ivages SENS & SPIRITUALITÉS
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N° 4 • mai-juin 2017 • Bureau de dépôt : Namur 1 • N° d’agr. : P 301046
BIMESTRIEL
Tapisserie de lumière
Apocalypse Révélation et espérance
Tapisserie de lumière
Une Apocalypse hindoue ? Loi et peur Bébé a tout chamboulé
Olivier Chaput : une transition positive
Le monde a besoin d’oies !
ivages | n° 4 | mai-juin 2017 Éditeur responsable : Pierre Sauvage, 7 rue Blondeau, 5000 Namur • Rédactrice en chef : Pascale Otten • Secrétaire de rédaction : Stéphane Dupuis • Comité de rédaction : Alain Arnould, Charles Delhez, André Füzfa, José Gérard, Vanessa Greindl, Jean-François Grégoire, Marie-Raphaël de Hemptinne, Armel Job, Hugues d’Oroc, Guy Ruelle, Jacques Scheuer, Luc Templier, Myriam Tonus, André Wénin, Lambert Wers • Maquette et mise en page : Véronique Lux • Abonnements : Nicolas Tonus, 7, rue Blondeau, 5000 Namur, info@editionsjesuites.com, 081 22 15 51 • Prix abonnement Belgique 1 an, 6 numéros : 24,50 EUR (36,00 EUR pour l’étranger) ; abonnement 2 ans, 12 numéros : 45,00 EUR (68,00 EUR pour l’étranger) ; abonnement de soutien : 40,00 EUR ; à partir de 10 abonnements groupés à la même adresse : 21,50 EUR par abonnement (33,00 EUR pour l’étranger) • Prix au numéro : 5,00 EUR • BE64 0688 9989 0952, IBAN GKCCBEBB – Paraît tous les deux mois • ISSN 2506-9829 • Rivages est une publication des Éditions jésuites • www.rivages.be Crédits photographiques : Fotolia.com : © mtaira, © Lukas Gojda, p. 14-15 – © meen_na, p. 19 – © Iovelava, p. 20-21 – © Dmitiri Mikitenko, p. 21 – © Romolo Tavani, p. 23 – © Ded Mityay, p. 27 – © Bibliothèque royale de Belgique, p. 2, 16, 17 – © Dotcame, p. 2, 5, 29 – © Irène Barberis, p. 2, 4, 6, 7.
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Éditorial
Sommaire
Au premier siècle, un empire romain sûr de lui régnait en maître. Pascale Otten Cet empire n’était guère à l’écoute des minorités, dont les chrétiens faisaient partie. Dans ce contexte, un texte voit le jour, riche en métaphores. Il décrit de manière imagée le combat du bien et du mal. Un message d’espoir s’en dégage : le bien va triompher, promet-il. Aujourd’hui, ce texte nous intrigue dans ses images et sa promesse nous parle. En effet, des chercheurs mettent en évidence que plusieurs aspects de notre monde contemporain ne fonctionnent plus. L’un d’entre eux, Pablo Servigne1, a publié Comment tout peut s’effondrer. Et dans un article récent, il met en évidence ceux qui veulent vivre un « espoir actif2 ». Cette attitude serait le contraire d’une espérance attentiste, sourde aux besoins de changement. Cet espoir actif pourrait être mis en lien avec une réflexion de JeanClaude Guillebaud3 : « Nous sommes convoqués à l’action, responsables du monde qui vient. » Dans ce numéro, nous nous intéresserons à la thématique de l’apocalypse qui est présente dans différentes religions et, en même temps, nous envisagerons l’action qui fait advenir un temps plus paisible. L’exposition « Tapestry of light » à Bruxelles4 est en résonnance avec ces constats. Oui, des « tissages de lumière » existent en grand nombre et d’intensité diverse. C’est ce que nous montre l’artiste Irène Barberis dans son apocalypse contemporaine tissée de fibres lumineuses. Cette œuvre est aussi comme un programme pour notre monde d’aujourd’hui. Il ne s’agit pas seulement de contempler ces fils de lumière. À nous aussi de les tisser, les fabriquer, conscients de notre responsabilité personnelle vis-à-vis de la transition vers un monde nouveau.
Rencontrer
1. Pablo Servigne et Raphaël Stevens, Comment tout peut s’effondrer, Seuil, 2015. 2. Pablo Servigne, in revue Imagine Demain le monde, mars-avril 2017, p.42-43. 3. Jean-Claude Guillebaud, in revue Entrées Libres, décembre 2015, p. 8. 4. Exposition à la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule du 28 avril au 15 juin 2017.
• Tapisserie de lumière ..................................................... 4 Propos d’Irène Barberis recueillis et traduits par Simon Malotaux et Constance Proux, Pascale Otten et Alain Arnould
• Olivier Chaput. Une transition positive pour le monde ......................................................................... 10 Propos recueillis par Pascale Otten • Loi et peur .................................................................................... 28 Regards croisés entre Jean-François Grégoire et Vanessa Greindl
Contempler • Le christ vient de l’avenir ............................................ 14 Marie-Raphaël de Hemptinne • Une vision qui annonce la victoire du bien ............................................................................................. 16 Alain Arnould • La Nouveauté après l’apocalypse ....................... 18 Luc Templier • La compassion pour tous les êtres « Comme on tisserait », de C. Nys-Mazure ................................................................ 26 Guy Ruelle • « Lueurs et tremblements » de Joël Rochette ................................................................... 31
Vivre • Révélations ou catastrophes ? ............................... 12 Arthur Buekens • Islam et apocalypse ........................................................... 19 Naïma El Makrini • Une apocalypse hindoue ? .......................................... 20 Jacques Scheuer • Le monde a besoin d’oies ! ......................................... 22 Myriam Tonus • Bébé a tout chamboulé .................................................. 24 José Gérard • L’apocalypse nucléaire ................................................... 27 Armel Job
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RENCONTRER | interview
Tapisserie de lumière
Propos recueillis et traduits par Simon Malotaux et Constance Proux, Pascale Otten et Alain Arnould
Jusqu’au 15 juin, la cathédrale de Bruxelles accueille en première mondiale la Tapestry of Light de l’artiste australienne Irene Barberis. Sur 36 mètres, c’est tout le livre de l’Apocalypse qui est évoqué en 14 pièces tissées en Belgique. Cette tenture est le résultat de plus de 10 ans de recherche technologique et artistique. L’occasion pour Rivages d’aller à la rencontre de l’artiste et de vous présenter cette femme engagée animée d’une foi inébranlable en la lumière qui finira toujours par jaillir, même après les pires souffrances, toute à l’image de la promesse du livre de l’Apocalypse.
Constance Proux (26 ans) est photographe, Simon Malotaux (25 ans) est plasticien et musicien, tous deux sont passionnés par la création contemporaine. Ils terminent actuellement un master aux beaux-arts de Gand (KASK) et préparent leur sortie avec des projets combinant photographie, musique et événementiel. Ils coorganisent le Fortune Festival qui aura lieu les 1er et 2 juillet 2017 au BRASS, le centre culturel de Forest.
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RENCONTRER | interview
Racontez-nous la genèse de cet ambitieux projet qu’est la Tapestry of Light. C’est un énorme projet qui visualise l’Apocalypse. Cette tapisserie fait partie de mon œuvre et de mon univers, où le Livre de la Révélation apparaît régulièrement. J’ai trouvé l’idée de la révélation très intéressante : l’idée d’avoir été quelque part, d’entendre et de soudainement penser à quelque chose. La Tapestry of Light est née d’une idée que j’ai eue en 1998 devant la tapisserie de l’Apocalypse d’Angers, que j’ai perçue comme quelque chose qui sortait du mur et qui brillait comme une tapisserie de lumière. Dans ma peinture, j’aimais introduire des éléments qui donnaient de la lumière. Mais il semblait impossible de faire une tapisserie de la dimension dont je rêvais avec de la fibre électro-luminescente. Alors, j’ai rencontré un confrère à l’université de Melbourne qui travaillait sur la phosphorescence. Dans ses recherches, il avait développé un pigment qui reflétait la lumière pendant huit heures plutôt que deux. Mais il fallait introduire cette matière phosphorescente dans les fils, ce qui a été un réel défi. La recherche à l’université a pris cinq ans. Normalement, je crée des structures abstraites ou figuratives, qui racontent une histoire. Dans la Tapestry of Light, les structures cartographient le monde. Dans l’obscurité, une carte du monde apparaît soutenant tous les motifs qui se voient lors des expositions à d’autres lumières. La tenture a trois niveaux d’éclairage : des fils normaux et brillant à la lumière naturelle, ensuite des fils fluorescents qui apparaissent sous éclairage U.V., et troisièmement des fils phosphorescents qui apparaissent quand la lumière naturelle disparaît. Il y a donc trois visions de la tapisserie. Par exemple, pour les soixante-deux étoiles de type mozarabe qui reprennent des éléments de la tapisserie d’Angers : sous éclairage U.V., elles deviennent noires et l’espace devient un ensemble de croix. Vous avez donc cherché à donner une dynamique particulière à votre tapisserie ? Oui, le mouvement ici est créé par la lumière, par les différentes sortes de lumière.
Comment avez-vous introduit la dynamique symbolique dans la tapisserie ? J’ai lu le livre de l’Apocalypse en 1985 et la pertinence de ce texte m’a immédiatement frappée. Il me semblait qu’il était actuel à plusieurs égards. Je ne travaillais pas alors avec la symbolique chrétienne, mais plutôt comme féministe. Je voulais briser des frontières. En observant l’Apocalypse d’Angers, je me suis rendu compte combien il était difficile de transposer des idées chrétiennes dans le monde séculier occidental. Cela m’a semblé un défi, et cela me semble toujours un défi. J’ai pris le livre de l’Apocalypse et me suis plongée dans l’idée de la révélation dans la création artistique. Je ne voulais pas d’illustration du livre de l’Apocalypse. Cela devait être quelque chose de plus réel. Certains pigments que j’avais trouvés à HongKong, quand ils étaient coupés ou comprimés, créaient une nouvelle couleur : par exemple, le rose devenait oranger. J’y ai vu comme une métaphore de la foi des chrétiens : quand elle est comprimée ou opprimée, la grâce en jaillit. Ces couleurs sont à la fois chatoyantes et mortellement vénéneuses. L’Apocalypse est exactement cela, il s’y trouve des passages magnifiques au milieu de descriptions de la mort. La mort et la vie s’y entremêlent. Comment imaginez-vous que le public pourra comprendre ces symboles en regardant votre tapisserie ? Le texte occupe la première position dans ce travail. Lorsque les gens regarderont la tapisserie, inévitablement ils liront le texte, qui, juxtaposé aux images, permet de comprendre le propos de
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CONTEMPLER | à propos d'un livre
Lueurs et tremblements Un commentaire de l’Apocalypse de Jean Illustré par le Manuscrit de Namur (début du XIVe siècle) Le grand public n’en avait jamais entendu parler. Quelques spécialistes seulement connaissaient son existence. Bien peu l’avaient vu. Gardé précieusement par les prêtres du Séminaire de Namur pendant des siècles, enfoui parmi les manuscrits anciens de leur bibliothèque, le Manuscrit de l’Apocalypse de Namur est enfin édité et accessible à tous1 ! Ce manuscrit remarquable, incroyablement bien conservé, est l’œuvre d’un artiste anonyme, probablement normand ou anglais, vers les années 1320-1330. Ses scènes peintes et enluminées, d’une facture exceptionnelle, accompagnent et illustrent le texte latin de l’Apocalypse de Jean, le dernier livre de la Bible. Chaque chapitre commence par une petite initiale bleu et rose sur fond doré garni d’un décor végétal qui se poursuit en marge. Mais il faut surtout noter les 85 miniatures peintes sur toute la largeur de la page. L’artiste est parvenu à rendre avec une profusion de détails la force des visions du livre et la puissance de ses symboles : le dragon, la femme céleste, les anges, la foule immense, la chute de Babylone, les terribles violences humaines et jusqu’à l’anéantissement de Satan dans l’étang de soufre et de feu…
En vente jusque fin jui n 2017 au prix de 48,50 40,00 € (+ frais de port). Commande à adresser par courrier à : Éditions Jés uites 7 rue Blondeau – 5000 Namur Code : RIVAGES LUEURS (à mentionner)
de Jean en ses 22 chapitres. Ce commentaire suit deux lignes principales : – la mise à jour de l’arrière-fond vétérotestamentaire que supposent les visions de Jean et le décodage des symboles nombreux, souvent complexes, dans la veine des écrits apocalyptiques anciens ; – l’éclairage théologique et spirituel qu’apporte le Nouveau Testament sur l’Apocalypse. Le commentaire est enrichi d’un glossaire des termes essentiels de l’Apocalypse : l’explication des mots de l’Apocalypse est ainsi soutenue par la découverte des trouvailles originales d’un artiste à la créativité débordante. Une vingtaine d’encadrés ouvrent des portes vers des analyses très actuelles de ces thèmes, que ce soit à travers le cinéma, la musique ou la littérature. L’ensemble est agrémenté des magnifiques reproductions des scènes enluminées.
Lueurs et tremblements, p. 320 © Guy Focant et Grand Séminaire de Namur
Joël Rochette — bibliste, docteur en théologie, recteur et professeur de Nouveau Testament au Grand Séminaire de Namur —, suivant le découpage effectué par l’artiste, propose un commentaire du texte biblique et une analyse de l’ensemble de l’Apocalypse
1 Joël ROCHETTE, Lueurs et tremblements, Un commentaire de l’Apocalypse de Jean illustré par le Manuscrit de Namur (xive siècle), Fidélité, Namur, 2016, 368 p.
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Lueurs et tremblements, p. 280 © Guy Focant et Grand Séminaire de Namur
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Je donnerai à l’assoiffé de la source de l’eau de la vie, gratuitement. (Ap 21, 6b) Prix TTC : 5,00 €