un temple ou une montagne où se trouve Jésus Christ ou Notre Dame, selon ce que je veux contempler. Pour ce qui est invisible, comme c’est ici le cas pour les péchés, la composition consistera à voir par le regard de l’imagination et à considérer mon âme emprisonnée dans ce corps corruptible, et tout le composé humain comme exilé en cette vallée parmi des animaux sans raison. Je dis « tout le composé humain », c’est-à-dire l’âme et le corps.

☞ Laisser apparaître la situation et le monde pécheur en lesquels je suis plongé aujourd’hui. Un monde cassé, blessé. L’homme blessé, enfermé en lui-même, dans ses peurs, ses contradictions, séparé de Dieu, errant sans raison… Situation d’exil. « L’homme est un loup pour l’homme. » Monde sans communication, sans amour, violent…

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LE PÉCHÉ

• Le second préambule (ES 48) Le second préambule est de demander à Dieu notre Seigneur ce que je veux et désire. La demande doit être adaptée au point où l’on en est : si la contemplation porte sur la Résurrection, demander la joie avec le Christ joyeux; si elle porte sur la Passion, demander la peine, les larmes et la souffrance avec le Christ souffrant. Demander ici la honte et la confusion de moi-même, en voyant tous ceux qui ont été damnés pour un seul péché mortel et combien de fois je mériterais d’être condamné à jamais pour mes si nombreux péchés.

☞ « Demander ce que je veux et désire » (cf. Mc 11, 24 : la force de la demande). Assurance humble d’être exaucé, même si c’est autrement que ce que j’attendais. « Honte » devant ce spectacle d’un monde cassé. Qu’avons-nous fait, qu’ai-je fait de ce monde beau et bon, créé dans le Verbe ? Mouvement de recul à cause de l’abîme créé par le péché entre le monde, moi et Dieu. « Confusion » : je me sens impuissant, dépassé, incapable de faire quelque chose. J’ai perdu les références justes. D’où désarroi et trouble parce que je ne parviens pas à me situer dans ce monde bouleversé. La logique du péché sépare de Dieu : c’est l’enfer. Et pourtant je n’y suis pas. Confusion plus grande encore en voyant le visage que prend Dieu en ce monde : le Verbe créateur se révèle en Jésus, le Christ en croix, le Juste souffrant, défiguré.

• Le premier point (ES 50) Le premier point sera d’appliquer la mémoire au premier péché, celui des anges ; puis, à ce même péché, l’intelligence, en parcourant le sujet ; puis la volonté. Chercher à me rappeler tout cela et à le comprendre afin d’avoir plus de honte et de confusion ; faire la comparaison entre l’unique péché des anges et mes si nombreux péchés : eux, pour un seul péché, ils sont allés en enfer ; et combien de fois, moi je l’ai mérité pour tous les miens. Je dis « me remettre en mémoire le péché des anges ». Comment, eux qui avaient été créés dans la grâce et qui n’ont pas voulu

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mettre à profit leur liberté pour rendre respect et obéissance à leur Créateur et Seigneur, ils tombèrent dans l’orgueil, passèrent de la grâce à la perversion et furent expulsés du ciel en enfer.

☞ La tradition chrétienne a toujours compris que le premier refus de l’amour de Dieu dans sa création a été vécu par ces messagers de Dieu que sont les anges. L’ange, c’est un messager entièrement lucide et libre. Il peut transmettre parfaitement le message en renvoyant à son auteur. Mais il peut aussi refuser de se reconnaître créature et pervertir sa situation. Son péché exprime le refus radical de se recevoir de Dieu ; c’est l’affirmation pervertie de soi-même face à Dieu. C’est là l’essence du péché avec sa conséquence nécessaire : le rejet de l’unique source de notre vie et de notre amour. L’ange est alors enfermé dans une situation de perversion définitive et complète, la séparation absolue d’avec Dieu (2 P 2, 4). Réfléchir en soi-même à ce péché. Percevoir que le péché de l’ange dit quelque chose de mon propre péché, révèle sa racine, sa fine pointe. La source, la racine du péché, quelle qu’en soit la « fleur », contient toujours en germe ce qu’il y a dans le mystère du péché à l’état pur. Laisser son cœur être touché par la découverte de ce qu’il y a de plus radical dans le péché. Regarder combien souvent, moi aussi, j’ai rejeté l’amour de Dieu ; ma propre intériorité spirituelle m’est ainsi révélée, ma liberté, avec sa possibilité de refus, de séparation radicale d’avec Dieu. • Le deuxième point (ES 51) Faire de même, c’est-à-dire appliquer les trois puissances au péché d’Adam et d’Ève. Me remettre en mémoire comment, pour ce péché, ils ont fait une si longue pénitence, et quelle corruption s’en est suivie pour le genre humain: tant de peuples marchant vers l’enfer. Je dis « se remettre en mémoire la gravité et la perversité-malice du péché contre son Créateur et Seigneur ». Comment, après qu’Adam eut été créé dans le pays de Damas et placé dans le Paradis terrestre, et après qu’Ève eut été créée de sa côte, il leur fut interdit de manger à l’arbre de la science. Ils y mangèrent, et ce fut là leur péché. Alors, vêtus de tuniques de peaux et

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LE PÉCHÉ

expulsés du paradis, ils vécurent toute leur vie sans la justice originelle qu’ils avaient perdue, en beaucoup de peines et en grande pénitence. Ensuite, parcourir le sujet plus en détail par l’intelligence; me servir de la volonté, comme on l’a dit.

☞ Cf. Gn 3 : « Manger à l’arbre de la science ». L’homme et la femme prennent position contre leur état de vie, qui demande de vivre dans la dépendance confiante, de se recevoir de Dieu dans la patience du temps. Ils veulent déterminer eux-mêmes ce qui est bien ou mal, ils ne font pas confiance à Dieu ; ils veulent comprendre et posséder tout de suite, au lieu de consentir à être aimés. Ils font passer l’intelligence avant l’amour. Conséquences : divisés en eux-mêmes et entre eux ; séparés de Dieu (se cachent, peur : 3, 8) ; divisés du monde (3, 16.17.19). Il s’en suit : prolifération du péché dans le monde (Gn 3—11). Universalité et solidarité dans le péché. Injustice, athéisme, violence… Toute l’histoire et la réalité du péché dans le monde aujourd’hui. Réfléchir profondément à tout cela. Me laisser toucher. Laisser la puissance d’autodestruction, de décréation du péché devenir pleinement présente à mon attention. • Le troisième point (ES 52) Faire de même pour le troisième péché, péché particulier de tout homme qui est allé en enfer pour un seul péché mortel ; et de beaucoup d’autres, innombrables, qui y sont allés pour moins de péchés que je n’en ai faits. Je dis « faire de même pour le troisième péché particulier ». Me remettre en mémoire la gravité et la perversité du péché contre le Créateur et Seigneur. Penser par l’intelligence à la façon dont celui qui a péché et agi contre la Bonté infinie a été justement condamné pour toujours. Terminer par la volonté, comme on l’a dit.

☞ Il est possible à la personne humaine, parce qu’elle est libre, de dire « non » à l’amour et à la bonté de Dieu notre créateur et Seigneur. Je pèse la gravité et la perversité d’un tel acte de liberté. C’est s’enfermer en soi-

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même, se fermer à l’unique source de vie et d’amour qui est Dieu. C’est se condamner soi-même à la séparation d’avec Dieu. Réfléchir en moi-même, réaliser la conséquence mortelle déjà à l’œuvre dans tout péché. Me rappeler, être présent à la réalité du péché devant laquelle je veux me mettre. Me laisser toucher, atteindre. De la tête au cœur.

• Colloque (ES 53-54) Imaginant le Christ notre Seigneur devant moi et mis en croix, je lui parle comme un ami à son ami : Comment, de Créateur, il en est venu à se faire homme, à passer de la vie éternelle à la mort temporelle, et ainsi à mourir pour mes péchés. Me regarder moi-même : ce que j’ai fait pour le Christ, ce que je fais pour le Christ, ce que je dois faire pour le Christ. Le voyant dans cet état, ainsi suspendu à la croix, parcourir ce qui s’offre à moi.

☞ Au cœur de ce monde créé beau et bon, mais blessé, défiguré, cassé par le péché, je vois que le Verbe Créateur prend visage dans le Christ notre Seigneur qui s’enfonce dans le monde jusqu’à mourir sur la croix.

Le colloque se fait, proprement, en parlant comme un ami parle à son ami, ou un serviteur à son maître. Tantôt on demande quelque grâce, tantôt on s’accuse de quelque mauvaise action, tantôt on fait part de ses affaires personnelles et on demande conseil à leur sujet. Terminer l’exercice par un Notre Père. On trouvera d’autres textes d’Écriture pour aider éventuellement la prière sur le péché en Annexe 11.

• PROPOSITION POUR RELIRE SA JOURNÉE – Dans quelle mesure suis-je conscient que ma vie a sa source dans la miséricorde de Dieu ? – Regarder comment dans tel ou tel événement j’ai réagi : quels mouvements affectifs positifs ou négatifs me meuvent ? – Comment le Seigneur m’y appelle à prendre conscience de mon péché, de mon désordre ?

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Je suis pécheur

GRÂCE

À DEMANDER

> Demander à Dieu une profonde et intense douleur et des larmes pour mes péchés.

ATTITUDES

À NOURRIR

> Sentir l’exil, l’enfermement en moi-même, l’isolement des autres, conséquence du mystère du péché en moi, et comment la rencontre du Christ et son regard de tendresse me libèrent. > Reconnaître ma misère dans sa miséricorde (Jésus, le bon Samaritain). > Dans le regard d’amour de Jésus, le laisser me dire et laisser monter en moi, reconnaître et nommer en vérité les points de péché plus précis, mais aussi les situations ou les pentes de lourdeur, de confusion, de peur, d’amertume, etc. > Non pas tellement méditer sur le péché, mais vivre une prière, une attitude de pécheur aimé et pardonné, dans une tristesse aimante et confiante.

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• DEUXIÈME

EXERCICE PROPOSÉ PAR IGNACE

(ES 55-61)

• Se mettre en présence de Dieu • Prière préparatoire (ES 46) Consiste à demander la grâce à Dieu notre Seigneur, pour que toutes mes intentions, mes actions et mes activités soient purement ordonnées au service et à la louange de sa divine Majesté. • Le premier préambule (ES 55) Le premier préambule est une composition en se représentant le lieu. Ici, pour les péchés, la composition consistera à voir par le regard de l’imagination et à considérer mon âme emprisonnée dans ce corps corruptible, et tout le composé humain comme exilé en cette vallée parmi des animaux sans raison. Je dis « tout le composé humain », c’est-à-dire l’âme et le corps.

☞ Laisser apparaître la situation et le monde pécheur en lesquels je suis plongé aujourd’hui. Un monde cassé, blessé. L’homme blessé, enfermé en lui-même, dans ses peurs, ses contradictions, séparé de Dieu, errant sans raison… Situation d’exil. « L’homme est un loup pour l’homme. » Monde sans communication, sans amour, violent… • Le second préambule Le second préambule est de demander ce que je veux. ici, demander une immense et intense douleur et des larmes pour mes péchés. • Premier point : la suite des péchés (ES 56) Me remettre en mémoire tous les péchés de ma vie, revoyant année par année ou époque par époque. Pour cela trois choses sont utiles : – revoir l’endroit et la maison où j’ai habité ; – les relations que j’ai eues avec autrui ; – l’emploi dans lequel j’ai vécu.

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JE SUIS PÉCHEUR

☞ Ceci fournira matière à la prière présente « me remettre en mémoire tous les péchés de ma vie ». Pour faire cela, déterminer des étapes avec des repères (cf. les grands passages : enfance, adolescence, âge adulte… ou des étapes significatives : famille, école, vie étudiante, vie professionnelle… ou des temps forts de la vie sentimentale, ou des événements qui ont changé quelque chose de ma vie, ceux dont je dis « avant » et « après »…). Avoir aussi des repères de lieux caractéristiques où ma personnalité s’est affirmée… Suite de mes péchés ne veut pas dire liste (inventaire) des péchés ; la démarche veut aider à prendre conscience de qui je suis, pécheur, de ce que le péché m’a fait devenir… Cette matière ainsi rassemblée, par l’exercice de la mémoire, va permettre de faire un travail exprimé dans les points 2, 3, 4 et 5.

• Deuxième point : peser les péchés (ES 57) Voir la laideur et la perversité que contient, en soi, tout péché capital que je commets, même s’il n’était pas défendu.

☞ Les péchés ne sont pas à peser sur la balance de la loi, mais devant Dieu qui est amour, me demander : Dans cette suite de mes péchés, qu’est-ce qui pèse le plus lourd ? Qu’est-ce qui m’est le plus douloureux ? • Troisième point (ES 58) Regarder qui je suis et me rendre de plus en plus petit par des comparaisons : – Qu’est-ce que je suis, moi, en comparaison de tous les hommes ? – Qu’est-ce que sont les hommes, en comparaison de tous les anges et de tous les saints du paradis ? – Regarder ce qu’est tout le créé en comparaison de Dieu : et moi tout seul, que puis-je être ? – Regarder toute la corruption et la laideur de mon corps. – Me regarder comme une plaie et un abcès d’où sont sortis tous ces péchés, toutes ces méchancetés et tout ce poison infect.

☞ Que suis-je en comparaison de tous les hommes… ? Qui suis-je, que sont tous les hommes en comparaison des saints… d’un François d’Assise… ? L’amour de Dieu personnalise. A moi tout seul que puis-je être ?

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Parce que le péché m’a séparé de ce qui me fait vivre (les autres, la création, Dieu…). Le péché est autodestruction, je peux le comprendre en comparaison avec ce qui dégrade. Le péché est comme une plaie ; il a pu prendre cet aspect en moi… en tout cas, Lui, est devenu plaie vivante sur la croix…

• Quatrième point (ES 59) Considérer qui est Dieu contre qui j’ai péché, en suivant ses attributs pour les comparer à leurs contraires qui sont en moi (ma malice) : sa sagesse à mon ignorance, sa toute-puissance à ma faiblesse, sa justice à mon iniquité, sa bonté à ma perversité.

☞ Dieu est fidèle, contre qui j’ai péché. Il continue de se révéler et de s’offrir à moi avec sa sagesse, sa toute-puissance, sa justice, sa bonté que je compare à mon ignorance, à ma faiblesse, à mon injustice, à ma malice… Dieu continue d’être disponible pour moi : perversité du péché. • Cinquième point (ES 60) Cri d’admiration, avec un immense amour. Parcourir toute la série des créatures : comment m’ont-elles laissé en vie et m’y ontelles conservé ? Les anges : eux qui sont le glaive de la justice divine, comment m’ont-ils supporté, m’ont-ils protégé, ont-ils prié pour moi ? Les saints: comment ont-ils pu intercéder et prier pour moi ? Et les cieux, le soleil, la lune, les étoiles et les éléments, les fruits, les oiseaux, les poissons et les animaux ? Et la terre : comment ne s’estelle pas ouverte pour m’engloutir, créant de nouveaux enfers pour que j’y souffre à jamais ?

☞ Cri qui jaillit du contraste entre deux découvertes : celle de mon péché et celle de Dieu. Un cri, c’est spontané, ça ne se commande pas… Étonnement à partir du regard sur les créatures : le péché m’en avait séparé, elles sont toujours là à mon service. Les créatures me disent que Dieu n’a cessé d’être là, car elles sont son œuvre. L’amour est fidèle jusque dans ma fragilité et mon infidélité.

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JE SUIS PÉCHEUR PARDONNÉ

• Colloque (ES 61) Terminer par un colloque sur la miséricorde, en m’entretenant avec Dieu notre Seigneur et en lui rendant grâce de m’avoir donné la vie jusqu’à maintenant, et former le propos de m’amender à l’avenir avec sa grâce. Dire un Notre Père.

☞ Dieu refait toutes choses nouvelles : rendre grâce — gratitude qui naît de la reconnaissance du péché, de sa gravité et de la bonté de Dieu. Il donne la vie jusqu’à présent : reconnaissance de la vie comme un don gratuit. S’engager à restaurer, refaire ce qui est blessé, dans la miséricorde. L’avenir est ouvert pour une espérance.

• PROPOSITION POUR RELIRE SA JOURNÉE – Dans quelle mesure suis-je conscient que ma vie a sa source dans la miséricorde de Dieu ? – Regarder comment dans tel ou tel événement j’ai réagi : quels mouvement affectifs positifs ou négatifs me meuvent ? – Comment le Seigneur m’y appelle à prendre conscience de mon péché, de mon désordre afin de me convertir et ordonner ma vie ? Note : (Sur l’orientation de cette prière.) C’est en acceptant de reconnaître dans la lumière aimante du Christ que je suis pécheur, responsable, même si je ne l’éprouve pas encore, que je pourrai aussi m’ouvrir au pardon. Tout le mouvement de la prière consiste à accepter de descendre avec le Christ dans la profondeur de mon péché, pour reconnaître ainsi la profondeur de la miséricorde.

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Je suis pécheur pardonné

GRÂCE

À DEMANDER

> Demander à Dieu une profonde et intense douleur et des larmes pour mes péchés.

ATTITUDES

À NOURRIR

> Laisser monter en moi l’humble joie du pécheur aimé et pardonné : « Heureuse faute qui nous a valu un tel Sauveur ». > Éprouver l’horreur des valeurs du « monde », de la dynamique qui risque de régir notre société avec ses injustices institutionnelles. > M’ouvrir au monde de miséricorde où je suis accueilli par Marie, le Christ et le Père, avec mes frères et sœurs, dans une société appelée à la réconciliation. > Vivre une conscience croissante de la réalité objective du mystère du péché et du mal, et de « structures de péché » dans notre monde, et m’en reconnaître solidaire de quelque manière.

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JE SUIS PÉCHEUR PARDONNÉ

Les prières suivantes seront des répétitions de tout le mouvement vécu jusqu’ici : le mal dans le monde, le péché, mon péché.

• TROISIÈME EXERCICE PROPOSÉ PAR IGNACE (ES 62-63) Le troisième exercice est une répétition du premier et du second exercice, avec trois colloques. Après la prière préparatoire et les deux préambules, répéter le premier et le second exercice ; noter, et m’y arrêter, les points où j’ai senti une plus grande consolation ou désolation, ou un plus grand sentiment spirituel. Après quoi, je ferai trois colloques de la façon suivante : • Premier colloque À Notre Dame, afin qu’elle m’obtienne la grâce de son Fils et Seigneur pour trois choses : – Que je sente une connaissance intérieure de mes péchés et que je les aie en horreur. – Que je sente le désordre de mon activité, afin que, l’ayant en horreur, je me réforme et je m’ordonne. – Demander la connaissance du monde, afin que, l’ayant en horreur, j’écarte de moi les choses mondaines et vaines. Ensuite, un Ave Maria. • Deuxième colloque De même au Fils, afin qu’il me l’obtienne du Père. Ensuite, Âme du Christ. Âme du Christ, sanctifie-moi. Corps du Christ, sauve-moi. Sang du Christ, enivre-moi. Eau du côté du Christ, lave-moi. Passion du Christ, fortifie-moi. […/…]

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[…/…] Ô bon Jésus, exauce-moi.

Dans tes blessures, cache-moi. Ne permets pas que je sois séparé de toi. De l’ennemi, défends-moi. À ma mort, appelle-moi. Ordonne-moi de venir à toi Pour qu’avec tes saints, je te loue, Dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

• Troisième colloque De même au Père, afin que le Seigneur éternel lui-même me l’accorde. Ensuite, un Notre Père.

☞ Pour aider à prier « le triple colloque » : – À NOTRE DAME. La prier, la contempler : sans péché, unifiée, « voici la servante », être présent à sa prière pour moi à son Fils. – AU FILS. Le prier, le contempler, sans péché, Fils unifié, Serviteur ; être présent à sa prière au Père pour moi. – AU PÈRE. La triple demande exprime une triple horreur, découlant d’une triple connaissance : – sentir une connaissance intérieure de mon péché (que le cœur soit touché). Voir mon péché comme Dieu le voit. Et comme il est réellement. Et de mon être pécheur (le voir comme une partie de moi-même : qu’ai-je fait pour le Christ ?). De là une horreur, comme la réaction spontanée d’un organisme vivant qui rejette ce qui ne lui convient pas et choisit le bien par instinct spirituel. – sentir la désorientation de mes actions (devant Dieu) : voir les racines et les pentes intérieures non évangélisées en moi, source de péché. Ordre de valeur faussé, intelligence pervertie. Cf. Rm 7 : une autre loi en moi. Un certain « empoisonnement » par le péché. L’homme devient autre. Dureté, nivellement. – une connaissance du monde : infiltration insidieuse de fausse échelle de valeurs morales, intellectuelles, suffisance, vie facile… qui entraî-

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JE SUIS PÉCHEUR PARDONNÉ

nent aveuglement, déception, perte du goût de la prière, du goût de Dieu et de ses voies (Sg 2, 21-24). Voir et écouter Notre Dame et le Christ intercéder avec amour pour moi auprès du Père.

• QUATRIÈME EXERCICE PROPOSÉ PAR IGNACE (ES 64) Le quatrième exercice consiste à reprendre le troisième. J’ai dit : en reprenant, afin que l’intelligence, sans chercher autre chose, parcoure assidûment le souvenir des choses contemplées dans les exercices antérieurs. On fera les trois mêmes colloques.

☞ À propos de la répétition. La répétition crée un espace pour les réactions affectives aux réalités reçues dans les premier et deuxième exercices. Grâce aux répétitions, le poids se déplace de plus en plus du côté de l’affectivité : la prière s’y oriente vers le centre de la personne et du dialogue avec Dieu. La personne demeure là où elle est touchée ou bien là où elle résiste. Prendre le temps de faire une préparation soignée. Voir où je me trouve situé en ce moment de la retraite. Pour cela revoir les points qui m’ont davantage touché lors des méditations, ou bien les points où j’ai perçu une résistance (« où j’ai senti une plus grande consolation ou désolation »). Ou encore les points de plus grande lumière (« sentiment spirituel »). C’est à ces points-là qu’il est bon de revenir durant la prière. ES 64 : Reprise plus objective, qui reprend davantage l’ensemble du parcours des deux premiers exercices. Elle permet de faire « l’enchaînement » du chemin parcouru.

• PROPOSITION POUR RELIRE SA JOURNÉE – Dans quelle mesure suis-je conscient que ma vie a sa source dans la miséricorde de Dieu ? – Regarder comment, dans tel ou tel événement, j’ai réagi : quels mouvement affectifs positifs ou négatifs me meuvent ? – Comment le Seigneur m’y appelle à prendre conscience de mon péché, de mon désordre ?

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• CINQUIÈME EXERCICE PROPOSÉ PAR IGNACE (ES 65 – 71) Est une méditation sur l’enfer. Il comprend, après la prière préparatoire et deux préambules, cinq points et un colloque.

☞ Alors que le retraitant habite déjà quelque peu la miséricorde du Christ, il est invité à méditer l’une ou l’autre fois la possibilité pour sa liberté de refuser Dieu et son amour et de s’enfermer radicalement en luimême. Il ne s’agit donc pas d’une méditation sur la punition de l’enfer, mais sur le sérieux de la liberté qui peut tenir l’amour de Dieu en échec.

• La prière préparatoire (ES 65) Consiste à demander la grâce à Dieu notre Seigneur, pour que toutes mes intentions, mes actions et mes activités soient purement ordonnées au service et à la louange de sa divine Majesté (ES 46). • Le premier préambule Une composition : c’est, ici, voir avec les yeux de l’imagination la longueur, la largeur et la profondeur de l’enfer.

☞ La possibilité pour l’homme d’être enfermé radicalement en luimême, alors qu’il est précédé et enveloppé par la miséricorde de Dieu, que c’est là le sens de sa vie, mais il le refuse. Ce lieu est à la fois spirituel et corporel, il touche l’esprit et le cœur d’une part, le corps et les sens d’autre part, ainsi que les autres et le monde.

• Le deuxième préambule Demander ce que je désire : ce sera, ici, demander de sentir intérieurement la peine qu’endurent les damnés, afin que, si j’en venais à oublier l’amour du Seigneur Éternel à cause de mes fautes, au moins la crainte des peines m’aide à ne pas tomber dans le péché.

☞ Comprendre et reconnaître le sérieux de la liberté humaine qui peut tenir l’amour de Dieu en échec. Sentir intuitivement quelque peu l’aboutissement de la logique du péché et éprouver en quelque manière sensiblement la répercussion sur le corps et les sens de ce refus qui déchire et détruit l’homme tout entier. Répercussion aussi sur les relations aux autres et au monde.

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JE SUIS PÉCHEUR PARDONNÉ

Éprouver la crainte d’être entraîné sur cette pente destructive, afin de mettre davantage toute ma confiance et mon abandon dans le Christ notre Sauveur qui me sauve de l’enfer.

• Climat de la méditation

☞ Alors que déjà j’habite l’expérience du salut et de la miséricorde du Christ, je réfléchis profondément à cette réalité possible de l’enfer. Je reconnais la possibilité pour ma liberté de refuser Dieu et son amour, de « m’enfer-mer ». Je pressens ce que peut être le monde du péché qui va à son terme, cette dynamique qui aboutit à l’enfer. Tout commence dans le cœur qui se laisse attirer par cette « douceur mortelle », les valeurs se pervertissent, le cœur se durcit, l’être s’unifie dans le mal. C’est l’anti-fondement. Je pèse le sérieux de ma situation, la responsabilité de ma liberté, pour que la crainte du moins me retienne de glisser sur cette pente destructive, si j’en venais à oublier l’amour du Seigneur pour moi. • Les points (ES 66-70)

☞ Par l’imagination dans ma prière, je laisse mes sens être affectés par cette destruction de la personne humaine, comme Jésus l’a évoqué luimême dans l’évangile. Tout en étant conscient de la distance culturelle, respecter les symboles bibliques, sans « forcer » ma sensibilité. Chaque point est une prière, et va de l’extérieur vers l’intérieur : laisser la douceur de Dieu entrouvrir peu à peu le mystère de crainte, d’humilité, d’amour. Nous connaissons tous des lieux et des situations actuelles dont on dit que « c’est un enfer ». • Le premier point (ES 66) Voir, avec les yeux de l’imagination, les grands brasiers (Mt 18, 8-9). • Le deuxième point (ES 67) Entendre de mes oreilles les plaintes, les hurlements, les cris, les blasphèmes contre le Christ notre Seigneur et contre tous ses saints (Mt 13, 42 ; 25, 30).

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• Le troisième point (ES 68) Sentir par l’odorat la fumée, le soufre, le cloaque et la pourriture (Ap 14, 10 ; 19, 20). • Le quatrième point (ES 69) Goûter par le goût les choses amères, comme par exemple, les larmes, la tristesse et le ver de la conscience (Mc 9, 48). • Le cinquième point (ES 70) Toucher par le tact, c’est-à-dire sentir comment les flammes touchent et embrasent les âmes. • Colloque (ES 71) Faisant un colloque avec le Christ notre Seigneur me remettre en mémoire les âmes qui sont en enfer ; les unes parce qu’elles ne crurent pas à son avènement, les autres qui y ont cru, mais n’ont pas agi selon ses commandements. Faire trois groupes : – le premier, avant son avènement ; – le deuxième, durant sa vie ; – le troisième, après sa vie en ce monde. Après quoi, lui rendre grâce de ne pas m’avoir laissé tomber dans aucun de ces groupes en mettant fin à ma vie et aussi de ce que, jusqu’à maintenant, il a toujours eu tant de compassion et de miséricorde pour moi. On terminera par un Notre Père.

☞ Je me tourne vers le Christ notre Seigneur, Lui dont la miséricorde victorieuse enveloppe le monde et l’histoire, et je lui parle comme un ami avec son ami (ES 54). Je lui rends grâce de ne pas m’avoir livré à ma liberté orgueilleuse et destructrice, mais d’être venu me rejoindre sur cette pente et d’avoir eu jusqu’à présent pour moi tant de tendresse et de miséricorde. Du fond de ma liberté, je consens et m’abandonne dans la confiance en Lui, mon Sauveur (Ps 130 [129], 103 [102]). Note : À ce point, l’être humain est rejoint par la miséricorde à la racine de son être. Tout son désir est de se laisser toucher, guérir, transfor-

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JE SUIS PÉCHEUR PARDONNÉ

mer par tant de tendresse et de compassion. D’où l’action de grâce. La personne commence à renaître. Cette méditation, et l’ensemble de ces exercices de Première Semaine, visent à constituer en nous l’instinct intérieur qui écarte tous les obstacles à l’amour (ES 63). Obtenir le sens instinctif du péché, enfer virtuel. Il y a une maturation des puissances instinctives qui s’opère ainsi et une ouverture à un genre de relations nouvelles. Recevoir la grâce de discerner la « manière » du Seigneur et celle par où le « monde » vient à moi. Selon les tempéraments, cette prière peut être vécue de manière plus sensible ou dans la nuit de la foi. Il importe peu. L’œuvre de la grâce en nous opère plus profondément que ce que nous pouvons en ressentir. Il ne s’agit donc pas d’une méditation sur « la punition de l’enfer ». Il s’agit de l’exercitant lui-même, de son lieu spirituel dont il découvre une nouvelle dimension, « la limite ». Dieu n’est pas absent de l’enfer. Mais l’homme y éprouve son propre éloignement de Dieu. Hors de Dieu en Dieu. « L’enfer pour Ignace, c’est l’extrême de la “dé-création” où le monde et l’homme se défont. Ignace a invité le retraitant à faire, jusque dans son propre corps, l’inventaire de ce lieu où tout se défait. Il l’a invité à contempler “la longueur, la largeur, la profondeur de l’enfer” (ES 65). Les termes employés évoquent ceux de l’épître aux Éphésiens (Ep 3, 18). Il y manque, de façon consciente, la “hauteur”. Mais c’est bien la reprise en creux de la plénitude du dessein de Dieu que Paul donnait à contempler » (J. Thomas, s.j.).

Note : Lorsque je sens, aidé par la personne qui m’accompagne, que j’habite la miséricorde du Père révélée en Jésus, au cœur de mon péché reconnu (fils prodigue), le fruit de la Première semaine est reçu. On aimera à ce moment faire une confession « générale » (cf. Annexe 12), c’est-à-dire qui reprend les points importants sur lesquels une lumière m’a été donnée — comme une rencontre plus visible, plus explicite avec le Christ que j’ai blessé, ainsi qu’avec son Corps (la communauté, l’Église) blessé lui aussi par mon péché.



Deuxième Semaine



Pour aider l’entrée en Deuxième Semaine

L’appel du Christ Où en sommes-nous dans notre démarche Nous avons d’abord reconnu et expérimenté plus profondément pendant les mois précédents le Dessein d’amour de Dieu sur notre monde et sur chacune de nos vies. Et nous avons constaté ensuite le décalage existant entre ce projet d’amour et la réalité concrète, celle du monde et la nôtre à chacun. Nous sommes descendus dans ce monde blessé et cassé dont nous sommes solidaires, parce que nous-mêmes aussi sommes pécheurs. Nous avons demandé de sentir une connaissance intérieure de notre péché et du désordre en nous. Et nous avons découvert peu à peu que le Christ Jésus nous révèle l’amour totalement fidèle du Père et vient nous rejoindre au cœur de notre misère. Nous avons éprouvé la miséricorde du Père dans son pardon. Nous savons par là que nous sommes guéris d’une meurtrissure intérieure, réconciliés avec nous-mêmes et ouverts à l’avenir avec plus de confiance (Rm 8, 39). Dans cette assurance nouvelle, une action de grâce peut monter du fond de nousmêmes, avec un désir de nous offrir davantage au Christ qui le premier nous a aimés et a donné sa vie pour nous. Nous entrons par là dans une nouvelle « étape ». Certes, les blessures de nos péchés sont toujours là mais quelque peu guéries ou transfigurées. Et voilà que le Christ notre Sauveur nous invite, si

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nous le voulons, à nous mettre à sa suite, à devenir ses disciples. C’est-à-dire à l’accompagner et à vivre comme Lui, tel qu’Il nous le révèle dans son Évangile. Saint Ignace nous propose pour cela de faire ce qu’il nomme la « Méditation du Règne ». Comment prier ce texte ? Nous vous proposons de le prendre pendant quelques jours et puis de le garder présent en arrière-fond de votre prière, aidé des « attitudes à nourrir », notées en page 74.

Comment vivre l’appel du Christ et mon offrande, ma réponse, dans la vie quotidienne ? Être avec le Christ, comme Lui, cela implique un certain choix de valeurs dans la manière de vivre, dans l’action exercée sur le monde à notre petite place, dans le sens donné à l’histoire humaine. En particulier, lors des Exercices dans la vie courante, nous nous offrons pour suivre le Christ, et voilà que son appel se manifeste à moi dans le concret de ma vie, à travers la présence de telle personne redoutée, à travers une circonstance qui m’apporte joie ou inquiétude, à travers une contrainte inéluctable, à travers un désir obscur qui m’habite… À travers tout cela, c’est le Christ qui m’interpelle de personne à personne. Je vis des situations humaines bien précises dans un va-et-vient entre l’engagement concret et la prière, et cela unifie mon regard de foi. « Le Christ est là, présent, agissant, comme celui qui vit en moi et aussi comme celui qui m’appelle audelà de moi, tout en étant pleinement intérieur à moi. Toute ma vie se révèle être le lieu où Jésus ressuscité se manifeste à moi, m’appelle à la conversion du cœur aux valeurs évangéliques, à une réconciliation, à une communion avec les autres. Nous commençons à découvrir, comme saint Paul, que “ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi” (Ga 2, 20). Je vis avec le Christ et dans le Christ, au cœur de ce dont est pétrie mon histoire d’aujourd’hui » (cf. M. GIULIANI, op. cit., p. 110-111). Cette expérience que nous commençons à vivre dans la contemplation de l’appel du Christ — « le Règne » — va se pour-

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POUR AIDER L’ENTRÉE EN DEUXIÈME SEMAINE

suivre tout au long des semaines et des mois qui viennent. Nous allons cheminer dans l’Évangile à travers certaines scènes, durant nos temps de prière, de contemplation évangélique. Nous nous laisserons imprégner par elles et nous y trouverons peu à peu une lumière qui éclaire le quotidien que nous avons à vivre et notre histoire actuelle. Nous apprendrons ainsi à y reconnaître sa présence et son appel sur chacun d’entre nous.

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L’appel du Christ

• DURÉE DE L’ÉTAPE. Une semaine environ (selon ce que vous verrez avec la personne qui vous accompagne).

GRÂCE

À DEMANDER

> Demander la grâce que je veux. Ici, demander la grâce à notre Seigneur, afin de ne pas être sourd à son appel, mais prompt et diligent à accomplir sa très sainte volonté.

ATTITUDES

À NOURRIR

> Laisser résonner en moi l’appel du Christ adressé au monde entier et à chacun en particulier. > Comment l’appel du Christ retentit-il en moi, dans la réalité concrète de ma vie ? > Nourrir le désir d’entrer dans une amitié avec le Christ, d’être avec Lui et de vivre comme Lui dans sa mission et sur ses chemins. > Éprouver le sérieux de la réponse, de l’offrande proposée par Ignace : la remise inconditionnelle de ma liberté. Reconnaître les points de résistance qui m’habitent et les lui confier dans notre amitié naissante. > Comment puis-je répondre, faire l’offrande maintenant, avec mes mots ? Dans cette amitié naissante, laisser peu à peu se greffer les sentiments du Christ sur notre générosité humaine.

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L’APPEL DU CHRIST

• L’APPEL DU ROI TEMPOREL AIDE À CONTEMPLER LA VIE DU ROI ÉTERNEL (ES 91-98)

• Prière (ES 91) La prière préparatoire habituelle. • Premier préambule Composition : voir le lieu. Ici, voir par le regard de l’imagination les synagogues, les châteaux et les villages où le Christ notre Seigneur prêchait. • Deuxième préambule Demander la grâce que je veux. Ici, demander la grâce à notre Seigneur, afin de ne pas être sourd à son appel, mais prompt et diligent à accomplir sa très sainte volonté. [Première partie] • Le premier point (ES 92) Me représenter un roi humain, choisi par la main de Dieu notre Seigneur, auquel rendent respect et obéissance tous les chefs chrétiens et tous les hommes. • Le deuxième point (ES 93) Regarder comment ce roi parle à tous les siens et leur dit : « Ma volonté est de conquérir tout le territoire des infidèles. Pour cela, celui qui voudra venir avec moi devra se contenter de la même nourriture que moi, de la même boisson, du même vêtement, etc. Il devra aussi peiner avec moi le jour et veiller la nuit, etc., pour prendre part ensuite avec moi à la victoire, comme il l’aura prise à la peine. » • Le troisième point (ES 94) Considérer comment doivent répondre à un roi si généreux et si humain les sujets fidèles, et aussi combien celui qui n’accepterait

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pas la requête d’un tel roi mériterait d’être blâmé par tout le monde et tenu pour lâche chevalier. [Seconde partie] La seconde partie de cet exercice consiste à appliquer l’exemple précédent du roi temporel au Christ notre Seigneur. • Le premier point (ES 95) Dans le premier point, s’il faut prêter attention à un tel appel adressé par le roi temporel à ses sujets, combien est-ce une chose qui mérite plus d’attention encore de voir le Christ notre Seigneur, Roi éternel, et devant lui tout l’univers qu’il appelle, en même temps que chacun en particulier, disant : « Ma volonté est de conquérir le monde entier et tous les ennemis, et d’entrer ainsi dans la gloire de mon Père. Pour cela, celui qui voudra venir avec moi doit peiner [travailler] avec moi, afin que, me suivant dans la peine, il me suive aussi dans la gloire. » • Le deuxième point (ES 96) Considérer que tous ceux qui auront jugement et raison offriront toute leur personne à la peine. • Le troisième point (ES 97-98) Ceux qui voudront aimer davantage et se distinguer au service total de leur Roi éternel et de leur Seigneur universel, n’offriront pas seulement leur personne à la peine ; mais encore, allant contre le sensible en eux et contre leur amour charnel et mondain, ils feront une offrande de plus haut prix et de plus haute importance, disant : « Éternel Seigneur de toutes choses, je fais mon offrande, avec votre faveur et votre aide, devant votre infinie Bonté et devant votre Mère glorieuse et tous les saints et saintes de la cour céleste. Je veux et je désire, et c’est ma détermination réfléchie, pourvu que ce soit votre plus grand service et votre plus grande louange, vous imiter en endurant toutes les injustices et tous les mépris, et toute pauvreté,

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L’APPEL DU CHRIST

aussi bien effective que spirituelle, si votre très sainte Majesté veut me choisir et m’admettre à cette vie et à cet état. » ☞ Sens de l’offrande : entrée dans une intimité, une amitié : je connais ma faiblesse (Première semaine), mais j’éprouve en moi un grand désir d’être et de travailler avec Jésus le Seigneur, mon Sauveur, à la mission reçue du Père. Dans cette amitié naissante, je fais mon offrande : c’est ma détermination réfléchie, consciente aussi de sa fragilité, et donc confiante « en sa faveur et son aide » et « s’il veut me choisir ». C’est une greffe des sentiments du Christ sur notre générosité humaine. Il faudra du temps pour que la greffe prenne.

• PROPOSITION POUR RELIRE SA PRIÈRE – Comment l’appel du Christ retentit-il en moi ? – Comment puis-je faire l’offrande ? • PROPOSITION POUR RELIRE SA JOURNÉE – Quelle écoute ai-je du Seigneur tout au long de la journée ? – Comment mon désir d’être avec le Seigneur a-t-il grandi durant la journée ? • NOTES POUR AIDER LA PRIÈRE DANS LA VIE – Il est des pas que seul l’amour peut poser. Que ce temps soit l’occasion de désirer et de grandir dans cet amour. – Voyez comment vous pouvez vous offrir à l’appel du Christ. Ne forcez pas mais voyez ce que vous pouvez dire en vérité. – La méditation de « l’appel du roi » que propose Ignace fait appel d’abord à votre intelligence : regardez comment vous pouvez comprendre cela en l’adaptant pour aujourd’hui. Ignace était pétri de l’idéal de son époque qui est un idéal de chevalerie. Aujourd’hui quelle cause éveille votre idéal ? De même Ignace vous invite à faire le passage de cet idéal à la proposition du Christ : êtes-vous d’accord ? Enfin regardez comment cette intelligence des choses mobilise votre être tout entier vers Lui.

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« Incarnation et vie cachée »

• INTRODUCTION AUX CONTEMPLATIONS ÉVANGÉLIQUES À partir de ce moment, nous sommes invités à commencer les exercices de contemplation, comme ils sont présentés dans les pages suivantes (p. 85-89). Vous trouverez en Annexe 13 une explication sur la manière de faire ces prières contemplatives, et en pages 90 à 92, comment les vivre dans la vie quotidienne. • DURÉE DE L’ÉTAPE Un mois environ (selon ce que vous verrez avec votre accompagnateur).

GRÂCE

À DEMANDER

> Demander une connaissance intérieure du Seigneur qui pour moi s’est fait homme, afin de mieux l’aimer et le suivre.

ATTITUDES

À NOURRIR

> Est-ce que je demeure spectateur extérieur au mystère contemplé, ou est-ce que je m’y rends présent ? Et puis-je entrer dans une relation vraie de familiarité, d’intimité avec les personnes : Marie, Jésus, le Père ? > Puis-je demeurer un peu gratuitement présent au mystère, aux personnes contemplées ?

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« INCARNATION ET VIE CACHÉE »

> Mon affectivité est-elle touchée, évangélisée de quelque manière ? > Y a-t-il un désir, un pressentiment, une invitation qui mûrit en moi de laisser toucher et changer mon cœur, qu’il soit conformé aux sentiments et aux goûts du Christ et de l’Évangile (« connaissance intérieure du Seigneur »). > Que m’est-il révélé du mystère de Dieu dans ces contemplations ? > Qu’est-ce qui m’est révélé de moi-même à travers ces contemplations ? (« réfléchir en moi-même et tirer profit »). > Quelles sont les distractions qui m’habitent dans la prière ? Certaines peuvent avoir leur importance.

Voici (p. 79-84) la proposition de prière et la méthode à suivre pour la première journée de contemplation. De la page 85 à la page 89, vous trouverez les suggestions (points) pour contempler tous les mystères de la vie cachée en Jésus.

• PREMIÈRE

CONTEMPLATION :

L’INCARNATION (ES 101-109)

• La prière préparatoire (ES 101) Demander la grâce à Dieu notre Seigneur, pour que toutes mes intentions, mes actions et mes opérations soient purement ordonnées au service et à la louange de sa divine Majesté. • Premier préambule (ES 102) Me rappeler l’histoire de ce que j’ai à contempler. Ici, ce sont les trois Personnes divines regardant toute la surface ou la sphère de l’univers, remplie d’hommes. Et les voyant tous qui descendent en enfer, elles décident dans leur éternité que la seconde Personne se ferait homme pour sauver le genre humain. Les temps étant donc

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arrivés à leur plénitude, elles envoient l’ange saint Gabriel à Notre Dame (Lc 1, 26-38 ; ES 262, p. 85). • Deuxième préambule (ES 103) Composition : voir le lieu. Ici, voir l’immensité et la sphère du monde, où vivent des peuples si nombreux et si divers. Puis voir aussi en particulier la maison et l’appartement de Notre Dame, dans la ville de Nazareth, dans la province de Galilée. • Troisième préambule (ES 104) Demander ce que je veux. Ici, demander une connaissance intérieure du Seigneur, qui pour moi s’est fait homme, afin que je l’aime et le suive davantage. • Premier point (ES 106) Voir les personnages les uns après les autres. Ceux qui sont sur la face de la terre, dans toute leur variété de costumes et d’attitudes : les uns blancs, les autres noirs ; les uns en paix, les autres en guerre ; les uns dans les larmes, les autres dans les rires ; les uns bien portants, les autres malades ; les uns qui naissent, les autres qui meurent, etc. ➋ Voir et considérer les trois Personnes divines, comme sur leur siège royal ou sur le trône de la divine Majesté ; elles regardent toute la surface de la terre, et tous les peuples dans un si grand aveuglement, qui meurent et descendent en enfer. ➌ Voir Notre Dame et l’ange qui la salue. Et réfléchir afin de tirer profit de ce que l’on voit. • Deuxième point (ES 107) Entendre ce que disent… les personnages sur la face de la terre : comment ils conversent entre eux, comment ils jurent et blasphèment, etc. ➋ De même, ce que disent les Personnes divines : « Faisons la rédemption du genre humain », etc. ➌ Puis ce que disent l’ange et Notre Dame.

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« INCARNATION ET VIE CACHÉE »

Et réfléchir ensuite afin de tirer profit de leurs paroles. • Troisième point (ES 108) Ensuite, regarder ce que font… les personnages sur la face de la terre : ils frappent, ils tuent, ils vont en enfer, etc. ➋ De même, ce que font les Personnes divines : elles opèrent la très sainte Incarnation, etc. ➌ De même, ce que font l’ange et Notre Dame : l’ange accomplissant son rôle de messager, et Notre Dame s’humiliant et rendant grâce à la divine Majesté. Et réfléchir ensuite afin de tirer quelque profit de chacun de ces faits. • Colloque (ES 109) À la fin, faire un colloque, en pensant à ce que je dois dire aux trois Personnes divines, ou au Verbe éternel incarné, ou à la Mère, Notre Dame. Demander selon ce que l’on sentira en soi, afin de mieux suivre et imiter notre Seigneur nouvellement incarné. Dire un Notre Père. • SECONDE

CONTEMPLATION

– LA NATIVITÉ (ES 110-117)

• Prière préparatoire Demander la grâce à Dieu notre Seigneur, pour que toutes mes intentions, mes actions et mes opérations soient purement ordonnées au service et à la louange de sa divine Majesté. • Premier préambule (ES 111) L’histoire. Ici, le départ de Nazareth : Notre Dame, enceinte de presque neuf mois, assise sur une ânesse, comme on peut le méditer pieusement, et Joseph et une servante menant un bœuf. Ils partent pour Bethléem, afin de payer le tribut que César a imposé à toutes ces contrées (ES 264, p. 86).

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• Deuxième préambule (ES 112) Composition : voir le lieu. Ici, par le regard de l’imagination, voir le chemin de Nazareth à Bethléem. Considérer sa longueur, sa largeur ; si ce chemin est en plaine ou à travers vallées et collines. Regarder aussi l’emplacement ou la grotte de la Nativité ; si elle était grande ou petite, basse ou élevée ; comment elle était préparée. • Troisième préambule (ES 113) Demander ce que je veux. Ici, demander une connaissance intérieure du Seigneur, qui pour moi s’est fait homme, afin que je l’aime et le suive davantage. • Premier point (ES 114) Voir les personnages. Voir Notre Dame, Joseph, la servante, et l’Enfant Jésus après qu’il est né. Et moi, me faire un petit pauvre et un petit esclave indigne, qui les regarde, les contemple et les sert dans leurs besoins, comme si je me trouvais présent, avec toute la révérence et tout le respect possible. Et réfléchir ensuite en moi-même, afin de tirer quelque profit. • Deuxième point (ES 115) Regarder, observer et contempler ce qu’ils disent. Et, réfléchissant en moi-même, tirer quelque profit. • Troisième point (ES 116) Regarder et considérer ce qu’ils font : leur voyage et leur peine pour que le Seigneur vienne à naître dans une extrême pauvreté. Et au terme de tant de peine, après la faim, la soif, la chaleur et le froid, les injustices et les affronts, il va mourir en croix ; et tout cela pour moi. Puis, réfléchissant, tirer quelque profit spirituel.

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« INCARNATION ET VIE CACHÉE »

• Colloque (ES 117) Terminer par un colloque, comme dans la contemplation précédente, et par un Notre Père. • TROISIÈME

CONTEMPLATION

DEUXIÈME EXERCICES

– RÉPÉTITION

DES PREMIER ET

(ES 118)

Après la prière préparatoire et les trois préambules, on fera la répétition du premier et du second exercice. On notera chaque fois quelques endroits plus importants, où l’on aura senti quelque connaissance, consolation ou désolation. Terminer également par un colloque et un Notre Père. • QUATRIÈME

CONTEMPLATION

LA DEUXIÈME

– RÉPÉTITION

DE LA PREMIÈRE ET DE

(ES 120)

De la même manière que dans la répétition précédente. • CINQUIÈME CONTEMPLATION – APPLICATION DES CINQ SENS (ES 121-126) Sur la première et la deuxième contemplation. ☞ « À partir de la Deuxième Semaine, saint Ignace propose une “application des sens” comme dernier exercice de la journée. Il invite ainsi le retraitant à se laisser toucher, à travers sa sensibilité, jusque dans son corps par le Verbe de vie, rendu visible, audible et palpable à nos sens (1 Jn 1, 1-3). Préparé par les contemplations, leurs reprises et répétitions, le retraitant se laisse informer (pétrir) en tout lui-même par les mystères de la vie du Christ Jésus » (Exercices spirituels, trad. E. Gueydan, p. 219). Pour cette contemplation, choisir un temps paisible, comme un week-end.

Après la prière préparatoire et les trois préambules, il est bon d’exercer les cinq sens de l’imagination sur la première et la seconde contemplation de la façon suivante : • Premier point (ES 122) Par le regard de l’imagination, voir les personnages. Méditer et contempler en détail ce qui les concerne et tirer quelque profit de ce que l’on voit.

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• Deuxième point (ES 123) Par l’oreille, écouter ce qu’ils disent ou peuvent dire. Et, réfléchissant en soi-même, en tirer quelque profit. • Troisième point (ES 124) Par l’odorat et le goût, sentir et goûter l’infinie suavité et douceur de la divinité, de l’âme et de ses vertus, et tout le reste, selon le personnage que l’on contemple. Réfléchir en soi-même et en tirer profit. • Quatrième point (ES 125) Par le tact, toucher : par exemple, embrasser et baiser les lieux où les personnages passent et s’arrêtent, tâchant toujours d’en tirer profit. • Colloque (ES 126) Terminer par un colloque, comme dans la première et la seconde contemplation, et par un Notre Père. • PROPOSITION POUR RELIRE SA JOURNÉE – Ignace nous invite à entrer en relation avec les personnes du mystère contemplé : comment le vivez-vous ? – Dans le déroulement de votre journée, qu’est-ce qui a le même goût que ce que vous avez contemplé dans votre prière ? ☞ Il est vivement conseillé de commencer par les contemplations ignatiennes : elles proposent une manière de faire qui peut être d’une grande aide pour la prière durant cette étape. De même, il est préférable de prendre les textes dans l’ordre, en veillant à faire une ou plusieurs répétitions, et si possible une application des sens, préférant moins de matière que davantage, et prenant en tout cas soin de demeurer longuement sur ce qui nous a plus touchés.

• CONSEILS – On notera que, pendant toute cette Semaine et les suivantes, je dois lire uniquement le mystère de la contemplation que j’ai à

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« INCARNATION ET VIE CACHÉE »

faire immédiatement. Pour le moment, je ne lirai donc aucun mystère que je n’ai pas à voir aujourd’hui ou maintenant, afin que la considération d’un mystère ne trouble pas la considération de l’autre (ES 127). – Dès que je me réveille, me remettre en face de la contemplation que j’ai à faire, dans le désir de mieux connaître le Verbe éternel incarné, afin de mieux le servir et de mieux le suivre (ES 130). – Me remettre en mémoire fréquemment la vie et les mystères du Christ notre Seigneur, à partir de son Incarnation jusqu’à l’endroit ou jusqu’au mystère que je suis en train de contempler (ES 130). – Quand je trouve dans la prière ce qui me nourrit, je ne cherche pas ailleurs. Au contraire, je m’applique à approfondir, goûter et me reposer dans mon Seigneur jusqu’à ce que je sois rassasié. – Une fois terminé l’exercice de prière, je regarde comment s’est passée la contemplation. Si ce fut difficile, je regarde si je puis en voir la cause ; la cause étant connue, je corrige la situation. Si c’est un succès, je rends grâce à Dieu mon Seigneur. Ce qui importe, finalement, c’est d’examiner brièvement ma manière de faire l’exercice afin qu’à l’avenir je puisse aller droit au but plus rapidement. – Se mettre devant une icône ou une image représentant ce que je veux contempler peut être une aide. – En Annexe 13, vous trouverez quelques suggestions pour vivre la contemplation des mystères de la vie du Christ. Voir aussi page 90. • LES

MYSTÈRES DE LA VIE CACHÉE

L’ANNONCIATION DE NOTRE DAME (Lc 1, 26-38) (ES 262) • Premier point L’ange Gabriel, en saluant Notre Dame, lui annonce la conception du Christ notre Seigneur. « L’ange entrant là où était Marie la salua en lui disant : Salut, pleine de grâce, tu concevras en ton sein et tu enfanteras un fils… »

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• Deuxième point L’ange confirme ce qu’il a dit à Notre Dame, en annonçant la conception de saint Jean Baptiste. Il lui dit : « Et voici qu’Élisabeth, ta parente, a conçu un fils dans sa vieillesse. » • Troisième point Notre Dame répondit à l’ange : « Voici la servante du Seigneur ; que tout s’accomplisse en moi selon ta parole. » LA VISITATION DE NOTRE DAME À ÉLISABETH (Lc 1, 39-56) (ES 263) • Premier point Alors que Notre Dame visitait Élisabeth, saint Jean-Baptiste, étant dans le sein de sa mère, perçut la visite que faisait Notre Dame : « Et dès qu’Élisabeth entendit la salutation de Notre Dame, l’enfant se réjouit dans son sein ; et, remplie de l’Esprit Saint, Élisabeth s’exclama d’une voix forte et dit : bénie sois-tu entre les femmes et béni soit le fruit de ton sein ! » • Deuxième point Notre Dame chante le cantique en disant : « Mon âme magnifie le Seigneur ! » • Troisième point « Marie resta avec Élisabeth environ trois mois et s’en retourna ensuite chez elle. » LA NATIVITÉ DU CHRIST NOTRE SEIGNEUR (Lc 2, 1-14) (ES 264) • Premier point Notre Dame et Joseph son époux vont de Nazareth à Bethléem : « Joseph monta de Galilée à Bethléem pour obéir à César, avec Marie, sa femme et épouse, déjà enceinte. » • Deuxième point « Elle enfanta son Fils premier-né, l’enveloppa de langes et le plaça dans la crèche. » • Troisième point « Survint une multitude de l’armée céleste qui disait : Gloire soit à Dieu dans les cieux ! »

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LES BERGERS (Lc 2, 8-20) (ES 265) • Premier point La Nativité du Christ notre Seigneur est annoncée aux bergers par l’ange : « Je vous annonce une grande joie, car aujourd’hui est né le Sauveur du monde. » • Deuxième point Les bergers vont à Bethléem : « Ils vinrent en grande hâte et trouvèrent Marie, Joseph et l’Enfant placé dans la crèche. » • Troisième point « Les bergers s’en retournèrent, glorifiant et louant le Seigneur. » LA CIRCONCISION (Lc 2, 21) (ES 266) • Premier point On circoncit l’Enfant Jésus. • Deuxième point « Son nom est celui de Jésus, nom qui fut prononcé par l’ange avant qu’il ne fût conçu dans le sein. » • Troisième point On rend l’enfant à sa mère, qui avait compassion du sang qui coulait de son Fils. LES TROIS ROIS MAGES (Mt 2, 1-12) (ES 267) • Premier point Les trois rois mages, se guidant d’après l’étoile, vinrent pour adorer Jésus, et dirent : « Nous avons vu son étoile en Orient et nous sommes venus l’adorer. » • Deuxième point Ils l’adorèrent et lui offrirent des présents : « Se prosternant à terre, ils l’adorèrent et lui offrirent des présents, de l’or, de l’encens et de la myrrhe. » • Troisième point « Pendant qu’ils dormaient, ils reçurent l’avertissement de ne pas retourner chez Hérode, et c’est par un autre chemin qu’ils retournèrent dans leur pays. »

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PURIFICATION DE NOTRE DAME ET PRÉSENTATION DE L’ENFANT JÉSUS (Lc 2, 22-39) (ES 268) • Premier point Ils amènent l’Enfant Jésus au Temple pour qu’il soit présenté, comme premier-né, au Seigneur et ils offrent pour lui « un couple de tourterelles ou deux jeunes colombes ». • Deuxième point Syméon, venant au Temple, « le prit dans ses bras » en disant : « Maintenant, Seigneur, laisse ton serviteur s’en aller en paix. » • Troisième point Anne, « venant ensuite, confessait le Seigneur et parlait de lui à tous ceux qui attendaient la rédemption d’Israël ». LA FUITE EN ÉGYPTE (Mt 2, 13-18) (ES 269) • Premier point Hérode voulait tuer l’Enfant Jésus, et c’est ainsi qu’il tua les Innocents. Avant la mort de ceux-ci, l’ange enjoignit à Joseph de fuir en Égypte : « Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte. » • Deuxième point Il partit pour l’Égypte : « Lui, se levant pendant la nuit, partit pour l’Égypte. » • Troisième point Il demeura là-bas jusqu’à la mort d’Hérode. COMMENT LE CHRIST NOTRE SEIGNEUR REVINT D’ÉGYPTE (Mt 2, 19-23) (ES 270) • Premier point L’ange enjoint à Joseph de revenir en Israël : « Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, et va en terre d’Israël. » • Deuxième point Se levant, ils vinrent en terre d’Israël. • Troisième point Parce qu’Archelaüs, fils d’Hérode, régnait en Judée, il se retira à Nazareth.

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« INCARNATION ET VIE CACHÉE »

LA VIE DU CHRIST NOTRE SEIGNEUR DE L’ÂGE DE 12 À 30 ANS (Lc 2, 51-52) (ES 271) • Premier point Il était obéissant à ses parents. « Il progressait en sagesse, en âge et en grâce. » • Deuxième point Il semble qu’il exerçait le métier de charpentier, comme paraît l’indiquer saint Marc au chapitre 6 : « Par hasard, n’est-ce pas lui, ce charpentier ? » LA VENUE DU CHRIST AU TEMPLE QUAND IL ÉTAIT ÂGÉ DE 12 ANS (Lc 2, 41-50) (ES 272) • Premier point Le Christ notre Seigneur, à l’âge de douze ans, monta de Nazareth à Jérusalem. • Deuxième point Le Christ notre Seigneur resta à Jérusalem, et les gens de sa parenté ne le surent pas. • Troisième point Au bout de trois jours, ils le trouvèrent, discutant dans le Temple, assis au milieu des docteurs ; ses parents lui ayant demandé où il avait été, il répondit : « Ne savez-vous pas qu’il me convient d’être aux choses de mon Père ? »

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Pour aider à vivre la contemplation évangélique dans la vie quotidienne

Comment s’obtient le fruit de la contemplation des « mystères » de la vie du Christ dans le tissu et le poids de la vie quotidienne ?

Par la répétition Dans tous les gestes, les paroles, les actes du Christ que nous contemplons, Dieu nous révèle la manière dont il nous aime et nous sauve dans notre vie. Peu à peu la personne qui contemple, reconnaît la scène comme le lieu où elle-même est engagée. Saint Ignace invite à « répéter » ces contemplations. Durant sa journée et son travail, la personne en garde le souvenir. Ce souvenir éclaire, nourrit, approfondit sa vie quotidienne. Une lumière, un attrait peuvent l’habiter. En revenant à cette contemplation les jours suivants, la vie quotidienne s’insère dans sa prière. La répétition est vécue à partir du point où elle en est dans sa vie quotidienne. Le réel vécu s’introduit dans la contemplation qui est modifiée par le concret de la vie où elle est insérée. De répétition en répétition, la vie quotidienne commence à s’éclairer de manière peut-être inattendue grâce à cette contemplation reprise. Dans la situation concrète à vivre, c’est aujourd’hui le même appel du Christ qui joue, la même réponse de foi, la même al-

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POUR AIDER À VIVRE LA CONTEMPLATION ÉVANGÉLIQUE DANS LA VIE QUOTIDIENNE

ternance de résistance et d’amour, le même choix pour Dieu et son royaume. La personne qui « fait » les Exercices est de plus en plus renvoyée à son histoire présente à partir de la contemplation de l’Évangile.

Et par un discernement qui s’opère « À mesure que la personne, contemplant le Christ dans l’Évangile se trouve davantage renvoyée à sa propre histoire, un lien très fort s’établit entre les motions, les mouvements nés de sa contemplation (attraits, joie, désir de conversion, résistances…) et l’orientation de sa vie » (cf. M. GIULIANI, op. cit., p. 117). Peu à peu, le temps de la contemplation et le temps de la vie se rejoignent, se confirment mutuellement. En découvrant la lumière qui lui est donnée dans le Christ et l’Évangile, et qui la fortifie, la personne reconnaît comment elle est invitée à vivre sa vie quotidienne — et l’épreuve ou la blessure qui est peut-être présente — dans la paix et la confiance. En puisant dans la contemplation une force nouvelle, elle pourra apprendre à demeurer paisible au sein de cette épreuve ou cette blessure acceptée dans la foi ou l’amour. « C’est ainsi qu’un discernement s’opère. Là où la contemplation de l’Évangile aide à augmenter la foi à travers le quotidien de l’existence, là où s’affirme une plus solide unité entre ces deux moments spirituels que sont la contemplation de l’Évangile et l’accueil de la vie concrète, la personne peut reconnaître qu’elle avance selon l’Esprit. Là, au contraire, où il y aurait discordance, et surtout discordance prolongée, entre la joie de la contemplation et une tristesse devant le réel de chaque jour, il lui faudrait s’interroger de nouveau sur la façon dont elle se livre à une contemplation qui ne porterait pas ses fruits » (cf. M. GIULIANI, op. cit., p. 118) ou sur la manière dont elle est appelée à vivre sa vie quotidienne avec ses épreuves et ses blessures. C’est ainsi que les Exercices dans la vie éduquent le retraitant à éclairer sa vie à la lumière de la contemplation et à éprouver « une sorte d’adhésion globale à l’existence qu’il lui est donné de vivre, fût-ce à travers des épreuves ou des

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blessures qui ne disparaissent pas. Un « goût » intérieur, une joie simple qui pacifie, un amour livré aux autres dont Dieu est la source peuvent habiter la vie et l’activité quotidiennes que la contemplation du Christ et de l’Évangile éclaire de l’intérieur. » Cette unification progressive entre la contemplation de l’Évangile et l’accueil de la vie concrète prend du temps et appelle un discernement difficile et délicat. En vue d’aider au discernement des motions que ces contemplations suscitent, saint Ignace introduit deux exercices clés, les « Deux Étendards » et les « Trois Hommes », qui éclairent le retraitant sur le chemin que prend le Christ, serviteur pauvre et humble, ainsi que sur le chemin illusoire que propose « l’ennemi ». (Texte inspiré du père M. GIULIANI, op. cit., ch. 12, « La contemplation évangélique »)

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Pour aider la méditation des « Deux Étendards »

Où en sommes-nous dans notre démarche des Exercices ? Il est bon de commencer par nous souvenir de l’ensemble du chemin parcouru depuis le début de la démarche accomplie avec son enchaînement, son dynamisme spirituel. Nous avons d’abord pris le temps de retrouver le sens profond de notre vie, à la lumière du « Principe et Fondement » et de reconnaître ainsi la beauté et la bonté du dessein d’amour de Dieu sur notre monde et sur chacune de nos vies. Et nous avons perçu dans cette lumière l’importance de nous « rendre indifférents », pleinement disponibles, afin de pouvoir mieux reconnaître ce dessein de Dieu sur notre vie : « Désirer et choisir uniquement ce qui nous conduit davantage à la fin pour laquelle nous sommes créés. » Puis nous avons constaté le décalage, la distance existant entre ce projet d’amour de Dieu et notre réalité concrète, celle du monde et la nôtre à chacun. Et nous sommes descendus dans cette faille, ce monde du péché dont nous sommes solidaires, parce que nousmêmes aussi pécheurs, résistant à ce dessein d’amour. Plongés et enfermés dans notre misère, nous avons peu à peu découvert avec étonnement et admiration que le Seigneur Jésus venait nous rejoindre dans la profondeur de notre péché et de nos fautes pour nous dire la miséricorde du Père et son amour fidèle qui nous pardonne et nous invite à nous confier totalement en sa miséricorde. C’était notre demande de Première Semaine.

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Ensuite, saint Ignace nous a invités à faire la méditation du Règne, l’appel du Christ. Non seulement le Christ nous révèle la miséricorde du Père, mais il nous appelle, nous invite à collaborer avec Lui à son Règne, à sa mission de rassembler les hommes dispersés par le péché pour les conduire au Père. Et nous nous sommes offerts à Lui, pour être et travailler avec Lui, comme Lui, dans son amitié, jusqu’à Lui devenir semblables, l’imiter, l’accompagner sur son chemin de serviteur pauvre et humble, humilié aussi. Nous avons pressenti le sérieux de cette démarche d’offrande qui nous engage dans une remise inconditionnelle de notre liberté. Peut-être avons-nous éprouvé des résistances et des peurs (où cela va-t-il me mener ?), mais l’essentiel est de s’offrir dans la confiance du cœur à Celui qui m’a aimé et s’est livré pour moi, m’a rejoint dans ma misère et sauvé. Tout mon désir est d’entrer dans son amitié, son intimité et de m’offrir pour collaborer ainsi à son œuvre. Mais pour cela, il faut apprendre à le connaître vraiment. C’est l’entrée en Deuxième Semaine. Nous y demandons « la grâce d’une connaissance intérieure du Christ notre Seigneur, qui pour moi s’est fait homme, afin que je l’aime et le suive davantage ». Toute cette Deuxième Semaine consiste en une longue contemplation de la vie du Christ qui conforme peu à peu notre vie, notre cœur, notre esprit à sa manière d’être et de vivre. Pendant ces dernières semaines, nous l’avons contemplé dans sa vie cachée. Et nous avons perçu combien le Christ venant dans ce monde prend d’emblée, non pas un chemin de richesse et de gloire, mais celui d’un petit enfant pauvre, né de Marie, dans une existence humaine banale, le fils du charpentier de ce village méprisé de Nazareth. Nous nous sommes laissés toucher par la simplicité, la beauté, la vérité humaine et divine de cette vie de Nazareth. Mais nous avons vu aussi qu’à douze ans il demeure au temple, car pour lui l’essentiel est d’être aux affaires du Père, d’accomplir le dessein d’amour du Père. C’est à ce point que nous en sommes maintenant sur notre route des Exercices. À ce moment, Ignace nous invite à faire une pause. Tout comme Jésus manifeste au temple que l’essentiel pour lui est d’accomplir la volonté de son Père, ainsi aussi nous faisons

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POUR AIDER LA MÉDITATION DES « DEUX ÉTENDARDS »

les Exercices pour mieux discerner le dessein d’amour du Père sur notre vie. Ignace évoque d’abord le choix d’un état de vie, mais aussi — et c’est souvent notre situation — il nous invite à reconnaître comment le Christ m’appelle dans mon état de vie, en ce moment bien concret de mon existence, à l’aimer et le suivre, à être davantage conformé à lui. C’est ce qu’Ignace appelle l’élection. Nous y reviendrons. Et il est important que chacun en parle avec la personne qui l’accompagne. C’est en laissant éclairer ma vie par la sienne, grâce à la contemplation des mystères de sa vie, que je sentirai et comprendrai peu à peu comment Il m’invite maintenant à ordonner ma vie selon son appel. Sans trop nous en préoccuper pour l’instant, continuons notre démarche. Avant d’entrer dans les contemplations de la vie publique et le travail de l’élection, saint Ignace veut éveiller notre lucidité spirituelle en nous proposant deux méditations : l’une pour éclairer notre intelligence, qu’il intitule « Les Deux Étendards », et l’autre qui vérifie si notre volonté est bien libre, pleinement disponible, « Les Trois Hommes ». Certes, depuis le Règne, nous nous sommes décidés à suivre le Christ, et déjà nous le suivons dans les contemplations de la vie cachée. Mais nous pouvons encore nous illusionner dans notre manière de le suivre et nous laisser subtilement récupérer par « l’ennemi mortel de la nature humaine » comme l’appelle Ignace dans la méditation des « Deux Étendards ». Cette méditation veut nous rendre plus lucides sur les deux chemins, deux logiques, deux voies, deux « étendards » qui existent dans le monde et en moi, dans mon désir. Car les désirs, les impulsions, les mouvements intérieurs qui m’habitent sont ambigus encore. Certes, il y a en moi le désir de suivre le Christ, mais il y a aussi une résistance psychologique et spirituelle à cette nouvelle manière d’être et de vivre sur le chemin du Christ pauvre et humble. Il y a en moi une attirance vers un autre chemin, un autre étendard, à l’opposé de cette vie que j’ai découverte dans la contemplation de la vie cachée du Christ à laquelle je commence à être enfanté.

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Parcourons le texte d’Ignace (cf. p. 101). Le vocabulaire et les images utilisées peuvent laisser mal à l’aise un esprit moderne. Ignace utilise des symboles de l’Écriture et des images de sa culture. Allons à l’essentiel, au-delà du vocabulaire. N’entrons pas dans des discussions à propos du type d’existence personnelle de celui qu’Ignace appelle Lucifer, l’ennemi. Pour Jésus l’existence de l’adversaire est évidente. Et de toute manière le mal existe, il se propage, il s’insinue partout, fait de terribles ravages.

Analyse de la méditation des « Deux Étendards » L’HISTOIRE. C’est l’histoire du donné de foi qu’est le grand combat du Christ et de l’Adversaire qui se joue dans le devenir de l’humanité. Les deux cités de St Augustin. La lumière et les ténèbres, la vie et la mort dans St Jean. L’ampleur du combat, c’est le monde et l’histoire. Personne n’y échappe, ni moi non plus. LE LIEU. Jérusalem, Babylone. Ne fuyons pas dans l’imaginaire, le rêve. Ces lieux ne sont pas extérieurs à nous, ils sont en chacun de nous. Ce combat sévit maintenant, dans le présent de celui qui fait les Exercices. Je suis traversé par ces deux champs de force opposés. C’est de moi qu’il s’agit, situé dans ce grand combat qui traverse aussi mon propre cœur, mes propres désirs. Je suis invité à trouver le lieu réel du combat qui est le mien aujourd’hui. Car je suis engagé, à la suite du Christ, et donc dans un conflit que je dois reconnaître lucidement. L’ENJEU DU COMBAT. La grâce de discernement. Connaître les tromperies de l’adversaire et la grâce de me garder de ses pièges. Et connaître la vraie vie qu’enseigne le Christ, ainsi que la grâce pour l’imiter. Que je puisse lui faire confiance jusqu’à l’imiter. J’ai déjà choisi de le suivre, mais à l’intérieur de ce choix, je peux me laisser piéger, tromper. Mon choix doit encore mûrir.

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POUR AIDER LA MÉDITATION DES « DEUX ÉTENDARDS »

Les pièges de l’ennemi [première partie] Le premier point nous révèle le vrai visage de cette séduction. Pris dans ses filets, j’entre dans un monde de discours fumeux, fausses vérités, justifications, mensonge, corruption, haine, violence, injustice, écrasement de l’autre. La belle apparence cache un monde perverti. Voilà le vrai visage de l’adversaire. Le deuxième point nous rappelle que l’adversaire s’insinue partout. Personne n’y échappe. Le mal se propage, contagieux, radioactif. Séduction, ambiance, air respiré. Prenons le temps de peser le poids de ce milieu qui si facilement nous imprègne. Quant au troisième point, le chemin proposé par l’ennemi est spontanément attirant. À regarder autour de nous, la recherche de la richesse et des honneurs, de la renommée, est universelle. Elle imprègne notre vie sociale et culturelle. Et moi-même, dans ma logique humaine, j’adopte spontanément une dynamique d’avoir (biens matériels, intellectuels, culturels assurant sécurité, confort, etc.), de valoir (être reconnu, estimé, respecté, admiré…) et de pouvoir (autosuffisance, domination). Ce qui est subtil, c’est qu’il s’agit de trois dimensions de tout être humain, bonnes en soi. On ne peut pas vivre sans posséder, et il est normal d’être reconnu, estimé. Mais ces réalités sont blessées et l’ennemi les récupère en suscitant la convoitise, le besoin quasi compulsif des richesses, des honneurs… J’y tiens, je m’y attache, j’y ai droit… Et me voilà récupéré sous l’apparence du bien, avec de bonnes raisons pour me justifier. Et cela est vécu dans le réel quotidien de mon existence, alors que je m’en aperçois à peine. Attirance subtile et trompeuse qui nous prend dans ses filets.

L’étendard ou le chemin du Christ [deuxième partie] Dans le premier point, en contraste avec Lucifer, le Christ se manifeste en « un lieu humble, beau et gracieux ». On respire l’air de l’Évangile et de la vie cachée que l’on vient de contempler, et qui rejoint et attire le meilleur de nous-mêmes.

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Le second point ainsi que le début du troisième font pressentir la manière d’agir du Christ, qui lui aussi rejoint chaque personne à travers ses disciples. Tout est vécu dans le respect des libertés et l’amitié, à l’encontre de l’ennemi. Et cela en cherchant à aider sans jamais s’imposer de force. Mais le discours du Christ dans le troisième point d’Ignace peut nous sembler par contre plus rebutant ou menaçant. Quelque chose y résiste en nous et nous fait peur. Car il semble aller à l’opposé de ce vers quoi nous poussent les tendances spontanées de notre être. Estce un chemin de liberté que de renoncer à avoir pour être pauvre ? À accepter de ne pas être reconnu par autrui, rejeté ? Renoncer à moimême pour me recevoir d’un autre ? Et pourtant il ne s’agit pas d’un piège. Mais c’est le chemin que le Christ propose pour que je devienne vraiment libre. Il semble me ravir ma liberté. Au contraire, je découvre qu’il me libère de mes rêves faux, mes ambitions, mes illusions sur moi-même. Car facilement je me complais dans une fausse image de moi. Jésus m’apprend à renoncer aux images trompeuses de moi-même, à prendre distance d’avec mes rêves, mes projets sur moi-même. À la lumière du Christ Jésus pauvre et humble, parfois humilié, sur qui je fixe amoureusement le regard, je comprends que ce chemin opposé au désir spontané m’est proposé pour « m’aider » en me libérant des chaînes et illusions d’avoir et de valoir, liées à une image de moi à laquelle je tiens et je m’accroche. Grâce à cette lumière aimante, j’entre peu à peu dans une attitude qui me conforme au Christ et en même temps à mon vrai moi d’enfant du Père. J’accepte cette invitation du Christ et j’expérimente peu à peu que c’est là que je suis donné à moi-même (à travers des mouvements intérieurs en sens divers, des résistances du vieil homme). Je reconnais peu à peu ce qui me libère, me repose, me pacifie ; et aussi ce qui m’emprisonne, me paralyse, m’attriste. Ainsi commence aussi à mûrir le chemin de l’élection. Car dans cette lucidité, je constate que ma vie peut s’unifier selon deux logiques, deux chemins, deux « étendards » opposés. Et qu’il y a en moi-même encore une distance qui me sépare du chemin du Christ, malgré mon désir de le suivre. Car il y a une am-

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POUR AIDER LA MÉDITATION DES « DEUX ÉTENDARDS »

biguïté dans mon désir et dans mes choix, mes options, mes décisions grandes ou quotidiennes. Cependant, j’éprouve le désir d’édifier ma vie de cette manière révélée par Jésus et son Évangile. Mais je me sens faible, incapable par mes propres forces, et facilement trompé par l’adversaire qui profite de mon désir de me réaliser. Je suis encore divisé. Les colloques. D’où la nécessité de demander la grâce de recevoir cette vie nouvelle. Nous en arrivons ainsi aux colloques, le point le plus important de cette méditation. Dans la contemplation du Règne, j’ai fait l’offrande généreuse de moi-même. Maintenant je vois mieux mon cœur encore divisé et je demande humblement au Père d’être reçu dans ce chemin humble et pauvre du Christ, sous son étendard, par la médiation de Notre Dame et du Christ lui-même. Ce triple colloque éveille en nous une attitude foncièrement humble et priante. Ignace demande de le reprendre à chaque oraison pendant tout le temps des contemplations de la vie publique qui est aussi le temps où mûrit l’élection. Cela entretient celui qui fait les Exercices dans cette attitude fondamentale demandée comme une grâce à recevoir. C’est ainsi que l’élection peut mûrir en vérité, comme reçue du Christ et me laissant choisir par lui. Mais comprenons bien ce qui est demandé dans ces colloques. Je ne demande pas d’être pauvre et encore moins d’être humilié. Je demande une grâce : être reçu à la suite du Christ sur son chemin, sous son étendard. Ce chemin, j’ai commencé à le reconnaître et à le goûter dans les contemplations de la vie cachée. Je suis entré dans son amitié, sa familiarité. Et puisque le Christ a pris ce chemin de pauvreté et d’humilité, parfois jusqu’à l’humiliation, je demande à Notre Dame et au Christ de m’obtenir cette grâce du Père. Qu’Il m’associe, selon la manière qu’il sait être bonne pour moi, à la pauvreté et l’humiliation de Jésus. Je n’ai pas à imaginer quoi que ce soit comme pauvreté ni humiliation. Celles qui m’arrivent réellement sont d’ailleurs habituellement autres que celles que j’imagine. J’ai simplement à m’en remettre à la bonté et la tendresse du Père, de Jésus. Tout leur désir est de me faire vivre, selon mon vrai moi d’enfant du Père qui se reçoit de Lui dans la confiance.

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Ces colloques, Ignace demande de les faire, à partir de maintenant, après chaque contemplation de la vie publique du Christ que nous allons poursuivre. C’est ce chemin que nous sommes invités à prendre, en découvrant petit à petit ce que cela veut dire pour moi, dans ma vie concrète, tel que je suis. Ainsi mûrit aussi peu à peu mon élection. Note : L’Annexe 15, sur le discernement des esprits, analyse la manière dont l’esprit de l’ennemi et le bon esprit, l’Esprit du Christ, agissent dans le déroulement de nos pensées, et comment les discerner.

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Méditation des « Deux Étendards »

• DURÉE DE L’ÉTAPE (« DEUX ÉTENDARDS » ET « TROIS HOMMES ») Une semaine environ (à voir avec la personne qui accompagne) • MÉDITATION DES « DEUX ÉTENDARDS » (ES 136-147) L’un celui du Christ, notre souverain capitaine et Seigneur ; l’autre, celui de Lucifer, mortel ennemi de notre nature humaine. • Prière (ES 136) La prière préparatoire habituelle. • Premier préambule (ES 137) L’histoire. Ici, le Christ qui appelle et qui veut tous les hommes sous son étendard, et Lucifer, au contraire, sous le sien. • Deuxième préambule (ES 138) Composition : voir le lieu. Ici, voir un vaste camp dans toute la région de Jérusalem, où le souverain capitaine général des bons est le Christ notre Seigneur. Un autre camp dans la région de Babylone, où le chef des ennemis est Lucifer. • Troisième préambule (ES 139) Demander ce que je veux. Ici, demander la connaissance des tromperies du mauvais chef et le secours pour m’en garder, ainsi que

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la connaissance de la vraie vie qu’enseigne le souverain et vrai capitaine, et la grâce pour l’imiter. [Première partie] • Premier point (ES 140) Imaginer le chef de tous les ennemis, dans ce vaste camp de Babylone, comme assis dans une sorte de grande chaire de feu et de fumée, avec un aspect horrible et terrifiant. • Deuxième point (ES 141) Considérer comment il procède à l’appel de démons innombrables, et comment il les répand, les uns dans une ville, les autres dans une autre ; et cela à travers le monde entier, sans omettre une province, une contrée, un état de vie ou une personne en particulier. • Troisième point (ES 142) Considérer le discours qu’il leur tient et comment il leur enjoint de jeter leurs filets et leurs chaînes : ils doivent tenter d’abord par la convoitise des richesses, comme c’est le cas le plus fréquent, afin qu’on en vienne plus facilement au vain honneur du monde et enfin à un orgueil immense. De la sorte, le premier échelon est la richesse, le second l’honneur et le troisième l’orgueil. Et par ces trois échelons, il amène à tous les autres vices. [Seconde partie] (ES 143) C’est tout à l’opposé qu’il faut imaginer le souverain et vrai capitaine, le Christ notre Seigneur. • Premier point (ES 144) Considérer comment le Christ notre Seigneur se tient en un vaste camp dans la région de Jérusalem, en humble place, beau et gracieux. • Deuxième point (ES 145) Considérer comment le Seigneur du monde entier choisit tous ces hommes : apôtres, disciples, etc., et les envoie par le monde en-

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MÉDITATION DES « DEUX ÉTENDARDS… »

tier répandre sa doctrine sacrée parmi les hommes de tout état et de toute condition. • Troisième point (ES 146) Considérer le discours que le Christ notre Seigneur tient à tous ses serviteurs et à tous ses amis qu’il envoie à cette expédition. Il leur recommande de chercher à aider tous les hommes, en les entraînant, premièrement à la suprême pauvreté spirituelle, et non moins à la pauvreté effective si la divine Majesté doit en être servie et veut bien les choisir ; secondement, au désir des humiliations et des mépris, car de ces deux choses résulte l’humilité. De la sorte, il y a trois échelons : le premier est la pauvreté opposée à la richesse, le second les humiliations ou les mépris opposés à l’honneur mondain, le troisième l’humilité opposée à l’orgueil. Et, par ces trois échelons, ils doivent amener à toutes les autres vertus. • Triple colloque (ES 147) À Notre Dame, afin qu’elle m’obtienne de son Fils et Seigneur la grâce d’être reçu sous son étendard : – Dans la suprême pauvreté spirituelle, et non moins dans la pauvreté effective si sa divine Majesté doit en être servie et veut bien me choisir et me recevoir. – En endurant humiliations et injustices, afin de l’imiter par là davantage, pourvu que je puisse les endurer sans qu’il y ait péché de personne ni déplaisir de sa divine Majesté. Ensuite, un Ave Maria. ➋ Demander la même chose au Fils, afin qu’il me l’obtienne du Père. Ensuite dire l’Âme du Christ. ➌ Demander la même chose au Père, afin qu’il me l’accorde. Dire un Notre Père. ☞ Ce triple colloque sera à reprendre après chaque temps de contemplation tout au long de la Deuxième Semaine. La méditation des « Deux Étendards » veut éveiller chez le retraitant une lucidité spirituelle. Qu’il se rende compte des enjeux impliqués dans

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les choix de vie qu’il sera amené à faire par son élection. Cependant, même si son intelligence est convaincue de cette opposition des deux voies, sa liberté est-elle prête à une adhésion qui engage l’orientation de sa vie dans des options à la suite du Christ pauvre et humble ? L’exercice suivant des « Trois Hommes » veut aider le retraitant à vérifier cela. Il est bon de le faire au moins deux fois pendant cette étape.

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Pour aider la méditation des « Trois Hommes »

Le titre Trois hommes est une traduction de l’expression espagnole tres binarios, qui vient du latin binarius. Dans les « cas de morale » de l’époque, ce vocable désignait un homme quelconque. « Pour embrasser ce qui est meilleur » : le but de l’exercice est de préparer le retraitant à choisir le meilleur. Ce meilleur est précisé dans le troisième préambule où il demande « la grâce de choisir ce qui est davantage ordonné à la gloire de Dieu et au salut de son âme ».

Premier préambule C’est « l’histoire ». Elle introduit les « Trois Hommes » comme dans les cas de morale de l’époque. Cette histoire doit permettre au retraitant de mieux cerner sa situation spirituelle. En priant les « Étendards », il a demandé la grâce d’être reçu dans la suprême pauvreté spirituelle et non moins dans la pauvreté effective. Il est appelé par cette nouvelle méditation à se libérer de toute affection désordonnée, et on donne l’exemple de l’argent, pour que son choix de suivre le Christ soit vraiment reçu de Dieu.

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Ces hommes ont acquis légitimement dix mille ducats (une fortune). Dans cette acquisition, il n’y a pas de faute morale à leur reprocher : ni vol ni fraude. Mais leur travail pour acquérir cet argent n’était pas purement ordonné, c’est-à-dire voulu pour l’amour de Dieu. Disons qu’ils ont voulu acquérir cet argent pour s’enrichir et non pour mieux aimer et servir Dieu notre Seigneur. Ces hommes sont de vrais chrétiens. Ils veulent se sauver c’està-dire ne pas s’écarter de la volonté divine ; bien plus, ils veulent trouver dans la paix Dieu notre Seigneur, c’est-à-dire s’accorder pleinement à sa volonté. Pour cela ils veulent écarter d’eux le fardeau et l’obstacle qui est leur affection pour l’argent qu’ils ont acquis. Voici ce que dit le père Rahner à leur propos : « Les hommes de la parabole veulent trouver Dieu de la manière la plus totale qui soit (c’est-à-dire en toutes choses). Ils ne peuvent se contenter d’être en règle avec la morale. Tout doit être intégré dans le mouvement de l’amour pur qui suppose l’esprit de pauvreté dont parle saint Ignace dans les “Étendards”… Aussi longtemps que, dans la vie d’un homme, il y a encore des choses qui ne sont pas totalement pénétrées de l’amour de Dieu (c’est Lui qui nous les donne), il est impossible de trouver Dieu en toutes choses. » Tous les hommes de la parabole sont désireux de parvenir à ce pur amour de Dieu et sont d’avis qu’il faut écarter l’obstacle concret, l’attachement désordonné, élément inassimilable dans une vie qui se veut toute à Dieu. Mais ils ne voient pas comment triompher de cet obstacle.

Deuxième préambule Une composition en se représentant le lieu. Le retraitant se mettra devant Dieu notre Seigneur et tous ses saints. On se souvient que c’est la même attitude qui lui fut proposée pour faire son offrande en réponse à l’appel du Christ. Il se met donc en présence de Dieu et de la cour céleste « pour désirer et demander ce qui serait plus agréable à sa divine bonté ».

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POUR AIDER LA MÉDITATION DES TROIS HOMMES

Troisième préambule La grâce demandée ne fait que préciser l’orientation donnée dans le deuxième préambule : choisir ce qui est davantage ordonné à la gloire de sa divine Majesté et au salut de mon âme. Il faut bien voir qu’il ne s’agit pas encore d’un choix concret mais de « l’attitude religieuse correcte qui doit le prévenir. C’est l’attitude de celui qui, d’une manière absolument nette, se remet à la volonté souveraine de Dieu » (Rahner). La réflexion de Rahner est importante. Il n’est pas encore demandé au retraitant de faire un choix concret pour une vie plus authentiquement évangélique, la vraie vie qu’enseigne le Christ, mais d’adopter une attitude spirituelle qui le rendra possible. Ce qui revient à dire que le retraitant doit se mettre dans l’attitude d’indifférence proposée dans les Exercices dès le « Fondement ». À cette condition le retraitant se laissera conduire par Dieu là où et comme il le voudra pour un meilleur service dans le Royaume. Par cette méditation, le retraitant sera amené à vérifier si, au fond de son cœur, il est prêt à faire librement le don total de lui-même. Estil prêt à suivre le Christ jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’à la croix ? Est-il disposé à suivre le Christ sans condition et à ne prendre une décision qu’en dépendance du Seigneur, c’est-à-dire en la recevant de Lui ? Celui-là est vraiment disciple du Seigneur qui peut dire : je ne veux que ce que tu veux et comme tu le veux. Ma vie t’appartient.

Le premier homme Il voudrait écarter l’inclination pour la chose acquise et supprimer l’attache. Il voudrait, dans la paix, trouver Dieu notre Seigneur et pouvoir se sauver. Dans le « Fondement », sauver son âme signifie accepter pleinement ce que Dieu désire de sa créature. « Mais il n’en prend pas les moyens. » Il faut comprendre qu’il n’arrive pas à se rendre indifférent pour prendre le moyen de supprimer l’attachement désordonné. Il voudrait bien se détacher, mais

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il ne le veut pas vraiment. Il reporte sans cesse à plus tard l’examen de ce qu’il doit faire pour supprimer l’attache. Ce premier homme est un indécis : il n’arrive pas à prendre une vraie décision. Il est sensible à ce que dit Jésus dans les Béatitudes. Il voit bien qu’il ne vit pas ce programme et il voudrait que les choses changent. L’intelligence est touchée mais la volonté ne bouge pas. Il veut s’y mettre mais il est arrêté dans son bon désir par les soucis quotidiens, la peur de l’avenir, le goût de la facilité. Il vit deux désirs : celui de Dieu et celui du monde mais le désir du monde l’emporte sur le désir de Dieu. Au fond ce qui le retient, c’est la peur du renoncement et c’est pourquoi il est l’homme de l’indécision avec son intention généreuse de se donner à Dieu mais sans vrai désir de passer à l’acte. En considérant l’attitude du premier homme, le retraitant sera amené à se demander s’il est prêt à faire librement le don total de lui-même, à suivre le Christ jusqu’au bout c’est-à-dire jusqu’à la croix. Est-il disposé à aimer le Christ sans condition et à ne prendre une décision qu’en dépendance du Seigneur, ce qui veut dire en la recevant de lui ? Saint Ignace se garde bien de trop expliciter. Au retraitant de découvrir par l’exercice si, en son cœur, il veut vraiment être disciple du Christ.

Le deuxième homme Méditons maintenant ce que dit saint Ignace du deuxième homme. Il veut écarter l’inclination au bien acquis pour être vraiment disciple du Christ. Mais en même temps il veut conserver la chose acquise. Il ne se demande donc pas si Dieu veut qu’il garde ce bien. Il décide de le garder et se met ainsi à la place de Dieu. Il fait en sorte — dit le texte — que Dieu en vienne là où il veut. Il ramène la volonté divine à sa volonté propre. Le texte continue : « … il ne se décide pas à l’abandonner pour aller à Dieu », signe qu’il tient fort à cet argent, alors que ce lâcher-

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POUR AIDER LA MÉDITATION DES TROIS HOMMES

prise serait « le meilleur état pour lui », car ce serait un progrès notable dans l’union au Christ et dans le don de sa liberté. On peut dire que cet homme veut deux choses à la fois : d’une part servir Dieu dans la paix du cœur, ce qui est le but, la fin que doit poursuivre l’être humain (cf. le Fondement) et d’autre part jouir du bien possédé. Il est l’homme du compromis, des demi-mesures. Il veut le but mais veut décider lui-même du moyen. Il ne cherche pas uniquement le Seigneur, ayant peur d’un choix radical. Il fait penser au jeune homme riche de l’évangile qui vient trouver le Christ mais n’est pas prêt à tout vendre pour acquérir le champ où est caché le trésor. Ce jeune homme n’est pas un velléitaire, car il est allé rencontrer le Christ. Mais il n’est pas assez libre pour tout risquer — et donc tout perdre pour le Christ. Il n’a pas été séduit par le Christ. Il n’a pas vu vraiment son visage. Voici ce que dit le père Rahner des personnes qui forment ce deuxième type d’homme. « Ils veulent utiliser le bien acquis à la gloire de Dieu. Avant de demander à Dieu comment il veut être aimé d’eux, ils ont déjà décidé de la voie de leur amour. Ils ne veulent pas trouver Dieu en tout. Ils posent des limites : tout abandonner leur paraît une folie. Ils ne sont pas prêts à tout sacrifier pour Dieu, pour le laisser disposer de leur vie. » Saint Ignace note dans le préambule à l’élection (ES 169) : « Ces gens-là ne vont pas droit à Dieu, mais ils veulent que Dieu vienne droit à leurs affections désordonnées. »

Le troisième homme Cet homme veut évidemment écarter l’inclination et il veut le faire radicalement, c’est-à-dire qu’il veut se tenir devant Dieu n’ayant pas plus envie d’avoir l’argent que de ne pas l’avoir. Peutêtre souhaite-t-il en son for intérieur garder cet argent mais il ne se laisse pas conduire par ses désirs plus ou moins conscients. Il veut être vrai devant Dieu. C’est pourquoi, note saint Ignace, « ce qu’il veut uniquement, c’est vouloir garder ou non (le bien acquis) selon

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ce que Dieu notre Seigneur mettra en sa volonté et ce qui lui semblera meilleur à lui-même pour le service et la louange de sa divine Majesté ». « Mettre en sa volonté ». L’expression peut sembler audacieuse mais saint Ignace est convaincu que Dieu peut agir dans l’âme et mouvoir la volonté du retraitant concernant le bien acquis. Pour écarter l’inclination, cet homme veut se rendre indifférent à l’argent acquis et pour bien demeurer dans l’indifférence, « il veut considérer qu’il renonce à tout, dans son cœur, s’efforçant de ne vouloir ni cette chose ni aucune autre, s’il n’y est pas poussé uniquement par le service de Dieu notre Seigneur ». Agissant ainsi, il s’unifie dans un seul désir, celui de servir Dieu notre Seigneur. On pourrait penser que l’attitude proposée par saint Ignace est le résultat d’un effort ascétique et même volontariste. C’est une erreur. Cette attitude de liberté profonde ne peut naître que de la contemplation du Christ qui va faire grandir en l’âme connaissance intérieure et amour du Seigneur. Alors le chrétien entre vraiment dans l’ordre de l’amour. Jésus a aimé son Père inconditionnellement en acceptant de se dessaisir de sa vie pour accomplir parfaitement sa mission. Ainsi le retraitant est invité en cette étape de la retraite à un abandon total et inconditionnel à son Seigneur. Pour demeurer dans cette attitude, il faut un amour qui bannit la crainte, un amour passionné, capable de tout risquer sur la Parole qu’il lui sera donné d’entendre. Personne ne peut atteindre à un tel abandon en ne s’appuyant que sur sa générosité. Il importe que le retraitant se donne à une prière intense et suppliante, en reprenant à la fin de chaque oraison le triple colloque des « Étendards ». C’est seulement dans la prière que le retraitant pourra accéder à cette liberté intérieure qui le rend totalement disponible à la volonté du Père. Écoutons encore le père Rahner : « Les hommes du troisième type sont réellement libres par rapport à l’abandon ou à la conservation de l’argent. L’amour pour Dieu grandit en eux, une forme

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POUR AIDER LA MÉDITATION DES TROIS HOMMES

d’amour qui est difficile et qui exige qu’on s’y exerce constamment. Laisser Dieu disposer de tout comme il l’entend. » Pour cela l’homme de ce type doit rester vigilant vis-à-vis de tout attachement intérieur. Il demandera à Dieu de lui enlever effectivement certaines choses pour laisser purement son amour disposer de lui. Ici le Royaume de Dieu est réellement proche car Dieu peut communiquer sa volonté particulière à chacun de nous. » Telle est la méditation des « Trois Hommes » qui doit aider le retraitant à accueillir en vérité l’appel du Christ et de son Évangile. Il est vrai que saint Ignace ne propose aucune référence évangélique au cours de cette méditation. Mais bien des paroles du Christ pourraient éclairer la démarche de cet exercice. En voici l’une ou l’autre. « Bienheureux les cœurs purs, ils verront Dieu » (Mt 5, 8). Pour Jésus, un cœur est pur lorsqu’il est simple et sans mélange, et donc quand les mouvements de l’affectivité, quand les motivations et les intentions sont unifiées par le seul désir de faire entièrement la volonté du Père. Tel est le sens de la purification du cœur dont parlent les auteurs spirituels : être acheminé lentement par la grâce de Dieu à n’aimer que Dieu et sa volonté en toute chose (Mt 7, 21). On pourrait aussi citer la parole de Jésus en saint Jean (8, 31-32). Ces textes évangéliques sont forts. Ils parlent au cœur. La méditation de saint Ignace offre une démarche qui aide à ne pas se payer de mots et à vérifier si le désir de suivre le Christ est authentique. En définitive, la question cruciale qui est posée est la suivante : le retraitant est-il assez attaché au Christ (et donc assez détaché de luimême) pour se laisser investir par l’amour de Dieu si bien qu’il se laissera porter au choix que le Seigneur lui fera sentir pour le meilleur service.

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Méditation des « Trois Hommes »

• MÉDITATION DES « TROIS HOMMES » AFIN D’EMBRASSER CE QUI EST MEILLEUR (ES 149-157)

• Prière (ES 149) La prière préparatoire habituelle. • Premier préambule (ES 150) L’histoire. Celle de trois hommes. Chacun d’eux a acquis dix mille ducats, mais non avec pureté et droiture pour l’amour de Dieu. Ils veulent tous les trois se sauver et trouver dans la paix Dieu notre Seigneur, en se débarrassant du fardeau et de l’obstacle qu’est pour cela leur attachement au bien acquis. • Deuxième préambule (ES 151) Composition : voir le lieu. Ici, me voir moi-même, en présence de Dieu notre Seigneur et de tous ses saints, afin de désirer et de reconnaître ce qui peut être davantage agréable à sa divine Bonté. • Troisième préambule (ES 152) Demander ce que je veux. Ici, demander la grâce, afin de choisir ce qui peut contribuer davantage à la gloire de sa divine Majesté et au bien de mon âme. • Premier homme Le premier homme voudrait supprimer l’attache qu’il a au bien

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MÉDITATION DES « TROIS HOMMES »

acquis, afin de trouver dans la paix Dieu notre Seigneur et de pouvoir se sauver. Mais il n’en prend pas les moyens jusqu’à l’heure de la mort. • Deuxième homme (ES 154) Le second veut supprimer l’attache. Mais il veut la supprimer tout en conservant le bien acquis, de sorte que ce soit Dieu qui en vienne là où il veut. Et il ne se décide pas à l’abandonner pour aller à Dieu, quand bien même ce devrait être le meilleur état pour lui. • Troisième homme (ES 255) Le troisième veut supprimer l’attache. Mais il veut si bien la supprimer qu’il n’est même pas attaché à garder le bien acquis ou à ne pas le garder. Ce qu’il prétend seulement, c’est vouloir le garder ou non selon ce que Dieu notre Seigneur mettra en sa volonté et selon ce qui lui paraîtra meilleur, à lui, pour le service et la louange de sa divine Majesté. En attendant, il veut se regarder comme abandonnant tout dans son cœur, et il met son effort à ne vouloir ni ce bien ni aucun autre, s’il n’y est pas poussé uniquement par le service de Dieu notre Seigneur. De la sorte, c’est le désir de pouvoir mieux servir Dieu notre Seigneur qui le pousse à prendre le bien ou à l’abandonner. • Trois colloques (ES 156) Faire les trois mêmes colloques que l’on a faits dans la précédente contemplation des « Deux Étendards ». • Remarque (ES 157) On notera que, lorsque nous sentons quelque attache ou quelque répugnance contre la pauvreté effective, lorsque nous ne sommes pas indifférents à la pauvreté ou à la richesse, il est excellent, pour étouffer cette attache désordonnée, de demander dans les colloques (même si cela va contre la chair) que le Seigneur nous choisisse pour la pauvreté effective, et même de le vouloir, de le demander et de l’implorer, pourvu que ce soit le service et la louange de sa divine Bonté.

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Pour aider la contemplation de la vie publique

Le sens des contemplations de la vie publique du Christ Nous avons essayé de comprendre le sens de ces deux méditations ignatiennes que sont les « Deux Étendards » et les « Trois Hommes ». Lorsque l’on fait les Exercices spirituels de trente jours, Ignace demande de faire ces méditations pendant une journée : trois ou quatre fois les « Étendards » et en fin de journée les « Trois Hommes ». Après cela, on reprend les contemplations de la vie publique du Christ, pendant le nombre de jours nécessaires pour que mûrisse l’élection. Cela peut prendre cinq, six ou sept jours. On voit donc bien que ce qui importe le plus dans les Exercices, c’est la contemplation de la vie du Christ. Les « Deux Étendards » nous aident à être lucides sur nos attaches désordonnées et sur le chemin pris par le Christ, et les « Trois Hommes » nous permettent de vérifier dans quelle mesure nous sommes vraiment indifférents, libres dans notre cœur. C’est à cette lumière-là que nous pouvons entrer dans les contemplations évangéliques qui nous introduisent dans une connaissance intérieure du Christ pour mieux l’aimer le suivre, afin de chercher et de trouver sa volonté sur notre vie (élection). De même, dans les Exercices dans la vie courante, nous prions pendant quelques jours les « Étendards » et les « Trois Hommes », afin de bien voir les enjeux de la retraite. Mais l’essentiel des semaines qui viennent consistera à contempler le Christ qui évangélise notre esprit et notre cœur tout au long des mystères de sa vie

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POUR AIDER LA CONTEMPLATION DE LA VIE PUBLIQUE

publique. En priant les contemplations des mystères évangéliques, nous laissons éclairer notre propre vie à la lumière de la vie de Jésus, et nous demandons au Seigneur de voir dans cette lumière du Christ pauvre et humble repris dans les colloques, comment il nous invite à ordonner notre vie pour qu’elle soit davantage conformée à la sienne et à son dessein d’amour sur moi. C’est ce qu’on appelle le travail de l’élection. Nous y reviendrons plus loin, mais il est bon de bien voir dès à présent que les contemplations des mystères évangéliques ne sont pas un simple parcours d’évangile, mais qu’ils sont là pour nous introduire à une connaissance intérieure, une intimité plus grande avec le Christ, et nous faire voir ce qu’il y a à changer, purifier, ordonner, nourrir comme attrait ou comme attitude en nous qui nous conforme davantage au Christ. Il y a donc un va-et-vient dans la prière entre la contemplation de la vie du Christ et le mystère de ma vie. Lorsque je contemple le Christ dans sa vie, c’est aussi ma propre vie qui est éclairée. Le Christ me révèle à moi-même et me fait voir et sentir comment il m’invite à être conformé à lui. Donc, à certains moments de la prière, je Le contemple, j’entre dans son amitié, son intimité, sa manière d’être et de vivre. Je laisse s’évangéliser tout mon être, esprit, affectivité, cœur. À d’autres moments, je réfléchirai davantage en moi-même pour « tirer profit ». Je laisse éclairer ma vie par la sienne et je pressens l’invitation à changer des choses en moi, des manières de faire, des attitudes, à nourrir certains attraits, à prendre certaines décisions. Sans oublier de faire les trois colloques des « Deux Étendards » à la fin de chaque exercice. C’est ainsi que mûrit peu à peu l’élection mais il importe surtout d’en parler et d’être aidé sur ce point par la personne qui vous accompagne. Concrètement, vous trouverez dans les pages suivantes une proposition, avec des passages d’évangile, pour prévoir la prière pendant ces semaines. Il ne s’agit pas de vouloir suivre cela à la lettre. Mais ce sont des points de repère. Vous verrez avec la personne qui vous accompagne quel rythme est bon pour vous, là où vous en êtes et dans la docilité à la manière dont l’Esprit vous conduit.

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Contemplation de la vie publique

• INTRODUCTION . C’est après la méditation suffisamment approfondie des « Deux Étendards » et des « Trois Hommes », et tout en continuant à contempler les mystères de la vie du Christ en sa vie publique à partir de son Baptême au Jourdain, que le retraitant commence à aborder le travail de l’élection. Il importe à ce moment qu’il s’en réfère à la personne qui l’accompagne. Il verra avec elle quelle est la manière de procéder pour lui. Quelques suggestions sont données aux pages 127 à 130. • DURÉE DE L’ÉTAPE. Le temps nécessaire pour que mûrisse l’élection dans une longue contemplation des mystères proposés, en dialogue avec l’accompagnateur (environ deux mois).

GRÂCE

À DEMANDER

> Demander une connaissance intérieure du Seigneur, qui pour moi s’est fait homme, afin de mieux l’aimer et le suivre.

ATTITUDES

À NOURRIR

> Relire et continuer à vivre les attitudes proposées pour la vie cachée. > Être fidèle à vivre au présent de sa vie la Parole de Dieu contemplée. > Se garder toujours disponible, désireux d’aboutir mais sans se

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CONTEMPLATION DE LA VIE PUBLIQUE

presser et sans volontarisme. > Noter les alternances des mouvements intérieurs des esprits : consolations et désolations, se demandant d’où elles proviennent et ce qu’elles peuvent signifier. > Apprendre à ne pas se laisser décourager ni retenir par ses résistances reconnues ; apprendre à les dépasser dans sa prière sans laisser se troubler son jugement ni sa volonté. > Accorder un soin particulier au temps du triple colloque. > Nous sommes au cœur de la démarche des Exercices, dans un temps où l’essentiel peut se donner en grande simplicité. Ne pas relâcher la prière et la vigilance pour l’ensemble de la démarche.

Vous trouverez ci-dessous les titres des contemplations que saint Ignace privilégie. Elles sont développées en points de prière à la fin du parcours de Deuxième Semaine (p. 120-126). D’autres sont ajoutées qui peuvent aider aussi, selon ce qui est bon pour chacun.

• CONTEMPLATIONS

PRIVILÉGIÉES PAR SAINT IGNACE

☞ En chacun des exercices de contemplation, on placera au début la prière préparatoire et les trois préambules, comme cela a été expliqué dans la contemplation de l’Incarnation et de la Nativité, et l’on terminera par le triple colloque des « Deux Étendards », ou selon la remarque qui fait suite à la méditation des « Trois Hommes » (ES 157). Un bon rythme peut être de prier deux contemplations par semaine avec leur répétition et l’application des sens.

– Contemplation sur le départ du Christ notre Seigneur de Nazareth pour le fleuve du Jourdain, et comment il fut baptisé (ES 273). – Comment le Christ notre Seigneur alla du fleuve du Jourdain jusqu’au désert inclusivement (ES 274). – Comment saint André et les autres suivirent le Christ notre Seigneur (ES 275).

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– Le sermon sur la montagne sur les huit béatitudes (ES 278). – Comment le Christ notre Seigneur apparut à ses disciples sur les flots de la mer (ES 280). – Comment le Seigneur prêchait dans le Temple (ES 288). – La résurrection de Lazare (ES 285). – Le jour des Rameaux (ES 287). • QUESTIONS À ME POSER TOUT EN CONTEMPLANT LES MYSTÈRES Selon le point où j’en suis dans mon parcours, il peut être bon de me poser les questions suivantes : – Où se situe pour moi le combat spirituel ? – Quels sont les traits du mystère du Christ qui m’attirent davantage ? – Suis-je disposé à engager toute ma liberté, selon le troisième homme, dans la suite du Christ Jésus, serviteur pauvre et humilié ? – Est-ce que je pressens une invitation plus précise du Christ à le suivre dans ma vie concrète ? • LES TROIS SORTES D’HUMILITÉ (ES 164-168) Avant d’entreprendre l’élection, il est très bon, pour s’attacher à la véritable doctrine du Christ notre Seigneur, de considérer avec attention les trois sortes d’humilité qui suivent. Revenir par moments sur cette considération au long de la journée, et faire également les colloques de la manière indiquée plus loin (voir Annexe 14). • Première humilité (ES 165) La première sorte d’humilité est nécessaire au salut éternel. Elle consiste en ceci : je m’abaisse et je m’humilie autant qu’il m’est possible, afin d’obéir en tout à la loi de Dieu notre Seigneur. Ainsi, même si l’on me constituait le maître de toutes les choses créées en ce monde, ou même au prix de ma propre vie temporelle, je n’envisagerais pas d’enfreindre un commandement, soit divin, soit humain, qui m’oblige sous peine de péché mortel.

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CONTEMPLATION DE LA VIE PUBLIQUE

• Seconde humilité (ES 166) La seconde est une humilité plus parfaite que la première. Elle consiste en ceci : je me suppose parvenu à ce point que je ne cherche ni ne m’attache à posséder la richesse plutôt que la pauvreté, à vouloir l’honneur plutôt que le déshonneur, à désirer une vie longue plutôt qu’une vie courte, étant égal le service de Dieu notre Seigneur et le bien de mon âme ; et en outre, même en échange de tout le créé, ou même au risque de perdre la vie, je n’envisagerais pas de faire un péché véniel. • Troisième humilité (ES 167) La troisième est l’humilité la plus parfaite. Incluant la première et la seconde, elle consiste en ceci : afin d’imiter le Christ notre Seigneur et de lui ressembler effectivement davantage, je veux et je choisis la pauvreté avec le Christ pauvre plutôt que la richesse, les humiliations avec le Christ humilié plutôt que les honneurs, étant égale la louange et la gloire de la divine Majesté ; et je préfère être regardé comme un sot et un fou pour le Christ, qui le premier a passé pour tel, plutôt que comme un sage et un prudent en ce monde. • Remarque (ES 168) Ainsi, pour qui désire obtenir cette troisième humilité, il est excellent de faire le triple colloque des « Trois Hommes », déjà indiqué, en demandant que notre Seigneur veuille me choisir pour cette troisième humilité plus haute et meilleure, afin de l’imiter et de le servir davantage, si doit être égal ou plus grand le service et la louange de sa divine Majesté.

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Les mystères de la vie publique du Christ

COMMENT LE CHRIST FUT BAPTISÉ (Mt 3, 13-17) (ES 273) • Premier Le Christ notre Seigneur, après avoir pris congé de sa mère bénie, vint de Nazareth au fleuve du Jourdain, où se trouvait saint Jean Baptiste. • Deuxième Saint Jean baptisa le Christ notre Seigneur. Comme il voulait se récuser, s’estimant indigne de le baptiser, le Christ lui dit : « Fais cela, pour le moment, parce qu’il est nécessaire que nous accomplissions ainsi toute la justice. » • Troisième « Vint l’Esprit Saint, ainsi que la voix du Père qui, du ciel, attestait : Celui-ci est mon Fils bien-aimé qui a toute ma faveur. » ☞ On peut lire les Chants du Serviteur : Is 42, 1-9 et Is 49, 1-7.

COMMENT LE CHRIST FUT TENTÉ (Lc 4, 1-13 ; Mt 4, 1-11) (ES 274) • Premier Après avoir été baptisé, il alla au désert où il jeûna quarante jours et quarante nuits. • Deuxième Il fut tenté trois fois par l’ennemi : « S’approchant de lui, le tentateur lui dit : Si tu es le Fils de Dieu, dis que ces pierres se changent en pain. Jette-toi, d’ici, en bas. Tout ce que tu vois, je te le donnerai si, prosterné à terre, tu m’adores. »

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LES MYSTÈRES DE LA VIE PUBLIQUE DU CHRIST

• Troisième « Les anges vinrent et ils le servaient. » L’APPEL DES APÔTRES (ES 275) • Premier C’est par trois fois, semble-t-il, que saint Pierre et saint André sont appelés : à une certaine connaissance : cela ressort de saint Jean, au chapitre premier (v. 35-42). ➋ à suivre en quelque manière le Christ, avec l’intention de reprendre possession de ce qu’ils avaient laissé, comme le dit saint Luc au chapitre cinquième (v. 1-11). ➌ à suivre pour toujours le Christ notre Seigneur : saint Matthieu, au chapitre quatrième (v. 18-22) et saint Marc au chapitre premier (v. 16-20). • Deuxième Il appela Philippe, comme il est indiqué au chapitre premier de saint Jean, et Matthieu comme le dit Matthieu lui-même au chapitre neuvième. • Troisième Il appela les autres Apôtres dont la vocation particulière n’est pas mentionnée dans l’Évangile. Trois autres choses doivent être considérées. combien les Apôtres étaient de fruste et basse condition. ➋ la dignité à laquelle ils furent si suavement appelés. ➌ les dons et grâces par lesquels ils furent élevés au-dessus de tous les Pères du Nouveau et de l’Ancien Testament. ☞ On peut prier le choix des Douze : Mc 3, 13-19 et Lc 6, 12-16.

LE PREMIER MIRACLE ACCOMPLI AUX NOCES DE CANA, EN GALILÉE (Jn 2, 1-11) (ES 276) • Premier Le Christ notre Seigneur fut invité aux noces avec ses disciples.

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• Deuxième La Mère signale au Fils le manque de vin, disant : « Ils n’ont pas de vin », et elle ordonna aux serviteurs : « Faites tout ce qu’il vous dira. » • Troisième « Il changea l’eau en vin et manifesta sa gloire ; et ses disciples crurent en lui. » COMMENT LE CHRIST CHASSA HORS DU TEMPLE CEUX QUI Y VENDAIENT (Jn 2, 13-22) (ES 277) • Premier Il chassa hors du Temple tous ceux qui y vendaient, avec un fouet fait de cordes. • Deuxième Il renversa les tables et l’argent des riches banquiers qui étaient dans le Temple. • Troisième Aux pauvres qui vendaient des colombes, il dit avec douceur : « Enlevez ces choses d’ici et ne faites pas de ma maison une maison de commerce. » LE SERMON QUE FIT LE CHRIST SUR LA MONTAGNE (Mt 5, 1-48) (ES 278) • Premier À ses disciples bien-aimés il parle, à part, des huit béatitudes : « Bienheureux les pauvres en esprit ; les doux ; les miséricordieux ; ceux qui pleurent ; ceux qui endurent la faim et la soif pour la justice ; ceux qui sont purs de cœur ; les pacifiques et ceux qui souffrent persécution. » • Deuxième Il les exhorte à faire bon usage de leurs talents : « Ainsi, que votre lumière brille devant les hommes afin qu’ils voient vos bonnes actions et glorifient votre Père qui est dans les cieux. » • Troisième Il ne se présente pas comme transgresseur de la Loi, mais comme celui qui l’accomplit, lorsqu’il explique le commandement de ne pas tuer, de ne pas forniquer, de ne pas faire de faux serments

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LES MYSTÈRES DE LA VIE PUBLIQUE DU CHRIST

et d’aimer ses ennemis : « Moi, à vous, je dis d’aimer vos ennemis et de faire du bien à ceux qui vous haïssent. » COMMENT LE CHRIST NOTRE SEIGNEUR FIT SE CALMER LA TEMPÊTE DE (Mt 8, 23-27) (ES 279) • Premier Tandis que le Christ notre Seigneur était en train de dormir, il se fit une grande tempête sur la mer. • Deuxième Ses disciples effrayés le réveillèrent ; il les reprend pour leur peu de foi, leur disant : « Que craignez-vous, gens de peu de foi ? » • Troisième Il commanda aux vents et à la mer de s’arrêter. S’arrêtant donc, la mer se fit tranquille, ce dont les hommes s’émerveillèrent en disant : « Quel est celui-là, à qui le vent et la mer obéissent ? »

LA MER

COMMENT LE CHRIST MARCHAIT SUR LA MER (Mt 14, 22-33) (ES 280) • Premier Tandis que le Christ notre Seigneur était sur la montagne, il fit en sorte que ses disciples s’en aillent vers la barque ; et, après avoir renvoyé la foule, il commença à prier, seul. • Deuxième La barque était battue par les flots ; le Christ vient vers elle en marchant sur l’eau, et les disciples pensaient que c’était un fantôme. • Troisième Le Christ leur dit : « C’est moi, ne craignez pas. » saint Pierre, sur son ordre, vint à lui en marchant sur l’eau ; pris de doute, il commença à s’enfoncer, mais le Christ notre Seigneur le délivra et le reprit pour son manque de foi. Ensuite, comme il montait dans la barque, le vent s’arrêta. ☞ On peut prier Mc 8, 27-33 : Profession de Pierre et annonce de la Passion ; et Mc 8, 34-38 : Conditions pour suivre Jésus.

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COMMENT LES APÔTRES FURENT ENVOYÉS PRÊCHER (Mt 10, 1-42) (ES 281) • Premier Le Christ appelle ses disciples bien-aimés et leur donne le pouvoir de chasser les démons du corps des hommes et de guérir toutes les maladies. • Deuxième Il leur enseigne la prudence et la patience : « Voici que je vous envoie, vous, comme des brebis au milieu des loups ; c’est pourquoi, soyez prudents comme des serpents et simples comme des colombes. » • Troisième Il leur indique la manière de faire route : « Ne possédez ni or, ni argent ; ce que vous avez reçu gratuitement, donnez-le gratuitement » ; et il leur donna la matière sur laquelle prêcher : « Sur votre route vous prêcherez, disant : Voici que le Royaume de Dieu est tout proche. » ☞ On peut prier Mc 9, 33-37 : Qui est le plus grand ? ; et Mc 10, 35-40 : La demande des deux fils de Zébédée.

LA CONVERSION DE MADELEINE (Lc 7, 36-50) (ES 282) • Premier Madeleine entre là où se trouve le Christ notre Seigneur, assis à table, dans la maison du pharisien ; elle apportait un vase d’albâtre plein de parfum. • Deuxième Se trouvant derrière le Seigneur, près de ses pieds, elle se mit à les baigner de larmes et elle les essuyait avec les cheveux de sa tête ; et elle baisait ses pieds et elle les oignait de parfum. • Troisième Comme le pharisien accusait Madeleine, le Christ prend la parole pour la défendre, en disant : « De nombreux péchés lui sont pardonnés parce qu’elle a beaucoup aimé » ; et il dit à la femme : « Ta foi t’a sauvée, va en paix. »

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LES MYSTÈRES DE LA VIE PUBLIQUE DU CHRIST

COMMENT LE CHRIST NOTRE SEIGNEUR DONNA À MANGER À CINQ MILLE (Mt 14, 13-21) (ES 283) • Premier Comme il se faisait déjà tard, les disciples demandent au Christ de renvoyer la multitude de ceux qui étaient avec lui. • Deuxième Le Christ notre Seigneur leur ordonna de lui apporter les pains et ordonna que les gens s’assoient à table ; et il bénit les pains, les partagea, les donna à ses disciples, et les disciples à la multitude. • Troisième « Ils mangèrent et se rassasièrent ; et il resta douze paniers. »

HOMMES

LA TRANSFIGURATION DU CHRIST (Mt 17, 1-9) (ES 284) • Premier Prenant en sa compagnie ses disciples bien-aimés, Pierre, Jacques et Jean, le Christ notre Seigneur fut transfiguré et son visage resplendissait comme le soleil et ses vêtements comme la neige. • Deuxième Il parlait avec Moïse et Élie. • Troisième Tandis que saint Pierre disait de faire trois tentes, une voix du ciel retentit qui disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutezle. » Lorsqu’ils entendirent cette voix, les disciples pris de peur tombèrent face contre terre. Le Christ notre Seigneur les toucha et leur dit : « Levez-vous et n’ayez pas peur ; ne parlez de cette vision à personne, jusqu’à ce que le Fils de l’homme ressuscite. » LA RÉSURRECTION DE LAZARE (Jn 11, 1-45) (ES 285) • Premier Marthe et Marie font savoir au Christ notre Seigneur la maladie de Lazare. Après l’avoir sue, il reste là pendant deux jours, pour que le miracle fût plus évident. • Deuxième Avant de le ressusciter, il demande à l’une et à l’autre de croire,

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disant : « Je suis la Résurrection et la vie ; celui qui croit en moi, fût-il mort, vivra. » • Troisième Il le ressuscite après avoir pleuré et prié ; et quant à la manière de le ressusciter ce fut en ordonnant : « Lazare, viens dehors ! » LE REPAS À BÉTHANIE (Mt 26, 6-10) (ES 286) • Premier Le Seigneur prend le repas du soir dans la maison de Simon le Lépreux, en compagnie de Lazare. • Deuxième Marie répand du parfum sur la tête du Christ. • Troisième Judas murmure, disant « À quoi sert ce gaspillage de parfum ? » Mais lui, il défend une nouvelle fois Madeleine, disant : « Pourquoi tracassez-vous cette femme ? Car elle a fait une bonne œuvre envers moi. » LE DIMANCHE DES RAMEAUX (Mt 21, 1-17) (ES 287) • Premier Le Seigneur envoie chercher l’ânesse et l’ânon, disant : « Détachez-les et amenez-les moi ; et si quelqu’un vous dit quelque chose, dites que le Seigneur en a besoin, et qu’ensuite il les laissera. » • Deuxième Il monta sur l’ânesse, recouverte des vêtements des Apôtres. • Troisième Les gens sortent pour le recevoir en étendant sur le chemin leurs vêtements et les branches des arbres en disant : « Sauve-nous, Fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Sauvenous, au plus haut des cieux ! » LA PRÉDICATION DANS LE TEMPLE (Lc 19, 47-48) (ES 288) • Premier Il était chaque jour à enseigner dans le Temple. • Deuxième La prédication terminée, comme il n’y avait personne qui le reçût à Jérusalem, il revenait à Béthanie.

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Pour aider le travail de l’élection

Situation La « journée des Étendards » a été vécue. Les Étendards vérifient la lucidité de l’intelligence spirituelle. Les types d’hommes vérifient la simplicité, la loyauté de la volonté. Le troisième mode d’humilité vérifie l’attachement du cœur au Christ pauvre et humilié. Le travail de l’élection commence, éclairé par cette journée, en abordant les contemplations de la vie publique. Le travail des élections est un des fruits de la contemplation. En effet, à chaque contemplation, Ignace dit de réfléchir, tirer du fruit. Ce fruit, ce profit que l’on tire dans l’Esprit est multiple. Il est d’abord connaissance et amour du Christ. Mais cela va aussi s’exprimer normalement dans l’élection. Ce travail de l’élection est le moment le plus délicat des Exercices et demande plus que jamais la présence d’une personne qui accompagne. Il suppose une attention continuelle au discernement des esprits selon les règles de deuxième semaine (cf. Annexes 15 et 16). Voici simplement quelques suggestions qui peuvent aider.

Comment entrer dans le travail de l’élection Normalement, dans la contemplation, le Christ révèle à l’exercitant la vérité de sa vie et l’appel qu’il lui adresse en ce moment de

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son existence. Il percevra dans la lumière du Christ qu’il y a des choses à réformer dans sa vie. On peut se rappeler aussi ce qui est apparu en première semaine et pendant les contemplations de la vie cachée, ou encore avant la retraite. Mais à travers cela, c’est Dieu qui dans la prière fait sentir ce sur quoi Il invite à faire élection, comment ordonner sa vie.

Étapes de maturation de l’élection Voir sur quoi Dieu appelle à faire élection. Ne pas se hâter, laisser mûrir. Ne pas trop se soucier. Contempler le Christ dans ses mystères et demander d’être reçu sous son étendard selon ce que je suis moi-même. Être reçu dans la manière dont il me donne d’actualiser son mystère par ma vie qui se laisse réformer et conformer à Lui. Ainsi émerge peu à peu la manière dont le Christ m’appelle en ce moment-ci de mon existence, et la manière dont je suis invité à y répondre. Des points plus « en surface » peuvent émerger d’abord. Puis la prière permet d’approfondir. Un passage se fait du souci de « résolutions pratiques à prendre » à la reconnaissance de ce à quoi Dieu invite. Cela mûrit de l’intérieur, comme une motion attirante du Dieu d’amour qui fait la vérité en moi, ordonne et restaure. Ainsi se dessine une attitude fondamentale, une orientation à donner à ma vie comme réponse à son appel et à son attrait — bref, mon élection avec les répercussions sur les diverses dimensions de l’existence, et l’une ou l’autre résolution pratique (ne pas en prendre trop).

Prier les objets ou les points d’élection Dans ce but, tout en faisant les contemplations telles qu’elles sont prévues, laisser monter ces points à l’intérieur de la contemplation. Si l’objet d’élection, l’orientation suggérée nourrit la prière et la fortifie (que ce soit sous forme de consolation ou sous forme de résistance), c’est signe que le mystère contemplé prend corps à travers

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POUR AIDER LE TRAVAIL DE L’ÉLECTION

cela dans ma vie. Il opère en moi ce qu’il révèle dans le Christ. Peu à peu, évitant les tentations de découragement ou d’amertume ou de solution sous apparence de bien, le travail s’opère. Si, au contraire, c’est source de distraction, faisant perdre la prière, c’est signe qu’il n’y a pas à retenir cela pour le moment. Cependant, il y a lieu de bien distinguer ces distractions des résistances qui peuvent apparaître. Il s’agit là d’un discernement délicat et important. Pour cela, il faut toujours revenir à la contemplation du Christ avec les colloques. Veiller à ne pas se regarder soi-même d’abord. C’est en regardant le Christ des « Étendards » et du troisième mode d’humilité que l’on se trouvera soi-même, à son image et à sa ressemblance. Ce n’est pas en se regardant soi-même que l’on trouvera la volonté du Christ sur sa vie.

Distinguer ce qui est du bon ou du mauvais esprit Donc apprendre à revenir du trouble ou de la distraction à la prière. Faire mémoire : comment est arrivé ce trouble, cette distraction ? Quel était l’état précédent ? Cela enlève-t-il la paix précédente ? Alors l’origine est sans doute du mauvais esprit. Peu à peu on reconnaît que le mauvais esprit s’oppose à quelque chose : c’est justement cela — c’est-à-dire ce à quoi le mauvais esprit s’oppose — qui est le don de Dieu. Le mauvais esprit peut s’y opposer sous forme de désolation ou sous forme de consolation sous l’apparence de bien. On est toujours tenté sur la grâce reçue. À partir du moment où on identifie ce à quoi l’ennemi est contraire (l’ennemi peut contrarier en distrayant, détournant, inquiétant, etc.) on commence à découvrir la volonté de Dieu. On identifie ainsi progressivement ce à quoi Dieu appelle, qui nous attire et dont nous sentons en même temps l’exigence qui peut faire peur. À ce moment le combat des esprits s’apaise. Reste alors une dernière étape.

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La liberté face à Dieu Le retraitant voit bien maintenant à quoi Dieu l’appelle. Mais il peut y avoir encore un rude combat pour consentir, dire pleinement oui à ce à quoi Dieu invite ainsi. Veiller ici plus que jamais à l’attitude du troisième type d’hommes et garder devant les yeux du cœur le troisième mode d’humilité. Quand on est au terme de l’élection, habituellement celui qui donne et celui qui reçoit les Exercices le perçoivent tous les deux. Conclure l’élection : c’est la dire et normalement aussi l’écrire. Si la décision est vraiment « prise », il importe de l’offrir à Dieu. Pour cela il est bon de la mettre par écrit sous forme de prière. Et aussi de la montrer à celui qui accompagne. C’est une aide pour recevoir l’élection comme venant de Dieu, et non pas de ma volonté propre. Il importe aussi de laisser l’élection se confirmer : voir si, pendant les jours qui suivent, l’élection est stable et donne la paix.

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Troisième Semaine



Introduction à la Troisième Semaine

La contemplation de la Passion du Seigneur Où en sommes-nous sur le chemin des Exercices ? Sans relire l’ensemble du parcours accompli — nous l’avons fait en présentant les « Deux Étendards » — rappelons simplement le but des Exercices spirituels tel que l’énonce en plusieurs endroits saint Ignace. Déjà la première annotation des Exercices se termine en précisant qu’il s’agit « d’écarter de soi les attachements désordonnés et, après les avoir écartés, chercher et trouver la volonté divine dans la disposition de sa vie, en vue du salut de son âme » (ES 1). Le titre des Exercices est on ne peut plus clair : « Exercices pour… ordonner sa vie… » (ES 21), et le « Principe et Fondement » explique qu’il faut « désirer et choisir uniquement ce qui nous conduit davantage à la fin pour laquelle nous sommes créés » (ES 23). C’est en Deuxième Semaine, spécialement durant la contemplation de la vie publique du Christ, que mûrit et se précise cette recherche de la volonté de Dieu sur notre vie. En demeurant dans la contemplation et à la lumière des méditations des « Deux Étendards », des « Trois Hommes » ainsi que de la Troisième Humilité, nous avons laissé évangéliser notre vie par le Christ. En le contemplant, nous avons peu à peu pressenti et perçu comment Il nous appelle à mieux orienter, ordonner notre vie selon son Dessein d’amour, sa volonté, en ce moment-ci de notre existence. C’est ce que saint Ignace appelle l’élection.

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Chacun de nous, pendant ces semaines, aura perçu d’une façon ou d’une autre la manière dont le Christ l’appelle à le suivre maintenant et ainsi fait son élection, ou au moins a commencé à la faire. Chacun aura mieux vu quelle attitude intérieure le Christ l’invite à choisir, à nourrir, et quels moyens concrets prendre pour entretenir cette orientation. Peut-être s’agit-il aussi de tel ou tel changement extérieur à apporter à sa vie, au style de son existence. Mais ces décisions ou résolutions plus extérieures sont toujours enracinées dans une orientation du cœur à laquelle l’Esprit Saint appelle à travers la contemplation du Christ. Une fois l’élection faite, saint Ignace invite à la laisser confirmer par le Seigneur. Car les Exercices spirituels ne s’achèvent pas avec l’élection. La démarche serait alors encore trop centrée sur nousmêmes. « J’ai trouvé ce que je cherche. Cela me suffit ». Il y aurait là une certaine autosuffisance. Les Exercices mènent plus loin. Il s’agit toujours, grâce à l’élection, à cette orientation donnée à notre existence, de nous laisser intégrer davantage au mystère du Christ, au dessein de salut de Dieu réalisé en Jésus. Me laisser prendre en son mystère est une des manières principales d’être confirmé dans mon élection. Par mon élection, je choisis de renoncer à ce qui est désordonné en moi (mourir avec le Christ au vieil homme, dirait saint Paul), pour laisser vivre en moi la vie du Christ ressuscité. Le Christ vient me prendre avec Lui dans son mystère de mort et de Résurrection, et m’associe à son œuvre, son Règne, qui se poursuit dans le monde. Laisser confirmer mon élection, c’est donc la laisser être intégrée dans le mystère pascal de Jésus. Mon élection est ma manière de communier et d’être pris dans le mystère de sa Passion et de sa Résurrection. Aussi allons-nous contempler maintenant Jésus qui entre dans sa Passion, et qui reçoit ainsi du Père sa vie ressuscitée. Nous allons entrer, durant les semaines qui viennent, dans la Passion du Christ, en nous y laissant associer. Puis, nous serons invités, selon ce que chacun verra avec la personne qui l’accompagne, à entrer dans la contemplation du Christ ressuscité qui nous introduit dans son intimité et nous éduque à sa nouvelle présence à l’œuvre dans l’Église au cœur du monde.

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INTRODUCTION À LA TROISIÈME SEMAINE

Regard sur le texte de Troisième Semaine On peut remarquer quelques caractéristiques du texte des Exercices spirituels : On y suit le Christ pas à pas « de… à… », alors qu’en Deuxième Semaine, il s’agissait d’événements ou de rencontres ponctuelles, séparées. La contemplation de la Passion est étalée sur toute une semaine, alors qu’elle n’a duré en fait qu’une journée. Signe qu’il s’agit d’une entrée dans le mystère de la Passion, bien plus que d’un rappel historique des faits. Le Christ, après son arrestation, est appelé « Jésus » ou « il », comme pour mieux montrer qu’il n’apparaît plus que comme un homme fragile et démuni. De même, il ne parle plus, n’agit plus, mais se laisse faire dans une passivité aimante qui accepte l’impuissance. Les conseils donnés invitent à une grande simplicité de communion à Jésus dans sa Passion, en laissant vivre devant soi et en soi les mystères accomplis par le Christ. On voit par là que, pour Ignace, le plus important est de se laisser intégrer au mystère du Christ. La recherche de la volonté de Dieu et l’élection sont intégrées dans les mystères de sa vie et de sa Passion. Nous devenons ainsi son corps. L’élection ne portera réellement du fruit qu’à l’intérieur de cette communion au Christ.

La grâce demandée en Troisième Semaine La grâce demandée en Troisième Semaine est exprimée dans la présentation de la contemplation de l’agonie : « … la douleur avec le Christ douloureux… la peine intérieure de tant de peine que le Christ a portée pour moi ». Il s’agit d’une grâce de communion, de compassion, que chacun reçoit selon ce qui est bon pour lui en ce moment. Il ne s’agit pas de compenser ou d’ajouter quoi que ce soit à la souffrance du Christ, mais de demander la grâce de lui être pré-

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sent et de recevoir, comme une confidence d’amitié, la part de l’unique souffrance du Sauveur qu’il me donne en partage. Car Il vit cela pour moi, parce qu’il m’aime, parce qu’il veut me donner la vie, m’introduire dans son mystère d’amour. La contemplation de la Passion n’est pas un spectacle auquel j’assiste, pour me laisser émouvoir ou culpabiliser. C’est un mystère qui éveille en moi la grâce d’aimer comme le Christ, de communier à son amour qui souffre. Cette « com-passion » fortifie mon élection et l’approfondit, la confirme. La grâce de Troisième Semaine est aussi évoquée dans la contemplation de la Cène. À cet endroit, l’accent est mis sur le lien entre la Passion et mes péchés. Le texte est proche de la grâce demandée en Première Semaine (honte et confusion). Mais il y a une différence fondamentale. En Première Semaine, je demandais la confusion pour mes péchés. Ici, je suis décentré de moi-même et demande la douleur à cause du Seigneur qui va à la Passion pour mes péchés. Le colloque proposé pour la contemplation de la Cène confirme ce qui est demandé dans la grâce de cette semaine. Il s’agit toujours d’entrer dans le mystère de la Passion du Christ avec tout ce qu’on est, avec l’élection que l’on désire voir confirmée. La personne qui fait les Exercices suit le Christ pas à pas, et est comme enveloppée par ce mystère d’amour du Christ qui livre sa vie pour elle. Ce « pour elle » n’est évidemment pas exclusif des autres, bien au contraire, mais tout le poids de la prière porte sur la relation personnelle au Christ. La profondeur de cette relation personnelle ouvrira d’autant plus à un amour universel et à une capacité de compatir avec tout autre (cf. Mère Teresa, François d’Assise, etc.).

Rappel de la manière de prier et du climat de la journée Il importe beaucoup en cette étape de la Passion de veiller à garder la manière de prier proposée pour les contemplations, depuis l’oraison préparatoire jusqu’au colloque. Importance aussi de préparer le temps de prière par une lecture attentive des textes évan-

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INTRODUCTION À LA TROISIÈME SEMAINE

géliques et des points d’Ignace. Le terrain est ainsi préparé pour entrer d’emblée dans la contemplation du mystère et la relation personnelle au Christ. Car il s’agit de moi et du Christ dans un tête-àtête personnel. De l’ennemi que j’étais, il fait de moi un ami (ES 196) qu’il sauve, restaure et invite à partager son chemin d’amour et de douleur. Ce n’est pas le moment d’étudier ou comparer les textes, ni de s’attarder en théorie sur la souffrance. Il importe aussi que ces journées soient habitées par le climat de la Passion, autant qu’il est possible. Un certain recueillement, quelque pénitence ou jeûne de télévision, radio, musique, nourriture… Le Christ nous invite à partager le secret de son amour souffrant pour moi, dans mon existence concrète.

La manière de prier et le fruit de la contemplation de la Passion Dans la prière, en Première Semaine, nous étions situés comme des pécheurs devant notre Sauveur. En Deuxième Semaine, nous sommes devenus disciples qui se laissent enseigner par le Christ. En Troisième Semaine, nous devenons des amis du Christ grâce à notre élection. Il nous invite comme un ami à marcher avec lui qui aime jusqu’au bout. Il ne s’agit donc plus tellement d’être instruit par lui pour être éclairé sur sa manière d’être et de vivre afin de m’y conformer, mais plus simplement d’être avec lui, de l’accompagner gratuitement. Cela peut être un temps d’éducation à une prière simplifiée, vécue en profondeur. L’important est de ne pas demeurer spectateur, à l’extérieur, mais de demander la grâce d’entrer dans la simplicité et la profondeur d’une rencontre personnelle avec le Christ, dans le mystère de son amour, et des sentiments qui habitent son cœur. Il ne s’agit pas de vivre une émotion facile, un peu sentimentale, ni de chercher une explication rationnelle à : « Pourquoi la Passion ? » Il s’agit simplement de communier à son mystère d’amour qui va jusqu’au bout. Lui être présent, autant que possible, pas à pas, de scène en scène. Demeurer en silence avec Jésus dans son agonie, sa prière au Père. Être avec lui au cachot toute la nuit.

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Voir son regard plein d’amour et de vérité alors qu’il est souffleté, bafoué. Son regard qui rejoint Pierre après le reniement. Les contemplations de la vie cachée nous ont un peu familiarisés avec cette présence aux personnes, cette intimité peut-être très dépouillée et pauvre. Ici, ce ne sont pas les idées qui importent, mais de communier à ce qui habite son cœur, selon ce qui peut aider et la grâce qui est donnée. Il peut y avoir un va-et-vient entre une prière plus réflexive et une simple présence. Nous pouvons nous aider pour cela des trois points complémentaires proposés par Ignace dès la contemplation de la Cène. POINT 4. Voir comment le Christ consent pleinement à ce chemin de la Passion, non pas qu’il choisisse de souffrir, mais il accepte librement la souffrance qui est la conséquence de son choix d’aimer jusqu’au bout les pécheurs que nous sommes et qui le rejettent. L’effort auquel est invité celui qui prie n’est pas de tension à partir de lui-même, mais un effort de passivité, d’ouverture à l’autre, malgré peut-être une insensibilité, une apparente sécheresse du cœur. Lui demeurer présent, malgré la distance éprouvée, sans se violenter soimême. « Le Christ pâtit dans l’humanité. » Il s’agit de son humanité d’abord, mais en arrière-fond il y a la souffrance de toute l’humanité, victime de l’injustice, la violence, la haine, la persécution, l’oppression, la maladie… Jésus entre dans ce monde de l’injustice, lui le Juste. POINT 5. « La divinité se cache » : elle n’est pas absente, mais s’efface, laisse les hommes à leur liberté destructrice et en est la victime. « Il pourrait anéantir ses ennemis », dont je suis, dans la mesure où je suis pécheur. Mais il veut faire de nous ses amis et accepte pour cela de continuer à nous aimer, alors que nous le rejetons. « C’est par ses blessures que nous sommes guéris », comme dit la lettre de saint Pierre (1 P 2, 24). C’est en acceptant de se laisser anéantir par ses ennemis, en continuant à aimer, que le Christ nous restaure et nous recrée. En arrière-fond, il y a tout le mystère du silence de Dieu, de son absence apparente, de sa mort, dans l’athéisme et l’incroyance d’aujourd’hui.

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INTRODUCTION À LA TROISIÈME SEMAINE

POINT 6. « Considérer comment il pâtit tout cela pour mes péchés, etc., et ce que moi je dois faire et pâtir pour lui » : invitation à la réciprocité de l’amour. Nous retrouvons la grâce demandée en troisième semaine (ES 203).

Le fruit de la contemplation de la Passion La manière de recevoir le fruit peut varier beaucoup d’une personne à l’autre, d’une époque à l’autre de notre vie, selon les différentes situations que nous traversons. Certains peuvent être consolés, touchés dans une communion et même jusqu’aux larmes en accompagnant le Christ dans sa Passion. D’autres peuvent partager la Passion et les souffrances de Jésus en se trouvant secs et sans éprouver de sentiments. Parfois dans une grande confusion : comment est-ce possible, cette souffrance de Dieu ? Mais en même temps, on veut demeurer là, sans vouloir en finir, même si une partie de soi-même résiste. C’est une manière très réelle de recevoir la grâce et le fruit de la contemplation de la Passion. On peut avoir le sentiment d’être devant un mur, une distance infranchissable. On voudrait éprouver une communion, mais c’est l’apparente insensibilité. Or, à l’intérieur de ce sentiment d’ennui, d’impuissance, d’aridité, de lassitude, de blocage, le mystère opère : cela peut être une manière vraie de communier au mystère du Christ en agonie, abandonné, ligoté. Le mystère opère ce qu’il révèle. Et on ne choisit jamais sa souffrance. La souffrance reçue nous surprend toujours. Mais dans cette absence de sentiments repérables, la grâce de communion au Christ souffrant est donnée. On fait ici l’expérience du silence de Dieu, de son effacement (cf. point 5). Cette manière de recevoir la grâce peut purifier et pacifier notre impatience, notre agressivité, nos tentations de révolte ou de découragement, notre angoisse ou notre peur de la mort.

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Comment organiser ces semaines Voir cela avec la personne qui nous accompagne. Lors de la contemplation de la Cène, il est bon de se rendre compte que c’est le moment où le Christ s’offre au Père et choisit d’aller jusqu’au bout de l’amour (« Il les aima jusqu’au bout » ; « Ceci est mon corps, livré pour vous »). On pourrait dire : Jésus vit son élection. En réciprocité, je suis invité à Lui offrir mon élection, pour qu’Il la prenne dans la sienne. Il me donne ainsi de pouvoir livrer ma vie avec Lui. Ma vie devient son corps. Avec lui, je peux dire de mon élection : Ceci est mon corps, livré… En clôturant les contemplations de la Troisième Semaine, il est bon de prendre le temps d’être présent à Marie, dans sa maison après la mort de Jésus. Cela correspond un peu au Samedi saint de la liturgie pascale. Depuis la contemplation des mystères accomplis à la croix, Marie est de nouveau très présente, comme en vie cachée. « Considérer sa solitude, sa douleur et son épuisement », demander d’être reçu dans son intimité. Elle est dans la nuit et les ténèbres, dans l’épuisement de tout son être, mais abandonnée à son Fils dans la mort et ainsi au Père. Sa foi abandonnée fait confiance au-delà du désespoir humain. Elle s’en remet à Dieu. C’est depuis la profondeur de son abandon dans la nuit que le Christ ressuscité se manifestera à elle. En contraste, la solitude des disciples est faite d’incompréhension, de déception, de désillusion, de désespoir. Ils meurent à leurs rêves d’un Messie glorieux. Leur désarroi est total devant ce dénouement. La présence abandonnée à Dieu de Marie permet que se fraye un chemin dans leur cœur. Ils doivent passer d’une générosité naturelle déçue à un amour qui fait confiance. Une purification s’opère en eux qui prépare et rend possible leur rencontre avec le Ressuscité.

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Les mystères de la vie du Christ La Passion

• INTRODUCTION. Ci-dessous, nous vous proposons de méditer chaque jour la Passion en suivant le chemin proposé par Ignace. En effet, saint Ignace en reprenant les récits dans les différents évangiles nous guide selon l’intelligence qu’il en a. À certains moments, vous serez aidés à prier le récit évangélique lui-même. À d’autres, vous reprendrez plutôt les points de prière proposés par Ignace : faites selon ce qui vous aide le mieux à recevoir la grâce de la Passion. Il sera bon de faire une ou deux répétitions de chaque mystère en revenant ou en demeurant là où l’on a senti quelques connaissances ou sentiments spirituels, consolations ou désolations. • DURÉE DE L’ÉTAPE. Deux ou trois mystères par semaine, à voir avec la personne qui vous accompagne.

GRÂCE

À DEMANDER

> Demander la grâce de pouvoir être avec le Christ jusque dans sa Passion, sa solitude, et sa douleur.

DISPOSITION

À NOURRIR

> En toute chose, face à l’épreuve, entrer dans un regard de foi qui permet d’aller de l’avant dans la suite du Christ. > Consentir au mystère de la présence du Christ qui a tout pris sur

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lui (« C’est par ses blessures que nous sommes guéris »). > Accepter de découvrir dans la contradiction un chemin pour accomplir jusqu’au bout ma vocation et mon élection.

Pendant cette Troisième Semaine, saint Ignace nous recommande (ES 206) : – dès mon réveil, me représenter où je m’en vais et pour quoi faire ; repasser brièvement la contemplation que je vais faire, suivant le mystère dont il s’agit ; – me remettre souvent en mémoire les peines, fatigues et douleurs que le Christ notre Seigneur a supportées depuis l’instant de sa naissance jusqu’au mystère de la Passion où j’en suis actuellement ; – relire sa journée. • PREMIÈRE CONTEMPLATION (ES 190-199) Le Christ notre Seigneur allant de Béthanie à Jérusalem jusqu’à la dernière cène inclusivement (ES 289). Voir page 144 le détail des points pour la contemplation de la Cène. • Prière (ES 190) La prière préparatoire habituelle. • Premier préambule (ES 191) Se rappeler l’histoire. Ici, le Christ notre Seigneur, de Béthanie, envoya deux disciples à Jérusalem pour préparer la Cène. Puis il s’y rendit lui-même avec les autres disciples ; et, après avoir mangé l’agneau pascal et après avoir dîné, il leur lava les pieds, donna son très saint corps et son précieux sang à ses disciples, et leur adressa un discours, une fois Judas parti pour vendre son Seigneur. • Deuxième préambule (ES 192) Composition : voir le lieu. Ici : considérer le chemin de Béthanie à Jérusalem : est-il large, étroit, en plaine, etc. ? Également, le lieu de la Cène : est-il grand, petit, a-t-il tel ou tel aspect ?

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LES MYSTÈRES DE LA VIE DU CHRIST – LA PASSION

• Troisième préambule (ES 193) Demander ce que je veux. Ici : douleur, regret et confusion, parce que c’est pour mes péchés que le Seigneur va à la Passion. • Premier point (ES 194) Voir les personnages de la Cène, et, réfléchissant en moi-même, tâcher d’en tirer quelque profit. • Deuxième point Entendre ce qu’ils disent et en tirer également quelque profit. • Troisième point Regarder ce qu’ils font et tirer quelque profit. • Quatrième point (ES 195) Considérer, selon la scène que l’on contemple ce que le Christ notre Seigneur pâtit ou endure dans l’humanité, ou désire pâtir ou endurer. Commencer ici avec beaucoup de force et mettre tout mon effort à souffrir, m’attrister et pleurer. Y travailler de la même manière dans les points suivants.

☞ Il ne s’agit pas d’un effort volontariste à partir de moi, mais d’une attention à me laisser intégrer à la souffrance du Christ selon ce qui me sera donné. Un effort de passivité. M’ouvrir au Christ, lui être présent et y demeurer. • Cinquième point (ES 196) Considérer comment la divinité se cache, c’est-à-dire comment elle pourrait anéantir ses ennemis et ne le fait pas, et comment elle laisse la très sacrée humanité pâtir ou endurer tant d’extrême cruauté. • Sixième point (ES 197) Considérer comment il pâtit ou endure tout cela pour mes péchés, etc., et ce que, moi, je dois faire et pâtir ou endurer pour lui.

☞ Les quatrième, cinquième et sixième points peuvent être utilisés tout au long des contemplations de Troisième Semaine (cf. p. 138).

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• Colloque (ES 198) Terminer par un colloque au Christ notre Seigneur. À la fin, un Notre Père. • Remarque (ES 199) On notera, comme cela a déjà été expliqué en partie, que dans les colloques nous devons parler et demander suivant le point où nous en sommes, c’est-à-dire selon que je me trouve tenté ou consolé, selon que je désire avoir telle ou telle vertu, selon que je veux disposer de moi pour tel ou tel parti, selon que je veux souffrir ou me réjouir de ce que je contemple, enfin en demandant ce que je désire avec plus d’efficacité sur certains points particuliers. De la sorte, on peut faire un seul colloque au Christ notre Seigneur, ou bien si le sujet et la dévotion y portent, on peut faire trois colloques, un à la Mère, un autre au Fils, un autre au Père, suivant la forme indiquée en seconde semaine dans la méditation des trois Hommes, avec la note qui y fait suite. LA CÈNE (Mt 25, 20-30 ; Jn 13, 1-30) (ES 289) • Premier Il mangea l’agneau pascal, avec ses douze Apôtres, auxquels il annonça sa mort : « En vérité, je vous le dis, l’un de vous va me vendre. » • Deuxième Il lava les pieds des disciples, même ceux de Judas, en commençant par saint Pierre, qui, considérant la majesté du Seigneur et sa propre bassesse, ne voulait pas accepter et disait : « Toi, Seigneur, me laver les pieds ! » Mais saint Pierre ne savait pas que, par là, il donnait un exemple d’humilité. C’est pourquoi il dit : « Je vous ai donné l’exemple pour que vous agissiez comme j’ai agi. » • Troisième Il institua le très saint sacrifice de l’Eucharistie, en signe suprême de son amour, et dit : « Prenez et mangez. » La Cène achevée, Judas sort pour aller vendre le Christ notre Seigneur.

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LES MYSTÈRES DE LA VIE DU CHRIST – LA PASSION

LES

CÈNE JUSQU’AU JARDIN INCLUSI(Mt 26, 30-46 ; MC 14, 26-42) (ES 200-203 et 290) • Prière La prière préparatoire habituelle. • Premier préambule L’histoire. Ici, le Christ notre Seigneur descendit avec ses onze disciples, du mont Sion où il avait fait la Cène, vers la vallée de Josaphat. Il en laisse huit en un endroit du jardin, et, se mettant en prière, il sue une sueur semblable à des gouttes de sang. Après avoir à trois reprises prié le Père, il réveille ses trois disciples. Puis, à sa voix, ses ennemis tombent ; Judas lui donne le baiser de paix ; saint Pierre tranche l’oreille de Malchus et le Christ la remet à sa place. Il est alors arrêté comme un malfaiteur ; on l’entraîne au fond de la vallée, pour remonter ensuite la pente, vers la maison d’Anne. • Deuxième préambule Voir le lieu. Ici, considérer le chemin, du Mont Sion à la vallée de Josaphat, ainsi que le jardin : est-il large, long, a-t-il tel ou tel aspect ? • Troisième préambule Demander ce que je veux. Il s’agit précisément dans la Passion de demander la douleur avec le Christ douloureux, le déchirement avec le Christ déchiré, les larmes, la souffrance intérieure pour tant de souffrance que le Christ a supporté pour moi. • Premier La Cène terminée, et après avoir chanté l’hymne, le Seigneur s’en alla au mont des Oliviers avec ses disciples remplis de peur. Il laissa les huit à Gethsémani, en disant : « Asseyez-vous ici, tandis que je vais là-bas pour prier. » • Deuxième Accompagné de saint Pierre, saint Jacques et saint Jean, il pria trois fois le Seigneur en disant : « Père, si cela peut se faire, que ce calice passe loin de moi ; cependant, que ce ne soit pas ma volonté qui se fasse mais la tienne. » Et, étant en agonie, il priait plus instamment. MYSTÈRES ACCOMPLIS DEPUIS LA

VEMENT

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• Troisième Il en vint à une telle peur qu’il disait : « Mon âme est triste jusqu’à la mort. » Et il sua du sang en telle abondance que saint Luc dit : « Sa sueur était comme des gouttes de sang qui tombaient à terre », ce qui suppose que ses vêtements étaient déjà pleins de sang. LES

MYSTÈRES ACCOMPLIS DEPUIS LE JARDIN JUSQU’À LA MAISON D’ANNE

(Mt 26, 47-58 ; Lc 22, 47-53 ; Mc 14, 43-54) (ES 291) • Premier Le Seigneur se laisse donner un baiser par Judas et prendre comme un brigand. À ceux qui l’arrêtent, il dit : « Vous êtes sortis pour me prendre comme un brigand, avec des bâtons et des armes, alors que chaque jour j’étais avec vous dans le Temple à enseigner, et vous ne m’avez pas pris. » Et quand il dit : « Qui cherchezvous ? », les ennemis tombèrent à terre. • Deuxième Saint Pierre frappa un serviteur du Grand Prêtre ; le très doux Seigneur lui dit : « Remets ton épée à sa place », et il guérit la blessure du serviteur. • Troisième Abandonné par ses disciples, il est amené à Anne ; là, saint Pierre, qui l’avait suivi de loin, le renia une fois ; et on donna au Christ une gifle, en lui disant : « Est-ce ainsi que tu réponds au Grand Prêtre ? » INCLUSIVEMENT

LES MYSTÈRES ACCOMPLIS DEPUIS LA MAISON D’ANNE JUSQU’À CELLE DE CAÏPHE INCLUSIVEMENT (Jn 18, 24-27) (ES 292) • Premier On le conduit, garrotté, de la maison d’Anne jusqu’à celle de Caïphe, où saint Pierre le renia deux fois, puis, regardé par le Seigneur, « il sortit dehors et pleura amèrement » (Mt 26, 57-58.69-75 ; Lc 22, 54-62). • Deuxième Jésus demeura lié toute cette nuit-là.

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LES MYSTÈRES DE LA VIE DU CHRIST – LA PASSION

• Troisième Outre cela, ceux qui le tenaient prisonnier se moquaient de lui, le frappaient, lui couvraient le visage, lui donnaient des soufflets et l’interrogeaient : « Prophétise-nous, qui est celui qui t’a frappé ? » Et ils proféraient contre lui de semblables blasphèmes (Mt 26, 67-68 ; Lc 22, 63-65). LES MYSTÈRES ACCOMPLIS DEPUIS LA MAISON DE CAÏPHE JUSQU’À CELLE DE PILATE INCLUSIVEMENT (Mt 27, 1-2.11-26 ; Lc 23, 1-5.13-25 ; Mc 15, 1-15) (ES 293) • Premier Toute la foule des juifs le conduit à Pilate, et devant lui l’accuse en disant : « Nous avons trouvé cet homme causant la perte de notre peuple et interdisant de payer le tribut à César. » • Deuxième Après l’avoir examiné à deux reprises, Pilate dit : « Pour moi, je ne trouve aucune faute. » • Troisième On lui préféra Barabbas, le brigand : « Ils crièrent tous en disant : Ne relâche pas celui-ci, mais Barabbas. » LES MYSTÈRES ACCOMPLIS DEPUIS LA MAISON DE PILATE JUSQU’À CELLE D’HÉRODE (Lc 23, 7-11) (ES 294) • Premier Pilate envoya Jésus, le Galiléen, à Hérode, tétrarque de Galilée. • Deuxième Hérode, curieux, l’interrogea longuement ; et lui, ne répondait rien bien que les scribes et les prêtres l’accusent avec insistance. • Troisième Hérode, avec sa troupe, le traita avec mépris et le revêtit d’une robe blanche.

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LES MYSTÈRES ACCOMPLIS DEPUIS LA MAISON D’HÉRODE JUSQU’À CELLE PILATE (Mt 27, 26-30 ; Lc 23, 11-12, 20-23 ; Mc 15, 15-20 ; Jn 19, 1-6) (ES 295) • Premier Hérode le fait renvoyer à Pilate, et ils en devinrent amis, eux qui auparavant étaient ennemis. • Deuxième Pilate prit Jésus et le fit flageller. Les soldats firent une couronne d’épines et la placèrent sur sa tête. Après l’avoir vêtu de pourpre, ils s’approchaient de lui et disaient : « Salut, roi des juifs. » Et ils lui donnaient des soufflets. • Troisième Il le fit sortir devant tout le monde : « Jésus sortit alors, couronné d’épines et vêtu d’écarlate. Pilate leur dit : « Voici l’homme. » En le voyant, les grands prêtres criaient et disaient : « Crucifie-le, crucifie-le ! » DE

LES MYSTÈRES ACCOMPLIS DEPUIS LA MAISON DE PILATE JUSQU’À LA CROIX INCLUSIVEMENT (Jn 19, 13-22) (ES 296) • Premier Pilate, siégeant comme juge, leur remit Jésus pour qu’ils le crucifient, après que les juifs l’eurent renié pour roi en disant : « Nous n’avons de roi que César. » • Deuxième Il portait la croix sur ses épaules. Comme il ne pouvait la porter, on força Simon de Cyrène à la porter derrière Jésus. • Troisième On le crucifia au milieu de deux brigands. On plaça cette inscription : « Jésus de Nazareth, roi des juifs. » LES MYSTÈRES ACCOMPLIS SUR LA CROIX (Jn 19, 23-37) (ES 297) • Premier Il prononça sept paroles sur la croix : – il pria pour ceux qui le crucifiaient (Lc 23, 34) ; – il pardonna au brigand (Lc 23, 43) ;

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LES MYSTÈRES DE LA VIE DU CHRIST – LA PASSION

– il recommanda saint Jean à sa Mère et la Mère à saint Jean ; – il dit à voix haute : « J’ai soif », et on lui donna du fiel et du vinaigre ; – il dit qu’il était abandonné (Mt 27, 46) ; – il dit : « C’est achevé » ; – il dit : « Père, en tes mains je remets mon esprit » (Lc 23, 46). • Deuxième Le soleil fut obscurci, les rochers brisés, les tombes ouvertes, le voile du Temple déchiré en deux parties de haut en bas. • Troisième On blasphème contre lui en disant : « Tu es celui qui détruit le Temple de Dieu ; descends de la croix. » Ses vêtements furent partagés ; son côté fut blessé par la lance et il coula de l’eau et du sang. LES MYSTÈRES ACCOMPLIS DEPUIS LA CROIX JUSQU’AU SÉPULCRE INCLUSIVEMENT (Jn 19, 38-42) (ES 298) • Premier Il fut enlevé de la croix par Joseph et Nicodème, en présence de sa Mère douloureuse. • Deuxième Son corps fut porté au sépulcre, oint et enseveli. • Troisième On y plaça des gardes. DEPUIS LE TOMBEAU INCLUSIVEMENT JUSQU’À LA MAISON OÙ NOTRE DAME SE RENDIT APRÈS QUE SON FILS EUT ÉTÉ ENSEVELI (ES 208 e) Saint Ignace nous invite, après l’ensevelissement, à suivre Notre Dame jusque dans sa maison et à faire une répétition de toute la Passion. Puis considérer autant qu’on le pourra, comment le corps très saint du Christ notre Seigneur resta détaché et séparé de l’âme, et où et comment il fut enseveli. Considérer la solitude de Notre Dame, dans une si grande douleur et épuisement ; puis d’autre part, celle des disciples. ☞ Voir ce qui a été dit à la fin de l’introduction à la Troisième Semaine page 140. Il est bon de demeurer deux ou trois jours dans ce mystère.

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Notes : 1. Regarder comment nous pouvons, au cours des contemplations, présenter au Seigneur qui veut vivre la Cène et la Passion pour nous sauver, son appel pour notre vie, notre élection. 2. Regarder comment nous pouvons déjà tâcher de la vivre dès aujourd’hui, en l’incarnant dans un « être avec » le Christ qui traverse les souffrances comme les joies. 3. Recevoir de Dieu ce que nous vivons dans notre prière comme dans notre vie : c’est de cette manière qu’il nous est donné de vivre la suite du Christ dans sa Passion. 4. Essayer de regarder dans la foi les peines des hommes, proches ou lointains, à la lumière de la croix de Jésus. Par-delà le scandale, tâcher d’entrer dans un regard de confiance, demeurant vulnérable, mais avec un cœur réconcilié, en y voyant autant de lieux où il continue de vivre son mystère jusqu’au bout. Ce qu’il vit pour nous, il le vit pour nos proches comme pour le lointain.


Quatrième Semaine



Introduction à la Quatrième Semaine

Où en sommes-nous sur le chemin des Exercices spirituels ? En Troisième et Quatrième Semaines, nous laissons notre élection — et donc la décision d’ordonner notre vie — s’intégrer au mystère pascal de Jésus qui livre sa vie pour nous sauver du monde ancien du péché. Nous l’avons longuement contemplé dans sa Passion, et nous lui avons demandé la grâce de compatir avec lui comme il le voudra. Il peut être bon de relire ce qui a été donné au début de l’introduction de la Troisième Semaine. Nous avons laissé ainsi sa Passion faire mourir progressivement en nous ce qu’il y a encore de désordre, de résistance à sa volonté sur nous. C’est du fond de cette mort, du fond de « notre enfer » où Jésus vient nous rejoindre, qu’il nous donne de naître à sa vie nouvelle de Ressuscité. Nous entrons ainsi en ce que saint Ignace appelle « la Quatrième Semaine ».

La grâce demandée La Quatrième Semaine nous introduit dans la contemplation des apparitions du Christ à Notre Dame et aux disciples. Et nous demandons la grâce de communier à l’allégresse et à la joie du Christ ressuscité qui se manifeste à ses amis. Cette grâce est reçue de manière très diverse selon ce que chacun est et selon la situation humaine et spirituelle qu’il vit en ce moment de son existence. Et la joie qui en surgit est plus profonde que ce que je peux en ressentir.

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L’expérience sensible que je fais de la joie n’est pas identique à la réalité de la joie. La joie est d’abord celle de Dieu le Père, du Christ ressuscité, des disciples, et je demande d’y communier, d’y être reçu, d’être intégré dans la vie et le corps du Christ ressuscité et de communier à sa joie. Chacun reçoit ce qui est bon pour lui en ce moment. Et il y a un lien profond entre la joie d’accomplir la volonté de Dieu sur ma vie (mon élection) et la joie de la vie ressuscitée du Christ.

La première contemplation : Comment le Christ notre Seigneur apparut à Notre Dame (ES 218-225) C’est la seule contemplation de Quatrième Semaine que saint Ignace développe. En lisant le premier préambule (ES 219) il apparaît que nous sommes d’emblée situés dans le mouvement cosmique de l’histoire du salut qui s’accomplit dans la descente du Christ aux enfers. L’accueil du Ressuscité par Notre Dame est inséparable de cette vision cosmique. L’apparition à « sa mère bénie », loin d’être à comprendre comme une anecdote émouvante de retrouvailles que la dévotion chrétienne aurait ajoutée aux autres apparitions, est inscrite dans l’accomplissement du dessein universel de salut de Dieu. Mais en même temps, nous sommes introduits dans ce mystère de gloire par la plus humble et petite porte. Nous ne contemplons pas le Ressuscité dans tout son éclat, mais nous sommes simplement invités à contempler la rencontre avec la Vierge Marie. C’est ainsi que nous entrons dans le monde nouveau de la Résurrection. (Les autres apparitions sont d’ailleurs, elles aussi, de modestes rencontres avec des personnes ou avec la communauté.) Toute la gloire du Christ ressuscité est présente dans cet événement caché, inconnu, pas même évoqué par l’évangile, vécu dans le quotidien de la maison de Marie, dans un climat de prière, de foi confiante et aimante (cf. deuxième préambule, ES 220). Mystère tout entier d’intériorité, d’intimité. Du fond des ténèbres qui l’habitent dans la foi de son cœur abandonné, la nuit s’illumine pour Notre Dame de la présence de son Fils dans

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INTRODUCTION À LA QUATRIÈME SEMAINE

une intimité et une communion totales. Les points 4 et 5 de cette contemplation (ES 223 et 224) aident la personne qui contemple à reconnaître que la gloire du Christ ressuscité lui est donnée en cette humble rencontre dans la maison de Marie. Il est invité à y communier par la foi, à recevoir part à cette joie humble, et à reconnaître que c’est de cette même manière que le Christ ressuscité se manifeste aussi dans sa propre vie quotidienne. C’est ainsi qu’il peut recevoir progressivement la grâce de Quatrième Semaine (ES 221) et entrer dans cette amitié avec le Christ qui vient le rejoindre dans sa réalité de tous les jours. Et nous pouvons nous demander comment le Christ m’apparaît à moi. Est-ce que j’apprends à reconnaître sa présence dans mon quotidien ?

La suite des apparitions et leur sens Ignace invite ensuite à contempler l’ensemble des apparitions données dans les Écritures. Vous trouverez les points qu’il propose ci-dessous. Les apparitions se déroulent habituellement en quatre étapes : – Situation confuse chez les disciples ; – Initiative du Christ ressuscité ; – Reconnaissance par les disciples ; – Envoi et « disparition » du Christ. Jésus ressuscité éduque ainsi ses disciples désemparés à sa nouvelle présence, invisible aux yeux de chair (cf. Saint-Exupéry : « L’essentiel est invisible pour les yeux, on ne voit bien qu’avec le cœur »). Ce sont les yeux du cœur, purifiés et ordonnés par l’élection, confirmés dans la contemplation de la Passion, qui reconnaissent le Christ vivant présent dans leur vie de chaque jour. Les apparitions déploient cette nouvelle présence du Christ dans toutes ses dimensions, jusqu’à l’univers entier. Il y a d’abord cinq apparitions à des personnes (ES 299-303), car Jésus ressuscité vient d’abord mettre debout chacun de manière unique et intime.

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Ensuite quatre apparitions à la communauté (ES 304-307) (au Cénacle et en Galilée), car il édifie son Église qui est son corps. Pour se déployer finalement à tout l’univers (ES 308-311). Et la quatrième semaine se termine par l’Ascension : le Christ qui disparaît aux yeux des disciples est vivant auprès du Père et vient sans cesse dans nos vies et dans notre monde (ES 312). Chaque personne est rejointe là où elle est, dans sa situation humaine, douloureuse ou harmonieuse, elle est remise debout et envoyée témoigner par sa vie et sa parole. Il en est de même pour la communauté. Mais tout est vécu dans une grande simplicité et humilité. Pour reconnaître le Christ, il faut que le cœur soit préparé, ouvert. Ses ennemis ne le verront pas. Il ne s’impose jamais, mais s’offre à notre liberté. Nous sommes invités à reconnaître sa présence et à découvrir la joie de Dieu dans les humbles rencontres et événements de notre vie quotidienne, notre Galilée. Comme Jésus qui a envoyé ses disciples en Galilée : « Là vous me verrez ». Dans la mesure où notre élection a bien mûri, elle sera confirmée par les « vrais et saints effets de la Résurrection » (point 4 de l’apparition à Notre Dame, ES 223), éprouvés dans notre vie quotidienne : paix et joie — pas nécessairement éprouvés sensiblement — à la place qui est la mienne et que j’assume pleinement, avec une certaine capacité de « trouver goût et douceur dans les choses créées, de les voir « en Dieu », de les aimer d’un cœur purifié ». C’est ainsi que le Christ ressuscité « remplit le rôle de consolateur (point 5, ES 224), comme un ami console son ami. » Cela n’abolit pas les difficultés, les souffrances et les croix de la vie quotidienne, mais ces réalités sont reçues et vécues dans une lumière nouvelle, car c’est là aussi que l’Esprit de Jésus vient répandre sa douce lumière et son amitié qui « console ». C’est ainsi que la contemplation du Christ ressuscité dans ses apparitions nous conduit progressivement à ce que les Exercices spirituels appellent la « contemplation pour obtenir l’amour ». Car le Christ éduque progressivement ses disciples et la personne qui fait les Exercices à sa nouvelle présence. Le nouveau regard et la nouvelle manière d’être qui sont donnés à prier dans la contemplation pour

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INTRODUCTION À LA QUATRIÈME SEMAINE

obtenir l’amour sont ainsi préparés. Nous nous découvrons peu à peu membres du corps vivant de Jésus ressuscité, intégrés dans la création restaurée, renouvelée, et associés avec Jésus à l’œuvre du Père (cf. contemplation du Règne). Dans cette lumière s’éclairent aussi les règles pour avoir le vrai sens de l’Église (cf. Annexe 17).

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Pour aider à prier en Quatrième Semaine

Le passage en Quatrième Semaine Il ne s’agit plus tellement d’assister à une scène en dehors de moi, comme en deuxième semaine. Mais davantage à partir des différents récits d’apparition que je contemple, de recevoir la grâce de me réjouir de la joie du Christ ressuscité et de ses frères, d’entrer dans cette scène, et de reconnaître son visage au plus intime de moimême, sa vie en moi au cœur de ma vie. Reconnaître et faire quelque peu l’expérience qu’il ressuscite en moi, au fond de mon acceptation de mourir avec lui, de laisser mourir les désordres, le vieil homme, qu’il me donne sa vie, qu’il me recrée, que je suis nouvellement créé. Je suis intégré au corps ressuscité de Jésus en qui toute chose est créée. Je me reçois de lui — dans une communion fraternelle avec tous. C’est un nouveau commencement, une nouvelle création. C’est le mystère de notre identité en Lui, notre nom nouveau.

Sens de la Résurrection et des apparitions Les évangiles ne décrivent pas la Résurrection. Personne n’a rien vu. C’est un événement au-delà du sensible, du tangible. Événement essentiellement spirituel. Le Christ n’est plus lié à son corps par l’espace et le temps. Son corps ressuscité emplit le monde. Il apparaît et disparaît. Les apparitions sont des manifestations sensibles,

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POUR AIDER À PRIER EN QUATRIÈME SEMAINE

visibles, tangibles de la réalité profonde et de la présence spirituelle du Christ vivant qui remplit le monde de son corps ressuscité. Les « apparitions » ne sont pas un retour à une situation passée, avant la Passion. Les apparitions ne sont pas une manière de confondre ses ennemis. Les apparitions ne sont pas non plus une présence pour prouver à ses ennemis qu’il est vivant. Il ne se manifeste pas aux ennemis. Le Christ ne se manifeste qu’à ses amis. Il faut que leur cœur soit préparé. Il faut un cœur préparé pour reconnaître le Christ vivant dans sa vie. Souvent ses amis commencent par ne pas le reconnaître. Car ils sont encore trop enfermés en euxmêmes, leur tristesse, leur déception, etc. Les apparitions sont toujours une rencontre avec quelqu’un. On ne contemple pas la Résurrection en elle-même. Jésus se manifeste à chacun de ses disciples. Et à chacun dans le respect de ce qu’elle ou qu’il est. L’apparition à Madeleine est très différente de celle aux disciples d’Emmaüs. Chacun est rejoint par le Christ dans sa situation humaine et spirituelle, du fond de sa tristesse, sa déception, son repli sur soi. Et chacun de nous, nous apprenons à le reconnaître vivant en nos propres vies en recevant le témoignage de ceux qui l’ont vu. Il se donne à notre regard à travers ceux qui l’ont vu. C’est ainsi que nous naissons à la foi vivante, que nous sommes enfantés à la foi, dans la communauté mariale des chrétiens, c’est-à-dire dans l’Église. On ne reconnaît Jésus ressuscité qu’en communiant à ceux qui l’ont déjà reconnu, c’est-à-dire dans l’Église. Les apparitions sont un moment de transition, une éducation à cette nouvelle manière d’être du Christ ressuscité « toujours avec nous ». Éducation à sa présence, à son intimité nouvelle. « Je m’en vais et je reviens ». «Je suis avec vous tous les jours ». Nous devenons un avec lui, nous vivons de sa vie qui naît en nous du fond de notre mort au vieil homme avec Lui : « votre vie est cachée avec le Christ en Dieu ». Nous devenons le Corps du Christ. Nous donnons au Christ son Corps. Temps d’apprentissage de la présence du Christ au cœur de nos vies et du monde. Les différentes apparitions manifestent les diverses manières dont le Christ rejoint les hommes, ses disciples, dans leur décourage-

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ment, le repli sur eux-mêmes et leur donne de découvrir sa présence de Ressuscité, son intimité, sa vie au cœur de leur existence. Je vis en toi. Tu vis de ma vie. Je suis ressuscité et pour toujours avec toi. Nous nous sommes laissés sauver par lui, lui remettant nos péchés, nos désordres, nos faiblesses, notre incapacité d’aimer, notre impossibilité d’enlever notre pierre, de sortir seuls de notre tombeau. Il nous éduque maintenant à découvrir que c’est lui qui ressuscite, nous donne sa vie à travers nos fautes, qu’il nous fait vivre en lui, qu’il vient demeurer en nous et nous en lui. Il nous invite à oser croire en sa Résurrection dans nos vies, plus forte que toutes nos faiblesses, et qui jamais ne nous quittera. Fidélité du Christ ressuscité dans nos fragilités humaines.

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Les mystères de la vie du Christ La Résurrection

• DURÉE DE L’ÉTAPE. Un mois environ. Le temps que mûrisse une confiance paisible en la fin des Exercices, en dialogue avec la personne qui vous accompagne.

GRÂCE

À DEMANDER

> D’éprouver intensément l’allégresse et la joie pour tant de gloire et de joie du Christ notre Seigneur.

DISPOSITION

À NOURRIR

> Recevoir de suivre le Christ dans sa joie de Ressuscité, comme j’ai essayé de le suivre dans sa Passion. > Apprendre à Le trouver paisiblement en toute chose. > Reconnaître les signes du Royaume, traces de Jésus Christ qui poursuit son œuvre de salut.

Saint Ignace nous recommande (ES 229) : – Dès mon réveil, me mettre en face de la contemplation que j’ai à faire, cherchant l’amour et l’allégresse pour tant de joie et d’allégresse du Christ notre Seigneur. – Appliquer la mémoire et la pensée aux sujets qui provoquent le bonheur, l’allégresse et la joie spirituelle, tels que la gloire.

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– Tirer parti de la lumière et des agréments de la saison, tels que la fraîcheur en été, ou le soleil et la chaleur en hiver, dans la mesure où l’âme pense ou estime que cela peut l’aider pour se réjouir en son Créateur et Rédempteur. • PREMIÈRE CONTEMPLATION : L’APPARITION GNEUR À NOTRE DAME (ES 218-225)

DU

CHRIST

NOTRE

SEI-

☞ Référez-vous au commentaire p. 154. (ES 299) Il apparut à la Vierge Marie. Sans doute l’Écriture n’en

parle pas, mais elle le laisse entendre en disant qu’il apparut à tant d’autres. Car l’Écriture suppose que nous avons de l’intelligence, selon ce qui est écrit : « Êtes-vous, vous aussi, sans intelligence ? » • La prière préparatoire habituelle (ES 46) La prière préparatoire consiste à demander la grâce à Dieu notre Seigneur, pour que toutes mes intentions, mes actions et mes opérations soient purement ordonnées au service et à la louange de sa divine Majesté. • Premier préambule (ES 219) L’histoire. Ici, après que le Christ eut expiré en croix, son corps demeura séparé de son âme, mais toujours uni à la divinité ; son âme bienheureuse descendit aux enfers, également unie à la divinité. Il tire de là les âmes des justes, revient au sépulcre, et, ressuscité, il apparut à sa Mère bénie, en corps et en âme. • Deuxième préambule (ES 220) Composition : voir le lieu. Ici, voir la disposition du saint sépulcre ; l’emplacement de la maison de Notre Dame : en regarder toutes les parties en détail, avec la chambre, l’oratoire, etc.

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LES MYSTÈRES DE LA VIE DU CHRIST – LA RÉSURRECTION

• Troisième préambule (ES 221) Demander ce que je veux. Ici demander la grâce afin d’éprouver intensément l’allégresse et la joie pour tant de gloire et de joie du Christ notre Seigneur. • Premier point (ES 222) Voir les personnages et réfléchissant en moi-même tâcher d’en tirer profit. • Deuxième point Entendre ce qu’ils disent et en tirer également quelque profit. • Troisième point Regarder ce qu’ils font et tirer quelque profit. • Quatrième point (ES 223) Considérer comment la divinité, qui paraissait se cacher dans la Passion, apparaît maintenant et se montre si miraculeusement dans la très sainte Résurrection par ses vrais et très saints effets. • Cinquième point (ES 224) Regarder le rôle de consolateur que remplit le Christ notre Seigneur. Le comparer à la façon dont les amis ont l’habitude de se consoler mutuellement. • Colloque (ES 225) Terminer par un ou plusieurs colloques suivant le point où l’on en est. Puis un Notre Père. LA SECONDE APPARITION (Mc 16, 1-11) (ES 300) • Premier De grand matin, Marie-Madeleine, Marie de Jacques et Salomé vont au tombeau, en disant : « Qui nous enlèvera la pierre de la porte du tombeau ? »

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• Deuxième Elles voient la pierre enlevée et l’ange qui leur dit : « C’est Jésus le Nazaréen que vous cherchez. Il est déjà ressuscité, il n’est pas ici. » • Troisième Il apparut à Marie, qui demeura à côté du sépulcre après le départ des autres. LA TROISIÈME APPARITION (Mt 28, 8-10) (ES 301) • Premier Les Marie sortent du tombeau avec beaucoup de crainte et de joie, dans l’intention d’annoncer aux disciples la Résurrection du Seigneur. • Deuxième Le Christ notre Seigneur leur apparut en chemin et leur dit : « Salut. » Et elles s’approchèrent, se jetèrent à ses pieds et l’adorèrent. • Troisième Jésus leur dit : « Ne craignez point ; allez dire à mes frères qu’ils aillent en Galilée, et là ils me verront. » LA QUATRIÈME APPARITION (Lc 24, 9-12.33-34) (ES 302) • Premier Ayant appris des femmes que le Christ était ressuscité, saint Pierre alla en hâte au tombeau. • Deuxième Étant entré dans le tombeau, il vit seulement les linges dont avait été couvert le corps du Christ notre Seigneur, et rien d’autre. • Troisième Tandis que saint Pierre pensait à tout cela, le Christ lui apparut. C’est pourquoi les Apôtres disaient : « C’est bien vrai, le Seigneur est ressuscité et il est apparu à Simon. »

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LES MYSTÈRES DE LA VIE DU CHRIST – LA RÉSURRECTION

LA CINQUIÈME APPARITION (Lc 24, 13-35) (ES 303) • Premier Il apparaît aux disciples qui allaient à Emmaüs en parlant du Christ. • Deuxième Il les reprend, en leur montrant par les Écritures que le Christ devait mourir et ressusciter : « Ô cœurs sans intelligence et lents à croire tout ce qu’ont dit les prophètes ! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît pour entrer dans sa gloire ? » • Troisième Sur leur prière, il s’arrête là et demeure avec eux, jusqu’à ce que, en leur donnant la communion, il disparaisse. Pour eux, s’en retournant, ils dirent aux disciples comment ils l’avaient reconnu à la communion. LA SIXIÈME APPARITION (Jn 20, 19-23) (ES 304) • Premier Les disciples se trouvaient réunis « par crainte des Juifs », à l’exception de saint Thomas. • Deuxième Jésus leur apparut, toutes portes closes, et, se tenant au milieu d’eux, il dit : « La paix soit avec vous. » • Troisième Il leur donne l’Esprit Saint en leur disant : « Recevez l’Esprit Saint. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. » LA SEPTIÈME APPARITION (Jn 20, 24-29) (ES 305) • Premier Saint Thomas, incrédule, car il était absent lors de l’apparition précédente, dit : « Si je ne le vois pas, je ne le croirai pas. » • Deuxième Jésus lui apparaît, huit jours plus tard, toutes portes closes, et il dit à saint Thomas : « Porte ton doigt ici et vois la vérité ; ne sois pas incrédule, mais croyant. »

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• Troisième Saint Thomas crut et dit : « Mon Seigneur et mon Dieu. » Le Christ lui dit : « Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru. » LA HUITIÈME APPARITION (Jn 21, 1-17) (ES 306) • Premier Jésus apparaît à sept de ses disciples qui étaient en train de pêcher. Pendant toute la nuit, ils n’avaient rien pris, et, jetant le filet sur son ordre, « ils n’arrivaient pas à le retirer, à cause du grand nombre de poissons ». • Deuxième À ce miracle, saint Jean le reconnut, et il dit à saint Pierre : « C’est le Seigneur ! » Celui-ci se jeta à l’eau et vint au Christ. • Troisième Il leur donna à manger une part de poisson rôti et un rayon de miel. il confia les brebis à saint Pierre, après avoir éprouvé à trois reprises sa charité. Et il lui dit : « Pais mes brebis. » LA NEUVIÈME APPARITION (Mt 28, 16-20) (ES 307) • Premier Les disciples, sur l’ordre du Seigneur, vont au mont Thabor. • Deuxième Le Christ leur apparaît et dit : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. » • Troisième Il les envoya prêcher dans le monde entier en disant : « Allez et enseignez tous les peuples, les baptisant au nom du Père et du Fils et de l’Esprit Saint. » L’ASCENSION DU CHRIST NOTRE SEIGNEUR (Ac 1, 1-12) (ES 312) • Premier Après que, durant quarante jours, il apparut aux Apôtres, donnant beaucoup de preuves et de signes et parlant du Royaume de Dieu, il leur ordonna d’attendre à Jérusalem l’Esprit Saint promis.

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LES MYSTÈRES DE LA VIE DU CHRIST – LA RÉSURRECTION

• Deuxième Il les emmena au mont des Oliviers ; en leur présence il fut élevé, et une nuée le fit disparaître à leurs yeux. • Troisième Tandis qu’ils regardaient vers le ciel, les anges leur dirent : « Hommes de Galilée, pourquoi êtes-vous là à regarder vers le ciel ? Ce Jésus, qui est emporté hors de votre vue vers le ciel, viendra de la même manière que vous l’avez vu aller au ciel. »

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Pour aider au discernement de ce qui est vécu dans la prière en Quatrième Semaine

Pour être attentif à ce que vous vivez dans la prière en Quatrième Semaine, quelques questions peuvent aider : – Comment et où suis-je situé en ce moment de la retraite, et dans la contemplation des apparitions ? – Qu’elle est mon type de prière : plus rationnel, méditatif ou plus simple, contemplatif ? – Comment le Seigneur m’apparaît-il à moi ? Dans ses manifestations discrètes, délicates. Suis-je attentif à le reconnaître dans ma prière, dans la vie ? Il ne fait pas habituellement de signes extraordinaires, mais des touches discrètes : oser y croire. – Quels sont les mouvements des esprits ou les sentiments spirituels qui m’habitent ? En particulier, y a-t-il des motions de désolation ? – Comment le Seigneur vient-il me rejoindre dans mes lieux de désolation, s’il y en a (tristesse, déception, peur, doute, scepticisme, résistance, et vide : cf. les disciples au moment des apparitions de Jésus ressuscité), pour me manifester sa présence et me partager sa joie, sa confiance, sa paix… – Est-ce que je reçois part de quelque manière à la joie du Christ, comment ? Non pas d’abord la joie d’avoir fait une bonne élection, ou bien fait les Exercices, ou d’avoir passé l’épreuve de la Troisième Semaine, comme si la joie était une récompense ou

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POUR AIDER AU DISCERNEMENT DE CE QUI EST VÉCU DANS LA PRIÈRE

une compensation. Mais est-ce que je me trouve quelque peu heureux de la joie du Christ, d’être associé à lui, à son œuvre, par mon élection, et comme il le veut ? Cette joie est plus grande que ce qu’on peut en éprouver sensiblement. Elle est toute de gratuité de se trouver heureux de la joie de Dieu, de la joie du Christ, un peu comme la Vierge Marie. La source de cette joie n’est pas en nous, mais en lui, qui me prend avec lui, du plus profond de ma misère (cf. Pierre, etc.). Cette gratuité nous sort de nous-mêmes, nous donne d’habiter dans l’autre : cela évite tout narcissisme qui replierait sur soi. – La joie de Quatrième Semaine est liée à l’élection : joie d’accomplir ainsi dans ma vie la volonté de Dieu, d’ordonner ainsi toutes mes intentions, mes actions et mes opérations purement au service et à la louange de sa divine Majesté, même si c’est crucifiant. Il est important d’être attentif à cette joie et de la recevoir, au-delà de ce que je peux en éprouver sensiblement. Il y a un lien profond entre la joie de la gloire du Christ ressuscité et la joie d’avoir rencontré la volonté de Dieu sur sa vie, comme un chemin qui m’est offert et que je choisis, conscient de ma faiblesse mais sûr de Lui et pour cela déterminé. C’est la joie d’être intimement associé au Seigneur parce que je choisis de faire mourir en moi avec Lui les forces de mort du péché et du désordre pour vivre de sa Vie en moi. Par là je suis aussi inséré profondément dans son corps qui est l’Église.

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Se laisser conduire par le Ressuscité dans la vie de l’Esprit

• INTRODUCTION. Lien avec la contemplation des apparitions : les apparitions éduquent progressivement les disciples et le retraitant à la nouvelle présence du Christ ressuscité et préparent le nouveau regard et la nouvelle manière d’être qui sont donnés à prier et à vivre dans la contemplation pour obtenir l’amour. Car l’homme se découvre peu à peu membre du corps vivant de Jésus ressuscité, intégré dans la création restaurée, renouvelée. • DURÉE DE L’ÉTAPE. Le temps que l’on souhaite pour terminer les Exercices.

GRÂCE

À DEMANDER

> Demander une connaissance intérieure de tout le bien reçu, afin que, par une pleine reconnaissance, je puisse en tout aimer et servir sa divine Majesté.

DISPOSITION

À NOURRIR

> Apprendre à Le trouver paisiblement en toute chose. > Reconnaître les signes du Royaume, traces de Jésus Christ qui poursuit son œuvre de salut.

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SE LAISSER CONDUIRE PAR LE RESSUSCITÉ DANS LA VIE DE L’ESPRIT

• CONTEMPLATION POUR OBTENIR L’AMOUR (ES 230-237) (ES 230) Il est bon, d’abord, de remarquer deux choses : – l’amour doit se mettre dans les actes plus que dans les paroles ; – (ES 231) l’amour consiste en une communication mutuelle. C’est-à-dire que l’amant donne et communique à l’aimé son bien, ou une partie de son bien ou de son pouvoir ; de même, en retour, l’aimé à l’amant. De la sorte, si l’un possède la science, il la donnera à l’autre qui ne l’a pas ; de même pour les honneurs, ou pour les richesses; et cela mutuellement. • Prière Prière habituelle. • Premier préambule (ES 232) Composition de lieu. Ici, voir comment je suis devant Dieu notre Seigneur, les anges, les saints qui intercèdent pour moi. ☞ L’histoire : ce n’est plus l’évangile, c’est la vie même de celui qui prie. Le lieu : la référence n’est plus moi, mais Dieu notre Seigneur, dans la communion des saints : le monde nouveau (cf. Méditation du Règne, ES 98 ; et celle des « Trois Hommes », ES 151).

• Deuxième préambule (ES 233) Demander ce que je veux. Ici, demander une connaissance intérieure de tout le bien reçu, afin que, par une pleine reconnaissance, je puisse en tout aimer et servir sa divine Majesté. ☞ L’amour s’exprime dans le service. La reconnaissance est à l’origine de l’action.

• Premier point (ES 234) Me remettre en mémoire les bienfaits reçus: création, rédemption et dons particuliers. Peser avec beaucoup d’amour combien Dieu notre Seigneur a fait pour moi, combien il m’a donné de ce qu’il a; ensuite, combien le Seigneur désire se donner lui-même à moi autant qu’il le peut, selon son dessein divin.

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SEMAINE 1 2 3 4

Réfléchir alors en moi-même et considérer ce qu’en toute raison et justice je dois de mon côté offrir et donner à sa divine Majesté, tous mes biens et moi-même avec eux, comme quelqu’un qui offre en un grand amour : Prends, Seigneur, et reçois toute ma liberté, ma mémoire, mon intelligence et toute ma volonté, tout ce que j’ai et possède. Tu me l’a donné: à toi, Seigneur, je le rends. Tout est tien, disposes-en selon ton entière volonté. Donne-moi ton amour et ta grâce : c’est assez pour moi. • Deuxième point (ES 235) Regarder comment Dieu habite dans les créatures, dans les éléments par le don de l’être, dans les plantes par la croissance, et dans les animaux par la sensation, dans les hommes par le don de l’intelligence, et donc en moi, par le don de l’être, par la vie, par la sensation et par l’intelligence. Comment aussi il fait de moi son temple, m’ayant créé à la ressemblance et à l’image de sa divine Majesté. De nouveau, réfléchir en moi-même, de la façon indiquée dans le premier point, ou d’une autre que je sentirai meilleure. On fera de même pour chacun des points suivants. ☞ La présence et la permanence de Dieu à sa création (et à moi). Réintégration de toute la création dans le corps du Christ ressuscité qui emplit l’univers depuis l’Ascension. Mystère eucharistique d’intégration de tous les éléments du monde et de l’homme dans le corps glorieux du Seigneur.

• Troisième point (ES 236) Considérer comment Dieu peine et travaille pour moi, en toutes les choses créées sur la face de la terre, c’est-à-dire comment il se comporte à la façon de quelqu’un qui travaille, par exemple dans les cieux, les éléments, les plantes, les fruits, les troupeaux, etc., leur donnant l’être, la conservation, la croissance et la sensation, etc.

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SE LAISSER CONDUIRE PAR LE RESSUSCITÉ DANS LA VIE DE L’ESPRIT

Puis réfléchir en moi-même. ☞ Le travail et l’œuvre de Dieu en sa création et sa nouvelle création (et pour moi). Le serviteur, la femme qui enfante, le potier. Avec la participation laborieuse de l’homme.

• Quatrième point Regarder comment tous les biens et tous les dons descendent d’en haut ; comment ma puissance limitée descend de la puissance souveraine et infinie d’en haut ; et aussi la justice, la bonté, la tendresse, la miséricorde, etc. ; comme du soleil descendent les rayons, de la source les eaux, etc. Puis terminer en réfléchissant en moi-même, comme il est indiqué. Terminer par un colloque et un Notre Père. ☞ La communion et l’intimité de Dieu à son œuvre et en moi. Puissance, justice, bonté, tendresse sont maintenant en moi fruits de l’Esprit.

Notes : 1. Apprendre à reconnaître Dieu présent en tout et en tous ; dans la joie, offrir toute sa vie. 2. Accorder une attention particulière à la relecture de ses journées, en prenant le temps de vivre les dimensions d’attention à l’œuvre du Seigneur, de demande de pardon et d’orientation pour l’avenir (voir Annexe 3). 3. Avec son accompagnateur, commencer à envisager les moyens qui seront utiles pour rester vivant dans la foi et nécessaires pour entrer dans cette nouvelle étape des Exercices : la vie dans l’Esprit.

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Pour aider à terminer les Exercices

Ce qu’il est bon de recommander à celui qui termine les Exercices (Directoire Aquaviva de 1599) Celui qui quitte un lieu bien chauffé et retrouve l’air extérieur peut aisément se refroidir, à moins de prendre bien soin de garder contact avec la source de chaleur. Ainsi celui qui achève les Exercices et retourne à la vie courante et à ses relations habituelles peut-il très facilement perdre en peu de temps la lumière reçue et l’ardeur qui l’habite. En effet, tout ce qu’il a reçu et acquis de bon n’est pas encore fermement enraciné en lui, mais lui est donné comme une greffe fragile qui peut aisément s’étioler et dépérir. Dans ce cas, tout le fruit et tout le travail des Exercices s’évanouit. C’est pourquoi il faut recommander d’abord à celui qui achève les Exercices de faire grand cas de ce principe et de cette fondation de vie bonne et spirituelle creusée dans les Exercices avec la grâce de Dieu. Qu’il le reçoive de Dieu comme un bienfait et un trésor de grande valeur. Qu’il soit profondément convaincu que toute la lumière et toutes les connaissances acquises dans les Exercices lui sont données par Dieu notre Seigneur comme une manifestation de son Amour spécial pour lui ; qu’il veille à les garder et les faire croître comme un trésor précieux qui lui est confié. […] En deuxième lieu, il est bon qu’il comprenne qu’il n’a encore rien fait d’autre que de laisser Dieu semer la bonne semence dans son âme. Si cette semence n’est pas cultivée et conduite à maturité pour

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POUR AIDER À TERMINER LES EXERCICES

donner du fruit en son temps, ce qu’il a fait n’est rien, ou bien peu de chose. Qu’il veille donc à ce que cette semence ne soit pas mangée par les oiseaux, c’est-à-dire « l’ennemi de la nature humaine », ou qu’elle ne soit étouffée par les épines, c’est-à-dire par les pensées et les désirs terrestres et désordonnés. C’est pourquoi, qu’il évite non seulement le péché, mais leur occasion, et surtout ceux auxquels il était le plus enclin avant les Exercices. C’est avant tout contre eux qu’il doit s’armer, car, c’est sur ces pentes-là qu’il risque le plus facilement de glisser à nouveau. En troisième lieu, qu’on l’exhorte à conserver et à nourrir par des exercices spirituels le don qu’il a reçu. Il est bon de recommander surtout les suivants : – qu’il garde d’abord l’habitude de méditer chaque jour une demiheure, et une heure entière si possible. – en second lieu, qu’il fasse chaque jour l’examen de conscience pendant un quart d’heure. – qu’il communie et se confesse régulièrement. – qu’il choisisse un confesseur stable, qu’il l’accepte comme guide dans son chemin spirituel, et qu’il traite avec lui de tout ce qui regarde sa vie spirituelle. – qu’il lise de bons livres, et recherche les conversations d’hommes spirituels, et fuie absolument les relations qui lui sont néfastes. – qu’il ait le souci de progresser sans cesse, surtout en humilité, patience et charité.



Annexes



Annexe 1 Pour méditer un texte d’Écriture

Comment me laisser unifier par l’écoute de la Parole ? Car prier, ce n’est rien de moins que découvrir dans l’Écriture le mystère de ma vocation, et accepter de laisser cette Parole être efficace en opérant en moi ce qu’elle dit. • LA

PRÉPARATION DE LA PRIÈRE

• Fixer, avant de me mettre en prière : – le texte sur lequel je vais prier – la grâce que je crois devoir demander étant donné le point où j’en suis et ce que le texte me révèle de ce que je suis appelé à vivre – le lieu où je prierai – le temps que je prierai. • Laisser grandir en mon cœur le désir d’une vraie rencontre avec le Seigneur, et me rendre au lieu fixé • LA

PRIÈRE PRÉPARATOIRE

• Me mettre en présence de Dieu – Prendre conscience de ce que Dieu m’attend, et être là devant le Tout-Autre. « Ton Père est là qui te voit dans le secret. » Me laisser regarder par Dieu, et entrer dans ce regard qui est le sien. Poser un geste de respect, d’adoration.

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ANNEXE 1. POUR MÉDITER UN TEXTE D’ÉCRITURE

– Laisser remonter si nécessaire ce qui m’habite (soucis, joies, peines, préoccupations, visages) et le confier simplement à Dieu pour que ce ne soit plus mon affaire et que je puisse entrer moimême dans l’écoute de sa Parole. – Entrer dans une réelle disponibilité : « Me voici, Seigneur, je viens faire ta volonté. » • LES

PRÉAMBULES

• Me rappeler l’histoire que je vais prier • La composition du lieu – S’il s’agit d’une scène de l’Écriture, fixer mon imagination, en me rappelant l’histoire et en imaginant un lieu en rapport avec le texte ou en pensant à un tableau ou une image en rapport avec ce texte et me rendre présent à ce lieu. • Demander ce que je veux – Il est important de demander avec beaucoup de force ce que je veux. Le contenu de cette demande est toujours en rapport avec le chemin sur lequel le Seigneur m’attire et que j’ai encore à découvrir. Demander la grâce, c’est déjà m’engager autant que je le puis à vivre dans le sens du texte, tout en laissant le soin à Dieu lui-même d’opérer son œuvre en moi, œuvre que je découvre dans le texte. – Il y a une demande de grâce dont je dois tenir compte : celle que me proposent les Exercices, parce qu’elle oriente le sens de ma recherche pour m’aider à aller de l’avant. – Il peut être bon d’y ajouter une autre demande de grâce, plus particulière, en fonction de ce que je sens important pour moi aujourd’hui, ou en rapport avec le texte choisi.

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ANNEXE 1. POUR MÉDITER UN TEXTE D’ÉCRITURE

• LE CORPS DE L’ORAISON – S’il s’agit d’une histoire : regarder les personnages, la scène ; me rappeler qui ils sont, ce qu’ils ont vécu. Entrer ainsi dans leur mystère, en les comprenant intérieurement. – S’il s’agit d’un texte, le lire lentement, pour en suivre le déroulement. – Le reprendre séquence après séquence, phrase par phrase, en m’arrêtant même simplement sur un mot. – Laisser résonner ces mots en moi, et sentir ceux sur lesquels il est bon que je m’attarde parce qu’ils ont davantage d’écho : que signifient-ils dans cette histoire pour les personnages, quel effet ont-ils eu sur eux ? Et que signifient-ils dès lors pour moi ? Qu’estce qui dans ma vie est évoqué par là, m’y est promis et révélé ? – Peser le poids des mots, les goûter, m’en étonner, m’émerveiller, rester surpris et plein d’admiration : il y a quelque chose dans ce texte qui me révèle ce que Dieu opère en moi, qui me parle de notre relation. Y consentir. – Ne pas passer plus loin tant que cela n’est pas nécessaire ; le propre de la prière, c’est de demeurer sur ce qui me touche. Dans le silence de l’accueil, sans devoir tirer toujours de nouvelles idées ou croire qu’il est nécessaire d’avoir de nouvelles idées. Demeurer dans le silence face à Dieu, en laissant descendre ces mots en moi, c’est laisser Dieu transformer mon cœur et mon être. – Passer autant que possible de la tête au cœur : laisser les mots retentir non seulement dans ma tête, mais laisser mon cœur luimême s’émouvoir (même si la prière ne se mesure pas aux sentiments effectivement éprouvés) – Lire et relire si nécessaire, ruminer… comme Marie « qui conservait toutes ces choses en son cœur » (Lc 2, 19). • DIALOGUE LIBRE OU COLLOQUE Il n’y a pas d’alliance sans réponse au don qui m’est fait. Si le corps de l’oraison est comme le moment où je prends conscience, m’émerveille et savoure le mystère qui m’est révélé par la Parole, le

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ANNEXE 1. POUR MÉDITER UN TEXTE D’ÉCRITURE

colloque est le temps privilégié pour faire mémoire devant Dieu de ce que j’ai découvert et pour lui parler en réponse à ce que j’ai vu. Si le corps de l’oraison est davantage prise de conscience, accueil, acquiescement, temps laissé à Dieu pour le laisser me transformer, s’il est plutôt de l’ordre d’une passivité qui contemple l’œuvre de Dieu et y consent sans imaginer pouvoir la réaliser soi-même, le colloque est le moment de m’offrir tout entier devant un si grand don, en engageant toute ma liberté et toute ma volonté. Faire un colloque, c’est parler d’un je à un Tu, à partir de ce qui m’a été donné. Parler en demandant une grâce, ou un conseil, en parlant d’un souci, en demandant pardon… C’est aussi le temps de l’offrande où je m’offre sans réserve pour vivre ce que j’ai découvert, m’unissant au Père pour ne plus faire qu’un avec lui. Terminer par un Notre Père.

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Annexe 2 Pour relire sa prière

☞ Après la prière, prendre un temps de recul pour relire la manière dont on l’a vécue.

Prendre note de : – ce qui m’a aidé ou ne m’a pas aidé dans les manières de prier que j’ai choisies, afin d’adapter ma prière pour que je puisse trouver Dieu ; – des mouvements intérieurs que j’ai vécus : joie et paix, ou tristesse et trouble, facilités ou difficultés… (consolations, désolation) ; – les fruits ou grâces données : - telle lumière sur l’un ou l’autre aspect des mystères priés, - telle résistance ou tel combat spirituel. ☞ En préparant la rencontre avec l’accompagnateur, reprendre ses notes et en retenir l’essentiel

« Dans ces exercices spirituels, il vaut beaucoup mieux, alors qu’on recherche la volonté divine, que le Créateur se communique luimême à l’âme fidèle, l’enveloppant dans son amour et sa louange, et la disposant à entrer dans la voie où elle pourra mieux le servir à l’avenir » (ES 15, 3-4).

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Annexe 3 Pour relire sa journée (cf. ES 43)

☞ Prendre environ quinze minutes en fin de journée

• PREMIER TEMPS : se décentrer vers Dieu. Il s’agit de prendre un temps avec le Seigneur. Je me mets en sa présence. Je lui dis ma confiance et lui rends grâce, lui dis merci. Pour lui-même, pour moi-même, pour la vie, pour tous les signes d’amour, de tendresse, de paix, de joie perçus, reçus. Je regarde ma vie comme un don. • DEUXIÈME TEMPS : demander son Esprit. Dans cette relation de confiance et d’action de grâce avec le Seigneur, je lui demande sa lumière et son esprit pour pouvoir regarder et voir ma vie avec ses yeux, comme lui la voit. • TROISIÈME TEMPS : relire les événements, discerner les sentiments. Je parcours la journée. Que s’est-il passé (événements, rencontres, etc.) Comment ai-je vécu les choses ? Quels sentiments ont dominé : la joie, la paix, la confiance… ou plutôt le découragement, l’inquiétude, la tristesse, le trouble ? Pourquoi ? À travers tous ces sentiments qui ont accompagné ce que j’ai vécu, je cherche comment Dieu était présent, m’a fait signe, me conduit, qui il est pour moi, ses appels. • QUATRIÈME TEMPS : rendre grâce, demander, pardon. Je remercie pour tout ce qui a été bon, là où la vie a grandi en moi, où j’étais « ajusté ». Je demande pardon pour les résistances, les refus, le péché. Je me laisse réconcilier avec moi-même, avec les autres, avec Dieu. À travers le bon et

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ANNEXE 3. POUR RELIRE SA JOURNÉE

le moins bon, je reconnais et j’accueille ainsi l’amour de Dieu au concret de ma vie. • CINQUIÈME TEMPS : un regard vers l’avenir. Recentré, réorienté vers les autres et vers Dieu, je lui demande sa grâce et son inspiration pour demain, pour davantage vivre en sa présence. Terminer par un Notre Père. ☞ Noter dans son « Journal spirituel » quelques mots clés reprenant les choses importantes qui me sont apparues. En préparant la rencontre avec l’accompagnateur, reprendre ses notes et en retenir l’essentiel

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Annexe 4 Pour préparer la première rencontre avec l’accompagnateur

☞ La première rencontre avec l’accompagnateur consiste à faire connaissance et à établir la confiance. Aussi est-il bon de venir avec quelques lignes ou quelques étapes de son histoire, ce qui a habité ces derniers mois, ce avec quoi le retraitant vient en retraite et « pour quoi » (désirs).

– Quelles raisons et quels sentiments m’ont amené à m’inscrire dans cette expérience ? Qu’est-ce que j’en attends ? – Quelles dispositions je découvre en moi par rapport à la prière personnelle en silence ? – Y a-t-il des questions importantes que je me pose dans ce moment de ma vie ? Si j’en trouve plusieurs, essayer d’identifier un fil conducteur entre elles. – Dans tout cela, comment apparaît ma relation avec Dieu et avec les autres ?

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Annexe 5 Pour préparer le partage en groupe

☞ Si vous faites les Exercices dans la vie courante en groupe, les deux « Fiches pédagogiques » suivantes vous aideront à préparer et à vivre le partage.

• FICHE

POUR PRÉPARER LE PARTAGE

☞ Préparer pendant trente minutes. Faire une « contemplation-relecture » du mois écoulé : comme Marie qui gardait tout en son cœur et qui a pu le partager aux premiers disciples…

– Avec le Seigneur, revoir les moments, événements du mois écoulé (la vie, la prière, l’accompagnement…) – Comment ai-je vécu la prière ? – Ai-je pu entrer en relation avec les personnes contemplées dans les mystères ? – Quelles ont été mes joies ? – Quelles ont été mes difficultés ? – Où et comment le Seigneur a-t-il « parlé », été présent ? – Comment je prie ma vie ? Comment je vis ma prière ? Où et comment ai-je pu « voir Dieu en toute chose » ? – De cela, qu’est-ce que je veux partager aux autres ? ☞ Ne pas hésiter à partager vos pauvretés. Lorsque nous pourrons être les uns devant les autres aussi avec nos pauvretés, nous serons vraiment frères… sinon nous ne sommes là qu’en nous jetant à la figure nos richesses… et celles-ci ne font que renforcer nos barrières les uns devant les autres.

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ANNEXE 5. POUR PRÉPARER LE PARTAGE EN GROUPE

S’accepter petit et pauvre devant mon frère, c’est lui faire confiance. Ne pas hésiter à partager aussi ce qui vous a aidés… car cela peut aider les autres. L’enjeu de ce partage, c’est de permettre de plus en plus que la vie de l’Esprit puisse circuler entre nous et nous faire vivre. Étant ensemble, nous sommes convaincus que nous visons une mystérieuse communion qui fait que d’une façon ou de l’autre la grâce qui m’est faite, dans la richesse comme dans la pauvreté, est faite aussi à nos frères et sœurs : pouvoir la partager, c’est lui donner de pouvoir se vivre.

• FICHE POUR FAVORISER L’EXPRESSION ET L’ÉCOUTE – L’attitude principale du groupe de partage est une écoute respectueuse et reconnaissante. – Chaque personne est experte de sa propre expérience. – Chacun parle à tour de rôle, dans la liberté. Partagez ce que vous pouvez. Ne vous livrez pas davantage que vous ne le souhaitez. L’écoute est une forme importante de participation. Si vous choisissez de ne pas parler, dites simplement : « Cette fois, je passe mon tour. » – Parlez sous forme de « je » et non de « nous » ou de « on ». – Décrivez votre expérience de manière brève et claire. Le petit groupe de partage n’est pas le lieu approprié pour faire un discours, convertir les autres à votre point de vue ou imposer aux autres vos idées favorites. Ce n’est pas non plus le lieu approprié pour discuter longuement, ni pour résoudre des problèmes, ni pour porter secours à quelqu’un, ni pour interférer avec ce qu’un autre a dit. – Des temps de silence sont appropriés et nécessaires. – Respecter ce qui est confidentiel. Ne « citez » pas quelqu’un en dehors du groupe.

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Annexe 6 Vocabulaire utilisé dans le « Principe et Fondement »

PRINCIPE

FONDEMENT

RESPECTER

NOTRE SEIGNEUR

ÂME INDIFFÉRENCE

Énonce un préalable théorique considéré par Ignace comme universellement accepté : « L’homme n’est pas sa fin, il est ordonné pour… » Énonce un préalable pratique constitutif de l’être de l’homme, de sa liberté et des choses ; considéré également par Ignace comme universellement accepté. (ou vénérer) « Il s’agit de laisser l’espace nécessaire à la liberté de l’autre, regarder l’autre tel qu’il est dans sa différence, et permettre ainsi une relation dans la vérité et la liberté : c’est traiter Dieu en Dieu. » Marque une relation de dépendance : maîtrise de Dieu sur l’homme et l’univers comme un bien consenti (en partie) de personne à personne. « Serviteur » est son corollaire à entendre, pour Ignace, dans le sens d’une intimité faite à quelqu’un devenant par appel un proche, un compagnon, un ami. Dans le sens concret de l’homme dans tout son être. Il ne s’agit pas de ne pas préférer, mais de ne pas s’attacher : il s’agit de la liberté du désir. On peut

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ANNEXE 6. VOCABULAIRE UTILISÉ DANS LE « PRINCIPE ET FONDEMENT »

LIBRE ARBITRE

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remplacer le terme par « liberté intérieure ». Il ne s’agit pas de rendre les choses indifférentes (parce qu’elles sont porteuses de la Bonté du Créateur), mais de nous rendre indifférent ou libre. Notre capacité de choix dans le processus d’une décision. Exprime qu’il ne s’agit pas de choisir entre un bien et un mal mais entre deux biens. Notre liberté ne recouvre pas tous les possibles : la liberté n’a pas à choisir là où elle est déjà engagée (par exemple, dans le mariage ou tout autre état de vie déjà engagé).


Annexe 7 « Prier ma vie – Vivre ma prière »

• VIVRE – Prendre conscience de la manière dont je suis affecté par la vie. Écouter tout ce retentissement des événements en moi. Y être attentif, m’en réjouir, ne pas les craindre, en prendre note. – Oser laisser remonter devant Dieu tout ce que je suis, y compris mes difficultés à « lâcher prise », à faire confiance à Dieu. – Partager, dans le cadre de l’accompagnement, ce que je mets devant Dieu comme désirs profonds et désordres. Partager aussi mes craintes, mes hésitations, mes manques de confiance. • CONSEILS UTILES – Dans la relecture, faire particulièrement attention à la manière dont j’ai été affecté par les événements et les rencontres ; accepter de venir avec toutes ces joies, ces peines et ces faux-fuyants devant mon Seigneur. – Parler avec mon accompagnateur de ce qui dans ma vie attend les lumières du Seigneur, de ce qui me fait penser que ceci ou cela ne devrait pas en faire l’objet. – Parler avec mon accompagnateur de ma perception du « Principe et Fondement » d’Ignace : m’éclaire-t-il ? Me dérange-t-il ? – Que je prie le soir ou le matin, je ne commence pas ma journée sans l’orienter à partir de ce que j’ai découvert dans ma prière précédente ; les fruits découverts sont soit une lumière pour ma journée, soit une grâce à désirer, chercher et demander. Ainsi je pourrai vivre ma journée dans une plus grande interpénétration entre ma vie et ma prière.

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Annexe 8 Dimension affective du péché : « Mes illusions et déceptions »

Pour prendre en compte la dimension affective en moi du péché

• MES

ILLUSIONS ET DÉCEPTIONS

• Voir de quoi il s’agit Ce qui nous éloigne de Dieu, ce ne sont peut-être pas tant les péchés dont nous avons conscience, que bien plutôt notre attachement à des idéaux et des modèles de perfection fabriqués par nousmêmes. Pour les réaliser nous concevons sans cesse des projets auxquels nous renonçons ensuite. Il s’ensuit dès lors une déception. Aussi longtemps que nous faisons dépendre notre valeur personnelle de ces idéaux, il nous sera impossible de sortir de ce cercle vicieux ; le chemin du salut peut commencer par la reconnaissance devant Dieu et devant nous-mêmes de notre misère : nous expérimenterons par là que la vérité libère. • Grâce à demander Je demande à Dieu la grâce de m’ouvrir les yeux sur mes illusions et de me confier entièrement à Lui, notre unique Sauveur.

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ANNEXE 8. DIMENSION AFFECTIVE DU PÉCHÉ : « MES ILLUSIONS ET DÉCEPTIONS »

• Des textes pour prier – Ps 77 : Dieu n’agit pas comme je l’avais imaginé. Puis-je ressentir la déception du psalmiste et, comme lui, regarder les actes de salut dans l’histoire, pour demeurer réceptif à une nouvelle démarche de Dieu ? – Répétition : Quels idéaux et espoirs n’ont pas été réalisés jusqu’ici dans ma vie ? Puis-je les présenter à Dieu, pour qu’Il les réalise ou non, selon sa volonté ? – Jn 2, 1-12 : Comme les disciples, je suis invité aux noces. Le vin vient à me manquer. Je m’adresse à Jésus. Suis-je capable de croire comme Marie, que le Seigneur fera quelque chose, même sans que je n’y aie aucun droit ? – Jn 3, 1-9 : Il ne s’agit pas seulement d’amender ma vie, mais bien de naître à nouveau. Est-ce que je m’en remets à Dieu et à son Esprit ? – Jn 4, 1-26 : Jésus amène la Samaritaine à la vérité de sa vie et à reconnaître le Sauveur. Suis-je prêt, moi aussi, à me laisser conduire de la sorte ? – Répétition : Quelle est l’eau que je cherche ? Quelles sont les solutions de remplacement auxquelles je recours sans cesse ? Quel aveu peut devenir pour moi l’entrée dans la libération ? – Répétition : À quelles fausses attentes dois-je renoncer ? Est-ce que je me laisse offrir l’espérance authentique ? • Relire ma journée – Quelles sont pour moi les causes de déception et de résignation ? – Comment est-ce que je réagis ? – Comment est-ce que je les gère ? Extrait de « Je veux que tu nous serves », Éd. Fidélité, Namur, 1990

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Annexe 9 Dimension affective du péché : « Guérison des blessures, de l’amertume et du dégoût de la vie »

Pour prendre en compte la dimension affective en moi du péché

• GUÉRISON

DES BLESSURES, DE L’AMERTUME ET DU DÉGOÛT DE LA VIE

• De quoi il s’agit Des blessures non guéries, des échecs non reconnus, des larmes non versées, une injustice subie, passée sous silence, tout cela rétrécit la vie, parfois la bloque, l’empoisonne même. De Jésus, on rapporte plus de guérisons que de pardons de péchés. Souvent le malade a dû parcourir plusieurs étapes et souvent d’autres personnes y jouent un rôle, en offrant de l’aide, l’occasion ou la contradiction. Dans notre vie aussi, des blessures de l’âme remontant souvent bien loin, des symptômes de maladies physiques, une rancune entretenue ou une brouille avec d’autres peuvent être liés et se trouver à l’origine du dégoût de la vie ou de la dureté de cœur. Les récits évangéliques de guérisons peuvent nous aider à nous adresser, nous aussi à Jésus, comme des blessés, pour trouver auprès de Lui guérison et réconciliation.

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ANNEXE 9. DIMENSION AFFECTIVE DU PÉCHÉ : « GUÉRISON DES BLESSURES, ETC. »

• Grâce à demander Je demande à Jésus de me montrer avec délicatesse mes blessures refoulées, mes déceptions mal acceptées, ma rancune envers certaines personnes et institutions, et de me conduire vers un chemin de guérison et de réconciliation. • Textes pour prier – Mc 2, 1-12 : Où suis-je paralysé ? Est-ce que je me laisse porter vers Jésus ? Qui pourrait me porter vers Lui ? Pourrais-je demander cela à quelqu’un ? – Mc 5, 24-34 : Quel est mon fardeau traîné depuis longtemps ? Quel aveu me ferait honte ? – Répétition : Le chemin vers la guérison demande souvent beaucoup de patience. – Lc 19, 1-10 : Je me sens trop petit et pas à la hauteur : en quel domaine ? Que fais-je pour entrer en contact avec Jésus ? – Répétition – Mt 5, 21-26 : Je passe en revue les personnes avec qui j’ai vécu ou vis actuellement, et considère qui a quelque chose contre moi ou contre qui j’ai quelque chose. J’expose ces relations à Jésus et demande de me réconcilier. – Répétition • Relire ma journée – Quels sont les points où je me sens bloqué ou non réconcilié ? – À quels moments réapparaissent des symptômes de maladie ? Extrait de « Je veux que tu nous serves », Éd. Fidélité, Namur, 1990

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Annexe 10 Dimension affective du péché : « Réaction envers les résistances et les angoisses »

Pour prendre en compte la dimension affective en moi du péché

• RÉACTION

ENVERS LES RÉSISTANCES ET LES ANGOISSES

• Voir de quoi il s’agit Nous sommes tellement habitués à de nombreux blocages et étroites restrictions que nous pouvons difficilement nous imaginer une vie différente. L’inconnu, toutefois, fait naître en nous de l’incertitude et de l’angoisse, même s’il s’y trouve l’occasion d’une vie plus abondante. Dès lors, la question de Jésus : « Veux-tu être guéri ? » (Jn 5, 6) n’est pas de simple rhétorique. La réponse à pareille question se heurte peut-être en nous à des obstacles intérieurs. Prier avec ceux-ci, les exposer à Jésus et Lui demander de les éliminer constitue, dès lors, une étape décisive vers la guérison. • Grâce à demander Je demande à Jésus de m’accorder le courage d’avouer en toute honnêteté mes obstacles et angoisses ; je Lui expose ceux dont je prends conscience pour qu’il les élimine ; je Lui demande avec insistance de me guérir et de me libérer.

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ANNEXE 10. DIMENSION AFFECTIVE DU PÉCHÉ : « RÉACTION… »

• Des textes pour prier – Jn 5, 1-9 : La guérison d’un paralytique. Est-ce que je souhaite être guéri ? Quelles sont mes hésitations et réticences ? Puis-je les exposer à Jésus ? – Mc 10, 46-52 : Suis-je capable de dire clairement à Jésus ce qu’Il devrait me faire ? Je me laisse apaiser, par qui ou par quoi ? – Répétition – Jn 11, 1-44 : Même la mort est incapable de limiter le pouvoir de Jésus d’accorder la plénitude de la vie. – Répétition – Mt 12, 9-21 : La solidarité de Jésus avec les malheureux et les malades est un motif pour l’éliminer. C’est ainsi qu’il est le serviteur de Yahvé, « le bien-aimé en qui Yahvé a trouvé sa complaisance ». – Réflexion : Quelle est ma pratique de la pénitence et de la célébration de la réconciliation ? Est-elle correcte ? Est-ce que je désire y changer quelque chose ? • Relire ma journée – Qu’est-ce que je préférerais régler « seul »? – C’est précisément cela que je veux présenter à Jésus ou dont je veux parler avec quelqu’un. Extrait de « Je veux que tu nous serves », Éd. Fidélité, Namur, 1990

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Annexe 11 Textes d’Écriture pour aider à prier le péché

Ignace n’en suggère pas. L’Histoire Sainte qui est en jeu ici, c’est l’histoire sainte de l’exercitant. Il y a danger de se « distraire » par la méditation de l’Écriture. Cependant il peut être bon parfois de s’aider de textes d’Écriture qui nourrissent ce chemin. À condition qu’ils ne soient pas prétexte à fuir l’entrée dans le monde du péché et de mon péché. • SUGGESTION

DE TEXTES

• Pour le premier exercice – Gn 3, 1-24 (la Chute) ; Gn 4, 1-16 (Caïn et Abel) ; Gn 6, 5 – 9, 17 (Noé : déluge et Alliance) ; Gn 11, 1-9 (tour de Babel). – Rm 1, 16 – 3, 21. – Ba 1, 15 – 3, 8 (le peuple exilé confesse ses péchés). – Is 1, 2-4.16-18 ; 5, 1-7. – Jr 2. – Ez 34, 1-10 (les mauvais pasteurs). – Dn 3, 24-43 (confession des péchés). – Ps 14 [13], 53 [52], 79 [78], 106 [105], 69 [68], 38 [37]. – Rm 5 – 6. – Colloque ES 53 : Ep 2, 13-16 ; Ga 2, 20 ; Ph 2, 5-8 ; 1 Jn 3, 16 ; 4, 911 ; Is 53. – Le Christ dans ce monde de péché guérit : Lc 15 ; Mt 8 ; 9 ; Lc 10, 29-37 (le bon Samaritain).

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ANNEXE 11. TEXTES D’ÉCRITURE POUR AIDER À PRIER LE PÉCHÉ

• Pour le deuxième exercice (péché personnel) – 2 S 11 – 12 (péché de David). – Ez 16 (histoire symbolique d’Israël). – Os 2 ; 11 ; 14, 2-10. – Confession des péchés : Is 59 ; 63, 7 – 64 ; Rm 7, 14-25 ; 1 Jn 1, 8 – 2, 2 ; Ap 2, 4-5 ; 3, 15 ; Ps 6 ; 25 [24] ; 39 [38] ; 80 [79]. – Pardon : Ps 51 [50] ; 32 [31] ; 103 [102] ; 130 [129] ; 65 [64] ; 86 [85] ; 80 [89] ; 85 [84] ; Is 54, 1-10. – Ez 36, 25-32 (cœur de chair) ; 37 (ossements desséchés).

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Annexe 12 Note à propos de la confession générale (ES 44)

« Elle se fera de préférence vers la fin des exercices de Première semaine ou après les exercices de Première semaine » (fin ES 44). Donc, ne pas vouloir se confesser trop vite. Laisser mûrir les choses. Que la miséricorde puisse « prendre corps ». Il faut du temps pour cela. Afin que le sacrement de réconciliation soit un acte de foi affective (ce qui ne veut pas dire sensible) en la miséricorde et un acte de réconciliation ecclésiale. Le sacrement : à la fois rencontre du Christ en lui-même et en son Corps qui est l’Église, que j’ai blessé par mon péché (dimension ecclésiale et fraternelle). • COMMENT SE PRÉPARER PROGRESSIVEMENT ? Par exemple : – Inscrire au fur et à mesure sur une feuille les péchés revenus à la mémoire. – S’aider d’un examen de conscience sobre, si cela aide. – Parfois un entretien préalable sur tel point plus délicat peut aider à la préparation à la confession. – Prendre le temps d’un exercice pour la préparer en la priant. • MATIÈRE DE L’AVEU – Ne pas vouloir tout dire, être exhaustif, mais exprimer avec précision chrétienne ce qui sera venu à la mémoire durant les journées de Première Semaine.

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ANNEXE 12. NOTE À PROPOS DE LA CONFESSION GÉNÉRALE

– Exprimer ce que je vois comme plus important. – Pas de recherche inquiète, mais manifestation simple de ce qui ne va pas en moi, de ce en quoi je ne me trouve pas content devant Dieu. – Il peut être bon de commencer par confesser quelques dons reçus. La bonté du Seigneur en telle situation. Action de grâce pour ce que le Seigneur a fait. – Confesser les obstacles profonds que le Seigneur me révèle en ce moment de ma vie. Là où je résiste davantage à Dieu dans ma vie. Ce qui me touche profondément et où j’ai besoin d’être pardonné et guéri. – Et expliciter quelques points qui précisent ces obstacles.

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Annexe 13 Pour aider la contemplation évangélique

« Tu m’as séduit… et je me suis laissé séduire »

• LA

PERSONNE DE JÉSUS

SAUVEUR

☞ Il s’agit de suivre Jésus en son Histoire et de la laisser éclairer la nôtre. C’est une histoire qui est arrivée et qui m’arrive ! Nous sommes en terre chrétienne et sur cette terre se passe quelque chose qui me concerne.

Le chemin de l’homme, notre chemin vers Dieu (et son chemin vers nous) passe par l’Humanité du Christ — le Verbe fait chair — contemplée dans ses gestes, ses paroles, son regard, ses silences… tous porteurs pour moi de Révélation et de Salut. L’événement « passé » — les mystères de la vie du Christ réalisés dans l’Esprit Saint — devient dans l’action actuelle de ce même Esprit un aujourd’hui de grâce, de lumière, de vie. « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie. » Contempler les mystères de la vie du Christ, c’est donc — et c’est l’essentiel de la prière dans laquelle nous entrons — prendre ce chemin pour y recevoir la vérité de ma vie maintenant. Comment « ne pas être sourd à son appel » ? Me tenir là où il résonne ! Comment « être prompt et diligent à accomplir la volonté de Dieu » ? Sinon en entrant dans une connaissance intérieure, amoureuse de Celui qui m’invite à sa suite ! C’est là tout le « travail » de la contemplation : m’exposer à l’action de l’Esprit à l’œuvre dans la vie du Christ, dans la vie de Jésus dans l’Évangile, et toujours à l’œuvre aujourd’hui en moi, pour m’y introduire plus profondément selon le dessein du Père.

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ANNEXE 13. POUR AIDER LA CONTEMPLATION ÉVANGÉLIQUE

Cette « exposition » de moi-même au mystère prendra la forme d’une rencontre. • Une rencontre – se prépare ; – se déroule selon un certain « rite » ; – se savoure ; – et laisse en moi des traces. C’est comme « aller en pèlerinage » « quelque part », mais pas n’importe où ! Ignace dit — comme une préparation du cœur — « me représenter l’endroit où je vais et devant qui » (ES 131). • Les étapes – La prière préparatoire sera — selon la manière propre de chacun — de toujours se remettre dans l’attitude fondamentale de la disponibilité, de la liberté intérieure, pour que « toutes mes intentions… soient purement ordonnées au service et à la louange » de Dieu. – Trois étapes nous conduisent au seuil du mystère. Trois étapes plus ou moins longues, mais dont l’importance n’est pas à négliger, que du contraire. Évoquer l’histoire, c’est de l’histoire du Christ qu’il s’agit et de l’aujourd’hui de la mienne en Lui. C’est l’Histoire sainte, une histoire où Dieu intervient et où les hommes ont à dire et à faire quelque chose. Histoire qui a ses racines « à la plénitude des temps ». Je suis conduit à l’aujourd’hui de Dieu. Maintenant. ➋ Maintenant, mais aussi ici, sur un chemin qui conduit à un lieu où se donne le mystère à contempler. La composition de lieu, c’est bien plus qu’un effort d’imagination et tout le contraire d’une fuite dans l’imaginaire, « le petit cinéma intérieur ». Une belle icône peut aider, mais le but est au-delà de l’image, c’est de percevoir déjà la qualité spirituelle de ce « quelque part » où je suis conduit (la ru-

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ANNEXE 13. POUR AIDER LA CONTEMPLATION ÉVANGÉLIQUE

desse du chemin qui va de Nazareth à Bethléem ; la nudité de la grotte…). Un chemin toujours qui me fait quitter mon « chez moi » et un lieu où demeurer et contempler. Demeurer et contempler, mais pourquoi ? ➌ C’est alors qu’il faut « demander ce que je veux ». La grâce sans mesure que je ne reçois qu’en la demandant ! Ici (et durant toute la deuxième semaine) une triple mais unique grâce : - une « co-naissance » intérieure de Jésus - dans l’amour grandissant de lui - pour « le suivre » (ne pas être sourd à son appel, mais prompt et diligent) Une connaissance intérieure de…, une croissance dans l’amour de…, une suite de Jésus. Ainsi, le début de la contemplation est un chemin qui — dans l’histoire qui est celle du Christ et la mienne, dans le lieu où se propose la demeure de ma prière et dans la reconnaissance du désir profond de la grâce — conduit au sanctuaire : le mystère lui-même du Christ, là où a lieu la rencontre. – Une rencontre, c’est toujours affaire de personnes, de relation à une personne, d’intimité réciproque avec la personne rencontrée. Cette rencontre elle aussi va connaître des approches successives. D’où les trois moments suggérés par la contemplation ignatienne : voir les personnes ; ➋ entendre ce qu’elles disent (ou peuvent dire) ; ➌ regarder ce qu’elles font. « Voir »… de loin encore peut-être, mais s’approcher et les « entendre » et encore « être affecté par leurs actes » (« ce qu’elles font »). Je ne reste pas extérieur au mystère contemplé. Celui-ci me touche, me mobilise au plus profond de moi, m’invite à glisser ma propre vie dans cette vie qui se découvre à moi. – Car — et cet aspect de la contemplation est capital — ce que je vois des personnes, ce que je leur entends dire, les actes qu’elles posent se réfléchissent en moi (ne veut pas dire « réfléchir intel-

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ANNEXE 13. POUR AIDER LA CONTEMPLATION ÉVANGÉLIQUE

lectuellement »), résonnent en moi (ne veut pas dire « raisonner ») et me font aussi réagir. Et du milieu de toute cette vie — qui est l’œuvre de l’Esprit Saint en moi et de ma correspondance (ou résistance) à son inspiration — voilà que me vient une parole qui m’est ici et maintenant adressée et à laquelle je réponds. La connaissance cordiale de Jésus « qui pour moi vient de naître à Bethléem » augmente mon amour pour lui, et que serait cet amour mien s’il ne me porte à choisir, vouloir, désirer imiter le sien, selon ce que Lui-même me montre de son mystère. C’est ce que les Exercices appellent le « colloque ». Le mystère contemplé opère en moi ce qu’il me donne à voir, à entendre, à regarder. La rencontre d’une personne — si rencontre il y a — ne me laisse pas inchangé. Il en va de même, bien plus encore, dans la contemplation, acte spirituel fort, dans lequel la mémoire, l’intelligence, la volonté, toute ma liberté, sont « puissamment » modifiées par le rendez-vous accordé et accepté avec un « aujourd’hui » de l’histoire de Jésus Christ. C’est tout le mystère de Dieu qui se donne en chacun des mystères contemplés, chacun des gestes, chacune des paroles, des silences de Jésus : « Qui me voit voit le Père. » C’est l’œuvre de l’Esprit Saint dans la contemplation. Aussi ce pèlerinage, cette rencontre, ce rendez-vous ne se termine-t-il pas seulement dans le colloque où je m’exprime en cœur à cœur, mais il se laisse encore éprouver et confirmer dans la prière du Notre Père, qui « ex-hausse » toute méditation ou toute contemplation dans la prière chrétienne.

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Annexe 14 Pour aider à prier les trois sortes d’humilité

Contenu La première sorte d’humilité (ES 165) suppose la fidélité de l’homme à la loi divine. La première semaine des Exercices spirituels conduit à cette attitude. La deuxième sorte d’humilité (ES 166) suppose la mise en état de liberté et « d’indifférence » pour pouvoir choisir ce que Dieu veut. La deuxième semaine des Exercices avec la méditation des « Trois Hommes » conduit à cette attitude. Ces deux premières sortes d’humilité concernent des attitudes déjà acceptées par le retraitant. Elles sont indispensables pour s’engager dans le travail de l’élection. Mais Ignace invite à creuser encore, comme si un chemin inconnu s’ouvrait dans la longue contemplation du Seigneur Jésus. La troisième sorte d’humilité (ES 167) est une attitude de préférence aimante pour le Seigneur pauvre et humilié (et non pas une préférence pour la pauvreté et l’humiliation !). L’humilité n’est pas entendue ici au sens d’une vertu morale, mais elle signifie la déprise de soi, le dépouillement de soi-même, auxquels la contemplation et l’amour du Seigneur Jésus permettent d’accéder.

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ANNEXE 14. POUR AIDER À PRIER LES TROIS SORTES D’HUMILITÉ

Sens et but de cette considération La méditation des « Étendards » a éclairé l’intelligence et sa lucidité spirituelle (ES 146). Celle des « Trois Hommes » a vérifié la simplicité, la disponibilité de la volonté au service de Dieu notre Seigneur (ES 155). La considération des Trois Humilités et spécialement de la troisième (ES 167) veut toucher le cœur de la personne en retraite. Les deux premières humilités risquent de nous maintenir encore dans une logique moralisante du plus parfait et de la gloire abstraite de Dieu. Dans la troisième sorte, nous sommes invités à passer au plan d’une logique de l’amour. La considération du troisième mode d’humilité visera donc pour sa part à vérifier et nourrir l’attachement au Christ pauvre et humilié (ES 167). Cette préférence est tout entière une grâce à demander (ES 168) et en aucune manière une décision à prendre. Depuis le début de la deuxième semaine, le retraitant a déjà été orienté comme par osmose vers la demande de cette grâce. L’humilité révélée dans la contemplation de l’Incarnation, la pauvreté de la Nativité, la prophétie de Syméon, la banalité de Nazareth et de manière plus explicite les colloques des Étendards le plaçaient devant la loi fondamentale du Royaume et son chemin opposé aux honneurs du « monde ». La grâce de la troisième humilité est l’aboutissement de cette pente de son cœur et de son désir d’être avec le Christ couvert d’opprobres et tenu pour insensé et fou. Et celui qui demande cette grâce la reçoit selon ce qui est bon pour lui en ce moment. L’attitude orientée vers le troisième mode d’humilité est le critère fondamental et l’arrière-fond des préférences et des décisions chrétiennes. Elle rappelle l’importance de la réceptivité immédiate au Christ dans la réalité sobre et paisible de son visage humilié. C’est dans cette lumière et ce climat que le retraitant peut commencer le travail de l’élection.

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ANNEXE 14. POUR AIDER À PRIER LES TROIS SORTES D’HUMILITÉ

Comment faire cette considération ? Noter que ce n’est pas une méditation ni une contemplation, mais une considération à faire de temps en temps tout au long de la journée « pour s’attacher à la véritable doctrine du Christ notre Seigneur » (ES 164). Le désir et le don de cette troisième sorte d’humilité est une grâce à demander et à vivre pendant toutes ces journées de retraite (et toute la vie…). C’est pourquoi Ignace invite encore à faire les trois colloques des Étendards (ES 168). Il s’agit d’une grâce d’identification, d’assimilation à Jésus. J’admire, je pressens le monde intérieur de Jésus, les sentiments de son Cœur (ES 104). Je préfère et désire ce genre de vie, son chemin de serviteur pauvre et humilié. Pourquoi, Jésus, as-tu pris ce chemin ? Au-delà des réponses rationnelles possibles, c’est la lumière de l’amour qui est fondamentale pour comprendre. C’est la longue contemplation de Jésus, l’entrée dans son mystère, qui éveille cet instinct intérieur.

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Annexe 15 Trois temps pour faire élection (ES 175-177)

☞ Il y a trois manières (ou temps) possibles pour faire élection, selon ce que Dieu donne à chacun. Que l’on discerne cela avec son accompagnateur. LE PREMIER TEMPS (ES 175) est quand Dieu notre Seigneur meut et

attire la volonté de telle façon que, sans douter ni pouvoir douter, l’âme fidèle suit ce qui lui est indiqué : c’est ce que firent par exemple saint Paul et saint Matthieu en suivant le Christ notre Seigneur. LE DEUXIÈME TEMPS (ES 176) : quand on reçoit suffisamment de lumière et de connaissance par l’expérience des consolations et des désolations, et par l’expérience du discernement des divers esprits. LE TROISIÈME TEMPS (ES 177) est tranqille : considérant d’abord pourquoi l’homme est né, c’est-à-dire pour louer Dieu notre Seigneur et pour sauver son âme, et désirant cela, on choisit, comme moyen, une vie ou un état qui se situe à l’intérieur de l’Église, afin d’y trouver une aide pour le service de son Seigneur et le salut de son âme. J’ai dit un temps tranquille : quand l’âme n’est pas agitée par divers esprits et use de ses facultés naturelles, librement et tranquillement.

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Annexe 16 Discernement des esprits

• LES TROIS SORTES DE PENSÉES La pratique des règles de discernement des esprits est fondamentale pour faire les Exercices spirituels. Cela suppose que l’on a appris à relire les différentes sortes de « pensées » qui peuvent nous habiter : « Je présuppose qu’il y a en moi trois sortes de pensées : l’une qui m’est propre, qui naît de ma seule liberté et de mon seul vouloir ; et deux autres qui viennent du dehors, l’une qui vient du bon esprit et l’autre du mauvais » (ES 32 : Trois sortes de pensées). « Il n’y a donc pas de pensées neutres. Il y a les pensées que j’ai parce que je veux les avoir. Elles peuvent être bonnes ou mauvaises : la référence à la loi suffit alors pour le discernement. Il y a des pensées que je ne veux pas mais qui me sollicitent fortement et tendent à provoquer mon adhésion. Elles peuvent m’entraîner dans une bonne ou une mauvaise direction. Je dois donc les discerner avant de leur donner mon accord en engageant ma liberté. Les règles de discernement des esprits sont écrites dans ce but » (A. DEMOUSTIER, s.j., Lecture du texte des Exercices spirituels, p. 61, Médiasèvres, 1999).

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ANNEXE 16. DISCERNEMENT DES ESPRITS

• LES TROIS MOMENTS DU DISCERNEMENT SPIRITUEL DES PENSÉES ET DES « MOUVEMENTS AFFECTIFS » Comme le dit le titre des « Règles de discernement » (ES 313), il y a trois moments dans le discernement spirituel des pensées et des mouvements affectifs qui les accompagnent souvent : – sentir ; – reconnaître ; – adhérer ou se dégager. SENTIR. Apprendre à devenir davantage conscient des émotions ressenties, les exprimer, les nommer. Prendre au sérieux la réalité affective. C’est le moment le plus passif du discernement. Prêter attention au retentissement affectif en moi du vécu. Sentiments de paix, joie, confiance… ou tristesse, trouble, colère, repli sur soi… Cette résonance affective a une signification plus profonde que le pur sentiment. Il ne faut ni négliger comme « purement sentimental », ni m’y identifier, car ces sentiments sont « en moi », cela rôde autour de moi, mais ils ne sont pas moi au plus profond. Il est bon d’apprendre à les repérer puis les discerner. Que veulent-ils dire dans ma vie qui désire s’orienter selon le Dessein d’amour de Dieu pour moi, naître à la vraie vie, à la vérité de mon moi le plus profond ? RECONNAÎTRE ET DISTINGUER CES MOUVEMENTS. Comprendre ce qu’ils veulent dire, pour savoir quoi en faire. Parmi ces mouvements, certains peuvent nous conduire vers Dieu et son Dessein d’amour, sa volonté sur moi. D’autres nous entraînent à la dérive. Il est donc important non seulement de nous rendre compte de l’existence de ces mouvements affectifs ou mouvements intérieurs (ces mouvements affectifs peuvent être accompagnés de pensées qui en naissent), mais encore de distinguer et discerner leur qualité bonne ou négative pour moi, dans mon désir d’unifier ma vie selon Dieu, selon le Christ et son évangile. ☞ Notons qu’il ne s’agit pas ici de rechercher les causes psychologiques, inscrites dans mon histoire peut-être depuis ma petite enfance, ni quelles causes inconscientes pourraient être à l’origine, etc. Quelles qu’en soient

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ANNEXE 16. DISCERNEMENT DES ESPRITS

les causes, ces mouvements ont aussi une signification religieuse. À travers la cause (événement, rencontre, psychologie de la personne, etc), une source plus profonde se manifeste : l’Esprit de Dieu me rejoint là, à travers ce mouvement intérieur, ou au contraire, les forces négatives et destructrices sont à l’œuvre et rôdent autour de moi. C’est cette signification religieuse qui nous intéresse, quels que soient les canaux par lesquels elle passe. Et la question se pose : parmi ces mouvements, quels sont ceux qui m’aident dans une croissance spirituelle, dans un accomplissement de mon existence selon le dessein de Dieu, ou qui au contraire m’en éloignent ?

Les mouvements affectifs (intérieurs) bons ou négatifs s’entremêlent en moi, dans mon monde intérieur. Ils ne sont pas provoqués volontairement par moi, mais se produisent, surviennent à l’occasion d’une rencontre, un événement, une prière… Il ne s’agit donc pas de mouvements ou de pensées propres, nées de mon raisonnement, de ma réflexion personnelle. Il ne s’agit pas non plus de juger ces pensées d’un point de vue moral, de vérifier si elles sont moralement bonnes ou mauvaises : il peut y avoir des mouvements intérieurs et des pensées bonnes en soi, mais qui ne le sont pas pour moi maintenant. Mais il s’agit de reconnaître et vérifier, discerner dans quelle mesure ces mouvements affectifs et les pensées qui les accompagnent peut-être aident et conduisent la personne sur le chemin de Dieu pour elle, ou si au contraire ils l’en éloignent, l’en distraient… Comment reconnaître si ces mouvements intérieurs sont bons ou négatifs ? C’est toute la question du « discernement des esprits », que nous ne pouvons qu’évoquer ici. Une règle simple, assez générale, peut s’énoncer comme suit : si quelqu’un cherche Dieu dans sa vie, en orientant son existence selon le Christ et son évangile, tout ce qui donne paix, joie, confiance, ouverture aux autres, consentement au réel de l’existence est signe de l’Esprit de Dieu. Tout ce qui au contraire attriste, accuse, inquiète, renferme sur soi, etc., ne vient pas de Dieu, mais des forces négatives qui freinent et paralysent la marche. Il ne faut surtout pas se culpabiliser de constater ces forces et tendances négatives et destructrices en nous : cela fait partie du

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ANNEXE 16. DISCERNEMENT DES ESPRITS

combat spirituel contre « l’ennemi de la nature humaine » (saint Ignace). Tout dépend de l’attitude que nous prenons par rapport à elles. RECEVOIR OU S’EN DÉGAGER. C’est le troisième moment. Si nous en restons au premier ou deuxième moment, nous demeurons des spectateurs. Si nous avons reconnu qu’il s’agit d’un mouvement et d’une pensée bonne, il s’agit de le recevoir et de nous y engager pleinement. Car c’est la manière dont Dieu me rejoint maintenant, se révèle discrètement à moi, désire me prendre avec Lui, m’introduire dans son mystère de salut et de communion. Cela demande une « microdécision » de liberté. À travers cette invitation, cette inspiration intérieure, c’est le Seigneur que j’accueille. Au contraire, si des pensées négatives m’agitent, m’inquiètent, veiller beaucoup à ne pas les habiter, m’y identifier, y consentir, même pour de soi-disant bonnes raisons. Mais m’en dégager vigoureusement, et prendre des moyens qui peuvent m’aider (en parler à la personne qui m’accompagne, la confier à Dieu pour qu’Il vienne me rejoindre dans ce lieu de faiblesse, etc.). Suivent ici les premières règles de discernement de saint Ignace.

• RÈGLES DE DISCERNEMENT (ES 313-327) Pour sentir et reconnaître en quelque manière les diverses motions qui se produisent dans l’âme, les bonnes pour les recevoir, les mauvaises pour les rejeter. Ces règles sont davantage propres à la Première Semaine. PREMIÈRE RÈGLE (ES 314). À ceux qui vont de péché mortel en péché mortel, l’ennemi a généralement l’habitude de proposer des plaisirs apparents. Il leur fait imaginer des délectations et des plaisirs sensibles, pour mieux les maintenir et les faire croître dans leurs vices et

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ANNEXE 16. DISCERNEMENT DES ESPRITS

dans leurs péchés. Avec ceux-là, le bon esprit use d’une méthode inverse : il aiguillonne et ronge leur conscience par la loi naturelle de la raison. DEUXIÈME RÈGLE (ES 315). Chez ceux qui progressent intensément dans la purification de leurs péchés et s’élèvent de mieux en mieux dans le service de Dieu notre Seigneur, c’est la méthode inverse de celle de la première règle. Car alors le propre de l’esprit mauvais est de mordre, d’attrister et de mettre des obstacles, en inquiétant par de fausses raisons, pour empêcher d’aller de l’avant. Le propre du bon esprit est de donner courage et forces, consolations, larmes, inspirations et repos, en diminuant et en supprimant tous les obstacles, afin que l’on marche de l’avant dans la pratique du bien. TROISIÈME RÈGLE (ES 316). La consolation spirituelle. J’appelle consolation le cas où se produit dans l’âme une motion intérieure par laquelle l’âme en vient à s’enflammer dans l’amour de son Créateur et Seigneur, et où alors elle ne peut plus aimer pour elle-même aucune chose créée sur la face de la terre, mais seulement dans le Créateur de toutes choses. C’est aussi le cas où l’âme verse des larmes qui la portent à l’amour de son Seigneur, par la douleur de ses péchés, ou de la Passion du Christ notre Seigneur, ou d’autres choses directement ordonnées à son service et à sa louange. J’appelle enfin consolation toute augmentation d’espérance, de foi et de charité, et toute allégresse intérieure qui appelle et attire aux choses célestes et au bien propre de l’âme, en la reposant et en la pacifiant dans son Créateur et Seigneur. QUATRIÈME RÈGLE (ES 317). La désolation spirituelle. J’appelle désolation tout le contraire de la troisième règle. Par exemple, ténèbres de l’âme, trouble intérieur, motion vers ce qui est bas et terrestre, inquiétude devant les diverses agitations et tentations, qui pousse à perdre confiance, sans espérance, sans amour ; l’âme s’y trouve toute paresseuse, tiède, triste et comme séparée de son Créateur et

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ANNEXE 16. DISCERNEMENT DES ESPRITS

Seigneur. Car, comme la consolation est à l’opposé de la désolation, les pensées qui naissent de la consolation sont également à l’opposé des pensées qui naissent de la désolation. CINQUIÈME RÈGLE (ES 318). En période de désolation, ne jamais faire de changement, mais s’en tenir avec fermeté et constance aux décisions et à la détermination dans laquelle on était pendant la consolation qui a précédé. Car, dans la consolation, c’est surtout le bon esprit qui nous guide et nous conseille, et, dans la désolation, c’est le mauvais, dont les conseils ne peuvent nous faire prendre un chemin qui aboutisse. SIXIÈME RÈGLE (ES 319). Si, dans la désolation, il ne faut pas changer nos décisions premières, il est par contre excellent de nous changer nous-mêmes vigoureusement face à cette désolation, par exemple, en nous ancrant davantage dans l’oraison, la méditation, l’examen rigoureux et, en étendant dans une mesure convenable notre pratique de la pénitence. SEPTIÈME RÈGLE (ES 320). Celui qui est dans la désolation doit considérer comment le Seigneur, pour l’éprouver, l’a laissé à ses puissances naturelles, afin qu’il résiste aux diverses agitations et tentations de l’ennemi ; car il le peut, avec le secours divin qui lui reste toujours, même s’il ne le sent pas clairement. Le Seigneur, en effet, lui a retiré sa grande ferveur, son immense amour et sa grâce intense, mais il lui laisse pourtant la grâce qui suffit pour son salut éternel. HUITIÈME RÈGLE (ES 321). Celui qui est dans la désolation, doit travailler à demeurer dans la patience, qui est opposée aux vexations qui lui adviennent. Il doit penser qu’il sera bientôt consolé, s’il met tout son soin à combattre la désolation, comme on l’a dit dans la sixième règle.

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ANNEXE 16. DISCERNEMENT DES ESPRITS

NEUVIÈME RÈGLE (ES 322). Il y a trois raisons principales pour lesquelles nous nous trouvons désolés. Parce que nous sommes tièdes, paresseux ou négligents dans nos exercices spirituels ; c’est alors à cause de nos fautes que la consolation spirituelle s’éloigne de nous. ➋ Pour éprouver ce que nous valons et jusqu’où nous pouvons aller dans son service et sa louange, sans un tel salaire de consolations et d’immenses grâces. ➌ Pour nous donner d’apprendre et de connaître en vérité, afin de le sentir intérieurement, qu’il ne dépend pas de nous de faire naître ou de conserver une immense dévotion, un intense amour, des larmes, ni aucune autre consolation spirituelle, mais que tout est don et grâce de Dieu notre Seigneur ; et pour que nous n’allions pas faire notre nid chez autrui et nous monter l’esprit jusqu’à l’orgueil ou la vaine gloire, en nous attribuant la dévotion ou les autres effets de la consolation spirituelle. DIXIÈME RÈGLE (ES 323). Celui qui est dans la consolation doit penser à la manière dont il se conduira dans la désolation qui viendra ensuite, en prenant des forces pour ce moment-là. ONZIÈME RÈGLE (ES 324). Celui qui est consolé doit tâcher de s’humilier et de s’abaisser autant qu’il lui est possible, en pensant au peu qu’il vaut dans le temps de la désolation, sans cette grâce ou cette consolation. Au contraire, celui qui est désolé doit penser qu’il peut beaucoup avec la grâce qui suffit pour résister à tous ses ennemis, en prenant des forces dans son Créateur et Seigneur. DOUZIÈME RÈGLE (ES 325). L’ennemi se conduit comme une femme, car il est faible quand nous résistons et fort quand nous laissons faire. C’est en effet le propre de la femme, quand elle se querelle avec un homme, de perdre courage et de prendre la fuite quand l’homme lui fait face franchement. Si, au contraire, l’homme commence à fuir et à perdre courage, la colère, la vengeance et la férocité de la femme sont immenses et sans bornes.

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De la même façon, c’est le propre de l’ennemi de faiblir et de perdre courage, et de s’enfuir avec ses tentations, lorsque celui qui s’exerce dans les choses spirituelles fait face franchement aux tentations de l’ennemi et lui oppose diamétralement l’inverse. Si, au contraire, celui qui s’exerce commence à avoir peur et à perdre courage sous l’assaut des tentations, il n’y a pas sur la face de la terre bête plus féroce que l’ennemi de la nature humaine, pour poursuivre son intention maudite avec une immense perversité. TREIZIÈME RÈGLE (ES 326). Il se conduit encore comme un amoureux frivole, qui voudrait rester secret et ne pas être découvert. L’homme frivole, en effet, qui par ses discours perfides sollicite la fille d’un bon père ou la femme d’un bon mari, veut que ses paroles et ses insinuations restent secrètes. Il est très mécontent, au contraire, quand la fille découvre à son père, ou la femme à son mari, ses paroles frivoles et son intention dépravée, car il a vite fait de conclure qu’il ne pourra venir à bout de l’entreprise commencée. De la même façon, quand l’ennemi de la nature humaine introduit en l’âme juste ses astuces et ses insinuations, il veut et désire qu’elles soient reçues et gardées dans le secret. Mais quand on les découvre à un bon confesseur ou à une autre personne spirituelle qui connaît ses tromperies et sa perversité, il en est très dépité. Car il conclut qu’il ne pourra venir à bout de son entreprise perverse, parce que sont découvertes ses tromperies manifestes. QUATORZIÈME RÈGLE (ES 327). Il se conduit enfin comme un chef de guerre pour vaincre et pour dérober ce qu’il désire. Car le capitaine ou le chef d’une troupe, après avoir établi son quartier et inspecté les forces ou le dispositif d’une citadelle, l’attaque par le point le plus faible. De la même façon, l’ennemi de la nature humaine fait sa ronde pour inspecter toutes nos vertus théologales, cardinales et morales, et c’est à l’endroit où il nous trouve plus faibles et plus en danger pour notre salut éternel, qu’il nous attaque et essaie de nous prendre.

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ANNEXE 16. DISCERNEMENT DES ESPRITS

• COMMENTAIRE : CONDUITE À TENIR EN TEMPS DE DÉSOLATION La désolation (ES 317) est un défilé où l’ennemi mortel de notre nature humaine (ES 156) tend un piège. Mais elle est aussi un chemin vers Dieu. Tout dépend de la réaction de celui qui est « désolé ». D’où l’importance de la conduite à tenir. • Que faire en temps de désolation ? (cf. ES 318-319) Demeurer fidèle au don que Dieu a déjà fait, car Dieu est fidèle. Ce don encore fragile (nouvelle naissance…), l’ennemi tente de le tuer. Donc ne rien changer à l’orientation prise, à ce qu’on avait décidé avant la désolation. Préserver ainsi ce don. En demeurant ferme, dans ces microdécisions, collaborant à la grâce donnée j’enracine dans le corps, la psychologie, l’intelligence etc., les réalités évangéliques en train de naître en moi. Je coopère avec Dieu à l’édification d’un espace pour ma liberté réelle d’enfant du Père. ➋ Réagir fermement contre la désolation (ES 319). Ne pas se résigner passivement mais prendre parti contre. Désolé, je suis et reste un chrétien réellement engagé, avec les dons reçus du Seigneur que je dois défendre en luttant contre une véritable attaque du « mortel ennemi de notre nature humaine ». Moyens de lutte : 319 et (13, 16, 157…) : s’ancrer dans l’oraison, la relecture, etc., m’en ouvrir à une personne de confiance (ES 325 – 327). • Que « penser « en temps de désolation ? (cf. ES 320) Ni fatalisme, ni victimisme, ni volontarisme. Que suis-je en ce moment de désolation ? Me comprendre moi-même comme en mission : « mise à l’épreuve permise par le Seigneur pour que je résiste ». Je ne suis pas abandonné, mais mis à l’épreuve par quelqu’un qui m’aime et veut me faire grandir. École d’apprentissage, d’élection par microdécision. L’ennemi dramatise la situation pour décourager et me faire perdre mon identité. Donc résister et me resituer dans la puissance du Seigneur : envoyé en mission.

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Il s’agit là d’un exercice spirituel pour l’intelligence. Le sens du temps de désolation : non pas du temps perdu, mais le temps d’accomplir une mission : apprendre à résister à l’adversaire et protéger ainsi l’œuvre du Seigneur contre l’attaque de l’ennemi. On peut relire l’introduction aux « Deux Étendards ». ➋ Quel est mon « pouvoir » en temps de désolation ? En désolation, je sens profondément mon impuissance, et l’ennemi tente de l’absolutiser en occultant l’aide de Dieu. « Je serai toujours le même ; jamais je ne changerai ; c’est au-dessus de mes forces. » Réduit à l’impuissance, apprendre à avancer en s’appuyant sur Dieu Rocher. « La foi, ce n’est pas croire que Dieu peut tout, c’est croire que moi je peux tout avec Dieu. » Me rappeler et réaffirmer que la victoire est déjà acquise par le Seigneur ressuscité et Vivant, qui demeure maître absolu de la situation et est le Dieu fidèle dans nos fragilités humaines. Ainsi le pouvoir n’est pas attribué à nos forces propres, mais c’est le pouvoir du Seigneur. Comment prendre force dans le Seigneur ? À chacun de voir. Se souvenir des dons déjà reçus, de la fidélité de son Amour. Prière simple, pauvre (ES 114), une attitude du corps, agenouillé à la Croix. Regard vers Marie, chapelet… Cela se réalise dans des petits détails, gestes très simples dont l’humilité triomphe des suggestions de l’ennemi. • Comment vivre en temps de désolation ? (cf. ES 321) Vivre dans la patience : une attitude intérieure au niveau du cœur qui permet de bien exercer les règles 318 à 320, c’est-à-dire sans dureté volontariste, et sans non plus se sentir victime impuissante et culpabilisée). Patience évoque le pâtir, passion avec le Christ. La patience est la vérité de l’amour et s’oppose paisiblement aux vexations de l’ennemi. L’amour en vérité se révèle quand on continue à chercher Dieu à travers l’aridité de la désolation, sans suivre les sirènes.

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La patience ne fait pas sortir de la désolation. Mais elle est contraire aux vexations de la désolation parce que je me dispose à lui résister jusqu’à ce que le Seigneur la fasse disparaître. ➋ Comment pratiquer la patience ? Dans cette espérance en Dieu seul, mettre tout son soin à combattre (ES 318). « Penser qu’il sera bientôt consolé. » La désolation bouche l’horizon. Donc réveiller l’espérance active. Demander l’Esprit Saint, la consolation (Lc 11, 13). Ne pas se contenter « d’attendre que ça passe », mais appeler le Seigneur et ainsi prendre force en Lui. • Quels fruits cueillir dans la désolation ? (cf. ES 322) Il ne suffit pas de passer par beaucoup de désolations pour obtenir le fruit : il importe de réfléchir pour progresser. La désolation en elle-même ne porte pas de fruit ou leçon, car elle est pleine de fausseté et de stérilité. Mais en luttant contre elle on mûrit et on apprend, non de la désolation elle-même, mais de la grâce de Dieu qui lutte en nous contre elle. Le Seigneur donne la grâce de découvrir et comprendre peu à peu sa souveraineté absolue sur la désolation, afin de laisser toute crainte et de ne plus être impressionné par le pouvoir laissé aux ténèbres (Rm 8, 28). La désolation elle-même est vécue à l’intérieur de sa Victoire. Alors disparaît la crainte d’un retour de la désolation qui réduirait à rien la réalité du Salut ; Le retraitant apprend à ne pas vivre dans une sorte de « manichéisme » pratique qui perçoit instinctivement le temps de l’histoire « fatalement » divisé en deux Seigneuries. Il découvre que l’ennemi, la désolation, n’est pas sur pied d’égalité avec la grâce toute puissante (Col 2, 15). – 1er fruit. L’appel à la conversion : on était devenu tiède dans les exercices spirituels. – 2e fruit. Le réalisme : le retraitant découvre sa faiblesse. En consolation, il risque de surestimer ses forces et de se les approprier. La désolation donne d’éprouver une vérité cachée à nos yeux : que par nous-mêmes nous sommes impuissants. Nous renonçons à la présomption et apprenons à éprouver la

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sagesse de l’espérance en Dieu seul. À ce moment-là, seronsnous mercenaire qui s’enfuit ou bon berger ? – 3e fruit. L’humilité : la désolation nous fait comprendre la gratuité de la consolation, en l’expérimentant dans notre chair. En goûtant son impuissance propre, le retraitant sentira mieux, dans la consolation reçue, qu’elle demeure gratuite. Alors que nous sommes tentés de l’accaparer. Suivent ici les règles de saint Ignace pour un plus grand discernement des esprits.

• RÈGLES SUR LE MÊME SUJET POUR UN PLUS GRAND DISCERNEMENT DES ESPRITS Elles concernent davantage la Deuxième Semaine (ES 328-336). PREMIÈRE RÈGLE (ES 329). C’est le propre de Dieu et de ses anges, dans leurs motions, de donner la véritable allégresse et joie spirituelle, en supprimant toute tristesse et trouble que nous inspire l’ennemi. Le propre de ce dernier est de lutter contre cette allégresse et cette consolation spirituelle, en proposant des raisons apparentes, des subtilités et de perpétuels sophismes. DEUXIÈME RÈGLE (ES 330). Seul, Dieu notre Seigneur donne à l’âme la consolation sans cause précédente. C’est en effet, le propre du Créateur d’entrer, de sortir, de produire des motions en elle, l’attirant toute entière dans l’amour de sa divine Majesté. Je dis : sans cause, sans aucun sentiment ni aucune connaissance préalable d’aucun objet grâce auquel viendrait la consolation par les actes de l’intelligence et de la volonté. TROISIÈME RÈGLE (ES 331). Avec une cause, le bon ange aussi bien que le mauvais peuvent consoler l’âme, mais pour des fins contraires : – le bon ange, pour le progrès de l’âme, afin qu’elle croisse et s’élève de mieux en mieux ;

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– le mauvais ange, pour le contraire, et ensuite pour l’entraîner dans son intention maudite et dans sa perversité. QUATRIÈME RÈGLE (ES 332). C’est le propre de l’ange mauvais, qui se transforme en ange de lumière, d’aller d’abord dans le sens de l’âme fidèle, et de l’amener finalement dans le sien. C’est-à-dire qu’il propose des pensées bonnes et saintes, en accord avec l’âme juste, et ensuite, peu à peu, il tâche de l’amener à ses fins en entraînant l’âme dans ses tromperies secrètes et ses intentions perverses. CINQUIÈME RÈGLE (ES 333). Il faut faire grande attention au déroulement de nos pensées. Si le début, le milieu et la fin sont entièrement bons, orientés entièrement vers le bien, c’est le signe du bon ange. Mais, si le déroulement de nos pensées nous amène finalement à quelque chose de mauvais, ou de distrayant, ou de moins bon que ce que l’âme projetait d’abord, ou qui affaiblit, inquiète et trouble l’âme en lui enlevant la paix, la tranquillité et le repos qu’elle avait auparavant, c’est un signe clair qu’il procède du mauvais esprit, ennemi de notre progrès et de notre salut éternel. SIXIÈME RÈGLE (ES 334). Quand l’ennemi de la nature humaine aura été senti et reconnu à sa queue de serpent et à la fin mauvaise qu’il inspire, il est utile à celui qu’il a tenté de regarder ensuite le déroulement des pensées bonnes qu’il a suggérées et leur point de départ : comment il a peu à peu tâché de nous faire déchoir de la suavité et de la joie spirituelle où nous nous trouvions, jusqu’à nous amener à son intention dépravée. Ainsi, grâce à cette expérience reconnue et notée, on se gardera à l’avenir de ses tromperies habituelles. SEPTIÈME RÈGLE (ES 335). Chez ceux qui avancent de mieux en mieux, le bon ange touche l’âme de façon douce, légère et suave, comme la goutte d’eau qui pénètre une éponge ; le mauvais touche de façon aiguë, avec bruit et agitation, comme lorsque la goutte d’eau tombe sur une pierre.

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ANNEXE 16. DISCERNEMENT DES ESPRITS

Chez ceux qui avancent de pis en pis, les mêmes esprits touchent de façon inverse. La raison en est la disposition de l’âme, qui est contraire ou semblable à celle des anges : – quand elle leur est contraire, en effet, leur entrée est bruyante et sentie, de façon perceptible ; – quand elle leur est semblable, l’entrée est silencieuse, comme chez soi, porte ouverte. HUITIÈME RÈGLE (ES 336). Lorsque la consolation est sans cause, elle ne comporte pas de piège, puisque, comme on l’a dit, elle vient uniquement de Dieu notre Seigneur. Cependant, l’homme spirituel à qui Dieu donne cette consolation doit l’examiner avec beaucoup de vigilance et d’attention, en discernant le temps même de cette consolation actuelle du temps qui la suit, où l’âme reste brûlante et favorisée du bienfait et des suites de la consolation passée. Souvent, en effet, pendant ce second temps, en pensant nousmêmes à partir des liaisons et déductions de nos idées et jugements, ou sous l’effet du bon esprit ou du mauvais, nous concevons des projets et des opinions diverses, qui ne sont pas données immédiatement de Dieu notre Seigneur. Aussi est-il nécessaire de les examiner avec le plus grand soin, avant de leur donner entier crédit et de les mettre en pratique.

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Annexe 17 Pour une communion toujours plus grande dans l’Église

« Règles pour le vrai sens que nous devons avoir dans l’Église » (ES 352-370) ☞ Ces règles donnent quelques critères qui aideront le retraitant à discerner, avec l’aide de son accompagnateur, la manière dont son amour pour le Christ ressuscité vécu dans la Contemplation pour obtenir l’amour s’inscrira dans son insertion ecclésiale.

En effet, dans cette contemplation, le retraitant est invité à se découvrir intégré à la création restaurée, renouvelée, comme membre du corps vivant de Jésus ressuscité. Dans la lumière de celle-ci, les Exercices manifestent aussi le visage de l’Église. Comme on le perçoit en contemplant les apparitions, le Christ pascal, ressuscité, fait d’hommes et de femmes fragiles et pécheurs les membres de son corps. C’est ainsi qu’on peut aimer l’Église et voir en elle la beauté miséricordieuse du Christ qui se manifeste avec ses plaies glorieuses. Les « Règles pour le vrai sens que nous devons avoir dans l’Église » (ES 352-370), qu’Ignace a écrites en fin du livret des Exercices sont situées dans ce contexte. Écrites pour un temps et une mentalité qui ne sont plus les nôtres, ces règles n’ont cependant rien perdu de leur substance et de leur actualité. Dans une allocution à ses frères jésuites, le père Kolvenbach affirme avec force qu’elles sont « une invitation à s’insérer

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ANNEXE 17. POUR UNE COMMUNION TOUJOURS PLUS GRANDE DANS L’ÉGLISE

de jour en jour davantage dans la vie de l’Église, avec vigueur et créativité, afin de faire l’expérience de son mystère et de le comprendre par l’intérieur ». Et il continue en résumant l’essentiel de leur contenu : « En un premier temps, Ignace centre les règles autour d’une attitude spirituelle qui consiste à “louer” tout ce qui vit dans l’Église […]. Sans prétendre imposer à tous ce qui est loué, saint Ignace insiste cependant sur l’impossibilité de vivre le mystère du Seigneur incarné sans l’apport d’une divine liturgie, où la beauté et les détails du culte, de l’architecture, du vêtement et des prières revêtent humblement un poids existentiel indéniable. » » Dans une seconde partie, saint Ignace se situe au cœur de l’Église hiérarchiquement articulée comme peuple de Dieu, dans laquelle l’exemple des saints et la compétence des théologiens exercent une autorité propre sous l’unique autorité pastorale qui revient à la hiérarchie du peuple de Dieu. Toutes les règles de cette partie constituent une claire invitation à accueillir d’abord la vérité de Dieu sur nous, “laissant tout jugement propre” — c’est-à-dire tout jugement clos sur lui-même et suffisant — pour “avoir l’esprit disposé et prompt à obéir en tout à la véritable Épouse du Christ notre Seigneur, qui est notre sainte Mère l’Église hiérarchique” (ES 353). Ce n’est qu’ainsi que la foi comme la raison “toucheront juste en tout” (ES 365), lorsqu’elles chercheront à progresser dans l’intelligence de la foi des apôtres, annoncée aux hommes et aux femmes de notre temps pour leur salut ». » Dans un dernier groupe de règles, saint Ignace centre sa réflexion autour de la mission apostolique de “parler”, de “proclamer la foi”, insistant dès lors sur la sobriété personnelle qui donne toute la place qui lui revient à la Parole de Dieu en son Église, insistant aussi sur le souci pastoral qui tient compte de l’attente, de la condition souvent “simple” et du désir du peuple de Dieu, composé de personnes fortes et de personnes faibles, selon l’expression de saint Paul » (P.H. KOLVENBACH, s.j., Allocution finale aux Procureurs, « Acta Romana », 1988). « Ces attitudes de louange, de respect et d’obéissance sont fruits de la Contemplation pour obtenir l’amour… Les Règles nous donnent une aide pour discerner comment l’élection reçue dans les

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ANNEXE 17. POUR UNE COMMUNION TOUJOURS PLUS GRANDE DANS L’ÉGLISE

Exercices peut contribuer à plus de communion dans l’Église… Ignace lui-même a éprouvé cette tension intérieure : comment être à la fois fidèle à l’Esprit qui m’anime et me pousse intérieurement, et loyal vis-à-vis de l’Église, peuple de Dieu hiérarchiquement articulé, Église totalement humaine et pleinement mystique. Jusqu’à sa mort, Ignace n’a jamais voulu supprimer cette tension, qui est celle de l’Incarnation » (Mark ROTSAERT, s.j., in Cahiers de spiritualité ignatienne 78 [1996], p. 115).


Table des matières

Présentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 La prière personnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 La réflexion personnelle dans le courant de la journée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 La relecture de la journée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 La relation avec la personne qui accompagne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Les rencontres communes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

Mise en route . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 Références bibliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 Mon histoire sainte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 Proposition pour relire sa journée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

PRINCIPE ET FONDEMENT DE MA VIE Fondement 1. « Le dessein d’amour de Dieu » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Références bibliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Proposition pour relire sa journée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24

Pour aider la méditation du « Principe et Fondement » . . . . . . . . . . . . . . 25 Fondement 2. « Ma liberté disponible » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 Fiche de prière 1 : « Le Principe et Fondement » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 Proposition pour relire sa journée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 Fiche de prière 2 : Références bibliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 Fiche de prière 3 : « Le Principe et fondement » adapté par le père Tetlov . . . . 33 Fiche de prière 4 : Écrire mon propre « Principe et Fondement » . . . . . . . . . . . . 34

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TABLE DES MATIÈRES

PREMIÈRE SEMAINE Introduction à la Première Semaine des Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 Où en sommes-nous ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 L’entrée en Première Semaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 Comment « voir » et sentir une connaissance intérieure du péché, de mon péché ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 Par quel chemin avancer pour recevoir cette grâce ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

Le mal dans le monde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46 Prier l’actualité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46 Textes qui peuvent aider la prière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 Proposition pour relire sa journée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47

Le péché . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 Premier exercice proposé par Ignace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50 Proposition pour relire sa journée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

Je suis pécheur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 Deuxième exercice proposé par Ignace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56 Proposition pour relire sa journée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

Je suis pécheur pardonné . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60 Troisième exercice proposé par Ignace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 Quatrième exercice proposé par Ignace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 Proposition pour relire sa journée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 Cinquième exercice proposé par Ignace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

DEUXIÈME SEMAINE Pour aider l’entrée en Deuxième Semaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 Où en sommes-nous dans notre démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 Comment vivre l’appel du Christ et mon offrande, ma réponse, dans la vie quotidienne ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

L’appel du Christ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74 L’appel du roi temporel aide à contempler la vie du Roi éternel (ES 91-98) . . . 75 Proposition pour relire sa prière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77 Proposition pour relire sa journée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77 Notes pour aider la prière dans la vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

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TABLE DES MATIÈRES

« Incarnation et vie cachée » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 Introduction aux contemplations évangéliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 Première contemplation : L’Incarnation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 Seconde contemplation – La Nativité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 Troisième contemplation – Répétition des premier et deuxième exercices . . . . 83 Quatrième contemplation – Répétition de la première et de la deuxième . . . . 83 Cinquième contemplation – Application des cinq sens . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 Proposition pour relire sa journée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84 Conseils . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84 Les mystères de la vie cachée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85 L’annonciation de Notre Dame . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85 La visitation de Notre Dame à Élisabeth . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86 La Nativité du Christ notre Seigneur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86 Les bergers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87 La circoncision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87 Les trois rois mages . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87 Purification de Notre Dame et présentation de l’enfant Jésus . . . . . . . . . . . . . . . 88 La fuite en Égypte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88 Comment le Christ notre Seigneur revint d’Égypte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88 La vie du Christ notre Seigneur de l’âge de 12 à 30 ans. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89 La venue du Christ au temple quand il était âgé de 12 ans . . . . . . . . . . . . . . . . 89

Pour aider à vivre la contemplation évangélique dans la vie quotidienne . . 90 Par la répétition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90 Et par un discernement qui s’opère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91

Pour aider la méditation des « Deux Étendards » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93 Où en sommes-nous dans notre démarche des Exercices ? . . . . . . . . . . . . . . . . 93 Analyse de la méditation des « Deux Étendards » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 Les pièges de l’ennemi [première partie] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97 L’étendard ou le chemin du Christ [deuxième partie] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97

Méditation des « Deux Étendards » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101 Pour aider la méditation des « Trois Hommes » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 Le titre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 Premier préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 Deuxième préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 Troisième préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 Le premier homme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 Le deuxième homme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108 Le troisième homme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109

229


TABLE DES MATIÈRES

Méditation des « Trois Hommes » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 Pour aider la contemplation de la vie publique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114 Le sens des contemplations de la vie publique du Christ . . . . . . . . . . . . . . . . 114

Contemplation de la vie publique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 Contemplations privilégiées par saint Ignace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117 Questions à me poser tout en contemplant les mystères . . . . . . . . . . . . . . . . 118 Les trois sortes d’humilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118

Les mystères de la vie publique du Christ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120 Comment le Christ fut baptisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120 Comment le Christ fut tenté. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120 L’appel des apôtres. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121 Le premier miracle accompli aux noces de Cana, en Galilée . . . . . . . . . . . . . . 121 Comment le Christ chassa hors du temple ceux qui y vendaient . . . . . . . . . . 122 Le sermon que fit le Christ sur la montagne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122 Comment le Christ notre Seigneur fit se calmer la tempête de la mer . . . . . . 123 Comment le Christ marchait sur la mer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 Comment les apôtres furent envoyés prêcher . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124 La conversion de Madeleine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124 Comment le Christ notre Seigneur donna à manger à cinq mille hommes . . 125 La transfiguration du Christ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125 La résurrection de Lazare. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125 Le repas à Béthanie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126 Le dimanche des Rameaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126 La prédication dans le temple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126

Pour aider le travail de l’élection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 Situation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 Comment entrer dans le travail de l’élection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 Étapes de maturation de l’élection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 128 Prier les objets ou les points d’élection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 128 Distinguer ce qui est du bon ou du mauvais esprit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129 La liberté face à Dieu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130

230


TABLE DES MATIÈRES

TROISIÈME SEMAINE Introduction à la Troisième Semaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 La contemplation de la Passion du Seigneur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 Regard sur le texte de Troisième Semaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135 La grâce demandée en Troisième Semaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135 Rappel de la manière de prier et du climat de la journée . . . . . . . . . . . . . . . . 136 La manière de prier et le fruit de la contemplation de la Passion . . . . . . . . . . 137 Le fruit de la contemplation de la Passion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139 Comment organiser ces semaines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140

Les mystères de la vie du Christ – La Passion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141 Première contemplation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142 La Cène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144 Les mystères accomplis depuis la Cène jusqu’au jardin inclusivement . . . . . . 145 Les mystères accomplis depuis le jardin jusqu’à la maison d’Anne inclusivement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146 Les mystères accomplis depuis la maison d’Anne jusqu’à celle de Caïphe inclusivement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146 Les mystères accomplis depuis la maison de Caïphe jusqu’à celle de Pilate inclusivement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147 Les mystères accomplis depuis la maison de Pilate jusqu’à celle d’Hérode . . . 147 Les mystères accomplis depuis la maison d’Hérode jusqu’à celle de Pilate . . . 148 Les mystères accomplis depuis la maison de Pilate jusqu’à la Croix inclusivement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148 Les mystères accomplis sur la Croix . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148 Les mystères accomplis depuis la Croix jusqu’au sépulcre inclusivement . . . . 149 Depuis le tombeau inclusivement jusqu’à la maison où Notre Dame se rendit après que son Fils eut été enseveli . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149

QUATRIÈME SEMAINE Introduction à la Quatrième Semaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153 La grâce demandée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153 La première contemplation : Comment le Christ notre Seigneur apparut à Notre Dame . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154 La suite des apparitions et leur sens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155

Pour aider à prier en Quatrième Semaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 Le passage en Quatrième Semaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 Sens de la Résurrection et des apparitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158

231


TABLE DES MATIÈRES

Les mystères de la vie du Christ – La Résurrection . . . . . . . . . . . . . . . . . 161 Première contemplation : L’apparition du Christ notre Seigneur à Notre Dame . 162 La seconde apparition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163 La troisième apparition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164 La quatrième apparition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164 La cinquième apparition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164 La sixième apparition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165 La septième apparition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165 La huitième apparition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166 La neuvième apparition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166 L’Ascension du Christ notre Seigneur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166

Pour aider au discernement de ce qui est vécu dans la prière en Quatrième Semaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168 Se laisser conduire par le Ressuscité dans la vie de l’Esprit . . . . . . . . . . . 170 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170 Contemplation pour obtenir l’amour . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171

Pour aider à terminer les Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174

ANNEXES Annexe 1. Pour méditer un texte d’Écriture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179 La préparation de la prière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179 La prière préparatoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179 Les préambules . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180 Le corps de l’oraison . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181 Dialogue libre ou Colloque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181

Annexe 2. Pour relire sa prière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183 Annexe 3. Pour relire sa journée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184 Annexe 4. Pour préparer la première rencontre avec l’accompagnateur . . 186 Annexe 5. Pour préparer le partage en groupe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187 Fiche pour préparer le partage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187 Fiche pour favoriser l’expression et l’écoute . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188

Annexe 6. Vocabulaire utilisé dans le « Principe et Fondement » . . . . . . 189

232


TABLE DES MATIÈRES

Annexe 7. « Prier ma vie – Vivre ma prière » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191 Vivre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191 Conseils utiles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191

Annexe 8. Dimension affective du péché : « Mes illusions et déceptions » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192 Annexe 9. Dimension affective du péché : « Guérison des blessures, de l’amertume et du dégoût de la vie » . . . . . . 194 Annexe 10. Dimension affective du péché : « Réaction envers les résistances et les angoisses » . . . . . . . . . . . . . . . . . . 196 Annexe 11. Textes d’Écriture pour aider à prier le péché . . . . . . . . . . . . 198 Annexe 12. Note à propos de la confession générale. . . . . . . . . . . . . . . . 200 Annexe 13. Pour aider la contemplation évangélique . . . . . . . . . . . . . . 202 Annexe 14. Pour aider à prier les trois sortes d’humilité . . . . . . . . . . . . 206 Contenu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206 Sens et but de cette considération . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 207 Comment faire cette considération ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 208

Annexe 15. Trois temps pour faire élection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209 Annexe 16. Discernement des esprits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 210 Les trois sortes de pensées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 210 Les trois moments du discernement spirituel des pensées et des « mouvements affectifs » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211 Sentir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211 Reconnaître et distinguer ces mouvements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211 Recevoir ou s’en dégager. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213 Règles de discernement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213 Commentaire : Conduite à tenir en temps de désolation . . . . . . . . . . . . . . . . 218 Règles sur le même sujet pour un plus grand discernement des esprits . . . . . 221

Annexe 17. Pour une communion toujours plus grande dans l’Église . . 224 « Règles pour le vrai sens que nous devons avoir dans l’Église ». . . . . . . . . . . . 224

Table des matières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 227








Deuxième édition achevée d’imprimer le 21 mai 2008 sur les presses de l’imprimerie Bietlot, à 6060 Gilly (Belgique)



André de Jaer André de Jaer, jésuite, a pendant plus de vingt ans exercé un ministère d’accompagnement spirituel pour les jeunes jésuites du monde entier en « troisième an ». Il est actuellement installé en Belgique, où il anime de nombreuses sessions et retraites et collabore à la Formac (formation à l’accompagnement). Il a travaillé ici avec une équipe composée de Philippe Franchimont, Jean Burton, Daniel de Crombrugghe et Suzy de Gheest, du Centre spirituel de La Pairelle, à Namur (Belgique). ISBN 978-2-87356-405-6 Prix TTC : 19,00 €

9 782873 564056

André de Jaer et une équipe

VIVRE LE CHRIST AU QUOTIDIEN Pour une pratique des Exercices spirituels dans la vie

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André de Jaer

Peut-on faire les Exercices spirituels sans se retirer dans une « maison de retraite » ou dans un monastère ? Saint Ignace avait déjà prévu la possibilité de les faire chez soi. Ce livre est d’abord destiné aux personnes qui désirent prendre ce chemin de vie spirituelle avec le Christ au quotidien et à ceux ou celles qui les accompagnent. Mais il peut aussi intéresser les personnes qui désirent mieux connaître la spiritualité ignatienne, enracinée toute entière dans la démarche des Exercices spirituels qui se déploie dans ces pages.

VIVRE LE CHRIST AU QUOTIDIEN

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