Rivages 10

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N° 10 • mai-juin 2018 • Bureau de dépôt : Namur 1 • N° d’agr. : P 301046

SENS & SPIRITUALITÉS

ivages BIMESTRIEL

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Chercher


Se mettre en recherche  28

Quand l’actualité prend sens  26

Découvrir Lucio Fontana  18

Chercher l’impossible  22

Oser des rencontres en profondeur      4

Le cœur au large  20

ivages | n° 10 | mai-juin 2018 Éditeur responsable : Xavier Cornet d’Elzius, 7 rue Blondeau, 5000 Namur • Rédactrice en chef : Pascale Otten • Comité de rédaction : Alain Arnould, Christian Deduytschaever, Charles Delhez, André Füzfa, José Gérard, Vanessa Greindl, Jean-François Grégoire, Marie-Raphaël de Hemptinne, Armel Job, Hugues d’Oroc, Simon Malotaux, Samira Mhanzez Serghini, Constance Proux, Guy Ruelle, Jacques Scheuer, Luc Templier, Myriam Tonus, André Wénin • Maquette et mise en page : MC Compo • Abonnements : 7, rue Blondeau, 5000 Namur, info@editionsjesuites.com, 081 22 15 51 • Prix  abonnement Belgique 1 an, 6 numéros : 24,50 EUR (36,00 EUR pour l’étranger) ; abonnement 2 ans, 12 numéros : 45,00 EUR (68,00 EUR pour l’étranger) ; abonnement de soutien :  40,00 EUR ; à partir de 10 abonnements groupés à la même adresse : 21,50 EUR par abonnement (33,00 EUR pour l’étranger) • Prix au numéro : 5,00 EUR • BE64 0688 9989 0952, IBAN GKCCBEBB – Paraît tous les deux mois • ISSN 2506-9829 • Rivages est une publication des Éditions jésuites • www.rivages.be Crédits photographiques : Couverture : Robert Delaunay-Rythmes,1934, © Flickr, page 2 Van Gogh © MET, page 7 © M. Peters, pages 10-11 © Flickr, page 12 © M. Peters, page 13 Street art © Flickr, page 19 © Flickr, page 20 © Flickr, page 22 Jan Fabre, l’homme qui mesurait les nuages. © Flickr, page 25 Hokusai-la côte des sept lieues, c.1831 © Flickr, page 27 © B.Tuerlinckx, 2 © Flickr, page 32 Ossip Zadkine, Les Arques – © Flickr page 30


Éditorial Qui n’est pas à la recherche d’un tré­ sor ? Enfants, cela motivait d’intermi­ Pascale Otten nables jeux de pistes… Que cherchonsnous aujourd’hui ? À la recherche de bien-être, de mieux-être, l’homme contemporain trouve son bonheur (éphémère) dans l’immédiateté de la consommation qui semble nous dire « j’ai trouvé ce qu’il te faut ». Mais très vite le mirage s’estompe ; ce manque, nous le ressentons à nouveau. « Il y a une bougie dans ton cœur, prête à être allumée. Il y a ce vide dans ton âme, prêt à être comblé, tu le sens n’est-ce pas ? », dit le poète soufi Rumi. Ce besoin d’être comblé est celui-là même qui nous fait « partir à la recherche ». La recherche de la « comblitude » ? Cette quête sera racontée dans toutes les civilisations. Déjà dans la Mésopotamie antique, il y a 4000 ans, Gilgamesh, désespéré par la mort de son ami, part à la recherche de l’immortalité. En chemin, il rencontrera le bonheur d’une relation amoureuse et rentrera différent dans son pays, mais sans la fleur de jouvence. Dans l’antiquité grecque, le voyage d’Ulysse se présente tel un « parcours initiatique ». Ulysse, larguant les amarres de son pays bien aimé, ira jusqu’aux rives de la mort et reviendra auprès de ceux qu’il aime, transformé et d’une certaine manière plus déterminée donc plus fort. Ces récits donnent alors sens à nos quêtes : les embûches elles-mêmes ont une signification : elles permettent d’en revenir renforcé. Le chercheur en chemin pourrait se dire qu’il faut changer de route. Il pourrait aussi décider d’habiter sa propre vie, ou de lui donner des couleurs. Chercher apportera ce à quoi on ne s’attend peut-être pas. Pourrons-nous accueillir cet imprévu ? Le sens se donnera-t-il tout à coup, petit à petit ou après-coup ? S’aiguiser à prendre du recul, penser à repérer le sens, c’est un art de vivre que nous pouvons tous exercer. Ne voit-on pas dans la Bible patriarches, prophètes ou disciples être surpris puis, ensuite, discerner un sens fondamental qui leur apparaît ? « Le simple berger lui-même, qui veille ses moutons sous les étoiles, s’il prend conscience de son rôle, se découvre plus qu’un berger. Il est une sentinelle1. » Aujourd’hui, dans un monde postmoderne, quand la transmission se fait plus complexe, moins évidente, le sens de ses actes, de sa vie est à réinventer pour chacun. Certains proposent d’en faire un récit de vie, pour retrouver notre cohérence. Pourquoi ne pas aussi interroger ses rêves d’enfant : Quel est notre trésor ? Là aussi sera notre cœur…

Sommaire Rencontrer • Oser des rencontres en profondeur ................ 4 Propos de Régis Close recueillis par Pascale Otten

• Rechercher… le sens… .................................................. 6 Propos de Framboise Boël recueillis par Pascale Otten

• Cool@School… Et si communiquer s’apprenait .................................................................................. 8 Propos recueillis par Pascale Otten

• Quand l’actualité prend sens .................................. 26 Propos de Fariba Samii recueillis par Pascale Otten

• Se mettre en recherche ................................................ 28 Regards croisés entre Jean-François Grégoire et Vanessa Greindl

Vivre • Marie en Islam ........................................................................ 16 Jacques Scheuer • Le cœur au large .................................................................. 20 Myriam Tonus • Chercher l’impossible ..................................................... 22 Hicham Abdel-el-Gawad • Chercher des mots et des gestes . ..................... 24 José Gérard

Contempler • Que cherchez-vous ? . ....................................................... 10 Marie-Raphaël de Hemptinne

• Rainer Maria Rilke .............................................................. 12 Guy Ruelle

• Pentecôte ...................................................................................... 13 Christian De Duytschaever

• Chercher ........................................................................................ 14 Luc Templier

• Lucio Fontana . ......................................................................... 18 Pascale van Zuylen

1  Antoine de Saint Exupéry, Un sens à la vie, 1956.

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Oser des rencontres en profondeur Propos recueillis par Pascale Otten

Régis Close

Régis Close est coordinateur du centre EL KALIMA1, centre chrétien pour les relations avec l’Islam où s’organisent rencontres, groupes de travail santé, couples mixtes, enseignement et qui favorise et approfondit les relations et le dialogue entre chrétiens et musulmans par des activités, des animations, des rencontres… Comment avez-vous rencontré l'Islam ?

Mon intérêt pour les religions est venu pendant mes études supérieures. Je m’étais engagé vers les sciences exactes, puis j’ai eu l’occasion de partir en pèlerinage vers Compostelle : qui fut un chemin vers moi-même, les autres et l’Autre. J’ai senti qu’il fallait faire fi de ses peurs en s’ouvrant à l’inconnu et j’ai choisi d’étudier la théologie. J’ai poursuivi un cursus en philosophie et après cela, j’ai choisi de m’ouvrir aux autres religions. J’ai ainsi fait un master en sciences des religions 1  Site internet : www.elkalima.be ; 69, rue du Midi à 1000 Bruxelles, 02/511.82.17.

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(UCL) à finalité approfondie en sociologie, islam et religions de l’Extrême-Orient. Quand j’ai commencé à El Kalima, j’ai suivi un certificat en islamologie. C’était donc une connaissance plutôt intellectuelle, peu relationnelle. J’avais cependant quelques expériences pratiques avec le kot à projet « Kapharnaüm » que j’ai créé avec d’autres, et qui a pour but de favoriser le dialogue interreligieux. Que vous apportent ces rencontres interreligieuses ?

Les rencontres avec les musulmans me confrontent à ma propre foi, peut-être plus que si on était dans l’entre-soi. Nous organisons des soirées thématiques où chacun explique sa propre religion à partir des textes et de la Tradition puis au travers de sa propre expérience quotidienne. Dans un deuxième temps, on revisite alors ce qui est dit dans notre religion pour la présenter aux autres et être prêts à répondre aux questions qu’ils se poseraient. Quels sont des points de convergence à votre avis ?

Un point où l’on se retrouve, c’est la foi en Dieu, en un Dieu unique. C’est surtout dans « être croyant ». Mais chacun est unique, on ne peut pas généraliser. Il y a tellement de courants,


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de tendances, de diversité chez les croyants. À El Kalima, on veut développer ces rencontres. Le fait qu’elles soient fréquentes a créé une relation de confiance entre les personnes : on peut alors aller plus loin, être plus fin, aborder des sujets plus difficiles comme le fait que pour les chrétiens Jésus est Dieu. On ne part pas du principe que l’on détient la vérité ou que l’on voudrait l’imposer. Comment voyez-vous l'avenir ?

Pour l’avenir, je me sens positif. Les idées changent, tout bouge très vite. J’ai le sentiment que la foi s’individualise davantage pour beau­ coup. Les nouvelles générations osent parler avec des personnes de différentes religions. Certains vont plutôt vers la spiritualité. Il faut creuser cet aspect-là. Cette année, El Kalima fête ses 40 ans et de beaux défis s’offrent au centre ! Il y a aussi un aspect systémique : on ne peut pas avoir une foi coupée de notre mode de vie. Personnellement, je suis engagé dans le mouvement de Transition qui essaie de réhumaniser nos actions les plus simples : par exemple, le rapport à l’alimentation. Il est bon de se réapproprier son rapport à l’environnement, de se reconnecter à la nature, aux autres et à nous-mêmes. Cela nous le faisons en créant un potager collectif, une gestion des déchets, des services d’échanges locaux. En participant à cela, j’ai le sentiment de vivre en cohérence avec le message biblique de la création : prendre soin de la nature, être co-créateur har­ monieusement. ♦

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Rechercher… le sens… Framboise Boël Propos recueillis par Pascale Otten

En rencontrant Framboise, une jeune femme souriante et pleine d’énergie, nous découvrons une « chercheuse en profondeur ». Elle est avocate et, en 2016, après 15 ans de Barreau, elle veut changer, travailler autrement. Framboise Boël va alors fonder son cabinet d’avocat et de médiation. Dans ce nouveau cadre, ce qu’elle aime par-dessus tout, c’est travailler de manière pragmatique et concrète, à l’écoute des besoins de ses clients. « J’essaye de trouver une solution à l’amiable, plutôt qu’une procédure souvent trop longue. Il faut dire que j’ai été formée à la médiation en l’an 2000, à la fin de mes études, à Montréal. J’y ai appris que les gens choisissent ce qu’ils croient le mieux pour eux, profondément. Je suis toujours à la recherche d’une solution saine, viable et juste. » Ce changement, il s'exprime aussi en termes de recherche de sens ?

« Mes 40 ans approchant, je me suis demandé comment les fêter. Plutôt qu’un grand diner, j’ai adopté une démarche singulière : rencontrer 40 personnes inspirantes, ayant un impact positif sur le monde. Que ce soit dans leur métier, leur famille. Qu’il s’agisse d’un enseignant, d’une infirmière, d’un médecin, d’une artiste, d’un juge… Cette rencontre dure

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cinq minutes ou deux heures. À chacun je pose les deux mêmes questions : « Quel verbe vous résume ? » Derrière ces mots, je recherche quelle est leur aspiration, leur moteur de vie. Un chef d’entreprise m’a répondu « faire grandir ». Ce n’était donc pas le développement commercial de son entreprise qui l’intéressait, mais révéler le potentiel de quelqu’un et le former pour qu’il puisse aller le plus loin possible. J’ai déjà rencontré 32 personnes et leurs réponses m’ont nourrie. Évidemment, la discussion devient souvent intime et c’est un cadeau, car on parle vrai, en vérité. Depuis trois ans, j’ai décidé de suivre mon instinct, de m’accueillir avec bienveillance. Ces rencontres m’ont confortée dans ma confiance en la vie : on a le droit d’être qui on est. Durant ces rencontres, l’échange se fait réci­ proque. Une jeune fille de 18 ans a trouvé intéressant d’entendre qu’à 40 ans, on puisse toujours être en recherche. La dernière question que je pose à la fin de la rencontre est « comment peut-on améliorer son impact sur le monde » ? Une personne m’a invitée à me concentrer sur les petites choses. C’est un peu l’idée des petits pas, faire de son mieux. Un écrivain m’a répondu « comprendre le monde ». Une chroniqueuse ajoute : « Se faire une opinion et la transmettre. » J’ai eu la chance de rencontrer Bertrand Picard, l’initiateur du projet Solar Impulse. Il m’a en­ couragée à sortir de ma zone de confort (« step out »), d’oser dire « oui », ce qui permet ensuite de rayonner et de transmettre (« speak up »).


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Qu'avez-vous retiré de ces rencontres ?

Si je devais résumer les témoignages que j’ai recueillis, ce serait par la métaphore de l’arbre. Il faut d’abord être ; c’est-à-dire habiter son être, être aligné, ancré, enraciné, présent aux autres et à soi-même. Lorsqu’on est pleinement soi, on peut « vivre aux frontières », comme le cœur vivant de l’arbre se trouve juste sous l’écorce et non tapi au centre du tronc. Vivre au contact du monde, le nourrir, grandir avec lui.

Quel serait un message que vous auriez envie de faire passer ?

Connaissez-vous quelqu’un dont la vie ou le projet vous inspire ? Pourquoi ne pas prendre le temps de le rencontrer en l’interrogeant sur ce qui le fait avancer ? Ce cadeau d’anniver­saire que je me suis offert à moi-même est le plus beau que j’aie reçu. ♦

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Es-tu végétale, tu As des arbres la patience D’être ici liée mais libre Parmi les vents les plus hauts

(Yves Bonnefoy, Hier régnant désert)

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